Choose the experimental features you want to try

This document is an excerpt from the EUR-Lex website

Document 52023DC0778

    RAPPORT DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL Rapport sur la mise en œuvre de l’article 5 de la directive (UE) 2018/2001 sur les énergies renouvelables

    COM/2023/778 final

    Bruxelles, le 11.12.2023

    COM(2023) 778 final

    RAPPORT DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL

    Rapport sur la mise en œuvre de l’article 5 de la directive (UE) 2018/2001 sur les énergies renouvelables


    Rapport sur la mise en œuvre de l’article 5 de la directive sur les énergies renouvelables

    1.Introduction

    La directive révisée sur les énergies renouvelables 1 porte l’objectif global de l’Union à 42,5 % d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie à l’horizon 2030, le but final étant d’atteindre 45 %. Contrairement à l’objectif fixé pour 2020, cet objectif au niveau de l’UE n’a pas été transposé en contributions nationales contraignantes. Il doit être atteint conjointement par tous les États membres, à partir d’une action coordonnée et combinée, comme le reflètent la directive et le règlement sur la gouvernance 2 .

    Conformément au règlement sur la gouvernance, les États membres coopèrent les uns avec les autres, en tenant compte de toutes les formes de coopération régionale potentielles et existantes, en vue de réaliser effectivement les objectifs généraux, les objectifs spécifiques et les contributions prévus dans les plans nationaux en matière d’énergie et de climat (PNEC). Toutefois, l’évaluation des PNEC de 2020 réalisée par la Commission européenne à l’échelle de l’UE 3 a conclu que les États membres devraient faire un meilleur usage pratique de la coopération régionale.

    L’ambition renforcée en matière d’énergies renouvelables nécessiterait d’exploiter de manière rentable le potentiel de déploiement des énergies renouvelables. Cela signifie que la coopération entre les États membres jouera un rôle dans la réalisation de l’objectif. Dans le même temps, la coopération est un outil permettant de parvenir à un meilleur alignement réglementaire entre les États membres. La directive révisée sur les énergies renouvelables vise à encourager la coopération au moyen de dispositions relatives aux projets communs, aux transferts statistiques et aux régimes d’aide communs.

    Jusqu’à présent, la plupart des investissements dans la production d’électricité renouvelable ont bénéficié de régimes d’aide nationaux dont le rôle dans la réalisation de l’objectif de l’UE est reconnu à l’article 4 de la directive ainsi que dans les règles de l’UE en matière d’aides d’État 4 . Ce type d’aide devrait être accordé de manière compétitive, par exemple au moyen d’appels d’offres.

    L’article 5 de la directive permet aux États membres d’ouvrir la participation aux régimes d’aide concernant l’électricité produite à partir de sources renouvelables aux producteurs situés dans d’autres États membres. Cela peut représenter, chaque année, au moins 5 % du budget ou de la capacité prise en charge par le régime de 2023 à 2026 et au moins 10 % de 2027 à 2030 ou, si la part est inférieure à ce seuil, le niveau d’interconnectivité dans l’État membre concerné une année donnée. En outre, l’ouverture de régimes d’aide peut entraîner ou non l’importation physique d’électricité. Si un État membre qui ouvre son régime d’aide exige la preuve de l’importation physique, il risque de limiter la participation à des projets situés dans des pays avec lesquels il est directement interconnecté. Conformément à la directive, si un État membre décide d’ouvrir la participation aux régimes d’aide, les États membres concernés doivent définir les principes de cette participation, dont au minimum les principes d’attribution de l’électricité renouvelable qui bénéficie d’aides transfrontières. Afin d’acquérir davantage d’expérience de mise en œuvre, les États membres peuvent organiser un ou plusieurs régimes pilotes dans lesquels l’aide est ouverte aux producteurs situés dans d’autres États membres.

    L’article 5, paragraphe 5, exige que la Commission procède à une évaluation de la mise en œuvre dudit article. Le rapport de mise en œuvre devrait examiner s’il est nécessaire d’obliger les États membres à ouvrir partiellement la participation à leurs régimes d’aide en faveur de l’électricité produite à partir de sources renouvelables à des producteurs situés dans d’autres États membres, en vue de parvenir à une ouverture de 5 % d’ici à 2025 et de 10 % d’ici à 2030.

    À cette fin, le présent rapport évalue dans quelle mesure les États membres ont mis en œuvre l’article 5 en ouvrant la participation à des régimes d’aide ou en organisant des projets pilotes depuis l’entrée en vigueur de la directive (UE) 2018/2001. Le présent rapport présente des exemples tels que des études de cas, ainsi que les résultats des consultations des parties intéressées sur ce sujet.

    2.Exemples existants d’ouverture de régimes d’aide et de projets pilotes

    a.Appel d’offres transfrontière germano-danois pour l’énergie solaire photovoltaïque (PV)

    En 2016, sur la base d’un accord de coopération bilatérale, l’Allemagne et le Danemark ont lancé deux enchères transfrontières pilotes pour l’énergie solaire photovoltaïque, l’une gérée par l’Allemagne et l’autre par le Danemark. Dans le cadre de l’enchère allemande de 50 MW, les installations situées au Danemark étaient autorisées à demander le versement d’aides, tandis que dans le cadre de l’enchère danoise de 20 MW, 2,4 MW étaient ouverts à des installations situées en Allemagne. Les enchères se distinguaient par plusieurs caractéristiques de conception. Par exemple, l’enchère allemande accordait des primes de marché variables, tandis que celle du Danemark utilisait des primes fixes. La taille autorisée des offres en Allemagne était comprise entre 0,1 et 10 MW, tandis qu’elle était plafonnée à 2,4 MW au Danemark. L’Allemagne imposait un cours d’achat maximal, contrairement au Danemark, qui ne spécifiait pas de prix plafond.

    Les enchères allemandes ont reçu 43 offres pour un total de 297 MW, dont 143 MW pour des projets situés en Allemagne (26 offres), et 154 MW pour des projets situés au Danemark (17 offres). Les 5 offres retenues concernaient toutes des projets situés au Danemark, avec une capacité maximale éligible de 10 MW. L’enchère danoise a reçu 36 offres pour un total de 79,45 MW, et aucune offre n’a été soumise pour des installations situées en Allemagne. Les 9 offres retenues concernaient toutes des projets qui se limitaient à la capacité maximale éligible de 2,4 MW. En conséquence, l’intégralité de la capacité de l’offre conjointe a été attribuée à des projets situés au Danemark.

    b.Projet d’accord sur les parcs éoliens entre l’Irlande et le Royaume-Uni

    En 2014, l’Irlande et le Royaume-Uni ont travaillé sur un accord intergouvernemental visant à mettre en place des parcs éoliens d’une capacité totale d’environ 5 GW dans les Midlands irlandais, avec l’aide de subventions publiques britanniques, et à exporter l’électricité produite vers le Royaume-Uni. Cela offrait à l’Irlande un marché d’exportation de l’électricité ainsi que d’autres avantages économiques et aidait le Royaume-Uni à atteindre ses objectifs en matière d’énergies renouvelables à un coût inférieur à celui du déploiement d’autres énergies renouvelables. Selon l’un des promoteurs du projet, il était attendu que les consommateurs britanniques économisent environ 7 milliards de livres sterling sur 15 ans grâce à cet accord 5 . L’accord a finalement été abandonné en raison des préoccupations des communautés locales quant à la taille des parcs éoliens proposés, à la hauteur des différentes éoliennes ainsi qu’à l’incidence sur l’environnement et la valeur des biens immobiliers. En outre, les avantages escomptés pour l’Irlande ont été perçus comme trop faibles par rapport aux incidences environnementales de l’installation des parcs éoliens dans le pays 6 .

    3.Contributions des parties intéressées

    Les États membres ont été consultés dans le cadre de l’action concertée relative à la directive sur les énergies renouvelables (CA-RES) 7 et dans le cadre de demandes bilatérales. Au total, dix États membres ont répondu au questionnaire envoyé dans le cadre de la CA-RES, dont six (Chypre, Finlande, Slovénie, Slovaquie, Danemark et Pologne) ont expliqué qu’ils ne prévoyaient pas d’ouvrir la participation à des régimes d’aide. La Suède a fait référence à son système de certificats d’électricité existant avec la Norvège. La Grèce a répondu que, conformément à une décision ministérielle récente, trois enchères communes pour l’énergie éolienne et solaire photovoltaïque sont prévues en 2023 et seront ouvertes à des producteurs établis dans d’autres États membres. Pour ces enchères, la quote-part de capacité attribuée à des producteurs d’autres États membres n’a pas été précisée. Une autre enchère prévue en 2023 est réservée aux producteurs situés dans d’autres États membres.

    À ce jour, les États membres qui ont répondu n’ont signé aucun accord de coopération en vue d’ouvrir la participation à des régimes d’aide. À l’exception du Danemark, aucun des États membres ayant répondu n’a organisé de projets pilotes dans le cadre desquels l’aide est ouverte aux producteurs établis dans d’autres États membres 8 .

    Il a été demandé aux États membres ce qu’ils considéraient comme étant le principal obstacle à l’ouverture de la participation aux régimes d’aide. Plusieurs facteurs ont été mentionnés: les différences entre les régimes d’aide nationaux et le risque que ces différences entraînent une concurrence déloyale; les différences dans les processus administratifs; les préoccupations liées à la sécurité d’approvisionnement; les défis liés à la communication et à la compréhension commune avec d’autres États membres; et le manque d’interconnexion électrique avec d’autres États membres.

    En ce qui concerne les mesures que la Commission pourrait prendre pour inciter ou aider les États membres à ouvrir des régimes d’aide aux producteurs établis dans un autre État membre, les réponses mentionnaient la normalisation des procédures, y compris un cadre prêt à l’emploi pour les accords.

    Outre la consultation menée dans le cadre de la CA-RES, la Commission a lancé un appel à contributions en ligne sur la possibilité pour les États membres d’ouvrir partiellement la participation à leurs régimes d’aide pour l’électricité produite à partir de sources renouvelables aux producteurs situés dans d’autres États membres, et la possibilité pour la Commission de proposer l’ouverture obligatoire des régimes d’aide.

    La Commission a reçu 18 contributions en réponse à l’appel. 2 réponses lui ont également été envoyées par courrier électronique après la date limite. La plupart des répondants se sont déclarés opposés à l’ouverture obligatoire des régimes d’aide. Dans toutes leurs réponses à l’appel à contributions, les particuliers ont exprimé leur opposition à l’ouverture obligatoire, soulignant principalement des préoccupations concernant la souveraineté des États membres.

    La Commission a reçu trois réponses venant d’États membres à l’appel à contributions. Une autre a été reçue à la suite d’une demande bilatérale complémentaire de la Commission aux États membres. Parmi les réponses à l’appel à contributions, deux provenaient des États membres ayant déjà mis en œuvre une enchère transfrontière pilote, à savoir le Danemark et l’Allemagne 9 . Dans sa réponse, le Danemark souligne qu’il est nécessaire que les États membres fassent preuve de souplesse lorsqu’ils choisissent les outils appropriés pour soutenir les énergies renouvelables, y compris au moyen de régimes d’aide nationaux et en ouvrant ces régimes à des producteurs d’autres États membres. Le Danemark rappelle également qu’à l’avenir, les énergies renouvelables terrestres devraient en grande partie être installées sans recourir à des régimes d’aide.

    La réponse de l’Allemagne décrit les caractéristiques de conception des enchères transfrontières pilotes lancées avec le Danemark, les enseignements qui en ont été tirés en matière de gains d’efficacité pouvant résulter de la coopération, l’importance des conditions réglementaires dans les enchères transfrontières, ainsi que la réglementation applicable en Allemagne sur les régimes d’aide aux énergies renouvelables. Selon les règles nationales, à partir de 2017, lorsqu’une aide pour les énergies renouvelables doit être déterminée au moyen d’enchères, une part de la capacité totale à ajouter chaque année doit être ouverte à des projets portant sur les énergies renouvelables situés dans d’autres États membres, sous certaines conditions 10 . Les règles ont ensuite été modifiées en 2017, 2021 et 2023, de sorte à augmenter la part de la capacité qui doit être ouverte à des projets situés dans d’autres États membres, à permettre à des technologies supplémentaires d’être prises en considération dans les enchères transfrontières, à introduire des modifications dans le calcul des primes de marché et à suspendre l’exigence de réciprocité. En vertu des règles actuelles, les 20 % de la capacité totale à ajouter chaque année doivent être ouverts à des projets consacrés aux énergies renouvelables dans d’autres États membres, tandis que la capacité éolienne en mer n’est pas prise en considération dans la limite fixée de 20 % et que la capacité totale peut être ouverte à des projets dans d’autres États membres. Dans sa contribution, l’Allemagne reconnaît qu’une obligation contraignante d’ouvrir des régimes d’aide stimulerait la coopération entre les États membres en matière d’énergies renouvelables. Toutefois, elle rappelle également les dispositions renforcées relatives aux projets communs figurant à l’article 9 de la directive sur les énergies renouvelables récemment révisée. L’Allemagne estime que le soutien apporté par la Commission à la coopération est utile pour accroître l’efficacité des régimes d’aide dans l’UE.

    Dans leurs réponses, la plupart des professionnels du secteur font valoir qu’une ouverture obligatoire des régimes ne répond pas aux besoins sous-jacents des gouvernements concernés, que cela pourrait entraver la légitimité de ces régimes et de la transition énergétique dans son ensemble ainsi que le soutien du public en leur faveur, et que l’introduction d’une obligation contraignante pourrait ne pas être le moyen le plus approprié de contribuer à la réalisation de l’objectif de l’UE en matière d’énergies renouvelables à l’horizon 2030, étant donné qu’il peut s’agir de modifier les exigences auxquelles les installations concernées doivent satisfaire pour bénéficier d’une aide, ou de modifier le régime de financement lui-même, créant ainsi une charge administrative. Par exemple, les répondants soulignent que, dans le cadre du régime d’aide espagnol REER (Régimen Económico de Energías Renovables), les installations de production d’électricité doivent être situées sur le territoire espagnol métropolitain et respecter certaines étapes administratives. L’obligation concernant l’emplacement devrait être modifiée pour permettre l’ouverture de régimes d’aide, tout comme celle ayant trait au respect de certaines étapes administratives pour les installations situées dans d’autres États membres, étant donné que ces installations seraient soumises à des procédures d’autorisation et administratives différentes de celles applicables en Espagne. En outre, si l’offre prend la forme d’un contrat sur différence, des règles différentes sur la manière de répartir la charge financière des versements d’aide entre les acteurs du marché des pays concernés peuvent entraîner une inégalité de traitement entre les États membres.

    En revanche, une association du secteur favorable à une ouverture obligatoire a plaidé en faveur d’un régime unitaire de l’UE ou de mesures d’aide harmonisées, afin de soutenir un déploiement rentable des énergies renouvelables ainsi que l’intégration et le fonctionnement du marché de l’électricité. Une autre association du secteur a mis en garde sur le fait que, si l’ouverture des régimes d’aide devait être rendue obligatoire, le financement national serait fourni directement ou indirectement par la population de l’État membre concerné et que, par conséquent, ce financement devrait contribuer en particulier à la réalisation des objectifs dudit État membre en matière d’énergie et de climat. Une autre association du secteur s’est déclarée favorable à l’ouverture obligatoire afin d’exporter l’énergie produite vers l’État membre qui lance l’enchère. En outre, ce répondant a plaidé en faveur de la possibilité de transporter l’électricité renouvelable bénéficiant d’une aide transfrontière sous forme de molécules gazeuses, à savoir d’hydrogène. Il fait valoir que cela pourrait contribuer à résoudre le problème de l’insuffisance de la capacité du réseau électrique et à créer la possibilité d’un stockage saisonnier d’énergies renouvelables.

    Bien que la plupart des répondants aient émis une préférence contre l’ouverture obligatoire des régimes d’aide, ils reconnaissent largement les avantages d’une coopération en matière de déploiement des énergies renouvelables. Le secteur de l’éolien en mer en particulier a été désigné comme un secteur dans lequel la coordination et la coopération systématiques des pays présents autour d’un bassin maritime revêtent une importance cruciale.

    Plusieurs répondants du secteur ont estimé qu’il serait bénéfique d’encourager l’ouverture de régimes d’aide, car cela créerait une concurrence entre un plus grand nombre de soumissionnaires, encouragerait les États membres à harmoniser leurs procédures administratives et permettrait des approches plus européennes lorsque, par exemple, un État membre dispose d’une marge de manœuvre limitée pour déployer des énergies renouvelables supplémentaires par rapport à une demande nationale importante, tandis que le potentiel de ressources d’un autre État membre est supérieur à la demande intérieure. Toutefois, les acteurs du secteur solaire ont souligné que, pour que les appels d’offres transfrontières soient couronnés de succès, la charge administrative doit rester limitée et la visibilité des régimes d’aide et des politiques nationales doit être garantie des deux côtés.

    Les répondants des secteurs de l’énergie solaire et de l’éolien ont insisté sur l’importance de plusieurs points liés à l’infrastructure du réseau. Ils ont souligné la nécessité d’augmenter le niveau d’interconnexion électrique, en mentionnant les connexions physiques au réseau comme étant l’une des conditions préalables à l’ouverture des régimes d’aide. Un répondant du secteur de l’éolien a insisté sur le fait que les coûts de raccordement au réseau devaient également faire partie de l’allocation coûts-avantages. Un répondant du secteur de l’énergie solaire a fait valoir qu’il conviendrait de garantir des conditions de concurrence équitables entre les pays concernés en harmonisant les cadres réglementaires ou en appliquant des mesures de partage des coûts. Par exemple, si les coûts de raccordement au réseau diffèrent, dans le processus de sélection des offres, une prime supplémentaire pourrait être octroyée aux offres émises sur des marchés qui présentent des conditions plus favorables.

    Les réponses de plusieurs répondants ont également convergé sur leur point de vue concernant le partage plus large des coûts et des avantages. Les acteurs du secteur éolien ont souligné que le régime transfrontière devrait aider les États membres à surmonter les différences dans leur évaluation des coûts et des avantages, que l’électricité produite devrait améliorer la sécurité d’approvisionnement du pays ouvrant son régime d’aide et que ledit pays devrait également tirer profit de la baisse des prix de l’électricité due à la capacité supplémentaire installée d’énergie renouvelable. Les acteurs du secteur de l’énergie solaire ont mis en évidence la manière dont le régime d’aide pourrait être conçu de sorte que le pays hôte puisse également bénéficier de l’installation, par exemple en associant la population et les promoteurs locaux et, éventuellement, en faisant en sorte que l’installation soit détenue au niveau local. Ils ont en outre souligné l’importance d’une comptabilisation claire et transparente de l’électricité produite et exportée, afin d’éviter un double comptage.

    Un répondant issu du secteur des énergies renouvelables au Danemark a déclaré que des projets dans le domaine des énergies renouvelables, tant terrestres qu’en mer, avaient été mis en œuvre sans recourir à des régimes d’aide et que l’utilisation de subventions compromettrait le succès et les avantages du secteur des énergies renouvelables. À l’opposé, ce répondant a souligné la nécessité d’accorder des subventions aux secteurs de l’énergie éolienne et solaire en tant que moyen de renforcer les chaînes de valeur européennes.

    4.Évaluation

    Sur la base des éléments recueillis lors de l’élaboration du présent rapport, il est clair que très peu d’évolutions spécifiques ont été enregistrées dans les États membres en ce qui concerne l’ouverture des régimes d’aide, tant en matière d’exigences législatives qu’en matière d’expérience de mise en œuvre dans le cadre de projets pilotes.

    L’Allemagne est l’un des rares États membres qui ont intégré l’ouverture de régimes d’aide à leur législation sur l’énergie. Toutefois, elle attire l’attention sur le manque d’intérêt des autres États membres pour les enchères transfrontières, ce qui rend difficile la mise en œuvre de ce mécanisme de coopération. La plupart des autres États membres n’ont pas l’intention d’ouvrir la participation à leurs régimes d’aide, à l’exception de la Grèce, qui prévoit d’organiser en 2023 plusieurs enchères sur l’énergie éolienne et solaire qui seraient ouvertes à des producteurs situés dans d’autres États membres, l’une d’entre elles étant réservée aux producteurs situés dans des pays voisins. Dans certains États membres, l’ouverture de régimes d’aide ne serait pas possible sans modification du cadre réglementaire actuel, comme en Espagne, où les installations financées par des régimes d’aide doivent être situées sur le territoire espagnol et respecter certaines exigences administratives. Dans de tels cas, il faudrait que les éventuelles modifications réglementaires créent davantage de flexibilité en ce qui concerne la localisation de l’installation et, dans la mesure où il reste des éléments spécifiques dans les procédures administratives nationales pour les énergies renouvelables qui ne sont pas harmonisés par des règles de l’UE, permettent l’identification d’étapes administratives comparables dans le cadre réglementaire de l’autre pays, tout en tenant compte des spécificités nationales.

    En ce qui concerne l’expérience de mise en œuvre dans le cadre de projets pilotes, l’exemple pilote germano-danois a démontré que les enchères transfrontières permettent aux projets présentant des conditions plus favorables, telles que celles liées au potentiel de ressources, de représenter un coût moindre pour le budget public du pays finançant le régime d’aide. Concernant ce projet pilote, les cinq offres retenues dans le cadre des enchères allemandes pour des projets à construire au Danemark exigeaient une prime mobile de 5,38 centimes d’euros/kWh, ce qui était inférieur au prix moyen des précédentes enchères nationales allemandes à la même période (7,25 centimes d’euro/kWh), soit une baisse de près de 26 %. Néanmoins, comme l’indiquent les contributions de plusieurs parties prenantes au présent rapport, outre les avantages d’un déploiement rentable des énergies renouvelables, les régimes d’aide transfrontières devraient également garantir une répartition équilibrée des coûts plus larges entre les pays participants, de manière à permettre la construction des projets dans le domaine des énergies renouvelables.

    L’expérience du projet pilote germano-danois montre également l’importance de tenir compte des différences entre les conditions réglementaires des pays participants. Le résultat de l’enchère allemande, pour laquelle toutes les offres retenues étaient situées sur des terres agricoles au Danemark, a pu être attribué non seulement au meilleur potentiel de ressources au Danemark, mais aussi aux restrictions imposées aux sites en Allemagne, qui interdisent l’installation de projets solaires photovoltaïques sur des terres agricoles, ainsi qu’à des taxes légèrement plus faibles et à des coûts de location de terrains moins élevés au Danemark 11 .

    Le Danemark a également imposé les mêmes restrictions relatives aux sites dans son appel d’offres, mais uniquement pour les installations situées sur le territoire allemand, ce que certaines parties prenantes ont perçu comme un désavantage pour les installations allemandes dans le cadre de l’appel d’offres transfrontière 12 . En outre, l’anticipation des futures enchères en Allemagne pourrait avoir dissuadé les soumissionnaires allemands de participer à l’enchère transfrontière. L’abandon du régime d’aide aux centrales solaires photovoltaïques de grande ampleur au Danemark avant le lancement de l’enchère transfrontière et l’absence de futures enchères ont également pu encourager la participation active des soumissionnaires danois. L’interaction entre les mesures nationales et transfrontières montre l’importance: i) du calendrier des mesures nationales et transfrontières; et ii) de l’interaction entre les pays participants en ce qui concerne la structure institutionnelle, juridique et financière.

    La plupart des répondants à la consultation des parties prenantes organisée par la Commission en vue de l’élaboration du présent rapport se sont déclarés opposés à l’ouverture obligatoire des régimes d’aide. Les raisons vont de la souveraineté nationale à l’augmentation de la charge administrative et à la difficulté de répartir les coûts et les bénéfices d’une manière qui serait perçue comme équitable par les parties concernées. Les échanges bilatéraux avec les États membres ont également révélé des problèmes liés à l’acceptation par le public du budget national utilisé pour financer le développement des énergies renouvelables dans un autre État membre. Un autre argument mentionné était que l’aide aux investissements dans les dépenses en capital nécessite un décaissement immédiat de la part de l’État membre contributeur, entraînant des implications budgétaires, tandis que les gains potentiels de la coopération ne se matérialiseraient qu’a posteriori. Toutefois, étant donné que la plupart des régimes actuels d’aide en faveur des énergies renouvelables n’entraînent pas de paiements de dépenses en capital dès le début, mais plutôt des paiements en fonction de la production d’électricité étalés dans le temps, dans la plupart des cas, cette préoccupation ne se présenterait pas.

    En outre, l’idée d’imposer l’ouverture obligatoire des régimes d’aide devrait également tenir compte des dispositions récemment introduites dans la directive sur les énergies renouvelables. Ces dispositions requièrent que chaque État membre convienne de mettre en place un cadre de coopération pour des projets communs avec un ou plusieurs autres États membres pour la production d’énergie renouvelable, avant fin 2025. Cette disposition a été introduite en tant que disposition contraignante en réponse à une coopération insuffisante entre les États membres dans le domaine des énergies renouvelables, de sorte que l’acquisition d’une expérience dans la mise en œuvre de cette disposition pourrait aider à mieux comprendre si de nouvelles mesures contraignantes sont nécessaires pour renforcer la coopération et parvenir ainsi à un déploiement plus efficace des énergies renouvelables.

    Néanmoins, les avantages de la coopération et la nécessité de l’encourager davantage sont largement reconnus. Compte tenu de la croissance du déploiement des énergies renouvelables, les sites adaptés aux nouvelles installations pourraient devenir rares dans certains États membres, mais pas dans d’autres, en particulier si l’on examine les différences entre les États membres en matière de demande d’électricité, de potentiel de ressources d’énergie renouvelable et de sites disponibles pour les nouvelles installations.

    La mise en œuvre de régimes d’aide transfrontières semble aussi présenter un potentiel pour des projets d’énergie renouvelable en mer, qui offrent souvent de gros volumes de production qui dépassent les besoins d’un pays tout en nécessitant des investissements importants. De tels projets pourraient constituer une option particulièrement attrayante pour les pays enclavés dont la disponibilité locale est limitée en matière de nouveaux projets dans le domaine des énergies renouvelables et qui pourraient ainsi accéder au potentiel des technologies éoliennes en mer. Comme expliqué ci-dessus, une telle approche pourrait être complétée par une obligation d’échange physique d’électricité, même si cela peut ne pas être nécessaire et dépend des besoins des États membres concernés. En outre, les régimes d’aide transfrontières peuvent également être particulièrement pertinents dans le cadre de certains projets d’interconnexion hybride 13 en cours de conception et d’autorisation, lorsqu’une interconnexion physique est garantie par les projets hybrides en mer et que les régimes d’aide transfrontières peuvent faciliter les projets transfrontières d’éoliennes en mer.

    5.Conclusion

    Le présent rapport décrit l’expérience acquise jusqu’à présent dans la mise en œuvre de l’article 5 de la directive sur les énergies renouvelables, ainsi que les retours d’information des États membres et de diverses parties prenantes en ce qui concerne les enseignements tirés et les perspectives d’avenir.

    Les données disponibles montrent clairement que, si elle est bien organisée, la coopération entre les États membres dans le domaine des énergies renouvelables présente un potentiel considérable en matière de rapport coût-efficacité, de convergence des cadres réglementaires et de meilleure utilisation des ressources renouvelables disponibles. Dans le cas des régimes d’aide transfrontières, le potentiel ne peut être atteint que si la mise en place du régime tient compte de l’incidence des différentes caractéristiques de conception sur les résultats et les coûts et des avantages pour les pays participants, tant au niveau local que du point de vue de l’intégration du marché. En outre, l’incidence des différences réglementaires sur les résultats des régimes d’aide transfrontières semble indiquer que les États membres disposent d’une plus grande marge de manœuvre pour améliorer leurs cadres nationaux pour le déploiement des énergies renouvelables.

    Il ne semble pas y avoir de solution unique à l’ouverture de régimes d’aide pouvant être appliquée dans tous les pays, compte tenu de la nécessité d’adapter les régimes aux spécificités des pays partenaires. Toutefois, la Commission peut, à la demande des États membres concernés, faciliter ce processus en fournissant des orientations, des modèles pour les accords de coopération, une expertise technique et une assistance sur les coûts et avantages directs et indirects de la coopération. Dans le contexte des installations en mer, qui présentent un potentiel particulier pour la mise en place de futurs régimes d’aide transfrontières, la Commission discute déjà régulièrement avec les États membres dans des enceintes telles que la coopération énergétique entre les pays des mers du Nord, qui couvre, entre autres, des domaines tels que les infrastructures en mer et le partage des coûts des énergies renouvelables. À cet égard, la Commission adoptera des orientations sur le partage des coûts en mer d’ici la mi-2024. La Commission communiquera également des données aux États membres et leur fournira des conseils afin de les aider à recenser les possibilités d’énergies renouvelables en mer, y compris par type de technologie, à la suite de l’évaluation, par la Commission, des PNEC actualisés finaux.

    La directive révisée sur les énergies renouvelables comprend une obligation d’établir un cadre de coopération pour les projets communs; elle répond donc déjà à la nécessité de renforcer la coopération entre les États membres dans le domaine des énergies renouvelables. Il n’existe aucune preuve concluante des avantages de l’introduction d’une obligation pour les États membres d’ouvrir partiellement la participation aux régimes d’aide concernant l’électricité produite à partir de sources renouvelables à des producteurs situés dans d’autres États membres. Par conséquent, la voie la plus appropriée pourrait consister à suivre la mise en œuvre des nouvelles dispositions convenues en ce qui concerne la coopération et leur incidence sur la réalisation des objectifs, tout en conservant la possibilité de proposer ultérieurement de nouvelles obligations, sous la forme d’une mesure visant à renforcer les progrès vers la réalisation de l’objectif de 2030 en matière d’énergies renouvelables, si les progrès sont jugés insuffisants.

    (1)

    Directive (UE) 2018/2001, telle que modifiée par la directive (UE) 2023/2413.

    (2)

    Règlement (UE) 2018/1999 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 sur la gouvernance de l’union de l’énergie et de l’action pour le climat.

    (3)

    Une planification intégrée dans le domaine de l’énergie et du climat pour faire progresser la transition verte et promouvoir la reprise économique [COM (2020) 564 final].

    (4)

     Lignes directrices concernant les aides d’État au climat, à la protection de l’environnement et à l’énergie pour 2022 (2022/C 80/01).

    (5)

    https://www.bbc.com/news/science-environment-21147279

    (6)

     Cross-border cooperation on renewable energy, p. 5, https://www.eea.europa.eu/publications/cross-border-cooperation-on-renewable-energy.

    (7)

    La CA-RES est un projet du programme Horizon 2020. Elle soutient la transposition et la mise en œuvre de la directive. Les pays participants échangent leurs expériences et leurs bonnes pratiques au moyen de la CA-RES.

    (8)

    Dans sa réponse, le Danemark fait référence à l’appel d’offres transfrontière pilote pour l’énergie solaire photovoltaïque lancé en 2016 conjointement avec l’Allemagne, qui est décrit à la section 2.a du présent rapport.

    (9)

    La troisième réponse provenant d’un État membre (la Lituanie) fait référence au cadre réglementaire applicable aux régimes d’aide communs et à la participation aux enchères dans un autre État membre, sans prendre position pour ou contre l’ouverture obligatoire des régimes d’aide.

    (10)

    1) Un traité international sur un mécanisme de coopération au titre de la directive sur les énergies renouvelables est en place entre l’Allemagne et le pays partenaire; 2) la coopération est réciproque, ce qui signifie que les deux parties ouvrent leurs enchères sur leurs marchés respectifs au pays partenaire dans des volumes comparables; et 3) l’électricité produite doit être physiquement importée ou avoir un effet comparable sur le marché allemand de l’électricité.

    (11)

      https://static.agora-energiewende.de/fileadmin/Projekte/2017/RES-Policy/144_cross-border_RES_cooperation_WEB.pdf

    (12)

      https://www.eea.europa.eu/publications/cross-border-cooperation-on-renewable-energy  

    (13)

    Par «hybride», on entend la combinaison de la production éolienne en mer et de l’interconnexion électrique.

    Top