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Document 52022IE3263

    Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Communiquer sur les droits fondamentaux et l’état de droit» (avis d’initiative)

    EESC 2022/03263

    JO C 100 du 16.3.2023, p. 24–30 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, GA, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

    16.3.2023   

    FR

    Journal officiel de l'Union européenne

    C 100/24


    Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Communiquer sur les droits fondamentaux et l’état de droit»

    (avis d’initiative)

    (2023/C 100/04)

    Rapporteur:

    Cristian PÎRVULESCU

    Corapporteur:

    José Antonio MORENO DÍAZ

    Décision de l’assemblée plénière

    20.1.2022

    Base juridique

    Article 52, paragraphe 2, du règlement intérieur

     

    Avis d’initiative

    Compétence

    Section «Emploi, affaires sociales et citoyenneté»

    Adoption en section

    23.11.2022

    Date de l’adoption en session plénière

    14.12.2022

    Session plénière no

    574

    Résultat du vote

    (pour/contre/abstentions)

    199/3/4

    1.   Conclusions et recommandations

    1.1.

    L’Union européenne est fondée sur des valeurs communes, consacrées à l’article 2 du traité sur l’Union européenne: il s’agit des valeurs de dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, d’état de droit, de droits de l’homme, de pluralisme, de non-discrimination, de tolérance, de justice, de solidarité et d’égalité entre les hommes et les femmes L’état de droit et les droits de l’homme font partie de l’identité européenne.

    1.2.

    Par ailleurs, la charte des droits fondamentaux, texte fondamental de nature contraignante, dispose que l’Union se fonde sur les valeurs indivisibles et universelles de dignité humaine, de liberté, d’égalité et de solidarité, et qu’elle repose sur le principe de la démocratie et le principe de l’État de droit (1). Renforcer l’application de la charte est à la fois une obligation et une approche riche de sens pour protéger nos concitoyens et les sensibiliser à l’importance de l’état de droit et de la protection des droits fondamentaux. Tout en approuvant toutes les actions menées dans ces domaines, le Comité insiste sur la nécessité pour toutes les institutions de l’Union de communiquer activement et directement avec le public au sens large. L’état de droit et les droits fondamentaux sont d’une importance cruciale, et ils doivent s’imposer comme une composante de la culture civique et démocratique partagée sur le continent.

    1.3.

    La Commission de Venise du Conseil de l’Europe fournit une description claire des principes clés couverts par l’état de droit: légalité; sécurité juridique; prévention de l’abus de pouvoir; égalité devant la loi et non-discrimination; accès à la justice (2). Ce sont là des critères précis pour évaluer la conformité de toute action de l’État avec les principes de l’état de droit, et qui ont été approuvés par la Cour de justice (3).

    1.4.

    Le CESE invite instamment toutes les institutions européenne à faire preuve d’une tolérance zéro à l’égard des violations de l’état de droit dans les États membres. L’Union a l’obligation juridique de respecter l’état de droit et la protection des droits fondamentaux, indépendamment des intentions des différents acteurs politiques qui peuvent aller à l’encontre de cet objectif.

    1.5.

    Le CESE attire l’attention sur l’arrêt de la Cour selon lequel le budget est l’un des instruments qui donnent un effet concret à l’obligation de tous les États membres de respecter les valeurs fondamentales de l’Union, notamment l’état de droit et le respect des droits de l’homme (4).

    1.6.

    Le rapport annuel de la Commission sur l’état de droit est un instrument précieux qui peut prévenir un recul de la démocratie, de l’état de droit et de la protection des droits fondamentaux. Pour atteindre ses objectifs, il doit toutefois être réformé. Il conviendrait en effet de l’adapter de manière à inclure toutes les valeurs de l’article 2 du traité UE, les actions juridiques et/ou financières lorsque les recommandations par pays ne sont pas pleinement prises en compte, ainsi qu’un cinquième pilier consacré au suivi des évolutions nationales en matière d’espace civique (5).

    1.7.

    Le CESE a déjà affirmé qu’il considère que la société civile joue un rôle clef pour préserver la démocratie en Europe, et qu’elle n’aura la capacité de défendre la démocratie et la liberté et de préserver l’Europe de l’autoritarisme que si elle présente force et diversité (6). Par ailleurs, il n’y a pas d’état de droit sans démocratie et droits fondamentaux, et inversement: les trois concepts sont intrinsèquement liés (7). Par conséquent, le CESE invite instamment toutes les parties concernées à cesser de parler de «démocratie illibérale», même lorsqu’il s’agit de critiquer ce concept. Sans principes libéraux, il n’y a pas de démocratie.

    1.8.

    Il y aurait lieu d’associer davantage de parties prenantes aux actions visant à faire de l’état de droit une réalité plus tangible: les partenaires sociaux, les organisations professionnelles telles que les barreaux, et les organisations de terrain qui travaillent avec des personnes et des populations vulnérables plus exposées au risque de préjudice, de désavantage et de discrimination.

    1.9.

    L’état de droit et les droits de l’homme peuvent être perçus par certains comme des concepts excessivement abstraits, lointains, jargonnants et associés à un juridisme abusif. Communiquer efficacement sur l’état de droit nécessite de mettre l’accent sur des valeurs communes et des concepts auxquels chacun peut s’identifier d’équité et de justice. Il peut aussi être utile d’humaniser le récit produit en montrant le visage individuel et la personne réelle qu’il y a derrière des éléments de dossier ou des statistiques.

    1.10.

    Le CESE invite les États membres à intégrer l’état de droit et les droits fondamentaux dans les établissements scolaires et l’enseignement supérieur. L’éducation civique devrait être obligatoire, commencer le plus tôt possible et être enseignée pendant un nombre d’années suffisamment significatif. De plus, des ressources européennes et nationales doivent être mises à disposition pour une formation adéquate des enseignants chargés de l’éducation civique.

    1.11.

    Le cadre en matière de droits de l’homme repose sur le principe de responsabilité et nécessite par conséquent des mesures visant à déterminer qui sera tenu responsable des résultats obtenus et à définir les changements politiques souhaitables. Il importe aussi de dresser l’inventaire des questions d’intérêt général pour la société tout entière, telles que l’accès à l’énergie, aux transports, à l’égalité régionale, au travail, au logement, aux soins de santé et à divers autres services publics, aux niveaux local, régional et national.

    1.12.

    La protection des droits de l’homme et l’état de droit se trouvent confortés par un État-providence fort, quelles que soient les formes de celui-ci au sein de l’Europe. Cette interconnexion est reconnue par le socle européen des droits sociaux, qui apparaît comme un outil politique essentiel pour construire une Union plus inclusive.

    1.13.

    Les mouvements de terrain et celles et ceux ont subi l’expérience de la pauvreté doivent être au cœur d’une approche démocratique des droits de l’homme. Il n’y a pas de meilleur moyen de défendre les droits de l’homme, en particulier les droits sociaux, que de donner droit de cité aux opinions de celles et ceux qui sont les plus touchés par les inégalités, la pauvreté et l’exclusion sociale dans les espaces publics et les débats politiques.

    2.   Observations générales

    2.1.

    Le CESE rappelle la position qu’il a exprimée dans son avis SOC/598 (2018): «L’état de droit se caractérise par son interdépendance et son indissociabilité des garanties qui protègent la démocratie pluraliste et le respect des droits fondamentaux. Il garantit que les gouvernements se conforment aux normes des droits fondamentaux et la démocratie pluraliste garantit que les gouvernements mènent des politiques qui font progresser le bien-être de leurs peuples. En soi, préserver l’état de droit ne garantit pas que la législation respecte les droits fondamentaux ni qu’elle soit élaborée conformément à une procédure inclusive et légitime qui se fonde sur un débat public et la participation de citoyens bien informées, pluralistes et équilibrées. Afin d’éviter une simple “administration par le droit”, il est nécessaire de veiller au respect des droits fondamentaux et des normes de la démocratie pluraliste en sus de celui de l’état de droit» (8).

    2.2.

    Dans ses rapports sur l’état de droit 2021 et 2022, la Commission a fait observer que la préservation de la confiance des citoyens dans les institutions publiques et l’état de droit requiert, entre autres, l’existence d’un système judiciaire indépendant, doté d’un contrôle juridictionnel effectif propre à garantir le respect du droit de l’Union; un engagement public fort pour lutter contre la corruption et la responsabilité démocratique; le pluralisme et la liberté des médias, y compris la transparence sur la propriété des médias; des mécanismes constitutionnels et institutionnels transparents pour garantir l’équilibre des pouvoirs, avec la participation active de la société civile; et le renforcement de la coopération internationale en faveur du développement durable, des droits de l’homme, de la démocratie et de l’état de droit (9). Dans son rapport de 2022, la Commission souligne aussi les menaces non négligeables que fait peser l’agression de la Russie contre l’Ukraine sur les valeurs de l’Union et sur l’ordre fondé sur des règles — il s’agit d’une attaque qui viole gravement le droit international et les principes de la charte des Nations unies et qui, tout en mettant à mal la sécurité et la stabilité européennes et mondiales, porte atteinte à la démocratie et à l’état de droit (10).

    2.3.

    Aucune norme démocratique et représentative ne peut être invoquée pour légitimer des violations de l’état de droit et des droits fondamentaux. Les institutions européennes, et la Commission en particulier, doivent mobiliser tous les instruments à leur disposition pour rétablir l’intégrité des principes de l’Union.

    2.4.

    Par leur action de surveillance de la situation sur le terrain, les organisations de la société civile et les défenseurs des droits de l’homme ont un rôle essentiel à jouer, en particulier lorsque l’état de droit se dégrade et que les droits de l’homme sont menacés (11). Les gouvernements autoritaires menacent les organisations de la société civile non seulement en réduisant et en déplaçant les espaces disponibles pour leurs activités, mais aussi par des menaces ou des persécutions personnelles, des restrictions financières ou une protection insuffisante contre les attaques physiques ou verbales (12).

    2.5.

    Comme indiqué précédemment, la capacité globale des organisations de la société civile et des défenseurs des droits de l’homme à travailler dans le cadre de la charte des droits fondamentaux devrait être considérablement renforcée au moyen d’un ensemble de mesures comprenant des formations et des transferts de connaissances, un soutien organisationnel et financier et une protection contre les attaques et les campagnes délétères (13). À cette fin, le CESE encourage la Commission à proposer une stratégie européenne globale à destination de la société civile pour orienter la collaboration, les actions de renforcement des capacités ou encore une communication efficace sur l’état de droit et les droits fondamentaux.

    2.6.

    Le CESE estime que le travail des organisations de la société civile et des défenseurs des droits de l’homme est essentiel pour aider les groupes vulnérables à faire face à de graves problèmes de sécurité, de bien-être et de dignité. Chacun est susceptible de se trouver un jour dans une situation de vulnérabilité. Dans de nombreux cas, les origines de la vulnérabilité se superposent et entraînent une marginalisation et une discrimination structurelles.

    2.7.

    L’état de droit et la protection des droits fondamentaux devraient être garantis pour ce qui concerne la démocratie, en particulier la promotion d’élections libres et équitables et d’une participation démocratique forte (14). Ceux qui occupent une position leur permettant de contester l’état de droit s’en prennent aussi à l’opposition politique et aux médias de masse indépendants. Le plan d’action pour la démocratie européenne est un pas nécessaire dans cette direction.

    2.8.

    Les partenaires sociaux ont un rôle important à jouer dans la communication sur l’état de droit et les droits fondamentaux. Tous les lieux de travail sont touchés par la détérioration du climat politique et juridique dans un pays. Les entreprises, les PME et les entreprises sociales ne peuvent fonctionner efficacement si les systèmes de protection de l’état de droit et des droits fondamentaux ne sont pas en place. Les partenaires sociaux devraient s’engager à agir pour améliorer leur intégrité et leur efficacité. La possibilité de former un syndicat ou d’adhérer à l’organisation syndicale de son choix relève de la liberté de chaque travailleur, et les syndicats doivent pouvoir fonctionner librement (15). Les travailleurs et les employeurs ont le droit de négocier et de conclure des conventions collectives et, en cas de conflit d’intérêts, de mener des actions collectives pour défendre leurs intérêts, y compris la grève (16).

    2.9.

    L’Agence des droits fondamentaux dispose d’une capacité non négligeable pour recueillir des informations pertinentes. Elle a déjà constitué une vaste base de connaissances que tous les acteurs intéressés peuvent utiliser. Son expertise est solide, et elle devrait servir de base au renforcement de sa dimension de communication. Davantage de ressources devraient être allouées à l’Agence pour que celle-ci s’engage dans la communication publique à destination de tous les États membres. Une coopération accrue est nécessaire avec des institutions spécialisées telles que le Conseil de l’Europe et le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme de l’OSCE (BIDDH).

    2.10.

    L’Union européenne est aussi un acteur mondial dont la responsabilité de respecter l’état de droit et les droits fondamentaux est au cœur de son identité et de son rôle internationaux. Tous les programmes, politiques, actions et instruments extérieurs devraient refléter leur rôle central pour l’Union ainsi que leur importance pour un monde démocratique et pacifique.

    3.   Observations particulières

    3.1.   Discours et cadrage positifs

    3.1.1.

    L’éducation civique sur les principes de la démocratie, les droits fondamentaux et l’état de droit doit être renforcé à tous les niveaux. La Commission devrait également continuer à promouvoir la sensibilisation du public par un programme de communication ambitieux (17).

    3.1.2.

    Le mythe fondateur de l’Union européenne ne suffit plus à lui seul pour exercer un pouvoir d’attraction auprès des populations européennes. L’Union devrait proposer des discours laissant entrevoir un avenir désirable et réactiver les principes clés qui ont joué un rôle majeur dans le projet européen (18), comme ceux d’état de droit et de droits de l’homme. Cela est particulièrement important dans le contexte de l’agression militaire russe contre l’Ukraine.

    3.1.3.

    Le cadre en matière de droits de l’homme repose sur le principe de responsabilité et nécessite par conséquent des mesures visant à déterminer qui sera tenu responsable des résultats obtenus et quel changement politique semble souhaitable. Il importe aussi de dresser l’inventaire des questions d’intérêt général pour la société tout entière, avec des problématiques telles que l’accès aux transports, à l’énergie, au travail, au logement, aux soins de santé et à divers autres services publics, aux niveaux local, régional et national. Il faut aller au-delà de la critique d’une situation où les normes en matière de droits de l’homme ne sont pas respectées et décrire l’avenir que l’état de droit et les droits de l’homme peuvent contribuer à édifier en suscitant dans l’esprit de nos concitoyens des associations positives (19).

    3.1.4.

    Il n’y a pas d’état de droit sans démocratie et droits fondamentaux, et inversement; les trois concepts sont intrinsèquement liés (20). Par conséquent, le CESE invite instamment toutes les parties concernées à cesser de parler de «démocratie illibérale», même lorsqu’il s’agit de critiquer ce concept. Sans principes libéraux, il n’y a pas de démocratie. La démocratie illibérale n’est ni une alternative ni même une forme diluée de démocratie. La démocratie illibérale n’est pas une démocratie.

    3.2.   Politiques nécessaires et domaines d’action pertinents

    3.2.1.

    Comme l’a déjà observé le CESE, une corrélation existe entre, d’une part, l’absence réelle ou perçue par les citoyens de bénéfices tirés de la prospérité économique et, d’autre part, les attitudes négatives à l’égard des institutions publiques et des principes fondamentaux (21).

    3.2.2.

    Afin de défendre les droits de l’homme et l’état de droit, il est nécessaire de prendre des mesures pour définir des politiques susceptibles d’améliorer la vie quotidienne de la population.

    3.2.3.

    La protection des droits de l’homme et l’état de droit se trouvent confortés par un État-providence fort, quelles que soient les formes de celui-ci au sein de l’Europe. Cette interconnexion est reconnue par le socle européen des droits sociaux, qui apparaît comme un outil politique essentiel pour construire une Union plus inclusive (22). Les travailleurs doivent avoir droit à des salaires équitables qui leur assurent un niveau de vie décent (6e principe du socle), et quiconque ne disposant pas de ressources suffisantes doit pouvoir disposer d’un revenu minimum adéquat lui permettant de vivre dans la dignité à tous les stades de la vie, ainsi que d’accéder de façon effective à des biens et services de soutien (14e principe) (23).

    3.2.4.

    La pandémie de COVID-19 rappelle l’importance d’un système de soins de santé public universel, accessible et équitable. Le CESE rappelle la position qu’il a exprimée dans son avis SOC/691 (2022): «L’UE et ses États membres devraient engager une réflexion sociétale approfondie sur les origines de la crise et les raisons pour lesquelles la plupart des systèmes de santé européens ont été précipités au bord de l’effondrement en raison de la pandémie. Des années de politiques d’austérité ont conduit à une tendance générale au désinvestissement dans le secteur de la santé et dans d’autres services sociaux essentiels (aide aux personnes dépendantes et vulnérables, maisons de soins, etc.), créant une bombe à retardement qui a explosé face à un défi sanitaire majeur» (24).

    3.2.5.

    La pandémie n’est pas la seule crise qui affecte les droits fondamentaux. La guerre en Ukraine met en danger des millions de personnes en Ukraine et dans le monde. Le changement climatique et les défis qui y sont liés ou encore les catastrophes telles que les incendies de forêt touchent directement les populations du continent. De nombreux européens sont confrontés à une hausse des prix de l’énergie. Les instruments d’action de l’Europe devraient être mis à jour et adaptés en conséquence.

    3.2.6.

    Les politiques publiques, en particulier celles de réforme économique, devraient être systématiquement fondées sur des évaluations ex ante et ex post des incidences sur les droits de l’homme (25) afin de faciliter des débats nationaux éclairés et inclusifs sur l’arbitrage et l’ajustement des choix politiques (26).

    3.2.7.

    Il convient d’accorder davantage la priorité au chapitre III (Égalité) et au chapitre IV (Solidarité) de la charte des droits fondamentaux en tant qu’éléments essentiels des pouvoirs démocratiques et fondés sur des valeurs de l’Union (27). Tous les droits de l’homme consacrés dans la charte sont indivisibles, interdépendants et tout aussi importants. Comme l’a souligné la Cour européenne des droits de l’homme dans une affaire qui a fait date, il n’existe pas de division indiscutable entre les droits socio-économiques et les droits civils et politiques (28).

    3.2.8.

    Il serait souhaitable de renforcer la coopération entre les institutions européennes et les États membres pour garantir que tous les citoyens et résidents jouissent de tous les droits reconnus par la convention européenne des droits de l’homme, la charte sociale européenne (sous ses multiples formes) et les conventions pertinentes des Nations unies relatives aux droits de l’homme. Le CESE invite la Commission et les États membres à tenir dûment compte du socle européen des droits sociaux et de la charte sociale européenne lors de la conception, de l’interprétation et de la mise en œuvre du droit de l’Union.

    3.2.9.

    Le CESE invite tous les États membres à signer et à ratifier la charte sociale européenne de 1996 (révisée) et à accepter la procédure de réclamations collectives du comité européen des droits sociaux.

    3.2.10.

    Le CESE soutient l’initiative établissant un nouvel outil qui permettrait de prendre des mesures correctives d’ordre économique à l’égard des États membres qui commettent des violations graves et persistantes des valeurs visées à l’article 2 du TUE (29). «[…] la Commission doit y allouer des ressources humaines et financières adéquates et assurer un suivi rigoureux lorsque des éléments font suspecter une infraction. Ce faisant, elle doit appliquer des critères strictement objectifs et enquêter sur les infractions de la même manière dans tous les États membres» (30).

    3.3.   Arguments démocratiques en faveur des droits de l’homme et importance de l’expérience vécue

    3.3.1.

    Selon une vaste enquête menée par l’Agence des droits fondamentaux, près de neuf personnes sur dix au sein de l’Union estiment que les droits de l’homme sont importants pour créer une société plus juste (31). Les européens considèrent que les droits de l’homme peuvent jouer un rôle significatif dans leur vie.

    3.3.2.

    Pour que les droits de l’homme soient une réalité dans toute l’Europe, il est nécessaire de mettre en évidence la manière dont ceux-ci, par exemple les droits sociaux tels que le travail, la sécurité sociale, le logement, l’éducation et la santé, peuvent avoir une influence réelle pour chacun d’entre nous dans notre vie quotidienne, aux endroits qui priment à nos yeux et dans notre cadre de vie quotidien (32).

    3.3.3.

    Les mouvements de terrain et celles et ceux ont subi l’expérience de la pauvreté doivent être au cœur d’une approche démocratique des droits de l’homme. Il n’y a pas de meilleur moyen de défendre les droits de l’homme, en particulier les droits sociaux, que de donner droit de cité aux opinions des personnes les plus touchées par les inégalités, la pauvreté et l’exclusion sociale dans les espaces publics et les débats politiques. Il peut aussi être utile d’humaniser le récit produit et de montrer le visage individuel et la personne réelle qu’il y a derrière des éléments de dossier ou des statistiques. Prendre les droits sociaux au sérieux exige non seulement des politiques différentes, mais aussi des processus plus inclusifs pour les élaborer (33).

    3.3.4.

    La société européenne ne peut se permettre un choix binaire spécieux entre droits et démocratie. Pour faire respecter les droits de l’homme, il faut rendre ceux-ci populaires en construisant et en préservant un mouvement visant à les défendre aux niveaux local, national et mondial.

    3.3.5.

    Les groupes de la société civile doivent se positionner aux avant-postes de ce processus, et les pouvoirs publics de l’Union et des États membres doivent asseoir le socle démocratique des droits de l’homme en agissant de manière transparente et en respectant le rôle de la société civile s’agissant de veiller à ce qu’elle exige d’eux le respect desdits droits. Il convient de renforcer les institutions nationales de défense des droits de l’homme, qui devraient informer les citoyens des voies de recours dont ils disposent.

    Bruxelles, le 14 décembre 2022.

    La présidente du Comité économique et social européen

    Christa SCHWENG


    (1)  Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (JO C 326 du 26.10.2012, p. 391), préambule.

    (2)  Commission de Venise du Conseil de l’Europe, Liste des critères de l’état de droit, adoptée lors de sa 106e session plénière, 2016.

    (3)  Arrêt du 16 février 2022, Pologne/Parlement et Conseil, C-157/21, EU:C:2022:98, arrêt de la CJUE, point 325.

    (4)  Pologne/Parlement et Conseil, C-157/21, points 130 et 131, arrêt du 16 février 2022, Hongrie/Parlement et Conseil, C-156/21, EU:C:2022:97, arrêt de la CJUE, points 116 et 117.

    (5)  Laurent Pech et Petra Bard, Rule of Law Report and the EU Monitoring and Enforcement of Article 2 TEU Values (rapport sur l’état de droit et le suivi et l’application par l’Union des valeurs de l’article 2 du traité UE), rapport à la demande de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures et à la commission des affaires constitutionnelles du Parlement européen, février 2022, p. 12 et 13.

    (6)  Avis du Comité économique et social européen sur «Une démocratie résiliente grâce à une société civile forte et diverse» (avis d’initiative) (JO C 228 du 5.7.2019, p. 24).

    (7)  Avis du Comité économique et social européen sur le «Mécanisme européen de contrôle du respect de l’État de droit et des droits fondamentaux» (avis d’initiative) (JO C 34 du 2.2.2017, p. 8).

    (8)  Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la protection du budget de l’Union en cas de défaillance généralisée de l’état de droit dans un État membre» [COM(2018) 324 final — 2018/0136 (COD)] (JO C 62 du 15.2.2019, p. 173).

    (9)  Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions intitulée «Rapport 2021 sur l’état de droit: La situation de l’état de droit dans l’Union européenne» [COM(2021) 700 final].

    (10)  Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions intitulée «Rapport 2022 sur l’état de droit: La situation de l’état de droit dans l’Union européenne» [COM(2022) 500 final].

    (11)  Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil européen et au Conseil — Poursuivre le renforcement de l’état de droit au sein de l’Union — État des lieux et prochaines étapes envisageables» [COM(2019) 163 final] (JO C 282 du 20.8.2019, p. 39).

    (12)  Avis du Comité économique et social européen sur le «Le populisme et les droits fondamentaux — zones périurbaines et rurales» (avis d’initiative) (JO C 97 du 24.3.2020, p. 53), point 1.6.

    (13)  Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — «Stratégie visant à renforcer l’application de la charte des droits fondamentaux dans l’Union européenne» [COM(2020) 711 final] (JO C 341 du 24.8.2021, p. 50).

    (14)  Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions relative au plan d’action pour la démocratie européenne [COM(2020) 790 final] (JO C 341 du 24.8.2021, p. 56).

    (15)  Article 8, paragraphe 1 du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

    (16)  Article 28 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

    (17)  Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions relative au plan d’action pour la démocratie européenne [COM(2020) 790 final] (JO C 341 du 24.8.2021, p. 56).

    (18)  Avis du Comité économique et social européen sur le «Le populisme et les droits fondamentaux — zones périurbaines et rurales» (avis d’initiative) (JO C 97 du 24.3.2020, p. 53).

    (19)  Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA), 10 clés pour bien communiquer sur les droits de l’homme, 2018; Réseau européen des institutions nationales des droits de l’homme, Tips for Effective Messaging about Economic & Social Rights (Conseils pour une communication efficace sur les droits économiques et sociaux — en anglais), 2019.

    (20)  Avis du Comité économique et social européen sur le «Mécanisme européen de contrôle du respect de l’État de droit et des droits fondamentaux» (avis d’initiative) (JO C 34 du 2.2.2017, p. 8).

    (21)  Avis du Comité économique et social européen sur le «Le populisme et les droits fondamentaux — zones périurbaines et rurales» (avis d’initiative) (JO C 97 du 24.3.2020, p. 53).

    (22)  Commission européenne, «Les 20 principes clés du socle européen des droits sociaux».

    (23)  Avis du Comité économique et social européen sur «Pour une directive-cadre européenne relative à un revenu minimum» [avis d’initiative] (JO C 190 du 5.6.2019, p. 1).

    (24)  Avis du Comité économique et social européen sur le thème «L’impact de la COVID-19 sur les droits fondamentaux et l’état de droit dans l’UE et l’avenir de la démocratie» (avis d’initiative) (JO C 275 du 18.7.2022, p. 11).

    (25)  Rapport d’expert indépendant des Nations unies sur les effets de la dette extérieure et des autres obligations financières internationales connexes des États sur la pleine jouissance de tous les droits fondamentaux, en particulier les droits économiques, sociaux et culturels, «Guiding Principles for human rights impact assessments for economic reform policies» (Principes directeurs pour l’évaluation de l’impact des politiques de réforme économique sur les droits de l’homme), doc. A/HRC/40/57 des Nations unies, 19 décembre 2018.

    (26)  Avis du Comité économique et social européen sur le «Le populisme et les droits fondamentaux — zones périurbaines et rurales» (avis d’initiative) (JO C 97 du 24.3.2020, p. 53).

    (27)  Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — «Stratégie visant à renforcer l’application de la charte des droits fondamentaux dans l’Union européenne» [COM(2020) 711 final] (JO C 341 du 24.8.2021, p. 50).

    (28)  Affaire Airey c. Irlande, requête no 6289/73 (1979), arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) du 9 octobre 1979, paragraphe 26.

    (29)  Avis du Comité économique et social européen sur le thème «L’impact de la COVID-19 sur les droits fondamentaux et l’état de droit dans l’UE et l’avenir de la démocratie» (avis d’initiative) (JO C 275 du 18.7.2022, p. 11).

    (30)  Avis du Comité économique et social européen sur le thème «État de droit et fonds pour la relance» (avis d’initiative) (JO C 194 du 12.5.2022, p. 27).

    (31)  Agence des droits fondamentaux, «Many Europeans believe human rights can build a fairer society but challenges remain» (De nombreux Européens estiment que les droits de l’homme peuvent construire une société plus juste, mais des défis subsistent), communiqué de presse du 24 juin 2020.

    (32)  Casla, Koldo et Barker, Lyle, Human Rights Local, Human Rights Local, Human Rights Centre blog — Université d’Essex, 17 janvier 2022.

    (33)  Casla, Koldo, Nothing about us, without us, is really for us, Global Policy, 14 octobre 2019.


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