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Document 61989TJ0132

    Arrêt du Tribunal de première instance (quatrième chambre) du 16 octobre 1990.
    Vincenzo Gallone contre Conseil des Communautés européennes.
    Fonctionnaire - Concours - Opérations de concours - Secret et contenu des épreuves écrites - Refus d'admission aux épreuves orales.
    Affaire T-132/89.

    Recueil de jurisprudence 1990 II-00549

    ECLI identifier: ECLI:EU:T:1990:60

    61989A0132

    Arrêt du Tribunal de première instance (quatrième chambre) du 16 octobre 1990. - Vincenzo Gallone contre Conseil des Communautés européennes. - Fonctionnaire - Concours - Opérations de concours - Secret et contenu des épreuves écrites - Refus d'admission aux épreuves orales. - Affaire T-132/89.

    Recueil de jurisprudence 1990 page II-00549


    Sommaire
    Parties
    Motifs de l'arrêt
    Décisions sur les dépenses
    Dispositif

    Mots clés


    ++++

    1 . Fonctionnaires - Recours - Recours dirigé contre une décision d' un jury de concours - Moyens tirés de l' irrégularité de l' avis de concours non contesté en temps utile - Irrecevabilité - Limites - Irrégularité apparue lors du déroulement du concours

    ( Statut des fonctionnaires, art . 91 )

    2 . Fonctionnaires - Recrutement - Concours - Concours sur titres et épreuves - Conditions d' admission et modalités - Pouvoir d' appréciation de l' autorité investie du pouvoir de nomination - Modalités et contenu des épreuves - Pouvoir d' appréciation du jury - Contrôle juridictionnel - Limites

    ( Statut des fonctionnaires, annexe III )

    3 . Fonctionnaires - Recrutement - Concours - Jury - Recours à des assesseurs - Admissibilité - Conditions

    ( Statut des fonctionnaires, annexe III, art . 3, alinéa 2 )

    4 . Fonctionnaires - Recrutement - Concours - Concours sur titres et épreuves - Égalité de traitement des candidats à un concours général - Traduction de certaines copies d' épreuves avant correction - Dates et contenu différents des épreuves orales - Discrimination - Absence

    Sommaire


    1 . Un fonctionnaire ne saurait, à l' appui d' un recours dirigé contre une décision d' un jury de concours, invoquer des moyens tirés de la prétendue irrégularité de l' avis de concours dont il n' a pas attaqué en temps utile les dispositions qu' il estime lui faire grief .

    Tel ne saurait cependant être le cas lorsque le fonctionnaire se prévaut d' irrégularités dont l' origine peut être trouvée dans le texte de l' avis de concours, mais qui sont intervenues lors du déroulement de celui-ci .

    2 . Le rôle essentiel de l' avis de concours consiste à informer les intéressés d' une façon aussi exacte que possible de la nature des conditions requises pour occuper le poste dont il s' agit, afin de les mettre en mesure d' apprécier s' il y a lieu pour eux de faire acte de candidature . L' autorité investie du pouvoir de nomination dispose d' un large pouvoir d' appréciation pour déterminer les capacités nécessaires pour occuper les emplois à pourvoir et pour arrêter, en fonction de celles-ci et dans l' intérêt du service, les conditions et les modalités d' organisation d' un concours . Le jury dispose également d' un large pouvoir d' appréciation quant aux modalités et au contenu détaillé des épreuves prévues dans le cadre d' un concours .

    Le Tribunal ne saurait censurer les modalités du déroulement d' une épreuve que dans la mesure nécessaire pour assurer le traitementégal des candidats et l' objectivité du choix opéré entre ceux-ci . Il n' appartient pas davantage au Tribunal de censurer le contenu détaillé d' une épreuve, sauf si celui-ci dépasse le cadre défini par l' avis de concours ou n' a pas de commune mesure avec les finalités de l' épreuve ou du concours .

    3 . Le jury peut recourir à l' assistance d' assesseurs dans tous les cas où il l' estime nécessaire . La régularité des opérations est respectée dès lors que les méthodes de correction ne diffèrent pas selon les candidats et que le jury conserve le pouvoir d' appréciation final .

    4 . Un concours général ouvert à des candidats de tous les États membres ne pourrait se dérouler en conformité avec le principe d' égalité de traitement sans que les membres du jury et les assesseurs qui ne connaissent pas la langue de certains candidats disposent d' une traduction de leurs copies . Le seul fait que certaines copies sont traduites avant d' être notées n' implique pas en soi une discrimination entre les candidats .

    Par ailleurs, si le principe d' égalité impose que les épreuves écrites se déroulent à la même date pour tous les candidats, une telle condition ne saurait être imposée pour les épreuves orales qui, par leur nature, ne peuvent avoir lieu pour tous les candidats au même moment et qui, d' ailleurs, n' ont pas nécessairement le même contenu pour tous les candidats .

    Parties


    Dans l' affaire T-132/89,

    Vincenzo Gallone, fonctionnaire du Conseil des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles, représenté par Me Georges Vandersanden, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l' étude de Me Alex Schmitt, 62, avenue Guillaume,

    partie requérante,

    contre

    Conseil des Communautés européennes, représenté par M . Gijs Peeters, conseiller au service juridique, en qualité d' agent, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M . Joerg Kaeser, directeur de la direction des affaires juridiques de la Banque européenne d' investissement, 100, boulevard Konrad Adenauer,

    partie défenderesse,

    ayant pour objet l' annulation des opérations du concours général Conseil/A/281 ( administrateurs/analystes-informaticiens ) ou, à tout le moins, de la décision du jury de concours de ne pas admettre le requérant à participer aux épreuves orales dudit concours,

    LE TRIBUNAL ( quatrième chambre ),

    composé de MM . D . A . O . Edward, président, R . Schintgen et R . García-Valdecasas, juges,

    greffier : M . H . Jung

    vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 12 juillet 1990,

    rend le présent

    Arrêt

    Motifs de l'arrêt


    Les faits à l' origine du recours

    1 Le requérant, M . Vincenzo Gallone, est fonctionnaire de catégorie B à la division "nouvelles technologies" du Conseil . Il a posé sa candidature au concours général ( analystes-informaticiens ) Conseil/A/281, dont l' avis a été publié le 31 mai 1988 ( JO C 142, p . 8 ) et qui avait pour objet la constitution d' une liste de réserve de recrutement d' administrateurs de catégorie A chargés de tâches informatiques .

    2 Le point II de l' avis de concours décrivait la "nature des fonctions" en ces termes :

    "Les fonctions à exercer se décrivent formellement comme suit : accomplir des tâches de conception, d' étude ou de contrôle sur la base de directives générales, ou assister le responsable d' un secteur d' activité d' une division .

    Dans la pratique, elles consisteront, en tant qu' analyste-programmeur, à établir les dossiers d' analyse et à superviser la programmation et le suivi des applications dans les domaines de l' informatique administrative et/ou de la bureautique sur desconfigurations de taille moyenne opérant en mode transactionnel et/ou par lot ."

    3 Le point IV de l' avis précisait les "nature et notation des épreuves" sous trois rubriques intitulées : "IV a ) épreuves écrites", "IV b ) admission aux épreuves orales" et "IV c ) épreuves orales ". La rubrique IV a ) indiquait qu' il y aurait trois épreuves écrites et spécifiait que "chaque épreuve est éliminatoire ".

    4 La nature des trois épreuves écrites ( ci-après "épreuve écrite 1", "2" ou "3 ") était énoncée comme suit :

    "1 . Épreuve dans la langue officielle des Communautés dont le candidat possède une connaissance approfondie, comportant une partie théorique portant sur les méthodes et techniques décisionnelles ( statistique, recherche opérationnelle, économétrie ) et une partie pratique ( étude de cas ), éventuellement sous forme de questionnaire, afin d' apprécier les connaissances professionnelles du candidat dans le domaine de l' analyse d' un problème en vue de l' établissement d' une programmation complète .

    2 . Épreuve, dans cette même langue, sur un sujet se rapportant aux fonctions décrites au point II ci-dessus, afin d' apprécier le niveau des connaissances professionnelles du candidat .

    3 . Bref exposé écrit, dans une autre langue officielle des Communautés, au choix du candidat sur un sujet de caractère général, afin d' apprécier dans quelle mesure le candidat est apte à rédiger dans une seconde langue ."

    5 Enfin, sous le point IV b ), "admission aux épreuves orales", il était précisé :

    "Pour être admis aux épreuves orales, les candidats devront avoir obtenu au moins 24 sur 40 pour l' épreuve écrite no 1, 18 sur 30 pour l' épreuve écrite no 2, et 12 sur 20 pour l' épreuve écrite no 3 ."

    6 Les titres du requérant ayant été reconnus suffisants, il a été admis aux épreuves écrites par le jury et s' y est présenté le 16 mars 1989 . Selon le rapport adressé par le jury à l' autorité investie du pouvoir de nomination ( ci-après "AIPN ") le 6 juillet 1989, ces épreuves ont eu lieu à Athènes, Bruxelles, Florence et Madrid . 336 candidats y ont participé .

    7 La correction des copies s' est déroulée selon la procédure suivante . Elle a d' abord porté sur les copies de l' épreuve linguistique ( épreuve écrite 3 ) et a abouti à l' élimination de deux tiers des candidats, n' en laissant subsister qu' une centaine . Pour les épreuves 1 et 2, les copies étaient en principe divisées en deux groupes . Les copies en langues anglaise, française et néerlandaise ont été corrigées dans leur version originale, et les candidats qui ont obtenu le nombre de points requis ont été admis aux épreuves orales les 19, 20 et 21 juin 1989 .

    8 Dans le cas des copies rédigées en langue italienne, telles que celle du requérant, la première partie de l' épreuve écrite 1 a été corrigée dans la version originale . La deuxième partie de cette épreuve ainsi que l' épreuve 2 ont été traduites avant d' être corrigées . A l' issue de la correction des épreuves écrites, 28 candidats ont été admis à participer aux épreuves orales qui ont eu lieu les 5 et 6 juillet 1989 .

    9 Au début du mois de mai 1989, le requérant, responsable au sein du Conseil du projet de traitement de textes, a été consulté au sujet de la dactylographie des épreuves de ce même concours . A cette occasion, il a pu visionner sur écran certaines copies des candidats italiens, y compris la sienne .

    10 Le 28 juin 1989, le requérant a été informé par lettre du service de recrutement du Conseil que, compte tenu du résultat des épreuves écrites, le jury ne l' avait pas admis aux épreuves orales .

    11 Le même jour, le requérant a adressé au président du jury une lettre attirant son attention sur "diverses irrégularités dans les corrections" des épreuves écrites . Par note du 29 juin 1989, le président du jury l' a assuré du respect scrupuleux des règles de confidentialité et de non-discrimination entre les candidats et l' a invité à motiver plus précisément les raisons qui étaient à la base de son appréciation .

    La procédure

    12 C' est dans ces conditions que, par requête déposée au greffe de la Cour le 22 août 1989, M . Gallone a introduit le présent recours contre le Conseil, qui a été inscrit sous le numéro 264/89 .

    13 Alors que la procédure écrite n' était pas terminée, par ordonnance du 15 novembre 1989, la Cour ( troisième chambre ), en application de l' article 3, paragraphe 1, de la décision du Conseil du 24 octobre 1988, instituant un Tribunal de première instance des Communautés européennes, a renvoyé l' affaire 264/89 devant le Tribunal, où elle a été inscrite sous le numéro T-132/89 . La procédure écrite s' est dès lors déroulée devant le Tribunal .

    14 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal ( quatrième chambre ) a décidé d' ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d' instruction préalables .

    15 La procédure orale s' est déroulée le 12 juillet 1990 . Les représentants des parties ont été entendus en leur plaidoirie et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal .

    16 La partie requérante conclut à ce qu' il plaise au Tribunal :

    - déclarer le recours recevable et fondé;

    - ordonner, si nécessaire, la désignation d' un expert aux fins de déterminer l' adéquation des épreuves telles qu' elles se sont déroulées aux exigences de l' avis de concours et leur pertinence pour apprécier les qualités d' un analyste-informaticien;

    - annuler les opérations du concours général Conseil A/281 ( 88/C 142/09 ) ou, à tout le moins, la décision du jury dudit concours de ne pas admettre le requérant aux épreuves orales;

    - condamner le défendeur à l' ensemble des dépens .

    17 Le Conseil conclut à ce qu' il plaise au Tribunal :

    - rejeter le recours;

    - condamner le requérant dans tous les dépens .

    Sur le fond

    18 A l' appui de ses conclusions, le requérant invoque trois moyens tirés respectivement d' une prétendue violation des principes de bonne gestion et de saine administration, d' uneprétendue violation du principe de non-discrimination et d' une prétendue violation des spécifications de l' avis de concours . Le Tribunal estime qu' il convient d' examiner ces moyens dans l' ordre inverse .

    Sur le moyen tiré de la violation des spécifications de l' avis de concours

    19 Ce moyen s' articule en deux branches . En premier lieu, le requérant prétend que les spécifications de l' avis de concours ne correspondaient pas au profil des postes à pourvoir, à savoir le recrutement d' analystes-informaticiens . Le Conseil répond que, si le requérant avait voulu contester l' avis de concours, il aurait dû attaquer la décision de l' AIPN qui l' a établi .

    20 Il est vrai que, selon la jurisprudence de la Cour ( arrêts du 11 mars 1986, Adams/Commission, 294/84, Rec . p . 977; du 8 mars 1988, Sergio e.a./Commission, 64/86, 71/86 à 73/86 et 78/86, Rec . p . 1399; et du 6 juillet 1988, Agazzi Léonard/Commission, 181/87, Rec . p . 3823 ), un fonctionnaire ne saurait, à l' appui d' un recours dirigé contre une décision d' un jury de concours, invoquer des moyens tirés de la prétendue irrégularité de l' avis de concours, alors qu' il n' a pas attaqué en temps utile les dispositions de l' avis qu' il estime lui faire grief . Tel ne saurait être le cas cependant lorsque le fonctionnaire se prévaut d' irrégularités dont l' origine peut être trouvée dans le texte de l' avis de concours, mais qui sont intervenues lors du déroulement du concours .

    21 En l' espèce, il suffit de constater que la prétendue irrégularité dont se prévaut le requérant n' est pas intervenue lors du déroulement du concours . La première branche de ce moyen doit donc être rejetée .

    22 En second lieu, le requérant fait valoir que les épreuves elles-mêmes n' étaient en relation ni avec la description des épreuves ( point IV de l' avis de concours ), ni avec le profil des postes à pourvoir ( point II dudit avis ).

    23 Pour étayer son argumentation, le requérant développe quelques exemples de cette prétendue disparité . Il fait valoir :

    - qu' aucune question n' a porté sur l' analyse, contrairement au point IV a ) 1 de l' avis;

    - que les questions de statistique, recherche opérationnelle et économétrie ont été exclusivement d' ordre pratique, contrairement au point IV a ) 1 de l' avis;

    - qu' il y a eu des questions de programmation, alors qu' il ne s' agissait pas d' un concours de programmeurs ainsi que le précisait le point II de l' avis .

    24 En outre, selon le requérant, les questions étaient mal adaptées à l' objet du concours et trop fortement influencées par l' assesseur/expert désigné par le jury . Cet assesseur, poursuit le requérant, n' était pas analyste, mais le seul membre informaticien du jury . Le requérant demande au Tribunal de désigner, si nécessaire, un expert afin de déterminer si les questions posées aux épreuves écrites étaient conformes non seulement à l' avis de concours, mais également aux critères permettant d' apprécier les qualités d' un analyste-informaticien .

    25 En réponse à ces arguments, le Conseil expose que le concours en cause était le premier concours destiné au recrutement d' informaticiens de niveau universitaire . Tout en reconnaissant l' intérêt personnel du candidat à ne pas se voir confronté à desépreuves ne correspondant pas à ce qui a été prévu par l' avis de concours, le Conseil conteste qu' il y ait eu une faute manifeste à cet égard de la part du Conseil . Quant aux exemples offerts par le requérant, le Conseil prétend que la première question de la deuxième partie de l' épreuve écrite 1 relevait incontestablement du domaine de l' analyse; que la connaissance d' une théorie peut être vérifiée soit par des questions portant sur cette théorie, soit par des questions ayant trait à son application; et qu' une épreuve visant à vérifier les connaissances d' un analyste-informaticien peut très bien comporter plus que des questions d' analyse .

    26 Quant à la prétendue influence excessive de l' assesseur, le Conseil rétorque que la compétence du jury a été assurée par la présence dans le jury même d' un expert informaticien et par l' assistance d' un assesseur . En outre, le recrutement des fonctionnaires de catégorie A au secrétariat général du Conseil devrait s' effectuer en fonction de considérations plus vastes que l' expertise technique .

    27 A cet égard, il convient, liminairement, de rappeler que le rôle essentiel de l' avis de concours consiste à informer les intéressés d' une façon aussi exacte que possible de la nature des conditions requises pour occuper le poste dont il s' agit, afin de les mettre en mesure d' apprécier s' il y a lieu pour eux de faire acte de candidature . L' AIPN dispose d' un large pouvoir d' appréciation pour déterminer les critères de capacité exigés par les emplois à pourvoir et pour déterminer, en fonction de ces critères et dans l' intérêt du service, les conditions et modalités d' organisation d' un concours . Le jury également dispose d' un large pourvoir d' appréciation quant aux modalités et au contenu détaillé des épreuves prévues dans le cadre d' un concours . Le Tribunal ne saurait censurer les modalités du déroulement d' uneépreuve que dans la mesure nécessaire pour assurer le traitement égal des candidats et l' objectivité du choix opéré entre ceux-ci . Il n' appartient pas davantage au Tribunal de censurer le contenu détaillé d' une épreuve, sauf si celui-ci sort du cadre indiqué dans l' avis de concours ou n' a pas de commune mesure avec les finalités de l' épreuve ou du concours ( voir les arrêts de la Cour du 16 octobre 1975, Deboeck/Commission, 90/74, Rec . p . 1123; du 28 juin 1979, Anselme/Commission, 255/78, Rec . p . 2323; du 1er octobre 1981, Guglielmi/Parlement, 268/80, Rec . p . 2295; du 18 février 1982, Ruske/Commission, 67/81, Rec . p . 661; du 14 juillet 1983, Detti/Cour de justice, 144/82, Rec . p . 2421; du 9 février 1984, Fabius/Commission, 39/83, Rec . p . 627; du 16 juin 1987, Kolivas/Commission, 40/86, Rec . p . 2643; du 8 mars 1988, Sergio e.a ., 64/86, 71/86 à 73/86 et 78/86, précité; et du 24 mars 1988, Goossens/Commission, 228/86, Rec . p . 1819 ).

    28 Quant au rôle et à l' influence de l' assesseur, il est constant que le jury peut recourir à l' assistance d' assesseurs dans tous les cas où il estime cette assistance nécessaire . La régularité des opérations est respectée dès lors que les méthodes de correction ne diffèrent pas selon les candidats et que le jury conserve le pouvoir d' appréciation final ( voir les arrêts de la Cour du 16 octobre 75, Deboeck, 90/74, précité; du 26 octobre 1978, Agneessens/Commission, 122/77, Rec . p . 2085; et du 16 juin 1987, Kolivas, 40/86, précité ).

    29 A la lumière de cet ensemble de considérations, il y a lieu de constater que les griefs formulés par le requérant ne font pas apparaître que les opérations du concours en cause se sont déroulées en méconnaissance des limites imposées par le statut des fonctionnaires et la jurisprudence au pouvoir d' appréciation du jury . La deuxième branche de ce moyen doit donc être rejetée .

    Sur la violation du principe de non-discrimination

    30 Pour étayer ce moyen, le requérant formule en substance deux griefs . En premier lieu, il soutient que le fait de traiter, au moment de la correction, les copies d' une manière différente selon la langue du candidat était discriminatoire :

    - d' une part, parce qu' il n' y avait aucune garantie que les traductions soumises au jury correspondaient bien aux copies originales et,

    - d' autre part, parce que le décalage enregistré lors de la correction des épreuves écrites et du déroulement des épreuves orales, qui ont eu lieu, respectivement, du 19 au 21 juin, puis du 5 au 6 juillet 1989, pouvait permettre aux candidats du deuxième groupe de profiter des expériences du premier .

    31 En second lieu, le requérant prétend que sa copie de l' épreuve écrite 2, qu' il a vue à l' écran, était tout aussi valable que celles remises par d' autres candidats de langue italienne, admis aux épreuves orales, qu' il a pu également visionner à l' écran .

    32 Le Conseil répond au premier argument que, pour autant que les copies comportaient des formules mathématiques ou des schémas informatiques, les membres du jury et les assesseurs disposaient non seulement du document traduit, mais aussi de la photocopie du document original . Dans les autres cas, ils auraient toujours eu la possibilité, en cas de doute, de se reporter aux photocopies des documents originaux qui étaient à leur disposition .

    33 Quant au deuxième argument, le Conseil explique que la procédure nécessaire à la correction des copies dans les différentes langues a donné lieu à un décalage entre la correction des épreuves par l' expert et leur évaluation par le jury . Les résultats des épreuves écrites auraient été communiqués par le jury à l' administration dès qu' ils auraient été disponibles, à savoir le 29 mai 1989 pour le premier groupe et le 26 juin 1989 pour le deuxième groupe . Ainsi les candidats du premier groupe auraient-ils pu être convoqués pour l' épreuve orale plus tôt que ceux du deuxième groupe . En tout état de cause, un jury n' aurait jamais été en mesure d' examiner tous les candidats dans une seule journée . Selon le Conseil, rien n' indique que le décalage incriminé a eu pour résultat que les copies ont été notées d' une manière différente ou discriminatoire, ou que les candidats du deuxième groupe, dont le requérant, ont été privilégiés .

    34 Quant au troisième argument, le Conseil rétorque que, selon le requérant, les copies qu' il a visionnées à l' écran étaient celles de l' épreuve écrite 2 . Dans le cas du requérant, la copie de cette épreuve n' aurait pas été notée par le jury du fait que l' insuffisance du résultat obtenu à l' épreuve écrite 1 avait déjà entraîné son élimination du concours, chaque épreuve étant éliminatoire . En tout état de cause, le nombre de points obtenus par les autres candidats de langue italienne serait comparable aux notes moyennes de l' ensemble des candidats du premier tour .

    35 Si le principe d' égalité constitue un principe fondamental lors du déroulement d' un concours ( arrêt de la Cour du 27 octobre 1976, Prais/Conseil, 130/75, Rec . p . 1589 ), il est toutefois évident qu' un concours de recrutement ouvert à des candidats de tous les États membres, tel que le présent, ne pourrait se dérouler en conformité avec ce même principe sans que les membres du jury et les assesseurs qui ne connaissent pas la langue decertains candidats disposent d' une traduction de leurs copies . Le seul fait que certaines copies sont traduites avant d' être notées n' implique pas en soi une discrimination entre les candidats . En l' espèce, le requérant n' a pas rapporté la preuve que la traduction des copies ait causé aux candidats de langue italienne et, moins encore, à lui-même un préjudice spécifique . Ce premier argument doit donc être écarté .

    36 En ce qui concerne l' argument tiré du décalage entre les dates des épreuves orales, il y a lieu de relever que, si le principe d' égalité impose que les épreuves écrites se déroulent à la même date pour tous les candidats ( arrêt du 27 octobre 1976, Prais, 130/75, précité ), une telle condition ne saurait être imposée pour les épreuves orales qui, par leur nature, ne peuvent avoir lieu pour tous les candidats au même moment et qui, d' ailleurs, n' ont pas nécessairement le même contenu pour tous les candidats . En l' espèce, il n' apparaît pas que le décalage enregistré lors de la correction des épreuves écrites et du déroulement des épreuves orales ait été excessif . De plus, selon l' argument du requérant, ce sont les candidats de langues autres que l' anglais, le français et le néerlandais, candidats parmi lesquels se trouvait le requérant lui-même, qui ont été privilégiés pour autant qu' ils aient pu profiter des expériences d' autres candidats . Enfin, le requérant ayant été éliminé au stade des épreuves écrites n' a pas d' intérêt à invoquer cet argument qui doit donc être rejeté .

    37 Quant à l' argument du requérant selon lequel ses réponses à l' épreuve écrite 2 n' étaient pas moins valables que celles d' autres candidats qu' il a pu visionner à l' écran, il suffit de constater que le requérant, ayant été éliminé des épreuves écrites à cause de l' insuffisance de ses résultats à l' épreuve écrite 1, ne justifie pas d' un intérêt à invoquer cet argument .

    38 Pour toutes ces raisons, le deuxième moyen ne peut être accueilli .

    Sur la violation des principes de bonne gestion et de saine administration

    39 Le requérant prétend que le Conseil n' a pris aucune mesure, lors des opérations internes de dactylographie et de correction des épreuves, pour éviter qu' un candidat interne, ayant accès au système de traitement de textes, ne puisse prendre connaissance des copies des autres candidats, les comparer avec la sienne et procéder à des modifications de ses propres réponses ou de celles des autres candidats . Cette absence de précautions, notamment de confidentialité, aurait nui d' une manière fondamentale à l' objectivité des opérations du concours, entraînant sa nullité absolue .

    40 Lors de la procédure orale, le Conseil a reconnu qu' il y a eu des problèmes lors de la correction des épreuves écrites de ce concours, le premier organisé par le Conseil en vue du recrutement d' informaticiens de niveau universitaire . Cependant, le Conseil affirme que les copies ont été relues et comparées à chaque stade, qu' elles ont été traitées dans l' anonymat absolu quant à leurs auteurs et que, par conséquent, seuls ces derniers ont été en mesure de s' identifier . De plus, le comportement du requérant constituerait une violation, dans son propre chef, de l' article 14 du statut, lequel fait obligation au fonctionnaire amené à se prononcer sur une affaire au traitement de laquelle il a un intérêt personnel d' en informer l' AIPN . En tout état de cause, le requérant ayant échoué à l' épreuve écrite 1, qui a été corrigée sans traduction, et cette épreuve ayant été éliminatoire, ilaurait dû être éliminé quelle que soit la manière dont l' épreuve écrite 2 aurait été corrigée .

    41 Il importe, cependant, de relever que le Conseil a annexé à son mémoire en défense deux rapports du jury, dont un, le rapport complémentaire du 26 octobre 1989, fait état des "vives préoccupations" du jury en ce qui concerne la confidentialité de ses travaux et demande à l' AIPN d' ouvrir une enquête sur les circonstances à l' origine du recours et de prendre toute mesure propre à remédier aux carences ou manquements observés . Le requérant se fonde sur ces éléments dans son mémoire en réplique .

    42 Le Tribunal ne peut que déplorer que le requérant, candidat interne à un concours général externe, ait été en mesure d' avoir accès à sa propre copie à la suite d' une épreuve écrite et, plus encore, aux copies d' autres candidats . Cependant, pour avoir gain de cause, le requérant devrait ou bien rapporter la preuve d' une atteinte spécifique à ses intérêts subjectifs, ou bien justifier d' un intérêt objectif à l' annulation de toutes les opérations du concours - ou, à tout le moins, de l' ensemble des épreuves écrites et orales -, en raison d' une violation grave et manifeste des principes de bonne gestion et de saine administration portant atteinte aux droits de tous les candidats .

    43 Ainsi qu' il a été relevé ci-dessus, le requérant a été éliminé des épreuves écrites à cause de l' insuffisance de ses résultats à l' épreuve 1 . Il ne semble pas que les copies de cette épreuve aient été accessibles à un candidat interne, et le requérant n' a aucunement établi que les réponses figurant sur sa copie aient été déformées de quelque manière que ce soit postérieurement au déroulement de ladite épreuve . Il en résulte qu' il ne peut pas faire état d' une atteinte à ses intérêts subjectifs .

    44 En ce qui concerne le prétendu intérêt objectif à l' annulation du concours, il est à noter que le requérant, la seule personne consciente de la possibilité pour un candidat interne de manipuler les copies, n' a pas cru utile, ni même urgent, d' attirer l' attention des ses supérieurs hiérarchiques sur cette possibilité . Il est mal venu, n' ayant pas réagi au moment opportun, de demander à présent l' annulation de toutes les opérations du concours au préjudice des candidats qui y ont réussi . Dans ces circonstances, le Tribunal, tout en déplorant ce qui s' est passé, n' estime pas qu' il y a eu une violation du principe de bonne gestion suffisamment grave pour entraîner l' annulation du concours . Ce moyen doit donc également être écarté .

    45 Il résulte de l' ensemble des considérations qui précèdent que le recours doit être rejeté .

    Décisions sur les dépenses


    Sur les dépens

    46 Aux termes de l' article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, applicable mutatis mutandis au Tribunal en vertu de l' article 11, troisième alinéa, de la décision du Conseil du 24 octobre 1988, précitée, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s' il est conclu en ce sens . Toutefois, selon l' article 70 dudit règlement, les frais exposés par les institutions dans les recours des agents des Communautés restent à la charge de celles-ci .

    Dispositif


    Par ces motifs,

    LE TRIBUNAL ( quatrième chambre )

    déclare et arrête :

    1 ) Le recours est rejeté .

    2 ) Chacune des parties supportera ses propres dépens .

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