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Document 61990CJ0345

    Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 20 février 1992.
    Parlement européen contre Jack Hanning.
    Pourvoi - Fonctionnaires - Concours - Candidats irrégulierement admis à concourir - Conséquences.
    Affaire C-345/90 P.

    Recueil de jurisprudence 1992 I-00949

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:1992:79

    61990J0345

    Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 20 février 1992. - Parlement européen contre Jack Hanning. - Pourvoi - Fonctionnaires - Concours - Candidats irrégulierement admis à concourir - Conséquences. - Affaire C-345/90 P.

    Recueil de jurisprudence 1992 page I-00949


    Sommaire
    Parties
    Motifs de l'arrêt
    Décisions sur les dépenses
    Dispositif

    Mots clés


    ++++

    1 . Fonctionnaires - Recrutement - Concours - Jury - Indépendance - Limites - Adoption de décisions illégales - Liste d' aptitude incluant des candidats irrégulièrement admis à concourir - Irrégularité justifiant l' annulation des opérations du concours par l' autorité investie du pouvoir de nomination

    2 . Pourvoi - Pourvoi jugé bien fondé - Règlement du litige au fond par la Cour - Affirmation par la Cour de la légalité de la décision contestée devant le Tribunal

    ( Statut de la Cour de justice CEE, art . 54, alinéa 1 )

    Sommaire


    1 . Si, en raison de l' indépendance des jurys de concours, l' autorité investie du pouvoir de nomination ne peut annuler ou modifier une décision prise par un jury, elle est toutefois tenue de prendre des décisions exemptes d' illégalité dans l' exercice de ses propres compétences et ne saurait être liée par une décision de jury dont l' illégalité pourrait entacher, par voie de conséquence, ses propres décisions .

    Confrontée à une liste d' aptitude qui, parce qu' elle inclut des candidats irrégulièrement admis à concourir et non susceptibles d' être nommés, d' une part, a privé un candidat ayant obtenu le minimum de points requis de la possibilité d' y figurer et, d' autre part, en réduisant ses possibilités de choix, limite son pouvoir d' appréciation, l' autorité investie du pouvoir de nomination est autorisée à annuler les opérations de concours, contrairement à ce qu' a jugé le Tribunal .

    2 . L' application de l' article 54, premier alinéa, du statut de la Cour de justice CEE conduit celle-ci à régler au fond le litige, lorsque la solution à laquelle elle parvient au terme de l' examen du pourvoi rend en tout état de cause inopérants les moyens dont se prévalait le demandeur devant le Tribunal .

    Tel est le cas lorsque la Cour reconnaît que, contrairement à ce que soutenait le demandeur et à ce qu' a jugé le Tribunal, une décision a été légalement prise .

    Parties


    Dans l' affaire C-345/90 P,

    Parlement européen, représenté par MM . Jorge Campinos, jurisconsulte, et Manfred Peter, chef de division, en qualité d' agents, assistés de Me Alex Bonn, avocat au barreau de Luxembourg, ayant élu domicile au secrétariat général du Parlement européen, Kirchberg,

    partie requérante,

    ayant pour objet un pourvoi formé contre l' arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 20 septembre 1990, Hanning/Parlement ( T-37/89, Rec . p . II-463 ), et tendant à l' annulation de cet arrêt,

    l' autre partie à la procédure étant :

    Jack Hanning, fonctionnaire du Conseil de l' Europe, représenté par Me Georges Vandersanden, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l' étude de Me Alex Schmitt, 62, avenue Guillaume, qui conclut au rejet du pourvoi,

    LA COUR ( troisième chambre ),

    composée de MM . F . Grévisse, président de chambre, J . C . Moitinho de Almeida et M . Zuleeg, juges,

    avocat général : M . M . Darmon

    greffier : Mme D . Louterman-Hubeau, administrateur principal

    vu le rapport d' audience,

    ayant entendu les représentants des parties en leur plaidoirie à l' audience du 8 novembre 1991,

    ayant entendu l' avocat général en ses conclusions à l' audience du 10 décembre 1991,

    rend le présent

    Arrêt

    Motifs de l'arrêt


    1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 23 novembre 1990, le Parlement européen a, en vertu de l' article 49 du statut CEE et des dispositions correspondantes des statuts CECA et CEEA de la Cour de justice, formé un pourvoi contre l' arrêt du Tribunal de première instance en date du 20 septembre 1990, Hanning/Parlement ( T-37/89, Rec . p . II-463 ), en tant qu' il a, d' une part, annulé la décision du Parlement européen de passer outre aux résultats du concours n PE/41/A et d' ouvrir un nouveau concours ainsi que la décision implicite du Parlement européen rejetant la réclamation de M . Hanning du 17 juin 1988 contre cette décision, d' autre part, mis à la charge du Parlement européen les dépens de l' instance devant le Tribunal .

    2 Il ressort des constatations faites par le Tribunal dans son arrêt ( points 1 à 12 ) que, le 5 décembre 1986, le Parlement a publié un avis de concours général n PE/41/A ( JO C 311, p . 13 ), sur titres et épreuves, destiné à pourvoir un emploi de chef de division de langue anglaise, de grade A 3, pour diriger le bureau d' information de Londres .

    3 Deux candidats, MM . Spence et Waters, fonctionnaires du Parlement, auxquels l' admission à concourir avait été refusée parce qu' ils n' avaient pas fourni toutes les pièces justificatives requises par l' avis de concours, ont, sur leur réclamation, été finalement admis à concourir en raison du fait que les pièces manquantes figuraient dans leurs dossiers individuels, détenus par l' autorité investie du pouvoir de nomination ( ci-après "AIPN ").

    4 A l' issue des épreuves du concours, M . Hanning a été inscrit, avec 72 points, en tête de la liste d' aptitude du concours . Les trois autres candidats inscrits étaient les suivants : Mme Beck ( 69 points ), MM . Spence et Waters ( 63 points chacun ). Suivant le tableau de cotation, un cinquième candidat, M . Tate, avait obtenu, avec 58 points, le minimum de points nécessaires pour figurer sur la liste . Cette dernière ne devant comprendre qu' un maximum de quatre lauréats, il n' y avait cependant pas été inscrit .

    5 Après avoir été informé de son inscription sur la liste d' aptitude et après avoir passé, à la demande du Parlement, la visite médicale préalable à son engagement, M . Hanning a été informé, par lettre du 6 avril 1988, signée par le chef de la division du personnel, que le président du Parlement, "ayant noté des irrégularités au cours de la procédure" du concours, "avait jugé bon de ne pas procéder à une nomination et d' ouvrir au contraire un nouveau concours général sur titres et sur épreuves ".

    6 Le 17 juin 1988, le requérant a introduit, au titre de l' article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes ( ci-après "statut "), une réclamation contre cette décision auprès du président du Parlement .

    7 Le 30 mars 1988, le Parlement a publié un avis concernant l' organisation d' un nouveau concours général n PE/41a/A en vue de pourvoir le même poste ( JO C 82, p . 17 ). Le requérant a participé à ce concours . Sur la liste d' aptitude établie à l' issue de ce concours figuraient les quatre candidats suivants : M . Bond avec 80,5 points, le requérant avec 73 points, M . Holdsworth avec 72 points et M . Wood avec 70,5 points . M . Tate se trouvait, avec 66 points, encore une fois en cinquième position . Le concours a abouti à la nomination de M . Bond .

    8 Par requête enregistrée au greffe de la Cour le 29 juin 1988, transmise au Tribunal par ordonnance de la Cour du 15 novembre 1989, en application de l' article 14 de la décision du Conseil du 24 novembre 1988 instituant le Tribunal de première instance des Communautés européennes, M . Hanning a demandé l' annulation de la décision du président du Parlement contenue dans la lettre du 6 avril 1988, la reconnaissance de son droit à être nommé à la suite du concours n PE/41/A ainsi que la condamnation du Parlement à lui verser 1 BFR à titre de dommage moral et personnel et à lui rembourser intégralement les dommages matériels subis .

    9 Le Tribunal a relevé que, à l' appui de sa demande d' annulation, M . Hanning faisait valoir cinq moyens : en premier lieu, le Parlement aurait méconnu l' article 33 du statut; en second lieu, il aurait violé le principe de la confiance légitime; en troisième lieu, il aurait méconnu les conditions de retrait des actes administratifs; et en quatrième lieu, il aurait commis un détournement de pouvoir . Enfin, la motivation de la décision aurait été insuffisante et incorrecte .

    10 Après avoir écarté l' exception d' irrecevabilité opposée à la demande de M . Hanning par le Parlement ( point 23 de l' arrêt attaqué ), le Tribunal a analysé l' argumentation des parties sur les quatre premiers moyens et décidé d' examiner le moyen relatif à la motivation de l' acte attaqué ( points 37 et 38 ).

    11 Le Tribunal a jugé que la décision litigieuse était entachée d' une insuffisance de motivation ( point 40 ). Mais il a alors recherché si les explications données en cours d' instance par le Parlement pouvaient pallier cette insuffisance formelle et pouvaient donner un fondement légal à la décision attaquée ( points 41 à 44 ).

    12 Il a, tout d' abord, écarté le motif invoqué par le Parlement dans son mémoire en défense et tiré de ce que l' AIPN serait libre de clore la procédure de recrutement en relevant que, selon la jurisprudence de la Cour ( arrêt du 9 février 1984, Kohler/Cour des comptes, 316/82 et 40/83, Rec . p . 641 ), si l' AIPN n' est pas tenue de pourvoir un emploi vacant, elle ne peut clore une procédure de recrutement que pour des raisons sérieuses, clairement et complètement justifiées ( points 45 à 48 ).

    13 Il a, ensuite, examiné les motifs contenus dans l' avis du service juridique du Parlement en date du 9 février 1988, relatif aux réclamations formées contre la procédure du concours n PE/41/A, et que le Parlement a présentés dans son mémoire en duplique comme étant ceux de la décision attaquée .

    14 En premier lieu, le Tribunal a relevé que l' avis retenait à bon droit que MM . Spence et Waters avaient été irrégulièrement admis à concourir, dès lors qu' ils n' avaient pas fourni l' ensemble des pièces justificatives requises par l' avis de concours ( points 50 à 55 ).

    15 En second lieu, le Tribunal a estimé que, contrairement à ce qu' indiquait l' avis, aucune des réclamations formées contre le concours n PE/41/A n' était susceptible d' aboutir et donc de nature à justifier légalement l' annulation de ce concours par le Parlement ( points 56 à 67 ).

    16 En troisième lieu, le Tribunal a relevé que le Parlement avait examiné, à la lumière des arrêts du 23 octobre 1986, Schwiering/Cour des comptes ( 321/85, Rec . p . 3199 ) et Hoyer/Cour des comptes ( 322/85 et 323/85, Rec . p . 3215 ), l' incidence sur le concours de la circonstance que M . Tate avait été écarté de la liste d' aptitude en raison de l' inscription irrégulière de deux candidats et que le Parlement en avait déduit qu' il pouvait annuler le concours ( points 68 et 69 ).

    17 Le Tribunal a alors indiqué, aux points 70 et suivants de son arrêt, que :

    "70 Il convient de constater que les faits de la présente affaire se distinguent des circonstances dans lesquelles ont été rendus les arrêts Schwiering et Hoyer, précités . Dans ces dernières affaires, la procédure de concours était irrégulière parce que le jury avait refusé, à tort, d' admettre des candidats à concourir, alors qu' en l' espèce, l' irrégularité de la procédure du concours n PE/41/A résulte de l' admission à tort de deux candidats qui auraient dû être exclus . Or, s' il est vrai qu' en principe l' ensemble des opérations d' un concours se trouve nécessairement vicié en raison du refus illégal d' admettre un candidat, il n' en est pas de même dans l' hypothèse où un ou plusieurs candidats ont été admis à tort . Dans de telles circonstances, l' AIPN se trouve confrontée à une procédure de concours et à une liste d' aptitude dont les parties entachées d' irrégularités peuvent être dissociées des parties qui en sont exemptes . En l' espèce, seule la participation des candidats Spence et Waters au concours et leur inscription sur la liste d' aptitude ont été entachées d' illégalité . Les autres candidats ont valablement participé au concours et leur classement à son issue n' a pas été influencé par la participation illégale des deux candidats irrégulièrement admis .

    71 Si l' on transpose les solutions retenues par la Cour dans ses arrêts du 23 octobre 1986 ( Schwiering, 321/85 et Hoyer, 322/85 et 323/85, précités ) à la présente espèce, où la procédure de concours est partiellement viciée, il y a lieu d' en déduire que l' AIPN n' était pas liée par les décisions du jury, dans la mesure où celles-ci étaient illégales . Ceci n' implique cependant pas qu' elle se trouvait, pour cette raison, dans l' impossibilité de nommer un candidat à la suite du concours . Son devoir de ne prendre que des décisions exemptes d' illégalité lui interdisait seulement de procéder à la nomination de M . Spence ou de M . Waters qui, à cause des irrégularités du concours, n' auraient pas dû figurer sur la liste d' aptitude . En revanche, l' AIPN devait prendre en considération la possibilité d' une nomination du requérant qui y avait été valablement inscrit . Il convient d' ailleurs d' ajouter que l' AIPN devait également envisager la nomination éventuelle de Mme Beck, dont l' inscription sur la liste n' était également pas entachée d' illégalité .

    72 Confrontée à une telle situation, l' AIPN était tenue de respecter la jurisprudence de la Cour dans l' arrêt précité du 8 février 1984, Kohler ( 316/82 et 40/83 ). Suivant cette jurisprudence, l' AIPN devait prendre en considération, avant de passer outre aux résultats du concours, la possibilité de pourvoir au poste vacant par la nomination de l' un des lauréats inscrits régulièrement sur la liste . En premier lieu, elle devait donc examiner la possibilité de nommer le requérant qui avait été classé premier sur la liste d' aptitude ( voir les arrêts du 15 décembre 1966, Serio/Commission de la CEEA, 62/65, Rec . p . 813, 826 et suivantes; du 18 décembre 1986, Kotsonis/Conseil, 246/84, Rec . p . 3989, 4005 et suivantes ). En effet, si ces arrêts reconnaissent à l' AIPN le droit de ne pas respecter l' ordre précis résultant du concours pour des raisons qu' il lui appartient d' apprécier et de motiver devant la Cour, il convient de souligner qu' elle doit avoir des raisons tenant à l' intérêt du service pour nommer un autre candidat que celui classé premier . Même si l' AIPN avait pu constater que des raisons tenant à l' intérêt du service, autres que les irrégularités du concours, s' opposaient à la nomination du requérant, elle devait encore, selon la même jurisprudence, examiner la possibilité de nommer Mme Beck .

    73 Le Parlement devait inclure, dans cet examen de la possibilité de procéder à la nomination du requérant ou de Mme Beck, les mérites de M . Tate qui, à tort, n' avait pas été inscrit sur la liste d' aptitude du seul fait des irrégularités entachant le concours . L' article 30 du statut, qui ne permet que la nomination d' un candidat inscrit sur la liste d' aptitude, ne s' opposait qu' à la nomination éventuelle de M . Tate après un tel examen . L' AIPN pouvait donc valablement comparer M . Tate - le cinquième candidat ayant obtenu le minimum de points - au requérant et à Mme Beck dans le cadre d' un examen des raisons tenant à l' intérêt du service susceptibles de s' opposer à une nomination des deux candidats classés en tête de liste . Étant donné que l' AIPN n' a pas procédé à un tel examen, elle n' a pas exercé son pouvoir d' appréciation d' une manière légale .

    74 Ce n' est que dans l' hypothèse où le Parlement aurait valablement décidé que des raisons tenant à l' intérêt du service justifiaient la nomination de M . Tate, que l' article 30 du statut aurait fait obstacle à une telle décision . Si le Parlement, après avoir écarté, par une décision motivée, les nominations du requérant et de Mme Beck, avait voulu nommer M . Tate, il en aurait été empêché par les irrégularités entachant la procédure du concours . Dans cette hypothèse, une décision de passer outre aux résultats du concours aurait donc été justifiée par de sérieuses raisons . Faute d' avoir été précédée d' un examen de la possibilité de nommer le requérant ou Mme Beck, la décision attaquée est, par conséquent, entachée d' une erreur de droit ."

    18 En conclusion, le Tribunal a retenu que, le Parlement ne pouvant se prévaloir d' aucune raison sérieuse pour justifier la clôture de la procédure de concours, la décision attaquée n' était pas correctement motivée et devait, par suite, être annulée ( point 75 ).

    19 Pour demander l' annulation de cet arrêt, le Parlement fait valoir un moyen unique tiré de la méconnaissance par le Tribunal des droits et obligations de l' AIPN en matière de concours . Il soutient, d' une part, que le Tribunal a méconnu le principe suivant lequel l' AIPN ne peut procéder à des nominations sur la base d' une liste d' aptitude irrégulièrement établie . En l' espèce, la liste d' aptitude, sur laquelle figuraient deux candidats irrégulièrement admis à concourir, comme l' a constaté le Tribunal, était, selon lui, entachée de vices graves et ne pouvait servir de base à la nomination de M . Hanning . Le Parlement soutient, d' autre part, que, en imposant à l' AIPN de choisir un candidat sur une liste d' aptitude comportant moins de candidats que ne l' avait décidé le jury, afin de tenir compte des irrégularités qui entachaient cette liste, le Tribunal a méconnu le pouvoir d' appréciation dont disposait l' AIPN pour choisir le candidat à nommer et a substitué purement et simplement son appréciation à celle de l' AIPN .

    20 M . Hanning, qui souligne que le Tribunal a entendu censurer implicitement le détournement de pouvoir dont est entachée la décision litigieuse, soutient que l' arrêt attaqué est parfaitement conforme au statut des fonctionnaires et à la jurisprudence de la Cour . Il fait valoir, d' une part, que les irrégularités relevées n' entachaient pas la liste d' aptitude d' un vice suffisamment grave pour entraîner l' annulation du concours . Il fait valoir, d' autre part, que, en indiquant que le Parlement était tenu d' examiner la possibilité de nommer successivement les candidats régulièrement inscrits sur la liste d' aptitude puis de considérer les mérites du premier candidat non inscrit sur cette liste, avant de passer outre aux résultats du concours, le Tribunal s' est borné à indiquer au Parlement les règles à suivre pour tirer toutes les conséquences de son arrêt sans empiéter sur son pouvoir d' appréciation .

    21 Pour un plus ample exposé du déroulement de la procédure ainsi que des moyens et arguments des parties, il est renvoyé au rapport d' audience . Ces éléments du dossier ne sont repris ci-après que dans la mesure nécessaire au raisonnement de la Cour .

    22 La Cour a jugé, dans les arrêts du 23 octobre 1986, Schwiering/Cour des comptes, précité, points 11 et 12, et Hoyer/Cour des comptes, précité, points 12 et 13, que, si l' AIPN ne dispose pas du pouvoir d' annuler ou de modifier une décision prise par un jury de concours, elle est toutefois tenue de prendre des décisions exemptes d' illégalité dans l' exercice de ses propres compétences . Elle ne saurait donc se trouver liée par des décisions du jury dont l' illégalité serait susceptible d' entacher, par voie de conséquence, ses propres décisions .

    23 Il ressort de ce qui a été dit ci-avant que, dans l' arrêt attaqué, le Tribunal a relevé, d' une part, que MM . Spence et Waters avaient été irrégulièrement admis à concourir et, par conséquent, irrégulièrement inscrits sur la liste d' aptitude, d' autre part, que M . Tate, candidat ayant obtenu le minimum de points requis par l' avis de concours, n' avait pu être inscrit sur la liste d' aptitude sur laquelle figuraient déjà quatre candidats, nombre maximal autorisé par l' avis de concours, dont les deux candidats qui y avaient été inscrits irrégulièrement . Le Tribunal a toutefois estimé qu' avant de pouvoir annuler le concours le Parlement devait rechercher au préalable si son choix ne pouvait pas se porter sur l' un des deux candidats régulièrement inscrits sur la liste d' aptitude et comparer les mérites de M . Tate à ceux de ces derniers .

    24 Le Parlement est fondé à soutenir que, par cette motivation, le Tribunal n' a pas légalement justifié son arrêt .

    25 D' une part, l' inscription sur la liste d' aptitude, limitée à quatre noms au maximum, de deux candidats qui, admis à tort à concourir, n' auraient pas dû y figurer a irrégulièrement privé M . Tate, qui avait obtenu le nombre de points nécessaires pour prétendre y figurer, de la possibilité d' être inscrit par le jury sur cette liste puis de la possibilité d' être choisi par le Parlement pour occuper le poste à pourvoir .

    26 Contrairement à ce qu' a retenu le Tribunal, au point 73 de son arrêt, le Parlement n' avait pas à et ne pouvait pas, sans substituer illégalement sa compétence à celle du jury, prendre en considération la candidature de M . Tate, dès lors que celui-ci ne figurait pas sur la liste d' aptitude et ne pouvait pas, par conséquent, être nommé .

    27 D' autre part, il résulte des articles 27 à 30 du statut que la liste d' aptitude établie par le jury a pour objet de permettre à l' AIPN de choisir le candidat qui lui paraît le plus apte à exercer les fonctions afférentes à l' emploi à pourvoir .

    28 L' AIPN peut, à cette fin, s' écarter de l' ordre des candidats tel qu' il figure sur la liste d' aptitude établie par le jury, pour des raisons qu' il lui appartient d' apprécier et, le cas échéant, de motiver devant le juge communautaire, à condition toutefois de ne pas annihiler la notion même du concours, en s' écartant substantiellement du résultat de celui-ci sans de sérieuses raisons ( arrêt du 18 décembre 1986, Kotsonis/Conseil, point 9, 246/84, Rec . p . 3989 ).

    29 C' est d' ailleurs pour faciliter la décision de l' AIPN que l' article 5, paragraphe 5, de l' annexe III du statut prévoit que le jury doit, dans toute la mesure du possible, établir une liste comportant un nombre de candidats au moins double du nombre des emplois mis au concours . En l' espèce, il convient de souligner que l' avis de concours prévoyait même expressément que la liste d' aptitude pourrait comporter jusqu' à quatre candidats .

    30 Lorsque des candidats sont irrégulièrement inscrits sur une liste d' aptitude, notamment parce qu' ils ont été irrégulièrement admis à concourir, l' AIPN ne peut pas les nommer et ses possibilités de choix sont réduites d' autant . Le pouvoir d' appréciation de l' AIPN se trouve ainsi limité de manière irrégulière .

    31 En l' espèce, les possibilités de choix de l' AIPN ont été réduites de moitié, puisque deux candidats sur les quatre inscrits par le jury sur la liste d' aptitude ne pouvaient pas être nommés .

    32 Il résulte de ce qui précède que les opérations du concours étaient entachées d' irrégularité et que le Parlement a pu légalement procéder à leur annulation .

    33 Ainsi, en retenant, pour les motifs indiqués ci-avant au point 17 et résumés au point 23, que la décision du Parlement n' était pas légalement justifiée, le Tribunal a commis une erreur de droit .

    34 Le point 1 du dispositif de l' arrêt attaqué doit, par suite, être annulé .

    35 Aux termes de l' article 54, premier alinéa, du statut CEE de la Cour : "Lorsque le pourvoi est fondé, la Cour annule la décision du Tribunal . Elle peut alors soit statuer elle-même définitivement sur le litige, lorsque celui-ci est en état d' être jugé, soit renvoyer l' affaire devant le Tribunal pour qu' il statue ."

    36 Ainsi qu' il vient d' être dit ci-avant, au point 32, les opérations du concours litigieux étaient irrégulières dans leur ensemble et le Parlement a pu légalement procéder à leur annulation .

    37 Le Parlement ayant décidé à bon droit d' annuler le concours, les conclusions présentées par M . Hanning devant le Tribunal, qui tendent à obtenir l' annulation de cette décision, ne peuvent qu' être rejetées .

    38 Il y a lieu, dans ces conditions, de statuer définitivement sur le litige en application des dispositions de l' article 54, premier alinéa, du statut CEE de la Cour, et de rejeter les conclusions de la requête de M . Hanning tendant, d' une part, à l' annulation de la décision du président du Parlement, en date du 19 février 1988, de passer outre aux résultats du concours n PE/41/A et d' ouvrir un nouveau concours, d' autre part, à l' annulation de la décision implicite du Parlement rejetant sa réclamation du 17 juin 1988 contre cette décision .

    Décisions sur les dépenses


    Sur les dépens

    39 Aux termes de l' article 69, paragraphe 2, du réglement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens .

    40 Il convient de relever, d' une part, que les conclusions à fin d' annulation présentées par M . Hanning devant le Tribunal doivent être rejetées, ainsi qu' il est dit ci-avant, au point 38, et, d' autre part, que le point 2 du dispositif de l' arrêt du Tribunal rejetant le surplus des conclusions du recours de M . Hanning n' a pas fait l' objet d' un pourvoi . Dès lors, M . Hanning doit être regardé comme ayant succombé en ses moyens .

    41 Toutefois, il résulte des dispositions combinées des articles 122 et 70 du même règlement que les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci lorsqu' elles sont à l' origine du pourvoi .

    42 Il y a lieu, par suite, de faire supporter à chaque partie ses propres dépens afférents à la présente instance ainsi qu' à celle engagée devant le Tribunal et d' annuler le point 3 du dispositif de l' arrêt du Tribunal .

    Dispositif


    Par ces motifs,

    LA COUR ( troisième chambre )

    déclare et arrête :

    1 ) Les points 1 et 3 du dispositif de l' arrêt du Tribunal de première instance du 20 septembre 1990, Hanning/Parlement ( T-37/89, Rec . p . II-463 ) sont annulés .

    2 ) Les conclusions de la requête de M . Hanning tendant à l' annulation, d' une part, de la décision du président du Parlement européen, en date du 19 février 1988, de passer outre aux résultats du concours n PE/41/A et d' organiser un nouveau concours, d' autre part, de la décision implicite du Parlement européen rejetant la réclamation de M . Hanning du 17 juin 1988 contre cette décision sont rejetées .

    3 ) Chacune des parties supportera ses propres dépens afférents à la présente instance et à celle engagée devant le Tribunal .

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