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Document 61993TJ0015

Arrêt du Tribunal de première instance (quatrième chambre) du 30 novembre 1993.
Philippe Vienne contre Parlement européen.
Fonctionnaires/autres agents - Indemnités journalières - Octroi, par trois fois consécutives, à titre d'agent auxiliaire, d'agent temporaire et de fonctionnaire stagiaire.
Affaire T-15/93.

Recueil de jurisprudence 1993 II-01327

ECLI identifier: ECLI:EU:T:1993:108

61993A0015

Arrêt du Tribunal de première instance (quatrième chambre) du 30 novembre 1993. - Philippe Vienne contre Parlement européen. - Fonctionnaires/autres agents - Indemnités journalières - Octroi, par trois fois consécutives, à titre d'agent auxiliaire, d'agent temporaire et de fonctionnaire stagiaire. - Affaire T-15/93.

Recueil de jurisprudence 1993 page II-01327


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés


++++

1. Fonctionnaires - Remboursement de frais - Indemnité journalière - Objet - Fonctionnaire stagiaire ayant été agent auxiliaire puis agent temporaire - Limitation de la durée de versement - Exclusion

(Statut des fonctionnaires, annexe VII, art. 10; régime applicable aux autres agents)

2. Fonctionnaires - Recours - Compétence de pleine juridiction - Demande de paiement - Recevabilité

(Statut des fonctionnaires, art. 91)

3. Fonctionnaires - Recours - Réclamation administrative préalable - Demande d' intérêts moratoires formulée pour la première fois devant le Tribunal en cas d' annulation de la décision attaquée - Recevabilité

(Statut des fonctionnaires, art. 90 et 91)

Sommaire


1. L' indemnité journalière, prévue à l' article 10, paragraphe 1, de l' annexe VII du statut, à laquelle a droit, avant son déménagement en vue de résider au lieu de son affectation, le fonctionnaire nouvellement recruté, vise à compenser les frais et les inconvénients occasionnés par la nécessité de se déplacer et de s' installer provisoirement au lieu de cette affectation, tout en gardant, également à titre provisoire, sa résidence antérieure.

Aucune disposition du statut ou du régime applicable aux autres agents ne prévoit une réglementation restrictive dans le cas d' un fonctionnaire qui est nommé fonctionnaire stagiaire, après avoir été agent auxiliaire puis agent temporaire, et une telle restriction ne s' impose pas. En effet, dans une telle situation, où la précarité du rapport d' emploi a été constante, l' octroi des indemnités journalières présente une finalité spécifique, à savoir inciter l' intéressé à s' abstenir de procéder à un déménagement qui, en cas de non-titularisation, s' avérerait prématuré et occasionnerait, en cas de cessation des fonctions de l' intéressé, un double remboursement des frais de déménagement. Or, eu égard à cette situation, l' intéressé doit bénéficier, en contrepartie, jusqu' à la fin de cette période précaire, augmentée d' un mois, de l' octroi des indemnités journalières, et ceci indépendamment du fait que durant des périodes antérieures, également caractérisées par leur précarité, il a déjà perçu de telles indemnités.

2. Dans le cadre d' un recours fondé sur l' article 91 du statut et relatif à un litige de caractère pécuniaire, le juge communautaire dispose d' une compétence de pleine juridiction, de sorte qu' une demande visant à ce que soit ordonné le versement de l' indemnité objet du litige est recevable.

3. Dans les recours de fonctionnaires, une demande d' intérêts moratoires en cas d' annulation de la décision attaquée n' a pas besoin, pour être recevable devant le Tribunal, d' avoir été expressément mentionnée dans la réclamation administrative préalable.

Parties


Dans l' affaire T-15/93,

Philippe Vienne, fonctionnaire du Parlement européen, demeurant à Bruxelles, représenté par Me Carlo Revoldini, avocat au barreau de Luxembourg, ayant élu domicile à Luxembourg en son étude, 21, rue Aldringen,

partie requérante,

contre

Parlement européen, représenté par M. Ezio Perillo, membre du service juridique, en qualité d' agent, ayant élu domicile au secrétariat général du Parlement européen, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet principal l' annulation de la décision du 2 février 1993 du secrétaire général du Parlement européen, rejetant la réclamation du requérant demandant l' allocation, pendant toute la durée de son stage augmentée d' un mois, des indemnités journalières prévues à l' article 10 de l' annexe VII du statut des fonctionnaires des Communautés européennes,

LE TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

composé de MM. C. P. Briët, président, A. Saggio et H. Kirschner, juges,

greffier: M. J. Palacio González, administrateur

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 6 octobre 1993,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt


Faits et procédure

1 Le 1er novembre 1990, le requérant - alors domicilié à Bruxelles-Anderlecht - a été recruté par le Parlement européen (ci-après "Parlement") en qualité d' agent auxiliaire, avec un contrat à durée indéterminée, et affecté à Luxembourg. Il a perçu, sur la base de l' article 69 du régime applicable aux autres agents des Communautés européennes (ci-après "RAA"), les indemnités journalières prévues à l' article 10 de l' annexe VII du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après "statut"). Dès son engagement, le requérant a établi une résidence à Messancy, près de la frontière belgo-luxembourgeoise, pour se conformer à l' obligation de résidence prévue aux articles 54 du RAA et 20 du statut, tandis que son épouse et leurs enfants restaient à Anderlecht.

2 Le 1er janvier 1991, le requérant a été engagé par le Parlement en qualité d' agent temporaire, avec un contrat à durée indéterminée prévoyant un stage probatoire de six mois. Il a, sur la base de l' article 25 du RAA, continué à percevoir les indemnités journalières susvisées, dont le bénéfice lui a été maintenu à compter de cette date pour la durée de son stage, c' est-à-dire pendant six mois.

3 Le 16 décembre 1991, le requérant a été engagé par le Parlement en qualité de fonctionnaire stagiaire de grade B 5, avec maintien de son affectation à Luxembourg. Après sa titularisation, intervenue en octobre 1992, le requérant s' est préparé à abandonner sa résidence familiale à Anderlecht.

4 A la date du 16 décembre 1991, le bénéfice des indemnités journalières susvisées a été renouvelé au requérant, en sa qualité de fonctionnaire stagiaire, pour une période de 128 jours, soit jusqu' au 21 avril 1992. Ce faisant, l' administration a limité à douze mois (ou 365 jours) le total des périodes pour lesquelles elle lui accordait ce bénéfice, et ce en appliquant le calcul suivant:

- total des périodes d' octroi antérieures à la nomination du requérant

- en tant qu' agent auxiliaire du 5 novembre 1990 au 31 décembre 1990 (deux mois ou 57 jours),

- en tant qu' agent temporaire du 1er janvier 1991 au 30 juin 1991 (six mois ou 180 jours),

soit huit mois ou 237 jours

- solde par rapport au maximum de douze mois (ou 365 jours):

365 jours - 237 jours = 128 jours.

5 Sur la fiche de rémunération du requérant du mois de juin 1992 il est apparu, pour la première fois, que le versement des indemnités journalières avait été arrêté rétroactivement à partir du 22 avril 1992. Le requérant ayant demandé au service des décomptes des explications orales à ce sujet, il lui a été répondu que, suivant une pratique administrative en vigueur au secrétariat général du Parlement, celui-ci cumulait les différentes périodes prestées par le bénéficiaire en qualité soit d' agent auxiliaire, soit d' agent temporaire, soit de fonctionnaire stagiaire; de la sorte, l' administration ne verserait des indemnités journalières que pour une période maximale de douze mois.

6 Par note du 7 juillet 1992, enregistrée au secrétariat général du Parlement le 13 juillet suivant, le requérant a introduit une réclamation dirigée contre sa fiche de rémunération du mois de juin 1992 et visant à obtenir le paiement des indemnités journalières jusqu' à la date du 15 octobre 1992 (durée de son stage augmentée d' un mois). A cet égard, le requérant invoquait notamment le libellé de l' article 10 de l' annexe VII du statut et faisait valoir que la pratique en usage au Parlement de limiter à un an la durée globale cumulée de versement des indemnités journalières, compte tenu des différents statuts antérieurs, ne respectait ni la lettre ni l' esprit du statut. Il faisait valoir, par ailleurs, que les indemnités journalières sont octroyées pour permettre au fonctionnaire de faire face aux frais exceptionnels qu' engendre l' entretien simultané de deux résidences. Il ajoutait que la limitation critiquée n' étant pas appliquée dans d' autres institutions communautaires, la pratique du secrétariat général en la matière était discriminatoire vis-à-vis des fonctionnaires du Parlement.

7 Par lettre du 3 décembre 1992, le secrétaire général du Parlement a fait savoir au requérant que l' examen de sa réclamation était en cours et que le problème soulevé avait été porté à l' attention du collège des chefs d' administration en vue de chercher une solution uniforme, étant donné qu' il trouvait auprès des différentes institutions concernées des réponses différentes.

8 Après avoir envoyé, le 28 janvier 1993, une lettre de rappel au secrétaire général du Parlement, le requérant s' est vu adresser, le 2 février 1993, une décision portant rejet explicite de sa réclamation. Dans cette décision, le secrétaire général, après avoir indiqué qu' il ne disposait pas encore de l' avis des autres institutions en vue d' arrêter une solution commune, observait que les dispositions de l' article 10 de l' annexe VII du statut s' appliquaient, en vertu de l' article 25 du RAA, également aux agents relevant du RAA et que les règles relatives à l' octroi des indemnités journalières devaient, dès lors, être interprétées et appliquées de façon unitaire et cohérente. Or, une durée maximale d' un an, pour ce qui est du bénéfice des indemnités journalières, serait prévue tant par l' article 25 du RAA pour les agents temporaires que par l' article 65 du RAA pour les agents auxiliaires, c' est-à-dire dans les cas des rapports d' emploi les plus précaires auprès des Communautés, tant du point de vue juridique que du point de vue matériel. En définitive, il ressortirait de l' ensemble de ces dispositions que le bénéfice des indemnités journalières aurait été conçu comme une mesure de première aide, de nature justement temporaire et ayant, en outre, un caractère présomptif, puisque l' on n' exigerait pas de l' intéressé qu' il fournisse la preuve des frais encourus. La somme ainsi octroyée ne serait pas non plus versée en fonction de la qualité statutaire du bénéficiaire; par conséquent, elle ne serait pas susceptible d' être prorogée au-delà de la limite la plus favorable voulue par les textes réglementaires, en raison du simple changement de la nature du rapport d' emploi liant le bénéficiaire à l' institution.

9 C' est dans ces conditions que le requérant a introduit le présent recours qui a été enregistré au greffe du Tribunal le 9 février 1993. La procédure écrite a suivi un cours régulier. Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d' ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d' instruction préalables. Il a toutefois posé des questions aux parties et aux institutions communautaires.

10 En réponse à la question posée par le Tribunal, concernant leur pratique administrative dans des cas tels que celui faisant l' objet du présent litige, la Cour de justice, le Conseil, la Commission et la Cour des comptes ont été unanimes à déclarer que, dans l' hypothèse envisagée, leur pratique consiste à octroyer l' intégralité des indemnités journalières chaque fois qu' il y a changement de régime d' emploi, de sorte qu' un fonctionnaire stagiaire bénéficie des indemnités journalières pour la durée intégrale prévue par le statut, même s' il en a déjà bénéficié en sa qualité antérieure d' agent auxiliaire et d' agent temporaire. Il a toutefois été précisé que l' octroi de ces indemnités est exclu, d' une part, lorsque l' intéressé a auparavant bénéficié du versement d' une indemnité d' installation et, d' autre part, à partir de la date à laquelle l' intéressé procède à son déménagement. Le Conseil, la Commission et la Cour des comptes ont, en outre, indiqué que, en cas de changement de régime, les montants plus élevés applicables aux quinze premiers jours ne sont attribués qu' une seule fois, à savoir à l' occasion de la première installation de l' intéressé sur le lieu de son affectation, et que, par conséquent, les nouvelles indemnités journalières sont intégralement liquidées selon les montants réduits prévus à partir du seizième jour.

Conclusions des parties

11 Le requérant conclut à ce qu' il plaise au Tribunal:

- dire le présent recours recevable en la forme;

- dire qu' il y a violation de l' article 10 de l' annexe VII du statut;

- dire qu' il y a violation du principe de la séparation des pouvoirs entre les organes exécutifs-administratifs et les organes législatifs-réglementaires des Communautés européennes;

- par conséquent, ordonner l' annulation de la décision du 2 février 1993 du secrétaire général du Parlement, rejetant la réclamation du requérant demandant la poursuite du versement des indemnités journalières, conformément à l' article 10 de l' annexe VII du statut;

- ordonner au Parlement de verser au requérant les indemnités journalières non payées s' élevant à 170 239 BFR, outre les intérêts de retard courant depuis la date de l' introduction de la réclamation;

- condamner le Parlement à tous les frais et dépens de l' instance.

12 Le Parlement conclut à ce qu' il plaise au Tribunal:

- rejeter le recours comme non fondé;

- statuer sur les dépens conformément aux dispositions pertinentes du règlement de procédure.

Quant à l' objet du recours et des moyens soulevés

13 Le requérant ayant formulé des conclusions visant, respectivement, à l' annulation de la décision de rejet de sa réclamation, au paiement de l' arriéré d' indemnités journalières qu' il estime lui être dû et d' intérêts de retard, ainsi qu' à la constatation de certains actes illégaux prétendument commis par le Parlement, il convient de constater, tout d' abord, que les conclusions en annulation constituent l' objet essentiel du recours, alors que les conclusions aux fins pécuniaires présentent, par rapport aux premières, un caractère plutôt consécutif et accessoire. Par conséquent, il sera procédé, en premier lieu, à l' examen des conclusions en annulation. En ce qui concerne les conclusions visant à la constatation de certains actes prétendument illégaux, il y a lieu de rappeler que de telles conclusions, qui visent en réalité à faire reconnaître par le Tribunal le bien-fondé de certains des moyens invoqués à l' appui des conclusions en annulation, sont irrecevables (voir l' arrêt de la Cour du 13 juillet 1989, Jaenicke Cendoya/Commission, 108/88, Rec. p. 2711, points 8 et 9).

14 Pour ce qui est des moyens soulevés par le requérant à l' appui de son recours, il y a lieu de rappeler qu' ils ont initialement été au nombre de trois, tirés, respectivement, d' une violation de l' article 10 de l' annexe VII du statut, de l' application d' une règle inexistante dans les dispositions réglementaires et, enfin, d' une violation du principe général de séparation des pouvoirs. Or, en réponse à la question posée par le Tribunal au cours de la procédure écrite, le requérant a expressément déclaré renoncer à ce troisième et dernier moyen. Quant aux premier et second moyens, il convient de relever que, ainsi que le Parlement l' a observé à juste titre, ils reposent tous deux sur un argument de fond qui leur est commun: d' après le requérant, l' administration ne peut se livrer à une interprétation analogue extensive des différentes règles régissant l' octroi des indemnités journalières, mais doit se limiter à appliquer littéralement chaque disposition pertinente. Dans cette optique, il apparaît opportun d' examiner cette argumentation en un moyen unique.

Sur les conclusions en annulation

Quant au moyen unique tiré, d' une part, d' une violation de l' article 10 de l' annexe VII du statut et, d' autre part, de l' application d' une règle inexistante

Arguments des parties

15 Le requérant fait valoir que cet article 10 prévoit, dans son deuxième alinéa, sous b), que le fonctionnaire stagiaire a droit à une indemnité journalière pendant la durée du stage, augmentée d' un mois. Étant donné que son stage s' est déroulé du 16 décembre 1991 au 15 septembre 1992 et que le Parlement a interrompu le versement des indemnités journalières à partir du 22 avril 1992, le Parlement n' aurait pas appliqué le texte clair et précis de la disposition précitée, mais se serait livré à une interprétation basée sur les différentes dispositions réglementaires concernant l' allocation d' indemnités journalières aux fonctionnaires stagiaires, aux agents auxiliaires et aux agents temporaires et aurait appliqué une règle inexistante, à savoir une "norme" créée par une interprétation analogique extensive qui limiterait à douze mois la durée globale de versement des indemnités journalières.

16 Le requérant soutient ensuite que c' est à tort que le Parlement donne une importance juridique au passage d' un régime d' emploi à un autre, sans écoulement d' un intervalle temporel, et parle d' un "cumul de l' octroi des indemnités journalières". Or, il n' existerait pas de continuité juridique entre les trois types de rapports d' emploi qui peuvent naître entre un agent et les institutions communautaires. Ces régimes seraient strictement délimités par la réglementation communautaire et il n' existerait aucune corrélation juridique entre eux.

17 Le requérant ajoute que, une fois accepté le principe de l' existence de trois régimes, il faut en accepter toutes les conséquences. Chaque régime conférerait à l' agent qui en relève des droits et obligations spécifiques. Ainsi, celui-ci ne pourrait se soustraire aux obligations prévues par son nouveau régime sous prétexte qu' il a assumé des obligations équivalentes au titre de son ancien régime (par exemple, un fonctionnaire stagiaire serait tenu d' effectuer un stage même s' il en a déjà effectué un, en vertu de l' article 14 du RAA, lors de son engagement antérieur en qualité d' agent temporaire). De la même manière, les institutions devraient assumer les charges qui sont propres à chaque régime; par ailleurs, chaque régime relèverait d' une ligne budgétaire différente.

18 Le Parlement répond que, dans le cadre d' une procédure visant à rembourser à un agent, sous forme d' indemnités journalières, les frais qu' il est susceptible d' avoir exposés à l' occasion de son entrée en fonctions, l' administration communautaire concernée doit, le cas échéant, tenir compte de ce que, d' une part, l' intéressé s' est déjà conformé à l' obligation de résidence prévue par l' article 20 du statut, en raison du fait qu' il se trouve déjà au service de l' institution, quoique dans le cadre d' un autre régime d' emploi, et, d' autre part, il a déjà, au titre de ce régime, bénéficié des indemnités journalières correspondantes. Le Parlement souligne que, en l' état actuel de la législation communautaire, le principe de la séparation entre trois différents régimes d' emploi auprès des Communautés - à savoir ceux d' agent auxiliaire, d' agent temporaire et de fonctionnaire - n' est pas, en soi, de nature à justifier dans le chef d' un agent, qui est passé successivement d' un rapport de service à l' autre au titre de chacun de ces trois régimes (sans solution de continuité et sans que son affectation et sa "résidence de service" ne soient modifiées), le droit de cumuler intégralement et automatiquement le bénéfice, le cas échéant par trois fois consécutives, des mêmes indemnités journalières.

19 A cet égard, le Parlement rappelle que, selon la jurisprudence de la Cour, l' indemnité journalière trouve sa justification essentielle dans l' obligation pour le fonctionnaire de s' installer dans une résidence autre que celle qu' il occupait précédemment, sans pouvoir cependant abandonner cette dernière, et vise à compenser les frais et les inconvénients occasionnés par le maintien de ces deux résidences (arrêt du 30 janvier 1974, Louwage/Commission, 148/73, Rec. p. 81, et du 5 février 1987, Mouzourakis/Parlement, 280/85, Rec. p. 589). Si telle est donc la finalité poursuivie par cette indemnité, il s' ensuit, de l' avis du Parlement, qu' il n' y a pas vraiment de raison plausible qui puisse justifier l' obligation de la verser intégralement, encore une fois, à la même personne qui, tout en continuant à rester au service des Communautés, entre une "deuxième fois" en fonctions auprès de celles-ci. A ce moment-là, en effet, le souci de ne pas laisser à la charge de l' intéressé les frais éventuellement encourus du fait d' être tenu de résider au lieu de son affectation aurait déjà trouvé sa réponse, précisément au moment où l' intéressé s' est conformé à l' obligation de résidence prévue par l' article 20 du statut, obligation à laquelle il n' est manifestement plus tenu lors de sa "deuxième" entrée en fonctions. Autrement dit, l' autonomie théorique de chacun des trois régimes d' emploi communautaires ne pourrait jamais parvenir à justifier l' obligation de payer deux voire trois fois la même indemnité, à la même personne, pour la même cause.

20 Le Parlement souligne, ensuite, le caractère présomptif que présente le régime des indemnités journalières, le fonctionnaire n' étant pas obligé de fournir la preuve qu' il a effectivement encouru des frais ni qu' il a gardé des attaches matérielles avec sa résidence d' origine. Il insiste également sur le caractère provisoire de ces indemnités, dont le versement est limité à une durée préétablie, pendant laquelle le montant de l' indemnité journalière est, en outre, modulé de façon décroissante. Ce dernier aspect permettrait de penser que, dans l' esprit du législateur communautaire, le versement d' une indemnité journalière n' a plus de justification, même si, à l' expiration de cette durée, la situation du bénéficiaire reste inchangée en droit (même rapport de travail) et en fait (plusieurs résidences). En d' autres termes, le législateur serait parti de l' idée que, au bout d' un nombre de jours déterminé, à partir de la date de recrutement ou d' engagement, l' obligation des Communautés de fournir une première aide à toute personne appelée à travailler à leur service cesserait ipso facto, même si la "précarité" du rapport de travail et celle du lien avec le lieu d' affectation continuent à exister telles qu' auparavant. Par ailleurs, le montant des indemnités journalières ne varierait pas en fonction de la qualité statutaire du bénéficiaire, ce qui leur conférerait un caractère neutre et objectif.

21 Le Parlement soutient que, s' il n' existe apparemment aucune disposition réglementaire établissant un mode de coordination entre les trois différents régimes d' emploi auprès des Communautés en ce qui concerne l' octroi des indemnités journalières, il n' est pas moins vrai que cette lacune normative ne pourrait pas, à elle seule, autoriser un octroi cumulatif automatique des indemnités: en premier lieu, les dispositions concernant l' octroi des indemnités journalières, bien que figurant chacune dans le contexte normatif propre au régime d' emploi concerné, constitueraient de par leur finalité concrète un ensemble normatif, unitaire, homogène et cohérent. En second lieu, il serait constant que l' octroi des indemnités journalières est subordonné à l' entrée en fonctions "matérielle" de l' agent auprès des Communautés, indépendamment du statut juridique de cet agent. De ce fait, sur le plan "matériel", cette entrée en fonctions ne se "renouvellerait" pas vraiment à chaque changement éventuel de régime d' emploi; l' affectation "physique" au lieu de travail resterait la même. En troisième lieu, dans le cas des rapports d' emploi les plus précaires, tant du point de vue juridique que du point de vue matériel (tels que ceux de l' agent temporaire de courte durée et de l' agent auxiliaire), le législateur communautaire aurait limité la durée d' octroi des indemnités journalières à douze mois. Il s' ensuit, de l' avis du Parlement, que, au-delà de cette période maximale, le bénéfice des indemnités journalières ne peut plus être accordé, même si l' agent concerné continue, après l' expiration de ce délai, à exercer au même titre ses fonctions auprès de la même institution et dans les mêmes conditions de précarité.

22 C' est en ayant égard à ce critère de continuité que la Cour aurait établi le principe selon lequel, dans des situations semblables à celle en cause, il convient d' interpréter les dispositions relatives aux diverses indemnités prévues par le statut selon le sens de l' unité fonctionnelle des Communautés européennes, conception qui ne permet pas d' admettre le cumul d' une indemnité de départ des services de l' une des institutions avec une indemnité d' entrée au service de l' autre (arrêt du 15 juillet 1960, Campolongo/Haute Autorité, 27/59 et 39/59, Rec. p. 795).

23 Dans la mesure où le requérant reproche au Parlement d' avoir procédé à une interprétation analogique extensive et d' avoir créé, par ce biais, une nouvelle norme, le Parlement fait valoir que, à la différence de la plupart des autres dispositions du RAA, l' article 25 de ce régime ne prévoit pas d' appliquer les dispositions de l' article 10 de l' annexe VII du statut, auxquelles il se réfère, "par analogie", mais dispose qu' elles "sont applicables". Cette formule, loin de pouvoir être considérée comme un oubli fortuit du législateur communautaire, prouverait que, dans l' économie générale du droit de la fonction publique communautaire, les dispositions de l' article 25 du RAA font partie intégrante du chapitre E (indemnité journalière) de la section 3 (remboursement de frais) de l' annexe VII du statut. Ces mêmes considérations sembleraient pouvoir s' appliquer aussi à l' article 69 du RAA, relatif aux agents auxiliaires.

24 Dans une telle situation, il s' agirait pour l' administration de procéder à une interprétation systématique des différentes dispositions applicables en la matière. Dans cette perspective, il faudrait surtout se fonder, dans l' application concrète de ces dispositions, sur des critères objectifs, de nature à assurer vis-à-vis de chaque bénéficiaire concerné un traitement non-discriminatoire et constant dans le temps. Par ailleurs, le Parlement rappelle que, si le statut et le RAA ont, ratione personae, deux champs d' application distincts, il y a cependant, ratione materiae, beaucoup de dispositions et même des chapitres entiers (voir, par exemple les chapitres 7 et 8 du RAA) qui leur sont communs.

25 A l' audience, le Parlement a commenté la pratique administrative adoptée en la matière par les autres institutions communautaires (voir ci-dessus point 10), en soulignant que, si cette pratique se distingue apparemment de celle du Parlement, les autres institutions ne semblent pas pour autant adopter totalement la thèse de l' autonomie des trois régimes d' emploi défendue par le requérant. En effet, le fait de refuser l' octroi des indemnités journalières au fonctionnaire stagiaire qui a auparavant perçu, en tant qu' agent temporaire, l' indemnité d' installation ainsi que le fait de ne verser qu' une seule fois les indemnités journalières d' un montant plus élevé (pendant les quinze premiers jours d' installation sur le lieu d' affectation) signifient, de l' avis du Parlement, que les autres institutions tiennent également compte de la situation antérieure du bénéficiaire et prennent donc, elles aussi, en considération un élément de continuité englobant tous les rapports d' emploi auprés des Communautés.

26 Le Parlement a ajouté que l' octroi des indemnités journalières n' est, à son avis, pas basé sur l' idée d' une précarité du rapport d' emploi en cause, mais qu' il s' agit là d' un simple remboursement forfaitaire de frais. La preuve en serait qu' elles sont également versées aux fonctionnaires qui sont recrutés immédiatement en tant que fonctionnaires titularisés (ceux de grade A 1 et A 2, qui, selon l' article 34, paragraphe 1, du statut, ne sont pas tenus d' effectuer un stage). Enfin, le Parlement a précisé que sa position consistant à limiter à un an au maximum l' octroi des indemnités journalières est également applicable au cas de figure inverse, à savoir celui d' un fonctionnaire stagiaire qui - par exemple à la suite de l' annulation, par le Tribunal, de sa nomination - se retrouve agent temporaire.

Appréciation du Tribunal

27 Il convient de relever, à titre liminaire, que l' objet du présent litige est limité à la question de savoir si le requérant, en sa qualité de fonctionnaire stagiaire n' ayant pas encore procédé à son déménagement ni perçu d' indemnité d' installation, a droit, pour la dernière partie de la durée de son stage augmentée d' un mois, au versement des indemnités journalières prévues à l' article 10, paragraphe 2, sous b), de l' annexe VII du statut. Les articles 25 et 69 du RAA - en particulier les limites temporelles qu' ils prévoient - ne sont pas applicables au cas d' espèce; ces articles ont en effet régi le versement des indemnités journalières pendant les périodes antérieures à celle présentement en cause. Leur incidence sur la solution du litige est donc limitée à la question de savoir si les versements effectués auparavant en vertu de ces dispositions peuvent exercer une influence sur l' interprétation à donner à la limite temporelle spécifique fixée par l' article 10.

28 En ce qui concerne la thèse défendue par le Parlement, selon laquelle les dispositions relatives aux indemnités journalières figurant au statut et au RAA constituent un ensemble normatif unitaire, homogène et cohérent dont l' interprétation systématique et téléologique doit aboutir à fixer une durée globale d' octroi s' élevant à un an au maximum, il y a lieu de reconnaître, tout d' abord, que l' interprétation des dispositions pertinentes en la matière ne doit pas aboutir à des résultats qui seraient en contradiction avec leur finalité. Par conséquent, la règle prévoyant l' allocation d' indemnités journalières d' un montant plus élevé pendant les quinze premiers jours - hypothèse qui ne fait pas l' objet du présent litige - ne doit normalement trouver application qu' à l' occasion de la première installation de l' intéressé sur le lieu de son affectation. En effet, le bénéfice de ce taux plus élevé, en tant que remboursement forfaitaire de frais, est justifié par l' expérience que, pendant la toute première période d' installation, l' agent doit exposer des frais extraordinaires (tels que des frais d' hôtel, de caution, d' agence immobilière et de voyages fréquents). Cet objectif précis, qu' est celui poursuivi par l' octroi d' indemnités journalières plus élevées, n' est plus pertinent si l' agent concerné change de statut juridique sans modification de son lieu d' affectation. Le bénéfice de telles indemnités ne saurait, par conséquent, "renaître" en faveur d' un tel agent du seul fait que ce dernier est passé d' un rapport d' emploi d' agent auxiliaire/temporaire à celui de fonctionnaire stagiaire.

29 Cette constatation effectuée, il s' avère que le principe formel de la séparation entre le régime des fonctionnaires, d' une part, et celui des autres agents, d' autre part, tel qu' il a été consacré par la jurisprudence (voir, par exemple, les arrêts de la Cour du 6 juin 1985, De Santis/Cour des comptes, 146/84, Rec. p. 1723, point 17, et du 19 avril 1988, Sperber/Cour de justice, 37/87, Rec. p. 1943, points 8 et 12, ainsi que l' arrêt du Tribunal du 14 mai 1991, Zoder/Parlement, T-30/90, Rec. p. II-207, point 22), ne suffit pas, à lui seul, à établir le bien-fondé de la position défendue par le requérant. Dès lors, il y a lieu de procéder à une interprétation des dispositions en cause, en tenant compte de leur libellé et de leur finalité.

30 A cet égard, le Tribunal constate, tout d' abord, qu' aucune disposition du statut ou du RAA ne prévoit expressément une réglementation restrictive pour le cas qui se présente en l' espèce. En particulier, le texte de l' article 10 de l' annexe VII du statut ne s' oppose pas à un octroi cumulatif des indemnités journalières, tel que le sollicite le requérant.

31 Dans la mesure où le Parlement objecte, sur le plan d' une interprétation littérale, que, aux termes de l' article 10, paragraphe 1, de l' annexe VII du statut, le fonctionnaire doit justifier "être tenu de changer de résidence", condition que le requérant ne remplirait pas du fait qu' il avait déjà changé de résidence auparavant, lors de son recrutement en tant qu' agent auxiliaire, le Tribunal estime que cette thèse méconnaît le caractère continu et durable de l' obligation d' indemnisation imposée par ladite disposition aux institutions vis-à-vis de leurs fonctionnaires. Par ailleurs, le Parlement a lui-même reconnu, en principe, l' obligation lui incombant au titre de cette disposition à l' égard du requérant, étant donné qu' il lui a versé les indemnités journalières qui y sont prévues pendant les quatre premiers mois de son stage.

32 Selon le Parlement, l' octroi des indemnités journalières est subordonné à la toute première entrée en fonctions "matérielle" de l' agent auprès des Communautés, cette entrée en fonctions ne se "renouvelant" pas à chaque changement de régime d' emploi. Toutefois, l' article 71 du statut prévoit que, dans les conditions fixées à l' annexe VII, le fonctionnaire a droit au remboursement des frais exposés, entre autres, à l' occasion de son "entrée en fonctions". Or, les fonctions exercées par un fonctionnaire peuvent être distinguées, sur le plan juridique, de celles exercées par un agent temporaire ou auxiliaire, étant donné que les intéressés se trouvent dans des situations statutaires différentes (voir l' arrêt Sperber/Cour de justice, précité, point 8). La notion d' "entrée en fonctions", susmentionnée, peut donc être interprétée en ce sens qu' elle vise la seule entrée en fonctions à la suite de la nomination formelle dans un emploi de fonctionnaire. De même, l' argument du Parlement, selon lequel les dispositions de l' article 10 de l' annexe VII du statut seraient applicables telles quelles, et non pas par analogie, conformément aux articles 25 et 69 du RAA, ne suffit pas pour exclure qu' un agent temporaire ou auxiliaire admis dans le corps des fonctionnaires puisse bénéficier, en application dudit article 10, des indemnités qu' il prévoit, même si cet article lui a été directement appliqué, en vertu des articles 25 et 69 du RAA, pendant ses périodes de service précédentes.

33 Il convient d' ajouter que la situation administrative d' un fonctionnaire stagiaire est caractérisée par la précarité de son rapport d' emploi. Dans ce contexte, il y a lieu d' observer qu' une limite maximale de la durée d' octroi des indemnités journalières, telle que le Parlement entend la voir appliquer à la période de stage, serait contraire à l' article 34, paragraphe 1, deuxième alinéa, du statut, selon lequel le stage peut être prolongé sans limite temporelle par suite de maladie ou d' accident de l' intéressé. Cette hypothèse suffit à démontrer que la précarité du rapport d' emploi peut persister même après la période de douze mois appliquée comme limite maximale par le Parlement. La cohérence qu' il convient d' établir entre la disposition précitée de l' article 34 du statut et l' article 10 de l' annexe VII du statut exige que cet article 10 ne détermine pas, en ce qui concerne les fonctionnaires stagiaires, une période fixe pour l' octroi des indemnités journalières. La durée de cet octroi doit, au contraire, être rattachée à la durée (flexible) du stage, augmentée d' un mois. Cette connexité démontre, encore une fois, que la précarité du rapport d' emploi constitue un élément important dans l' interprétation dudit article 10.

34 En l' espèce, la situation administrative du requérant a connu trois phases successives: après avoir été agent auxilaire puis agent temporaire, il a été nommé fonctionnaire stagiaire. Pendant toute cette période, la précarité de son rapport d' emploi a persisté, y compris lors de la dernière phase, étant donné qu' il aspirait à une titularisation, tout en sachant qu' il n' y avait pas droit. Dans une telle situation, l' octroi des indemnités journalières présente une finalité spécifique: il paraît raisonnable d' inciter l' intéressé à s' abstenir de procéder à un déménagement qui, en cas de non-titularisation, s' avérerait prématuré et occasionnerait, conformément à l' article 9, paragraphes 1 et 2, de l' annexe VII du statut, en cas de cessation des fonctions de l' intéressé, un double remboursement des frais de déménagement. Or, eu égard à cette situation, l' intéressé doit bénéficier, en contrepartie et en application de l' article 10 de l' annexe VII du statut, jusqu' à la fin de cette période précaire, augmentée d' un mois, de l' octroi des indemnités journalières, et ceci indépendamment du fait qu' il a déjà perçu de telles indemnités, pendant d' autres périodes antérieures, également caractérisées par leur précarité.

35 En l' espèce, il est constant que, pendant toute cette période, le requérant, en raison de son affectation en qualité de fonctionnaire à Luxembourg, a maintenu deux résidences, à savoir sa résidence familiale à Bruxelles-Anderlecht et une résidence provisoire à Messancy, près du lieu de son affectation. Ainsi, les circonstances de l' espèce correspondent bien à l' objectif poursuivi par l' octroi des indemnités journalières, à savoir la compensation des frais et des inconvénients occasionnés par la nécessité de se déplacer et de s' installer provisoirement au lieu de l' affectation, tout en gardant également, à titre provisoire, la résidence antérieure (voir l' arrêt Mouzourakis/Parlement, précité, point 9, et l' arrêt du Tribunal du 10 juillet 1992, Benzler/Commission, T-63/91, Rec. p. II-2095, point 20).

36 Par conséquent, il y a lieu de constater que les conditions prévues par l' article 10 de l' annexe VII du statut pour l' octroi des indemnités journalières sont remplies en l' espèce. Conformément à cet article, le requérant a donc droit au versement de ces indemnités. En adoptant la décision du 2 février 1993 portant rejet de sa réclamation, le Parlement a, dès lors, violé ce droit statutaire du requérant.

37 Dans la mesure où le Parlement renvoie à l' arrêt Campolongo/Haute Autorité, précité, en faisant valoir que le principe de l' unité fonctionnelle des Communautés ne permet pas d' admettre le cumul d' indemnités, le Tribunal constate que cet arrêt de la Cour concerne un cas tout à fait différent de la présente affaire. En effet, le requérant Campolongo avait démissionné d' une institution communautaire afin de passer au service d' une autre. La Cour a rejeté sa demande de lui reconnaître une indemnité de réinstallation au motif qu' un paiement avait déjà été effectué pour la même cause. Dans ce contexte, la Cour a jugé que l' unité fonctionnelle des Communautés ne permettait pas d' admettre le cumul d' une indemnité de départ des services d' une institution avec une indemnité d' entrée au service d' une autre. Or, le Tribunal estime que, s' il s' agissait dans l' affaire Campolongo d' une tentative de cumuler plusieurs prestations pour un événement ponctuel et unique, la présente affaire est marquée par le caractère continu et durable de la situation en considération de laquelle le requérant demande à bénéficier des indemnités journalières et qui, si elle a donné lieu au versement de telles indemnités dans le passé, continue toujours à satisfaire aux conditions statutaires prévues à cet effet.

38 En ce qui concerne la question, évoquée par le Parlement à l' audience, des règles applicables au versement des indemnités journalières à un fonctionnaire qui, après l' annulation de sa nomination, devient agent temporaire, le Tribunal estime que ce cas de figure, qui ne fait pas l' objet du présent litige, concerne une situation exceptionnelle et ne saurait donc être pris en considération pour l' interprétation de la réglementation pertinente dans le cas inverse qui est soumis à son examen.

39 Dans la mesure où le Parlement souligne, enfin, que le versement d' indemnités journalières se trouve limité à douze mois, même pour les emplois les plus précaires (surtout les agents auxiliaires et les agents temporaires "à courte durée"), ce qui rendrait injustifiée toute prorogation, au-delà de cette durée, en faveur d' un agent qui, tel que le requérant, passe successivement d' un régime d' emploi à l' autre sans changement du lieu d' affectation, le Tribunal estime que, à la lumière des considérations qui précèdent, cette argumentation d' équité ne trouve pas d' appui dans la réglementation pertinente actuellement en vigueur.

40 Il résulte de tout ce qui précède que le moyen invoqué par le requérant est fondé et que les conclusions en annulation doivent, dès lors, être accueillies. Par conséquent, la décision du 2 février 1993 portant rejet de la réclamation du requérant doit être annulée.

Sur les conclusions aux fins pécuniaires

41 Dans la mesure où le requérant conclut à ce qu' il soit ordonné au Parlement de lui verser les indemnités journalières non payées à concurrence de 170 239 BFR, le Tribunal estime que, s' agissant en l' occurrence d' un litige de caractère pécuniaire dans lequel le juge communautaire dispose d' une compétence de pleine juridiction, conformément à l' article 91, paragraphe 1, deuxième phrase, du statut, ces conclusions doivent être déclarées recevables. En ce qui concerne le montant de la somme sollicitée, le requérant a produit au cours de la procédure écrite, à la demande du Tribunal, un calcul des indemnités journalières non payées. A l' audience, le Parlement a déclaré, en réponse à une question du Tribunal, ne pas avoir d' objection à formuler sur ce montant. Par conséquent, les conclusions aux fins pécuniaires doivent être accueillies.

42 En ce qui concerne la demande du requérant tendant à ce qu' il soit ordonné au Parlement de lui verser des intérêts de retard à compter de la date de l' introduction de sa réclamation, il y a lieu de constater qu' il ressort de la requête que la demande de paiement d' intérêts n' a été formulée que pour le cas d' une annulation de la décision attaquée, de sorte que cette demande, qui présente en outre un caractère purement accessoire, n' avait pas besoin d' être déjà expressément mentionnée dans la réclamation que le requérant a adressée au Parlement (arrêt du Tribunal du 30 mars 1993, Vardakas/Commission, T-4/92, non encore publié au Recueil, point 50). Quant au fond, le Tribunal considère que, cette demande relevant également de sa compétence de pleine juridiction, il y a lieu de lui faire droit et de fixer le taux des intérêts moratoires à 8 % l' an (voir, par exemple, l' arrêt Vardakas/Commission, précité, point 49). La réclamation ayant été enregistrée au secrétariat général du Parlement le 13 juillet 1992, les intérêts moratoires devront être versés à compter de ce jour.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

43 Selon l' article 87, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement de procédure, le Tribunal peut répartir les dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs. Le Parlement ayant succombé sur l' essentiel de ses conclusions, il y a lieu de le condamner à supporter l' ensemble des dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête:

1) La décision du 2 février 1993, par laquelle le Parlement a rejeté la réclamation du requérant demandant l' allocation, pendant toute la durée de son stage augmentée d' un mois, des indemnités journalières prévues à l' article 10 de l' annexe VII du statut, est annulée.

2) Le Parlement est condamné à verser au requérant un montant de 170 239 BFR, majoré d' intérêts moratoires au taux de 8 % l' an à compter du 13 juillet 1992.

3) Le recours est rejeté pour le surplus.

4) Le Parlement est condamné à l' ensemble des dépens.

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