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Document 61992CC0137

    Conclusions de l'avocat général Van Gerven présentées le 29 juin 1993.
    Commission des Communautés européennes contre BASF AG, Limburgse Vinyl Maatschappij NV, DSM NV, DSM Kunststoffen BV, Hüls AG, Elf Atochem SA, Société artésienne de vinyle SA, Wacker Chemie GmbH, Enichem SpA, Hoechst AG, Imperial Chemical Industries plc, Shell International Chemical Company Ltd et Montedison SpA.
    Pourvoi - Concurrence - Décision de la Commission - Inexistence.
    Affaire C-137/92 P.

    Recueil de jurisprudence 1994 I-02555

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:1993:268

    61992C0137

    Conclusions de l'avocat général Van Gerven présentées le 29 juin 1993. - Commission des Communautés européennes contre BASF AG, Limburgse Vinyl Maatschappij NV, DSM NV, DSM Kunststoffen BV, Hüls AG, Elf Atochem SA, Société artésienne de vinyle SA, Wacker Chemie GmbH, Enichem SpA, Hoechst AG, Imperial Chemical Industries plc, Shell International Chemical Company Ltd et Montedison SpA. - Pourvoi - Concurrence - Décision de la Commission - Inexistence. - Affaire C-137/92 P.

    Recueil de jurisprudence 1994 page I-02555
    édition spéciale suédoise page I-00201
    édition spéciale finnoise page I-00239


    Conclusions de l'avocat général


    ++++

    Monsieur le Président,

    Messieurs les Juges,

    1. La présente affaire concerne un pourvoi formé par la Commission conformément à l' article 49 du statut CEE de la Cour de justice contre l' arrêt que le Tribunal de première instance a rendu le 27 février 1992 dans les affaires PVC (ci-après : "l' arrêt PVC")(1). Dans cet arrêt, le Tribunal a déclaré inexistante la décision 89/190/CEE de la Commission du 21 décembre 1988 "relative à une procédure d' application de l' article 85 du traité CEE (IV-31.865, PVC)" (ci-après : "la décision")(2) qui avait été notifiée aux parties défenderesses au pourvoi. La Commission demande à la Cour d' annuler l' arrêt PVC et de tirer de cette annulation toutes les conséquences juridiques nécessaires, à savoir, en particulier, de renvoyer les affaires devant le Tribunal afin qu' il puisse se prononcer sur les autres moyens qui avaient été invoqués par les parties demanderesses à la procédure devant cette juridiction et qui n' avaient pas été examinés dans l' arrêt PVC.

    Le plan de notre exposé sera le suivant. Dans un premier temps, nous aborderons l' exception d' irrecevabilité pour dépassement des délais soulevée par les parties défenderesses au pourvoi ainsi que, d' une manière générale, la question de l' irrecevabilité du recours en ce que la Commission y allègue des faits nouveaux. Nous examinerons ensuite les griefs formulés par la Commission à l' encontre de l' arrêt PVC ainsi que l' argumentation développée par les défenderesses au pourvoi en réponse à chacun de ces griefs, à savoir (i) l' appréciation donnée par le Tribunal des modifications apportées à la décision, (ii) les exigences du traité relatives aux conditions d' adoption des actes de la Commission et en particulier aux conditions d' adoption des versions linguistiques faisant foi d' une décision, (iii) la portée et l' interprétation de l' article 12 du règlement intérieur de la Commission et (iv) l' application de la théorie de l' inexistence des actes administratifs. Au préalable, nous allons rappeler brièvement les antécédents du litige.

    I. Contexte du litige

    2. A la suite de vérifications qu' elle avait effectuées au mois d' octobre 1983 auprès d' entreprises du secteur du polypropylène, conformément à l' article 14 du règlement n 17/62(3), la Commission avait entamé une enquête sur le polyvinylchloride (PVC). A cette occasion, elle a effectué diverses vérifications auprès des entreprises concernées et leur a adressé des demandes de renseignements à plusieurs reprises. Se fondant sur l' article 3 paragraphe 1 du règlement n 17, la Commission a décidé, le 25 mars 1988, d' entamer une procédure à l' encontre de 14 producteurs de PVC(4). Après que les parties eurent été mises en mesure de présenter leur point de vue sur les griefs qui leur étaient faits(5) par la Commission dans la communication des griefs du 5 avril 1988 et après que le comité consultatif en matière d' ententes et positions dominantes eut émis son avis sur la base d' un avant-projet de décision le 1er décembre 1988, la Commission a adopté la décision qui porte officiellement la date du 21 décembre 1988 et qui a été notifiée aux entreprises concernées au mois de février 1989. Le texte de la décision fait foi en allemand, en anglais, en français, en italien et en néerlandais.

    Dans la décision, les 14 producteurs de PVC ont été trouvés coupables d' une violation de l' article 85 paragraphe 1 du traité CEE qu' ils auraient commise - au cours des périodes indiquées dans la décision - en participant à un accord et/ou à une pratique concertée, remontant à août 1980 environ, en vertu desquels les producteurs approvisionnant en PVC le territoire du marché commun ont assisté à des réunions périodiques afin de fixer des prix "cibles" et des quotas "cibles", de planifier des initiatives concertées visant à élever le niveau des prix et de surveiller la mise en oeuvre de ces arrangements collusoires (Article 1er). Outre une injonction de mettre fin immédiatement aux infractions constatées et de s' abstenir à l' avenir des pratiques incriminées (article 2), les 14 producteurs se sont vu chacun imposer une amende individuelle (article 3).

    3. Pratiquement toutes les entreprises concernées(6) ont introduit un recours contre cette décision devant la Cour qui, le 15 novembre 1989, a transféré ces affaires devant le Tribunal(7). Toutes les parties requérantes ont demandé, à titre principal, l' annulation de la décision et, à titre subsidiaire, l' annulation ou du moins la réduction de l' amende infligée par l' article 3 de la décision(8).

    Pour ce qui est du raisonnement suivi par le Tribunal dans son arrêt PVC, on se référera au rapport d' audience. Qu' il me suffise d' indiquer ici que le Tribunal a décidé de déclarer la décision de la Commission juridiquement inexistante au motif qu' elle avait constaté (i) qu' une "atteinte particulièrement grave et manifeste au principe de l' intangibilité de l' acte adopté" avait été commise(9), (ii) que le commissaire en charge des questions de concurrence qui avait signé l' acte était incompétent ratione materiae et ratione temporis(10) et (iii) que l' acte concerné n' avait pas été authentifié.

    II. Exception d' irrecevabilité pour dépassement de délais

    4. Toutes les parties défenderesses au pourvoi, à l' exception de Shell, ICC et Montedison, ont soulevé une exception d' irrecevabilité pour dépassement des délais. Elles soutiennent à cet égard que, l' arrêt du Tribunal ayant été signifié à la Commission le 28 février 1992, le pourvoi aurait dû être formé dans le délai de deux mois, conformément à l' article 49 premier alinéa du statut CEE de la Cour, à savoir, en vertu de l' article 80, paragraphe 1, sous b) du règlement de procédure(11), le 28 avril 1992 au plus tard. Or, la Commission n' a déposé son pourvoi au greffe de la Cour que le 29 avril 1992.

    D' après les parties défenderesses, la Commission ne pourrait bénéficier des dispositions de la décision relative à l' augmentation des délais de procédure en raison de la distance(12). L' article 1er de cette décision dispose en effet que les délais de procédure ne peuvent pas être augmentés en raison de la distance pour les parties qui ont leur résidence habituelle au grand-duché de Luxembourg. En attendant une décision définitive sur le siège des institutions des Communautés, ce sont leurs lieux de travail provisoires qui devraient être considérés comme leur résidence habituelle. Il s' ensuivrait que la Commission a également sa résidence habituelle à Luxembourg parce qu' elle y exerce une partie importante de ses fonctions habituelles et qu' elle y dispose d' un certain nombre de services comprenant un nombre considérable de fonctionnaires.

    5. Nous ne saurions souscrire à ce point de vue. Il est exact que, selon une jurisprudence constante de la Cour, "l' application stricte des réglementations communautaires concernant les délais de procédure répond à l' exigence de la sécurité juridique et à la nécessité d' éviter toute discrimination ou traitement arbitraire dans l' administration de la justice"(13). L' on sait également que la question de savoir ce qui - pour l' application des délais de procédure en raison des distances - est la résidence habituelle d' une partie à la procédure est considérée par la Cour comme étant une question de fait : dans les arrêts Fonzi, elle a déjà dit pour droit que "le délai de distance relève seulement de la situation de fait, c' est-à-dire de la résidence du requérant"(14). Pour ce qui est des personnes juridiques ou des institutions, il est cependant d' usage d' adopter comme critère permettant de déterminer le lieu de leur résidence habituelle, le lieu où leur siège social est établi. En effet, en ce qui concerne le délai de recours d' une société destinataire d' une décision, la Cour a expressément jugé que le point de départ de ce délai se situait le jour de la notification au siège de cette société(15). C' est la raison pour laquelle l' élément déterminant pour le calcul des délais de procédure auxquels une institution telle que la Commission a droit est le lieu au départ duquel cette institution est effectivement dirigée, c' est-à-dire le lieu où sont prises les décisions relatives à l' activité de l' institution et d' où elle reçoit ses impulsions(16).

    6. Nul ne saurait contester que dans le cas de la Commission, ce centre nerveux est situé à Bruxelles. Il est vrai qu' au moment où la Commission a formé son pourvoi, le siège des institutions communautaires n' avait pas encore été fixé de manière définitive(17) et que la décision du 8 avril 1965 des représentants des gouvernements des Etats membres relative à l' installation provisoire de certaines institutions et de certains services des Communautés(18) était encore en vigueur. Toutefois, rien dans cette décision n' autorise, selon nous, à conclure que la Commission aurait sa "résidence habituelle" à Luxembourg. Les articles 7, 8 et 9 de cette décision énoncent seulement un certain nombre de services de la Commission qui seront installés à Luxembourg. Pour le surplus, la décision n' affecte pas, comme le déclare son article 12, "les lieux de travail provisoires des institutions et services des Communautés européennes", ces lieux de travail provisoires étant Luxembourg, Bruxelles et Strasbourg, comme le veut l' article 1er de la décision. Bien que cela ne soit pas exprimé de manière explicite dans la décision, chacun sait que le siège de la Commission en tant qu' organe de décision était déjà établi à Bruxelles sous le régime provisoire(19) et que l' établissement d' un certain nombre de ses services à Luxembourg devait constituer pour le grand-duché de Luxembourg une compensation pour le départ de la Haute Autorité de la CECA dont le siège qui se situait précédemment à Luxembourg avait été transféré à Bruxelles(20) en application du traité de fusion(21). Ce régime a été ratifié de manière définitive par la Décision prise de commun accord, le 12 décembre 1992, par les représentants des gouvernements des Etats membres relativement à la fixation des sièges des institutions et de certains organismes et services des Communautés européennes(22). Aux termes de l' article 1er, lettre c), de cette décision, la Commission a son siège à Bruxelles et les services énumérés aux articles susmentionnés de la décision de 1965 sont établis à Luxembourg.

    7. Nous déduisons de ce qui précède que, pour l' application des délais de procédure devant la Cour, la Commission a sa résidence habituelle à Bruxelles et que tel était déjà le cas sous le régime provisoire. Nous en concluons donc que, conformément à l' article 1er de la décision sur les délais de distance, la Commission a droit à une prolongation des délais de procédure de 2 jours. Sa requête a donc été introduite à temps de sorte que l' exception d' irrecevabilité pour dépassement des délais doit être rejetée.

    III. Exception d' irrecevabilité prise des faits nouveaux invoqués par la Commission

    8. La majorité des parties défenderesses excipent également du fait que le pourvoi est irrecevable dans la mesure où la Commission y donne un nouvel exposé des faits sur lequel le Tribunal ne s' est pas prononcé. Le pourvoi devant la Cour ne pouvant porter que sur des questions de droit, la Commission aurait dû se limiter à rappeler tous les faits essentiels tels qu' ils sont exposés dans l' arrêt rendu en première instance. La Commission aurait cependant omis certaines constatations essentielles du Tribunal et indiqué un certain nombre d' éléments nouveaux et elle n' aurait pas pris en considération la plupart des résultats qui étaient apparus à l' issue des mesures d' instruction prises en première instance. De surcroît, la Commission n' aurait pas donné un compte rendu exact de quelques parties essentielles de la procédure qui s' est déroulée devant le Tribunal de première instance.

    9. Qu' il nous suffise d' indiquer à cet égard qu' en ce qui concerne les constatations de fait, le Tribunal est souverain(23). Etant donné que le contrôle que la Cour peut exercer dans le cadre d' un pourvoi contre des arrêts du Tribunal est limité à des questions de droit (article 168 A, paragraphe 1, du traité CEE et article 51 du statut CEE de la Cour de justice), la Cour ne peut pas se prononcer sur des faits nouvellement allégués. Cela nécessiterait en effet une nouvelle appréciation des faits, ce qui est exclu par une jurisprudence constante :

    "[L]e pourvoi ne peut s' appuyer que sur des moyens portant sur la violation de règles de droit, à l' exclusion de toute appréciation des faits et n' est, en conséquence, recevable que dans la mesure où la requête fait grief au Tribunal d' avoir statué en méconnaissance de règles de droit dont il avait à assurer le respect"(24).

    C' est la raison pour laquelle nous partons du principe que pour apprécier les griefs énoncés par la Commission dans sa requête - mais également les arguments exposés par les parties défenderesses(25) -, seules les constatations de fait effectuées par le Tribunal peuvent être prises en considération. La description que, dans sa requête, la Commission donne des éléments de fait qui constituent les antécédents de l' affaire PVC n' a donc aucune valeur probante en droit et ne peut être considérée que comme une déclaration unilatérale. Nous n' avons dès lors pas besoin de revenir sur cette description.

    En revanche, nous entendons souligner d' emblée que lorsque, dans la partie "en droit" de sa requête, la Commission conteste les motifs de l' arrêt PVC dans la mesure où le Tribunal tire des conséquences juridiques de faits qu' il n' a pas établis à suffisance de droit, elle invoque une violation du droit qui, en tant que grief, doit, en principe, être déclarée recevable. En effet, le moyen pris de la "violation du droit communautaire" sur lequel, aux termes de l' article 51 du statut CEE de la Cour, un pourvoi peut être fondé, doit être interprété au sens large(26) : ainsi qu' il ressort de l' arrêt que la Cour a rendu dans l' affaire Vidrányi, cette notion ne recouvre pas seulement les règles écrites du droit communautaire mais également les principes généraux (non écrits) qui font partie de l' ordre juridique communautaire. Dans l' arrêt précité, la Cour a admis comme moyens de pourvoi le moyen pris de la violation du principe général du respect des droits de la défense ainsi que le moyen tiré de la violation de l' obligation pour un juge de motiver ses décisions(27). Or, tirer des conséquences juridiques de faits qui n' ont pas été établis ou qui ne l' ont pas été suffisamment constitue incontestablement une violation de cette obligation de motivation de sorte qu' un grief pris d' un tel procédé est un moyen tiré de la violation du droit communautaire et doit dès lors, en principe, être recevable devant la Cour(28). Nous aborderons la question de savoir si les moyens de la Commission contre lesquels l' exception d' irrecevabilité est dirigée satisfont à ces conditions lorsque nous examinerons ce point précis (au point 24 plus bas).

    IV. L' appréciation par le Tribunal des modifications apportées à la décision

    10. Le premier moyen d' annulation de l' arrêt PVC pris par la Commission est tiré de la violation du droit et d' une motivation incorrecte, notamment en ce qui concerne l' appréciation portée par le Tribunal sur les modifications qui ont été apportées à la décision entre le moment où le collège des commissaires a adopté la décision et le moment où celle-ci a été notifiée à ses destinataires. Les griefs de la Commission concernent (i) les modifications apportées au texte allemand de la décision et (ii) les modifications apportées à toutes les versions linguistiques, notamment l' alinéa ajouté au point 27 de la décision et la modification apportée au dispositif de la décision.

    Pour bien comprendre la teneur du moyen et le commentaire que nous allons en donner, il convient de rappeler préalablement le trente-cinquième considérant de l' arrêt PVC. Ce considérant indique en effet les éléments sur lesquels le Tribunal s' est fondé pour analyser les modifications qui ont été apportées à la décision. Partant de l' arrêt que la Cour a rendu le 23 février 1988 dans l' affaire 131/86, Royaume-Uni contre Conseil (ci-après : "l' arrêt Royaume-Uni contre Conseil")(29) - sur lequel nous reviendrons aux points 13 et 14 plus bas -, le Tribunal aboutit à la réflexion suivante :

    "Le principe de l' intangibilité de l' acte, une fois adopté par l' autorité compétente, constitue un facteur essentiel de sécurité juridique et de stabilité des situations juridiques dans l' ordre communautaire, aussi bien pour les institutions communautaires que pour les sujets de droit qui voient leur situation juridique et matérielle affectée par une décision desdites institutions. Seul le respect rigoureux et absolu de ce principe permet d' acquérir la certitude que, postérieurement à son adoption, l' acte ne pourra être modifié que dans le respect des règles de compétence et de procédure et que, par voie de conséquence, l' acte notifié ou publié constituera une copie exacte de l' acte adopté, reflétant ainsi fidèlement la volonté de l' autorité compétente."

    A. Les modifications apportées au texte allemand de la décision

    11. La décision du Tribunal et le point de vue des parties. La Commission considère que le Tribunal a violé le droit en ce qu' il a estimé (i) qu' il n' était pas nécessaire d' examiner le point de savoir si les modifications constatées dans la version allemande de la décision revêtaient ou non un caractère substantiel et (ii) que ces modifications entachaient la légalité de la décision dans son ensemble à l' égard de toutes les parties requérantes en première instance. Nous aborderons d' abord la première question ; rappelons toutefois brièvement le passage concerné de l' arrêt PVC.

    Le Tribunal a constaté que la décision adoptée par le collège des commissaires au cours de sa réunion du 21 décembre 1988 comportait, dans sa version allemande, "des discordances sensibles d' une nature autre que grammaticale ou syntaxique" par rapport à la version anglaise et à la version française de la décision - il s' agit là des trois versions linguistiques qui ont été approuvées au cours de la réunion - et par rapport à la version allemande telle qu' elle a été notifiée et publiée au Journal officiel du 17 mars 1989(30). Après avoir énuméré toutes les modifications en cause (cf. le point 14 plus bas), le Tribunal a déclaré ce qui suit au point 42 :

    "Dès lors que les modifications ainsi apportées, d' une part, sont postérieures à l' adoption de l' acte le 21 décembre 1988 et, d' autre part, ne présentent pas un caractère purement orthographique ou syntaxique, elles ont nécessairement été ajoutées par une personne incompétente pour ce faire, et, par suite, elles affectent le caractère intangible de l' acte adopté par le collège des commissaires, sans qu' il y ait lieu d' examiner la portée, l' importance ou le caractère substantiel de ces modifications, ainsi qu' il ressort de l' arrêt de la Cour du 23 février 1988, précité".

    12. La Commission affirme qu' en lisant l' arrêt Royaume-Uni contre Conseil comme il l' a fait, le Tribunal a donné une interprétation incorrecte de l' article 190 du traité CEE qui est la disposition sur laquelle cet arrêt était fondé. Aux termes de cet article "(l)es règlements, les directives et les décisions du Conseil et de la Commission sont motivés et visent les propositions ou avis obligatoirement recueillis en exécution du (...) traité". Pour pouvoir retenir une violation de cet article, il faudrait qu' il ait été démontré que les modifications apportées à l' acte après son adoption revêtent un caractère substantiel. Dans le cas qui nous concerne aujourd' hui, il ne s' agirait cependant que de corrections de nature linguistique qui, à aucun égard, n' entament les prérogatives des membres de la Commission ni, a fortiori, les droits des destinataires de la décision. La Commission fait enfin valoir qu' il devrait lui être possible de corriger une version linguistique d' une décision, même lorsque cette version est une version authentique, afin de la mettre en parfaite concordance avec la version linguistique dans laquelle l' acte a été dressé.

    Les parties défenderesses rétorquent que les différences relevées entre le texte soumis au collège des commissaires et le texte notifié dans la version allemande vont beaucoup plus loin que de simples corrections de nature syntaxique ou orthographique, les seules corrections qui, selon elles, pourraient être apportées à l' acte après l' adoption de celui-ci, ainsi qu' il apparaîtrait de l' arrêt Royaume-Uni contre Conseil. La distinction que la Commission fait entre les modifications substantielles et les modifications qui ne présenteraient pas ce caractère ne trouverait aucun appui dans la jurisprudence et ne pourrait être étayée sur aucun critère objectif.

    13. L' arrêt Royaume-Uni/Conseil dans l' affaire 131/86. Ceci nous amène à analyser de plus près l' arrêt Royaume-Uni contre Conseil. Dans cette affaire, le Royaume-Uni avait demandé à la Cour d' annuler la directive 86/113/CEE du Conseil, du 25 mars 1986, établissant les normes minimales relatives à la protection des poules pondeuses en batterie(31). Le deuxième moyen d' annulation était pris de ce que le texte du préambule de la directive différait en trois points du projet qui avait été soumis à l' approbation du Conseil. La Cour a déclaré ce moyen fondé, basant son raisonnement sur le règlement intérieur du Conseil et sur l' article 190 du traité CEE. Après avoir récapitulé les dispositions applicables du règlement intérieur précité, la Cour a dit pour droit - et nous citons in extenso :

    "Toutefois, le règlement intérieur du Conseil n' autorise ni le secrétaire général ni le personnel du secrétariat général à apporter des modifications ou des corrections aux textes adoptés par le Conseil. Même s' il est vrai qu' il est inhérent aux fonctions du secrétariat général du Conseil de procéder à des rectifications de nature orthographique ou grammaticale, cette faculté ne peut pas s' étendre au contenu même de l' acte en cause.

    [L]es modifications effectuées par le secrétariat général du Conseil ne concernent que la motivation de la directive en cause sans toucher au corps même de l' acte. Cette motivation a cependant été élaborée en fonction de l' article 190 du traité, qui exige que les règlements, les directives et les décisions du Conseil et de la Commission contiennent un exposé des raisons qui ont amené l' institution à les arrêter, de sorte que la Cour puisse exercer son contrôle et que tant les Etats membres que les ressortissants intéressés connaissent les conditions dans lesquelles les institutions communautaires ont fait application du traité (voir l' arrêt du 7 juillet 1981, affaire 150/80, Rewe, Rec. 1981, p. 1805).

    Il ressort de cette considération que la motivation d' un acte en constitue un élément essentiel. Par conséquent, ni le secrétaire général du Conseil ni le personnel de son secrétariat général n' ont le pouvoir de modifier la motivation des actes approuvés par le Conseil"(32).

    Dès lors qu' il avait été établi que les modifications apportées à la directive allaient beaucoup plus loin que de simples corrections de nature grammaticale ou orthographique, la Cour a annulé la directive querellée(33).

    14. Différences entre la présente affaire et l' affaire 131/86. Il nous semble que le Tribunal a trop facilement laissé de côté quelques différences importantes entre la situation en cause dans l' affaire Royaume-Uni contre Conseil et la situation qui nous intéresse dans le présent litige (cf. ci-après) ainsi que la question de savoir (cf. les points 15 à 17 plus bas), à la lumière de la jurisprudence de la Cour relative à l' article 190 du traité CEE, quel est le critère précis permettant d' apprécier si certaines modifications apportées, après son approbation officielle, à une décision individuelle prise en matière de concurrence sont ou non illégales.

    En ce qui concerne le premier point, à savoir les différences considérables de circonstances, les deux affaires se distinguent, en premier lieu, par la nature des modifications. Il en résulte que rien n' autorise, selon nous, à déduire de l' arrêt Royaume-Uni contre Conseil que l' on pourrait passer sous silence "la portée, l' importance ou le caractère substantiel ou non" des modifications. En effet, la Cour a établi dans cet arrêt une distinction entre des modifications du contenu d' un acte, ce qui inclut également son exposé des motifs, et des rectifications de nature purement linguistique(34). Les divergences dans le texte du préambule auxquelles la Cour a été confrontée dans cette affaire relevaient incontestablement de la première catégorie : elles concernaient notamment la base juridique de la directive en cause (une référence additionnelle à un article du traité avait été ajoutée dans le préambule) et la suppression d' un considérant entier dans le préambule(35). S' il faut admettre, dans la présente affaire, que les divergences indiquées par le Tribunal qui apparaissent dans la version allemande de la décision ne constituent pas de simples rectifications "orthographiques ou grammaticales" au sens de l' arrêt Royaume-Uni contre Conseil, nous estimons néanmoins qu' à les examiner de plus près, ces divergences ne sont pas davantage de nature à modifier le contenu, c' est-à-dire la portée de la motivation de la décision. Il est manifeste que les modifications n' ont été apportées que pour mettre la version allemande de la décision en concordance avec les versions anglaise et française (il s' agit des modifications citées sous le premier et le deuxième tirets du point 41 de l' arrêt(36)) ou pour éliminer une faute d' orthographe qui trouvait son origine dans le texte anglais (il s' agit cette fois de la troisième modification citée sous le troisième tiret(37)). En tout état de cause, ces modifications sont à ce point limitées et ponctuelles qu' elles ne pouvaient avoir le moindre impact sur l' appréciation juridique de la violation de l' article 85 du traité CEE ni sur le droit des destinataires de la décision à une protection juridique aussi complète que possible (cf. le point 17 plus bas).

    Une deuxième différence importante entre l' affaire Royaume-Uni contre Conseil et la présente affaire consiste, du moins en ce qui concerne cette branche du premier moyen, en ce qu' il s' agit ici uniquement de divergences dans une seule version linguistique, à savoir la version allemande, alors que dans la première affaire, les modifications qui avaient été constatées apparaissaient dans toutes les versions linguistiques. Ceci semble confirmer que, comme le soutient la Commission, les modifications apportées à la version allemande de la décision avaient essentiellement pour objet de rendre cette version identique aux versions rédigées dans les autres langues.

    Signalons enfin une dernière différence, essentielle selon nous, entre la situation à laquelle a trait l' arrêt Royaume-Uni contre Conseil et la situation qui nous occupe dans la présente affaire. Dans la première affaire, un Etat membre, qui siège en qualité de membre dans l' institution communautaire concernée, à savoir le Conseil (cf. l' article 2 du traité de fusion), s' estimait - à bon escient - lésé dans ses droits parce qu' après l' approbation de la directive litigieuse par le Conseil, certaines modifications avaient été opérées sans suivre la procédure prévue pour l' adoption des décisions, ce qui avait empêché cet Etat membre de participer à ce processus. Il est incontestable que cet Etat membre, sur la base du règlement intérieur de l' institution, dont il fait partie, pouvait invoquer l' incompétence du secrétariat général à apporter des modifications dans un texte qui avait déjà été adopté(38). Il est tout aussi incontestable que la question de savoir si cette violation avait causé un préjudice au Royaume-Uni en l' espèce était dénuée de pertinence pour l' appréciation de la Cour : en effet, comme la Cour l' a encore rappelé dans ce même arrêt(39), l' article 173 du traité CEE ouvre à tout Etat membre le droit de contester la légalité d' une directive sans qu' il doive pour cela justifier d' un intérêt à agir. Tout autre est la situation qui nous concerne en l' espèce où il s' agit d' une décision dans laquelle la Commission, agissant sur la base de l' article 3 paragraphe 1 du règlement n 17, a constaté une violation de l' article 85 du traité CEE : aux termes de l' article 173 deuxième alinéa du traité CEE, les particuliers - qui ne peuvent évidemment pas s' autoriser de la qualité de membre de l' institution communautaire concernée et se prévaloir en tant que tels du droit à un processus correct de décision(40) - ne peuvent contester la légalité d' une telle décision qu' à la condition que celle-ci leur soit adressée ou qu' elle les concerne directement et individuellement.(41)

    15. L' obligation faite par l' article 190 du traité CEE de motiver les décisions individuelles dans les affaires de concurrence. Ceci nous amène à notre deuxième critique. L' arrêt Royaume-Uni contre Conseil qui, comme nous l' avons déjà dit, a trait à une directive n' est pas le seul à faire autorité lorsqu' il s' agit de savoir si la condition de motivation énoncée à l' article 190 du traité CEE est remplie. Il n' est surtout pas le seul à faire autorité dans un cas comme celui qui nous occupe aujourd' hui où il s' agit d' une décision individuelle dans une affaire de concurrence. Dans ce domaine, en effet, la Cour a consacré à cette condition une jurisprudence abondante dont l' arrêt PVC fait coupablement abstraction. Cette critique dépasse d' ailleurs le moyen que nous examinons ici dès lors qu' à d' autres endroits également, le Tribunal fonde son arrêt sur l' interprétation précitée de l' article 190 du traité CEE et de l' arrêt Royaume-Uni contre Conseil(42).

    16. Selon une jurisprudence constante de la Cour, l' obligation de motiver une décision individuelle a pour but

    "de permettre à la Cour d' exercer son contrôle sur la légalité de la décision et de fournir à l' intéressé une indication suffisante pour savoir si la décision est bien fondée ou si elle est entachée d' un vice permettant d' en contester la légalité"(43).

    C' est la raison pour laquelle la motivation exigée par l' article 190 du traité doit faire apparaître d' une façon claire et non équivoque le raisonnement de l' autorité communautaire auteur de l' acte incriminé(44). L' étendue précise de l' obligation de motivation dépend cependant de la nature de l' acte en cause et des circonstances dans lesquelles il a été pris(45). Il y a notamment lieu de tenir compte à cet effet du contexte dans lequel la décision a été prise, des possibilités matérielles et des conditions techniques ainsi que du délai dans lequel elle devait intervenir(46) ; il faut également tenir compte de l' éventuel intérêt que la décision peut présenter pour ses destinataires ou pour d' autres personnes qui seraient directement et individuellement concernées par elle, au sens de l' article 173 deuxième alinéa du traité CEE(47).

    En ce qui concerne plus spécifiquement les affaires de concurrence, la Cour estime que la Commission a satisfait à l' obligation de motivation qui lui est faite par l' article 190 lorsqu' elle indique dans sa décision les éléments de fait et de droit dont dépend la justification légale de celle-ci(48). La Commission n' est pas tenue d' aborder à cette occasion tous les points de fait et de droit qui ont été soulevés par les intéressés au cours de la procédure administrative(49). Il suffit au contraire qu' elle ait suffisamment exposé toutes les considérations de fait et de droit sur lesquelles elle s' est basée pour aboutir au dispositif de sa décision, ce qui veut dire, en d' autres termes, qu' elle doit fournir aux intéressés les indications nécessaires pour savoir si la décision est ou non fondée(50). En ce qui concerne plus particulièrement les décisions infligeant une amende, la Cour a dit pour droit que

    "la motivation doit être jugée suffisante dès lors qu' elle fait apparaître de façon claire et cohérente les considérations de fait et de droit sur lesquelles s' appuie la condamnation des intéressés, de manière à permettre tant à ceux-ci qu' à la Cour de connaître les éléments essentiels du raisonnement de la Commission"(51).

    C' est pourquoi la Cour estime qu' il n' y a pas manquement à l' obligation de motivation imposée par l' article 190 lorsque "la décision, considérée dans son ensemble, indique clairement et de manière cohérente les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels elle s' appuie"(52). Il n' y a pas davantage une telle violation lorsque la Commission écarte des motifs de sa décision des éléments qu' elle estimait, à tort ou à raison, étrangers à l' affaire(53). Même lorsque certains passages n' ont pas été rédigés avec toute la précision souhaitable, il n' y a aucune violation des formes substantielles au sens de l' article 173 lorsque cette circonstance n' est pas de nature à empêcher les requérantes ou la Cour de comprendre la portée du grief soulevé par la Commission et d' en apprécier le bien ou le mal-fondé(54). Il y a cependant une telle violation des formes substantielles lorsque la motivation s' avère par trop sommaire, notamment parce que la Commission va sensiblement plus loin qu' elle ne l' avait fait dans des décisions précédentes(55).

    17. Il faut, selon nous, déduire de cette jurisprudence les principes directeurs suivants en ce qui concerne la signification de l' article 190 du traité CEE dans les affaires de concurrence. L' obligation de motivation imposée par cette disposition n' a pas un caractère absolu mais bien un caractère relatif en ce sens qu' elle vise à permettre aux destinataires d' une décision de connaître et de défendre leurs droits aussi bien que possible(56). C' est la raison pour laquelle ils doivent être instruits d' une manière suffisamment claire et cohérente des points principaux du raisonnement suivi par la Commission, c' est-à-dire qu' ils doivent être informés des considérations de fait et de droit qui leur sont nécessaires pour connaître le bien-fondé de la décision prise à leur égard.

    La motivation doit en outre permettre à la Cour d' exercer, dans le cadre de recours formés par les destinataires d' une décision dans des affaires de concurrence, le contrôle de légalité que l' article 173 du traité CEE lui donne pour mission d' exercer. Ce dernier principe procède lui aussi de la nécessité d' assurer une protection juridique aussi complète que possible des destinataires de l' acte en cause.

    Il n' y a cependant aucune violation de l' article 190 du traité CEE lorsque les lacunes signalées par les parties ne sont pas de nature à influencer la situation juridique des entreprises concernées, c' est-à-dire lorsqu' elles ne sont pas susceptibles de porter atteinte à leur droit à une protection juridique aussi complète que possible(57).

    18. Application de la jurisprudence précitée aux modifications querellées. En ce qui concerne plus spécifiquement le problème qui nous occupe ici, à savoir la manière dont il y a lieu de considérer, au regard de l' article 190 du traité CEE, les modifications (restreintes) qui ont été apportées au texte d' une décision en matière de concurrence entre le moment de l' approbation de celui-ci et le moment de sa notification et de sa publication, les arrêts Suiker Unie et Hasselblad nous paraissent particulièrement pertinents(58).

    Dans l' arrêt Suiker Unie, une des parties avait tiré grief d' une faute qui n' apparaissait que dans la version française de la décision qui avait été notifiée aux parties, à savoir que cette version indiquait comme année pendant laquelle une pratique contraire aux règles de la concurrence avait commencé, la campagne 1969/1970 au lieu de la campagne 1968/1969. La Cour a rejeté l' objection de cette partie qui souhaitait s' en tenir au texte français qui lui avait été notifié : en effet, la communication des griefs avait indiqué avec suffisamment de clarté à partir de quelle campagne la Commission entendait retenir la pratique concertée en cause à la charge de la contrevenante et, de surcroît, il apparaissait des pièces du dossier que la partie en question avait clairement compris la décision en ce sens. Dans ces circonstances, la Cour a dit pour droit que la décision devait être lue en ce sens que l' infraction aux règles de la concurrence avait été constatée à partir de la campagne de 1968/1969(59).

    Dans l' arrêt Hasselblad, il s' agissait d' une omission qui affectait toutes les versions linguistiques du texte d' une décision tel qu' il avait été notifié et publié. Cette omission concernait la désignation des clauses d' un contrat type de concessionnaire de la marque Hasselblad qui avaient été jugées incompatibles avec l' article 85, paragraphe 1, du traité CEE. Une des clauses incriminées n' apparaissait que dans une version ultérieure, amendée, du contrat type de concessionnaire alors que deux des autres clauses qui figuraient dans la version originelle de ce contrat type portaient un autre numéro. La Cour a néanmoins jugé que cette lacune n' était pas insurmontable et elle a dit pour droit que la décision devait être entendue comme se référant aux clauses que la Commission avait effectivement visées (mais qu' elle avait désignées d' une manière erronée) :

    "Si à leur égard une erreur de plume s' est glissée dans la décision, cette erreur n' a pu affecter matériellement la compréhension par la requérante des reproches qui lui sont adressés"(60).

    19. Les arrêts Suiker Unie et Hasselblad me confortent dans la conclusion à laquelle j' ai abouti plus haut (au point 17), à savoir que pour apprécier s' il est satisfait à l' exigence de motivation énoncée à l' article 190 du traité CEE, la Cour se laisse guider en premier lieu par la question de savoir si les destinataires de la décision ont été suffisamment, c' est-à-dire d' une manière suffisamment claire et cohérente, informés des griefs qui leur sont faits. Cette condition était remplie dans l' une comme dans l' autre affaire. Si la Cour a pu conclure que des divergences ponctuelles entre les différentes versions linguistiques du texte notifié d' une décision ou des erreurs de plume dans toutes les versions linguistiques du texte notifié ne peuvent pas entamer la validité de la décision en question dès lors que ces divergences n' ont pas eu une importance essentielle pour la compréhension de la critique formulée par la Commission, nous ne voyons guère comment on pourrait, sur la base de l' article 190 du traité CEE, conclure à l' illégalité d' une décision dans laquelle des corrections linguistiques mineures ou des modifications de fond peu importantes ont été apportées à la version en langue allemande encore avant que la décision soit notifiée aux parties, c' est-à-dire avant que les parties aient pu prendre connaissance officiellement des griefs qui leur étaient faits par la Commission(61). Pour autant que cet élément pose problème, celui-ci se situe exclusivement au niveau de la compétence de celui qui a opéré les modifications en cause (cf. le point 44 plus bas).

    20. Les éléments que nous venons d' exposer nous permettent de prendre la position suivante sur le premier grief de la Commission. En refusant de prêter attention à "la portée, l' importance ou le caractère substantiel ou non" des modifications apportées à la décision après son approbation, le Tribunal a donné, selon nous, une lecture trop absolue de l' arrêt Royaume-Uni contre Conseil. Il apparaît de la jurisprudence de la Cour relative à l' obligation faite par l' article 190 du traité CEE de motiver les décisions en matière de concurrence que le critère à prendre en compte pour examiner le point de savoir s' il a été satisfait à cette exigence n' est pas tant la question de savoir si de telles modifications vont au-delà de simples rectifications "orthographiques et grammaticales" mais bien celle de savoir si elles ont influencé de manière essentielle la compréhension que les parties défenderesses ont eue des griefs qui leur étaient faits par la Commission et si elles ont, du fait de cette influence, porté atteinte à leur droit à une protection juridique aussi complète que possible. Contrairement à ce qu' allèguent les défenderesses, ce critère nous paraît parfaitement objectif et suffisamment applicable pour permettre un contrôle juridictionnel efficace. Le Tribunal étant passé outre à ce critère, nous nous trouvons en présence d' une violation du droit communautaire.

    21. A titre subsidiaire : la légalité de la décision dans son ensemble est-elle entamée à l' égard de tous les destinataires ? Compte tenu de la conclusion qui précède, il n' est pas nécessaire, à strictement parler, que nous abordions la deuxième violation du droit alléguée par la Commission, à savoir la question de savoir si les modifications apportées à la version allemande de la décision étaient susceptibles d' entamer la légalité de la décision dans son ensemble et à l' égard de toutes les parties requérantes. A titre subsidiaire, cependant, dans la mesure où la Cour déciderait, contrairement au point de vue que nous venons de défendre, de considérer les modifications litigieuses comme une violation de l' article 190 du traité CEE, nous allons néanmoins nous pencher sur cet argument.

    Faisons une première remarque à ce propos : il est exact que, comme les parties défenderesses l' ont fait observer, le Tribunal n' a pas dit en toutes lettres que la légalité d' une décision est entachée dans son ensemble par le fait que des modifications ont été apportées dans une version linguistique déterminée après son approbation par le collège des commissaires. Nous considérons néanmoins que c' est ce qui découle nécessairement du point 42 de l' arrêt, et plus précisément du passage où le Tribunal déclare "par suite, elles (c' est-à-dire les modifications) affectent le caractère intangible de l' acte adopté par le collège des commissaires". Cela apparaît encore plus clairement lorsqu' on lit ce passage en combinaison avec le point 49 de l' arrêt PVC dans lequel le Tribunal déclare que " des modifications qui affectent les motifs d' une décision présentent, comme l' a jugé la Cour, le caractère d' un vice de nature à affecter la légalité de l' ensemble de la décision modifiée, dès lors que (...) de telles modifications tendent à ruiner l' effet utile de l' article 190 du traité"(62). Il faut donc accepter d' emblée que le Tribunal a effectivement déduit des modifications en cause qui avaient été apportées au texte allemand de la décision l' invalidité de la décision dans son ensemble, c' est-à-dire l' invalidité de toutes les versions linguistiques, et ce à l' égard de tous les autres destinataires.

    Nous estimons qu' une telle conclusion est manifestement disproportionnée. Selon nous, la violation de l' article 190 du traité CEE, si tant est qu' une telle infraction ait été commise, ne peut avoir d' impact que sur la validité de la décision dans la version allemande qui fait foi. Une des caractéristiques essentielles d' une décision est en effet, ainsi qu' il découle de l' article 189, quatrième alinéa du traité CEE, qu' elle est un acte juridique individuel(63). Une décision a pour objet d' appliquer une règle générale (en l' espèce l' article 85 du traité CEE) dans un cas concret : c' est la raison pour laquelle elle n' est obligatoire que pour ceux auxquels elle est expressément adressée et cela conformément à l' article 3 du règlement n 1 du Conseil, du 15 avril 1958, portant fixation du régime linguistique de la Communauté économique européenne(64), uniquement dans la langue de l' Etat membre à la juridiction duquel le destinataire ressortit. Les défauts de motivation qui n' apparaissent que dans une version linguistique de la décision n' influencent dès lors que la situation juridique des destinataires pour lesquels c' est cette langue qui fait foi.

    Contrairement à ce qu' affirment Huels AG, la Société Artésienne de Vinyle (ci-après : SAV) et Shell ICC, le fait que la Commission n' a pris dans cette affaire qu' une seule décision, pour laquelle il existe certes différentes versions faisant foi, ne change rien à la situation. Dans l' arrêt Suiker Unie, la Cour a en effet décidé que :

    "rien n' interdit à la Commission de statuer par une décision unique sur plusieurs infractions, même si certains destinataires sont étrangers à certaines de ces infractions, à condition que la décision permette à tous les destinataires de dégager avec précision les griefs retenus à son égard"(65).

    Les modifications qui ont été apportées à la version allemande d' une décision n' entament à aucun égard la capacité des destinataires auxquels la décision a été notifiée dans une autre langue faisant foi qui est la leur, de lire avec précision les griefs qui leur sont faits dans cette décision. Les modifications apportées à une version d' une décision rédigée dans une langue faisant foi n' ont dès lors aucun impact sur la légalité de la décision dans les autres langues faisant foi.

    Nous estimons en conséquence que, sur ce point également, nous nous trouvons en présence d' une violation du droit communautaire en ce qu' une sanction disproportionnée a été infligée.

    B. Les modifications apportées dans toutes les versions linguistiques de la décision

    22. La décision du Tribunal et le point de vue des parties. Outre les modifications apportées au texte allemand de la décision, le Tribunal a constaté, dans le cadre des mesures d' instruction qu' il avait ordonnées, deux modifications qui avaient été apportées à la décision entre le moment de son approbation par le collège des commissaires et le moment de sa notification dans toutes les versions linguistiques. Il s' agit : (i) de l' insertion, dans le point 27 de la décision, d' un quatrième alinéa entièrement neuf (pour le texte de celui-ci, cf. le point 27 plus bas) et (ii) de l' omission, à l' article 1er du dispositif de la décision, de la mention "(EMC-Group)" derrière le nom de l' entreprise SAV.

    La Commission conteste l' appréciation que le Tribunal a donnée de ces deux modifications, se fondant, pour chacune d' elles, sur deux moyens que nous pouvons résumer comme suit. En ce qui concerne la première modification, elle affirme (i) qu' en estimant, d' une part, que l' alinéa qui a été ajouté au point 27 de la décision dans toutes les versions linguistiques n' a pas été approuvé par le collège des commissaires et en jugeant, d' autre part, que le caractère substantiel de cet alinéa est incontestable, le Tribunal ne s' est pas acquitté de son obligation de motivation ; (ii) qu' en ne jugeant pas nécessaire d' examiner sur le caractère substantiel de cet alinéa, il a violé le droit ; et (iii) qu' en affirmant que l' addition de celui-ci entache la légalité de la décision dans son ensemble, il s' est rendu coupable d' une violation du droit. Quant à la deuxième modification, la Commission fait valoir (i) qu' en jugeant que l' omission de la mention "(EMC-Group)" serait d' une nature telle que la portée de la décision s' en trouverait modifiée, le Tribunal ne s' est pas acquitté de son obligation de motivation et (ii) qu' en estimant que cette omission entache la légalité de la décision dans son ensemble, et cela à l' égard de toutes les parties requérantes, il s' est rendu coupable d' une violation du droit.

    23. Exception d' irrecevabilité fondée sur l' allégation de faits nouveaux ?

    Avant d' analyser tous ces griefs, il nous faut d' abord examiner l' exception d' irrecevabilité soulevée par la plupart des parties défenderesses dans la mesure où la Commission allègue dans son pourvoi des éléments de fait nouveaux sur lesquels le Tribunal ne se serait pas prononcé. Aux points 5 et 38 de pourvoi, la Commission aurait notamment révélé des faits nouveaux, ayant trait en particulier à ce qui avait été convenu au cours de la réunion spéciale des chefs de cabinet qui s' est tenue dans la matinée du 19 décembre 1988, à ce que ces mêmes chefs de cabinet ont décidé de recommander à la Commission au cours de leur réunion hebdomadaire habituelle qui s' est tenue le même jour, et à ce que le collège des commissaires avait débattu au cours de sa réunion du 21 décembre 1988.

    24. Comme nous l' avons indiqué au point 9 plus haut, la Cour est en principe liée par les constatations de faits opérées par le Tribunal. C' est la raison pour laquelle elle ne peut pas se laisser guider par de nouvelles données de fait mises en avant par les parties. Aux points 5 et 38 de son pourvoi, en effet, la Commission invoque trois éléments de fait qui n' ont pas été constatés par le Tribunal dans son arrêt et dont elle ne saurait dès lors se prévaloir devant la Cour :

    - Au point 5, la Commission fait une citation extraite de la conclusion du procès-verbal de la réunion spéciale des chefs de cabinet qui s' est tenue au cours de la matinée du 19 décembre 1988. Il apparaîtrait de cette conclusion qu' il aurait été convenu, sur proposition du cabinet du commissaire chargé des affaires de concurrence, d' ajouter au point 27 du projet de décision un alinéa dont le texte est repris en anglais et en français à l' annexe III du procès-verbal de cette réunion. Cette conclusion ne figure cependant pas dans la partie de ce procès-verbal (il s' agit d' un document qui porte le n SEC (88) 2033) que la Commission a produite devant le Tribunal le 21 novembre 1991 dans le cadre de la procédure orale(66).

    - Au point 5 de son pourvoi, la Commission affirme encore qu' au cours de leur réunion hebdomadaire ordinaire du 19 décembre 1988 à midi, les chefs de cabinet ont recommandé à la Commission d' approuver les propositions du commissaire chargé des affaires de concurrence aux conditions énoncées dans le procès-verbal de la réunion spéciale qui s' était tenue ce matin-là. Ce fait n' a cependant pas été constaté par le Tribunal dans son arrêt.

    - Au point 38 de son pourvoi, la Commission relève enfin qu' au cours de la neuf cent quarante cinquième réunion du collège des commissaires qui s' est tenue le 21 décembre 1988, les membres de la Commission "après avoir eu un échange de vues sur des questions de portée générale, comme par exemple le montant des amendes [(...)], ont entièrement suivi les recommandations des chefs de cabinet". Cet élément n' est, lui non plus, consigné à aucun endroit dans les constatations de fait du Tribunal. Celui-ci, au contraire, se basant sur le texte du procès-verbal de ladite réunion du collège des commissaires qui s' est tenue le 21 décembre 1988, a uniquement constaté que le collège a pris connaissance de l' examen de l' affaire par les chefs de cabinet des commissaires lors de la réunion spéciale hebdomadaire du 19 décembre 1988 (mais voir le point 25 plus bas)(67).

    L' argumentation de la Commission doit donc être déclarée irrecevable dans la mesure où elle repose sur ces éléments de faits. Concrètement, cette irrecevabilité signifie uniquement, selon nous, que pour juger le grief que la Commission a exposé au point 38 de son pourvoi - et que nous avons reproduit au point 22, à propos de la première modification, sous (i) -, la Cour doit faire abstraction de ces faits nouvellement allégués. Cela n' implique cependant pas que la totalité de ce grief serait irrecevable : la portée de (l' ensemble de) ce grief est en effet, pour l' essentiel, qu' en décidant, sur la base de données de fait insuffisamment établies, que l' alinéa concerné n' avait pas été approuvé par le collège des commissaires, le Tribunal a manqué à son obligation de motivation. Dans cette mesure-là, le grief doit être déclaré recevable et soumis à examen (cf. le point 9 plus haut).

    25. Examen des griefs en ce qui concerne l' addition d' un nouvel alinéa. Le Tribunal aurait, selon la Commission, manqué à son obligation de motivation en décidant, sur la base de données de fait insuffisamment établies, que l' alinéa nouvellement ajouté (voir le texte au point 27 plus bas) n' avait pas été approuvé par le collège des commissaires. Si on le comprend de la sorte, une analyse plus attentive démontre, selon nous, que le grief de la Commission doit être jugé fondé. La lecture que le Tribunal fait du procès-verbal de la séance de la Commission en question est essentielle dans le raisonnement qui lui a permis d' aboutir à la conclusion que l' alinéa concerné n' avait pas été approuvé par le collège des commissaires. C' est en se basant sur ce texte qu' au point 46 de l' arrêt, le Tribunal a jugé qu' il était établi que la Commission a seulement pris connaissance de l' examen de l' affaire par les chefs de cabinet des commissaires lors de la réunion spéciale du 19 décembre 1988(68). Au point 47 de l' arrêt, le Tribunal déclare qu' "il ressort des termes mêmes du procès-verbal de la réunion, précédemment analysés (voir ci-avant point 37) que le collège des commissaires, en adoptant les projets du 14 décembre 1988 qui ne contiennent pas cet alinéa, a implicitement entendu ne pas adopter l' amendement". Cependant, si l' on examine sur ce point les termes mêmes du procès-verbal - et non pas le résumé qu' en donne le Tribunal au point 37 de l' arrêt PVC -, on peut y lire en toutes lettres au point 2 :

    "La Commission prend connaissance du résultat de l' examen de cette question par les chefs de cabinet lors de leur réunion spéciale (cf. doc. SEC (88) 2033, point 11) et lors de leur réunion hebdomadaire (cf. doc. SEC (88) 1958, point 16)".

    Nous constatons que la manière dont le Tribunal reproduit ce passage au point 37 de son arrêt n' est pas tout à fait précise : (i) d' une part, le Tribunal ne mentionne pas que le point concerné se réfère expressément au procès-verbal de la réunion spéciale des chefs de cabinet (qui portait la référence SEC (88) 2033 et qui comportait en annexe, ainsi qu' il est apparu de la déclaration faite et des pièces produites par la Commission le 21 novembre 1991, l' appendice III dans lequel figure l' alinéa ajouté)(69) et (ii) d' autre part, le Tribunal constate uniquement que le collège des commissaires a pris connaissance de l' examen de l' affaire par les chefs de cabinet alors que le point en question du procès-verbal indique que la Commission a pris connaissance du résultat des discussions que les chefs de cabinet ont tenues au cours de leur réunion spéciale ainsi que - contrairement à ce que le Tribunal déclare au point 46 - au cours de leur réunion ordinaire.

    Cela indique, selon nous, que la conclusion a laquelle le Tribunal a abouti, à savoir que le collège des commissaires aurait implicitement fait savoir qu' il n' entendait pas adopter l' ajout proposé, repose sur une relation imprécise des faits. Sur la base des données de fait précitées, il nous semble au contraire que, si le collège avait entendu ne pas faire sien l' ajout proposé - ajout dont il avait manifestement connaissance, ainsi qu' il apparaît du point 2 précité du procès-verbal -, il en aurait selon toute vraisemblance été donné acte dans le procès-verbal. En d' autres termes, il ressort des données de fait que le collège des commissaires a implicitement accepté l' ajout suggéré par les chefs de cabinet plutôt qu' il ne l' aurait implicitement rejeté. Ce point constitue déjà en soi un manquement par le Tribunal à son obligation de motivation dès lors qu' il a rattaché des conséquences juridiques à des faits insuffisamment établis.

    26. Il faut encore ajouter à ce qui précède que nous estimons que le deuxième grief que la Commission a soulevé à propos de l' alinéa ajouté - cf. le point 22 plus haut, première modification sous (ii) - est également fondé, comme nous le démontrerons ci-après. Ce grief consiste en ce que le Tribunal aurait manqué à son obligation de motivation en déclarant qu' il n' y avait pas lieu d' analyser la nature substantielle de l' alinéa litigieux, laquelle n' était d' ailleurs pas contestable. Il serait au contraire manifeste, selon la Commission, que cet alinéa n' aurait aucun caractère substantiel : il ferait en effet partie des points de l' arrêt relatifs à une question de procédure qui avait été soulevée au cours de la procédure administrative engagée en application du règlement n 17 et ne ferait pas partie du raisonnement qui constitue le support nécessaire du dispositif de la décision.

    Avant d' examiner ce deuxième grief, nous citons le passage querellé de l' arrêt PVC :

    "Cette adjonction à la motivation de la décision, qui n' est ni d' ordre syntaxique ni d' ordre grammatical, affecte ainsi la validité de l' ensemble des actes notifiés comme celle de l' acte publié au Journal officiel des Communautés européennes, ainsi que la Cour l' a jugé dans l' arrêt du 23 février 1988 précité, sans qu' il soit besoin d' examiner son caractère substantiel, au demeurant non contestable"(70).

    27. Le texte de l' alinéa ajouté au point 27 de la décision est le suivant :

    "Il faudrait préciser que tout renoncement de la part d' entreprises au caractère confidentiel de leurs documents d' affaires internes est subordonné à l' intérêt public, qui exige que des concurrents ne soient pas informés réciproquement de leurs activités et de leurs politiques commerciales de telle manière que la concurrence entre eux soit restreinte".

    Il est selon nous établi que les principes que nous avons définis plus haut (aux points 17, 19 et 20) doivent également être appliqués à ce grief : le critère permettant de déterminer si les modifications apportées à une décision constituent un manquement à l' obligation de motivation énoncée à l' article 190 du traité CEE est celui de savoir si ces modifications ont influencé de manière déterminante la possibilité pour les parties défenderesses de comprendre les griefs qui leur étaient faits par la Commission et, partant, si elles ont porté atteinte à leur droit à une protection juridique aussi complète que possible.

    En admettant qu' il n' était pas "besoin d' examiner (le) caractère substantiel, au demeurant non contestable" de l' alinéa ajouté, le Tribunal a omis, à mauvais escient selon nous, d' examiner si l' ajout litigieux avait eu une influence déterminante sur la possibilité pour les parties défenderesses de comprendre le grief qui leur était fait d' avoir violé l' article 85 du traité CEE et, partant, sur leur droit à une protection juridique complète. Or, il n' y a pas eu, selon nous, une telle influence déterminante. L' ajout litigieux concerne en effet le problème - qualifié de délicat et de controversé par le Tribunal - de savoir si, dans le cas où une procédure engagée au titre de l' article 85 du traité CEE concerne plusieurs entreprises, la Commission peut faire droit, en faveur des autres entreprises intéressées par la même procédure, à la renonciation, formulée par une des parties, à la confidentialité s' attachant aux informations la concernant ou si, au contraire, des considérations d' ordre supérieur - telles que le maintien des règles communautaires de la concurrence - s' opposent à ce que la Commission accède à la demande(71). En d' autres termes, cet alinéa ne concerne pas la motivation de la décision en ce qu' elle doit permettre aux entreprises de bien comprendre les griefs qui leur sont faits par la Commission de s' être rendues coupables de comportements concertés incompatibles avec l' article 85 du traité CEE mais il concerne uniquement un point de procédure (ce qui ressort d' ailleurs également de la place qu' occupe cet alinéa dans la décision, à savoir sous le titre "D. Problèmes procéduraux"), en l' occurrence la question de savoir si, au cours de la procédure administrative, la Commission a respecté les droits de la défense.

    A lire de plus près l' ensemble du point 27 de la décision - qui concerne la question de savoir si, en leur refusant un accès entièrement libre aux dossiers administratifs, la Commission a violé les droits de la défense de différentes parties défenderesses -, il apparaît en outre clairement que l' alinéa nouvellement inséré n' a qu' une signification limitée : il ne fait que préciser la raison pour laquelle la Commission a décidé de ne pas faire droit à la demande de la majorité des entreprises qui, sur la base de renonciations réciproques à la confidentialité s' attachant aux informations les concernant, avaient demandé que la Commission autorise chacune d' elles à examiner tous les documents obtenus par la Commission auprès des autres entreprises. A proprement parler, ce nouvel alinéa n' était même pas nécessaire à cet effet puisque, d' une part, la Commission avait indiqué dans l' alinéa précédent qu' elle ne s' était pas opposée de facto à ce que les entreprises organisent entre elles un échange des documents dont elles détenaient des copies et que, d' autre part, dans l' alinéa suivant (qui figurait en tout cas dans le projet de décision), la Commission se prévaut de jure, pour justifier son refus de communication des documents, d' une jurisprudence constante de la Cour, notamment de l' arrêt VBVB et VBBB dans lequel, en effet, la Cour a dit pour droit que

    "si le respect des droits de la défense exige que l' entreprise intéressée ait été en mesure de faire connaître utilement son point de vue sur les documents retenus par la Commission dans les constatations qui sont à la base de sa décision, il n' y a pas de dispositions prescrivant à la Commission l' obligation de divulguer ses dossiers aux parties intéressées"(72).

    28. Ce qui précède nous amène à la conclusion suivante. Même si l' on pouvait admettre que le collège des commissaires n' a pas fait sien l' alinéa ajouté au point 27 de la décision (cf. plus haut le point 25 des présentes conclusions), l' appréciation que le Tribunal donne de cet ajout en se fondant sur l' arrêt Royaume-Uni contre Conseil repose en grande partie sur les mêmes objections que celles que nous venons de soulever dans notre appréciation des modifications de la version allemande : si l' on examine la question du point de vue de l' article 190 du traité CEE, le critère d' appréciation n' est pas le caractère "syntaxique ou grammatical" ou non des différences entre le texte d' une décision tel qu' il a été adopté par la Commission et celui qui a été notifié aux destinataires de celle-ci, mais bien la question de savoir si les modifications ont influencé de manière fondamentale la possibilité pour les parties défenderesses de comprendre les griefs qui leur étaient faits par la Commission et, partant, si elles ont influencé leur situation juridique. En n' appliquant pas ce critère - et, partant, en négligeant d' examiner, d' une manière suffisante, l' importance de l' ajout querellé à la lumière de ce critère -, le Tribunal a commis une violation du droit communautaire et il a manqué à son obligation de motivation.

    Eu égard aux observations qui précèdent, nous n' estimons pas nécessaire d' aborder le troisième grief soulevé par la Commission - que nous avons indiqué au point 22, première modification, sous (iii) - à savoir que la sanction appliquée par le Tribunal serait exorbitante.

    29. Examen des griefs pris de l' omission de la mention "(EMC-Group)" dans le dispositif de la décision. La Commission objecte que la mention en cause était de nature exclusivement descriptive et ne comportait aucune conséquence juridique. Cette mention, qui a à peine été utilisée au cours des différentes phases de la procédure, aurait été supprimée au cours de la révision linguistique de la décision afin d' exclure toute possibilité d' ambiguïté. La Commission soutient en outre que le Tribunal n' a donné aucune motivation à l' appui de l' affirmation selon laquelle la suppression de la mention "(EMC-Group)" était de nature à affecter l' imputabilité de l' infraction alléguée, voire à déplacer la charge financière de l' amende infligée.

    SAV affirme quant à elle que l' omission de la mention "(EMC-Group)" dans le dispositif de la décision - une omission qui la touche tout particulièrement - est de nature à affecter l' imputabilité de l' infraction reprochée et à déplacer la charge financière de l' amende infligée.

    30. Récapitulons brièvement ce que le Tribunal a décidé sur ce point. Après avoir constaté que la mention litigieuse apparaissait dans les projets de décision qui ont été soumis au collège des commissaires mais qu' elle ne figurait plus dans le texte qui a été notifié à toutes les parties défenderesses et qui a été publié au Journal officiel, le Tribunal a jugé qu' une telle modification est incompatible avec l' article 190 du traité CEE :

    "Des modifications qui viennent affecter le dispositif d' une décision concernent directement la portée des obligations susceptibles d' être imposées aux sujets de droit par l' acte modifié ou, au contraire, la portée des droits qui leur sont conférés par l' acte modifié. En l' espèce, une telle modification est de nature à affecter l' imputabilité de l' infraction alléguée, voire à déplacer la charge financière de l' amende infligée"(73).

    Le Tribunal estime ensuite que la solution qu' il a déduite de l' arrêt Royaume-Uni contre Conseil devrait s' imposer de plus fort lorsque

    "comme en l' espèce, l' acte modifié inflige des amendes et impose des obligations aux destinataires de l' acte et où la modification apportée est susceptible d' affecter la désignation de la personne morale à laquelle ces obligations s' imposent. Une telle conséquence doit, en effet, être nécessairement tirée de la modification de l' article premier, précité, du dispositif des dispositions, par lequel la Commission opère, par déduction consécutive au raisonnement exposé dans les motifs, la qualification juridique des faits litigieux au regard de l' article 85 du traité CEE et la désignation des entreprises en infraction. Une telle modification rejaillit, dès lors, directement et nécessairement sur les autres articles du dispositif qui, en soumettant les requérantes à des injonctions et à des sanctions pécuniaires et en déterminant les modalités selon lesquelles les destinataires des actes pourront se libérer de leurs obligations, ne font que tirer les conséquences nécessaires de l' article premier du dispositif, lequel a, en l' espèce, précisément fait l' objet d' une modification"(74).

    31. La modification qui est au centre de la présente discussion était-elle de nature à affecter l' imputabilité de l' infraction alléguée à SAV et, partant, de nature à influencer de manière fondamentale la possibilité qu' avaient les parties défenderesses de comprendre la décision et à influencer leur droit à une protection juridique, ce qui est le critère déterminant que nous avons retenu plus haut (au point 17) ? Il résulte incontestablement de la jurisprudence de la Cour que, lorsqu' une entreprise est intégrée dans un groupe au point de perdre toute autonomie, la société mère doit éventuellement porter la (co)responsabilité des agissements de la filiale qui sont incompatibles avec les règles de la concurrence. Depuis les arrêts "colorants" en effet, il est de jurisprudence constante que "la circonstance que la filiale a une personnalité juridique distincte ne suffit pas pour écarter la possibilité que son comportement soit imputé à la société mère" et que "tel peut être notamment le cas lorsque la filiale, bien qu' ayant une personnalité juridique distincte, ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l' essentiel les instructions qui lui sont imparties par la société mère"(75).

    Néanmoins, nous ne sommes pas convaincus en l' espèce que la mention "(EMC-Group)" ou son omission à l' article premier du dispositif de la décision(76) ait affecté ou ait pu affecter l' imputabilité de l' infraction constatée dans la décision. En premier lieu, il est établi que ni le projet de décision ni le texte de la décision notifié aux destinataires et publié au Journal officiel ne comportaient, aux articles 3 et 4 du dispositif, la moindre référence à l' affiliation de SAV à l' "EMC-Group". Contrairement à ce qu' a déclaré le Tribunal au point 50 de l' arrêt, nous estimons en outre que la décision ne comporte pas la moindre ambiguïté lorsqu' elle inflige une amende spécifique à SAV, et à elle seule (article 3), et règle les modalités de paiement de cette amende (article 4). Enfin le préambule de la décision mentionne, de manière conséquente, uniquement SAV en tant que telle, sans la désigner en sa qualité de filiale d' aucune société mère(77).

    32. Il résulte de tout ceci qu' eu égard à l' ensemble du texte de la décision(78), la modification litigieuse n' a pas ou n' a pas pu affecter l' imputabilité de l' infraction alléguée à SAV et donc pas davantage la possibilité qu' a eu cette entreprise de comprendre la décision et qu' elle n' a pas pu affecter non plus son droit à une protection juridique. En passant outre à ce critère et en omettant de l' appliquer à la modification litigieuse, le Tribunal a respectivement commis une violation du droit communautaire et a manqué à son obligation de motivation.

    33. Ceci nous amène au dernier grief soulevé par la Commission, à savoir que le Tribunal a jugé à mauvais escient que l' omission de la mention susvisée a entaché la légalité de la décision dans son ensemble, et cela à l' égard de toutes les parties défenderesses. Nous pouvons nous référer sur ce point à ce que nous avons déjà observé plus haut (au point 21) à propos des modifications apportées à la version allemande de la décision : l' omission de la mention "(EMC-Group)" derrière le nom de SAV ne pouvait pas avoir la moindre influence sur la possibilité pour les autres entreprises auxquelles la décision était adressée de lire avec précision dans la décision quels griefs leur étaient faits et ne pouvait certainement pas avoir d' influence non plus sur la question de l' imputabilité de la violation de l' article 85 du traité CEE qui leur était reprochée.

    V. Les exigences du traité CEE relatives à l' adoption des actes de la Commission, en particulier des versions linguistiques faisant foi d' une décision

    34. Selon la Commission, l' arrêt PVC se fonde sur une conception d' un formalisme manifestement excessif par rapport aux exigences que le traité CEE énonce vis-à-vis de l' intervention de la Commission en tant que collège lors de l' adoption de ses actes. En exigeant que le collège des commissaires intervienne pour l' adoption de toutes les versions linguistiques dans lesquelles les actes font foi, l' arrêt serait en effet fondé sur une conception juridique erronée. Les exigences que le traité CEE et le règlement intérieur de la Commission posent en ce qui concerne l' intervention de la Commission en tant que collège auraient au contraire été parfaitement respectées lors de l' approbation de la décision.

    35. La décision du Tribunal et le point de vue des parties. Nous allons revenir immédiatement à l' argumentation spécifique des parties. Rappelons tout d' abord ce qui a été précisément décidé en première instance sur le point qui nous occupe à l' instant. Les points querellés de l' arrêt PVC se situent dans la partie de celui-ci où le Tribunal examine le pouvoir de l' auteur de la décision et en particulier la question de savoir si le commissaire en charge des affaires de concurrence était compétent ratione materiae à adopter les versions italienne et néerlandaise de la décision qui ont été notifiées aux destinataires et publiées au Journal officiel. Un certain nombre des parties requérantes devant le Tribunal avaient soulevé l' incompétence de l' auteur de la décision au motif qu' il était apparu du procès-verbal de la neuf cent quarante cinquième réunion du collège des commissaires que le collège n' avait approuvé la décision que dans les versions allemande, anglaise et française et qu' il avait mandaté le commissaire chargé des questions de concurrence, qui était à l' époque M. P. Sutherland, afin qu' il adopte la décision dans les autres langues officielles, à savoir l' italien et le néerlandais. Il était apparu de surcroît que ces deux dernières versions linguistiques n' avaient été soumises au secrétariat général de la Commission que le 16 janvier 1989 alors que le mandat de commissaire de M. P. Sutherland avait expiré le 5 janvier 1989.

    Voici ce qu' au point 55 de son arrêt, le Tribunal déduit, en premier lieu, d' une lecture combinée des dispositions de l' article 3 du règlement n 1 du Conseil, du 15 avril 1958, portant fixation du régime linguistique de la Communauté européenne(79) et des dispositions de l' article 12, premier alinéa du règlement intérieur de la Commission(80) :

    "Il résulte de la combinaison de ces dispositions que, dans le cas où, comme en l' espèce, la Commission entend adopter, par un acte matériellement unique, une décision qui fait foi à l' égard de plusieurs personnes morales relevant de régimes linguistiques différents, la décision doit, sauf à rendre toute authentification impossible, être adoptée dans chacune des langues où elle fait foi".

    Le Tribunal rejette ensuite l' argument de la Commission selon lequel le mandat que le collège des commissaires avait donné au membre de la Commission chargé des questions de concurrence afin qu' il adopte le texte italien et le texte néerlandais de la décision était conforme à l' article 27 du règlement intérieur(81). Selon lui, l' adoption d' une décision d' application de l' article 85, paragraphe 1 du traité CEE ne présente pas le caractère d' une mesure de gestion ou d' administration au sens de l' article 27 précité(82). Selon le Tribunal, "il résulte (...) de l' examen et des dispositions (...) de l' article 27, premier alinéa (...) en combinaison avec celles du deuxième alinéa de cet article" que le collège des commissaires pourrait éventuellement donner délégation à l' un de ses membres en vue de l' adoption de la décision dans les langues officielles de la Communauté autres que les langues faisant foi dès lors que les décisions arrêtées dans ces langues ne produisent aucun effet juridique et ne valent pas titre exécutoire à l' égard d' une ou plusieurs entreprises citées dans le dispositif de la décision(83). Le Tribunal conclut enfin que le commissaire en charge des questions de concurrence n' était pas compétent ratione materiae à adopter la décision dans les versions italienne et néerlandaise. Il se fonde à cet égard sur le considérant suivant :

    "Tout autre est la portée de l' adoption de la décision dans la langue faisant foi. En effet, une décision constatant une infraction à l' article 85 du traité, émettant des injonctions à l' égard de plusieurs entreprises, leur infligeant des sanctions pécuniaires importantes et valant titre exécutoire à cet effet affecte de façon caractérisée les droits et obligations de ces dernières, ainsi que leur patrimoine. Elle ne saurait être regardée comme une simple mesure d' administration ou de gestion et, par suite, être compétemment adoptée par un seul commissaire sans méconnaître directement le principe de collégialité expressément rappelé à l' article 27, précité"(84).

    36. La Commission concède qu' en ce qui concerne les décisions d' application des articles 85 et suivants du traité CEE prises à l' encontre d' entreprises, une délibération du collège doit toujours avoir lieu. Néanmoins, lorsque le collège des commissaires a approuvé une décision dont le texte a été rédigé dans une, deux ou trois langues officielles de la Communauté, ce qui est le cas de la décision en cause, le collège a parfaitement rempli son office. En effet, lorsqu' il s' agit d' adopter une décision, il faudrait toujours distinguer entre l' élément intellectuel et l' élément formel de cette opération. L' élément intellectuel se situerait à un stade interne dans la formation de la décision lors de la naissance de la volonté collective après étude et discussion du dossier ; l' élément formel, en revanche, serait composé de toutes les mesures d' exécution par lesquelles l' acte serait définitivement incorporé dans le circuit juridique (rédaction, traduction, mise en forme définitive, notification et publication). Seul le premier élément impliquerait l' exercice d' un pouvoir d' appréciation de sorte que l' intervention du collège n' aurait de sens que pour ce seul élément. La traduction d' une décision, y compris l' élaboration des versions linguistiques authentiques, étant une mesure d' exécution purement administrative, elle doit également être possible sous la direction du membre compétent de la Commission sans une délégation spécifique expresse du collège des commissaires. La Commission fait encore observer à cet égard que l' habilitation qui a été donnée au membre de la Commission chargé des questions de concurrence, ainsi qu' il apparaît du procès-verbal de la neuf cent quarante cinquième réunion du collège, n' était pas une délégation au sens strict de l' article 27 du règlement intérieur. En effet, il ne s' agit même pas d' une mesure de gestion ou d' administration mais bien d' une tâche qui ne laisse aucune marge de manoeuvre à celui qui l' exerce et ne lui offre pas la moindre possibilité d' agir selon son propre jugement. Si la Cour devait néanmoins estimer que nous nous trouvons bel et bien en présence d' une délégation au sens de la disposition précitée, cette délégation lui serait alors conforme a fortiori.

    En revanche, les parties défenderesses affirment principalement que la différence faite par la Commission entre l' élément intellectuel et l' élément formel d' une décision est parfaitement artificielle et ne trouve aucun appui dans le traité CEE ni dans le règlement intérieur de la Commission ou encore dans la jurisprudence de la Cour. Elles ont ajouté à l' audience que si la thèse de la Commission devait l' emporter, cela excluerait, pour les versions linguistiques qui n' ont pas été soumises à l' approbation du collège des commissaires, l' authentification prescrite par l' article 12 du règlement intérieur. L' article 12 en perdrait ainsi son caractère impératif.

    37. Dans les paragraphes qui vont suivre nous allons nous concentrer sur la question essentielle à laquelle nous sommes confrontés, c' est-à-dire la question de savoir si et dans quelle mesure, la Commission, après avoir approuvé une décision d' application des règles de la concurrence adressée à des entreprises dans une ou plusieurs versions linguistiques, peut, en se fondant sur l' article 27 de son règlement intérieur, donner délégation au commissaire en charge des questions de concurrence afin qu' il adopte les (autres) versions linguistiques faisant foi de cette décision. Nous n' aborderons pas maintenant la question de savoir si, au point 55 de son arrêt que nous avons cité au point 35 plus haut, le Tribunal a donné une interprétation correcte de l' article 12 du règlement intérieur : c' est ce que devra établir l' analyse que nous effectuons dans la partie suivante des présentes conclusions.

    38. Le principe de collégialité et les critères d' octroi des délégations dans la jurisprudence de la Cour. Il nous paraît nécessaire d' esquisser brièvement le cadre juridique. Comme chacun sait, le processus de formation des décisions au sein de la Commission est fondé sur le principe de la collégialité(85). Sur le plan des traités, ce principe s' exprime à l' article 17 premier alinéa du traité de fusion qui dispose que "(l)es délibérations de la Commission sont acquises à la majorité du nombre des membres prévu à l' article 10"(86). Il a été développé dans le règlement intérieur de la Commission qui dispose notamment que la Commission agit en collège, conformément aux dispositions qu' il institue (article premier) et qu' en règle générale, la Commission décide en séance (article 2). La Cour a elle-même exposé la raison de ce principe de collégialité de manière pertinente dans son arrêt Akzo du 23 septembre 1986 :

    "Le principe de collégialité ainsi établi [par l' article 17 du traité de fusion] repose sur l' égalité des membres de la Commission dans la participation à la prise de décision et implique, notamment, d' une part, que les décisions soient délibérées en commun, et, d' autre part, que tous les membres du collège soient collectivement responsables, sur le plan politique, de l' ensemble des décisions arrêtées"(87).

    Le règlement intérieur de la Commission contient cependant un certain nombre de dérogations à ce mode collégial de délibération, notamment ce qu' il est convenu d' appeler la procédure écrite fondée sur l' article 11 (procédure dans laquelle l' accord des membres de la Commission est obtenu par voie écrite) et, surtout, la délégation de compétence qui a été rendue possible par l' article 27 premier alinéa. Depuis la modification qu' il a subie en 1975(88), le texte de cette disposition est le suivant :

    "La Commission peut, à condition que le principe de sa responsabilité collégiale soit pleinement respecté, habiliter ses membres à prendre en son nom et sous son contrôle, des mesures de gestion ou d' administration clairement définies"(89).

    39. Dans le cadre que nous venons de définir et notamment sur la base de l' article 27, précité, premier alinéa de son règlement intérieur, la Commission peut-elle donner délégation au commissaire en charge des questions de concurrence d' adopter une décision dans une ou plusieurs des langues faisant foi autres que celles dans lesquelles le projet de décision a été soumis à la Commission et approuvé par elle collégialement ?

    Pour répondre à cette question, nous avons consulté la jurisprudence de la Cour. Dans celle-ci il faut, selon nous, accorder une signification décisive à l' arrêt Akzo, précité, du 23 septembre 1986. Rappelons qu' aussi bien devant le Tribunal que devant la Cour, la Commission s' est prévalue de cette jurisprudence à l' appui de son affirmation selon laquelle la procédure suivie dans la présente affaire a été conforme au principe de collégialité(90). Elle n' a manifestement pas pu convaincre le Tribunal puisque celui-ci n' a reconnu une valeur de précédent à l' arrêt Akzo qu' en ce qui concerne la possibilité de prendre, sur la base de l' article 27 du règlement intérieur, des mesures d' instruction et de procédure pendant la phase administrative au cours de laquelle la décision de la Commission est préparée, notamment les mesures prises dans le cadre des pouvoirs généraux d' investigation conférés à la Commission par le règlement n 17(91).

    40. L' affaire Akzo avait pour objet un recours en annulation formé par deux entreprises du groupe Akzo contre une décision rendue par le commissaire en charge des questions de concurrence par laquelle celui-ci avait soumis ces entreprises à une vérification sur la base de l' article 14 paragraphe 3 du règlement n 17. Les entreprises ont fait valoir notamment que la délégation de compétence sur la base de laquelle la décision querellée avait été prise enfreignait le principe de collégialité tel qu' il est énoncé à l' article 17 du traité de fusion.

    La Cour a écarté ce moyen en des termes vigoureux. Pour apprécier la compatibilité de la procédure d' habilitation telle qu' elle est notamment instituée par l' article 27 du règlement intérieur avec le principe de collégialité, elle a tout d' abord rappelé sa jurisprudence constante aux termes de laquelle

    "la Commission pouvait, dans certaines limites et moyennant certaines conditions, habiliter ses membres à prendre certaines décisions en son nom, sans qu' il fût pour autant porté atteinte au principe de collégialité qui régit son fonctionnement"(92).

    La Cour explique ensuite que cette jurisprudence constante repose sur deux considérations :

    "D' une part, un tel système d' habilitation n' a pas pour effet de dessaisir la Commission en transférant au membre habilité un pouvoir propre. Les décisions prises sur habilitation le sont au nom de la Commission qui en assume la pleine responsabilité et peuvent faire l' objet d' un recours en annulation dans les mêmes conditions que si elles avaient été délibérées en collège. Par ailleurs, la Commission a institué des mécanismes permettant de réserver au collège certaines mesures susceptibles d' être prises sur habilitation. Enfin, elle s' est ménagé la faculté de revoir les décisions accordant des habilitations.

    D' autre part, limiter à des catégories déterminées d' actes d' administration et de gestion, ce qui exclut par hypothèse les décisions de principe, un tel système d' habilitation apparaît nécessaire, compte tenu de l' augmentation considérable du nombre des actes décisionnels que la Commission est appelée à prendre, pour mettre celle-ci en mesure de remplir sa fonction. La nécessité d' assurer la capacité de fonctionnement de l' organe de décision correspond à un principe inhérent à tout système institutionnel qui trouve plus particulièrement son expression dans l' article 16 du traité de fusion aux termes duquel la Commission fixe son règlement intérieur en vue d' assurer son fonctionnement et celui de ses services"(93).

    41. Voici la conclusion que nous tirons de ce passage. En premier lieu, les considérations juridiques précitées ont, selon nous, une portée qui dépasse de loin le litige dont il s' agissait dans l' affaire Akzo, d' autant plus que, sur ce point, la Cour s' est exprimée en termes de principes - sans se limiter aux mesures de procédure prises en application du règlement n 17 qui ont précédé la décision au fond - et que ce n' est que dans les considérants suivants qu' elle applique ces principes à la situation de l' affaire Akzo(94).

    Par la suite, l' argumentation développée par la Cour pour justifier la procédure de délégation ou d' habilitation suivie par la Commission nous semble reposer sur l' idée que le principe de collégialité doit être concilié avec le principe, qui le limitera donc, du bon fonctionnement de l' organe investi du pouvoir de décision qui est un principe institutionnel sous le signe duquel - et ceci est important également (cf. le point 55 plus bas) - la Cour place le règlement d' ordre intérieur de la Commission. Eu égard à l' augmentation du nombre de décisions à prendre par la Commission, la Cour estime, à la lumière de ce principe, que la procédure d' habilitation est même nécessaire pour que la Commission puisse remplir correctement sa mission, du moins en ce qui concerne certaines catégories de mesures de gestion et d' administration.

    La Cour développe enfin deux critères auxquels la procédure d' habilitation doit satisfaire pour être compatible avec le principe de collégialité. L' habilitation doit tout d' abord respecter certaines limites de compétence, ce qui signifie : (i) que la Commission ne peut renoncer à sa compétence - en d' autres termes, la compétence déléguée ne peut être convertie en une compétence transférée en propre à un membre de la Commission - de sorte qu' il ne puisse y avoir aucun doute sur "l' identité et les pouvoirs de l' organe de décision, à savoir la Commission"(95) ; (ii) que la Commission doit continuer à assumer la pleine responsabilité des décisions prises sur habilitation (ce qui est un élément essentiel du principe de collégialité) et (iii) qu' elle doit avoir le pouvoir de se réserver à elle-même, en tant que formation collégiale, une matière qui aurait été déléguée ainsi que le pouvoir de revenir sur la décision d' habilitation. En second lieu, les décisions prises sur habilitation doivent être susceptibles de recours dans les mêmes conditions que si elles avaient été prises par la Commission réunie en collège. En d' autres termes, il ne peut être porté atteinte à la protection juridique des destinataires des décisions en cause : la possibilité de contester la régularité de la décision d' habilitation ou la validité de la décision prise en vertu de l' habilitation accordée ne peut leur être enlevée(96).

    42. Les différents niveaux du pouvoir de décision. Les critères développés par la Cour dans l' arrêt Akzo sont parfaitement compatibles, selon nous, avec les autres arrêts dans lesquels la Cour a examiné la question de la délégation de pouvoirs dans le cas des institutions communautaires. Si nous effectuons la synthèse de ces arrêts, nous pouvons, en ce qui concerne l' exercice par la Commission de ses compétences en matière de politique de la concurrence, établir grosso modo une distinction entre trois niveaux.

    Il faut distinguer, en premier lieu, l' exercice d' une compétence au niveau politique. Il s' agit ici du coeur même du pouvoir politique que le traité CEE confère à la Commission en matière de concurrence, la Commission pouvant donner forme à sa politique en matière de concurrence soit au moyen de mesures réglementaires générales soit au moyen de décisions individuelles(97). Pour reprendre les termes des critères que la Cour a dégagés dans l' arrêt Akzo, il s' agit ici de "décisions de principe" qui doivent demeurer du domaine réservé du collège des commissaires. Il est clair que, comme l' a souligné le Tribunal dans l' arrêt PVC(98) et comme la Commission l' a rappelé dans le cadre du présent pourvoi, les décisions d' application des articles 85 et suivants du traité CEE prises à l' égard d' entreprises font partie de cette catégorie : pareilles décisions supposent en effet un large pouvoir politique d' appréciation et elles impliquent que la Commission prenne position sur des situations économiques et juridiques complexes. Le principe de collégialité doit ici être strictement respecté, ce qui exclut toute délégation pour l' adoption de telles décisions(99).

    Les mesures de gestion et d' administration au sens strict du mot se situent à un deuxième niveau. Dans les affaires de concurrence, ce sont surtout les mesures d' instruction qui font partie de cette catégorie, c' est-à-dire les mesures que la Commission prend au cours de la phase préparatoire antérieure à la décision afin de constater certaines pratiques incompatibles avec les règles de la concurrence. Pour adopter de telles mesures, elle dispose d' une certaine marge d' appréciation, même si celle-ci est limitée (ne serait-ce que par le caractère préparatoire de l' acte). C' est ainsi, par exemple, que sont à ranger dans cette catégorie les décisions que la Commission adopte sur la base de l' article 14, paragraphe 3 du règlement n 17 afin de soumettre des entreprises à des vérifications. Dans l' arrêt Akzo, la Cour a dit pour droit que, dans la mesure où il est satisfait aux critères que nous avons énoncés plus haut (au point 41), l' exercice de ce pouvoir par la Commission peut être délégué au membre de la Commission chargé des questions de concurrence :

    "(...) une décision ordonnant à une entreprise de se soumettre à une vérification doit être, en tant que mesure d' instruction, considérée comme une simple décision de gestion. Il en va ainsi, alors même que les entreprises s' opposeraient à la vérification"(100).

    Il y a enfin le niveau de la mise en oeuvre matérielle, qui comprend des actes de pure organisation interne. Il ne s' agit pas à strictement parler d' une délégation de pouvoir : il s' agit d' actes pris en exécution de décisions déjà adoptées, tels que la communication ou la transmission de décisions aux destinataires de celles-ci ainsi que d' autres mesures matérielles d' exécution(101). Semblables mesures matérielles d' exécution ne comportent pas la moindre marge d' appréciation. Le pouvoir qui est donné au directeur général de la concurrence de signer la communication des griefs visée à l' article 2 du règlement n 99/63 de la Commission est un exemple bien connu. La Cour a accepté à plusieurs reprises la légalité de cette pratique en se fondant sur l' article 27 du règlement intérieur : le fonctionnaire en question agit en effet "dans le cadre, non pas d' une délégation de pouvoirs, mais d' une simple délégation de signature qu' il avait reçue du membre de la Commission"(102). Selon la Cour, une telle délégation du pouvoir de signature constitue "une mesure relative à l' organisation interne des services de la Commission"(103). Elle constitue donc "le moyen normal par lequel la Commission exerce sa compétence"(104).

    43. Application de la différence de niveau de décision au problème de l' espèce. Avant d' appliquer la distinction que nous venons d' opérer à la problématique de l' espèce, nous voudrions tout d' abord faire la remarque suivante à propos de l' emploi des langues dans le fonctionnement interne d' une institution communautaire telle que la Commission. A l' instar de toutes les institutions communautaires, la Commission travaille officiellement dans toutes les langues officielles de la Communauté(105). Ceci n' empêche cependant pas qu' elle peut utiliser une ou plusieurs langues communautaires comme langue de travail interne pourvu que dans ses interventions extérieures, elle respecte parfaitement le principe de l' égalité de droits de toutes les langues officielles de la Communauté, comme cela est prévu par le règlement n 1(106). Le choix d' une ou de plusieurs langues de travail peut en effet, aux termes de l' arrêt Akzo (cf. le point 41 plus haut), apparaître nécessaire pour le bon fonctionnement de la Commission en tant qu' organe de décision, c' est-à-dire afin de permettre une plus grande efficacité dans les délibérations et la prise de décisions. Nous estimons à ce propos que le collège des commissaires peut, dans les affaires de concurrence également, adopter une décision sur la base d' un projet de décision rédigé dans une ou plusieurs des langues de travail de la Commission : ce qui importe en effet, c' est que, conformément au principe de collégialité, tous les membres de la Commission aient la possibilité de participer à la discussion et à la prise de décision dans une langue dont ils maîtrisent l' usage (cf. le point 38 plus haut)(107).

    On ne saurait prendre au sérieux l' argumentation des parties défenderesses lorsqu' elles affirment que soumettre au collège des commissaires les projets de décisions dans toutes les versions linguistiques faisant foi constituerait une garantie pour le contrôle de ces versions (parce qu' alors au moins un commissaire dont la langue maternelle est une des langues concernées pourrait vérifier la version linguistique en question) : l' intervention des membres de la Commission se situe au niveau de la délibération et de la prise de décision - qui peuvent, comme nous l' avons dit plus haut, pour des raisons pratiques, se dérouler dans une ou plusieurs des langues de travail de la Commission - et ne se situe nullement sur le plan de la révision linguistique d' un texte.

    44. Ceci nous amène à adopter la position suivante. Il est satisfait au principe de collégialité lorsque le collège des commissaires, sur la base d' un texte rédigé dans une ou plusieurs langues (de travail), a effectivement délibéré et décidé d' adopter une décision par laquelle elle constate une infraction à l' article 85 du traité CEE et inflige les sanctions qui s' y rattachent. Aucune des parties ne conteste que c' est bien là ce qui s' est passé en l' espèce. C' est d' ailleurs ce qui ressort des constatations de fait opérées par le Tribunal(108).

    Contrairement au Tribunal, nous estimons qu' une délégation donnée au commissaire chargé des questions de concurrence afin qu' il adopte le texte dans les autres versions linguistiques faisant foi (ou non), d' une décision adoptée par le collège (dans une ou plusieurs langues de travail) doit être considérée comme une mesure de mise en oeuvre matérielle ou d' organisation interne : en effet, ce qui est accordé en substance, ce n' est que le pouvoir de poser des actes matériels d' exécution, à savoir le pouvoir d' effectuer la traduction d' une décision déjà adoptée et, le cas échéant, la coordination avec les autres traductions.

    Quoi qu' il en soit, même si, eu égard au caractère authentique (de certaines) des versions linguistiques à adopter, on part du principe que l' habilitation que le collège des commissaires a donnée au commissaire chargé des questions de concurrence, ainsi qu' il apparaît du procès-verbal de la neuf cent quarante cinquième réunion, est une mesure de gestion et d' administration au sens strict du terme, nous estimons que la Commission avait le droit de la lui donner. A y regarder de plus près, en effet, les conditions qui ont été posées par l' arrêt Akzo à cet effet sont remplies. C' est ainsi, en premier lieu, qu' il est clair, en ce qui concerne les limites de compétence à respecter, qu' en accordant la délégation en question, la Commission n' a nullement cédé son pouvoir de prendre une décision de principe ou qu' elle se serait départie de sa responsabilité collégiale à l' égard de cette décision : une lecture attentive du procès-verbal nous enseigne que la Commission a d' abord discuté et adopté elle-même cette décision dans une langue de travail (il s' agissait en l' espèce de plusieurs langues de travail, à savoir l' allemand, l' anglais et le français) et que ce n' est qu' ensuite qu' elle a demandé au commissaire chargé des questions de concurrence de transposer le texte de la décision dans les autres langues officielles. L' habilitation ne saurait dès lors raisonnablement être comprise comme l' octroi du pouvoir d' adopter une nouvelle décision mais uniquement comme l' octroi du pouvoir de veiller au nom de la Commission à la transposition de la décision dans les autres versions linguistiques (faisant foi ou ne faisant pas foi) conformément à la décision adoptée par la Commission dans sa version allemande, anglaise et française. Par ailleurs, les entreprises auxquelles la décision est adressée dans les versions linguistiques faisant foi en question, ne sont à aucun égard affectées dans leur protection juridique : elles pouvaient en effet introduire un recours en annulation contre la décision - et elles l' ont d' ailleurs fait - exactement dans les mêmes conditions que si la décision avait été adoptée par le collège lui-même dans les versions linguistiques concernées. De surcroît, il ressort de l' arrêt PVC qu' aucune des parties auxquelles la décision était adressée en italien ou en néerlandais n' a soulevé un moyen sur ce point en première instance(109).

    45. Nous concluons donc qu' en disant pour droit que le collège des commissaires ne pouvait pas habiliter le commissaire chargé des questions de concurrence à adopter le texte de la décision dans les autres versions linguistiques faisant foi, à savoir la version italienne et la version néerlandaise, le Tribunal a enfreint le droit communautaire. Nous entendons néanmoins souligner que l' appréciation que nous venons de donner sur le jugement que le Tribunal a porté sur l' incompétence matérielle du commissaire chargé des questions de concurrence est totalement indépendante de la question de la compétence dans le temps du commissaire en question, à savoir M. Sutherland, à notifier la décision à ses destinataires. Nul ne saurait contester, sur la base de la constatation de fait opérée par le Tribunal que la décision n' a été prête de manière définitive - c' est-à-dire après traduction et révision linguistique - que fin janvier 1989, et cela aussi bien dans les cinq langues faisant foi que dans les quatre autres langues communautaires officielles, que M. Sutherland, dont le mandat de commissaire a pris fin le 5 janvier 1989, n' était plus compétent à notifier la décision à ses destinataires, en son nom mais pour le compte de la Commission. Il est clair que cette notification aurait dû être faite par le successeur de M. Sutherland. Nous reviendrons dans la dernière partie des présentes conclusions sur la question de savoir si cette lacune est suffisamment importante pour porter atteinte à la légalité ou même à l' existence de la décision.

    VI. Portée et interprétation de l' article 12 du règlement intérieur de la Commission concernant l' authentification des décisions

    46. Selon la Commission, l' arrêt PVC fait preuve d' un formalisme excessif et méconnaît le sens et la portée de l' authentification des actes prévue à l' article 12 du règlement intérieur. Les formalités prescrites par l' article 10 (qui à trait à l' approbation du procès-verbal des réunions de la Commission) et par l' article 12 du règlement (qui concerne l' authentification des actes pris par la Commission)(110) ne seraient que de simples aide-mémoire pour la Commission et n' auraient en tant que telles qu' un effet purement interne. Selon la Commission, elles ne seraient pas des éléments constitutifs de l' adoption et de l' existence de ces actes, moins encore des éléments qui confèrent aux actes leur caractère exécutoire ou qui assurent leur pleine incorporation à l' ordre juridique communautaire. Au contraire, un acte n' apparaîtrait à la vie juridique externe à l' institution qu' en entrant en vigueur ou en prenant effet à l' égard de ses destinataires, c' est-à-dire par sa publication ou sa notification conformément aux dispositions de l' article 191 du traité.

    47. Deux questions juridiques étroitement liées se trouvent, selon nous, au centre de ce débat, en l' occurrence (i) la question de savoir quelle signification juridique il y a lieu de donner à l' authentification des actes de la Commission opérée en application de l' article 12 du règlement intérieur et (ii) la question de savoir si des tiers peuvent se prévaloir du non-respect de cette disposition. Pour aborder correctement ces questions, nous allons d' abord examiner la jurisprudence que la Cour a consacrée d' une manière générale au statut juridique du règlement intérieur d' une institution ou d' un organe communautaire et au point de savoir dans quelle mesure il peut être invoqué par des tiers.

    A. Statut des règlements intérieurs dans la jurisprudence de la Cour et droit des tiers à s' en prévaloir

    48. Dispositions du traité et précédents dans la jurisprudence. A l' exception de la Cour et du Tribunal (qui ont un règlement de procédure(111)), toutes les institutions de la Communauté ont un règlement intérieur qu' elles ont dû se donner en application du traité CEE ou du traité de fusion(112). Pour la Commission, cette obligation découle de l' article 16 du traité de fusion aux termes duquel :

    "La Commission fixe son règlement intérieur en vue d' assurer son fonctionnement et celui de ses services dans les conditions prévues par les traités instituant la Communauté européenne du charbon et de l' acier, la Communauté économique européenne et la Communauté européenne de l' énergie atomique ainsi que par le présent traité. Elle assure la publication de ce règlement". SUITE DES CONCLUSIONS SOUS LE NUM.DOC : 692C0137.2

    L' article 16 du traité de fusion confère donc à la Commission un pouvoir d' auto-organisation(113). Cette autonomie institutionnelle qui, comme l' a dit la Cour dans l' arrêt Akzo, constitue l' expression d' "un principe inhérent à tout système institutionnel" (cf. le point 39 plus haut) est cependant placée expressément - ce qui n' est pas le cas pour les autres institutions(114) - sous le signe du fonctionnement de la Commission et de ses services dans les conditions prévues par les traités communautaires(115).

    49. Pour le surplus, les traités ne règlent à aucun endroit de manière expresse le statut juridique des règlements intérieurs en question ni la question de savoir s' ils peuvent ou non être invoqués par des tiers. En revanche, la Cour a abordé ces questions à propos du règlement intérieur du Conseil dans l' arrêt qu' elle a rendu le 7 mai 1991 dans l' affaire Nakajima/Conseil(116). Il s' agissait d' une affaire anti-dumping dans laquelle Nakajima avait demandé l' annulation d' un règlement instituant un droit anti-dumping définitif. A l' appui de sa demande, elle s' était notamment fondée sur une violation de formes substantielles parce que le Conseil n' aurait pas respecté deux dispositions de son règlement intérieur : le délai prévu pour l' établissement de l' ordre du jour provisoire de la session du Conseil n' aurait pas été respecté (violation de l' article 2) et toutes les versions linguistiques du règlement en question n' auraient pas été disponibles le jour de son adoption (violation de l' article 8)(117). La Cour a écarté ce moyen en des termes vigoureux :

    "Sur ce point, il convient de constater que le règlement intérieur d' une institution communautaire a pour objet d' organiser le fonctionnement interne des services dans l' intérêt d' une bonne administration. Les règles qu' il établit, notamment pour l' organisation des délibérations et la prise de décisions, ont dès lors, essentiellement pour fonction d' assurer le bon déroulement des débats, dans le plein respect des prérogatives de chacun des membres de l' institution.

    Il en résulte que les personnes physiques ou morales ne sauraient se prévaloir d' une prétendue violation de ces règles, qui ne sont pas destinées à assurer la protection des particuliers"(118).

    50. La valeur de précédent de l' arrêt Nakajima pour l' affaire qui nous occupe aujourd' hui a soulevé de longs débats. La Commission s' était déjà prévalue de cet arrêt au cours de la procédure orale en première instance pour corroborer son affirmation selon laquelle les tiers ne peuvent se prévaloir de l' article 12 du règlement intérieur. Ceci n' a pas empêché le Tribunal d' écarter ce point de vue avec insistance :

    "(...) une telle argumentation ne saurait être retenue. En effet, le Tribunal estime que cet arrêt doit, en réalité, être interprété comme signifiant qu' il convient de faire le départ, parmi les dispositions du règlement intérieur d' un institution, entre celles dont la violation ne peut être invoquée par les personnes physiques et morales, parce qu' elles ne concernent que les modalités de fonctionnement interne de l' institution qui ne sont pas susceptibles d' affecter leur situation juridique, et celles dont la violation peut, au contraire, être invoquée, dès lors que, comme c' est le cas de l' article 12 du règlement intérieur de la Commission, elles sont créatrices de droits et facteur de sécurité juridique pour ces personnes"(119).

    La Commission a de nouveau invoqué l' arrêt Nakajima devant la Cour. Son représentant a fait valoir à l' audience que bien que le Tribunal ait fait allusion à cet arrêt - rendu après la clôture de la procédure écrite en première instance -, cet arrêt n' a cependant pas obtenu l' attention qu' il mérite dans le cadre de la présente problématique.

    51. La jurisprudence qualifiée de "constante" de la Cour sur le point de savoir si les dispositions des règlements intérieurs des institutions communautaires peuvent être invoquées par des personnes physiques ou morales. Nous trancherons ultérieurement la question de savoir si la critique de la Commission est justifiée. Mais nous voulons tout d' abord faire la lumière sur une autre critique soulevée par la Commission à l' audience, à savoir qu' au point 77 de son arrêt, le Tribunal se serait fondé sur un raisonnement incorrect pour aboutir à la conclusion que la jurisprudence constante de la Cour confirme le droit des tiers à invoquer la violation du règlement intérieur d' une institution communautaire. S' il est vrai que les arrêts cités par le Tribunal à cet effet font mention du règlement intérieur d' une institution communautaire, dans aucun des cas tranchés par ces arrêts, la violation du règlement en cause n' aurait été invoquée par la partie requérante et examinée par la Cour.

    Au point 77 de l' arrêt PVC, le Tribunal se réfère en effet à un nombre important d' arrêts que la Cour a rendus non seulement dans des affaires de fonctionnaires mais également dans "d' autres domaines du contentieux communautaire" et dont il déduit que la Cour

    "par une jurisprudence constante (...) a admis que les personnes physiques et morales sont recevables à invoquer la violation du règlement intérieur d' une institution communautaire au soutien de leurs conclusions dirigées contre un acte émanant de cette institution (voir, à cet égard, les nombreux arrêts intervenus dans le contentieux de la fonction publique communautaire : 9 juin 1964, Bernusset/Commission, 94/63 et 96/63, Rec. p. 587 : 17 décembre 1981, Bellardi Ricci/Commission, 178/80, Rec. p. 3187 ; 4 février 1987, Bouteiller/Commission, 324/85, Rec. p. 529 ; pour ce qui concerne le seul règlement intérieur de la Commission ; voir également dans d' autres domaines du contentieux communautaire, les arrêts du 29 octobre 1980, Roquette Frères/Conseil, point 36, 138/79, Rec. 3333 ; du 30 juin 1988, CIDA/Conseil, 297/86, Rec. p. 3531 ; et du 11 octobre 1990, FUNOC/Commission, C-200/89, Rec. p. I-3369)".

    52. Si nous examinons de plus près les arrêts cités par le Tribunal, il nous faut souscrire pour la majeure partie à la critique formulée par la Commission. A aucun moment, dans les affaires citées, une des parties requérantes n' a invoqué expressément une violation du règlement intérieur d' une institution communautaire. C' est pourquoi dans aucune de ces affaires la Cour n' a dû trancher le point de savoir s' il y avait ou non une violation de ce règlement et si la partie requérante était recevable à invoquer une telle violation. Lorsque dans les affaires de contentieux de la fonction publique européenne qui ont été citées(120) et dans les deux premiers arrêts cités relatifs à "d' autres domaines du contentieux communautaire" (arrêt Roquette Frères/Conseil(121) et arrêt CIDA/Conseil(122)), la Cour se réfère au règlement intérieur d' une institution communautaire, cette référence a tout au plus la valeur d' un obiter dictum.

    Ce n' est que dans le dernier arrêt cité, à savoir l' arrêt FUNOC/Commission, que la Cour a également fondé son appréciation juridique sur le règlement intérieur de la Commission. La partie requérante avait invoqué l' illégalité d' une décision de la Commission lui imposant le remboursement d' une somme d' argent et lui refusant le paiement du solde d' un concours financier octroyé au titre d' un projet du Fonds social européen. Selon la Funoc, cette décision était illégale parce qu' elle n' émanait pas de l' organe compétent (à savoir la Commission elle-même) mais bien du chef de division de la direction générale V qui avait signé la décision(123). La Cour a rejeté cette argumentation en se référant à l' article 27 du règlement intérieur de la Commission ainsi qu' à sa jurisprudence en matière de délégation de signature que nous avons citée plus haut (au point 42) :

    "En soulevant ce moyen, la requérante méconnaît le fait que les délégations de signature, ainsi que la Cour l' a reconnu dans ses arrêts des 14 juillet 1972, ICI, points 10 à 14 (48/69, Rec. p. 619) et 17 octobre 1972, Cementhandelaren, points 10 à 14 (8/72, Rec. p. 977), constituent le moyen normal par lequel la Commission exerce ses compétences. La requérante n' a fourni aucune indication qui permette de croire qu' en l' occurrence l' administration communautaire se serait départie de l' observation des règles applicables en la matière"(124).

    Nous allons revenir dans quelques instants sur la signification que cet arrêt revêt pour la problématique de la recevabilité des personnes physiques ou morales à se prévaloir de dispositions du règlement intérieur d' une institution communautaire (cf. le point 55 plus bas).

    53. Il ressort de ce qui précède que la conclusion à laquelle le Tribunal aboutit au point 77 de l' arrêt et selon laquelle la Cour autoriserait, dans une jurisprudence constante, les personnes physiques et morales à se prévaloir de la violation du règlement intérieur d' une institution communautaire, ne trouve aucun appui dans les arrêts qu' il cite à cet effet. A aucun endroit de ces arrêts, la Cour n' établit pas non plus de lien entre le règlement intérieur de l' institution concernée et les principes de légalité, de sécurité juridique et de bonne administration que le Tribunal mentionne au point 76 de l' arrêt (cf. le point 58 plus haut).

    Cela ne veut pas dire qu' exception faite des arrêts cités par le Tribunal et de l' arrêt Nakajima, il n' existe pas d' autre jurisprudence dans laquelle la Cour fait intervenir dans son raisonnement juridique des dispositions du règlement intérieur d' une institution ou d' un organe communautaire ou dans laquelle elle examine la conformité à ce règlement des actes de cette institution ou de cet organe. Dans aucun de ces arrêts, cependant, la Cour n' exprime de manière explicite son point de vue sur le statut juridique de ces règlements. De surcroît, cette jurisprudence ne concerne pas des litiges entre une institution et des personnes physiques ou morales qui ne font pas partie de ladite institution : il y s' agit toujours d' affaires de fonctionnaires(125) ou bien de litiges entre un Etat membre et une institution communautaire(126). On ne saurait donc pas davantage déduire de ces arrêts que la jurisprudence constante de la Cour autoriserait les personnes physiques et morales à se prévaloir de violations du règlement intérieur d' une institution communautaire. La conclusion inverse, à savoir qu' un tel règlement ne pourrait, par principe, pas être invoqué par des personnes physiques ou morales, ne saurait cependant pas davantage, selon nous, être déduite des deux ordonnances spécifiques que la Commission a mentionnées à l' audience(127).

    54. Analyse de l' arrêt Nakajima. Tous les éléments que nous venons d' exposer nous confortent dans la conviction que le seul arrêt de la Cour auquel on puisse accorder valeur de précédent à cet égard est l' arrêt Nakajima : c' est le seul arrêt dans lequel la Cour se soit exprimée de manière explicite sur le statut juridique du règlement intérieur d' une institution communautaire et sur la question de savoir si un particulier, personne physique ou morale, extérieure à cette institution, peut se prévaloir d' une violation de ce règlement. L' argument invoqué par les parties défenderesses à l' audience alléguant que l' arrêt Nakajima serait dénué de pertinence dans la présente affaire ne saurait être retenu : s' il est vrai que cet arrêt concerne le règlement intérieur du Conseil (et non celui de la Commission) et qu' il ne concerne pas l' authentification des décisions, il n' en demeure pas moins qu' il faut lui reconnaître une valeur de précédent en ce qui concerne la question qui nous occupe à présent, à savoir celle qui a trait au statut juridique du règlement intérieur d' une institution communautaire ainsi que le point de savoir si un tel règlement peut être invoqué par des particuliers extérieurs à cette institution.

    55. La question est donc celle de savoir si, en faisant une distinction entre les dispositions du règlement intérieur d' une institution qui règlent uniquement le déroulement interne des affaires au sein de l' institution (et dont la violation ne saurait dès lors pas être invoquée) et celles qui donnent naissance à des droits et qui constituent un élément de la sécurité juridique (et dont la violation peut dès lors être invoquée), le Tribunal interprète correctement l' arrêt Nakajima.

    Nous sommes d' avis que la réponse doit être nuancée. Il résulte en tout cas de la jurisprudence de la Cour que la deuxième situation représente bien plus l' exception que la règle : en effet, comme il apparaît des arrêts Akzo et Nakajima (cités plus haut aux points 41 et 48 respectivement), le règlement intérieur d' une institution communautaire a pour objectif principal de régler le fonctionnement interne de cette institution en vue d' une bonne administration. Cette approche vaut a fortiori pour la Commission en raison de l' impératif évoqué plus haut (au point 48) qui est énoncé à l' article 16 du traité de fusion. Il résulte en outre clairement de l' arrêt Nakajima que les personnes physiques ou morales ne peuvent pas se prévaloir de la violation des règles d' un règlement intérieur qui concernent l' organisation de l' institution concernée et la formation de ses décisions et qui ont donc pour but d' assurer le bon déroulement des délibérations internes - ce qui était clairement le cas des articles du règlement intérieur du Conseil qui avaient été invoqués par Nakajima (cf. le point 49 plus haut).

    La jurisprudence de la Cour n' exclut cependant pas totalement que des particuliers puissent se prévaloir d' un règlement intérieur, du moins dans la mesure où, pour reprendre les termes du point 50 de l' arrêt Nakajima, la disposition invoquée est "destinée (...) à assurer la protection des particuliers". L' article 27 du règlement intérieur de la Commission, qui a trait à la délégation de pouvoir, constitue une illustration adéquate d' une disposition satisfaisant à cette exigence. Les arrêts Akzo, VBVB et VBBB/Commision et Funoc/Commission indiquent de manière implicite mais certaine qu' un tiers peut éventuellement se prévaloir d' une violation de la disposition en question(128). Cela n' est d' ailleurs que logique : comme nous l' avons déjà indiqué précédemment (aux points 38 et suivants), le problème de la délégation et du pouvoir de représentation qui va de pair avec elle est étroitement lié au principe de la collégialité de la Commission, qui est inscrit dans le traité, et présente également un lien étroit avec la question de savoir si un acte a été pris ou exécuté par l' autorité compétente. Cette dernière question concerne la compétence et est dès lors soumise au contrôle de légalité de la Cour conformément à l' article 173 premier alinéa du traité CEE.

    56. L' exemple de l' article 27 me conforte dans la conviction que le critère à appliquer pour analyser le point de savoir si les dispositions du règlement intérieur d' une institution communautaire peuvent être invoquées par des particuliers est précisément qu' une telle disposition doit (notamment) viser à la protection des particuliers et non pas, ou du moins pas exclusivement, au bon fonctionnement interne de l' institution en question. Si on la comprend dans ce sens là, nous pouvons souscrire à la distinction que le Tribunal a lue dans l' arrêt Nakajima. Cela ne signifie cependant pas encore que nous adoptons purement et simplement la position du Tribunal qui veut que l' article 12 du règlement intérieur soit "créat(eur) de droits et facteur de sécurité juridique" pour les particuliers. Pour pouvoir déterminer si tel est le cas, il nous faut à présent examiner la signification de la notion d' authentification au sens de la disposition précitée.

    B. La signification juridique de l' authentification des décisions de la Commission conformément à l' article 12 du règlement intérieur

    57. La conception du Tribunal. Examinons d' abord rapidement les principaux passages de l' arrêt PVC dans lesquels le Tribunal exprime son point de vue sur la procédure d' authentification qui est prévue à l' article 12 du règlement intérieur. La position de principe du Tribunal figure au point 72 de l' arrêt :

    "La procédure d' authentification des actes prévue par ces dispositions du règlement intérieur de la Commission, lequel trouve lui-même sa base légale directement dans les articles 15 et 16 du traité de fusion du 8 avril 1965, qui prévoient en outre, la publicité de ce règlement, constitue un facteur essentiel de sécurité juridique et de stabilité des situations juridiques dans l' ordre normatif communautaire. Elle est seule de nature à garantir que les actes de l' institution ont été adoptés par l' autorité compétente dans le respect des règles de forme prévues par le traité et les textes pris pour son application, et spécialement dans le respect de l' obligation de motivation prévue à l' article 190 du traité. En garantissant l' intangibilité de l' acte adopté, qui ne peut être modifié ou abrogé que dans le respect de ces obligations, elle permet aux sujets de droit, qu' il s' agisse des personnes physiques ou morales, des Etats membres ou des autres institutions communautaires, de connaître avec certitude et à tout moment l' étendue exacte de leurs droits ou de leurs obligations et les raisons pour lesquelles la Commission a adopté une décision à leur égard".

    Selon le Tribunal, la procédure d' authentification remplit plus précisément les fonctions suivantes :

    "En premier lieu, l' authentification de l' acte certifie ainsi, de façon certaine, son existence et la correspondance exacte de son contenu avec celui de l' acte adopté par le collège des commissaires. En second lieu, elle permet, par la datation de l' acte et l' apposition des signatures du président et du secrétaire général, de s' assurer de la compétence de son auteur. En troisième lieu, en conférant à l' acte son caractère exécutoire, l' authentification assure sa pleine incorporation dans l' ordre juridique communautaire"(129).

    Le Tribunal estime indispensable le formalisme que comporte cette procédure d' authentification :

    "L' ensemble de ce formalisme rigoureux qui s' attache à l' élaboration, à l' adoption et à l' authentification des actes est nécessaire à la garantie de la stabilité de l' ordre juridique et à la sécurité juridique des sujets auxquels s' imposent les actes des institutions communautaires. Un tel formalisme est strictement nécessaire au maintien d' un système juridique qui repose sur la hiérarchisation des normes. Il garantit le respect tout à la fois des principes de légalité, de sécurité juridique et de bonne administration (...). Toute méconnaissance de ces règles aurait pour effet de créer un système essentiellement précaire, dans lequel la désignation des sujets auxquels s' imposent les actes des institutions, l' étendue de leurs droits et obligations et l' auteur des actes ne pourraient être connus qu' avec une approximation relative qui serait de nature à remettre en cause l' exercice même du contrôle juridictionnel. C' est pourquoi, comme la Cour l' a jugé dans l' arrêt du 23 février 1988, Royaume-Uni/Conseil, dit 'des substances hormonales' (68/86, Rec. p. 855), où, comme dans l' arrêt du même jour dit des 'poules pondeuses' , précités, elle a rappelé la force contraignante qui s' attache aux règlements intérieurs des institutions communautaires, 'les règles relatives à la formation de la volonté des institutions communautaires sont établies par le traité et ... ne sont à la disposition ni des Etats membres ni des institutions elles-mêmes' "(130).

    58. Si l' on résume ces trois points de l' arrêt, nous retiendrons que, selon le Tribunal, la procédure d' authentification prévue par le règlement intérieur remplit les fonctions suivantes : (i) elle garantit que l' acte a été adopté par l' autorité compétente dans le respect des conditions de forme et des règles de mise en oeuvre énoncées par le traité CEE, en particulier l' obligation de motivation formulée par l' article 190 du traité CEE(131) ; (ii) elle confirme l' existence matérielle et le contenu de l' acte ainsi que sa conformité à la volonté du collège des commissaires(132) ; et (iii) elle confère à l' acte son caractère exécutoire et assure sa pleine incorporation dans l' ordre juridique communautaire(133).

    Avant d' examiner si ces fonctions peuvent en effet être attribuées à la procédure d' authentification, il nous paraît indiqué d' examiner de plus près les dispositions concernées du règlement intérieur.

    59. Analyse détaillée des dispositions concernées du règlement intérieur de la Commission. L' article 12 fait partie de la section I, intitulée "délibérations de la Commission", du premier chapitre du règlement intérieur. Il apparaît à la fin de cette section qui concerne exclusivement la manière dont la Commission délibère et adopte ses décisions, que ce soit en séance ou par la voie de la procédure écrite(134). Comme l' affirme la Commission et comme l' a également admis le Tribunal dans son arrêt(135), il existe un lien étroit entre l' article 12 et l' article 10 de ce règlement. Nous citons in extenso le texte de ces deux dispositions :

    Article 10

    "Il est établi un procès-verbal de chaque séance de la Commission.

    Les projets de procès-verbaux sont soumis à l' approbation de la Commission au cours d' une séance ultérieure. Les procès-verbaux approuvés sont authentifiés par la signature du président et la contre-signature du secrétaire général".

    Article 12

    "Les actes adoptés par la Commission, en séance ou par la procédure écrite, sont authentifiés, dans la ou les langues où ils font foi, par les signatures du président et du secrétaire général.

    Les textes de ces actes sont annexés au procès-verbal de la Commission où il est fait mention de leur adoption.

    Le président notifie, en tant que de besoin, les actes adoptés par la Commission".

    Lues conjointement, ces dispositions signifient que pour les décisions adoptées par le collège des commissaires, la Commission doit respecter la procédure suivante : (i) en premier lieu, pour chaque séance, un procès-verbal doit être dressé, approuvé par la Commission au cours d' une séance ultérieure et authentifié ensuite par la signature du président et la contre-signature du secrétaire général ; (ii) les actes adoptés par la Commission (en séance ou par la procédure écrite) doivent ensuite être authentifiés, dans la ou les langues où ils font foi, par les signatures du président et du secrétaire général ; (iii) les textes de ces actes doivent être annexés au procès-verbal de la séance de la Commission où il est fait mention de leur adoption et (iv) les actes en question doivent, en tant que de besoin, être notifiés par le président à leurs destinataires(136).

    60. La procédure d' authentification a-t-elle pour fonction de garantir que l' acte a été adopté par l' autorité compétente dans le respect des prescriptions de forme et en particulier dans le respect de l' obligation de motivation énoncée à l' article 190 du traité CEE ? Nous ne sommes pas convaincus que la procédure d' authentification aurait pour fonction de garantir qu' un acte a été adopté par l' autorité compétente, à savoir la Commission. S' il est vrai que l' authentification constitue une preuve que le collège des commissaires a pris un acte déterminé, elle ne garantit cependant en aucune manière que la Commission était bel et bien compétente à adopter cet acte(137). Inversement, le fait que le règlement intérieur actuel ne prévoit aucune procédure d' authentification pour les actes adoptés par une personne à laquelle un pouvoir de prendre une mesure d' administration ou de gestion a été conféré conformément à l' article 27 du règlement, n' implique pas davantage que de tels actes auraient été pris par un auteur incompétent. Si ce que le Tribunal veut dire, c' est que l' authentification garantit qu' un acte a été adopté par un auteur compétent à l' intérieur de la Commission, nous estimons que la jurisprudence exposée plus haut (aux points 40 et suivants) que la Cour a consacrée au principe de collégialité et aux conditions auxquelles des pouvoirs peuvent être délégués offre à cet égard des garanties suffisantes aux particuliers pour qu' ils puissent se défendre contre un acte pris par un membre incompétent de la Commission ou du personnel de celle-ci.

    Nous ne voyons pas davantage quelle garantie supplémentaire l' authentification apporterait pour qu' il soit satisfait aux conditions de forme imposées par le traité CEE, en particulier l' obligation de motivation énoncée à l' article 190 du traité CEE. En ce qui concerne le respect de l' article 190, on retiendra que, bien qu' il soit exact que l' exposé des motifs est un élément constitutif d' un acte communautaire (cf. le point 73 plus bas), l' article 190 du traité CEE, tel qu' il a été interprété dans la jurisprudence de la Cour (cf. le point 16 plus haut), pose en premier lieu un certain nombre de conditions relatives aux qualités de fond de la motivation des décisions que la Commission rend en matière de concurrence. Quelle que soit la minutie avec laquelle elle est suivie, une procédure purement formelle d' authentification au sens des articles 10 et 12 du règlement intérieur n' est pas en mesure de remédier aux déficiences, quant au fond, de la motivation d' une décision, compte tenu des exigences de la Cour en matière de protection juridique des destinataires de l' acte et en matière de contrôle de légalité dans le cadre de l' article 173 du traité CEE.

    61. Examen détaillé des articles 191 et 192 du traité CEE. Pour analyser les autres fonctions que le Tribunal prête à la procédure d' authentification, y compris le rôle que l' authentification doit jouer pour assurer le respect des autres règles de forme prévues par le traité CEE et les textes pris pour son application, nous estimons qu' il est nécessaire d' examiner d' abord et de plus près la signification des articles 191 et 192 du traité CEE. Outre l' article 190 que nous avons déjà examiné, ce sont en effet ces deux articles qui énoncent les conditions de forme que le traité CEE impose à l' égard des décisions en matière de concurrence qui comportent une obligation pécuniaire pour des personnes physiques ou morales.

    62. L' article 191 deuxième alinéa du traité CEE dispose en premier lieu que "les décisions sont notifiées à leurs destinataires". En d' autres termes, la notification est donc une formalité indispensable pour qu' une décision puisse prendre effet(138). La Cour fait néanmoins preuve de souplesse en ce qui concerne la manière formelle dont la notification doit être opérée : il est de jurisprudence constante, depuis l' arrêt Continental Can, qu' "une décision est dûment notifiée, au sens du traité, dès lors qu' elle est communiquée à son destinataire et que celui-ci est mis en mesure d' en prendre connaissance"(139). Cette jurisprudence se situe dans le prolongement logique de l' arrêt ALMA dans lequel, sur la base d' "une règle de droit généralement admise dans tous les pays de la Communauté", la Cour a dit pour droit qu' "une déclaration de volonté écrite produit tous ses effets dès lors qu' elle est régulièrement entrée dans la sphère interne du destinataire"(140). En d' autres termes, pour déterminer s' il est satisfait à l' exigence de notification énoncée à l' article 191 du traité CEE, il est déterminant que le destinataire ait eu effectivement accès à la décision concernée(141). Comme la Cour l' a déclaré dans les arrêts Geigy et ICI, les irrégularités qui auraient pu se produire dans le mode de notification d' une décision n' entachent pas l' acte lui-même et ne peuvent donc pas le rendre invalide : de telles irrégularités peuvent tout au plus empêcher, dans certaines circonstances, que le délai de recours commence à courir(142). Si la Cour veille à une application rigoureuse du régime linguistique qui est prévu à l' article 3 du règlement n 1 sur la base duquel "les institutions de la Communauté sont tenues de communiquer à toute entreprise destinataire d' une décision le texte de celle-ci dans la langue de l' Etat membre dont cette entreprise relève"(143), elle estime cependant que le fait qu' une décision ait été notifiée à cette entreprise dans d' autres langues également n' est pas de nature à mettre en cause sa validité(144).

    L' article 191 deuxième alinéa dispose en outre que les décisions "prennent effet par cette notification". Une décision ne saurait donc entrer en vigueur avant le moment où elle est notifiée : la Cour a confirmé qu' un principe fondamental dans l' ordre juridique communautaire exige qu' un acte émanant des pouvoirs publics ne soit pas opposable aux justifiables avant que n' existe pour ceux-ci la possibilité d' en prendre connaissance(145). Ceci ressort également du fait que le délai imparti pour un recours en annulation sur la base de l' article 173 du traité CEE ne commence à courir qu' à partir de la notification au requérant ou, à défaut, à partir du jour où le requérant a eu connaissance de cet acte (article 173 troisième alinéa du traité CEE).

    Dans l' arrêt Consten-Grundig, la Cour a également dit avec insistance à propos d' une décision d' application de l' article 85 du traité CEE que "seul le texte notifié aux destinataires fait foi"(146). C' est pourquoi le destinataire ne peut se prévaloir d' une faute apparaissant dans le texte de la décision tel qu' il a été publié au Journal officiel(147).

    63. L' article 192 du traité CEE énonce les règles qui régissent le caractère exécutoire des décisions qui, comme cela peut être le cas dans les affaires "article 85", comportent une obligation pécuniaire à la charge des personnes physiques ou morales. (C' est l' article 192 du traité CEE qui, conformément à l' article 187 du traité, règle également le caractère exécutoire des arrêts de la Cour). Ces décisions forment titre exécutoire pour les personnes susvisées (article 192 premier alinéa). La formule exécutoire doit être apposée "sans autre contrôle que celui de la vérification de l' authenticité du titre" par l' autorité nationale que le gouvernement de chacun des Etats membres désigne à cet effet (article 192 deuxième alinéa)(148). Il faut supposer que cette vérification signifie uniquement que l' autorité nationale compétente constate que l' acte à exécuter émane effectivement de l' institution communautaire qui notifie la décision(149).

    64. Examen, au regard de ces articles du traité, des autres fonctions que le Tribunal prête à la procédure d' authentification. Si nous examinons à présent les autres fonctions que le Tribunal prête aux procédures d' authentification prévues par le règlement intérieur à la lumière des articles 191 et 192 du traité CEE, il apparaît d' emblée que l' on ne saurait soutenir qu' en conférant à l' acte son caractère exécutoire, l' authentification assurerait la pleine incorporation de celui-ci dans l' ordre juridique communautaire. Par une telle déclaration, en effet, le Tribunal fait, à tort, totalement abstraction de l' article 191 deuxième alinéa du traité CEE et de la jurisprudence développée par la Cour sur la base de celui-ci ainsi que de l' article 192 du traité CEE qui énoncent de manière exhaustive les conditions auxquelles une décision entre en vigueur, ce qui lui confère son caractère exécutoire et assure sa pleine incorporation dans l' ordre juridique communautaire. Avant sa notification au sens de cette disposition, en effet, une décision ne saurait pas entrer en vigueur et ne saurait pas davantage être exécutoire, indépendamment du point de savoir si la procédure interne d' authentification a été respectée ou non.

    65. Nous ne voyons pas davantage, à la lumière des articles 191 et 192 du traité CEE, comment une authentification conforme aux articles 10 et 12 du règlement intérieur donne aux sujets de droit auxquels la décision est adressée une garantie supplémentaire sur l' existence matérielle et le contenu d' un acte. Lorsqu' une décision de la Commission est notifiée à une personne physique ou morale conformément à l' article 191 deuxième alinéa du traité CEE, c' est l' acte ainsi notifié et lui seul, qui, selon la Cour, est authentique et dont les autorités nationales compétentes peuvent, en vue de l' apposition de la formule exécutoire, vérifier l' authenticité (cf. les points 62 et 63 plus haut). A partir de cet instant, la Commission ne peut plus se soustraire à la déclaration de volonté qu' elle a faite, sauf s' il devait apparaître que l' acte est inexistant (cf. le point 77 plus bas). En revenant sur sa déclaration de volonté, la Commission porterait atteinte aux principes de la sécurité juridique et de la confiance légitime du destinataire qui peut se fonder sur la légalité de l' acte(150). Ce n' est que dans l' hypothèse où l' acte s' avérerait illégal que la Commission pourrait procéder à son retrait mais, même en pareille hypothèse, elle ne pourrait, conformément à une jurisprudence constante, effectuer ce retrait que "s' il intervient dans un délai raisonnable et si la Commission a suffisamment tenu compte de la mesure dans laquelle la requérante a éventuellement pu se fier à la légalité de l' acte"(151).

    66. La procédure d' authentification a-t-elle pour fonction de confirmer que le contenu d' un acte correspond à la volonté du collège des commissaires ? Ceci nous amène à la dernière fonction que le Tribunal prête à la procédure d' authentification, à savoir que celle-ci garantirait que l' acte authentifié coïncide, quant à son contenu, avec l' acte adopté par le collège des commissaires. Cette interprétation du Tribunal doit, selon nous, être assortie de la nuance suivante.

    Soulignons tout d' abord que ce n' est qu' à la condition que le destinataire d' une décision de la Commission comparaissant devant lui puisse justifier d' un intérêt à l' obtention d' une telle mesure que le juge communautaire peut faire droit à la demande que ce destinataire lui ferait d' ordonner, à titre de mesure d' instruction, que la Commission produise le procès-verbal authentifié et l' original authentifié de la décision dès lors qu' il s' agit-là de documents confidentiels étant donné que, conformément à l' article 8 du règlement intérieur, les débats de la Commission sont confidentiels. C' est au juge qu' il appartient d' apprécier concrètement cet intérêt : il est permis de supposer qu' un tel intérêt existe bel et bien dès lors qu' il existe des indications sérieuses que le texte notifié de la décision ne correspond pas (ou plus) avec celui de la décision adoptée par le collège des commissaires(152). Un tel intérêt ne nous paraît cependant pas être présent lorsqu' il n' existe que des traces de divergences qui, comme c' est le cas des adaptations effectuées en vue de la coordination des différentes versions linguistiques d' une décision, n' influencent à aucun égard la portée de la décision ou lorsqu' il s' agit de divergences de fond qui ne sont susceptibles d' affecter que d' autres destinataires.

    Dans l' hypothèse évoquée plus haut, cependant, où une partie peut justifier d' un intérêt nous estimons qu' un tel rôle peut effectivement être attribué au procès-verbal authentifié et à l' original authentifié d' un acte adopté par le collège des commissaires. Le juge communautaire doit alors en effet pouvoir vérifier au moyen de ces documents si des modifications importantes, c' est-à-dire affectant la situation juridique de la partie intéressée, ont été apportées a posteriori à l' acte adopté par le collège, modifications qui ne correspondraient pas à la déclaration de volonté de la Commission telle qu' elle est exprimée dans les documents concernés. Nous pouvons formuler ceci d' une autre manière également : lorsque le président et le secrétaire général de la Commission apposent leur signature au bas du procès-verbal approuvé d' une séance de la Commission au cours de laquelle une décision déterminée a été prise et qu' ils signent de surcroît (la ou les versions authentiques de) cette décision, nous voyons dans cette formalité une garantie réelle pour le destinataire de cette décision que le texte qui lui est notifié correspond effectivement à la décision du collège des commissaires. Cette garantie joue à un double niveau. Elle remplit une fonction a priori (avant la notification de la décision) au sein de la Commission pour le secrétaire général et ses services en ce sens que lorsque ceux-ci, en vue de la notification de la décision, apposent au bas de l' acte l' apostille "pour copie conforme", ils peuvent être sûrs, grâce à l' authentification de l' original de la décision, du contenu de cet original au moyen duquel ils doivent constater la conformité de la copie notifiée (cf. le point 82 plus bas)(153). Cette garantie remplit également une fonction a posteriori (après la notification de la décision) devant le juge communautaire : elle joue au profit du destinataire de la décision dans l' hypothèse que nous avons esquissée plus haut, à savoir lorsque celui-ci dispose d' indications sérieuses que le texte notifié ne correspond pas à l' original.

    67. Parmi les fonctions attribuées par le Tribunal à la procédure d' authentification, seule la dernière que nous avons citée satisfait, selon nous, au critère que nous avons énoncé plus haut (au point 56) pour qu' une disposition du règlement intérieur d' une institution communautaire puisse être invoquée par des personnes physiques ou morales. L' authentification effectuée conformément aux articles 10 et 12 du règlement intérieur garantit notamment - sur la foi du président et du secrétaire général qui ont respectivement présidé et assisté à la séance au cours de laquelle la décision a été prise - que le texte d' une décision de la Commission notifié à un destinataire est conforme à la décision adoptée par le collège des commissaires. A cet égard, l' authentification vise à assurer une meilleure protection (juridique) des sujets de droit - qui, en raison du caractère confidentiel des séances de la Commission, ne sont évidemment pas en mesure de contrôler eux-mêmes cette conformité - et qui, conformément à la jurisprudence Nakajima, peuvent dès lors se prévaloir des articles 10 et 12 du règlement intérieur.

    68. Toutes les observations que nous venons de formuler ne signifient cependant pas encore que, dans l' hypothèse où une mesure d' instruction ordonnée par le juge communautaire ferait apparaître ultérieurement que la Commission n' a pas ou pas complètement suivi la procédure d' authentification prévue par son règlement intérieur, les destinataires de la décision en cause pourraient tirer de la violation des dispositions concernées du règlement un moyen d' inexistence de cette décision. En effet, on verra plus tard (au point 77) qu' il faut pour cela que des vices manifestes entachent la décision, c' est-à-dire des vices qui, pour ses destinataires également, apparaissent clairement à la lecture du texte qui leur a été notifié - ce qui ne saurait manifestement pas être le cas d' un non-respect par la Commission de la procédure d' authentification qui se déroule dans la sphère interne de la Commission, non-respect constaté a posteriori par le juge dans le cadre d' une mesure d' instruction.

    Le non-respect ou le non-respect partiel par la Commission de la procédure d' authentification ne saurait pas davantage, selon nous, être considéré comme une violation d' une forme substantielle au sens de l' article 173 du traité CEE. Comme on peut le lire dans la jurisprudence de la Cour, les formes substantielles sont, en effet, des règles qu' une institution communautaire doit respecter, à peine de nullité, préalablement à l' adoption d' un acte ou au moment de celle-ci(154). C' est la raison pour laquelle, par exemple, les règles relatives à la publication ou à la notification d' un acte à ses destinataires ne constituent pas, aux yeux de la Cour, des formes substantielles au sens de l' article 173 du traité CEE : dès l' instant où une décision a été validement adoptée, aucun acte postérieur à son adoption ne peut plus affecter sa validité(155). Nous ne voyons dès lors pas comment le non-respect ou le respect incomplet par la Commission de ses procédures internes d' authentification - qui, comme il ressort de l' analyse des articles 10 et 12 (cf. le point 59 plus haut), doivent nécessairement se dérouler après l' approbation de l' acte - pourrait constituer une violation d' une forme substantielle.

    Il faut en revanche, selon nous, considérer cette authentification comme une règle de procédure que la Commission s' est donnée à elle-même dans le cadre de l' obligation qui lui incombe (en vertu de l' article 16 du traité de fusion : cf. le point 48 plus haut) de s' acquitter des missions qui lui ont été imparties par les traités, d' une manière conforme aux principes de bonne administration. La Cour a confirmé à plusieurs reprises que ces principes s' appliquent également lorsque la Commission intervient dans des affaires de concurrence(156). L' authentification doit alors être comprise comme une règle de diligence que la Comission s' est donnée à elle-même qui vise à garantir que les décisions qu' elle a adoptées reflètent intégralement la volonté du collège des commissaires(157).

    69. Ce qui précède n' empêche pas que le non-respect total de la procédure d' authentification peut révéler un tel manque de soin dans l' administration qu' il constitue une violation des principes de bonne administration et, partant, un motif d' illégalité au sens de l' article 173 du traité CEE(158). Cependant, rien n' autorise, selon nous, à parler d' un tel manque de soin ou de rigueur dans l' administration dans le cas présent. Il ressort en effet des constatations de fait opérées par le Tribunal que la Commission n' a pas violé la totalité de la procédure d' authentification qui lui est imposée par son règlement intérieur : le procès-verbal de la neuf cent quarante cinquième séance du collège des commissaires du 21 décembre 1988 qu' elle a déposé devant le Tribunal le 5 décembre 1991 est authentifié par la signature du président et la contre-signature du secrétaire général, exactement comme l' exige l' article 10 du règlement intérieur(159). Ce procès-verbal montre clairement que le collège des commissaires a délibéré de la décision et il indique en outre expressément que la Commission (i) constate une violation de l' article 85 du traité CEE, (ii) inflige aux quatorze entreprises concernées des amendes spécifiées dans le procès-verbal, (iii) leur enjoint de mettre fin aux violations en cause et de s' abstenir à l' avenir de tout accord ou pratique concertée pouvant avoir un objet ou un effet identique ou similaire et (iv) qu' elle fait siennes les décisions énoncées dans les documents C(88)2497 et C(88)2498 (c' est-à-dire les projets de décision, y compris l' exposé des motifs, en allemand, anglais et français). Etant donné que le procès-verbal dénote un tel degré de précision -pratiquement l' ensemble du dispositif de la décision y apparaît ainsi que, sous forme de renvoi aux projets de décision, l' exposé des motifs de la décision - et étant donné qu' il est signé par le président et le secrétaire général conformément à l' article 10 du règlement intérieur, on est autorisé à admettre que cette authentification du procès-verbal peut être assimilée à l' authentification de la décision elle-même en ce sens que la correspondance de la décision notifiée aux destinataires avec la décision telle qu' elle a été prise au cours de la séance peut être constatée au moyen d' un procès-verbal à ce point précis et authentifié de surcroît. Bien que nous trouvions extrêmement inopportune la manière dont la Commission a procédé - il y a longtemps qu' elle aurait dû adapter l' article 12 du règlement intérieur (qui date de 1963) au rythme de ses décisions qui s' est nettement accéléré entre temps -, nous ne pouvons pas, dès lors que l' on dispose d' un procès-verbal précis et authentifié qui a repris, en substance, la fonction liée à l' authentification de la décision elle-même, constater une violation d' un principe de bonne administration en l' espèce.

    70. Conclusion. Ceci nous amène à la conclusion suivante. La procédure d' authentification énoncée aux articles 10 et 12 du règlement intérieur ne garantit pas que l' auteur d' une décision de la Commission était compétent à intervenir ni que les règles de forme énoncées par le traité CEE, y compris par l' article 190, ont été respectées. Cette procédure n' a rien à voir avec le caractère exécutoire de la décision ni avec ses effets ou encore avec son incorporation dans l' ordre juridique communautaire. L' authentification ne protège pas davantage les particuliers en ce qu' elle confirmerait l' existence d' une décision puisqu' est seul déterminant à cet égard le texte authentique de la décision qui a été correctement établi et notifié aux destinataires. L' authentification prévue par le règlement intérieur permet cependant au juge communautaire de contrôler au besoin - c' est-à-dire lorsqu' une partie qui peut justifier d' un intérêt suffisant lui en fait la demande - le texte notifié aux destinataires d' une décision au moyen du procès-verbal de la séance de la Commission au cours de laquelle l' acte a été adopté et au moyen de l' original de cet acte, ces deux documents confirmant conjointement l' expression originelle de la volonté de la Commission. C' est à cet égard uniquement que l' authentification a aussi pour objet de protéger les particuliers et que le non-respect de la procédure peut éventuellement être invoquée comme une violation du droit communautaire, à savoir comme une violation d' un principe de bonne administration. Dans le cas qui nous occupe à présent, cette fonction d' authentification est cependant entièrement remplie grâce à la présence d' un procès-verbal suffisamment précis et qui, de surcroît, a été authentifié. En ne tenant pas compte de cet élément et en considérant la disposition de l' article 12 comme une disposition de forme dont le non-respect entraîne en soi la nullité de la décision, et même son inexistence, le Tribunal a donné une portée trop absolue à l' article 12 du règlement intérieur et il a donc violé le droit communautaire.

    VII. Application incorrecte de la théorie de l' inexistence ?

    71. Les déclarations des parties et le raisonnement du Tribunal. Le dernier moyen de la Commission est pris de l' application incorrecte par le Tribunal de la théorie de l' inexistence des actes d' administration telle qu' elle a été développée dans les systèmes juridiques nationaux des Etats membres et dans la jurisprudence de la Cour. En premier lieu, tous les systèmes juridiques nationaux connaîtraient, selon la Commission, le principe selon lequel un acte administratif jouit d' une présomption de légalité. Ce n' est que dans des cas tout à fait exceptionnels, d' une irrégularité tellement grossière et évidente que les vices dont l' acte est entaché seraient immédiatement décelables par tout un chacun, qu' il serait fait application de la théorie de l' inexistence dans le droit des Etats membres. Dans sa jurisprudence, notamment dans l' arrêt Consorzio Cooperative d' Abruzzo (ci-après : "arrêt Consorzio"), la Cour ferait elle aussi application de la présomption susvisée de légalité et ce n' est que dans des cas extrêmes - elle ne l' a fait qu' à une seule occasion jusqu' à présent - qu' elle serait disposée à déclarer un acte inexistant en raison des irrégularités particulièrement graves et flagrantes qui l' affectent, irrégularités qui sauteraient aux yeux du destinataire lui-même. Pour autant qu' il faille admettre que la présente décision est entachée de vices, ceux-ci ne touchent, selon la Commission, que la procédure interne qui a abouti à l' approbation de la décision. C' est à tort que le Tribunal aurait conclu à l' inexistence de l' acte sur la base de ce motif.

    L' argumentation des parties défenderesses revient en bonne partie à déclarer que la Commission interprète de manière incorrecte la théorie de l' inexistence telle qu' elle figure dans l' arrêt Consorzio notamment. En effet, la condition à remplir ne serait pas que les vices qui entachent un acte sautent aux yeux de son destinataire, c' est-à-dire qu' ils soient immédiatement visibles. D' autre part, ce serait à tort que la Commission tirerait argument du fait que la Cour n' a encore fait qu' application de la théorie de l' inexistence qu' à une seule occasion : selon les défenderesses, il n' existerait, au plan communautaire, pas un seul cas connu dans lequel les règles de procédure auraient été violées à une échelle aussi grande que dans la présente affaire, violation qui culminerait par la non-authentification de la décision.

    72. Passons en revue le raisonnement tenu par le Tribunal. Se référant à la jurisprudence communautaire, celui-ci rappelle tout d' abord que

    "le juge communautaire, s' inspirant des principes dégagés par les ordres juridiques nationaux, déclare inexistants les actes qui sont entachés de vices particulièrement graves et évidents (...). Ce moyen est d' ordre public et, comme tel, il peut être invoqué par les parties sans condition de délai au cours de la procédure et doit être soulevé d' office par le juge"(160).

    De l' arrêt Consorzio (cf. le point 75 plus bas), le Tribunal déduit ensuite que

    "(i)l convient d' examiner si, en l' espèce, l' acte attaqué est affecté de vices particulièrement graves et évidents, au sens de l' arrêt de la Cour du 26 février 1987, précité, de nature à conduire le Tribunal à le déclarer inexistant"(161).

    Le juge de première instance procède ensuite de la sorte. Après avoir constaté l' absence d' authentification au sens de l' article 12 du règlement intérieur et après avoir récapitulé ce qu' il avait déjà constaté à propos des modifications apportées au texte de la décision et de l' incompétence de l' auteur de celle-ci, le Tribunal déclare qu' il n' est pas possible de déterminer la date, le contenu et l' auteur de la décision.

    En ce qui concerne la date, le Tribunal estime qu' il est placé dans l' impossibilité

    "d' opérer une datation des actes, et ce alors même que leur adoption se situe à une date rapprochée de l' expiration du mandat du commissaire en charge des questions de concurrence, dont il est constant qu' il avait été investi par le collège, au moins pour partie, d' un tel pouvoir d' adoption ; ainsi, le Tribunal se trouve dans l' impossibilité de déterminer la date à laquelle les actes litigieux auraient, entre le 21 décembre 1988 et le 16 janvier 1989, été réellement adoptés et incorporés dans l' ordre juridique communautaire, acquérant ainsi force obligatoire"(162).

    Pour ce qui est du contenu de ces actes, le Tribunal estime également qu' il ne peut pas s' en faire "une image exacte et certaine"

    "dès lors qu' a été totalement méconnue la procédure d' authentification prévue à l' article 12 du règlement intérieur, qui aurait été le seul moyen de faire (...) le départ entre la volonté de l' organe délibérant et les modifications ultérieures apportées par une personne et à une date non identifiables"(163).

    Le Tribunal constate enfin

    "qu' il est placé dans l' impossibilité, en conséquence de la combinaison des deux vices précédents, d' identifier avec certitude l' auteur des actes arrêtés dans leur version définitive, alors même d' une part, qu' il s' agit d' une question d' ordre public et, d' autre part, que les actes ont perdu, en raison des deux vices précédents, la présomption de légalité dont ils bénéficient en apparence"(164).

    Au point 96 de l' arrêt, le Tribunal aboutit alors à la conclusion suivante :

    "Un acte dont le Tribunal ne peut ni fixer avec une certitude suffisante la date exacte à partir de laquelle il a été susceptible de produire des effets juridiques et, par suite, d' être incorporé dans l' ordre juridique communautaire, ni, en raison des modifications dont il a été l' objet, appréhender avec assurance le contenu précis de la motivation qu' il doit contenir en vertu de l' article 190 du traité, ni définir et contrôler sans ambiguïté l' étendue des obligations qu' il impose à ses destinataires ou la désignation de ces derniers, ni identifier avec certitude quel a été l' auteur de sa version définitive, et pour lequel il est établi que la procédure d' authentification prévue par la réglementation communautaire a été totalement méconnue et que celle prévue à l' article 192, deuxième alinéa, du traité ne serait pas susceptible d' être mise en oeuvre, ne peut être qualifié de décision au sens de l' article 189 du traité, précité. Un tel acte est entaché de vices particulièrement graves et évidents, qui le rendent juridiquement inexistant".

    73. La théorie de l' inexistence dans la jurisprudence de la Cour. En raisonnant de la sorte, le Tribunal a-t-il fait une application correcte de la théorie de l' inexistence telle qu' elle a été développée dans la jurisprudence de la Cour ? Soulignons en premier lieu que, de longue date, à savoir dans l' arrêt Algera du 12 juillet 1957, la Cour a adopté la règle de base suivante :

    "L' intervention d' un acte administratif crée la présomption de sa validité. Celle-ci ne peut être infirmée que par annulation ou par retrait, pour autant que ces mesures sont admises"(165).

    Dans le même arrêt, la Cour a souligné que :

    "l' illégalité d' un acte administratif individuel n' entraîne sa nullité absolue que dans certains cas (...). Abstraction faite de ces cas exceptionnels, la doctrine et la jurisprudence des Etats membres n' admettent qu' une annulabilité et révocabilité"(166).

    Plus récemment, dans l' arrêt Consorzio du 26 février 1987, la Cour a formulé sa conception de l' inexistence des actes administratifs de la manière suivante :

    "En ce qui concerne l' inexistence, il y a lieu de relever que, comme dans les droits nationaux des divers Etats membres, un acte administratif, même irrégulier, jouit, en droit communautaire, d' une présomption de validité, jusqu' à ce qu' il ait été annulé ou retiré régulièrement par l' institution dont il émane. Qualifier un acte d' inexistant permet de constater, en dehors des délais de recours, que cet acte n' a produit aucun effet juridique. Pour des raisons de sécurité juridique manifestes, cette qualification doit, dès lors, être réservée, en droit communautaire, comme elle l' est dans les droits nationaux qui la connaissent, aux actes affectés de vices particulièrement graves et évidents"(167).

    Au cours des dernières années également, la Cour a confirmé à plusieurs reprises qu' elle n' est disposée à appliquer la théorie de l' inexistence que

    "si l' acte en cause était affecté de vices particulièrement graves et évidents, au point de pouvoir être qualifié d' acte inexistant (...)"(168).

    74. A y regarder de plus près, la jurisprudence communautaire fait montre d' une grande réserve lorsqu' il s' agit de déclarer inexistants des actes émanant d' organes communautaires. Passons en revue les cinq arrêts qui concernent le sujet.

    La première et, jusqu' à présent, la seule occasion où la Cour a décidé de déclarer inexistant un acte d' administration communautaire, a été l' arrêt Société des usines à tubes de la Sarre du 10 décembre 1957(169). L' affaire concernait l' intervention de la Haute Autorité à l' appui de programmes d' investissement dans l' industrie métallurgique sur la base de l' article 54 du traité CECA. La partie requérante, un producteur d' acier, avait reçu de la Haute Autorité une lettre que (contrairement à la Haute Autorité) elle considérait comme un avis au sens de l' article 54 quatrième alinéa du traité CECA et qu' elle a entrepris d' attaquer devant la Cour. Après avoir analysé les circonstances, la Cour a conclu que la Haute Autorité avait effectivement eu l' intention d' émettre un avis au sens de cette disposition. Elle a cependant constaté que l' article 54 quatrième alinéa du traité CECA impose un certain nombre de conditions relatives à la manière dont un avis doit être émis (motivation, notification à l' entreprise intéressée, communication au gouvernement concerné, publication). Elle a également constaté qu' une seule de ces formalités, à savoir la notification, avait été remplie. La Cour a constaté notamment que "la motivation est inexistante" dès lors que les termes de la lettre ne pouvaient être considérés "comme mentionnant les éléments essentiels de constatation de fait dont dépend la justification légale de la mesure"(170). La Cour en a tiré la conclusion suivante :

    "Plusieurs des conditions posées par le traité n' ont donc pas été remplies ; si, parmi celles-ci, certaines sont des formalités qui ne peuvent affecter la nature ou l' existence de l' acte, il apparaît que la motivation d' un avis est non seulement prescrite par les articles 5, 15 et 54 alinéa 4 du traité, mais qu' elle constitue un élément essentiel, voire constitutif d' un tel acte. De telle sorte que l' absence de motivation entraîne l' inexistence de l' acte"(171).

    75. Une deuxième affaire dans laquelle la Cour a été invitée à se prononcer sur l' inexistence d' un acte communautaire était l' affaire Schots-Kortner dans laquelle elle a statué le 21 février 1974(172). Il s' agissait d' un recours de fonctionnaires par lequel, dans le prolongement des arrêts Sabbatini et Bauduin(173), un certain nombre de fonctionnaires féminins réclamaient une indemnité de dépaysement. Une des requérantes, qui était forclose de ses droits par expiration des délais de recours, avait fait valoir, pour remédier à cette forclusion, que la disposition du statut applicable à l' époque - que la Cour avait jugé illicite dans les arrêts précités - sur la base de laquelle l' indemnité avait été refusée à certains fonctionnaires féminins (l' ancien article 4 paragraphe 3 de l' annexe VII) était à ce point illégale qu' elle devait être considérée comme non écrite ou inexistante. La Cour a refusé résolument de donner cette qualification à la disposition en question : elle a estimé

    "qu' on ne saurait en aucun cas qualifier d' 'inexistante' la disposition de l' article 4, paragraphe 3 de l' annexe VII du statut, émanée de l' autorité compétente et prise dans le respect des conditions de procédure et de forme fixées par les traités"(174).

    76. Dans l' affaire Consorzio que nous avons déjà citée plus haut, le litige portait sur l' aide financière que la Commission avait accordée à une entreprise italienne, le Consorzio Cooperative d' Abruzzo, dans le cadre du FEOGA (section Orientation). Le Consorzio réclamait l' annulation d' une décision datée du mois d' octobre 1984 dans laquelle la Commission avait réduit le montant de l' aide maximum pour son projet par rapport au montant qui avait été fixé dans une décision datée du mois d' avril 1982. Cette décision de retrait datée de 1984 était, à l' exeption du montant accordé, rédigée dans des termes identiques à ceux qui avaient été utilisés dans la décision précédente de 1982, mais elle ne faisait cependant pas référence à cette dernière. Pour sa défense, la Commission a fait valoir qu' elle n' avait jamais eu l' intention d' accorder le montant énoncé dans la décision de 1982 et que cette décision était inexistante. A cet effet, elle a notamment invoqué deux irrégularités qui avaient été commises au cours de l' adoption de la décision, à savoir (i) que les dispositions internes relatives à la fixation du montant maximum de l' aide FEOGA avaient été enfreintes et (ii) qu' elle avait accordé une aide d' un montant différent de celui pour lequel le comité de gestion avait remis un avis favorable, et cela sans en informer le Conseil, conformément aux dispositions du règlement de base applicables.(175)

    Après avoir rappelé sa conception de l' inexistence des actes communaitaires d' administration (cf. le point 74 plus haut), la Cour a rejeté le moyen de défense de la Commission concernant l' inexistence de sa décision de 1982 :

    "Sans même qu' il y ait lieu de se prononcer sur la gravité des irrégularités alléguées par la Commission, il suffit de constater que ni l' une ni l' autre ne revêtent un caractère évident. Aucune d' elles ne pouvait apparaître à la lecture de la décision. En effet, les règles internes concernant la détermination du concours maximal possible du FEOGA dans le cadre du règlement n 355/77 du Conseil précité n' ont pas été publiées. Ainsi, en dehors des fonctionnaires de la Commission qui ont à les appliquer régulièrement, nul n' était en mesure de vérifier, à la lecture de la décision du 7 avril 1982, si elles avaient été ou non transgressées. Il en est de même de l' irrégularité qui tiendrait à la non correspondance entre le projet soumis au comité de gestion et la décision arrêtée le 7 avril 1982. Il est donc exclu que la décision du 7 avril 1982 puisse être qualifiée d' inexistante"(176).

    77. L' occasion la plus récente dans laquelle une partie litigante a invoqué l' inexistence d' un acte communautaire devant la Cour était l' affaire 226/87, Commission/Grèce(177). Il s' agissait d' un recours en manquement que la Commission avait formé contre la Grèce parce que cet Etat membre n' avait pas pris, dans le délai qui lui avait été imparti, les mesures nécessaires pour se conformer à une décision que la Commission avait adoptée sur la base de l' article 90, paragraphe 3(178). La Grèce a fait valoir que la Cour devrait, par voie d' exception, contrôler la légalité de la décision en cause parce que celle-ci serait dénuée de tout fondement de droit dans l' ordre juridique communautaire. Se référant à l' arrêt Consorzio, la Cour a rejeté ce moyen de défense :

    "Cette objection ne pourrait être accueillie que si l' acte en cause était affecté de vices particulièrement graves et évidents, au point de pouvoir être qualifié d' acte inexistant (...). Or, l' argumentation avancée par la République hellénique ne contient aucun élément précis de nature à conférer une telle qualification à la décision de la Commission. Elle a d' ailleurs elle-même considéré que la décision du 24 avril 1985 n' était pas inexistante lorsqu' elle a annoncé tout au long de la procédure pré-contentieuse son intention de s' y conformer"(179).

    78. Avant l' arrêt contre lequel est dirigé le présent recours, le Tribunal avait lui aussi déjà examiné une fois la question de l' inexistence d' un acte. Il s' agissait de l' affaire Valverde Mordt dans laquelle il a statué le 27 juin 1991(180). Il s' agissait d' un recours de fonctionnaire dans lequel un fonctionnaire de la Cour réclamait notamment l' annulation d' un concours organisé par la Cour. A l' exception d' irrecevabilité pour tardiveté du recours qui lui a été opposée, il a rétorqué que le concours n' était pas seulement annulable mais qu' il était nul de plein droit parce qu' il avait été organisé en violation d' un règlement du Conseil. Le Tribunal a déclaré que cet argument se rapportait en substance à la règle, reconnue dans la jurisprudence de la Cour,

    "selon laquelle, dans des circonstances exceptionnelles, un acte peut être inexistant en raison des vices particulièrement graves et évidents dont il est atteint (...). Pour qu' un acte soit ainsi privé du bénéfice de la présomption de validité que les traités attachent, pour des raisons de sécurité juridique évidentes, aux actes mêmes irréguliers des institutions, il faut qu' il soit entaché d' une irrégularité grossière et évidente dont la gravité dépasse de loin celle d' une irrégularité 'normale' , provenant d' une appréciation erronée des faits ou d' une méconnaissance de la loi (...)"(181).

    La violation éventuelle du règlement invoquée par le fonctionnaire -règlement dont la portée était limitée d' un point de vue aussi bien temporel que matériel car il avait été adopté pour répondre à la situation spécifique créée par l' adhésion de l' Espagne et du Portugal - ne figure nullement, selon le Tribunal, "parmi les cas exceptionnels permettant de caractériser une irrégularité tellement grave et flagrante qu' elle rendrait inexistant l' acte qui en est affecté"(182).

    79. De cet inventaire, il nous semble pouvoir déduire que le juge communautaire applique, selon ses propres dires dans le prolongement des systèmes juridiques nationaux, le cadre d' appréciation suivant en ce qui concerne l' éventuelle inexistence d' un acte communautaire d' administration. Le point de départ est toujours qu' un acte pris par un organe communautaire bénéficie d' une présomption de validité. Même lorsque cet acte est irrégulier ou illégal, cette présomption est maintenue jusqu' au moment de l' annulation ou du retrait de cet acte. Ce n' est que dans des cas exceptionnels que son inexistence pourra être déclarée : il faut pour cela que l' acte présente des vices à ce point graves et évidents qu' ils sautent aux yeux, c' est-à-dire qu' ils soient clairement visibles à la lecture de l' acte et cela, comme la Cour l' a dit dans l' arrêt Consorzio, pas seulement pour les fonctionnaires de l' institution qui a adopté cet acte. Cette jurisprudence est fondée sur des "raisons de sécurité juridique évidentes" : en effet, dans l' affaire Schots-Kortner, l' avocat général Trabucchi a fait observer que

    "[l]es conséquences d' une constatation d' inexistence d' un acte ayant valeur de loi sont tellement graves et souvent pas du tout prévisibles, qu' une extrême prudence est conseillée dans l' emploi de cette notion à l' égard d' actes normatifs, surtout si ceux-ci sont demeurés longtemps en vigueur"(183).

    N' est-il du reste pas frappant qu' au cours des quarante années de son existence, la Cour n' a fait qu' une seule fois application de la théorie de l' inexistence, à savoir dans l' arrêt Usines à tubes du 10 décembre 1957 et que, même à cette occasion, elle a précisé qu' un seul des vices constatés dans cet arrêt était susceptible d' entraîner l' inexistence de l' acte, à savoir l' absence de toute motivation ?

    80. Application de ces critères à l' arrêt PVC. Peut-on parler ici d' une situation exceptionnelle, d' un acte qui présente des vices à ce point graves et évidents qu' ils sautent aux yeux à la lecture de l' acte et lui font perdre toute apparence de validité juridique et, partant, le bénéfice de la présomption de légalité ? Tel n' est manifestement pas le cas, selon nous. Il ressort de l' arrêt PVC qu' à l' origine, les parties requérantes en première instance étaient parties de l' idée qu' une présomption de légalité était attachée à l' acte. Si elles ont exposé un certain nombre de moyens d' annulation dans leurs requêtes, à aucun endroit elles n' ont invoqué le moyen de l' inexistence(184). Ce n' est qu' au cours de l' audience et sur la base des pièces produites par la Commission que le moyen de l' inexistence de l' acte a été invoqué(185).

    Ainsi qu' il ressort de la structure de l' arrêt qu' il a rendu, le Tribunal a lui aussi manifestement pris pour point de départ à l' origine que la décision était tout au plus annulable. La mesure d' organisation de la procédure et la mesure d' instruction qu' il a ordonnées visaient précisément à déterminer si les moyens pris, par certaines requérantes en première instance, de la violation de formes substantielles et de l' incompétence étaient fondés. Ce n' est qu' après avoir décidé au point 65 de l' arrêt que la violation constatée des formes substantielles (du fait des modifications apportées a posteriori) et l' incompétence de l' auteur de l' acte "devraient entraîner l' annulation de la décision attaquée" que le Tribunal entame son analyse sur l' inexistence de la décision. Dans cette analyse, le Tribunal reconnaît une importance décisive à la violation de l' article 12 du règlement intérieur, violation qui n' a été relevée qu' au cours de l' audience. D' une manière plus générale, nous pouvons difficilement admettre que, lorsque nonante six considérants sont nécessaires pour constater que certains vices "sont à ce point graves et évidents" qu' ils rendent inexistant l' acte juridique qu' ils entachent, de telles irrégularités étaient clairement visibles à la lecture pour les destinataires de cet acte. Tout cela constitue déjà en soi une indication claire qu' il ne sauraít être question d' une inexistence "prima facie" en l' espèce.

    81. Le raisonnement que le Tribunal a tenu en ce qui concerne l' impossibilité de déterminer la date, le contenu et l' auteur de la décision fait apparaître également, selon nous, qu' il a fait une application incorrecte de la théorie de l' inexistence telle qu' elle apparaît dans la jurisprudence communautaire. Bien que ce soit à bon droit que le Tribunal ait retenu dans son appréciation ces trois éléments - qui sont en effet des éléments constitutifs d' un acte administratif -, nous ne saurions, eu égard aux autres parties des présentes conclusions, souscrire aux constatations juridiques auxquelles le Tribunal a procédé ensuite.

    En ce qui concerne la date de la décision, rien n' autorise, selon nous, à mettre en doute qu' il s' agit du 21 décembre 1988. Il ressort en effet sans ambiguïté aucune des constatations de fait opérées par le Tribunal que c' est ce jour-là, au cours de sa neuf cent quarante cinquième séance, que le collège des commissaires a adopté la décision de principe que les quatorze entreprises impliquées dans l' affaire PVC avaient enfreint l' article 85 du traité CEE, qu' il a défini le montant des amendes à infliger à ces entreprises et approuvé le principe de l' injonction de mettre fin à l' infraction qu' il entendait leur adresser et qu' il a adopté la décision en langues allemande, anglaise et française(186). Il est donc établi que la date de l' acte peut être déterminée avec précision, du moins en ce qui concerne ces versions linguistiques faisant foi. Nous estimons cependant que la datation ne pose pas davantage de problème pour le texte italien et le texte néerlandais : comme nous l' avons déclaré plus haut (au point 43), nul ne peut contester que le collège des commissaires s' est limité à donner au commissaire chargé des questions de concurrence le mandat d' adopter le texte de la décision dans les autres langues officielles des Communautés conformément au texte déjà approuvé pour les trois langues précitées. L' expression de volonté inscrite dans ces versions linguistiques de la décision remonte à la même délibération et à la même décision du 21 décembre 1988. La date à laquelle la traduction et la coordination linguistique ont été terminées ne joue aucun rôle à cet égard. Rappelons d' ailleurs que, contrairement à ce qu' admet le Tribunal, l' incorporation d' une décision dans l' ordre juridique communautaire et l' acquisition par elle de son caractère exécutoire n' interviennent que par la notification de cette décision conformément à l' article 191 deuxième alinéa du traité CEE (cf. le point 63 plus haut) sans, bien entendu, que cela ait la moindre répercussion sur la date de la décision elle-même.

    Le Tribunal ne nous convainc pas davantage lorsqu' il affirme qu' il est placé dans l' impossibilité d' apprécier le contenu "exact et certain" de la décision : s' il est vrai que la Commission n' a pas appliqué la procédure interne d' authentification prévue par l' article 12 du règlement intérieur, la volonté de l' organe de décision ressort sans ambiguïté du procès-verbal de la réunion du 21 décembre 1988 - lequel a en tout cas été authentifié conformément à l' article 10 du règlement intérieur - lu en combinaison avec le projet de décision en langues allemande, anglaise et française que la Commission a déposé et certifié conforme. Ainsi qu' il ressort de la première partie des présentes conclusions, cette expression de volonté n' est à aucun égard déformée par les modifications qui ont été apportées ultérieurement au texte de la décision. En effet, ces adaptations, qui résultaient soit d' une coordination linguistique des textes (modifications dans le texte allemand) soit, eu égard au contexte dans lequel elles ont été effectuées (insertion d' un nouvel alinéa quatre au point 27 de la décision) ou à la décision considérée dans son ensemble (omission de la mention "(EMC-Group)" derrière SAV à l' article 1er du dispositif), qui avaient pour fonction de rendre le texte plus clair, étaient à ce point limitées qu' elles ne pouvaient pas avoir d' influence sur la possibilité pour les parties défenderesses de comprendre la critique que la Commission avait formulée à l' égard de leur comportement dans la perspective de l' article 85 du traité CEE.

    En résumé, nous ne voyons donc aucunement pourquoi, comme l' affirme le Tribunal, les deux "vices" qui affectent la décision lui auraient fait perdre le bénéfice de la présomption de légalité dont elle jouit prima facie.

    82. Ceci nous amène à un dernier point qui concerne l' incompétence dans le temps du commissaire Sutherland à notifier la décision aux parties défenderesses, incompétence que nous avons déjà évoquée plus haut (au point 44). Selon le Tribunal, combiné aux deux "vices" que nous venons d' examiner au point précédent, ce grief pris de l' incompétence du commissaire entraîne l' impossibilité d' identifier avec certitude l' auteur de la version définitive de la décision.

    Cette irrégularité est-elle de nature à affecter en soi - c' est-à-dire après que nous ayons écarté les deux autres "vices" - la décision dans son existence ou du moins dans sa validité ? Nous estimons que non, et cela pour les raisons suivantes. La jurisprudence de la Cour comporte, selon nous, un précédent en ce qui concerne la question de savoir si le fait qu' une décision en matière de concurrence adressée à des entreprises n' a pas été signée par le commissaire compétent est constitutif d' une violation d' une forme substantielle. Il s' agit de l' arrêt Dow Chemical Ibérica/Commission dans lequel les entreprises requérantes avaient notamment pris moyen de la violation d' une forme substantielle du fait que la décision qui leur avait été adressée et qui ordonnait une vérification sur la base de l' article 14 du règlement n 17 n' avait pas été signée par l' organe de décision. La Cour a rejeté ce moyen en disant pour droit que

    "aucune disposition ne prévoit que l' exemplaire de la décision notifiée à l' entreprise doit être signé par le membre habilité. Par ailleurs, il est constant que les décisions litigieuses étaient dûment authentifiées par la signature du secrétaire général de la Commission"(187).

    Ce n' est pas le moment de rappeler les différences entre une décision ordonnant des vérifications et une décision finale telle que celle de l' espèce. Contentons-nous d' observer que, pas davantage que pour les décisions ordonnant des vérifications, aucune disposition communautaire n' exige que le texte d' une décision portant constatation d' une violation de l' article 85 du traité CEE tel qu' il est notifié aux destinataires soit signé par le membre compétent de la Commission. Il apparaît en outre des pièces du dossier transmises à la Cour que le texte de la décision notifié aux parties défenderesses porte le cachet de la Commission et a été authentifié par le secrétaire général de la Commission(188).

    Il demeure évidemment que le texte de la décision qui a été notifié aux parties portait également la mention "pour la Commission, Peter Sutherland" (sans la signature de celui-ci) et était assorti d' une lettre d' accompagnement de M. Sutherland datée du 5 janvier 1988 - c' est-à-dire le dernier jour de son mandat - laquelle lettre d' accompagnement était signée par lui. Nous estimons néanmoins que ces éléments ne peuvent pas constituer un motif suffisant d' annulation ni, a fortiori, d' inexistence de la décision. En premier lieu, pour ce qui concerne la lettre du 5 janvier 1989 signée par M. Sutherland, il est clair - comme le Tribunal l' a fait observer lui-même(189) - qu' une telle lettre ne fait pas partie d' une décision portant constatation d' une violation de l' article 85 du traité CEE. Le fait que cette lettre (qui en soi avait encore été signée à temps) émanait de M. Sutherland ne peut donc avoir aucune influence sur la validité de la décision qui a été transmise aux parties en même temps que cette lettre. De même, le fait que la lettre date du 5 janvier 1989, alors que la notification aux destinataires n' a eu lieu qu' au cours du mois de février de cette année, ne saurait pas davantage, selon nous, affecter la légalité de la décision : en effet, ce qui est déterminant pour trancher la question de savoir si une notification a été effectuée conformément à l' article 191 deuxième alinéa du traité CEE, ce n' est pas la date ou la signature de la lettre d' accompagnement mais bien le fait que le texte de la décision a été communiqué à ses destinataires et que ceux-ci ont été mis en mesure d' en prendre connaissance, c' est-à-dire qu' ils ont eu effectivement accès à la décision (cf. le point 62 plus haut). Pas une seule des parties à la présente affaire ne conteste que tel a bien été le cas en l' espèce.

    Pour ce qui est de la mention "pour la Commission, Peter Sutherland, membre de la Commission", nous ne pouvons pas davantage supposer qu' il s' agirait-là d' une irrégularité de nature à affecter la légalité de la décision. Non seulement cette mention n' est exigée par aucune disposition du droit communautaire, mais il est de surcroît clair, que dans la mesure où l' on peut admettre que cette mention fait partie de la décision elle-même, elle a été approuvée par le collège des commissaires le 21 décembre 1988 : les versions allemande, anglaise et française du projet de décision approuvé par le collège contiennent toutes cette mention, sans doute parce qu' il semblait acquis que la notification pourrait encore avoir lieu avant l' expiration du mandat de M. Sutherland. Il est cependant essentiel, à notre avis, que cette mention n' a, à aucun égard pratique, pu inspirer aux entreprises destinataires le moindre doute sur la question de savoir si la décision émanait bien d' une autorité compétente. En effet, la décision se présentait en tous points comme une décision de la Commission adoptée à la date du 21 décembre 1988, elle était clairement destinée à produire des effets juridiques, elle avait été adoptée - ce que toutes les entreprises destinataires savaient - au terme d' une longue procédure administrative et après délibération en collège des commissaires et indiquait par là clairement qu' elle constituait l' expression définitive de la volonté de la Commission relativement à la violation alléguée de l' article 85 du traité CEE(190).

    Conclusion

    83. Eu égard aux observations qui précèdent, nous invitons la Cour à statuer de la manière suivante :

    "1. L' arrêt que le Tribunal de première instance a rendu le 27 février 1992 dans les affaires jointes T-79/89, T-84/89, T-85/89, T-86/89, T-89/89, T-91/89, T-92/89, T-94/89, T-96/89, T-98/89,

    T-102/89 et T-104/89, BASF AG e.a./Commission est annulé.

    2. L' affaire est renvoyée devant le Tribunal afin qu' il statue sur les moyens invoqués par les parties requérantes en première instance qui n' ont pas été traités dans l' arrêt précité"

    (*) Langue originale: le néerlandais.

    (1) - Arrêts dans les affaires jointes T-79/89, T-84/89, T-85/89, T-86/89, T-89/89, T-91/89, T-92/89, T-94/89, T-96/89, T-98/89, T-102/89 et T-104/89, Rec. 1992, p. II-315.

    (2) - JO 1989, L 74, p. 1.

    (3) - Règlement n 17/62 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d' application des articles 85 et 86 du traité, JO 1962, n 13, p. 204.

    (4) - A savoir Atochem SA, BASF AG, NV DSM et DSM Kunststoffen BV, Enichem SpA, Hoechst AG, Huels AG, Imperial Chemical Industries PLC, NV Limburgse Vinyl Maatschappij, Montedison SpA, Norsk Hydro AS, Société artésienne de vinyle SA, Solvay et Cie, Shell International Chemical Company Ltd et Wacker Chemie GmbH.

    (5) - Et cela conformément à l' article 19 paragraphe 1 du règlement n 17 et conformément au règlement n 99/63/CEE de la Commission, du 25 juillet 1963, relatif aux auditions prévues à l' article 19 paragraphes 1 et 2 du règlement n 17 du Conseil, JO 1963, n 127, p. 2268.

    (6) - A l' exception de Solvay et Cie.

    (7) - Ce transfert a été effectué conformément à l' article 3 paragraphe 1 et à l' article 14 de la décision du Conseil, du 24 octobre 1988, instituant un Tribunal de première instance des Communautés européennes (décision 88/591/CECA, CEE, EURATOM), JO 1988, n L 319, p. 1 et JO 1989, n L 241, p. 4 (rectificatifs).

    (8) - Cf. le point 9 de l' arrêt PVC.

    (9) - Arrêt PVC, points 32-50. L' expression est utilisée au point 49 de l' arrêt PVC.

    (10) - Arrêt PVC, points 51-65.

    (11) - Règlement de procédure de la Cour de justice des Communautés européennes du 19 juin 1991, JO 1991, n L 176, p. 7.

    (12) - Décision sur les délais de distance adoptée le 19 juin 1991 par la Cour sur la base de l' article 81 paragraphe 2 du règlement de procédure, figurant en annexe II au règlement de procédure publié au JO 1991, n L 176, p. 32.

    (13) - Cf. notamment l' arrêt du 12 juillet 1984, affaire 209/83, Valsabbia/Commission, Rec. 1984, p. 3089, point 14 ; arrêt du 26 novembre 1985, affaire 42/85, Cockerill-Sambre/Commission, Rec. 1985, p. 3749, point 10 ; arrêt du 15 janvier 1987, affaire 152/85, Misset/Conseil, Rec. 1987, p. 223, point 11 ; arrêt du 4 février 1987, affaire 276/85, Cladakis/Commission, Rec. 1987, p. 495, point 11 ; décision du 5 février 1992, affaire C-59/91, France/Commission, Rec. 1992, p. I-525, point 8.

    (14) - Arrêts du 15 décembre 1966, rendus respectivement dans l' affaire 28/65, Rec. 1966, p. 689, à la p. 711, et dans l' affaire 31/65, Rec. 1966, p. 741, à la p. 751. Dans ces affaires, la Cour a dit pour droit qu' eu égard au fait qu' à la date à laquelle le délai de recours a commencé à courir et pendant toute la durée de ce délai, le requérant exerçait effectivement ses fonctions à Bruxelles, sa résidence habituelle était située en Belgique.

    (15) - Arrêt Cockerill-Sambre/Commission, déjà cité à la note 13, point 11. Voir aussi notamment, de manière plus implicite, arrêt du 5 avril 1979, affaires jointes 220/78 et 221/78, Ala et Alfer/Commission, Rec. 1979, p. 1693, ainsi que l' arrêt Valsabbia/Commission que nous venons de citer à la note 13. Dans un arrêt qu' elle a rendu le 10 décembre 1957, la Cour a déjà dit pour droit que dès l' instant où une lettre de la Haute autorité est remise à un préposé de l' entreprise sur le lieu où celle-ci a son siège social, cette lettre est entrée dans la sphère interne de l' entreprise : arrêt rendu par la Cour dans l' affaire 8/56, ALMA/Haute autorité, Rec. 1957, p. 179, à la p. 183.

    (16) - Cf. la définition de la notion de siège réel que l' avocat général Darmon a donnée au point 5 des conclusions qu' il a présentées dans l' affaire 81/87, Daily Mail, Rec. 1988, p. 5501.

    (17) - Les articles 77 du traité CECA, 216 du traité CEE et 189 du traité EURATOM imposent aux gouvernements des Etats membres de fixer d' un commun accord le siège des institutions de la Communauté. La Cour a constaté à plusieurs reprises le non respect de cette obligation : arrêt du 10 février 1983, affaire 230/81, grand-duché de Luxembourg/Parlement, Rec. 1983, p. 255, point 36 ; arrêt du 22 septembre 1988, affaires jointes 358/85 et 51/86, France/Parlement, Rec. 1988, p. 4821, point 29 ; arrêt du 28 novembre 1991, affaires jointes C-213/88 et C-39/89, Grand-duché de Luxembourg/Parlement, Rec. 1991, p. I-5643, point 52.

    (18) - JO 1967, n L 152, p. 18.

    (19) - La Cour a elle aussi, ne serait-ce que de manière incidente, signalé cet élément : cf. le point 3 de l' arrêt déjà cité en note 17 que la Cour a rendu le 10 février 1983 dans l' affaire grand-duché de Luxembourg/Parlement européen et dans lequel elle indique que les Conseils et les Commissions prévus par ces traités (à savoir le traité CECA, le traité CEE et le traité EURATOM) se sont établis à Bruxelles (...) .

    (20) - Cf. l' article 37 du traité de fusion sur la base duquel les Etats membres ont adopté la décision du 8 avril 1965. Cf. à ce propos notamment M. Schweitzer Article 216 , dans Grabitz Kommentar zum EWG-Vertrag, Muenchen, Beck, p. 1, n 3 ; cf. également, pour l' historique des sièges provisoires des institutions depuis la déclaration du 7 janvier 1958 des ministres des Affaires étrangères des six Etats membres originels, G.-E. zur Hausen, Article 216 , dans Groeben-Thiesing-Ehlermann, Kommentar zum EWG-Vertrag, IV, Baden-Baden, Nomos, 1991, pp. 5462-5464 ; J.-L. Dewost, Article 216 , dans Le droit de la Communauté économique européen (commentaire Mégret), XV, Bruxelles, éditions de l' Université Libre de Bruxelles, 1987, pp. 267 ss.

    (21) - Traités instituant un Conseil unique et une Commission unique des Communautés européennes, JO 1967, n L 152, p. 2.

    (22) - JO 1992, C 341, p. 1. Le texte de la décision est également reproduit dans Bull. CE, 12-92, p. 25.

    (23) - Cf. R. Joliet et W. Vogel, Le Tribunal de première instance des Communautés européennes , Revue du Marché commun, 1989, (423), p. 430.

    (24) - Arrêt du 8 avril 1992, affaire C-346/90 P, F./Commission, Rec. 1992, p. I-2691, point 7 ; arrêt du 1er octobre 1991, affaire C-283/90 P, Vidrányi/Commission, Rec. 1991, p. I-4339, points 12-13 ; arrêt du 28 novembre 1991, affaire C-132/90 P, Schwedler/Parlement, Rec. 1991, p. I-5745, point 10 ; voir déjà également l' ordonnance du 20 mars 1991, affaire C-115/90 P, Turner/Commission, Rec. 1991, p. I-1423, en particulier le point 13. En d' autres termes, un pourvoi dont les moyens se bornent à contester l' appréciation du Tribunal qui se limite aux faits et qui n' implique en soi l' application d' aucune règle juridique, est irrecevable : cf. l' arrêt précité Schwedler/Parlement, point 11, qui est très clair sur cette question. Pour d' autres confirmations de ce point de vue, cf. arrêt du 17 janvier 1992, affaire C-107/90 P, Hochbaum/Commission, Rec. 1992, p. I-157, points 9 et 16 ; arrêt du 2 avril 1992, affaire C-378/90 P, Pitrone/Commission, Rec. 1992, p. I-2375, points 12-13 ; arrêt F./Commission précité, en particulier les points 10, 14 et 18.

    (25) - C' est la raison pour laquelle nous ne pouvons aborder les modifications dans certaines versions linguistiques de la décision qui ont été dénoncées dans leur mémoire en réponse par un certain nombre de parties défenderesses (à savoir BASF, Hoechst et la Société Artésienne de Vinyle), modifications qui n' ont pas été constatées par le Tribunal dans l' arrêt PVC.

    (26) - La formulation large de l' article 51 du statut CEE de la Cour en ce qui concerne le moyen de pourvoi tiré de la violation du droit communautaire ne peut que confirmer cela. Cf. à ce propos également H. Schermers et D. Waelbroeck, Judicial Protection in the European Communities, Deventer, Kluwer Law & Taxation, 1992, p. 515, paragraphe 893 : By its wide formulation, it prevents all doubt about whether all aspects of Community law can be controlled by the Court of Justice . ( Par la formulation large qui lui est donnée, il exclut le moindre doute quant à la question de savoir si tous les aspects du droit communautaire peuvent faire l' objet d' un contrôle par la Cour de justice ).

    (27) - Arrêt Vidrányi/Commission, déjà cité à la note 24, cf. points 19 et 29.

    (28) - Voir déjà à cet égard les conclusions que nous avons présentées dans l' affaire précitée Costacurta/Commission, Rec. 1991, p. I-5459, point 3, conclusions dans lesquelles nous nous sommes référés à l' expérience que les plus hautes instances judiciaires des Etats membres ont acquise sur la question.

    (29) - Rec. 1988, p. 905.

    (30) - Arrêt PVC, point 40.

    (31) - JO 1986, L 95, p. 45.

    (32) - Arrêt Royaume-Uni contre Conseil, points 35-37.

    (33) - Arrêt Royaume-Uni contre Conseil, points 38-39 et point 1 du dispositif.

    (34) - Cf. notamment le point 35 de l' arrêt Royaume-Uni contre Conseil.

    (35) - Cf. le point 33 de l' arrêt Royaume-Uni contre Conseil.

    (36) - Les modifications mentionnées sous le premier tiret du point 41 de l' arrêt concerne deux ajouts mineurs qui ont été faits au point 7 de la version allemande de la décision qui a été notifiée et publiée, ajouts par rapport à la version du projet de décision (daté du 14 décembre 1988) : (i) addition de la note 2 dont le contenu est le suivant : De toute façon, tant Huels que Hoechst sont identifiées par ICI et BASF comme participants aux réunions et (ii) addition, dans le corps du texte, de la phrase Hoechst, la seule autre possibilité, n' était qu' un petit producteur de PVC . La modification mentionnée sous le deuxième tiret est encore plus limitée : il s' agit du remplacement de la formule Die Unternehmen streiten offensichtlich nicht ab ( les entreprises ne contestent visiblement pas ) par Die Unternehmen bestreiten zwar nicht ( les entreprises ne nient certes pas ).

    (37) - Il s' agit d' une modification apportée au point 41 du premier alinéa de la décision et qui consiste dans l' omission d' un mot, à savoir Rationalisierungsprozess ( processus de rationnalisation ) dans le texte notifié et publié de la version allemande de la décision dans le sens suivant (nous citons le texte du projet de décision) : Die europaeische Petrochemie-Industrie einschliesslich des PVC-Sektors hat in dem von dieser Entscheidung erfassten Zeitraum einen grundlegenden Umstrukturierungs - und Rationalisierungsprozess durchlaufen, der von der Kommission unterstuetzt worden ist ( Au cours de la période couverte par la présente décision, l' industrie pétrochimique de l' Europe occidentale - y compris le secteur du PVC - a subi une profonde restructuration et rationnalisation, processus qui a reçu l' appui de la Commission ).

    (38) - L' application du critère que la Cour a développé sur ce point dans l' arrêt du 7 mai 1991, affaire C-69/89, Nakajima/Conseil, Rec. 1991, p. I-2069, aboutit également à ce résultat : cf. les points 48, 53 et 54 plus bas.

    (39) - Arrêt Royaume-Uni/Conseil, point 6.

    (40) - Sur l' influence de cet aspect sur la question de savoir si les dispositions du règlement intérieur de la Commission peuvent être invoquées par des particuliers, cf. le point 55 plus bas.

    (41) - Il s' agit d' ailleurs d' une jurisprudence constante : cf. déjà l' arrêt du 11 juillet 1968, affaire 6/68, Zuckerfabrik/Conseil, Rec. 1968, p. 569, à la p. 579.

    (42) - Cf. arrêt PVC, points 47 (relatif à l' addition d' un nouvel alinéa au point 27 de la décision), 49 et 50 (relatifs à la modification apportée au dispositif de la décision), 61 (relatif à la compétence dans le temps du commissaire chargé des questions de concurrence), 72 (relatif à la signification en droit communautaire des procédures d' authentification prévues par le règlement intérieur), 96 (relatif à la qualification de la décision comme étant une décision au sens de l' article 189 du traité CEE) et 98 (relatif à l' apparence des actes notifiés et publiés).

    (43) - Cf. en dernier lieu l' arrêt du 4 juin 1992, affaire C-181/90, Consorgan/Commission, Rec. 1992, p. I-3557, point 14 ; cf. auparavant notamment arrêt du 8 novembre 1983, affaires jointes 96/82 à 102/82, 104/82, 105/82 et 110/82, IAZ/Commission, Rec. 1983, p. 3369, point 37 ; arrêt du 28 mars 1984, affaire 8/83, Bertoli/Commission, Rec. 1984, p. 1649, points 12-13 ; arrêt du 7 avril 1987, affaire 32/86, Sisma/Commission, Rec. 1987, p. 1645, point 8 ; arrêt du 7 avril 1992, affaire C-358/90, Compagnia Italiana Alcool/Commission, Rec. 1992, p. I-2457, point 40. Ce principe a été formulé très tôt dans l' arrêt que la Cour a rendu le 1er décembre 1965 dans l' affaire 16/65, Schwarze, Rec. 1965, p. 1081, en particulier p. 1096.

    (44) - Cf. déjà arrêt du 30 septembre 1982, affaire 108/81, Amylum/Conseil, Rec. 1982, p. 3107, point 19 ; arrêt du 25 octobre 1984, affaire 185/83, Rijksuniversiteit Groningen, Rec. 1984, p. 3623, point 38. Cf. plus récemment arrêt du 14 février 1990, affaire C-350/88, Delacre/Commission, Rec. 1990, p. I-395, point 15 ; arrêt du 1er avril 1993, affaires jointes C-260/91 et C-261/91, Diversinte et Iberlacta, non encore publié au Rec., point 11.

    (45) - Arrêt Consorgan/Commission, point 14 ; arrêt Sisma/Commission, point 8. Cf. déjà arrêt du 11 janvier 1973, affaire 13/72, Royaume des Pays-Bas/Commission, Rec. 1974, p. 27, point 11 et arrêt du 14 janvier 1981, affaire 819/79, République fédérale d' Allemagne/Commission, Rec. 1981, p. 21, point 19. En ce qui concerne la jurisprudence de la Cour relative au principe selon lequel l' étendue précise de l' obligation de motivation doit être appréciée en fonction de la nature de l' acte en question, cf. G. Le Tallec et C.D. Ehlermann, La motivation des actes des Communautés européennes , Revue du Marché commun, 1967, pp. 179 ss. ; cf. également C. Hen, La motivation des actes des institutions communautaires , Cahiers de droit européen, 1977, (49), pp. 73-78.

    (46) - Cf. l' arrêt Schwarze, déjà cité à la note 43, p. 1096 ; cf. également l' arrêt Delacre, point 16.

    (47) - Cf. sur ce dernier point l' arrêt du 13 mars 1985, affaires jointes 296/82 et 318/82, Royaume des Pays-Bas et Leeuwarder Papierwarenfabriek/Commission, Rec. 1985, p. 809, point 19 ; arrêt du 20 mars 1985, affaire 41/83, Italie/Commission, Rec. 1985, p. 873, point 46.

    (48) - Cf. notamment l' arrêt IAZ/Commission, déjà cité à la note 43, point 37 ; arrêt du 9 novembre 1983, affaire 322/81, Michelin/Commission, Rec. 1983, p. 3461, point 14 ; arrêt du 17 janvier 1984, affaires jointes 43/82 et 63/82, VBVB et VBBB/Commission, Rec. 1984, p. 19, point 22 ; arrêt du 10 novembre 1985, affaires jointes 240/82 à 242/82, 261/82, 262/82, 268/82 et 269/82, Stichting Sigarettenindustrie/Commission, Rec. 1985, p. 3831, point 88 ; arrêt du 17 novembre 1987, affaires jointes 142/84 et 156/84, BAT et Reynolds/Commission, Rec. 1987, p. 4487, point 72 ; arrêt du 11 juillet 1989, affaire 246/86, Belasco/Commission, Rec. 1989, p. 2117, point 55. Le Tribunal a expressément fait sienne cette jurisprudence ; cf. notamment arrêt du 24 janvier 1992, affaire T-44/90, La Cinq/Commission, Rec. 1992, p. II-1, points 41-42 ; les arrêts polypropylène prononcés le 10 mars 1993, et notamment l' arrêt rendu dans l' affaire T-10/89, Hoechst/Commission, Rec. 1992, p. II-629, point 312 et dans l' affaire T-11/89, Shell/Commission, Rec. 1992, p. II-757, point 319 ; arrêt du 9 juillet 1992, affaire T-66/89, Publishers Association/Commission, Rec. 1992, p. II-1995, point 75.

    (49) - Arrêt du 29 octobre 1980, affaires jointes 209/78 à 215/78 et 218/78, Van Landeweyck/Commission, Rec. 1980, p. 3125, point 66 ; arrêt Michelin/Commission, point 14 ; arrêt VBVB et VBBB/Commission, point 22 ; arrêt du 21 février 1984, affaire 86/82, Hasselblad/Commission, Rec. 1984, p. 883, point 17 ; arrêt Stichting Sigarettenindustrie, point 88 ; arrêt BAT et Reynolds/Commission, point 72 ; arrêt Belasco/Commission, point 55. Déjà dans l' arrêt Grundig-Consten la Cour avait dit pour droit que la Commission n' avait pas violé les droits de la défense des parties dès lors que dans une telle procédure non juridictionnelle, l' administration n' est pas tenue de motiver le rejet des moyens des parties : arrêt du 13 juillet 1966, affaires jointes 56/64 et 58/64, Rec. 1966, p. 429, à la p. 492.

    (50) - Cf. le point 22 de l' arrêt VBVB et VBBB/Commission et les points 26-27 de l' arrêt du 11 juillet 1985, affaire 42/84, Remia/Commission, Rec. 1985, p. 2545, qui sont particulièrement explicites à cet égard.

    (51) - Arrêt du 15 juillet 1970, affaire 41/69, ACF Chemiefarma/Commission, Rec. 1970, p. 661, point 78 (mis en italique par nous). Dans l' arrêt Cimenteries, la Cour a appliqué le critère de la clarté suffisante de la décision : arrêt du 15 mars 1967, affaires jointes 8/66 à 11/66, Cimenteries/Commission, Rec. 1967, p. 91, à la p. 117.

    (52) - Arrêt du 14 juillet 1972, affaire 55/69, Cassella/Commission, Rec. 1972, p. 887, point 22 (mis en italique par nous).

    (53) - Arrêt ACF Chemiefarma/Commission, point 80.

    (54) - Arrêt du 16 décembre 1975, affaires jointes 40/73 à 48/73, 50/73, 54/73 à 56/73, 111/73, 113/73 et 114/73, Suiker Unie/Commission, Rec. 1975, p. 1663, point 118.

    (55) - Arrêt du 26 novembre 1975, affaire 73/74, Papiers Peints/Commission, Rec. 1975, p. 1491, en particulier les points 31 et 34 ; arrêt BAT et Reynolds/Commission, point 71 ; arrêt Delacre/Commission, point 15.

    (56) - A cet égard il a été observé à bon escient que l' exigence de motivation est un corollaire indispensable du droit d' agir en justice en ce sens qu' il permet d' exercer ce droit dans les meilleures conditions possibles : cf. F. Schockweiler, La motivation des décisions individuelles en droit communautaire et en droit national , Cah. Dr. Eur., 1989, (3), p. 33.

    (57) - Cf. arrêt Grundig-Consten, Rec. 1966, p. 511.

    (58) - Cf. les références à ces arrêts qui figurent respectivement à la note 54 et à la note 49.

    (59) - Arrêt Suiker Unie, points 227-232.

    (60) - Arrêt Hasselblad/Commission, point 40.

    (61) - C' est la raison pour laquelle nous estimons également que c' est tout à fait à mauvais escient que dans ses observations écrites, Huels AG a établi un parallèle avec l' article 66, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour. Cette disposition confère à la Cour le pouvoir de faire rectifier les erreurs de plume ou de calcul ou des inexactitudes évidentes dans un délai de deux semaines à compter du prononcé de l' arrêt. Ce pouvoir de rectification concerne cependant la période après que l' arrêt a été prononcé en audience publique et qu' une copie certifiée conforme de celui-ci a été signifiée à chacune des parties (cf. article 64 du règlement de procédure) ; dans le cas qui nous occupe, il s' agit au contraire de corrections qui ont été apportées au texte d' une décision avant que celle-ci ait été notifiée aux parties.

    (62) - Mis en italique par nous.

    (63) - Le critère qui permet de distinguer une décision d' un règlement est précisément la portée générale ou non de l' acte en cause, c' est-à-dire le point de savoir s' il s' adresse à une catégorie de destinataires restreinte ou non : cf. déjà l' arrêt du 14 décembre 1962, affaires jointes 16/62 et 17/62, Confédération nationale/Conseil, Rec. 1962, p. 903, à la page 918.

    (64) - JO 1958, n 17, p. 385, modifié en dernier lieu par le point XVII de l' annexe I à l' Acte relatif aux conditions d' adhésion du Royaume d' Espagne et de la République portugaise et aux adaptations des traités (JO 1985, n L 302, p. 242). Aux termes de cette disposition, (l)es textes adressés par les institutions (...) à une personne relevant de la juridiction d' un Etat membre sont rédigés dans la langue de cet Etat .

    (65) - Arrêt Suiker Unie, point 111 (mis en italique par nous).

    (66) - Le Tribunal se réfère à ce document d' une manière pas très heureuse au point 26 troisième tiret de l' arrêt PVC : comme nous l' avons dit, la référence de ce document est SEC (88) 2033 et non pas, comme le Tribunal le dit SEC (88) OJ 945, point 15 . Bien que, comme l' indique le Tribunal, le titre de ce document est Note à l' attention de MM. les membres de la Commission , le document indique également clairement - mais cela n' a pas été constaté par le Tribunal - qu' il s' agit d' un Compte rendu de la réunion spéciale des Chefs de Cabinet du lundi 19 décembre 1988 dans lequel il est fait référence au document C (88) 2497 (c' est-à-dire au projet de décision rédigé en allemand, en anglais et en français).

    (67) - Arrêt PVC, point 37. Voir également la note suivante sur ce point.

    (68) - C' est ce qu' on peut lire dans les versions allemande, française, italienne et néerlandaise de l' arrêt PVC. Il n' y a que dans le texte anglais de cet arrêt qu' il est indiqué aux points 37 et 46 que la Commission took note of the results of the examination . Nous partons dès lors du principe que ce sont les quatre premières versions linguistiques qui reproduisent le point de vue du Tribunal de la manière la plus fidèle.

    (69) - Cf. la note 66 plus haut.

    (70) - Arrêt PVC, point 47.

    (71) - Cf. arrêt PVC, point 44.

    (72) - Arrêt VBVB et VBBB/Commission déjà cité à la note 48, point 25 (mis en italique par nous). Plus récemment, la Cour a encore confirmé cette jurisprudence dans l' arrêt qu' elle a rendu le 3 juillet 1991 dans l' affaire C-62/86, Akzo/Commission, Rec. 1991, p. I-3359, point 16. Le Tribunal pose lui aussi cette jurisprudence en prémisse : cf. notamment arrêt du 17 décembre 1991, affaire T-7/89, Hercules Chemicals/Commission, Rec. 1991, p. II-1711, point 52 et arrêt du 10 mars 1992, affaire T-9/89, Huels/Commission, Rec. 1992, p. II-499, point 47. Dans ces deux arrêts, le Tribunal précise que dans la mesure où la Commission a élaboré des règles d' accès aux dossiers qui dépassent les exigences liées aux droits de la défense et qu' elle a fait connaître dans un de ses rapports sur la politique de la concurrence, elle ne peut pas se départir des règles qu' elle s' est ainsi imposées à elle-même : arrêt Hercules Chemicals/Commission, point 53 ; arrêt Huels/Commission, point 48 ; cf. également à ce sujet l' arrêt que le Tribunal a rendu le 18 décembre 1992 dans les affaires jointes T-11/92, T-12/92 et T-15/92, Cimenteries CBR/Commission, non encore publié au recueil, points 40-41 et, très récemment, l' arrêt que le Tribunal a rendu le 1er avril 1993 dans l' affaire T-65/89, BPB Industries et British Gypsum/Commission , non encore publié au recueil, point 29.

    (73) - Arrêt PVC, point 49.

    (74) - Arrêt PVC, point 50.

    (75) - Arrêt du 14 juillet 1972, affaire 48/69, ICI/Commission, Rec. 1972, p. 609, points 132-133 ; arrêt du 14 juillet 1972, affaire 52/69, Geigy/Commission, Rec. 1972, p. 787, point 44 ; voir également l' arrêt du 21 février 1973, affaire 6/72, Europemballage et Continental Can/Commission, Rec. 1973, p. 215, point 15. Dans la lignée de cette jurisprudence, la Cour a dit pour droit dans l' arrêt AEG/Commission que dans le cas d' une filiale à 100 %, il est superflu d' examiner le point de savoir si une société mère a effectivement fait usage de son pouvoir de contrôle : arrêt du 25 octobre 1983, affaire 107/82, Rec. 1983, p. 3151, points 49 et 50. Voir également à ce propos l' arrêt très récent déjà cité à la note 72 que le Tribunal a rendu le 1er avril 1993 dans l' affaire BPB Industries et British Gypsum/Commission, point 149.

    (76) - Le Tribunal a uniquement constaté que cette modification a été apportée à l' article premier de la décision. Au point 43 de sa demande de pourvoi, la Commission indique que la mention (EMC-Group) apparaissait également à l' article 5 du projet de décision. S' agissant d' une constatation de fait, nous sommes tenu de laisser cet élément hors de considération. Pour les mêmes raisons, nous ne pouvons pas davantage examiner l' argument de la Commission (qui figure à la fin du point 43 de la demande de pourvoi) selon lequel la même mention apparaissait dans la notification adressée à SAV.

    (77) - Cf. notamment les points 2, 7, 8, 9, 26 (note 1), 43, 48 et 54 de la décision. Aux points 9, 26 (note 1), 43 et 48, il est question de la qualité de SAV en tant que société mère de LVM, une entreprise commune que DSM et SAV avaient constituée à la mi-1983 et dans laquelle elles ont mis en commun leurs activités PVC. Une telle référence aux liens d' affiliation en ligne descendante de SAV n' a cependant rien à voir avec la référence en ligne ascendante au EMC-Group qui nous occupe ici. De surcroît, la décision indique avec précision en son point 43 que SAV ne reste responsable de sa participation à l' entente PVC que jusqu' à la constitution de LVM et que, au-delà de la mise sur pied de cette entreprise commune, cette dernière a participé à l' entente sous sa propre responsabilité (cf. sur ce dernier point également les points 48 et 54).

    (78) - Cf. l' arrêt Cassella/Commission déjà cité à la note 52, point 22.

    (79) - Cf., pour la référence et le contenu de cette disposition, la note 64 plus haut.

    (80) - Règlement intérieur de la Commission (63/41/CEE), JO 1963, n 17, p. 181. Le règlement intérieur a été modifié entre temps sur différents points mais l' article 12 est demeuré inchangé : cf. respectivement Règlement intérieur provisoire de la Commission (67/426/CEE) (67/24/EURATOM), JO 1967, n 147, p. 1 ; décision de la Commission du 23 juillet 1975, modifiant le règlement intérieur provisoire de la Commission du 6 juillet 1967 (75/461/EURATOM, CECA, CEE), JO 1975, n L 199, p. 43 ; décision de la Commission du 6 janvier 1981, modifiant le règlement intérieur provisoire de la Commission du 6 juillet 1967 (81/2/EURATOM, CECA, CEE), JO 1981, n L 8, p. 16 ; décision de la Commission du 8 janvier 1986, modifiant le règlement intérieur provisoire de la Commission du 6 juillet 1967 (86/61/CEE, EURATOM, CECA), JO 1986, n 72, p. 34. Pour le texte de l' article 12, cf. le point 60 plus bas.

    (81) - Cf. le texte de cette disposition qui est reproduit au point 38 plus bas.

    (82) - Arrêt PVC, point 57.

    (83) - Arrêt PVC, point 58.

    (84) - Arrêt PVC, point 59.

    (85) - A propos de ce principe, cf. notamment J. Amphoux, Article 162, alinéa 2 - Article 16 du traité de fusion , dans Le droit de la Communauté économique européenne (Commentaire Mégret), IX, pp. 247-248, n 7. A propos du contexte historique du principe de collégialité, tel qu' il a déjà trouvé son expression lorsqu' il s' est agi de donner forme à la Haute autorité dans le traité CECA, cf. C.F. Ophuels, Zur ideengeschichtlichen Herkunft der Gemeinschaftsverfassung , dans : Probleme des europaeischen Rechts. Festschrift fuer Walter Hallstein, Francfort, Klostermann, 1966, (387), pp. 395-396. Cf. également, pour un témoignage plus personnel, W. Hallstein, Die europaeische Gemeinschaft, Duesseldorf-Vienne, Econ, cinquième édition, 1979, p. 83.

    (86) - Le texte de cette disposition est une reprise pratiquement littérale de l' ancien article 163 premier alinéa du traité CEE. Cet article est devenu caduc par l' effet de l' article 19 du traité de fusion.

    (87) - Arrêt du 23 septembre 1986, affaire 5/85, Akzo Chemie/Commission, Rec. 1986, p. 2585, point 30.

    (88) - Cf. la référence à la décision concernée de la Commission à la note 80.

    (89) - Le texte des autres alinéas de l' article 27 est le suivant :

    Des fonctionnaires peuvent aussi être habilités à prendre de telles mesures si cela s' avère indispensable pour permettre à la Commission de s' acquitter comme il convient des tâches qui lui incombent.

    Sauf s' ils sont délégués à titre personnel, les pouvoirs dévolus à un fonctionnaire sont valables pour son suppléant.

    Les compétences ainsi déléguées ne peuvent faire l' objet d' une subdélégation, sauf disposition expresse en ce sens figurant dans la décision d' habilitation.

    Les dispositions du présent article ne portent pas atteinte aux règles relatives aux délégations en matière financière et de gestion du personnel .

    (90) - Cf. pour ce qui concerne la procédure devant le Tribunal, l' arrêt PVC, point 16.

    (91) - Arrêt PVC, point 57.

    (92) - Arrêt Akzo Chemie/Commission, point 35. La Cour se réfère en l' espèce à l' arrêt VBVB et VBBB/Commission déjà cité à la note 48 plus haut, et plus particulièrement au point 14 de l' arrêt.

    (93) - Arrêt Akzo Chemie/Commission, points 36 et 37.

    (94) - A savoir aux points 38 à 40 inclus de l' arrêt Akzo Chemie/Commission.

    (95) - La citation est extraite de l' arrêt que la Cour a rendu le 17 octobre 1989 dans les affaires jointes 97/87 à 99/87, Dow Chemical Ibérica/Commission, Rec. 1989, p. 3165, point 58 in fine. Dans ce considérant, la Cour se réfère expressément à l' arrêt Akzo du 23 septembre 1986 pour rejeter le moyen pris de l' incompétence du commissaire chargé des questions de concurrence à signer une décision ordonnant une vérification. Sur cette question, voir également le point 82 plus bas.

    (96) - Arrêt Akzo Chemie/Commission, point 39 in fine.

    (97) - Cf. la distinction entre mesures essentielles et mesures d' exécution que la Cour a déjà établie dans l' arrêt qu' elle a rendu le 17 décembre 1970 dans l' affaire 25/70, Koester (Rec. 1970, p. 1161, point 6) à propos de la répartition des compétences entre le Conseil et la Commission en matière de politique agricole commune. La Cour a précisé récemment que la qualification règles essentielles doit être réservée aux dispositions qui ont pour objet de traduire les orientations fondamentales de la politique communautaire : arrêt du 27 octobre 1992, affaire C-240/90, Allemagne/Commission, non encore publié au recueil, p. 37. Dans l' arrêt Rey Soda, la Cour a jugé, à propos de la compétence d' exécution qui est conférée à la Commission par l' article 155 du traité CEE, qu' il résulte de l' économie du traité (...) ainsi que des exigences de la pratique que la notion d' exécution doit être interprétée largement : arrêt du 30 octobre 1975, affaire 23/75, Rec. 1975, p. 1279, point 10.

    (98) - Cf. arêt PVC, point 57.

    (99) - Très tôt déjà, à propos d' affaires CECA, la Cour a dit pour droit que le pouvoir discrétionnaire conféré à une institution communautaire par le traité impliquant une large liberté d' appréciation, susceptible de traduire par l' usage qui en est fait une véritable politique économique ne peut pas faire l' objet d' une délégation dès lors que cela signifierait un véritable déplacement de responsabilité et porterait donc atteinte à l' équilibre des pouvoirs caractéristique de la structure institutionnelle de la Communauté que la Cour considère comme une garantie fondamentale accordée par le traité (CECA), notamment aux entreprises et associations d' entreprises auxquelles il s' applique : arrêt du 13 juin 1958, affaire 9/56, Meroni, Rec. 1958, p. 9, pp. 45-46, et arrêt du 13 juin 1958, affaire 10/56, Meroni, Rec. 1958, p. 51, pp. 81-82.

    (100) - Arrêt Akzo Chemie/Commission, point 38. C' est à bon escient que la Cour a ajouté que le pouvoir reconnu à la Commission par l' article 14, paragraphe 3 du règlement n 17 trouve à s' appliquer essentiellement lorsque la Commission s' attend à ce que les entreprises ne se soumettent pas volontairement à une vérification. Pour des confirmations plus récentes, cf. arrêt du 21 septembre 1989, affaires jointes 46/87 et 227/88, Hoechst/Commission, Rec. 1989, p. 2859, points 44 et 46, ainsi que l' arrêt Dow Chemical Ibérica/Commission déjà cité à la note 95, point 58.

    (101) - En ce qui concerne ces dernières mesures, on songera notamment aux pouvoirs que l' article 14, paragraphe 1 du règlement n 17 confère aux membres du personnel de la Commission agissant pour le compte de celle-ci lorsqu' ils effectuent les vérifications que la Commission a ordonnées par une décision prise sur la base de l' article 14, paragraphe 3 de ce règlement. Encore à propos d' affaires CECA, la Cour a jugé à plusieurs reprises que le mandat par lequel la Haute autorité fait procéder à une vérification au sens de l' article 47 du traité CECA constitu(e) l' exercice même de ses pouvoirs et non une délégation de ceux-ci de sorte que les formes et la publicité exigées pour une délégation de pouvoirs n' étaient pas applicables en l' occurrence : arrêt du 16 décembre 1963, affaire 18/62, Barge/Haute autorité, Rec. 1963, p. 529, pp. 560-561 ; arrêt du 16 mars 1971, affaire 67/69, SIMET/Commission, Rec. 1971, p. 197, point 7 ; voir également l' arrêt du 22 mars 1966, affaire 30/65, Macchiorlati Dalmas/Haute autorité, Rec. 1966, p. 49, à la p. 78.

    (102) - Arrêt du 17 octobre 1972, affaire 8/72, Cementhandelaren/Commission, Rec. 1972, p. 977, point 12 ; arrêt ICI/Commission, déjà cité à la note 75, point 13 ; arrêt Geigy/Commission, déjà cité à la note 75, point 5 ; arrêt Cassella/Commission, déjà cité à la note 52, point 5.

    (103) - Arrêt ICI/Commission, déjà cité à la note 75, point 14 ; arrêt Geigy/Commission, déjà cité à la note 75, point 5 ; arrêt Cassella/Commission, déjà cité à la note 52, point 5 ; arrêt Cementhandelaren/Commission, déjà cité à la note précédente, point 13.

    (104) - Arrêt VBVB et VBBB/Commission, point 14, dans lequel la Cour se réfère à l' arrêt ICI/Commission, cité dans la note précédente, points 11 à 15, et à l' arrêt Cementhandelaren/Commission, cité dans la note précédente, points 10 à 14. Cf. également, bien que cet arrêt ne concerne pas le droit de la concurrence, l' arrêt du 11 octobre 1990, affaire C-200/89, Funoc, Rec. 1990, p. I-3369, point 14, qui se réfère lui aussi aux deux arrêts précités. A propos de l' arrêt Funoc, cf. le point 52 plus bas.

    (105) - A l' époque - la Communauté ne connaissait alors que quatre langues officielles - la Cour appliquait cette règle à elle-même : cf. arrêt du 10 mai 1960, affaire 1/60, FERAM/Haute autorité, Rec. 1960, p. 351, à la p. 363. La Cour y a dit pour droit que comme toutes les institutions des trois Communautés, la Cour est quadrilingue en vertu d' une présomption juris et de jure .

    (106) - Cf. en ce qui concerne le respect de cette égalité des langues dans la jurisprudence des débuts de la Cour, O. Riese, Das Sprachenproblem in der Praxis des Gerichtshofs der europaeischen Gemeinschaften , dans : Vom Deutschen zum europaeischen Recht, Festschrift fuer Hans Doelle, II, Tuebingen, Mohr, 1963, p. 507 et ss. En ce qui concerne les problèmes spécifiques qu' entraîne le caractère multilingue de la législation communautaire dans la jurisprudence de la Cour, cf. P. Brasselmann, UEbernationales Recht und Mehrsprachigkeit. Linguistische UEberlegungen zu Sprachproblemen in EuGH-Urteilen , Europarecht, 1992, p. 55 ss.

    (107) - Observons à cet égard que le règlement intérieur de la Commission ne comporte à aucun endroit une disposition analogue à l' article 8 du règlement intérieur du Conseil (règlement intérieur arrêté par le Conseil le 24 juillet 1979, sur la base de l' article 5 du traité du 8 avril 1965 instituant un Conseil unique et une Commission unique des Communautés européennes (79/868/CECA, CEE, EURATOM), JO 1979, n L 268, p. 1) que les parties défenderesses ont invoqué dans l' exposé qu' elles ont fait à l' audience. Cet article dispose que, sauf décision contraire prise par le Conseil à l' unanimité et motivée par l' urgence, le Conseil ne délibère et ne décide que sur la base de documents et projets établis dans les langues prévues par le régime linguistique en vigueur. La différence entre les deux règlements intérieurs sur ce point ne fait que confirmer, selon nous, la position adoptée dans le corps du texte : comme nous l' avons dit (au point 14 plus haut), le Conseil se compose, contrairement à la Commission, de représentants des Etats membres délégués par les gouvernements nationaux, de sorte qu' il est normal que ceux-ci puissent participer dans leur propre langue aux délibérations et à la prise de décision. Qu' il nous soit en outre permis d' indiquer que dans l' arrêt Nakajima dont nous reparlerons plus bas (au point 49), la Cour a dit pour droit que cette disposition du règlement intérieur ne peut pas être invoquée par des tiers.

    (108) - Arrêt PVC, point 37.

    (109) - Seules Wacker Chemie et Hoechst avaient conclu du mémoire en défense de la Commission que la décision n' avait pas été adoptée en italien et en néerlandais le 21 décembre 1988 alors que, selon elles, tel aurait dû être le cas : arrêt PVC, point 14.

    (110) - Pour ce qui est du texte de ces deux dispositions, cf. le point 60 plus bas.

    (111) - Conformément à l' article 188 troisième alinéa et, respectivement à l' article 168 A paragraphe 4 du traité CEE.

    (112) - Pour le Conseil, cette obligation résulte de l' article 5 du traité de fusion ; pour le Parlement européen, de l' article 142 du traité CEE ; cette obligation vaut également pour le Comité économique et social : cf. article 196 deuxième alinéa du traité CEE. Quant à la banque européenne d' investissement, c' est en application de l' article 9, paragraphe 3 du protocole sur les statuts de la banque européenne d' investissement que le conseil des gouverneurs de celle-ci doit approuver le règlement intérieur de la banque.

    (113) - Cf. arrêt du 30 mai 1973, affaire 46/72, De Greef/Commission, Rec. 1973, p. 543, point 14.

    (114) - Comparer l' article 5 du traité de fusion (règlement intérieur du Conseil) et article 142 du traité CEE (règlement intérieur du Parlement européen).

    (115) - Les dispositions applicables du traité sont éparses : c' est ainsi qu' il est clair que le règlement intérieur de la Commission doit notamment être compatible avec les exigences relatives au nombre de ses membres et à leur indépendance (article 10 du traité de fusion), avec le principe de collégialité et avec la condition du quorum requis pour les séances de la Commission (article 17 du traité de fusion) mais également, par exemple, avec le principe de la responsabilité politique collective devant le Parlement européen (article 144 du traité CEE) : cf. J. Amphoux, Article 162 deuxième alinéa - Article 16 du traité de fusion , dans Le droit de la Communauté économique européenne (Commentaire Mégret), IX, pp. 244-245, n 1.

    (116) - Arrêt déjà cité à la note 38.

    (117) - Pour ce qui est du contenu de cette disposition, cf. la note 107 plus haut.

    (118) - Arrêt Nakajima/Conseil, points 49 et 50.

    (119) - Arrêt PVC, point 78.

    (120) - Seuls les arrêts Bernusset et Bouteiller se réfèrent incidemment au règlement intérieur de la Commission. L' arrêt Bellardi Ricci ne comporte aucune référence à cet égard. Dans l' arrêt Bernusset, la Cour examine brièvement la procédure suivie par la Commission dans l' affaire 94/63 pour aboutir à la décision de nomination querellée (à savoir la procédure écrite prévue par l' article 11 du règlement intérieur) mais uniquement dans le cadre de la question de savoir si les garanties prévues par l' article 45 du statut des fonctionnaires CEE pour les fonctionnaires promouvables avaient été respectées : cf. Rec. 1964, pp. 612-613. En d' autres termes, la Cour ne mentionne le règlement intérieur que dans le cadre de son examen en fait. Dans l' arrêt Bouteiller également, la Cour ne fait mention du règlement interne de la Commission qu' à titre tout à fait subsidiaire, sans spécifier la disposition concernée (il apparaît des conclusions présentées par l' avocat général Da Cruz Vilaça qu' il s' agissait de l' article 26 du règlement intérieur). L' élément qui était au centre des débats était la prise en compte, dans le cadre d' une procédure de promotion, d' un facteur déterminé dans la carrière d' un fonctionnaire, à savoir l' exercice temporaire par celui-ci de la fonction de chef d' un service nouvellement créé. Cet exercice temporaire d' une fonction a lieu en application de l' article 26 du règlement intérieur qui prévoit que lorsque le fonctionnaire supérieur hiérarchique est empêché, il est suppléé par le fonctionnaire subordonné présent le plus ancien dans la catégorie et le grade les plus élevés.

    (121) - Cette affaire concernait une demande en annulation, formée par une société française, d' un règlement du Conseil en matière de politique agricole qui prévoyait un quota de production pour l' isoglucose. Le Parlement européen est intervenu à l' appui des conclusions de la requérante relativement à la violation de formes substantielles. A aucun endroit, la requérante n' a invoqué une disposition du règlement intérieur d' une institution communautaire. Au point 36 de l' arrêt Roquette Frères/Conseil cité par le Tribunal, la Cour a examiné le point de savoir si, lorsqu' il a adopté le règlement querellé, le Conseil avait consulté le Parlement comme l' article 43, paragraphe 2 du traité CEE lui impose de le faire. Il a uniquement indiqué à ce propos que le Conseil avait omis d' adresser au Parlement une demande d' avis d' urgence sur le règlement concerné, possibilité qui est inscrite dans le règlement intérieur du Parlement (il apparaît des conclusions présentées par l' avocat général Reischl qu' il s' agit de l' article 14 du règlement intérieur du Parlement). Cf. l' arrêt pratiquement identique que la Cour a rendu le même jour dans l' affaire Maizena/Conseil : arrêt du 29 octobre 1980, affaire 139/79, Rec. 1980, p. 3393, point 37. La Cour s' est encore référée ultérieurement au passage concerné de l' arrêt Roquette Frères dans l' arrêt qu' elle a rendu le 10 juillet 1986, affaire 149/85, Wybot/Faure, Rec. 1986, p. 2391, point 24.

    (122) - Cet arrêt concernait une demande introduite par une association italienne de chefs d' entreprises visant à l' annulation d' une décision du Conseil portant nomination des membres du comité économique et social. A aucun moment, cette association ne s' était prévalue de la violation du règlement intérieur du Conseil : les moyens invoqués étaient pris de la violation de l' article 195 du traité CEE et d' un abus de pouvoir dont le Conseil se serait rendu coupable. Le seul renvoi au règlement intérieur du Conseil figure au point 25 de l' arrêt dans lequel la Cour observe que le Conseil a adopté la décision litigieuse par la voie de la procédure des points de la partie A prévue au règlement intérieur du Conseil (la Cour n' a pas davantage indiqué ici de quelles dispositions de ce règlement il s' agissait, à savoir l' article 2, paragraphe 6).

    (123) - Il apparaît du rapport d' audience que ce n' est pas la violation du règlement intérieur de la Commission que la FUNOC avait alléguée mais bien la violation de l' article 6, paragraphe 1 du règlement (CEE) n 2950/83 du Conseil, du 17 octobre 1983 (JO 1983, L 289, p. 1). Selon elle, il résultait de cette disposition que c' est la Commission elle-même qui aurait dû prendre cette décision.

    (124) - Arrêt Funoc, point 14.

    (125) - Cf. notamment arrêt du 24 mars 1983, affaire 298/81, Colussi/Parlement, Rec. 1983, p. 1131, point 10 ; arrêt du 29 septembre 1983, affaire 223/82, De Bruyn/Parlement, Rec. 1983, p. 2879, point 18 ; arrêt du 19 janvier 1984, affaire 260/80, Andersen/Conseil, Rec. 1984, p. 177, points 5 et 6 ; arrêt du 21 juin 1984, affaire 69/83, Lux/Cour des comptes, Rec. 1984, p. 2447, points 9, 11 et 12 (règlement intérieur de la Cour des comptes) ; arrêt du 10 juin 1987, affaire 307/85, Gavanas/Comité économique et social et Conseil, Rec. 1987, p. 2435, points 17-21 (règlement intérieur du Comité économique et social) ; arrêt du 9 février 1988, affaire 1/87, Picciolo/Commission, Rec. 1988, p. 711, points 36-40 (règlement interne de l' Office des publications). Pour ce qui est des affaires de fonctionnaires dans lesquelles le règlement intérieur d' une institution intervient à titre plutôt subsidiaire, cf. arrêt du 15 mai 1985, affaire 3/84, Patrinos/Comité économique et social, Rec. 1985, p. 1421, points 7 et 21 ; arrêt du 11 juillet 1985, affaires jointes 87/77 et 130/77, 22/83 et 10/84, Salerno/Commission et Conseil, Rec. 1985, p. 2523, points 7 et 50 (règlement interne de l' Association européenne pour la coopération).

    (126) - Dans ce groupe d' arrêts également, il existe une certaine diversité. Lorsqu' il s' agissait d' un Etat membre qui, en sa qualité de membre de l' institution concernée, se prévalait de la violation du règlement intérieur, la Cour a déjà dit pour droit de manière explicite que l' institution était liée par son règlement intérieur et ne pouvait y déroger : cf. arrêt du 23 février 1988, affaire 68/86, Royaume-Uni/Conseil, Rec. 1988, p. 855, point 48 ; cf. également l' arrêt Royaume-Uni contre Conseil, affaire 131/86, dont il a été question ci-avant (aux points 10 et suivants). Dans les affaires où cette qualité de membre n' intervenait pas, en revanche, la Cour fait montre d' une certaine réserve : c' est ainsi qu' elle a refusé à plusieurs reprises de faire droit à la demande d' Etats membres qui l' invitaient à examiner la conformité d' une décision du Parlement européen au règlement intérieur de cette institution au motif que cette décision relève de l' organisation interne de ses travaux et ne peut dès lors faire l' objet d' un contrôle juridictionnel : arrêt du 22 septembre 1988, affaires jointes 358/85 et 51/86, France/Parlement, Rec. 1988, p. 4821, points 16 et 17, et arrêt rendu le 28 novembre 1991 dans l' affaire Luxembourg/Parlement, déjà cité à la note 17, points 43 et 44. La Cour fait montre d' une réserve analogue dans un arrêt qu' elle a rendu le 14 janvier 1987 dans l' affaire 278/84, République fédérale d' Allemagne/Commission, Rec. 1987, p. 1, points 12 et 13.

    (127) - Il s' agit de l' ordonnance du 4 juin 1986, affaire 78/85, Groupe des droites européennes/Parlement, Rec. 1986, p. 1753, et ordonnance du 22 mai 1990, affaire C-68/90, Blot et Front national/Parlement, Rec. 1990, p. I-2101. Dans ces deux cas, un membre du Groupe des droites européennes du Parlement européen avait introduit une demande d' annulation d' actes internes pris par le Parlement. Dans les deux cas, les requérants avaient notamment invoqué une violation du règlement intérieur du Parlement. Dans l' une comme dans l' autre affaire, la Cour a déclaré le recours irrecevable, se fondant à cet égard sur son arrêt du 23 avril 1986 (affaire 294/83, Les Verts, Rec. 1986, p. 1339) dans lequel elle avait déclaré que les recours en annulation d' actes du Parlement européen ne sont ouverts que pour les actes qui visent à produire des effets juridiques à l' égard de tiers. Aucun des actes querellés ne remplissaient cette condition. La Cour n' a cependant pas abordé la question de savoir si les dispositions du règlement intérieur du Parlement dont les parties requérantes s' étaient prévalues peuvent ou non être invoquées par des personnes physiques ou morales.

    (128) - Cf. respectivement le point 14 in fine de l' arrêt VBVB et VBBB/Commission cité à la note 48 plus haut, et le point 14 in fine de l' arrêt Funoc/Commission, reproduits au point 52 plus haut : il en ressort que la Cour estime qu' une partie requérante peut fournir la preuve que les règles applicables en matière de délégation de signature ou d' octroi d' un tel pouvoir ont été violées.

    (129) - Arrêt PVC, point 75.

    (130) - Arrêt PVC, point 76.

    (131) - Arrêt PVC, points 72 et 75.

    (132) - Arrêt PVC, points 74 in fine et 75.

    (133) - Arrêt PVC, point 75.

    (134) - La section II du premier chapitre concerne la préparation et l' exécution des délibérations de la Commission. Le règlement intérieur comporte encore un deuxième chapitre, administration , qui concerne l' organisation des services administratifs de la Commission, ainsi qu' un troisième chapitre, suppléances et délégations , dans lequel apparaît l' article 27 que nous avons déjà cité à plusieurs reprises.

    (135) - Arrêt PVC, point 74.

    (136) - Signalons en passant que le règlement intérieur n' exige nulle part expressément que, lorsqu' il s' agit d' une décision qui doit être rédigée dans plusieurs langues faisant foi, la Commission doit adopter cette décision dans toutes ces langues au cours de sa séance et encore moins que celle-ci doit être signée par tous les commissaires qui ont pris part à l' adoption de cette décision. L' article 12 du règlement intérieur n' institue pas davantage un délai strict pour l' authentification des actes dans la ou les langues faisant foi. Il nous semble au contraire résulter de la disposition aux termes de laquelle ces textes doivent être annexés au procès-verbal approuvé conformément à l' article 10 - procès-verbal qui, contrairement à ce qu' affirme le Tribunal au point 74 de l' arrêt PVC, ne doit pas être approuvé par la Commission au cours de la première séance ultérieure mais bien au cours d' une séance ultérieure - que l' authentification à laquelle il doit être procédé en application de l' article 12 peut avoir lieu dans un délai raisonnable après l' adoption de l' acte.

    (137) - En effet, si la Commission devait, par exemple, adopter une décision dans un domaine qui relève de la compétence exclusive des Etats membres, cette décision, selon la Cour, manquerait de toute base juridique dans l' ordre communautaire : arrêt du 10 décembre 1969, affaires jointes 6/69 et 11/69, Commission/France, Rec. 1969, p. 523, point 13. Il va de soi que l' authentification ne saurait remédier à un tel vice.

    (138) - Contrairement à ce qui est prévu pour les règlements, l' article 191 deuxième alinéa du traité CEE n' impose pas une publication au Journal officiel pour les décisions. Une telle publication ne constitue donc pas une exigence du traité pour l' entrée en vigueur d' une décision : cf. arrêt Pays-Bas et Leeuwarden Papierwarenfabriek/Commission déjà cité à la note 47 plus haut, point 28. Pour un certain nombre de décisions que la Commission rend en application des articles 85 et 86 du traité CEE, l' article 21 du règlement 17 impose cependant une publication ; cette obligation de publication ne vaut cependant pas pour les décisions qui imposent des amendes pour violation des articles 85 ou 86 du traité en application de l' article 15 du règlement n 17. Selon la Cour, néanmoins, ni le texte ni l' esprit de l' article 21 du règlement n 17 n' empêchent la Commission d' effectuer cette publication pourvu que celle-ci ne comporte pas une divulgation du secret d' affaires des entreprises concernées ; la publicité ainsi donnée à la décision peut même contribuer à assurer le respect des règles de concurrence du traité : arrêt ACF Chemiefarma/Commission, déjà cité à la note 51, points 102 et 104. En revanche, les destinataires d' une décision ne peuvent pas davantage quereller l' absence de publication, même si la Cour estime souhaitable qu' une décision (...) affectant les droits et intérêts des ressortissants de plusieurs Etats membres ne demeure pas privée d' une publicité qui a cependant été assurée dans des cas analogues : arrêt du 18 février 1964, affaires jointes 73/63 et 74/63, Internationale Crediet- en Handelsvereniging Rotterdam , Rec. 1964, p. 1, en particulier à la page 28.

    (139) - Arrêt Europemballage et Continental Can/Commission, déjà cité à la note 75, point 10. La Cour a estimé en l' espèce que la décision en cause avait été dûment notifiée dès lors que Continental en avait eu communication effectivement (c' est-à-dire par des lettres qui lui avaient été adressées par la poste). Pour des arrêts plus récents confirmant cette jurisprudence, cf. notamment l' arrêt Cockerill-Sambre/Commission, déjà cité à la note 13, point 10, et l' arrêt du 18 octobre 1989, affaire 374/87, Orkem/Commission, Rec. 1989, p. 3283, point 6 ; cf. également l' arrêt que le Tribunal a rendu le 29 mai 1991 dans l' affaire T-12/90, Bayer/Commission, Rec. 1991, p. II-219, point 18.

    (140) - Arrêt ALMA/Haute autorité déjà cité à la note 15, Rec. 1957, p. 190.

    (141) - C' est la raison pour laquelle également, dans l' affaire Continental Can, la Cour a déclaré que Continental ne pouvait pas, pour rendre sans effet la communication de la décision litigieuse, se prévaloir de son propre refus d' en prendre connaissance : arrêt Europemballage et Continental Can/Commission, déjà cité à la note 75, point 10.

    (142) - Arrêt ICI/Commission, déjà cité à la note 75, points 39 et 40, et arrêt Geigy/Commission, déjà cité à la note 75, point 18. Tant dans l' affaire ICI que dans l' affaire Geigy, la Cour a déclaré que la requérante avait eu complète connaissance du texte de la décision et qu' elle avait fait usage, dans les délais, de son droit de recours ; que, dans ces circonstances, la question des irrégularités éventuelles de notification devenait sans intérêt et que, dès lors, les moyens pris de celles-ci étaient irrecevables faute d' intérêt : arrêt ICI/Commission, points 42-44 ; arrêt Geigy/Commission, point 19.

    (143) - Arrêt Suiker Unie/Commission, déjà cité à la note 54, point 114. Pour ce qui est du texte de cette disposition, cf. la note 64 plus haut.

    (144) - Arrêt Suiker Unie/Commission, point 115.

    (145) - Arrêt du 25 janvier 1979, affaire 98/78, Racke, Rec. 1979, p. 69, point 15 in fine. Cf. également à cet égard H.-W. Daig et G. Schmidt, Article 191 , dans Von der Groeben - Thiesing - Ehlermann, Kommentar zum EWG-Vertrag, IV, p. 4991, n 20 ; E. Grabitz, Article 191 , dans Grabitz Kommentar zum EWG-Vertrag, p. 32, point 8.

    (146) - Arrêt Consten-Grundig/Commission, déjà cité à la note 49, Rec. 1966, p. 491.

    (147) - Ibidem. Consten avait invoqué une violation des formes substantielles parce que le texte publié au Journal officiel qualifiait l' acte attaqué de directive.

    (148) - Pour la liste des autorités nationales compétentes désignées par les Etats membres à cet effet, cf. J.-V. Louis, Article 192 , dans Le droit de la Communauté économique européenne (Commentaire Mégret), X, pp. 516-517, note 5.

    (149) - E. Grabitz, Article 192 , dans Grabitz Kommentar zum EWG-Vertrag, p. 36, point 11 ; H.P. Ipsen, Europaeisches Gemeinschaftsrecht, Tuebingen, Mohr, 1972, p. 535, point 13.

    (150) - Cf. arrêt du 26 février 1987, affaire 15/85, Consorzio Cooperative d' Abruzzo/Commission, Rec. 1987, p. 1005, points 13 et 17.

    (151) - Arrêt Consorzio Cooperative d' Abruzzo/Commission, point 12 ; arrêt du 3 mars 1982, affaire 14/81, Alpha Steel/Commission, Rec. 1982, p. 749, point 10 ; voir déjà l' arrêt du 12 juillet 1957, affaires jointes 7/56 et 3/57 à 7/57 inclus, Algera e.a./Assemblée commune, Rec. 1957, p. 81, à la page 125 ; arrêt du 12 juillet 1962, affaire 14/61, Hoogovens/Haute Autorité, Rec. 1962, p. 485, à la p. 521 ; arrêt du 13 juillet 1965, affaire 111/63, Lemmerz-Werke/Haute Autorité, Rec. 1965, p. 835, à la p. 853.

    (152) - Cf. ordonnance BAT et Reynolds/Commission dans lequel une des parties requérantes avait demandé à la Cour d' ordonner à la Commission de produire tous les documents qu' elle avait en sa possession concernant un certain dossier de concurrence en vue de vérifier si la décision avait été influencée par des considérations autres que celles indiquées dans l' exposé des motifs de la décision. Le Président a rejeté cette demande car il s' agissait-là d' une mesure d' exception de caractère exceptionnel qui suppose que les circonstances entourant la décision en cause donnent lieu à des doutes sérieux quant aux motifs véritables, et notamment à des soupçons que ces motifs soient étrangers aux objectifs du droit communautaire et, donc, constitutifs d' un détournement de pouvoir : ordonnance du 18 juin 1986, affaires jointes 142/84 et 156/84, Rec. 1986, p. 1899, point 11 (mis en italique par nous).

    (153) - Aux termes de l' article 16 troisième alinéa du règlement intérieur de la Commission, il appartient en effet au secrétaire exécutif de prendre les mesures nécessaires pour assurer la notification et la publication au Journal officiel des Communautés européennes des actes de la Commission .

    (154) - Cf. M. Waelbroeck, Article 173 , dans Le droit de la Communauté économique européenne (Commentaire Mégret), X, p. 128, point 34 ; cf. également R. Joliet, Le droit institutionnel des Communautés européennes. Le contentieux, Liège, Faculté de Droit, d' Economie et de Sciences sociales de Liège, 1981, pp. 99 ss. Se fondant sur la jurisprudence de la Cour, ce dernier distingue trois catégories de formes substantielles prescrites à peine de nullité au sens de l' article 173 du traité CEE : (i) les règles concernant le processus d' élaboration des actes communautaires (par exemple l' obligation pour une institution de consulter une autre institution ou un autre organe ou l' obligation faite à la Commission par l' article 19, paragraphe 1 du règlement n 17 de donner aux entreprises l' occasion de faire connaître leur point de vue sur la communication des griefs : cf. à ce propos le très récent arrêt du 31 mars 1993, affaires jointes C-89/85, C-104/85, C-114/85, C-116/85, C-117/85 et C-125/85 à C-129/85, Ahlstroem e.a./Commission, non encore publié au recueil) ; (ii) les règles concernant la procédure de prise de décision (à savoir les règles relatives au quorum ou à la majorité requis, etc) ; et (iii) les règles concernant la forme extérieure de l' acte (notamment la langue dans laquelle il est rédigé et son exposé des motifs). Le seul arrêt jusqu' à présent dans lequel la Cour a qualifié de forme substantielle une disposition du règlement interne d' une institution communautaire est l' arrêt Royaume-Uni/Conseil (affaire 68/86), déjà cité à la note 126. Dans cette affaire, la Cour avait constaté (aux points 46-49 de l' arrêt) que le Conseil avait violé l' article 6, paragraphe 1 de son règlement intérieur (la décision de procéder à un vote par écrit requiert l' unanimité). Selon la Cour, cette disposition est une forme substantielle (cf. point 51 de l' arrêt). Elle relève dès lors de la deuxième catégorie de formes substantielles à laquelle se réfère Joliet. Cf. également les renvois à cette jurisprudence qui sont faits dans l' arrêt du 13 novembre 1990, affaire 331/88, Rec. 1990, p. I-4023, point 3, dans l' ordonnance du 13 juillet 1988, affaire 160/88 R, FEDESA/Conseil, Rec. 1988, p. 4121, point 12, dans l' ordonnance du 12 octobre 1988, affaire 34/88, CEVAP/Conseil, Rec. 1988, p. 6265, point 6, dans l' ordonnance du 7 décembre 1988, affaire 160/88, FEDESA/Conseil, Rec. 1988, p. 6399, point 4 et dans l' ordonnance du 7 décembre 1988, affaire 138/88, Flourez/Commission, Rec. 1988, p. 6393, point 4.

    (155) - Arrêt IAZ/Commission, déjà cité à la note 43, point 16. Cela a également été confirmé par la jurisprudence de la Cour relative aux irrégularités qui auraient été commises lors de la notification prévue par l' article 191 du traité CEE : cf. les arrêts Geigy/Commission et ICI/Commission déjà cités au point 62.

    (156) - Cf. l' arrêt Consten-Grundig, déjà cité à la note 49, Rec. 1966, p. 500 ; arrêt IAZ/Commission, point 15.

    (157) - C' est dans le même sens qu' il faut, selon nous, comprendre la procédure d' authentification qui est définie aux articles 7 et 9 du règlement intérieur du Conseil. Cette procédure est la suivante : (i) il est établi un procès-verbal de chaque séance qui, après approbation, est signé par le président et le secrétaire général ; (ii) la signature du président et du secrétaire général est apposée au bas du texte des actes adoptés par le Conseil ; (iii) le texte de ces actes est annexé au procès-verbal.

    (158) - A savoir une violation du (...) traité ou de toute règle de droit relative à son application au sens de cette disposition. Il ressort de l' arrêt IAZ/Commission (point 15 in fine), déjà cité à la note 43, qu' une faute de procédure commise par la Commission (même si elle ne concerne pas une forme substantielle) peut constituer une violation des principes de bonne administration susceptible de rendre une décision illégale.

    (159) - Cf. arrêt PVC, point 28, ainsi que la déclaration du secrétaire exécutif de la Commission à laquelle l' arrêt renvoie.

    (160) - Arrêt PVC, point 68. Pour ce qui est de la notion d' inexistence juridique des actes communautaires, le Tribunal se réfère aux arrêts de la Cour du 10 décembre 1957, Société des usines à tubes de la Sarre, affaires jointes 1/57 et 14/57, Rec. 1957, p. 201 ; du 21 février 1974, affaires jointes 15/73 à 33/73, 52/73, 53/73, 57/73 à 109/73, 116/73, 117/73, 123/73, 132/73 et 135/73 à 137/73, Schots-Kortner, Rec. 1974, p. 177 ; du 26 février 1987, Consorzio Cooperative d' Abruzzo, déjà cité à la note 150 ; du 30 juin 1988, affaire 226/87, Commission/Grèce, Rec. 1988, p. 3611 ; ainsi qu' à l' arrêt du Tribunal du 27 juin 1991, affaire T-156/89, Valverde Mordt, Rec. 1991, p. II-407.

    (161) - Arrêt PVC, point 68 in fine.

    (162) - Arrêt PVC, point 93.

    (163) - Arrêt PVC, point 94.

    (164) - Arrêt PVC, point 95.

    (165) - Arrêt Algera e.a./Assemblée commune, déjà cité à la note 151, Rec. 1957, p. 122.

    (166) - Ibidem, p. 122.

    (167) - Arrêt Consorzio Cooperative d' Abruzzo/Commission, point 10.

    (168) - Arrêt du 30 juin 1988, Commission/Grèce, déjà cité à la note 160, point 16 ; arrêt du 27 octobre 1992, affaire C-74/91, Commission/Allemagne, Rec. 1992, p. I-5437, point 11.

    (169) - Arrêt déjà cité à la note 160.

    (170) - La seule indication de motifs que la Haute Autorité a donné à l' appui de son point de vue dans la lettre en cause était la suivante : dans les circonstances actuelles (...) la Haute Autorité ne peut rendre qu' un avis négatif, au sens de l' article 54 alinéa 4 du traité, sur le programme d' investissement que vous avez déposé .

    (171) - Rec. 1957. pp. 219-220.

    (172) - Arrêt déjà cité à la note 160.

    (173) - Arrêts du 7 juin 1972, respectivement dans l' affaire 20/71, Sabbatini/Parlement européen, Rec. 1972, p. 345 et dans l' affaire 32/71, Bauduin/Commission, Rec. 1972, p. 363. Dans ces arrêts, la Cour avait dit pour droit que l' article 4, paragraphe 3 de l' annexe VII au statut comportait une différence arbitraire de traitement et que, pour ce motif, il y avait lieu d' annuler les décisions prises à l' égard des fonctionnaires en cause par lesquelles l' indemnité de dépaysement leur avait été retirée.

    (174) - Arrêt Schots-Kortner, point 33.

    (175) - A savoir l' article 22 paragraphe 3 du règlement (CEE) n 355/77 du Conseil, du 15 février 1977, concernant une action commune pour l' amélioration des conditions de transformation et de commercialisation des produits agricoles, JO 1977, n L 51, p. 1.

    (176) - Arrêt Consorzio, point 11.

    (177) - Déjà cité à la note 160.

    (178) - Il s' agit de la décision 85/276 de la Commission, du 24 avril 1985, relative à l' assurance en Grèce des biens publics et des crédits accordés par les banques publiques helléniques, JO 1985, n L 152, p. 25.

    (179) - Arrêt Commission/Grèce, point 16.

    (180) - Arrêt déjà cité à la note 160.

    (181) - Arrêt Valverde Mordt, point 84.

    (182) - Arrêt Valverde Mordt, point 85.

    (183) - Rec. 1974, p. 197.

    (184) - Cf. le point 9 de l' arrêt PVC dont il apparaît que les parties requérantes devant le Tribunal ont demandé, à titre principal, l' annulation de la décision prise à leur égard et, à titre subsidiaire, l' annulation ou du moins la diminution des amendes qui leur avaient été imposées par l' article 3 de la décision. Au point 30 de son arrêt, le Tribunal dit en résumé que les requérantes ont essentiellement invoqué trois groupes de moyens, tirés de la violation des droits fondamentaux, de la méconnaissance des formes substantielles et de ce que la Commission aurait procédé à une appréciation et à une qualification juridique des faits insuffisantes ou erronées au regard de l' article 85 paragraphe 1 du traité .

    (185) - Cf. arrêt PVC, point 30.

    (186) - Cf. arrêt PVC, point 37.

    (187) - Arrêt DowChemical Ibérica/Commission, déjà cité à la note 95, point 59. Dans les conclusions qu' il a présentées dans cette affaire, l' avocat général Mischo observe à bon droit que les requérantes ne pouvaient en aucun cas se méprendre sur le fait qu' il s' agissait de décisions de la Commission, cela d' autant plus qu' elles étaient authentifiées par le cachet de celle-ci et par la signature de son secrétaire général et qu' elles leur avaient été remises par des agents de la Commission dûment mandatés aux fins de leur exécution : Rec. 1989, p. 2903, point 163.

    (188) - Cette formalité a pour objet, selon nous, de garantir que la version signifiée est conforme à l' original de la décision qui a été authentifié par le président et le secrétaire exécutif de la Commission. Comme nous l' avons dit plus haut (au point 66), cette dernière authentification a pour objet à son tour d' authentifier la conformité de l' original de la décision à la décision qui a été adoptée en séance par le collège des commissaires.

    (189) - Arrêt PVC, point 63.

    (190) - Cf. arrêt du 5 décembre 1963, affaires jointes 53/63 et 54/63, Lemmerz, Rec. 1963, p. 487, à la p. 507 et arrêt du 5 décembre 1963, affaires jointes 23/63, 24/63 et 52/63, Usines Emile Henricot, Rec. 1963, p. 439, à la p. 455.

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