Choose the experimental features you want to try

This document is an excerpt from the EUR-Lex website

Document 61993TJ0551

    Arrêt du Tribunal de première instance (quatrième chambre) du 24 avril 1996.
    Industrias Pesqueras Campos SA, Transacciones Maritimas SA, Recursos Marinos SA et Makuspesca SA contre Commission des Communautés européennes.
    Concours financiers communautaires - Demande d'indemnisation en cas de non-paiement - Recours en annulation contre les décisions de suppression.
    Affaires jointes T-551/93, T-231/94, T-232/94, T-233/94 et T-234/94.

    Recueil de jurisprudence 1996 II-00247

    ECLI identifier: ECLI:EU:T:1996:54

    61993A0551

    Arrêt du Tribunal de première instance (quatrième chambre) du 24 avril 1996. - Industrias Pesqueras Campos SA, Transacciones Maritimas SA, Recursos Marinos SA et Makuspesca SA contre Commission des Communautés européennes. - Concours financiers communautaires - Demande d'indemnisation en cas de non-paiement - Recours en annulation contre les décisions de suppression. - Affaires jointes T-551/93, T-231/94, T-232/94, T-233/94 et T-234/94.

    Recueil de jurisprudence 1996 page II-00247


    Parties
    Motifs de l'arrêt
    Décisions sur les dépenses
    Dispositif

    Parties


    ++++

    Dans les affaires jointes T-551/93, T-231/94, T-232/94, T-233/94 et T-234/94,

    Industrias Pesqueras Campos, SA, société de droit espagnol, établie à Vigo (Espagne), représentée, dans l'affaire T-551/93, par Mes Antonio Creus, Xavier Ruiz, avocats au barreau de Barcelone, et Me José Ramón García-Gallardo, avocat au barreau de Burgos, ayant élu domicile à Bruxelles en l'étude Cuatrecasas, 78, avenue d'Auderghem, et, dans l'affaire T-233/94, par Mes Santiago Martínez Lage, Rafael Allendesalazar Corcho et Javier Vías Alonso, avocats au barreau de Madrid, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Me Aloyse May, 31, Grand-rue,

    Transacciones Maritimas, SA,

    Recursos Marinos, SA,

    Makuspesca, SA,

    sociétés de droit espagnol, établies à Vigo (Espagne), représentées par Mes Santiago Martínez Lage, Rafael Allendesalazar Corcho et Javier Vías Alonso, avocats au barreau de Madrid, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Me Aloyse May, 31, Grand-rue,

    parties requérantes,

    contre

    Commission des Communautés européennes, représentée par M. Francisco Santaolalla, conseiller juridique, et Mme Amparo Alcover, membre du service juridique, ainsi que, lors de la procédure orale, par Mme Blanca Vila Costa, fonctionnaire nationale détachée auprès de la Commission, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

    partie défenderesse,

    ayant pour objet, dans l'affaire T-551/93, la réparation des dommages occasionnés à la requérante en raison du fait que la Commission ne lui a pas versé le concours financier communautaire qu'elle lui a accordé par sa décision C(89) 632/73, du 26 avril 1989 (dossier n_ ES/545/89/01), pour la construction du navire de pêche «Escualo», et ayant pour objet, dans les affaires T-231/94, T-232/94, T-233/94 et T-234/94, l'annulation respectivement des décisions C(94) 670/1, C(94) 670/2, C(94) 670/3 et C(94) 670/4 de la Commission par lesquelles celle-ci a supprimé le concours financier communautaire octroyé à chacune des quatre requérantes pour la construction de navires de pêche et a enjoint à trois d'entre elles d'en rembourser le montant antérieurement versé,

    LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

    (quatrième chambre),

    composé de M. K. Lenaerts, président, Mme P. Lindh et M. A. Potocki, juges,

    greffier: M. J. Palacio González, administrateur,

    vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 29 novembre 1995,

    rend le présent

    Arrêt

    Motifs de l'arrêt


    Cadre réglementaire

    1 Les présents recours en indemnité et en annulation s'inscrivent dans le cadre de la réglementation communautaire relative à l'aide à la construction de nouveaux navires de pêche.

    2 Le 18 décembre 1986, le Conseil a adopté le règlement (CEE) n_ 4028/86, relatif à des actions communautaires pour l'amélioration et l'adaptation des structures du secteur de la pêche et de l'aquaculture (JO L 376, p. 7, ci-après «règlement n_ 4028/86»), par lequel le Conseil permet à la Commission d'accorder un concours financier communautaire notamment à des projets de construction de nouveaux navires de pêche (article 6). Il s'agit du texte de base de la politique communautaire en matière de structures de pêche. Le 24 juin 1988, le Conseil a adopté le règlement (CEE) n_ 2052/88, concernant les missions des fonds à finalité structurelle, leur efficacité ainsi que la coordination de leurs interventions entre elles et celles de la Banque européenne d'investissement et des autres instruments financiers existants (JO L 185, p. 9, ci-après «règlement n_ 2052/88»). Le 20 juillet 1993, le Conseil a adopté le règlement (CEE) n_ 2080/93, portant dispositions d'application du règlement CEE n_ 2052/88 en ce qui concerne l'instrument financier d'orientation de la pêche (JO L 193, p. 1), abrogeant notamment les dispositions du règlement n_ 4028/86 à partir du 1er janvier 1994, sauf pour les demandes de concours introduites avant cette date (article 9).

    3 L'article 44 du règlement n_ 4028/86 indique les circonstances dans lesquelles les procédures de suspension, de réduction ou de suppression peuvent être entreprises et se lit comme suit:

    «1. Pendant toute la durée de l'intervention communautaire, l'autorité ou l'organisme désigné à cet effet par l'État membre intéressé transmet à la Commission, à sa demande, toute pièce justificative et tout document de nature à établir que les conditions financières ou autres imposées pour chaque projet sont remplies. La Commission peut décider de suspendre, de réduire ou de supprimer le concours, selon la procédure prévue à l'article 47:

    - si le projet n'est pas exécuté comme prévu, ou

    - si certaines des conditions imposées ne sont pas remplies, ou

    - si le bénéficiaire, contrairement aux renseignements contenus dans sa demande et repris dans la décision d'octroi du concours financier, ne commence pas, dans un délai d'un an à compter de la notification de ladite décision, à réaliser les travaux ou s'il n'a pas fourni, avant l'expiration de ce délai, des garanties suffisantes pour l'exécution du projet, ou

    - si le bénéficiaire ne termine pas les travaux dans un délai de deux ans à compter de leur début, sauf en cas de force majeure.

    La décision est notifiée à l'État membre intéressé ainsi qu'au bénéficiaire.

    La Commission procède à la récupération des sommes dont le versement n'était pas ou n'est pas justifié.

    2. Les modalités d'application du présent article sont arrêtées par la Commission selon la procédure prévue à l'article 47.»

    4 L'article 46 de ce même règlement précise les pouvoirs de contrôle conférés à la Commission et son deuxième paragraphe se lit comme suit:

    «2. Sans préjudice des contrôles effectués par les États membres conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives nationales, et sans préjudice des dispositions de l'article 206 du traité ainsi que de tout contrôle organisé sur la base de l'article 209, point c), du traité, les agents mandatés par la Commission pour les vérifications sur place ont accès aux livres et à tout autre document ayant trait aux dépenses financées par la Communauté. Ils peuvent notamment vérifier:

    a) la conformité des pratiques administratives avec les règles communautaires;

    b) l'existence des pièces justificatives nécessaires et leur concordance avec les opérations financées par le budget communautaire;

    c) les conditions dans lesquelles sont réalisées et vérifiées les opérations financées par le budget communautaire.

    La Commission avise en temps utile, avant la vérification, l'État membre auprès duquel la vérification est effectuée ou sur le territoire duquel elle a lieu. Des agents de l'État membre intéressé peuvent participer à cette vérification.

    A la demande de la Commission et avec l'accord de l'État membre, des vérifications ou enquêtes relatives aux opérations visées au présent règlement sont effectuées par les instances compétentes de cet État membre. Des agents de la Commission peuvent y participer.

    Afin d'améliorer les possibilités de vérifications, la Commission peut, avec l'accord des États membres intéressés, associer des administrations de ces États membres à certaines vérifications ou enquêtes.»

    5 L'article 47 du règlement n_ 4028/86 organise la consultation du comité permanent des structures de la pêche dans le cadre des procédures de suspension, de réduction ou de suppression.

    6 Le 13 février 1987, le gouvernement espagnol a adopté le décret royal n_ 219/87, portant mise en oeuvre du règlement n_ 4028/86 (BOE n_ 44 du 20 février 1987, ci-après «décret royal n_ 219/87»), mis à exécution par l'arrêté du 3 mars 1987 (BOE n_ 56 du 6 mars 1987).

    7 Le 26 mars 1987, la Commission a adopté le règlement (CEE) n_ 970/87, portant mesures transitoires et modalités d'application du règlement n_ 4028/86 du Conseil en ce qui concerne les actions de restructuration et de renouvellement de la flotte de pêche, de développement de l'aquaculture et d'aménagement de la bande côtière (JO L 96, p. 1, ci-après «règlement n_ 970/87»), dont les annexes contiennent les formulaires reprenant les données et documents nécessaires à l'introduction d'une demande de concours financier communautaire à des projets de construction de nouveaux navires de pêche.

    8 Le 20 avril 1988, la Commission a adopté le règlement (CEE) n_ 1116/88, relatif aux modalités d'exécution des décisions de concours pour des projets concernant des actions communautaires pour l'amélioration et l'adaptation des structures du secteur de la pêche, de l'aquaculture et de l'aménagement de la bande côtière (JO L 112, p. 1, ci-après «règlement n_ 1116/88»), dont l'annexe contient les modèles reprenant les données et documents devant figurer dans la demande de paiement d'un concours financier communautaire à des projets de construction de nouveaux navires de pêche.

    9 L'article 7 de ce règlement précise les conditions de mise en oeuvre des procédures de suspension, de réduction ou de suppression et il se lit comme suit:

    «Avant d'engager la procédure de suspension, de réduction ou de suppression du concours prévue à l'article 44, paragraphe 1, du règlement (CEE) n_ 4028/86, la Commission:

    - en avise l'État membre sur le territoire duquel le projet devrait être exécuté, qui peut prendre position à ce sujet,

    - consulte l'autorité compétente chargée de transmettre les pièces justificatives,

    - appelle le ou les bénéficiaires à exprimer, par l'intermédiaire de l'autorité ou de l'organisme, les raisons du non-respect des conditions prévues.»

    Faits à l'origine du recours

    10 Les requérantes sont des sociétés qui ont pour objet statutaire l'exercice d'activités dans le domaine de la pêche. Elles ont le même associé majoritaire qui en est également le gérant unique. Transacciones Maritimas, SA (ci-après «Tramasa»), a été constituée en avril 1984, Industrias Pesqueras Campos, SA (ci-après «IPC»), a été constituée en septembre 1986, Makuspesca, SA, et Recursos Marinos, SA, ont été constituées en novembre 1986.

    11 Le 7 avril 1987, Tramasa a sollicité auprès de l'administration espagnole, conformément à l'article 34 du règlement n_ 4028/86, l'autorisation de construire le navire de pêche de palangres «Tiburon III» ainsi que l'octroi des concours financiers communautaire et national prévus et organisés dans le règlement n_ 4028/86 et le décret royal n_ 219/87. Le projet présenté par Tramasa portait sur la construction d'un navire de pêche pour un coût total de 126 500 000 PTA, dont la construction a été confiée au chantier naval «Construcciones Navales Santo Domingo, SA». Le 9 juillet 1987, la direction générale de la marine marchande espagnole a autorisé la construction du navire de pêche «Tiburon III».

    12 Par décision C(87) 2200/137, du 21 décembre 1987, la Commission a octroyé à Tramasa une aide financière de 39 283 091 PTA pour la construction du navire. Cette aide couvrait 35 % du montant de 112 237 403 PTA que la Commission a déclaré susceptible d'être subventionné. La construction du bateau «Tiburon III» a également bénéficié d'une aide des autorités espagnoles, à concurrence d'un montant de 16 240 000 PTA. Le chantier naval a par ailleurs obtenu une prime à la construction navale d'un montant de 21 532 436 PTA, auprès de la Gerencia del sector naval.

    13 Le 6 avril 1988, Tramasa a demandé à la Commission de procéder à un versement partiel de l'aide communautaire, sur la base d'une facture du chantier naval chargé de la construction, du 15 mars 1988, certifiant le paiement de 51 % de l'investissement total, soit 64 660 000 PTA. La Commission a effectué ce versement partiel le 12 juillet 1988.

    14 Le 25 octobre 1988, Tramasa a demandé à la Commission de verser le solde de l'aide, sur la base d'une facture du chantier naval du 27 juin 1988, certifiant le paiement par chèques de l'intégralité du prix de 126 500 000 PTA (annexe 3 au mémoire en défense dans l'affaire T-231/94) correspondant au montant total de l'investissement figurant sur la demande d'octroi du concours financier communautaire et sur la décision d'octroi du 21 décembre 1987 (annexe 5 à la requête dans l'affaire T-231/94). Tramasa a également remis à la Commission le certificat de navigabilité délivré le 27 juin 1988 par la direction générale de la marine marchande espagnole. La Commission a procédé au versement du solde le 4 avril 1989. Le 9 octobre 1989, la requérante a vendu le navire «Tiburon III» à Puntapesca, SA, société espagnole, pour un montant de 112 837 453 PTA.

    15 Le 21 septembre 1987, Makuspesca a sollicité auprès de l'administration espagnole, conformément à l'article 34 du règlement n_ 4028/86, l'autorisation de construire le navire de pêche «Makus» ainsi que l'octroi des concours financiers communautaire et national prévus et organisés dans le règlement n_ 4028/86 et le décret royal n_ 219/87. Le projet présenté par Makuspesca portait sur la construction d'un navire de pêche pour un coût total de 217 250 000 PTA, dont la construction a été confiée au chantier naval «Construcciones Navales Santo Domingo, SA». La direction générale de la marine marchande espagnole a autorisé la construction du navire de pêche «Makus».

    16 Par décision C(89) 632/47, du 26 avril 1989, la Commission a octroyé à Makuspesca une aide financière de 74 924 630 PTA pour la construction du navire. Cette aide couvrait 35 % du montant de 214 070 374 PTA que la Commission a déclaré susceptible d'être subventionné. La construction du navire «Makus» a également bénéficié d'une aide des autorités espagnoles, à concurrence d'un montant de 21 407 038 PTA. Le chantier naval a par ailleurs obtenu une prime à la construction navale d'un montant de 23 000 000 PTA, auprès de la Gerencia del sector naval.

    17 Le 5 juin 1989, Makuspesca a demandé à la Commission de procéder au versement de la totalité de l'aide communautaire, sur la base d'une facture du chantier naval du 8 février 1989 certifiant le paiement au comptant de l'intégralité du prix de 217 250 000 PTA (annexe 4 au mémoire en défense dans l'affaire T-234/94) correspondant au montant total de l'investissement figurant sur la demande d'octroi du concours financier communautaire (annexe 3 au mémoire en défense dans l'affaire T-234/94) et sur la décision d'octroi du 26 avril 1989 (annexe 5 à la requête dans l'affaire T-234/94). Makuspesca a également remis à la Commission le certificat de navigabilité délivré le 9 mars 1989 par la direction générale de la marine marchande espagnole. La Commission a versé l'aide communautaire en juillet 1989. En juillet 1992, Makuspesca a vendu le navire «Makus», pour un montant de 63 000 000 PTA (selon la réponse fournie à une question écrite du Tribunal).

    18 Le 28 septembre 1987, Recursos Marinos a sollicité auprès de l'administration espagnole, conformément à l'article 34 du règlement n_ 4028/86, l'autorisation de construire le navire de pêche «Acechador» ainsi que l'octroi des concours financiers communautaire et national prévus et organisés dans le règlement n_ 4028/86 et le décret royal n_ 219/87. Le projet présenté par Recursos Marinos portait sur la construction d'un navire de pêche pour un coût total de 324 500 000 PTA, dont la construction a été confiée au chantier naval «Astilleros del Atlantico, SA». Recursos Marinos a ensuite modifié le projet initial et l'a remplacé par un projet d'un montant de 322 300 000 PTA. Le 21 octobre 1987, la direction générale de la marine marchande espagnole a autorisé la construction du navire de pêche «Acechador».

    19 Par décision C(89) 632/73, du 26 avril 1989, la Commission a octroyé à Recursos Marinos une aide financière de 107 570 697 PTA pour la construction du navire. Cette aide couvrait 35 % du montant de 307 344 850 PTA que la Commission a déclaré susceptible d'être subventionné. La construction du navire «Acechador» a également bénéficié d'une aide des autorités espagnoles, à concurrence d'un montant de 30 734 486 PTA. Le chantier naval a par ailleurs obtenu une prime à la construction navale d'un montant de 25 430 000 PTA, auprès de la Gerencia del sector naval.

    20 Le 10 mai 1989, Recursos Marinos a demandé à la Commission de procéder a un versement partiel de l'aide communautaire, sur la base d'une facture du chantier naval du 2 mai 1989 certifiant le paiement de 94 % de l'investissement total, soit 304 800 000 PTA. La Commission a effectué ce versement partiel le 28 juillet 1989.

    21 Le 21 novembre 1989, Recursos Marinos a demandé à la Commission de verser le solde de l'aide, sur la base d'une facture du chantier naval du 4 octobre 1989 certifiant le paiement au comptant de l'intégralité du prix de 322 300 000 PTA (annexe 3 au mémoire en défense dans l'affaire T-232/94) correspondant au montant total de l'investissement figurant sur la demande d'octroi du concours financier communautaire (annexe 3 au mémoire en défense dans l'affaire T-232/94) et sur la décision d'octroi du 26 avril 1989 (annexe 5 à la requête dans l'affaire T-232/94). Recursos Marinos a également remis un certificat de navigabilité délivré le 16 mai 1989 par la direction générale de la marine marchande espagnole. La Commission a effectué le versement du solde le 28 novembre 1989. Le 17 mai 1990, Recursos Marinos a vendu le navire «Acechador» à Pesquerias Lumar, SA, pour un montant de 175 000 000 PTA.

    22 Le 21 décembre 1987, IPC a sollicité auprès de l'administration espagnole, conformément à l'article 34 du règlement n_ 4028/86, l'autorisation de construire le navire de pêche «Escualo» ainsi que l'octroi des concours financiers communautaire et national prévus et organisés dans le règlement n_ 4028/86 et le décret royal n_ 219/87. Le projet présenté par IPC portait sur la construction d'un navire de pêche pour un coût total de 148 500 000 PTA, dont la construction a été confiée au chantier naval «Construcciones Navales Santo Domingo, SA». IPC a ultérieurement modifié le projet initial et l'a remplacé par un projet d'un montant de 217 250 000 PTA. Le 30 septembre 1988, la direction générale de la marine marchande espagnole a autorisé la construction du navire de pêche «Escualo».

    23 Par décision C(89) 632/73, du 26 avril 1989, la Commission a octroyé à IPC une aide financière de 48 550 322 PTA pour la construction du navire. Cette aide couvrait 35 % du montant de 138 715 208 PTA que la Commission a déclaré susceptible d'être subventionné. La Commission a par ailleurs refusé de prendre en considération l'augmentation du coût total du projet, telle qu'elle résulte de la modification présentée par IPC. La construction du navire «Escualo» a également bénéficié d'une aide des autorités espagnoles, à concurrence d'un montant de 21 407 038 PTA. Le chantier naval a par ailleurs obtenu une prime à la construction navale d'un montant de 15 292 360 PTA, auprès de la Gerencia del sector naval.

    24 Le 22 février 1990, IPC a demandé à la Commission de procéder au versement du montant total de la subvention, sur la base d'une facture du chantier naval du 4 octobre 1989, certifiant le paiement au comptant de l'intégralité du prix de 217 250 000 PTA (annexe 4 au mémoire en défense dans l'affaire T-233/94) correspondant au montant total de l'investissement figurant sur la demande d'octroi du concours financier communautaire (annexe 3 au mémoire en défense dans l'affaire T-233/94) et sur la décision d'octroi du 26 avril 1989 (annexe 5 à la requête dans l'affaire T-233/94). IPC a également remis à la Commission un certificat de navigabilité délivré le 23 octobre 1989 par la direction générale de la marine marchande espagnole. La Commission n'a pas encore versé le montant du concours financier communautaire réclamé par IPC. Le navire «Escualo» a été vendu le 18 avril 1991 à Tusapesca, SA, pour un montant de 80 000 PTA (selon la réponse fournie à une question écrite du Tribunal).

    25 Entre le 25 et le 31 mars 1990, les services de la Commission ont effectué, en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par l'article 46 du règlement n_ 4028/86, des vérifications sur place auprès des entreprises requérantes, dans le but de contrôler l'utilisation des aides octroyées, qu'elles aient été versées ou non. Ces inspections ont porté, en particulier, sur les pièces comptables présentées par ces sociétés comme justificatifs de la demande de paiement des concours communautaires.

    26 Les agents de la Commission présents et le fonctionnaire de l'administration espagnole qui les accompagnait n'ont cependant pas pu effectuer leur contrôle dans les conditions prévues, car les requérantes ne disposaient pas de comptabilité officielle à ce moment-là.

    27 La Commission a dès lors demandé aux autorités espagnoles, en l'espèce l'Intervención General de la Administración del Estado (ci-après «IGAE»), de réaliser un audit de l'entreprise des requérantes et des chantiers navals ayant construit les navires en question, conformément au prescrit de l'article 5 du règlement n_ 1116/88, ce qu'elles firent en mai 1991. Les résultats de l'audit ont été transmis aux requérantes le 17 juin 1991 sous la forme d'une copie et à la Commission le 10 juillet 1991 sous la forme d'un «audit comptable des entreprises d'armement correspondant aux dossiers de subvention pour nouvelles constructions ES/099/87/01, ES/392/89/01, ES/397/89/01, ES/545/89/01» (ci-après «rapport d'audit»). Plusieurs éléments apparaissent dans le rapport d'audit.

    28 Ainsi, le rapport d'audit fait état d'un certain nombre d'aspects communs aux entreprises bénéficiaires des concours: leur actionnaire majoritaire et gérant unique commun est M. Albino Campos Quinteiro (p. 20); elles sont constituées avec un capital social égal ou inférieur à 100 000 PTA (p. 20); les montants totaux des investissements qui figurent sur les formulaires de demande de concours et sur les certificats établis en vue du versement total de l'aide communautaire ne coïncident dans aucun des cas avec les valeurs de base des navires déclarés par le chantier naval à la Gerencia del sector naval en vue de l'obtention de la prime à la construction navale (p. 18); les factures des chantiers navals sur lesquelles figure l'acquis justifiant la réalisation de la totalité de l'investissement au moment de la demande de paiement ne reflètent pas le coût véritable de l'investissement et ne prouvent pas le paiement effectif de celles-ci (p. 16); les montants réellement payés pour les navires sont notablement inférieurs à ceux qui apparaissent sur lesdites factures (p. 22). Le rapport de l'IGAE contient également des constatations spécifiques à chacune des requérantes.

    29 Le 27 décembre 1991, les autorités espagnoles ont décidé de réduire leur intervention financière dans le projet présenté par Tramasa, à concurrence d'un montant de 4 101 217 PTA, dans le projet présenté par IPC, à concurrence d'un montant de 7 439 459 PTA, et dans le projet présenté par Makuspesca, à concurrence d'un montant de 5 238 167 PTA. Ces trois décisions de réduction précisaient en outre que «ce remboursement est totalement indépendant de celui que pourrait décider la Commission des Communautés européennes pour le concours financier communautaire versé pour la construction du navire en question» et qu'«il est également sans préjudice des sanctions administratives qui pourraient être infligées par l'autorité compétente en raison du comportement de cette entreprise». Selon la Commission, les autorités espagnoles ont adopté ces décisions à la suite des constatations contenues dans le rapport d'audit (p. 14 des mémoires en défense; annexe 8 aux mémoires en défense). Les requérantes soutiennent de leur côté que, le règlement n_ 4028/86 ne permettant pas d'accorder un concours national dépassant 30 % du montant des coûts éligibles, il convenait de réduire à due concurrence la somme résultant de l'addition de l'aide nationale et de la prime à la construction navale.

    30 Les trois requérantes visées par ces décisions de réduction du concours national ont introduit un recours administratif à l'encontre de ces décisions, sur lequel le ministre de l'Agriculture, de la Pêche et de l'Alimentation espagnol a statué en adoptant un arrêté de confirmation. Selon la Commission, les requérantes n'auraient pas formé utilement de recours à l'encontre de cet arrêté, tel que cela ressortirait d'un courrier du secrétariat général de la pêche maritime figurant à l'annexe 7 aux mémoires en duplique. Les requérantes rétorquent toutefois qu'un tel recours a été formé en temps utile, comme l'attesteraient les ordonnances rendues les 5 novembre et 16 décembre 1992 par le Tribunal Superior de Justicia de Madrid (annexe 4 aux mémoires en réplique dans les quatre affaires), aux termes desquelles les dossiers administratifs doivent être renvoyés à cette juridiction afin que les requérantes puissent y présenter leurs recours.

    31 En novembre 1992, la Commission a pris contact avec le secrétariat général de la pêche maritime du ministère de l'Agriculture, de la Pêche et de l'Alimentation espagnol afin de l'informer de son intention de supprimer les concours communautaires accordés aux requérantes et d'obtenir son avis sur cette question. Le 16 décembre 1992, le directeur général des structures de la pêche de cette administration espagnole a communiqué ses observations à la Commission en concluant qu'il convenait de procéder à la régularisation des concours initialement octroyés, sans les supprimer totalement, puisque les coûts totaux finalement payés par les requérantes étaient supérieurs aux montants subventionnés retenus par la Commission (annexe 8 au mémoire en défense dans l'affaire T-231/94; annexe 9 au mémoire en défense dans l'affaire T-234/94; annexe 7 au mémoire en défense dans l'affaire T-232/94; annexe 9 au mémoire en défense dans l'affaire T-233/94). Le 9 mars 1993, le directeur général des structures de la pêche a fait parvenir de nouvelles observations à la Commission confirmant les premières observations (annexe 9 au mémoire en défense dans l'affaire T-231/94; annexe 10 au mémoire en défense dans l'affaire T-234/94; annexe 8 au mémoire en défense dans l'affaire T-232/94; annexe 10 au mémoire en défense dans l'affaire T-233/94).

    32 Le 8 juin 1993, la Commission a adressé un courrier recommandé avec accusé de réception à chaque requérante afin de faire part à chacune d'entre elles de son intention d'engager une procédure de suppression du concours financier communautaire précédemment octroyé, à la suite de la constatation de certaines irrégularités comptables dans les pièces justificatives présentées à l'appui des demandes de paiement. Ces courriers ne sont toutefois parvenus aux requérantes que le 15 juillet 1993, de sorte que les requérantes n'ont pas été en mesure de faire part à la Commission de leurs observations en temps utile, avant que la Commission n'ait adopté le 28 juillet 1993 quatre décisions par lesquelles elle supprimait les aides accordées aux requérantes et en exigeait, en outre, le remboursement.

    33 Postérieurement à l'adoption de ces quatre décisions, la Commission a toutefois pris connaissance des observations formulées par les requérantes dans le délai imparti à dater de la réception du courrier du 8 juin 1993. Le 1er octobre 1993, la Commission a adopté quatre décisions d'annulation des décisions de suppression de l'aide communautaire adoptées le 28 juillet 1993.

    34 Sur la base des observations formulées par les requérantes dans leur courrier du 22 juillet 1993, la Commission a rencontré les avocats représentant les requérantes au cours de réunions où elle leur a donné accès à la documentation relative aux quatre dossiers.

    35 Le 12 octobre 1993, la Commission a à nouveau demandé aux requérantes de lui faire parvenir leurs observations concernant les résultats de l'audit dont elles avaient fait l'objet, afin qu'elle puisse prendre une décision définitive sur les concours financiers communautaires relatifs à la construction des navires de pêche «Tiburon III», «Makus», «Acechador» et «Escualo». Les requérantes ont eu l'occasion de présenter leurs observations à la Commission dans un courrier du 15 novembre 1993, ainsi que leurs observations additionnelles dans le courant du mois de décembre 1993.

    36 Le 24 mars 1994, la Commission a adopté quatre décisions C(94) 670/1, C(94) 670/2, C(94) 670/3 et C(94) 670/4, par lesquelles elle décide de supprimer les concours financiers communautaires octroyés aux requérantes et enjoint à trois d'entre elles d'en rembourser le montant dans un délai de trois mois. La Commission justifie l'adoption de ces décisions par le refus des requérantes de donner libre accès à leurs livres comptables et par l'existence d'irrégularités relatives aux coûts totaux des projets et aux sommes effectivement déboursées au moment des demandes de paiement. Ces décisions ont été notifiées aux requérantes le 5 avril 1994.

    Procédure et conclusions des parties

    37 Le 27 octobre 1993, IPC a formé un recours en indemnité contre la Commission, en raison de l'absence de versement de l'aide communautaire qu'elle lui avait octroyée par sa décision du 26 avril 1989 (affaire T-551/93).

    38 Le 15 juin 1994, les requérantes ont déposé au greffe du Tribunal quatre requêtes visant à obtenir l'annulation des décisions de suppression et, le cas échéant, de remboursement du concours financier communautaire adoptées par la Commission le 24 mars 1994 (ci-après «décisions litigieuses») (affaires T-231/94, T-232/94, T-233/94 et T-234/94).

    39 Le 6 juillet 1994, les requérantes Tramasa, Makuspesca et Recursos Marinos ont chacune saisi le président du Tribunal d'une demande en référé visant à surseoir à l'exécution de l'article 2 des décisions C(94) 670/1, C(94) 670/2, C(94) 670/3, du 24 mars 1994, exigeant le remboursement de l'aide financière communautaire octroyée à ces trois requérantes pour la construction de navires de pêche.

    40 Le 26 octobre 1994, le président du Tribunal a prononcé une ordonnance de référé (Transacciones Maritimas e.a./Commission, T-231/94 R, T-232/94 R et T-234/94 R, Rec. p. II-885) aux termes de laquelle les trois requêtes ont été jointes aux fins de la procédure de référé, un sursis à l'exécution de l'article 2 des trois décisions litigieuses visées a été accordé jusqu'au prononcé de l'arrêt du Tribunal sur les recours au principal, en subordonnant toutefois cette mesure à la constitution, par les requérantes, d'une caution bancaire en faveur de la Commission couvrant la totalité du montant des aides octroyées, et les dépens ont été réservés pour le surplus. Les trois requérantes intéressées par cette procédure de référé ont formé un pourvoi devant la Cour en date du 17 janvier 1995, qui a été rejeté (ordonnance du président de la Cour du 7 mars 1995, Transacciones Maritimas e.a./Commission, C-12/95 P, Rec. p. I-467).

    41 Par ordonnance du président de la quatrième chambre du Tribunal du 20 novembre 1995, les affaires T-551/93, T-231/94, T-232/94, T-233/94 et T-234/94 ont été jointes.

    42 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d'instruction préalables. Dans le cadre des mesures d'organisation de la procédure, les parties ont toutefois été invitées à répondre par écrit à certaines questions avant l'audience.

    43 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales du Tribunal lors de l'audience publique qui s'est déroulée le 29 novembre 1995.

    44 Dans l'affaire T-551/93, la requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

    - condamner la Commission à payer à la requérante 48 550 322 PTA, soit le principal du concours octroyé par la Commission dans sa décision C(89) 632/73, du 26 avril 1989;

    - condamner la Communauté économique européenne à indemniser intégralement la partie requérante pour les dommages et préjudices soufferts en raison du retard de la Commission dans le paiement de l'aide accordée à la requérante par la décision du 26 avril 1989, le montant de cette indemnisation étant estimé à 329 442 écus, se décomposant comme suit:

    - 133 580 écus pour les intérêts au taux légal applicable en Espagne au cours des années 1990, 1991, 1992 et 1993 (10 %), augmenté de 2 points pour le retard (12 %), et appliqué sur un montant maximal de 48 550 322 PTA à partir du 13 novembre 1990 jusqu'à la date du présent recours;

    - 84 633 écus, au titre des frais de découvert en appliquant un taux de 8 % jusqu'à un montant de 48 550 322 PTA;

    - 73 151 écus, correspondant à la «prime de risque» prélevée par les fournisseurs pour l'octroi de facilité de paiement, jusqu'à concurrence d'un montant de 48 550 322 PTA;

    - 13 078 écus, au titre des frais légaux engagés par la requérante pour assurer sa défense au stade précontentieux;

    - 25 000 écus, au titre de préjudice moral;

    tous ces montants devant être adaptés jusqu'au prononcé de l'arrêt ou jusqu'à la date du paiement par la Commission, exception faite des frais légaux;

    - subsidiairement, condamner la Communauté économique européenne au paiement de tout autre montant que le Tribunal jugerait opportun, eu égard aux faits établis;

    - adopter toute autre mesure supplémentaire qu'il jugerait nécessaire ou appropriée;

    - condamner la Commission au paiement des dépens.

    La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

    - déclarer irrecevable la prétention de paiement de la subvention;

    - à titre subsidiaire pour la prétention qui précède et à titre principal pour toutes les autres, rejeter le recours comme non fondé;

    - condamner la requérante aux dépens.

    45 Dans les affaires T-231/94, T-232/94, T-233/94 et T-234/94, les requérantes concluent à ce qu'il plaise au Tribunal:

    - déclarer intégralement nulles les décisions de la Commission C(94) 670/1, C(94) 670/2, C(94) 670/3 et C(94) 670/4, du 24 mars 1994, qui suppriment et, le cas échéant, exigent le remboursement des concours financiers communautaires accordés aux requérantes;

    - condamner la Commission aux dépens.

    La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

    - rejeter les recours;

    - condamner les requérantes aux dépens.

    46 Dans le cadre du recours en indemnité et des recours en annulation, les requérantes formulent, en outre, au titre de l'article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, une prétendue offre de preuve ayant pour objet, en premier lieu, d'obtenir la production d'une série de documents dont certains figurent d'ailleurs en annexe des requêtes; en deuxième lieu, de proposer l'audition comme témoins de fonctionnaires espagnols et communautaires qui sont intervenus dans le cadre des vérifications effectuées sur place et de l'audit de l'IGAE, et, en troisième lieu, d'enjoindre à la direction générale des structures de la pêche du secrétariat général de la pêche maritime du ministère de l'Agriculture, de la Pêche et de l'Alimentation espagnol de fournir des informations sur la manière dont la vérification s'est déroulée. De son côté, la Commission a proposé, si le Tribunal l'estime nécessaire, de citer et d'interroger comme témoins les fonctionnaires de la Commission et le fonctionnaire de l'IGAE présents lors de la vérification effectuée sur place en mars 1990.

    47 Le Tribunal estime que les éléments figurant dans les dossiers des parties sont suffisants et que les véritables offres de preuve formulées par les parties - à savoir l'audition de fonctionnaires communautaires et espagnols et la production de certains documents - ne sont dès lors pas nécessaires à l'examen des présents recours.

    48 Par ailleurs, le Tribunal considère que, compte tenu des particularités des affaires jointes en l'espèce, il y a lieu d'examiner les recours en annulation introduits dans les affaires T-231/94, T-232/94, T-233/94 et T-234/94, avant d'examiner le recours en indemnité introduit dans l'affaire T-551/93.

    Quant aux recours en annulation

    Sur la recevabilité

    Arguments des parties

    49 Dans l'affaire T-232/94, la Commission relève l'existence d'une contradiction entre le libellé du certificat émis par le registre du commerce de Pontevedra, selon lequel Recursos Marinos est dissoute et liquidée, et celui du mandat authentique accordé par le liquidateur, selon lequel Recursos Marinos serait en liquidation.

    50 La Commission fait également remarquer que le liquidateur de Recursos Marinos a donné mandat aux avocats qui ont signé la requête dans cette affaire de représenter IPC. Ceux-ci n'auraient dès lors pas les pouvoirs de représenter la société Recursos Marinos et la requête serait nulle.

    51 A la suite des injonctions que lui a adressées le Tribunal, conformément à l'article 44, paragraphe 6, du règlement de procédure du Tribunal, Recursos Marinos a précisé que, selon une pratique notariale et judiciaire espagnole bien établie, une société en liquidation dispose encore d'une personnalité morale résiduelle lui permettant notamment d'exercer certaines actions en justice en vue d'assurer la défense de droits nés avant sa mise en liquidation. Cette pratique notariale et judiciaire aurait en outre été consacrée récemment par l'article 123 de la loi espagnole n_ 2/1995, du 23 mars 1995. Recursos Marinos a par ailleurs indiqué que l'erreur figurant dans le mandat ad litem était purement matérielle et qu'elle avait été rectifiée par l'établissement d'un nouvel acte authentique daté du 12 août 1994 et communiqué au Tribunal le 26 août 1994.

    Appréciation du Tribunal

    52 Le Tribunal estime que les précisions complémentaires présentées par Recursos Marinos à l'appui de documents probants qui n'ont pas été contestés par la Commission lèvent les doutes qui ont pu exister au sujet de la recevabilité du recours en annulation introduit par Recursos Marinos.

    Sur le fond

    53 Les requérantes invoquent cinq moyens à l'appui de leurs recours. Le premier moyen est tiré d'une violation des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime, en ce que les décisions de suppression des concours financiers communautaires ont été adoptées au-delà d'un délai raisonnable. Le deuxième moyen, présenté à titre subsidiaire, est pris de la violation des formes substantielles, en ce que la Commission n'aurait pas demandé, préalablement à l'adoption des décisions de suppression, l'avis du comité permanent des structures de la pêche, n'aurait pas avisé l'État membre concerné conformément à l'article 7 du règlement n_ 1116/88 et n'aurait pas ou pas suffisamment motivé les décisions attaquées. Le troisième moyen, qui est présenté à titre subsidiaire et complémentaire, est tiré de la violation du règlement n_ 4028/86, en ce que la Commission ne fonderait ses décisions sur aucun des cas cités à l'article 44, paragraphe 1, du règlement n_ 4028/86. Le quatrième moyen, également invoqué à titre subsidiaire et complémentaire, est pris de la violation du principe de proportionnalité en ce que la Commission a décidé d'infliger la sanction maximale prévue à l'article 44, paragraphe 1, du règlement n_ 4028/86, alors que les navires bénéficiant des concours financiers communautaires ont été effectivement construits conformément aux spécifications techniques des projets et que la Commission n'a relevé que de prétendues irrégularités administratives. Le cinquième moyen, également invoqué à titre subsidiaire et complémentaire, est tiré d'un détournement de pouvoir en ce que la Commission aurait de la sorte cherché à sanctionner des ventes de navires de pêche parfaitement licites au regard de la réglementation communautaire applicable.

    Premier moyen: violation des principes de sécurité juridique et de la protection de la confiance légitime

    - Arguments des parties

    54 Les requérantes s'insurgent contre la longueur des délais qui se sont écoulés, d'une part, entre les décisions d'octroi des concours financiers et les décisions de suppression de ceux-ci et, d'autre part, entre la date de réception du rapport d'audit et la date des décisions de suppression des concours financiers. A cet égard, les requérantes soutiennent que le comportement de la Commission a violé le principe de la protection de la confiance légitime et, à tout le moins, le principe de sécurité juridique.

    55 Selon les requérantes, le principe de la protection de la confiance légitime ne serait qu'une consécration partielle du principe de sécurité juridique, ce qui explique que le même comportement puisse entraîner à la fois la violation de l'un et l'autre principes. Elles ont ajouté que, lorsqu'aucune disposition du droit communautaire n'impose à la Commission d'adopter une décision dans un délai déterminé, le principe de sécurité juridique joue un rôle plus déterminant, puisqu'il doit alors combler une lacune normative.

    56 Ainsi, le comportement de la Commission dans cette affaire constituerait, tout d'abord, une violation du principe de la protection de la confiance légitime, dans la mesure où, entre le moment où les aides ont été octroyées aux requérantes et celui où les décisions ordonnant leur suppression ont été adoptées, les requérantes n'ont pu disposer d'aucun indice indiquant que la Commission considérait qu'elles avaient commis des illégalités.

    57 Le silence observé par la Commission, même après que les autorités espagnoles ont demandé, en décembre 1991, le remboursement d'une partie des aides qu'elles avaient octroyées, aurait renforcé la confiance des requérantes, ce qui justifierait l'annulation des décisions litigieuses (arrêt de la Cour du 3 mars 1982, Alpha Steel/Commission, 14/81, Rec. p. 749, point 11).

    58 En outre, selon les requérantes, même si les intéressés sont conscients de l'illégalité de leur situation, la Commission ne peut constater celle-ci au-delà d'un certain laps de temps sans violer le principe de la protection de la confiance légitime (arrêts de la Cour du 12 novembre 1987, Ferriere San Carlo/Commission, 344/85, Rec. p. 4435, et du 24 novembre 1987, RSV/Commission, 223/85, Rec. p. 4617).

    59 Les requérantes allèguent, par ailleurs, que les illégalités qui leur sont reprochées reposent essentiellement sur des différences d'interprétation quant au mode de calcul du coût des navires et ne constituent en aucune façon des violations manifestes de la réglementation applicable, de nature à exclure l'application du principe de la protection de la confiance légitime (arrêt de la Cour du 12 décembre 1985, Sideradria/Commission, 67/84, Rec. p. 3983, point 21).

    60 Selon les requérantes, leur confiance légitime n'a pas non plus été affectée par les vérifications sur place effectuées par les agents de la Commission à la fin du mois de mars 1990. En effet, une telle mesure ne constituerait qu'une simple faculté reconnue par l'article 46, paragraphe 2, du règlement n_ 4028/86, ne présumant pas qu'il existe un soupçon de quelque nature que ce soit à l'encontre des entreprises qui en font l'objet. Dans le cas d'espèce, ces vérifications sur place n'auraient d'ailleurs donné lieu à l'envoi d'aucun document contenant une accusation quelconque à l'égard des requérantes et dont elles auraient pu déduire qu'elles avaient commis une infraction.

    61 Ensuite, les requérantes prétendent que, même si le comportement de la Commission ne peut être analysé comme ayant entraîné la violation du principe de la protection de la confiance légitime, ce comportement viole à tout le moins le principe de sécurité juridique. En effet, les requérantes rappellent, en premier lieu, qu'un délai variant de quatre à six ans s'est écoulé entre le moment où le versement des aides litigieuses a été demandé à la Commission et le moment où celle-ci a décidé de les supprimer. Elles ont présenté, lors de l'audience, des tableaux récapitulatifs démontrant l'étendue de ces délais dans chaque affaire. Elles ont rappelé, en second lieu, qu'un délai d'environ trois ans s'est écoulé entre le moment où la Commission a reçu le rapport d'audit et celui où elle a adopté les décisions litigieuses. Or, une telle durée ne pourrait être qualifiée de délai raisonnable et constituerait une violation des principes de sécurité juridique et de bonne administration (arrêts de la Cour du 12 juillet 1957, Algera e.a./Assemblée commune de la CECA, 7/56, 3/57, 4/57, 5/57, 6/57 et 7/57, Rec. p. 81, et du 3 mai 1978, Toepfer/Commission, 112/77, Rec. p. 1019, et RSV/Commission, précité).

    62 En outre, les requérantes font valoir que l'argument de la Commission par lequel celle-ci réduit son délai d'inactivité de la date de réception du rapport d'audit (19 juin 1991) à la date de notification de l'ouverture de la procédure en suppression (15 juillet 1993) ne modifie en rien la pertinence des principes invoqués. Elles ajoutent même que la passivité injustifiée de la Commission a été soulignée par l'administration espagnole lors de l'adoption, le 27 décembre 1991, des décisions de suppression partielle des concours financiers nationaux.

    63 En tout état de cause, les requérantes insistent sur le fait qu'elles n'ont commis aucune infraction substantielle et délibérée à la réglementation communautaire. A cet égard, elles rappellent, d'une part, qu'elles contestent le contenu du rapport d'audit sur plusieurs points et, d'autre part, qu'elles jouissent de la présomption de bonne foi qu'il revient, éventuellement, à la Commission de renverser. Elles avancent comme preuve de leur bonne foi le fait que le rapport d'audit et les observations des autorités espagnoles ne se prononcent pas sur le caractère conscient des éventuelles infractions. En outre, selon les requérantes, si elles avaient commis délibérément des infractions, il aurait fallu prévenir le ministère public espagnol de ce comportement, conformément aux articles 262 de la loi de procédure pénale espagnole et 350 du code pénal espagnol, ce qui n'a pas été fait. Les requérantes constatent que les décisions litigieuses ne comportent aucun élément de preuve à cet égard.

    64 La Commission répond, tout d'abord, qu'en invoquant à titre principal l'argument tiré de la confiance légitime résultant du retard dans l'adoption des décisions litigieuses les requérantes reconnaissent implicitement le bien-fondé de ces dernières.

    65 Elle soutient, ensuite, que les circonstances de l'espèce ne permettent pas d'établir la confiance légitime revendiquée par les requérantes. Ainsi, les requérantes auraient été constituées avec un capital inférieur ou égal à 100 000 PTA, réparti entre trois associés de la même famille dont l'associé majoritaire est chaque fois M. Campos Quinteiro, parce qu'elles auraient été créées dans le but, apparemment exclusif, d'obtenir d'importantes subventions communautaires et nationales pour construire des navires de pêche et les revendre par la suite. Trois des quatre requérantes ayant en outre cessé leurs activités depuis la vente des navires construits à l'aide des subventions (Tramasa, IPC, Recursos Marinos), la Commission se retrouverait ainsi face à des entreprises volontairement placées dans une situation financière rendant impossible la récupération des aides indûment versées. A l'audience, la Commission a ajouté que, malgré les démarches entreprises à la suite du rejet par le président de la Cour du pourvoi introduit par les requérantes contre l'ordonnance de référé du président du Tribunal du 26 octobre 1994, elle n'était pas parvenue à récupérer les concours financiers communautaires versés à Tramasa, Makuspesca et Recursos Marinos en raison de l'insolvabilité de ces sociétés.

    66 La Commission poursuit en affirmant que le laps de temps qui s'est écoulé avant l'adoption des décisions litigieuses est, au moins partiellement, imputable aux requérantes, lesquelles, par l'attitude obstructive dont elles ont fait preuve lors des visites d'inspection des services de la Commission à la fin du mois de mars 1990, auraient rendu nécessaire la réalisation d'un audit par les autorités espagnoles.

    67 La Commission considère par ailleurs que la jurisprudence citée par les requérantes ne serait pas applicable aux cas d'espèce, dans la mesure où le retrait d'actes des institutions communautaires ne serait pas en l'occurrence justifié soit par une erreur de la Commission, soit par la modification d'une pratique ou d'une tolérance de celle-ci, mais par un comportement irrégulier des intéressées.

    68 La Commission en déduit que les requérantes ne sauraient se prévaloir de la confiance légitime qu'elles auraient placée dans le bénéfice d'une subvention dont l'octroi est fondé sur de fausses indications de leur part, en violation manifeste de la réglementation applicable. A cet égard, la Commission relève que les factures établies par les chantiers navals non seulement ne correspondent pas à des paiements effectifs de la part des requérantes, mais encore ne reflètent pas le coût véritable des investissements, lequel serait sensiblement inférieur aux montants qui y sont indiqués. La Commission allègue, en outre, que les montants totaux des investissements qui figurent sur les formulaires de demande d'aide communautaire, ainsi que, à titre de montants payés, sur les certificats établis en vue du versement total de l'aide accordée, ne coïncident en aucun cas avec les valeurs de base des navires déclarées par les chantiers navals aux autorités nationales. La Commission ajoute que de telles déclarations ne peuvent se faire que de façon délibérée, comme l'indiquerait d'ailleurs l'administration espagnole.

    69 Il en résulte, selon la Commission, que, dès lors que les requérantes ont sciemment enfreint la réglementation communautaire, elles ne seraient pas en droit d'interpréter l'écoulement d'un délai, quelle que soit sa longueur, et le silence de la Commission comme des signes de la prétendue intention de celle-ci de ne pas supprimer les aides octroyées.

    70 En tout état de cause, la Commission considère que les requérantes ne pouvaient plus se nourrir d'espoir légitime dès l'instant où elles ont pris connaissance du rapport d'audit et, a fortiori, où l'administration espagnole leur a fait savoir qu'elle réduisait sa propre intervention.

    71 Enfin, la Commission soutient que le comportement de l'actionnaire majoritaire des requérantes, M. Campos Quinteiro, dans la gestion des trois sociétés qui ont perçu le montant des concours communautaires, après avoir pris connaissance des résultats de l'audit, constitue un sérieux indice d'absence de confiance légitime. Ainsi Recursos Marinos aurait été dissoute et liquidée, et les actifs de Makuspesca et Tramasa auraient été fortement réduits, de façon à rendre impossible l'éventuel remboursement des subventions, ce que la Commission a constaté en tentant de récupérer les aides indûment versées. En outre, M. Campos Quinteiro s'est gardé de réclamer le paiement du concours financier octroyé à IPC jusqu'à ce que la Commission lui notifie son intention de supprimer l'aide qu'elle avait accordée à cette société.

    - Appréciation du Tribunal

    72 Les requérantes font reposer toute l'argumentation qu'elles développent dans le cadre de ce premier moyen sur la longueur prétendument excessive des délais ayant amené la Commission à adopter les décisions litigieuses. Le Tribunal considère qu'il convient dès lors de déterminer les délais qui doivent être pris en considération pour apprécier le bien-fondé des violations alléguées.

    73 A cet égard, le Tribunal relève que les décisions litigieuses renvoient notamment au contenu du rapport d'audit pour justifier la suppression des aides communautaires. Le délai devant être pris en considération débute par conséquent au moment où les requérantes prennent connaissance des résultats des mesures de contrôle mises en oeuvre par la Commission, conformément aux pouvoirs qui lui sont attribués par la réglementation applicable en la matière. Or, il s'avère que le rapport d'audit a été adressé à la Commission le 10 juillet 1991 et que les décisions litigieuses ont été adoptées le 24 mars 1994. Le délai devant être pris en considération s'élève donc, dans les cas d'espèce, à quelque 32 mois.

    74 Le Tribunal constate toutefois que, durant ce délai de 32 mois, la Commission n'est pas restée inactive. Elle a entretenu des contacts avec les autorités espagnoles (lettres du directeur général des structures de la pêche espagnol du 16 décembre 1992 et du 8 mars 1993 suite à la demande de la Commission du mois de novembre 1992) et avec les requérantes (lettres du 8 juin 1993 reçues le 15 juillet 1993, décisions du 28 juillet 1993 et du 1er octobre 1993, entretiens et contacts d'octobre et novembre 1993). Il s'ensuit que la Commission est en réalité restée inactive vis-à-vis des requérantes du 10 juillet 1991 au 8 juin 1993, soit durant 23 mois, alors que son inactivité vis-à-vis des autorités espagnoles se réduit à la période s'écoulant du 10 juillet 1991 au mois de novembre 1992, soit durant 16 mois.

    75 Il importe de vérifier si ces délais ont pu affecter d'une quelconque façon les principes de la protection de la confiance légitime et de sécurité juridique invoqués par les requérantes. Pour ce faire, il y a lieu d'examiner dans quelle mesure les requérantes étaient en droit de croire que les aides versées ou devant l'être leur étaient définitivement acquises, en raison d'une confiance légitime ou, à tout le moins, de l'écoulement même d'un délai. SUITE DES MOTIFS SOUS LE NUM.DOC : 693A0551.1

    76 A cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour, le principe de la protection de la confiance légitime ne peut pas être invoqué par une entreprise qui s'est rendue coupable d'une violation manifeste de la réglementation en vigueur (arrêt Sideradria/Commission, précité, point 21). La Cour a par ailleurs indiqué que, s'il convient de veiller au respect des impératifs de la sécurité juridique protégeant des intérêts privés, il importe également de les mettre en balance avec les impératifs du principe de la légalité protégeant des intérêts publics et de promouvoir ces derniers lorsque le maintien d'irrégularités est de nature à violer le principe d'égalité de traitement (voir notamment les arrêts de la Cour du 22 mars 1961, Snupat/Haute Autorité, 42/59 et 49/59, Rec. p. 103, plus particulièrement p. 159 à 161, et du 12 juillet 1962, Hoogovens/Haute Autorité, 14/61, Rec. p. 485, plus particulièrement p. 516 à 523).

    77 Dans les cas d'espèce, le Tribunal relève que les décisions litigieuses justifient la suppression des concours financiers communautaires en déclarant que l'IGAE a constaté des irrégularités consistant «dans le fait qu'au moment de la demande de paiement du concours financier, les sommes déclarées comme ayant été payées par le bénéficiaire étaient nettement supérieures aux sommes effectivement payées à ce moment», et «dans le fait que les montants correspondant au coût total de l'investissement ayant bénéficié de la subvention, et qui figurent tant dans la demande de subvention que dans la demande de paiement, montants justifiés par les budgets et les factures correspondantes et en fonction desquels le concours financier communautaire a été octroyé et son montant fixé, apparaissent comme nettement supérieurs aux sommes effectivement payées». Les décisions litigieuses ont également justifié la suppression des concours financiers communautaires par le fait que, au «cours des contrôles effectués par des fonctionnaires de la Commission le 30 mars 1990, le bénéficiaire a refusé l'accès à la comptabilité de l'entreprise aux services de la Commission, ce qui a empêché de vérifier si les conditions, auxquelles l'octroi du concours était subordonné, étaient remplies (et) que, pour cette raison, la Commission a demandé aux autorités espagnoles d'effectuer un contrôle sur place».

    78 En premier lieu, en ce qui concerne l'absence de concordance entre le montant déclaré et le montant effectivement payé pour l'investissement réalisé au moment de la demande de paiement, il importe de relever que les auteurs du rapport d'audit ont constaté que, contrairement à ce que les requérantes ont déclaré dans leurs demandes de paiement des concours, à l'appui de factures émises par les chantiers navals (voir ci-dessus points 14, 17, 21 et 24), les documents examinés n'ont pas permis d'établir que l'intégralité des paiements déclarés avait été réalisée à ce moment-là (rapport d'audit, p. 26, 32, 38 et 47).

    79 En outre, il y a lieu de souligner que, loin d'avoir été acquittées au comptant (annexe 3 aux mémoires en défense dans les affaires T-234/94, T-232/94 et T-233/94) ou au moyen de chèques (annexe 3 au mémoire en défense dans l'affaire T-231/94), comme les requérantes l'ont déclaré dans la liste énumérative des pièces comptables remises conjointement aux demandes de paiement des concours, les factures émises par les chantiers navals auraient notamment été payées au moyen de traites, selon la thèse soutenue par les requérantes depuis la réalisation de l'audit.

    80 A l'audience, en réponse à une question du Tribunal, les requérantes sont convenues que les montants déclarés sur lesdites factures, et partant sur les demandes de paiement des concours, ne correspondaient pas aux coûts effectivement payés à ce moment-là. Les requérantes n'ont toutefois pas apporté d'explications permettant de justifier, en tout ou en partie, l'inexactitude de leurs déclarations.

    81 Par ailleurs, le Tribunal constate que la ventilation des différentes catégories de travaux de construction des navires reprise dans les demandes de paiement des concours est identique à celle qui se trouve dans les demandes d'octroi des concours, en ce qui concerne tant l'identification des travaux que leur coût respectif, comme l'indiquent les listes énumératives des pièces comptables remises conjointement aux demandes de paiement (voir annexe 3 aux quatre mémoires en défense).

    82 Malgré l'existence de ces fausses déclarations, les requérantes soutiennent qu'aucune disposition ne leur impose de démontrer qu'elles ont effectivement payé l'intégralité de l'investissement indiqué dans la demande et dans la décision d'octroi du concours au moment où elles demandent le paiement final du concours communautaire. En effet, selon les requérantes, la réglementation communautaire doit s'analyser comme leur imposant uniquement d'avoir payé les coûts subventionnables (ou éligibles) retenus par la Commission pour calculer le montant du concours communautaire, au moment où elles en réclament le versement.

    83 Or, l'article 3, second alinéa, du règlement n_ 1116/88, cité dans les décisions litigieuses, prévoit que «les demandes de paiement comportent un certificat et une liste énumérative des pièces justificatives (qui) sont à présenter en deux exemplaires et doivent contenir les données et documents mentionnés en annexe». A cet égard, il s'avère que les données et documents mentionnés en annexe relatifs au paiement final du concours communautaire se présentent sous la forme de modèles. Il y figure notamment un modèle du certificat par lequel l'autorité nationale compétente atteste, entre autres choses, que, au moment de la demande de paiement, le «montant des coûts totaux effectivement payé» s'élève à une certaine somme et «se répartit entre les différentes catégories de travaux prévus, comme indiqué dans la liste énumérative des pièces justificatives de la présente demande de paiement (modèle n_ 8)» (points 2 et 4 du modèle n_ 6). Il ressort donc des termes utilisés dans les modèles reprenant les données et documents devant obligatoirement être remis au moment de la demande de paiement que le bénéficiaire d'un concours financier communautaire doit produire à l'autorité nationale compétente les éléments démontrant que les coûts totaux ont été effectivement payés.

    84 Les requérantes ne sauraient tirer argument de la présentation des modèles sous la forme d'annexes à un règlement pour soutenir que les indications qui y figurent n'ont pas la force obligatoire d'une disposition réglementaire. En effet, comme le Tribunal l'a exposé ci-dessus au point 83, l'article 3, second alinéa, du règlement n_ 1116/88 impose que les données et documents mentionnés en annexe du règlement figurent dans le certificat et la liste énumérative des pièces justificatives accompagnant la demande de paiement. Le Tribunal estime par conséquent que les indications figurant sur de tels modèles ont une force obligatoire identique à celle des dispositions du règlement auquel ils sont annexés.

    85 En outre, le Tribunal tient à préciser qu'aucune des indications figurant dans les modèles en annexe au règlement n_ 1116/88 ne permet de déduire que les «coûts totaux» devant être effectivement payés au moment de la demande de paiement se réfèrent uniquement aux coûts subventionnables. Au contraire, le Tribunal relève que le point 6 du modèle n_ 6 de l'annexe au règlement n_ 1116/88 fait une référence expresse aux travaux décrits dans la décision d'octroi du concours de la Commission. Or, les travaux décrits dans cette décision ne se limitent pas seulement à ceux qui sont retenus par la Commission pour être subventionnés, mais englobent l'ensemble des travaux prévus par le candidat bénéficiaire pour réaliser l'investissement (voir annexe 5 aux requêtes dans les quatre affaires).

    86 Le Tribunal considère dès lors que les «coûts totaux» devant être effectivement payés au moment de la demande de paiement sont ceux qui correspondent à l'intégralité de l'investissement prévu par le bénéficiaire dans sa demande d'octroi du concours communautaire et reproduit dans la décision d'octroi. Au surplus, le Tribunal rappelle que les requérantes ont estimé nécessaire de soutenir qu'elles avaient acquitté le montant total de l'investissement projeté lorsqu'elles ont réclamé le paiement du concours communautaire, puisqu'elles ont, dans chaque cas, produit une facture du chantier naval dont le montant correspond au coût total de chaque projet (voir ci-dessus points 14, 17, 21 et 24). Un tel comportement permet raisonnablement de supposer que les requérantes étaient convaincues que la réglementation en vigueur leur imposait de démontrer le paiement effectif du montant total de l'investissement projeté avant de pouvoir percevoir le concours communautaire.

    87 Le Tribunal tient aussi à faire remarquer que les auteurs du règlement n_ 1116/88 ont précisément prévu que, s'il existe une différence entre les travaux initialement envisagés et ceux effectivement réalisés et payés, cette différence doit être indiquée et justifiée dans les données et documents joints à la demande de paiement (modèle n_ 9, figurant en annexe au règlement n_ 1116/88). Or, dans les cas d'espèce, les requérantes n'ont pas déclaré qu'il existait une différence entre les travaux prévus et réalisés ni au moment où elles ont introduit leurs demandes de paiement (voir, à cet égard, l'annexe 5 aux mémoires en défense dans les affaires T-233/94 et T-234/94) ni ultérieurement.

    88 Par ailleurs, à l'appui de leur argumentation, les requérantes ont allégué que les dépenses suivantes devaient être considérées comme effectivement réalisées au moment de la demande de paiement du concours communautaire: la prime à la construction navale versée directement par la Gerencia del sector naval au chantier naval chargé de la construction du navire; les traites émises avant la demande de paiement, mais dont l'échéance est postérieure à cette date, et les réductions de prix pour cause de retard dans la construction du navire.

    89 Tout d'abord, le Tribunal relève que le rapport d'audit ne se prononce pas sur le sort qu'il convient de réserver à la prime à la construction navale lors de la comptabilisation des dépenses effectivement réalisées par le bénéficiaire du concours communautaire. La Commission ne s'est pas non plus formellement opposée, dans le cadre de la procédure écrite ou dans celui de la procédure orale, à la prise en compte de cette prime dans les dépenses effectivement réalisées au moment de la demande de paiement. Compte tenu de ces éléments, le Tribunal estime, sans qu'il soit nécessaire de poursuivre l'examen de cette question, que le montant correspondant à la prime à la construction navale doit être considéré comme une dépense effectivement réalisée dès que la prime a été accordée par la Gerencia del sector naval.

    90 Ensuite, le Tribunal constate que, dans la note infrapaginale n_ 4 du modèle n_ 8 figurant en annexe au règlement n_ 1116/88 et auquel renvoie son article 3, second alinéa, il est précisé que la date de paiement à indiquer sur la liste énumérative des pièces justificatives accompagnant la demande de paiement «est celle relative au paiement effectif et non pas la date d'échéance de la dette, par exemple, en cas de paiement par traites». Par conséquent, si la date du paiement effectif d'une traite ne peut pas correspondre à sa date d'échéance, à plus forte raison, la date de paiement effectif d'une traite ne saurait correspondre à celle de son émission. Les coûts acquittés au moyen de traites non échues, ou de traites échues mais non payées, au moment de la demande de paiement ne peuvent dès lors pas être considérés comme ayant été effectivement payés à cette date. Dans ces conditions, le Tribunal considère qu'il n'est pas nécessaire de recourir au droit espagnol pour déterminer l'effet libératoire d'un paiement par traite dans le cadre des concours financiers communautaires à la construction de nouveaux navires de pêche.

    91 Enfin, il ressort des dossiers que trois requérantes - à savoir, Tramasa, IPC et Makuspesca - ont intégré des réductions de prix pour retard de construction dans la liste des coûts effectivement payés au moment des demandes de paiement. A cet égard, la Commission fait remarquer, à juste titre, que les contrats de construction du navire présentés à l'appui des demandes d'octroi ne comportent aucune disposition prévoyant des réductions de prix en cas de retard dans l'exécution du contrat. En outre, le Tribunal constate que seule la requérante IPC a déposé des documents attestant, selon elle, la réalité des réductions obtenues à concurrence d'un montant de 40 100 000 PTA, ce qui représente 18 % du coût total du projet. Tramasa et Makuspesca se sont contentées, pour leur part, d'alléguer l'existence de telles réductions de prix pour retard, sans en apporter la moindre preuve.

    92 Or, parmi les documents déposés par IPC à l'appui de son allégation (annexe 3 au mémoire en réplique dans l'affaire T-233/94), le Tribunal relève que certains ont été rédigés par un expert comptable qui a été consulté en octobre 1993, soit plus de deux années après la réalisation de l'audit et quelques mois seulement après que, par sa lettre du 8 juin 1993, la Commission a informé IPC de son intention de supprimer le concours communautaire qu'elle lui a précédemment octroyé. En outre, l'auteur des documents en cause a précisé que «Por todo lo expuesto y sin que ello sirva como documento de Auditoría contable para posteriores comprobaciones, explido la presente Certificación en Vigo a 15 octubre de 1993» (traduction). Le Tribunal considère dès lors que la réalité de telles réductions de prix pour retard dans l'exécution du contrat ne saurait être établie à l'aide de ces seuls documents.

    93 Compte tenu de ces éléments, le Tribunal considère que les réductions de prix pour cause de retard dans la construction du navire présentées par les trois requérantes précitées ne sauraient être analysées, dans le cas d'espèce, comme des coûts effectivement payés par le bénéficiaire de l'aide ni au moment où il en demande le paiement ni ultérieurement.

    94 Dès lors, sur la base des éléments traités ci-dessus aux points 89 à 93, il s'avère que, pour déterminer le montant des investissements effectivement réalisés au moment de l'introduction des demandes de paiement des concours, il convient de déduire des montants que les requérantes prétendent avoir payés à ce moment-là, à tout le moins, le montant des traites non échues et non payées ou échues et non payées, ainsi que, le cas échéant, le montant des réductions de prix pour retard dans l'exécution du contrat [(montant avancé dans le cadre de la présente procédure) moins (montant des traites) moins (montant des réductions de prix)].

    95 Il apparaît alors que:

    - Tramasa n'aurait effectivement payé que 56 055 200 PTA [123 085 272 PTA (mémoire en réplique, p. 20) - 61 991 072 PTA (mémoire en réplique dans l'affaire T-231/94, p. 18, et rapport d'audit, p. 26) - 5 039 000 PTA (rapport d'audit, p. 28 et 54, et mémoire en réplique dans l'affaire T-231/94, p. 19)], soit 44,31 % du montant qu'elle a déclaré (126 500 000 PTA);

    - Makuspesca seulement 26 359 511 PTA [213 731 225 PTA (mémoire en réplique dans l'affaire T-234/94, p. 20 et 21) - 151 950 417 PTA (mémoire en réplique dans l'affaire T-234/94, p. 18 et 20, et rapport d'audit, p. 34) - 35 421 297 PTA (rapport d'audit, p. 34, et mémoire en réplique dans l'affaire T-234/94, p. 21)], soit 12,13 % du montant qu'elle a déclaré (217 250 000 PTA);

    - Recursos Marinos seulement 295 480 510 PTA [303 781 000 PTA (mémoire en réplique dans l'affaire T-232/94, p. 20) - 8 300 490 PTA (mémoire en réplique dans l'affaire T-232/94, p. 18, 19 et 20) - 0 PTA], soit 91,67 % du montant qu'elle a déclaré (322 300 000 PTA);

    - IPC seulement 131 089 196 PTA [210 429 468 PTA (mémoire en réplique dans l'affaire T-233/94, p. 20 et 21) - 39 240 272 PTA (mémoire en réplique dans l'affaire T-233/94, p. 19, et rapport d'audit, p. 41) - 40 100 000 PTA (mémoire en réplique dans l'affaire T-233/94, p. 20 et rapport d'audit, p. 41)] soit 60,34 % du montant qu'elle a déclaré (217 250 000 PTA).

    96 Au surplus, il convient de relever que les documents examinés lors de l'audit n'ont pas permis d'établir le paiement d'une série d'autres coûts que les requérantes prétendent avoir acquittés au moment des demandes de paiement, de sorte que les pourcentages repris ci-dessus au point 95 doivent encore être réduits (voir rapport d'audit, p. 25 et 26, 33 à 35, 38 à 41 et 46 à 49).

    97 En deuxième lieu, en ce qui concerne l'absence de concordance entre le montant déclaré et le montant effectivement payé pour l'investissement réalisé telle qu'elle ressort des éléments rassemblés dans le rapport d'audit, il importe de relever que les auteurs du rapport d'audit ont constaté que, contrairement à ce que les requérantes ont déclaré, même à ce moment-là, soit plusieurs mois après l'introduction des demandes de paiement des concours, les documents examinés n'ont pas permis d'établir que le montant des coûts effectivement payés par les requérantes correspondaient au montant des investissements figurant sur les demandes et les décisions d'octroi des concours et sur les factures des chantiers navals déposées à l'appui des demandes de paiement [rapport d'audit, sous k), p. 16; point 2.1, p. 21 et 22].

    98 Les requérantes ont contesté cette affirmation en soutenant notamment qu'il fallait tenir compte des réductions de prix pour retard dans l'exécution du contrat et des frais qui résultent de la livraison de fournitures et de services divers effectués par les requérantes ou pour leur compte, comme elles l'ont précisé au stade de la réplique.

    99 Or, d'une part, comme le Tribunal l'a indiqué ci-dessus au point 93, les réductions de prix pour retard dans l'exécution du contrat ne sauraient, dans les trois cas où elles sont invoquées, être retenues comme paiement effectif à quelque moment que ce soit. D'autre part, le rapport d'audit a constaté que, au moment où il a été réalisé, les requérantes n'ont pas été en mesure de démontrer l'existence comptable des paiements effectués pour la livraison de fournitures et de services divers, ni d'établir leur lien avec les dossiers en cause (rapport d'audit, p. 34, 41, 49, 54, 55, 57 et 59). En outre, le Tribunal relève que, depuis lors, les requérantes n'ont pas apporté d'éléments nouveaux permettant de contredire le contenu du rapport d'audit sur ce point. Par conséquent, de tels frais de livraison de fournitures et de services divers ne sauraient pas non plus être pris en compte à titre de coûts effectivement payés.

    100 Dès lors, il apparaît que, sur la base des seuls éléments examinés ci-dessus au point précédent, il convient de déduire des montants que les requérantes prétendent avoir finalement payés, à tout le moins, le montant des réductions de prix pour retard dans l'exécution du contrat et le montant des frais résultant de livraisons de fournitures et de services divers [(montant avancé dans le cadre de la présente procédure) moins (montant des réductions de prix) moins (montant des livraisons)].

    101 Il s'ensuit que:

    - Tramasa n'aurait finalement payé, tout au plus, que 93,3 % de ce qu'elle a déclaré [126 433 787 PTA (mémoire en réplique dans l'affaire T-231/94, p. 20) - 5 039 000 PTA (rapport d'audit, p. 28 et 54, et mémoire en réplique dans l'affaire T-231/94, p. 19) - 3 348 515 PTA (mémoire en réplique dans l'affaire T-231/94, p. 20)];

    - Makuspesca, tout au plus, que 82,07 % [217 250 000 PTA (mémoire en réplique dans l'affaire T-234/94, p. 21) - 35 421 297 PTA (rapport d'audit, p. 34, selon lequel il s'agit de déductions pour livraison de fournitures pour la construction du navire par la requérante, et mémoire en réplique dans l'affaire T-234/94, p. 20) - 3 518 775 PTA (mémoire en réplique dans l'affaire T-234/94, p. 20)];

    - Recursos Marinos, tout au plus, que 92,81 % [310 719 066 PTA (mémoire en réplique dans l'affaire T-232/94, p. 16) - 0 PTA - 11 590 934 PTA (rapport d'audit, p. 49 et mémoire en réplique dans l'affaire T-232/94, p. 21)];

    - IPC, tout au plus, que 61,15 % [217 773 539 PTA (mémoire en réplique dans l'affaire T-233/94, p. 21) - 40 100 000 PTA (mémoire en réplique dans l'affaire T-233/94, p. 20 et rapport d'audit, p. 41) - (7 343 971 PTA + 37 475 210 PTA) (mémoire en réplique dans l'affaire T-233/94, p. 21 et rapport d'audit, p. 41)].

    102 Au surplus, le Tribunal relève que le rapport d'audit conteste également la réalité d'autres paiements invoqués par les requérantes, tels qu'un effet de commerce qui n'a finalement pas été payé (p. 34 et 35) ou un chèque ultérieurement annulé (p. 59).

    103 En tout état de cause, force est de constater que, contrairement à ce qu'elles ont déclaré et soutenu, les requérantes n'ont, en fait, jamais été en mesure d'établir la réalisation de l'intégralité des investissements, malgré l'écoulement d'un délai de 14 à 31 mois entre les différentes demandes de paiement des concours et la réalisation de l'audit.

    104 Le Tribunal tient encore à relever deux éléments relatifs aux coûts finalement acquittés par les requérantes. Tout d'abord, le Tribunal constate que, dans ses décisions d'octroi des concours financiers communautaires (annexe 5 aux quatre requêtes), la Commission a réparti la prise en charge de l'investissement entre le bénéficiaire du concours communautaire, la Communauté et l'État membre concerné. Toutefois, elle n'a pas tenu compte de la prime accordée par la Gerencia del sector naval dans son calcul de la part prise en charge par l'État membre concerné, de sorte que, dans les décisions d'octroi des concours, cette prime relève de la part prise en charge par le bénéficiaire.

    105 Or, il apparaît que, sur la base des seules dépenses examinées ci-dessus aux points 99 à 101, les coûts effectivement payés par les requérantes ne correspondent pas au montant des investissements prévus. Il s'ensuit que, dès l'instant où les aides communautaires et nationales prévues ont été versées, les requérantes n'ont pas en réalité pris en charge la part à laquelle elles étaient tenues en vertu des décisions d'octroi, même en tenant compte du montant de la prime à la construction navale versée au chantier naval.

    106 Ainsi, si les concours communautaire et national sont déduits des coûts effectivement payés par les requérantes tels qu'ils ont été établis ci-dessus au point 101 [(coûts effectivement payés, prime à la construction navale comprise) moins (concours communautaire) moins (concours national)]:

    - Tramasa n'aurait pris effectivement en charge, tout au plus, qu'un montant de 66 113 181 PTA [118 046 272 PTA (voir ci-dessus point 101) - 39 283 091 PTA (concours communautaire selon annexe 5 à la requête dans l'affaire T-231/94) - 12 650 000 PTA (concours national selon annexe 5 à la requête dans l'affaire T-231/94)], soit 88,66 % du montant imposé par la décision d'octroi [74 566 909 PTA (selon annexe 5 à la requête dans l'affaire T-231/94)];

    - Makuspesca, tout au plus, un montant de 81 660 298 PTA [178 309 928 PTA (selon ci-dessus point 101) - 74 924 630 PTA (concours communautaire selon annexe 5 à la requête dans l'affaire T-234/94) - 21 725 000 PTA (concours national selon annexe 5 à la requête dans l'affaire T-234/94)], soit 67,71 % du montant imposé par la décision d'octroi [120 600 370 PTA (selon annexe 5 à la requête dans l'affaire T-234/94)];

    - Recursos Marinos, tout au plus, un montant de 159 327 435 PTA [299 128 132 PTA (selon ci-dessus point 101) - 107 570 697 PTA (concours communautaire selon annexe 5 à la requête dans l'affaire T-232/94) - 32 230 000 PTA (concours national selon annexe 5 à la requête dans l'affaire T-232/94)], soit 87,30 % du montant imposé par la décision d'octroi [182 499 303 PTA (selon annexe 5 à la requête dans l'affaire T-232/94)].

    Si IPC avait perçu le concours financier communautaire, elle n'aurait effectivement pris en charge, tout au plus, qu'un montant de 62 579 036 PTA [132 854 358 PTA (voir ci-dessus point 101) - 48 550 322 PTA (concours communautaire selon annexe 5 à la requête dans l'affaire T-233/94) - 21 725 000 PTA (concours national selon annexe 5 à la requête dans l'affaire T-233/94)], soit 42,57 % du montant imposé par la décision d'octroi [146 974 678 PTA (selon annexe 5 à la requête dans l'affaire T-233/94)].

    107 Il convient toutefois de tenir compte des sommes récupérées par les autorités espagnoles auprès des requérantes Tramasa, Makuspesca et IPC, à la suite de leurs décisions du 27 décembre 1991, de sorte que:

    - Tramasa aurait effectivement pris en charge, tout au plus, 70 214 398 PTA [66 113 181 PTA (voir ci-dessus point 106) + 4 101 217 PTA (réduction du concours national, annexe 8 au mémoire en défense dans l'affaire T-231/94)], soit 94,16 % du montant imposé [74 566 909 PTA (voir ci-dessus point 106)];

    - Makuspesca, tout au plus, 86 898 465 PTA [81 660 298 PTA (voir ci-dessus point 106) + 5 238 167 PTA (réduction du concours national, annexe 9 au mémoire en défense dans l'affaire T-234/94)], soit 72,05 % du montant imposé [120 600 370 PTA (voir ci-dessus point 106)];

    - IPC, tout au plus, 70 018 495 PTA [62 579 036 PTA (voir ci-dessus point 106) + 7 439 459 PTA (réduction du concours national, annexe 9 au mémoire en défense dans l'affaire T-233/94)], soit 47,63 % du montant imposé [146 974 678 PTA (voir ci-dessus point 106)].

    108 Ensuite, dans trois des quatre cas traités, le Tribunal dispose d'éléments permettant d'établir que le montant de l'investissement indiqué dans la demande d'octroi et repris successivement dans la décision d'octroi, dans la demande de paiement et sur la facture du chantier naval est supérieur au prix du contrat de construction indiqué par le chantier naval à la Gerencia del sector naval afin d'obtenir la prime à la construction navale. Ainsi, le prix donné à la Gerencia del sector naval est de 163 300 000 PTA pour Makuspesca (au lieu de 217 250 000 PTA), de 311 000 000 PTA pour Recursos Marinos (au lieu de 322 300 000 PTA) et de 157 200 000 PTA pour IPC (au lieu de 217 250 000 PTA) (rapport d'audit, p. 18, et annexe 3 bis au mémoire en défense dans l'affaire T-232/94). En revanche, il y a lieu de relever que, en réponse à une question écrite du Tribunal, Tramasa a indiqué qu'elle ignorait quel était le prix déclaré par le chantier naval à la Gerencia del sector naval.

    109 Se référant sur ce point aux termes mêmes du rapport d'audit (p. 18), la Commission soutient que les prix indiqués à la Gerencia del sector naval rendent compte, en fait, du coût réel de la construction des navires en cause. Cependant, en réponse à une question écrite, les requérantes ont allégué que «le coût aux fins de l'obtention de la prime à la construction navale ... ne doit pas nécessairement coïncider avec le coût déclaré par l'armateur à la Commission et à l'autorité nationale en vue d'obtenir les subsides de l'une et de l'autre». En effet, selon les requérantes, la prime à la construction navale tient uniquement compte du prix de la construction navale proprement dite, à l'exclusion de l'appareillage, des instruments de pêche et des installations frigorifiques. Les chantiers navals n'incluraient donc pas ces rubriques dans leur déclaration du prix du contrat de construction à la Gerencia del sector naval.

    110 Le Tribunal relève néanmoins que les requérantes n'ont pas jugé nécessaire de détailler le coût des différents appareillages et installations exclus de la construction navale proprement dite pour démontrer que les différences constatées se justifient par l'explication qu'elles ont fournie. En outre, compte tenu des données dont dispose le Tribunal, l'argument avancé par les requérantes est dépourvu de pertinence. En effet, alors que la différence entre les coûts déclarés respectivement à la Commission ainsi qu'à l'autorité nationale et à la Gerencia del sector naval s'élève à 11 300 000 PTA dans le cas de Recursos Marinos, cette différence grimpe à 53 950 000 PTA dans le cas de Makuspesca et même à 60 050 000 PTA dans le cas d'IPC. Pourtant, dans les deux derniers cas, le montant total de l'investissement (217 250 000 PTA) est inférieur à celui du premier cas (322 300 000 PTA). Or, les requérantes n'ont jamais établi, ni même allégué, que la proportion du coût des appareillages et installations dans le coût total des projets diminue, passant de 60 050 000 PTA à 11 300 000 PTA (soit de 27,6 % de 217 250 000 PTA à 3,5 % de 322 300 000 PTA), dès lors que le coût total du projet augmente.

    111 Le Tribunal estime que l'explication avancée par les requérantes en réponse à l'une de ses questions écrites n'est pas de nature à éliminer le doute suscité par la coïncidence apparente entre le coût déclaré à la Gerencia del sector naval (voir ci-dessus point 108) et le montant effectivement payé par les requérantes (voir ci-dessus point 106), tel que cela ressort du contenu du rapport d'audit.

    112 Dès lors, les éléments repris ci-dessus aux points 78 à 111 ayant permis d'établir que les coûts déclarés au moment des demandes de paiement, identiques au montant des investissements repris sur les décisions d'octroi, ne correspondaient ni aux coûts effectivement payés au moment des demandes de paiement ni aux coûts effectivement payés au moment de la réalisation de l'audit, il apparaît que les requérantes ont effectué de fausses déclarations dans le but d'obtenir l'octroi et le versement de concours financiers communautaires et nationaux d'un montant supérieur à celui qu'elles étaient en droit d'escompter si elles avaient, dès le départ, fait état des coûts réels de construction des navires «Tiburon III», «Makus», «Acechador» et «Escualo».

    113 En troisième lieu, en ce qui concerne le comportement adopté par les requérantes lors de la vérification effectuée sur place en mars 1990, il ressort des dossiers que la Commission a été contrainte de demander à l'administration espagnole de réaliser un audit, afin d'être en mesure de contrôler les pièces justificatives déposées par les requérantes à l'appui de leurs demandes de paiement. En effet, il est établi, et en outre non contesté, que les requérantes ne disposaient pas d'une comptabilité officielle au moment de la vérification opérée sur place par les services de la Commission. Les parties divergent toutefois quant à la question de savoir si cette absence de comptabilité officielle était délibérée ou involontaire, légale ou illégale. Le rapport d'audit a également indiqué que, au moment où il a été réalisé, «la légalisation des livres comptables officiels de ces entreprises pour l'exercice 1987, année au cours de laquelle ont été demandés la construction des navires et les concours nationaux et communautaires, a été refusée, comme l'attestent les certificats du Tribunal du district n_ 2 de Vigo, en date du 3 mai 1988. Les livres de l'exercice 1988 ont été légalisés pour la date prévue et ceux de 1989 l'ont été en dehors des délais» (p. 21).

    114 Néanmoins, le Tribunal constate que les requérantes avaient été averties en temps utile de la vérification sur place planifiée par la Commission. En effet, le 12 octobre 1989, la Commission a adressé à chaque requérante une lettre lui annonçant qu'un contrôle aurait lieu le 8 novembre 1989 (annexe 3 aux quatre mémoires en duplique). A la suite des réponses fournies par les requérantes, ce contrôle n'a pu être organisé qu'en mars 1990, époque à laquelle les navires en cause étaient amarrés au port de Vigo, lieu du siège social des requérantes. En outre, il y a lieu de relever que, dans ses courriers du 12 octobre 1989, la Commission a précisé les documents qu'il convenait de préparer en vue du contrôle annoncé, de sorte que les requérantes étaient en mesure de faire le nécessaire pour mettre leur comptabilité officielle en ordre dans cette perspective.

    115 Compte tenu de ces éléments, le Tribunal considère qu'il ne saurait être admis que les requérantes se retranchent derrière l'interprétation d'une législation nationale pour tenter de justifier une attitude qui ne répond même pas aux exigences minimales de diligence que la Commission est en droit d'exiger du bénéficiaire d'une aide communautaire. Il s'ensuit que, par leur attitude, les requérantes ont empêché la Commission d'exercer son droit d'effectuer un contrôle sur place, conformément à l'article 46, paragraphe 2, du règlement n_ 4028/86.

    116 Il ressort des éléments repris ci-dessus aux points 78 à 115 que les requérantes ont commis, en parfaite connaissance de cause, des violations manifestes de la réglementation en vigueur, consistant notamment à présenter à plusieurs reprises des déclarations ne correspondant pas à la réalité, comme l'ont, à juste titre, souligné les décisions litigieuses.

    117 A titre subsidiaire, le Tribunal tient à rappeler que la réglementation communautaire a élaboré un système de traitement des demandes de concours financiers en deux étapes. La première prend place lors de l'examen de la demande d'octroi de l'aide et la seconde lors de la demande de paiement de l'aide octroyée. Afin d'assurer le fonctionnement de ce système de subvention, la Commission a organisé son contrôle par rapport à ces deux étapes, sans toutefois le mettre en oeuvre de façon systématique eu égard au nombre de projets traités. Par conséquent, le système requiert que les éléments avancés par le bénéficiaire d'une subvention existent et soient contrôlables lors de ces deux étapes. Comme l'a indiqué à juste titre la Commission (voir, notamment, mémoire en défense dans l'affaire T-231/94, p. 9 et 10), celle-ci ne saurait dès lors être tenue de vérifier la réalité de prétendus paiements qui n'existent pas et ne sont pas contrôlables au moment de la demande de paiement du concours, comme ceux que les requérantes prétendent avoir effectués au moyen de traites. Il convient d'ajouter qu'il ne revient pas non plus au Tribunal de procéder au contrôle des prétendus paiements effectués postérieurement à la demande de paiement du concours.

    118 Il convient également de relever que les données fournies par les requérantes concernant des dépenses effectivement acquittées à une date postérieure aux demandes de paiement des concours ne peuvent plus faire l'objet d'un contrôle semblable à celui qui est prévu par la réglementation communautaire, a fortiori lorsque les bénéficiaires des aides communautaires n'ont pas fait preuve de la diligence la plus élémentaire lors des vérifications sur place auxquelles la Commission a procédé (voir ci-dessus points 113 à 115).

    119 Par conséquent, compte tenu de la jurisprudence citée ci-dessus au point 76, le Tribunal considère, d'une part, que les requérantes ne sauraient se prévaloir d'une atteinte à une prétendue confiance légitime. D'autre part, il estime que, si l'écoulement d'un délai important durant lequel la Commission n'entreprend aucune démarche à l'égard d'une entreprise et si l'adoption d'une mesure affectant la situation de celle-ci au terme d'un tel délai sont éventuellement de nature à violer le principe de sécurité juridique, l'importance du critère tiré de la longueur du délai doit être nuancée dans les cas d'espèce. Ainsi, dès lors qu'il apparaît que les requérantes ont délibérément adopté une attitude qui transgresse la réglementation en vigueur, l'écoulement d'un délai de 16 mois, voire de 23 mois, durant lequel aucune démarche extérieure n'est entreprise par la Commission ne saurait être qualifié de délai déraisonnable.

    120 Il importe également de relever que le maintien des aides octroyées aux requérantes, voire d'ores et déjà versées, alors que l'octroi et le paiement de ces aides sont entachés d'irrégularités manifestes, est de nature à porter atteinte à l'égalité de traitement de toutes les demandes qui sont soumises à la Commission dans le cadre des programmes de subvention communautaire à la construction de nouveaux navires de pêche.

    121 Il résulte de l'ensemble des éléments qui précèdent que le premier moyen doit être rejeté.

    Deuxième moyen: à titre subsidiaire, violation des formes substantielles

    122 A titre préliminaire, le Tribunal prend acte du fait que, lors de l'audience, les requérantes ont renoncé à la branche du moyen tirée de la violation de la forme substantielle de la consultation du comité permanent des structures de la pêche prévue à l'article 47 du règlement n_ 4028/86, qu'elles ont présentée dans le cadre de la procédure écrite.

    - Arguments des parties

    123 Les requérantes articulent ce deuxième moyen en deux branches. Tout d'abord, les requérantes soutiennent que la Commission n'a pas avisé l'État membre concerné de l'engagement d'une procédure de suppression en lui donnant l'occasion de prendre position, comme le requiert le premier tiret de l'article 7 du règlement n_ 1116/88. Cette formalité serait d'autant plus importante que l'article 45, paragraphe 2, du règlement n_ 4028/86 prévoit que les conséquences financières des irrégularités ou négligences sont supportées par l'État membre si elles sont imputables aux administrations ou organismes de celui-ci et que, en l'espèce, l'avis de l'administration espagnole sur la suppression de l'aide est différent de celui de la Commission. Les requérantes ajoutent au stade de la réplique qu'il ne ressort d'aucun document présenté par la Commission que les formalités relatives à l'«avis» de l'État membre ont été remplies.

    124 Ensuite, les requérantes soutiennent que les décisions litigieuses ont été adoptées en violation de l'article 190 du traité, dans la mesure où leur motivation est insuffisante compte tenu de la longueur du délai d'adoption et identique pour les quatre décisions, alors que le seul lien entre les dossiers concerne un actionnaire commun, que les faits justifiant la suppression sont différents dans chaque cas selon la Commission et que l'autorité espagnole compétente aboutit à une conclusion différente pour chacun des dossiers.

    125 Cette motivation serait, en outre, vague et imprécise. D'une part, les reproches adressés aux requérantes quant aux différences relevées entre le montant de l'investissement déclaré dans les différents projets et le montant effectivement payé ne seraient pas chiffrés. D'autre part, les irrégularités prétendument constatées par la Commission ne seraient pas précisées, de sorte qu'il serait impossible de savoir si les primes à la construction navale doivent ou non être considérées comme une partie du prix payé et si la Commission a tenu compte des paiements effectués au moyen de traites. A cet égard, les requérantes rappellent que, si la Commission n'est pas tenue de reproduire toutes les données de fait et de droit qui l'ont amenée à adopter sa décision, la motivation doit à tout le moins en faire apparaître les éléments indispensables. Elles ajoutent encore que, dans les décisions litigieuses, la Commission parle tout d'abord d'«irrégularités» et, ensuite, de «contrevérités délibérées et substantielles», sans expliquer davantage les raisons qui justifieraient cette modification.

    126 Selon les requérantes, la motivation contient aussi un fait inexact et comporte une appréciation injustifiée d'autres faits. Ainsi, d'une part, les décisions litigieuses font état d'une attitude obstructive des requérantes lors de la vérification sur place en mars 1990, alors que leurs livres comptables n'existaient pas, ne devaient pas exister en vertu de la législation comptable espagnole et que les inspecteurs ne l'ont même pas mentionné dans leur rapport et, d'autre part, elles portent des accusations de contrevérités délibérées et substantielles sans en apporter la moindre preuve.

    127 Enfin, les décisions litigieuses seraient affectées d'un défaut de motivation en ce qu'elles n'indiqueraient pas le fondement légal qui justifie leur adoption, même si elles font référence à un «manquement grave aux conditions d'octroi de la subvention».

    128 La Commission répond, tout d'abord, que les autorités espagnoles ont été informées de la procédure de suppression des aides et, le cas échéant, de son intention d'en ordonner le remboursement et que, suite aux contacts établis, ces mêmes autorités ont présenté leurs observations à la Commission, en décembre 1992 et en mars 1993. Par conséquent, elle estime, d'une part, qu'elle a rempli son obligation d'informer l'État membre et, d'autre part, que celui-ci a pris position. Le fait que l'avis de l'État membre ne coïncide pas avec l'opinion présentée par la Commission ne serait pas pertinent et ne pourrait pas empêcher cette dernière de faire respecter la réglementation communautaire et d'appliquer ainsi sa propre appréciation aux faits de l'espèce, même si elle parvient à un résultat différent de celui prôné par l'État membre. Au stade de la duplique, la Commission soutient que lorsque l'administration nationale compétente en matière de pêche est également chargée de transmettre les pièces justificatives, comme c'est le cas du secrétariat général de la pêche espagnol, la notification et la consultation visées à l'article 7 du règlement n_ 1116/88 peuvent se faire en un seul et même acte.

    129 La Commission soutient, ensuite, que les décisions litigieuses sont suffisamment motivées. Elle estime, en premier lieu, que les requérantes confondent des arguments de forme liés à la motivation et des arguments de fond liés à la prétendue inexactitude de certains faits. En deuxième lieu, la Commission rappelle que, selon la jurisprudence de la Cour (arrêts du 25 octobre 1984, Rijksuniversiteit te Groningen, 185/83, Rec. p. 3623, du 15 mai 1985, Patrinos/CES, 3/84, Rec. p. 1421, du 19 septembre 1985, Hoogovens Groep/Commission, 172/83 et 226/83, Rec. p. 2831, et du 26 juin 1986, Nicolet Instrument, 203/85, Rec. p. 2049), l'étendue de l'obligation de motivation s'apprécie en fonction du contexte dans lequel s'inscrit la décision et, par conséquent, que les éléments qui ont déjà été exposés aux requérantes ne doivent pas à nouveau être répétés dans la décision. La Commission soutient, en troisième lieu, que les différences constatées entre les montants déclarés et les montants effectivement payés ont été précisément chiffrées dans le rapport d'audit auquel les décisions litigieuses renvoient explicitement. Elle souligne, à cet égard, que le fait que les décisions reprennent dans leur texte les données chiffrées relatives aux irrégularités ou renvoient au rapport d'audit communiqué aux requérantes n'est qu'une option technique qui n'a rien à voir avec le respect des deux exigences auxquelles doit répondre la motivation, à savoir permettre aux intéressés de connaître les motifs de l'acte et au Tribunal d'exercer son contrôle.

    130 En quatrième lieu, la Commission considère que l'argument relatif à l'absence de référence à l'article 44, paragraphe 1, du règlement n_ 4028/86 se confond avec le troisième moyen. Elle renvoie dès lors aux développements qu'elle y consacre.

    - Appréciation du Tribunal

    131 La première branche du deuxième moyen amène le Tribunal à examiner si les démarches entreprises par la Commission à l'égard des autorités espagnoles en novembre 1992 et les observations fournies par celles-ci en décembre 1992 et en mars 1993 (voir ci-dessus point 31) répondent aux exigences de l'article 7 du règlement n_ 1116/88.

    132 En vertu du premier tiret de cette disposition, la Commission devait aviser l'Espagne de son intention d'engager la procédure de suppression des aides et lui permettre de prendre position à ce sujet. En vertu du deuxième tiret, elle devait consulter l'autorité nationale espagnole compétente chargée de transmettre les pièces justificatives.

    133 Ni le premier tiret de l'article 7 du règlement n_ 1116/88 ni aucune autre disposition de ce règlement ne précisent quelle est l'autorité de l'État membre concerné qu'il convient d'aviser. Il ressort toutefois du libellé de l'article 7 que les premier et deuxième tirets constituent deux étapes distinctes. Selon les quatrième et cinquième considérants du règlement n_ 1116/88, l'objet de ces deux démarches est également différent. En effet, l'objet de la communication à l'État membre concerné est de prendre connaissance de sa position et d'assurer l'efficacité des éventuels contrôles effectués par la Commission ou à l'initiative de cette dernière auprès des bénéficiaires intéressés, alors que la consultation de l'autorité nationale compétente a pour objet de vérifier auprès de celle-ci la régularité des formalités accomplies et de lui demander éventuellement de transmettre de nouvelles pièces justificatives.

    134 En outre, aucune disposition ne permet de déduire de l'article 7 du règlement n_ 1116/88, d'une part, que les organes étatiques auxquels font référence ses deux premiers tirets doivent être distincts et, d'autre part, que l'autorité nationale compétente pour transmettre les pièces justificatives ne pourrait pas également être l'autorité nationale chargée de faire part à la Commission de l'avis de l'État membre concerné. L'article 7 du règlement n_ 1116/88 n'organise donc aucune répartition exclusive des compétences entre différents organes du même État membre.

    135 Or, d'une part, dans les quatre cas, le Tribunal constate que la Commission a interrogé, en novembre 1992, le secrétariat général de la pêche maritime du ministère de l'Agriculture, de la Pêche et de l'Alimentation espagnol sur l'éventuelle suppression des concours communautaires. Le 16 décembre 1992, le directeur général des structures de la pêche du secrétariat général de la pêche maritime lui adressa un courrier à ce sujet. Le 9 mars 1993, ce même directeur général communiqua de nouvelles observations à la Commission. Par ailleurs, celle-ci a envoyé à l'administration espagnole en cause une copie des lettres adressées aux requérantes le 8 juin 1993.

    136 D'autre part, il ressort des dossiers que les contacts que la Commission a entretenus avec l'Espagne ont toujours eu comme intermédiaire le directeur général des structures de la pêche. Il paraît donc logique que la Commission avise l'Espagne par le biais de cet intermédiaire privilégié et consulte également ce dernier en tant qu'autorité chargée de transmettre les pièces justificatives, puisqu'il s'agit de la seule autorité nationale intéressée aux dossiers.

    137 En tout état de cause, il convient de relever que les requérantes n'ont pas précisé quelles auraient dû être, selon elles, les autorités de l'État membre concerné que la Commission devait aviser pour agir conformément au prescrit de l'article 7 du règlement n_ 1116/88. Elles n'ont pas non plus soutenu que le directeur général des structures de la pêche n'était pas habilité à agir au nom de l'Espagne dans ces quatre affaires.

    138 Par conséquent, le Tribunal considère que, dès lors que l'État membre a été avisé et a pu prendre position et que l'autorité nationale compétente chargée de transmettre les pièces justificatives a été consultée, il est satisfait aux deux premiers tirets de l'article 7 du règlement n_ 1116/88, même si, organiquement, l'autorité administrative nationale qui intervient est la même dans les deux cas. Il convient dès lors de rejeter la première branche du deuxième moyen.

    139 En ce qui concerne la seconde branche du deuxième moyen tirée de la violation de l'article 190, le Tribunal relève, à titre liminaire, qu'il convient de reporter l'examen de la prétendue insuffisance de fondement légal des décisions litigieuses dans le règlement n_ 4028/86 à l'appréciation du troisième moyen qui est précisément consacré à cette question.

    140 Quant aux autres arguments avancés par les requérantes, il importe de rappeler qu'il est de jurisprudence constante que, d'une part, en vertu de l'article 190 du traité, la motivation d'un acte doit faire apparaître, d'une façon claire et non équivoque, le raisonnement de l'autorité communautaire, auteur de l'acte incriminé, de façon à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et au juge communautaire d'exercer son contrôle et, d'autre part, la portée de l'obligation de motivation s'apprécie en fonction de son contexte (voir arrêts de la Cour du 14 février 1990, Delacre e.a./Commission, C-350/88, Rec. p. I-395, point 15, et du 23 février 1978, An Bord Bainne, 92/77, Rec. p. 497, points 36 et 37).

    141 Il convient dès lors d'examiner si, dans les cas d'espèce, les reproches formulés par les requérantes à l'égard de la motivation des décisions litigieuses permettent ou non de démontrer que cette motivation ne fait pas apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de la Commission.

    142 A cet égard, il convient de rappeler que les décisions litigieuses exposent les trois raisons majeures qui justifient, selon la Commission, la suppression des concours financiers communautaires et, le cas échéant, leur remboursement, comme le Tribunal l'a relevé au point 77 ci-dessus. En outre, les décisions litigieuses se réfèrent expressément au rapport d'audit et indiquent qu'il a été transmis aux requérantes et au secrétariat général de la pêche maritime espagnol.

    143 Le Tribunal estime dès lors que la motivation des décisions litigieuses fait apparaître clairement et de façon non équivoque le raisonnement suivi par la Commission pour décider de supprimer les quatre concours financiers communautaires.

    144 Cette motivation ne saurait pas non plus être considérée comme insuffisante en raison du fait qu'elle ne reprend pas les données chiffrées permettant d'établir l'existence des irrégularités reprochées aux requérantes. En effet, le renvoi exprès au rapport d'audit dont les requérantes disposent doit être considéré comme suffisant à cet égard. En outre, il convient de préciser que l'absence de référence au sort réservé à la prime nationale à la construction navale et aux traites n'est pas de nature à dissimuler le raisonnement de la Commission.

    145 De plus, l'identité formelle des motifs dans les quatre cas d'espèce n'affecte pas le caractère suffisant de la motivation, puisque, d'une part, ces motifs renvoient à des données précises et particulières pour chaque requérante et que, d'autre part, le comportement adopté par les requérantes dans chaque affaire peut être qualifié de semblable, voire d'identique.

    146 Par ailleurs, en ce qui concerne la prétendue absence de référence au fondement légal des décisions litigieuses, le Tribunal constate que celles-ci se réfèrent explicitement aux règlements applicables à la matière (règlements n_ 4028/86 et n_ 1116/88), avant de mentionner plus particulièrement une violation de l'article 46, paragraphe 2, du règlement n_ 4028/86 et des conditions d'octroi de l'aide. Par conséquent, même si le texte des décisions litigieuses ne mentionne pas l'article 44 du règlement n_ 4028/86 en tant que tel, le Tribunal considère que, compte tenu des circonstances, la référence à la réglementation communautaire, et notamment au règlement n_ 4028/86, est, à cet égard, suffisante.

    147 L'absence de mention de cette disposition n'est donc pas de nature à dissimuler ou à rendre confus et équivoque le raisonnement de la Commission. Le Tribunal tient également à rappeler que le motif tiré de l'attitude obstructive des requérantes lors de la vérification sur place n'est pas non plus entaché d'une quelconque erreur d'appréciation, comme il l'a indiqué ci-dessus aux points 113 à 115. Pour l'ensemble de ces motifs, la seconde branche du deuxième moyen doit être rejetée.

    148 Au surplus, le Tribunal relève que, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, le rapport d'audit contient un nombre suffisant d'éléments permettant de démontrer que les documents remis par les requérantes dans le cadre de l'octroi et du paiement des concours communautaires contiennent des irrégularités qui peuvent être qualifiées de contrevérités délibérées et essentielles (voir ci-dessus points 77 à 114). En revanche, il importe de relever que les requérantes n'ont pas pu justifier, au moyen de documents probants, les différences relevées dans le rapport d'audit entre les montants déclarés et les montants effectivement payés.

    Troisième et quatrième moyens: à titre subsidiaire et complémentaire, violation du règlement n_ 4028/86 et violation du principe de proportionnalité

    - Arguments des parties

    149 Le troisième moyen correspond en partie à l'un des arguments présentés dans la seconde branche du deuxième moyen au titre de la violation de l'obligation de motivation des décisions litigieuses et, en partie également, au quatrième moyen. Dès lors, il y a lieu d'examiner conjointement les troisième et quatrième moyens avancés à l'appui des recours en annulation.

    150 Ainsi, d'une part, les requérantes reprochent à la Commission de ne pas fonder ses décisions sur l'un des cas visés à l'article 44, paragraphe 1, du règlement n_ 4028/86, qui seraient seuls à pouvoir justifier l'adoption d'une décision de suppression d'un concours financier communautaire. La violation de l'article 46 du règlement n_ 4028/86 invoquée par les décisions litigieuses ne pourrait pas être sanctionnée par une décision de suppression et l'absence de fondement des décisions d'octroi et de paiement ne pourrait entraîner que l'annulation de celles-ci. Au stade de la réplique, les requérantes ajoutent encore que la suppression des concours serait une sanction administrative indirecte non prévue par la réglementation communautaire, dès lors que la Commission irait au-delà des pouvoirs qui lui sont conférés par le règlement n_ 4028/86.

    151 D'autre part, les requérantes prétendent que, même s'il fallait considérer que les décisions litigieuses se fondent sur l'article 44 du règlement n_ 4028/86, les irrégularités alléguées ne permettraient pas, sur la base de cette disposition, de supprimer la totalité des aides octroyées sans entraîner une violation du principe de proportionnalité. Selon les requérantes, la suppression des aides constitue la sanction maximale prévue à l'article 44, paragraphe 1, du règlement n_ 4028/86, qui doit être réservée au dernier cas visé par cette disposition, à savoir, celui où le navire n'est pas construit. Or, selon les requérantes, les quatre navires en cause ont été construits dans le respect des spécifications des différents projets et ces quatre navires sont d'ailleurs toujours en exploitation à ce jour. La réaction de la Commission est par conséquent disproportionnée et pourrait même être considérée comme contraire au principe de non-discrimination, si l'on pouvait démontrer que la Commission n'a pas appliqué de mesures identiques aux autres projets cités dans le rapport de la Cour des comptes des Communautés européennes n_ 3/93, consacré à l'application du règlement n_ 4028/86, qui mentionne des infractions et des irrégularités beaucoup plus manifestes que celles alléguées à l'égard des requérantes.

    152 Les requérantes soutiennent aussi que la jurisprudence de la Cour [arrêts du 24 septembre 1985, Man (Sugar), 181/84, Rec. p. 2889, et du 27 novembre 1986, Maas, 21/85, Rec. p. 3537] fait une différence entre les sanctions applicables, selon qu'elles portent sur l'inobservation d'une obligation principale ou sur l'inobservation d'une obligation accessoire. En l'espèce, l'obligation principale consistant à construire un navire, son inobservation serait seule susceptible de donner lieu à l'application de la sanction maximale qui consiste à supprimer l'aide octroyée. Le fait d'appliquer cette sanction à de prétendues irrégularités administratives qui ne constituent qu'une violation d'une obligation accessoire serait constitutif d'une violation du principe de proportionnalité.

    153 La Commission répond, en premier lieu, que les décisions litigieuses se fondent clairement sur l'article 44, paragraphe 1, deuxième tiret, du règlement n_ 4028/86. En outre, la Commission se réfère au principe général de la répétition de l'indu, qui trouve à s'appliquer lorsque le montant présenté dans le projet initial et dans la demande de paiement est supérieur au montant réellement dépensé, ce qui serait le cas en l'espèce. Selon la Commission, suivre la thèse défendue par les requérantes reviendrait à empêcher la Commission de récupérer une subvention obtenue frauduleusement au moyen de fausses déclarations, dès lors que ce cas ne serait pas explicitement prévu à l'article 44 du règlement n_ 4028/86.

    154 La Commission fait valoir, en second lieu, que les requérantes ont faussé, de façon délibérée, les montants des investissements pour lesquels les aides ont été demandées en présentant des documents ne correspondant pas à la réalité, afin d'obtenir une subvention supérieure à celle qui serait justifiée et à un moment antérieur à celui qui serait justifié. Face à un tel comportement, une simple réduction des aides, en proportion des incorrections constatées, constitue une invitation à la fraude. En effet, compte tenu de l'impossibilité de contrôler toutes les demandes présentées, l'exactitude des déclarations est un élément essentiel du système des concours financiers communautaires. La suppression totale de ceux-ci constitue dès lors la seule réponse appropriée et nécessaire pour réaliser l'objectif visé, à savoir que seules les aides justifiées soient accordées et payées. En outre, la Commission souligne qu'elle est tenue par l'obligation de garantir l'égalité de traitement des demandes de concours qui lui sont adressées, puisque la somme de ces demandes dépasse dans une large mesure le budget qu'elle peut y affecter.

    - Appréciation du Tribunal

    155 En premier lieu, il importe d'examiner la portée de l'article 44, paragraphe 1, du règlement n_ 4028/86. A cet égard, il convient de rappeler que cette disposition prévoit notamment que la Commission peut décider de supprimer un concours communautaire «si certaines conditions imposées ne sont pas remplies». Cette disposition ne limite pas les types de conditions à prendre en considération, puisqu'elle ne fournit aucune précision en ce qui concerne la nature des conditions visées. De plus, il est explicitement fait référence aux «conditions financières et autres imposées par chaque projet» dans la première partie de cette même disposition. Toutes les conditions, qu'elles soient techniques, financières ou relatives au délai, sont donc incluses dans cette expression.

    156 Or, il y a lieu de relever que la Commission a adopté les décisions litigieuses notamment parce qu'elle reprochait aux requérantes de ne pas avoir respecté les conditions d'octroi et de paiement des concours, en d'autres mots les conditions financières. Par conséquent, il ressort des décisions litigieuses que la Commission les a, à juste titre, fondées sur l'article 44, paragraphe 1, du règlement n_ 4028/86.

    157 Il y a également lieu de relever que le Tribunal ne saurait faire droit à l'argument des requérantes selon lequel seule l'annulation des décisions d'octroi et de paiement pouvait être prononcée, dès lors que la Commission reprochait aux requérantes la violation des conditions d'octroi et de paiement des concours. En effet, il convient de constater que le règlement n_ 4028/86 ne contient aucune disposition particulière prévoyant l'annulation des décisions d'octroi et de paiement des concours communautaires, lorsqu'il s'avère que ces dernières ont été adoptées sur la base d'indications inexactes.

    158 Il s'ensuit que la solution de l'annulation proposée par les requérantes ne permet pas de répondre à l'objection soulevée par les requérantes, selon laquelle les décisions litigieuses n'ont pas de fondement légal et ne pouvaient dès lors pas être adoptées. En outre, il y a lieu de relever que, si la Commission n'était pas en mesure de supprimer les aides octroyées sur la base d'indications inexactes, étant donné qu'il n'existe pas de procédure particulière d'annulation dans de telles hypothèses, les comportements irréguliers des bénéficiaires de subventions communautaires ne pourraient jamais être sanctionnés. En tout état de cause, le Tribunal tient à faire remarquer que, dans le chef du bénéficiaire d'un concours financier communautaire, le résultat de la suppression d'un concours est identique à celui de l'annulation de la décision d'octroi du concours.

    159 Enfin, il ne saurait pas non plus être soutenu que l'article 44, paragraphe 1, du règlement n_ 4028/86 réserve la sanction de la suppression de l'aide au seul cas où le projet n'aurait pas été réalisé. En effet, cette disposition ne prévoit pas que les sanctions de suspension, de réduction ou de suppression d'un concours communautaire s'appliquent exclusivement à l'une ou l'autre des hypothèses qu'elle envisage. Il n'y a donc pas lieu d'opérer une distinction concernant le degré de la sanction applicable aux situations visées par la disposition, dès lors qu'elle ne la prévoit pas.

    160 En second lieu, le Tribunal doit se prononcer sur la prétendue violation du principe de proportionnalité. Tout d'abord, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, le Tribunal considère que, compte tenu de la nature même des concours financiers accordés par la Communauté, l'obligation de respecter les conditions financières de l'investissement telles qu'indiquées dans la décision d'octroi constitue, au même titre que l'obligation d'exécution matérielle de l'investissement, l'un des engagements essentiels du bénéficiaire et, de ce fait, conditionne l'attribution du concours communautaire.

    161 Ensuite, le Tribunal relève que le système de subvention élaboré par la réglementation communautaire repose notamment sur l'exécution par le bénéficiaire d'une série d'obligations lui donnant droit à la perception du concours prévu. Si le bénéficiaire n'accomplit pas toutes ces obligations, l'article 44, paragraphe 1, du règlement n_ 4028/86 autorise la Commission à reconsidérer l'étendue des obligations qu'elle assume en vertu de la décision d'octroi. Or, dans les décisions litigieuses, la Commission a indiqué que «le caractère fallacieux, délibéré et substantiel, dans les déclarations du bénéficiaire, lesquelles constituent la cause de l'octroi et du paiement du concours financier, a pour effet de priver de fondement la décision d'octroi et le paiement (et) que les irrégularités décrites dans le (point 77 ci-dessus) et qui consistent dans le dépôt de déclarations et la production de documents comptables ne correspondant pas à la réalité sont également constitutives d'une violation grave des conditions d'octroi du concours financier et d'obtention du paiement, prévues par la réglementation communautaire, en particulier les règlements n_ 4028/86, précité, n_ 970/87, portant mesures transitoires et modalités d'application du règlement n_ 4028/86 du Conseil en ce qui concerne les actions de restructuration et de renouvellement de la flotte de pêche, de développement de l'aquaculture et d'aménagement de la bande côtière, en particulier son article premier et ses annexes, au coût des investissements, et n_ 1116/88, relatif aux modalités d'exécution des décisions de concours pour des projets concernant des actions communautaires pour l'amélioration et l'adaptation des structures du secteur de la pêche, de l'aquaculture et de l'aménagement de la bande côtière, en particulier ses articles 3, 4 et 5 et ses annexes relatives à la demande et la justification des paiements et dans la décision d'octroi». La Commission a dès lors considéré que, «dans ces conditions, la suppression totale du concours financier communautaire est une mesure proportionnée à la gravité des infractions».

    162 Le Tribunal constate qu'il ressort de l'examen du premier moyen des présents recours que le montant déclaré de l'investissement au moment de la demande de paiement ne correspond pas au montant effectivement payé à ce moment-là (voir ci-dessus points 78 à 96), que le montant déclaré de l'investissement au moment de la demande de paiement ne correspond pas non plus au coût effectivement payé au moment où l'audit a été réalisé (voir ci-dessus points 97 à 111) et que les requérantes ont manqué de la diligence la plus élémentaire lors de la vérification sur place en mars 1990 (voir ci-dessus points 113 à 115).

    163 Par conséquent, le Tribunal considère que, dans les cas d'espèce, les manquements aux obligations incombant aux requérantes étaient si importants que la Commission a pu raisonnablement estimer que toute sanction autre que la suppression, parmi celles qui sont envisagées à l'article 44, paragraphe 1, du règlement n_ 4028/86, risquait de constituer une invitation à la fraude en ce que les candidats bénéficiaires seraient tentés de grossir artificiellement le montant de l'investissement qu'ils présentent dans leur demande d'octroi afin d'obtenir un concours financier communautaire plus important sous peine seulement de voir ce dernier réduit à concurrence de la part correspondant à la surévaluation de l'investissement projeté dans la demande d'octroi. Il s'ensuit que les violations alléguées du principe de proportionnalité ne sont pas établies.

    164 Enfin, le Tribunal ne saurait accueillir l'argument des requérantes selon lequel la Commission a violé le principe de non-discrimination. En effet, il convient tout d'abord de relever que l'examen des deux premiers moyens a permis d'établir que les requérantes ont commis de graves irrégularités dans l'application de la réglementation communautaire, de sorte qu'elles ne sauraient se prévaloir du fait d'avoir commis de prétendues irrégularités mineures pour soutenir que le principe de non-discrimination a été violé. Ensuite, il y a lieu de rappeler que, pour qu'il y ait violation de ce principe, il faut que des situations comparables aient été traitées de manière différente, sans justifications objectives. Or, dans les cas d'espèce, il y a lieu de relever que les requérantes n'ont pas indiqué en quoi leurs situations seraient comparables à celles des bénéficiaires de concours financiers communautaires visés dans le rapport de la Cour des comptes qu'elles citent. Enfin, il ne revient pas au Tribunal de procéder à un examen semblable à celui auquel il a soumis les cas d'espèce pour déterminer, d'une part, si les reproches formulés de façon imprécise dans les cas invoqués par les requérantes sont ou non comparables aux irrégularités que ces dernières ont commises, et, d'autre part, si de tels reproches sont fondés.

    165 Pour l'ensemble de ces raisons, les troisième et quatrième moyens doivent être rejetés.

    Cinquième moyen: à titre subsidiaire et complémentaire, détournement de pouvoir

    - Arguments des parties

    166 Selon les requérantes, la Commission aurait commis un détournement de pouvoir en essayant, au moyen des décisions litigieuses, de mettre en oeuvre une recommandation présentée par la Cour des comptes dans son rapport n_ 3/93, visant à empêcher la revente rapide des navires construits à l'aide de fonds communautaires, qu'ils soient revendus en dehors ou au sein même de la Communauté. Or, les requérantes soutiennent que la sanction de la vente à l'intérieur de la Communauté, parfaitement licite au regard de la réglementation applicable, ne peut se concevoir que par l'adoption de nouvelles mesures législatives modifiant le régime en vigueur.

    167 La Commission considère que les requérantes n'avancent aucun argument susceptible d'étayer leurs allégations à cet égard.

    - Appréciation du Tribunal

    168 Il convient de rappeler que la notion de détournement de pouvoir a une portée précise en droit communautaire et qu'elle vise la situation où une autorité administrative use de ses pouvoirs dans un but autre que celui en vue duquel ils lui ont été conférés. Il est, à cet égard, de jurisprudence constante qu'une décision n'est entachée de détournement de pouvoir que si elle apparaît, sur la base d'indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été prise pour atteindre des fins autres que celles excipées (voir l'arrêt du Tribunal du 26 novembre 1991, Williams/Cour des comptes, T-146/89, Rec. p. II-1293, points 87 et 88, ainsi que la jurisprudence citée).

    169 Or, dans les cas d'espèce, les éléments avancés par les requérantes à l'appui de ce cinquième moyen ne permettent pas d'établir que la Commission a poursuivi un but autre que celui de sanctionner les irrégularités constatées dans le cadre du système de subvention communautaire à la construction d'un navire de pêche. Il ne saurait être déduit du fait que toutes les requérantes ont revendu leur navire et de la circonstance que la Cour des comptes propose, dans un rapport annuel, un aménagement de la réglementation en cause pour éviter de telles reventes, que la Commission a détourné les pouvoirs qui lui ont été conférés par ladite réglementation pour sanctionner ce type de vente.

    170 Le Tribunal considère dès lors que les requérantes n'ont pas démontré que le but réellement poursuivi par la Commission était de sanctionner la vente des navires dont la construction a bénéficié de l'aide octroyée par la Communauté. Pour cette raison, le cinquième moyen doit être rejeté.

    171 Il s'ensuit que les recours en annulation doivent être rejetés dans leur intégralité.

    Quant au recours en indemnité

    Moyens et arguments des parties

    Sur la recevabilité

    172 La Commission soulève une exception d'irrecevabilité à l'encontre d'une partie de l'objet du recours, en ce qu'il postule l'indemnisation d'un préjudice correspondant précisément au montant du concours financier communautaire accordé par la décision C(89) 545/01 du 26 avril 1989. Elle reproche à la requérante IPC d'avoir commis un détournement de procédure en introduisant un recours en indemnité sur la base des articles 178 et 215, deuxième alinéa, du traité alors que les effets poursuivis sont identiques à ceux qu'elle pourrait obtenir dans le cadre d'un recours en carence sur la base de l'article 175, troisième alinéa, du traité.

    173 La requérante IPC conteste l'irrecevabilité de cette partie de l'objet de son recours en affirmant, d'une part, que les effets juridiques d'un recours en carence et d'un recours en indemnité ne sont pas identiques dans le cas d'espèce et, d'autre part, que le paiement du concours financier communautaire ne constitue pas une décision autonome de la décision d'octroi du concours financier adoptée par la Commission le 26 avril 1989. Selon la requérante IPC, le paiement d'un concours financier communautaire accordé par la Commission ne réunit pas les conditions formelles permettant d'établir qu'il s'agit d'une décision et ne constitue qu'un simple acte d'exécution contre lequel un recours en carence ne peut pas être introduit.

    Sur le fond

    - Le comportement illégal

    174 La requérante IPC soutient que la Commission s'est comportée de façon illégale et fautive dans le cadre de la procédure administrative antérieure à l'introduction du présent recours. En premier lieu, la requérante IPC reproche à la Commission de ne pas avoir adopté, durant la période s'écoulant du 31 mars 1990 (vérification sur place) au 8 juin 1993 (lettre de la Commission), une attitude conforme à la réglementation communautaire applicable, en vertu de laquelle la Commission était tenue soit de payer le montant du concours financier communautaire, soit de décider de suspendre, de réduire ou de supprimer le paiement de ce dernier. Or, la requérante IPC constate que durant ce délai, la Commission n'a ni payé le concours financier communautaire ni entamé l'une des procédures visées à l'article 44 du règlement n_ 4028/86.

    175 Selon la requérante IPC, l'attitude adoptée par la Commission aurait en fait abouti à étendre de façon injustifiée le délai d'instruction du dossier (voir les arrêts de la Cour du 25 mai 1978, HNL/Conseil et Commission, 83/76, 4/77, 15/77 et 40/77, Rec. p. 1209, et du 26 juin 1990, Sofrimport/Commission, C-152/88, Rec. p. I-2477) et à violer un certain nombre de principes invoqués dans le cadre de son recours en annulation examiné ci-dessus.

    176 La requérante IPC conteste avoir fait obstacle à l'action de la Commission lors de la visite de ses agents sur les lieux en mars 1990 et soutient qu'une éventuelle obstruction lors de la vérification sur place ne saurait être la cause principale du fait que, trois années plus tard, la Commission n'ait pas encore payé le concours financier communautaire, ni notifié à la requérante IPC l'ouverture de l'une des procédures prévues à l'article 44 du règlement n_ 4028/86.

    177 Elle rejette, en outre, l'explication avancée par la Commission selon laquelle son comportement résulterait d'une décision de «gel à titre provisoire» du paiement du concours financier communautaire, puisque cette procédure de «gel à titre provisoire» ne repose sur aucune base juridique. Selon la requérante IPC, admettre la thèse de la Commission sur ce point reviendrait à priver de tout effet utile la procédure de suspension prévue à l'article 44 du règlement n_ 4028/86.

    178 En second lieu, en ce qui concerne la procédure de suppression du concours engagée par la lettre de la Commission du 12 octobre 1993, d'une part, la requérante IPC soutient que la Commission a commis une erreur manifeste d'appréciation en se basant sur les résultats de l'audit, reprenant, à cet égard, les arguments développés par ailleurs dans le cadre de son recours en annulation examiné ci-dessus.

    179 D'autre part, la requérante IPC considère qu'en lui refusant l'accès au dossier la Commission ne lui a pas accordé l'audition à laquelle elle a droit. A cet égard, la requérante IPC allègue qu'elle n'a pu accéder au dossier qu'après l'introduction du présent recours et que le dossier qui lui a été présenté n'aurait pas été complet. Selon la requérante IPC, il s'agit d'une atteinte au droit de tout administré d'examiner et d'obtenir copie des documents de son dossier qui n'ont pas un caractère confidentiel, atteinte qui aurait été condamnée par le Tribunal dans l'arrêt du 1er avril 1993, BPB Industries et British Gypsum/Commission (T-65/89, Rec. p. II-389, point 30). En outre, tous les documents qui lui ont été présentés par la Commission après l'audition qu'elle lui a accordée se sont révélés être non confidentiels, de telle sorte qu'elle estime qu'il s'agit d'une violation grave des droits de la défense. La requérante IPC fait enfin remarquer que certains documents produits par la Commission dans le cadre de la présente procédure ne figuraient pas dans le dossier qu'elle lui a présenté lors de son audition.

    180 Enfin, la requérante IPC souligne que l'administration espagnole a adopté une attitude différente de celle de la Commission, qui, en outre, aurait clairement indiqué à cette dernière que la requérante IPC était en droit de percevoir la totalité de l'aide octroyée puisque la somme de l'ensemble des investissements effectivement réalisés dépasse le montant des coûts éligibles retenus par la Commission. Selon la requérante IPC, la Commission ne pourrait adopter une attitude différente de celle de l'administration espagnole, surtout en raison du délai d'inactivité constaté.

    181 La Commission répond qu'elle n'a commis aucune faute dans le cadre de cette affaire et que son attitude ne pourrait être considérée comme illégale au regard de la réglementation applicable et des principes généraux du droit communautaire.

    182 Elle rappelle que le bénéficiaire d'un concours financier communautaire doit justifier la réalisation des conditions donnant droit à la perception de celui-ci, avant de pouvoir en réclamer le paiement.

    183 Or, selon la Commission, la requérante IPC n'a pas justifié la réalisation du paiement effectif de l'investissement projeté, ni au moment de la demande de paiement ni ultérieurement, et elle a fait obstruction au contrôle de sa comptabilité par la Commission. Cette dernière estime qu'une telle attitude a eu pour conséquence, d'une part, de rendre le paiement du concours impossible et d'affecter de façon irrémédiable la possibilité de vérifier les justificatifs avancés par la requérante IPC, la comptabilité de cette dernière ayant vraisemblablement été modifiée entre-temps, et, d'autre part, de rendre divergents les avis des autorités nationales et communautaires, de sorte qu'une décision finale n'a pas pu être prise dans un délai plus bref. La Commission considère que, dans de telles circonstances, il relevait de son devoir de diligence en matière de gestion des deniers publics de prendre la décision de geler, à titre conservatoire, le dossier du paiement du concours financier communautaire à la requérante IPC.

    184 En revanche, la Commission estime que l'obstruction à son contrôle et les irrégularités révélées par le rapport d'audit constituent de graves infractions à la réglementation communautaire, d'autant plus que, dans ce domaine, le droit que la réglementation communautaire octroie à la perception d'une subvention «dès lors qu'il se rapporte à un régime d'aides communautaire alimenté par des fonds publics et fondé sur une idée de solidarité, doit être subordonné à la condition que son bénéficiaire présente toutes les garanties de probité et de fiabilité» (voir l'arrêt de la Cour du 27 octobre 1992, Allemagne/Commission, C-240/90, Rec. p. I-5383).

    185 Selon la Commission, il est difficile en l'espèce de soutenir que les principes invoqués par la requérante IPC ont été violés, dès l'instant où les justificatifs avancés par la requérante IPC contiennent délibérément des indications inexactes.

    186 En ce qui concerne les allégations de la requérante IPC sur l'accès au dossier que la Commission lui a réservé dans le cadre de la procédure préalable à la suppression de l'aide, la Commission répond qu'elle a procédé à l'audition de la requérante IPC avant d'ouvrir la procédure de suppression, conformément au prescrit de l'article 7 du règlement n_ 1116/88, en lui adressant les lettres des 8 juin, 12 octobre et 15 novembre 1993. Elle ajoute encore qu'elle a également mis à la disposition de la requérante IPC l'ensemble des documents figurant dans son dossier, à l'exception des notes internes. La Commission fait d'ailleurs remarquer que la requérante IPC a répondu de façon abondante et détaillée aux demandes de la Commission, dans ses courriers des 22 juillet et 24 novembre 1993, ainsi que dans le cadre de la présente procédure, ce qui tend à démontrer que les communications de la Commission ont été suffisantes pour faire connaître à la requérante IPC les faits qui lui étaient imputés. Enfin, la Commission constate que la requérante IPC a répété les mêmes arguments dans les lettres et dans le recours, ce qui démontre que la Commission ne disposait pas d'autres éléments pouvant contenir des informations ou des données substantiellement différentes de celles figurant dans l'audit qui avait déjà été communiqué à la requérante IPC par les autorités espagnoles le 17 juin 1991.

    187 La Commission en déduit que la requérante IPC confond la formalité d'audition de l'intéressé, qui consiste, selon la Commission, à la communication des infractions que celle-ci estime avoir constatées et à l'octroi d'un délai à l'intéressé pour présenter ses observations, avec l'accès à toute la documentation en la possession de la Commission, y compris les notes internes aux services de cette dernière. La Commission soutient en tout état de cause que les actes qu'elle a posés dans la procédure de suppression se sont fondés sur le rapport d'audit communiqué à la requérante IPC dès le 17 juin 1991.

    188 La Commission s'interroge, pour conclure, sur les raisons qui ont conduit la requérante IPC à ne pas réclamer le paiement de la subvention pendant le délai qu'elle qualifie de retard manifeste et d'avoir attendu que la Commission engage une procédure en suppression du concours financier communautaire pour former le présent recours (27 octobre 1993), en se souvenant que, selon elle, cette subvention lui est due depuis le mois de février 1990, date d'introduction de la demande de paiement.

    - Préjudice

    189 La requérante IPC estime que le préjudice qu'elle subit est direct, certain, grave, démontrable et évaluable en argent et qu'il se rapporte, en premier lieu, au montant de l'aide litigieuse, s'élevant à 48 550 322 PTA, en deuxième lieu, aux frais engagés pour sa défense dans le cadre de la procédure précontentieuse, s'élevant à 13 078 écus, en troisième lieu, aux intérêts moratoires courant sur le montant de l'aide, soit 133 580 écus, aux frais résultant des découverts de la requérante IPC, soit 84 633 écus, et à la prime de «risque» prélevée par les fournisseurs de la requérante IPC, soit 173 151 écus, et, en quatrième lieu, à un préjudice moral résultant des répercussions de l'attitude de la Commission sur les relations commerciales de la requérante IPC et de la perte de prestige causée à l'administrateur unique de la requérante IPC, évalué à 25 000 écus.

    190 La requérante IPC justifie à cet égard le choix d'un taux d'intérêt moratoire de 12 % en raison du taux d'intérêt légal de l'argent en Espagne auquel il convient d'ajouter deux points en pourcentage afin de traduire un certain nombre de paramètres objectifs déterminés. Elle ajoute que ce pourcentage supplémentaire de deux points est fixé annuellement par la loi de finances générales de l'État espagnol. Elle soutient ensuite que les intérêts pour découverts trouvent leur raison d'être dans l'absence de trésorerie provenant du paiement des factures de construction du navire et de l'absence de paiement du concours financier communautaire.

    191 La requérante IPC affirme enfin que si la Commission l'estime opportun, les frais juridiques encourus préalablement à l'introduction du recours pourraient être inclus dans la taxation des dépens et viendraient alors en déduction de la somme réclamée au titre de réparation du préjudice.

    192 La Commission répond que, dès lors que le concours communautaire a été supprimé, les demandes de paiement et de réparation des prétendus dommages résultant de l'absence de paiement faisant l'objet de la présente procédure sont dénuées de fondement. Elle ajoute que le paiement de la subvention est seulement dû lorsque la réalisation ainsi que le paiement des investissements sont justifiés auprès d'elle. Dès l'instant où ils ne sont pas justifiés, la subvention n'est pas due. Par conséquent, la Commission estime que, en tout état de cause, le paiement ne saurait être dû qu'à partir du prononcé de l'arrêt par le Tribunal.

    193 Elle conteste également la réalité des préjudices allégués, en demandant à la requérante IPC de produire les éléments de preuve les justifiant et en rappelant la jurisprudence du Tribunal à cet égard. La Commission se réserve toutefois le droit de se prononcer à un stade ultérieur sur le montant du préjudice au cas où le Tribunal considérerait que le préjudice peut être valablement fondé sur les éléments allégués.

    194 La Commission s'interroge par ailleurs sur la détermination des taux retenus et sur le choix de la formule du découvert bancaire, en lieu et place de l'habituelle ligne de crédit.

    - Lien de causalité

    195 La requérante IPC soutient qu'elle a non seulement allégué son droit de percevoir certains montants en raison du préjudice causé par le comportement de la Commission, mais qu'elle a également établi la justification concrète de chacun de ces montants. Elle ajoute que le préjudice est une conséquence immédiate, stricte et nécessaire de l'inaction de la Commission, au niveau des conditions de financement nécessaires à la mise en exploitation du navire «Escualo», au niveau de la défense juridique dans le cadre de la phase précontentieuse et au niveau du préjudice moral.

    196 Elle affirme que l'argument du recours en carence peut être facilement renversé puisque l'objet du présent recours vise à être indemnisé non seulement du montant de la subvention, mais aussi d'autres montants tirant leur origine de la perspective légitime de paiement du concours communautaire et, en outre, que le recours en carence ne pourrait aboutir qu'à un arrêt déclaratif, et non pas à un droit à la réparation du dommage.

    197 La Commission estime quant à elle que le lien de causalité entre les éléments soulevés par la requérante IPC et le préjudice allégué a été rompu par la conduite de cette dernière, qui a fait obstruction à la vérification de la Commission et qui n'a pas non plus introduit de recours en carence ni adressé de mise en demeure préalable avant l'engagement de la procédure de suppression du concours.

    198 Selon la Commission, l'absence de lien de causalité serait véritablement évident pour certains des préjudices allégués. Ainsi, en ce qui concerne la prime de risques, la Commission considère que les difficultés qui sont à l'origine de sa perception proviennent de la décision des autorités espagnoles de réduire le concours national et du fait de devoir donner satisfaction aux dettes fiscales créées à partir d'une connaissance réelle de sa dynamique patrimoniale, et non pas du prétendu retard fautif de la Commission. En ce qui concerne le préjudice moral, il proviendrait de la propre conduite de l'administrateur de la requérante IPC et des actions entreprises par les autorités espagnoles. En ce qui concerne enfin les «coûts légaux», la Commission estime que seuls ceux découlant de la présente procédure pourraient éventuellement être pris en compte.

    Appréciation du Tribunal

    199 Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité du présent recours, il importe de relever que l'examen des faits démontre que la Commission n'a commis aucune faute.

    200 En effet, le Tribunal constate, tout d'abord, que la demande de paiement du concours a été introduite par la requérante IPC le 22 février 1990 (voir ci-dessus point 24), que les services de la Commission ont effectué une vérification sur place entre le 25 et le 31 mars 1990, soit un mois plus tard (voir ci-dessus point 25), qu'en raison de l'attitude de la requérante IPC lors de cette vérification sur place et, par conséquent, de l'impossibilité de procéder au contrôle prévu (voir ci-dessus points 113 à 115), la Commission a commandé un audit qui a été réalisé en mai 1991 (voir ci-dessus point 27), au terme duquel il est apparu que les montants déclarés comme ayant été payés par la requérante IPC étaient inexacts, tant au moment de la demande de paiement qu'au moment de la réalisation de l'audit (voir ci-dessus points 78 à 112).

    201 Au vu de ces éléments, il ne saurait être reproché à la Commission d'avoir considéré que la requérante IPC n'avait pas encore accompli les obligations qui lui incombaient en vertu de la réglementation communautaire au moment où elle a formulé sa demande de paiement, de sorte que la Commission ne devait pas faire droit à celle-ci. A cet égard, il importe d'ailleurs de souligner que, contrairement à l'attitude que n'aurait pas manqué d'adopter tout bénéficiaire diligent convaincu d'avoir accompli les obligations imposées par la réglementation communautaire pour obtenir le paiement du concours financier qui lui avait été accordé, la requérante IPC s'est bien gardée d'entreprendre la moindre démarche à l'égard de la Commission durant le délai qu'elle dénonce. Ainsi, il s'avère que la requérante IPC n'a jamais adressé de rappel ou de mise en demeure à la Commission, depuis sa demande de paiement du 22 février 1990. Elle n'a introduit le présent recours qu'après avoir été formellement informée de l'ouverture d'une procédure en suppression du concours par la Commission.

    202 Par ailleurs, le Tribunal estime que la prétendue violation des droits de la défense résultant d'un accès imparfait aux pièces du dossier de la Commission dans la procédure de suppression du concours financier en cause ne relève pas du présent recours en indemnité mais affecte, le cas échéant, la légalité de la décision prise à l'issue de cette procédure, à savoir, en l'occurrence, la décision du 24 mars 1994, postérieure à l'introduction du présent recours. Or, le Tribunal constate que la requérante IPC n'a pas fait état de ce grief dans le cadre de son recours en annulation (affaire T-233/94), dont l'examen a démontré que la Commission n'a commis aucune illégalité en décidant de supprimer le concours qu'elle avait accordé à la requérante IPC.

    203 Par conséquent, le Tribunal considère que la Commission n'a commis aucune faute susceptible d'entraîner la responsabilité de la Communauté, que ce soit en refusant de verser le concours ou en entamant la procédure de suppression de celui-ci.

    204 Il s'ensuit que le recours en indemnité doit être rejeté, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les arguments échangés par les parties en ce qui concerne le préjudice allégué et le lien de causalité.

    Décisions sur les dépenses


    Sur les dépens

    205 Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Les requérantes ayant succombé en leurs conclusions et moyens tant dans les recours en annulation que dans le recours en indemnité et la Commission ayant conclu à la condamnation des requérantes aux dépens, il y a lieu de condamner les requérantes aux dépens, y compris ceux de la procédure en référé.

    Dispositif


    Par ces motifs,

    LE TRIBUNAL

    (quatrième chambre)

    déclare et arrête:

    1) Les recours en annulation dans les affaires T-231/94, T-232/94, T-233/94 et T-234/94 sont rejetés.

    2) Le recours en indemnité dans l'affaire T-551/93 est rejeté.

    3) Les requérantes sont condamnées aux dépens, y compris ceux de la procédure en référé.

    Top