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Document 61980CC0193

Conclusions de l'avocat général Sir Gordon Slynn présentées le 15 septembre 1981.
Commission des Communautés européennes contre République italienne.
Manquement - Mesures d'effet équivalent - Vinaigre.
Affaire 193/80.

Recueil de jurisprudence 1981 -03019

ECLI identifier: ECLI:EU:C:1981:193

CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL

SIR GORDON SLYNN,

PRÉSENTÉES LE15 SEPTEMBRE 1981 ( 1 )

Monsieur le Président,

Messieurs,

Dans cette procédure, entamée au titre de l'article 169 du traité CEE, la Commission soutient qu'en interdisant l'importation et la commercialisation, sous la dénomination «vinaigre» (en italien «aceto»), du vinaigre autre qu'à base de vin, la République italienne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du traité et en particulier de ses articles 30 à 36.

En Italie, la production et la commercialisation du vinaigre sont régies par la loi n° 991 du 9 octobre 1964 (Gazzetta ufficiale n° 265 du 28.10.1964) et par des décrets adoptés à ce titre. Cette loi habilite le gouvernement à arrêter des normes en vue de la suppression des fraudes lors de la préparation et de la commercialisation des moûts, des vins et des vinaigres. L'article 2, paragraphe 6, stipule que les normes adoptées à ce titre devront comporter l'interdiction d'utiliser, directement ou indirectement, dans le domaine alimentaire, des alcools de synthèse et des produits contenant de l'acide acétique ne provenant pas de la fermentation de vin ou de piquette.

Conformément à cette loi, le président de la République a promulgué le décret n° 162 du 12 février 1965 (Gazzetta ufficiale n° 73 du 23.3.1965). L'article 41 du décret n° 162 réserve la dénomination «aceto» (vinaigre) aux «produits obtenus par la fermentation acétique des vins» présentant des propriétés physiques spécifiques. L'article 51 (modifié par la loi n° 739 du 9.10.1970, Gazzetta ufficiale n° 270 du 24.10.1970) prévoit qu'il est interdit de transponer, détenir pour la vente, mettre en circulation ou utiliser de quelque manière que ce soit, pour un usage alimentaire direct ou indirect, de l'alcool éthylique synthétique, ainsi que des produits contenant de l'acide acétique ne provenant pas de la fermentation acétique du vin, de même que des produits dérivant de la fermentation acétique du vin qui ne peuvent être qualifiés de vinaigre selon l'article 41.

L'article 60 stipule que «les dispositions du présent décret sont également applicables aux produits importés de l'étranger».

Les infractions aux articles 41 et 51 sont sanctionnées pénalement.

La Commission a soutenu que le décret n° 162 était en contradiction avec l'article 30 du traité CEE. Ce décret était susceptible d'entraver, directement ou indirectement, actuellement ou potentiellement, le commerce intracommunautaire du vinaigre et des préparations alimentaires contenant du vinaigre. Le 14 décembre 1978, le vicomte Davignon, au nom de la Commission, a adressé au ministre italien des affaires étrangères une lettre exprimant l'opinion de la Commission sur ce problème et en indiquant les motifs. La lettre disait que cette constatation ne s'appliquait qu'au vinaigre d'alcool obtenu par la fermentation acétique de produits agricoles. Il était dit expressément et clairement que cette constatation ne s'appliquait pas à l'acide acétique synthétique. La Commission a demandé au gouvernement italien, conformément à l'article 169 du traité CEE, de lui faire connaître ses observations dans un délai de deux mois sur le point de vue exprimé par la Commission dans cette lettre, et elle s'est réservé le droit d'émettre par la suite un avis motivé au titre de cet article.

Le gouvernement italien n'a pas présenté ses observations avant le 8 novembre 1979, date à laquelle il a adressé à la Commission une communication soutenant qu'il avait de bonnes raisons de maintenir en vigueur le décret n° 162.

Le 19 novembre, la Commission a émis un avis donnant les raisons pour lesquelles elle estimait que la République italienne avait manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du traité. L'avis motivé ne se limitait pas expressément au vinaigre dérivé de produits agricoles, mais il se référait à la lettre du 14 décembre 1978 sans revenir sur l'exclusion de l'acide acétique synthétique du champ d'application de l'enquête. En outre, l'avis mentionnait plus d'une fois des vinaigres produits par fermentation.

Le 26 juin 1980, dans l'affaire 788/79, qui résultait d'une procédure pénale engagée contre Herbert Gilli et Paul Andres, Recueil 1980, p. 2071, la Cour (deuxième Chambre), dans une demande de décision préjudicielle présentée au titre de l'article 177 du traité CEE, a dit pour droit que la notion de mesures d'effet équivalant à des restrictions quantitatives à l'importation, figurant à l'article 30 de ce traité, était à comprendre en ce sens que relevait de cette disposition une interdiction édictée par un État membre d'importer ou de commercialiser du vinaigre contenant de l'acide acétique non dérivé de la fermentation acétique du vin, et notamment du vinaigre de pomme, lorsqu'il s'agit de vinaigre légalement produit et commercialisé dans un autre État membre.

Par la suite, le 28 juillet 1980, la Commission a adressé au gouvernement italien un nouvel avis motivé attirant son attention sur un passage de la décision rendue dans l'affaire 788/79 qui se réfère au vinaigre de pomme. En outre, la Commission a considéré que la lettre du 14 décembre 1978 entamait la procédure prévue à l'article 169 sans revenir en aucune façon sur l'exclusion de l'acide acétique synthétique.

Dans sa requête à la Cour du 26 septembre 1980, la Commission n'a pas expressément indiqué qu'elle cherchait à revenir sur cette exclusion.

Le gouvernement français, dans de brèves observations écrites, a écrit que son principal souci en l'occurrence était de défendre la proposition selon laquelle les États membres pouvaient interdire la commercialisation d'acide acétique synthétique.

Vers la fin de l'audience, l'agent de la Commission a affirmé qu'il fallait considérer que la présente procédure concernait les vinaigres synthétiques tout autant que les vinaigres provenant de la fermentation de produits agricoles. Il a soutenu 3u'une limitation quelconque exprimée ans la requête de la Commission ne limitait pas l'objet du litige ultérieur.

Nous n'acceptons pas que ce dernier argument doive être entendu dans un sens aussi large. Avant d'entamer une procédure contre un État membre au titre de l'article 169 du traité CEE, la Commission doit prendre deux mesures: tout d'abord, elle doit mettre l'État concerné en mesure de présenter ses observations et, ensuite, elle doit émettre un avis motivé. Ces deux mesures ne sont pas de simples formalités, mais elles constituent des protections essentielles pour permettre aux États membres de défendre ou de modifier leur position afin d'éviter de s'exposer à une procédure judiciaire. Il s'ensuit que la Commission ne devrait pas, en principe, être autorisée à continuer à soulever, dans un recours intenté au titre de l'article 169, une question qu'elle a expressément exclue de la lettre par laquelle elle a invité l'État à présenter ses observations. Si la Commission souhaite étendre le champ de l'enquête, elle doit expressément mettre l'État concerné en mesure de présenter ses observations.

Même si la Commission peut, dans son avis motivé, élargir le manquement invoqué (au motif que la lettre et l'avis motivé de la Commission déterminent conjointement l'objet du litige ultérieur — affaire 45/64, Commission/Italie, Recueil 1965, p. 1057), elle doit le faire expressément et de manière non équivoque dans une affaire dans laquelle elle a à l'origine limité le manquement invoqué en prononçant une exclusion spécifique. Aucun des deux avis motivés ne répond en l'occurrence à cette condition. Au contraire, la référence faite dans l'avis du 19 novembre 1979 aux vinaigres produits par fermentation va en sens contraire si, comme l'agent de la Commission l'a expliqué à l'audience, certains vinaigres (les «vinaigres totalement synthétiques») sont produits par un processus chimique sans aucune fermentation.

En outre, s'il faut considérer que la requête devant la Cour détermine l'objet du litige (affaire 232/78, Commission/France, Recueil 1979, p. 2729), il nous semble que, lorsqu'une exclusion expresse a été prononcée au cours de la procédure préliminaire, la Commission devrait indiquer clairement dans sa requête devant la Cour si elle a l'intention de modifier les moyens qu'elle invoque. Cela ne nous semble pas avoir été le cas en l'occurrence.

Ni l'argument de la Commission selon lequel les réponses du gouvernement italien sont les mêmes en ce qui concerne l'acide acétique synthétique, ni le fait que le gouvernement italien s'est référé à l'acide acétique synthétique dans son mémoire en défense ne modifient à notre avis la situation dans la présente affaire.

Nous n'acceptons pas l'argument, avancé au nom de la Commission, selon lequel, dans un recours déposé devant la Cour au titre de l'article 169, la Commission est libérée de toutes les contraintes imposées par sa propre lettre et son propre avis motivé, étant donné ce que la Cour de justice a affirmé dans les affaires jointes 142/80 et 143/80, Essevi et Salengo, arrêt du 28. mai 1981, non encore publié. Au contraire, la Cour a affirmé dans cette affaire (au quinzième attendu) que l'avis motivé avait pour fonction de définir l'objet du litige. L'affirmation ultérieure de la Cour que les prises de position et les avis motivés émis au titre de l'article 169 ne peuvent pas déterminer les droits ou les obligations qui incombent aux États membres en vertu du traité n'est aucunement incompatible avec ce qui a été dit au quinzième attendu ni avec la thèse que nous avons émise. Selon nous, il y a lieu de considérer que le présent recours ne concerne pas l'acide acétique synthétique.

L'agent de la Commission a concédé, à juste titre selon nous, même s'il l'a fait avec réticence, que la Commission est prête, si la Cour l'estime opportun, à limiter son recours aux vinaigres dérivés de la fermentation. Nous comprenons qu'il a voulu dire par là que la Commission était prête à limiter le présent recours aux vinaigres provenant de la fermentation de produits agricoles, à l'exclusion de tous les autres. Pour les raisons déjà exposées, nous estimons que la Cour devrait à tout le moins dire pour droit qu'il est opportun de limiter l'affaire aux vinaigres produits par la fermentation de produits agricoles.

Si la Cour estime que le recours concerne les vinaigres synthétiques, elle a déjà indiqué, et à juste titre selon nous, que les parties, y compris le gouvernement français, devraient être mises en mesure de présenter d'autres observations sur cet aspect de la question.

Notre examen des griefs de la Commission part de l'idée que le présent recours ne vise pas les vinaigres synthétiques.

D'après la Commission, le décret n° 162 donne lieu à deux violations distinctes du traité CEE. La première est celle qui, selon la Commission, résulte de l'interdiction, prévue à l'article 51 dudit décret, de l'importation et de la commercialisation de vinaigres autres que ceux provenant de la fermentation du vin. Il nous paraît clair que la Cour a déjà traité cet aspect de la question dans l'affaire 788/79 Gilli et Andres, en déclarant qu'une telle interdiction était incompatible avec l'article 30 du traité CEE lorsqu'elle s'appliquait à des marchandises produites et commercialisées légalement dans un autre État membre. Nous n'acceptons pas l'argument selon lequel cet arrêt devrait être d'une portée limitée parce qu'il s'agissait d'un renvoi effectué au titre de l'article 177, tandis que le présent cas d'espèce est porté devant la Cour de justice au titre de l'article 169. Ce qui a été décidé dans cette dernière affaire nous parait être applicable à la présente espèce. Aucun argument n'a été présenté qui soit de nature à persuader la Cour de revenir sur sa décision antérieure. A notre avis, il serait juste que la Cour déclare dans la présente affaire également que l'article 51 du décret n° 162 et sa mise en vigueur sont incompatibles avec l'article 30 du traité CEE lorsqu'ils s'appliquent aux vinaigres (autres que les vinaigres synthétiques) qui sont légalement produits et commercialisés dans un autre État membre.

Le second aspect eu égard auquel la Commission a dit que le décret n° 162 violait le traité CEE était que ce décret interdisait la commercialisation, sous le nom d'«aceto», de vinaigres autres que ceux produits à partir de vin — interdiction prévue à l'article 41 du décret en question. Selon la Commission, cette interdiction déprécie, aux yeux des consommateurs italiens, les vinaigres naturels produits par fermentation de substances autres que le vin. A un moment donné, en effet, l'agent de la Commission a affirmé que cela rendait ces vinaigres «presque invendables» dans ce pays. Pour cette raison, a dit la Commission, l'interdiction équivalait à une réglementation commerciale adoptée par les États membres et susceptible d'entraver, directement ou indirectement, actuellement ou potentiellement, le commerce intracommunautaire, et elle devait être considérée comme une mesure d'effet équivalent à une restriction quantitative, conformément à l'arrêt de la Cour dans l'affaire 8/74, Procureur du Roi/Dassonville, Recueil 1974, p. 837.

En sens inverse, l'argument a été avancé selon lequel le terme «aceto» signifie pour le consommateur italien du vinaigre de vin, puisque c'est ce qu'il a toujours et exclusivement été habitué à acheter et à utiliser. En conséquence, cette restriction est justifiée.

La difficulté résulte principalement du fait qu'en dépit des résolutions du Conseil du 28 mai 1969, JO n° C 76 de 1979 p. 75, et du 17 décembre 1973, JO n° C 117 de 1973 p. 1, aucune mesure en vue de l'harmonisation des législations nationales relatives à l'étiquetage du vinaigre n'a été adoptée.

D'après la jurisprudence antérieure de la Cour, il semble qu'il faille tenir compte de deux principes différents.

D'une part, une restriction à l'utilisation d'un terme générique, sous lequel des marchandises sont commercialisées, est susceptible de constituer une restriction du type de celle qui est prohibée par l'article 30. Il peut en être ainsi, par exemple, lorsqu'une législation nationale réserve l'emploi d'une dénomination particulière à la production nationale, en contraignant ainsi les produits des autres États membres à utiliser des dénominations inconnues ou moins appréciées par le consommateur. Voir l'affaire 112/74, Commission/Allemagne, Recueil 1975, p. 181 à p. 199. Une telle restriction peut tomber sous le coup de l'article 30, même si elle n'est pas discriminatoire, dans la mesure où elle réserve une dénomination particulière à la production nationale. Au contraire, lorsque la législation nationale impose l'obligation d'utiliser une dénomination particulière dans une langue déterminée, pour tous les produits d'un certain type, il peut en résulter une restriction aux échanges entre les États membres puisque l'importateur est obligé de supporter la gêne et les frais que représente l'apposition de nouvelles étiquettes sur ses produits. Voir l'affaire 27/80, Anton Adriaan Fietje, Recueil 1980, p. 3839, dixième attendu, dans laquelle la législation litigieuse imposait à l'importateur d'employer une étiquette spéciale utilisant le terme de commercialisation adopté dans le pays d'importation. En outre, un État membre n'est pas en droit d'invoquer l'article 36 du traité CEE comme base légale lui permettant d'affirmer qu'une restriction de ce type, destinée à la défense des consommateurs et à la loyauté des transactions commerciales, est légale. Ni la défense des consommateurs ni la loyauté des transactions commerciales ne sont mentionnées parmi les exceptions figurant à l'article 36. Il s'ensuit que ces raisons ne peuvent être invoquées en tant que telles au titre de l'article 36. Voir l'affaire 113/80, Commission/Irlande, arrêt du 17 juin 1981, non encore publié, au huitième attendu.

D'un autre côté, l'interdiction d'utiliser un terme particulier pour la commercialisation de produits, lorsqu'elle s'applique indifféremment aux marchandises nationales et aux marchandises importées, n'est pas nécessairement constitutive d'une violation de l'article 30 du traité CEE. Ainsi que la Cour l'a affirmé dans l'affaire 27/80 Anton Adriaan Fietje, au onzième attendu:

«si une réglementation nationale concernant un produit déterminé comprend l'obligation d'utiliser une dénomination suffisamment précise pour permettre à l'acheteur de connaître la nature du produit et de le distinguer des produits avec lesquels il pourrait être confondu, il peut certainement être nécessaire, pour donner aux consommateurs une protection efficace, d'étendre cette obligation également aux produits importés...»

Cette obligation peut être justifiée afin de sauvegarder les intérêts des producteurs contre la concurrence déloyale et de protéger les consommateurs contre les indications susceptibles de les induire en erreur (Commission/Allemagne, supra, p. 194). Une telle interdiction peut, selon les termes utilisés par la Cour, être «justifiée comme étant nécessaire pour satisfaire à des exigences imperatives tenant notamment à ... la loyauté des transactions commerciales et à la défense des consommateurs»: voir l'affaire 120/78, Rewe/Bundesmonopolverwaltung für Branntwein, Recueil 1979, p. 649 à p. 662; affaire 788/79, Gilli et Andres, p. 2078; affaire 130/80, Fabriek voor Hoogwaardige Voedingsprodukten Keldermann BV, arrêt du 19 février 1981, non encore publié, au sixième attendu. Tout autre résultat serait incompatible non seulement avec les décisions de la Cour, mais également avec le principe énoncé à l'article 5 de la directive n° 79/112/CEE du Conseil du 18 décembre 1978 relative au rapprochement des législations des États membres concernant l'étiquetage et la présentation des denrées alimentaires destinées au consommateur final ainsi que la publicité faite à leur égard JO 1979, L. 33, p. 1). Cet article prévoit à son paragraphe 1 que la dénomination de vente d'une denrée alimentaire est la dénomination prévue par les dispositions législatives, réglementaires ou administratives qui lui sont applicables et, à défaut, le nom consacré par les usages de l'État membre dans lequel s'effectue la vente au consommateur final.

Naturellement, il est constant que le fait qu'une restriction similaire soit imposée aux producteurs nationaux de l'État en question ne constitue pas en tant que tel une réponse à la prétention selon laquelle un État viole les obligations qui lui incombent au titre du traité CEE.

Si on applique ces principes aux faits de la présente affaire, il nous semble que l'agent du gouvernement italien a reconnu que le terme «aceto» est le terme générique approprié pour «vinaigre», tant du point de vue sémantique que du point de vue du tarif douanier commun. D'un autre côté, le seul vinaigre que connaissent la plupart des consommateurs en Italie est le vinaigre de vin. En conséquence, empêcher absolument les importateurs d'utiliser le terme «aceto» signifie que les acheteurs ne sauront pas que le produit offert à la vente est du vinaigre. Cela paraît être manifestement susceptible d'entraver, directement ou indirectement, actuellement ou potentiellement, le commerce intracommunautaire du vinaigre. D'autre part, le fait pour les producteurs d'appeler simplement «aceto» le produit qu'ils fabriquent et qui ne provient pas du vin est de nature à induire en erreur, parce que les acheteurs en Italie supposeront qu'il s'agit de vinaigre de vin et, compte tenu de l'extrait de l'arrêt rendu par la Cour dans l'affaire Fietje (affaire 27/80), que nous avons citée antérieurement, les autorités nationales sont en droit de l'empêcher.

En conséquence, il nous semble qu'en l'état actuel de la législation, la République italienne ne manque pas aux obligations qui lui incombent en vertu du traité lorsqu'elle interdit l'emploi du terme «aceto» utilisé seul pour décrire le vinaigre ne provenant pas du vin. Par contre, elle manque à ses obligations dans la mesure où elle interdit l'utilisation du terme «aceto», dans son sens générique, accolé avec un autre mot ou avec d'autres mots qui indiquent que le produit provient d'une substance autre que le vin, comme le cidre ou le malt. La possibilité, ou peut-être le fait, que les acheteurs italiens puissent initialement trouver inhabituelle ou étrange cette expression ne nous paraît pas être suffisante pour infirmer ce résultat.

Si, contrairement à ce qui, selon nous, a été reconnu à l'audience, la Cour n'était pas convaincue que le terme «aceto» a la signification générique que nous avons citée, il nous semble que la Cour ne devrait pas déclarer que la République italienne, en l'état actuel de la législation, a violé les obligations qui lui incombent en vertu du traité.

Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, la partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La République italienne n'a pas conclu en ce sens. En conséquence, nous n'estimons pas qu'il soit nécessaire de statuer sur les dépens en sa faveur.

Nous pensons donc que la Cour devrait dire pour droit que la République italienne:

1)

a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du traité CEE dans la mesure où elle interdit l'importation et la commercialisation ultérieure des produits utilisés directement ou indirectement pour la consommation humaine qui contiennent de l'acide acétique (autre que l'acide acétique synthétique) ne provenant pas de la fermentation acétique du vin et des produits dérivés de la fermentation acétique du vin qui ne peuvent pas être classés comme vinaigres conformément à l'article 41 du décret n° 162 du 12 février 1965 promulgué parle président de la République italienne;

2)

n'a pas manqué à ces obligations en interdisant l'emploi du terme «aceto» utilisé seul pour décrire des produits qui ne proviennent pas de la fermentation acétique du vin;

3)

a manqué à ces obligations en interdisant l'utilisation du terme «aceto» combiné à d'autres termes indiquant à suffisance le produit de base, autre que le vin, duquel provient le produit.


( 1 ) Traduit de l'anglais.

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