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Document 52022IE3162

Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Initiative citoyenne européenne — Sauvons les abeilles et les agriculteurs» (avis d’initiative)

EESC 2022/03162

JO C 100 du 16.3.2023, p. 45–50 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, GA, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

16.3.2023   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 100/45


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Initiative citoyenne européenne — Sauvons les abeilles et les agriculteurs»

(avis d’initiative)

(2023/C 100/07)

Rapporteur:

Arnold PUECH D’ALISSAC

Décision de l’assemblée plénière

19.5.2022

Base juridique

Article 52, paragraphe 2, du règlement intérieur

 

Avis d’initiative

Compétence

Section «Agriculture, développement rural et environnement»

Adoption en section

24.11.2022

Adoption en session plénière

15.12.2022

Session plénière no

574

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

168/0/2

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le succès de cette initiative citoyenne européenne (ICE) montre une attente très forte des citoyens européens vis-à-vis de la Commission européenne (CE). Le Comité économique et social européen (CESE) tient tout d’abord à féliciter l’organisateur et à saluer l’engagement des citoyens pour ce succès, étant donné la difficulté à collecter toutes les signatures nécessaires. Il invite donc la CE à apporter des réponses précises et concrètes aux demandes formulées par cette ICE.

1.2.

Le CESE déplore que la principale proposition de l’ICE, qui consiste à renoncer progressivement aux pesticides de synthèse jusqu’à leur interdiction complète en 2035, ne soit pas mise en lumière dans le titre retenu: «Sauvons les abeilles et les agriculteurs». Il souligne par ailleurs que de nombreux actes juridiques sont en cours d’élaboration ou ont déjà été adoptés par la CE en faveur des abeilles, des pollinisateurs, de la biodiversité, de l’utilisation durable des pesticides et de l’accompagnement des agriculteurs dans la transition agroécologique, mais reconnaît néanmoins que ces mesures n’ont pas permis d’atteindre pleinement leurs objectifs. C’est pourquoi il appelle la CE à prendre des mesures complémentaires pour atteindre concrètement et avec plus d’efficacité les objectifs ambitieux qu’elle se fixe. Il recommande par exemple que soient soutenus plus fortement l’agriculture de précision, l’agriculture numérique, le biocontrôle, la robotique, mais aussi l’agroécologie.

1.3.

Le CESE insiste sur la nécessité de prendre en compte l’ensemble des trois piliers de la durabilité (environnemental, social et économique), sans omettre l’économique qui est souvent mis de côté, dans un contexte essentiel de durabilité des systèmes et de souveraineté alimentaire.

1.4.

Le CESE invite également la CE à réaliser des études d’impact avant de prendre toute décision, pour évaluer notamment les coûts de l’initiative sur la production agricole et sur l’économie, à mettre en parallèle du coût économique que représente la perte de la biodiversité pour les agriculteurs.

2.   Contexte

2.1.   Une ICE pour une agriculture plus respectueuse des abeilles, des hommes et de l’environnement

2.1.1.

Le dispositif de l’ICE offre la possibilité aux citoyens européens de participer activement aux processus démocratiques de l’Union européenne (UE), en demandant à la CE de proposer de nouvelles législations. Dès lors qu’une initiative reçoit le soutien d’au moins 1 million de citoyens de l’UE et atteint les seuils nécessaires dans au moins un quart des États membres (EM) (1), la CE doit répondre à l’ICE.

2.1.2.

L’ICE «Sauvons les abeilles et les agriculteurs! Vers une agriculture respectueuse des abeilles pour un environnement sain» ayant atteint ces seuils, elle demande par conséquent à la CE de proposer des actes juridiques visant à supprimer progressivement les pesticides de synthèse d’ici à 2035, à rétablir la biodiversité et à aider les agriculteurs pendant cette phase de transition.

2.2.   Un contexte de déclin des pollinisateurs et d’érosion de la biodiversité en Europe

2.2.1.

Les demandes formulées par cette ICE se placent dans un contexte où l’Europe fait face à un déclin des abeilles. En effet, d’après la liste rouge européenne des abeilles, une espèce sur trois d’abeilles et de papillons est en déclin et une sur dix est menacée d’extinction (2).

2.2.2.

Or, 84 % des cultures européennes bénéficient au moins partiellement d’une pollinisation animale (3) et 78 % des plantes sauvages de l’UE dépendent des insectes pollinisateurs (4). Leur protection est donc un enjeu crucial pour la production agricole, dans le contexte actuel essentiel de sécurité et de souveraineté alimentaires. De plus, les abeilles sont essentielles à la production de miel, alors que l’Union européenne n’est autosuffisante en miel qu’à 60 %. Pour répondre à la demande, elle doit compter sur les importations (dont 28 % proviennent de Chine), dont la qualité est inférieure à celle du miel européen.

2.2.3.

D’après le rapport d’évaluation sur les pollinisateurs, la pollinisation et la production alimentaire de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) (5), les principaux facteurs de déclin des pollinisateurs sont les changements d’usage des terres, les pratiques agricoles intensives et l’utilisation des pesticides, la pollution environnementale, les espèces exotiques envahissantes, les agents pathogènes et le changement climatique.

2.2.4.

Une ressource alimentaire (nectar et pollen) diversifiée et disponible en quantité suffisante tout au long de l’année est également un facteur clé pour le bon développement des abeilles et pour garantir une production de miel plus régulière pour les apiculteurs (6).

2.2.5.

Le déclin des abeilles s’inscrit dans un contexte plus global d’érosion de la biodiversité. En effet, le rapport de l’évaluation mondiale de la biodiversité et des services écosystémiques, établi en 2019 par l’IPBES (7), a dressé le bilan d’une érosion sans précédent de la biodiversité.

2.2.6.

À la suite de ces rapports de l’IPBES, l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE) et l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer) ont publié, en mai 2022, une expertise scientifique collective (ESCo) sur les impacts des produits phytopharmaceutiques sur la biodiversité et les services écosystémiques (8). L’ESCo met en avant l’aspect multifactoriel du déclin de la biodiversité, ainsi que la difficulté d’établir la part relative des produits phytopharmaceutiques (PPP) dans ce déclin à cause de l’interdépendance des différents facteurs. Les connaissances scientifiques ont en revanche permis à l’ESCo d’établir un lien de causalité clair entre l’utilisation de PPP et le déclin de certaines populations: c’est le cas des insectes pollinisateurs.

2.3.   De nombreux actes juridiques sont en cours d’élaboration ou ont déjà été adoptés par la CE en faveur des abeilles, de l’utilisation durable des pesticides, de la restauration de la biodiversité et de l’accompagnement des agriculteurs dans la transition agroécologique

2.3.1.

Concernant la protection des abeilles et des pollinisateurs: l’UE a lancé en 2018 l’initiative européenne sur les pollinisateurs, qui a pour objectif de lutter contre le déclin des pollinisateurs sauvages dans l’UE. Celle-ci comprend dix actions réparties en trois thèmes prioritaires:

améliorer les connaissances sur le déclin des pollinisateurs, ses causes et ses conséquences,

lutter contre les causes du déclin des pollinisateurs,

sensibiliser, engager la société dans son ensemble et promouvoir la collaboration.

Néanmoins, la Cour des comptes européenne a constaté dans son rapport spécial 15/2020 sur la protection des pollinisateurs sauvages dans l’UE (9) que «cette démarche n’avait guère produit d’effets pour ce qui est d’enrayer le déclin et qu’une meilleure gestion de l’initiative était nécessaire pour que celle-ci puisse atteindre ses objectifs». La CE a par ailleurs elle-même reconnu dans son rapport sur la mise en œuvre de l’initiative (10) que si des progrès significatifs ont été accomplis dans la mise en œuvre des actions de l’initiative, des efforts sont encore nécessaires pour lutter contre les différentes causes du déclin.

2.3.2.

Concernant la réduction des impacts et des risques des produits phytosanitaires: la CE a lancé la révision de sa directive sur l’utilisation durable des pesticides, afin de répondre à la problématique majeure de son efficacité limitée lorsqu’il s’agit de réduire leur utilisation et les risques pour la santé humaine et l’environnement, en présentant en juin 2022 un nouveau projet de règlement (11). Parmi les principales mesures, on peut citer:

des objectifs juridiquement contraignants au niveau de l’UE pour réduire de 50 % l’utilisation et le risque des pesticides chimiques ainsi que l’utilisation des pesticides les plus dangereux d’ici 2030,

de nouvelles mesures pour garantir la mise en œuvre par les agriculteurs de la lutte intégrée contre les ennemis des cultures,

l’interdiction, hors dérogation encadrée, de tous les pesticides dans les zones sensibles.

2.3.3.

La mise sur le marché dans l’UE des PPP est strictement réglementée. Le cadre juridique relatif à la mise sur le marché de PPP dans l’UE est établi par le règlement (CE) no 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil (12). Conformément à celui-ci, des évaluations des risques sont menées avant l’approbation d’une substance active au niveau européen, afin d’éviter des effets néfastes potentiels sur la santé ou sur l’environnement. De plus, les lignes directrices concernant l’évaluation des risques des produits phytopharmaceutiques sur les abeilles [document d’orientation sur les abeilles ou «Bee Guidance Document» (13)] sont en cours de révision pour prendre en compte les dernières avancées scientifiques dans ce domaine.

2.3.4.

Concernant la restauration de la biodiversité dans les zones agricoles: l’UE peut s’appuyer, même s’il ne concerne pas que des zones agricoles, sur le réseau Natura 2000 et sur les directives «Oiseaux» (14) et «Habitats» (15), qui forment le socle de la législation européenne en matière de conservation de la nature. La CE a également mis en place la stratégie de l’UE en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030 (16). Celle-ci contient notamment des actions et engagements visant à la restauration de la biodiversité dans les zones agricoles, déclinés dans le projet de règlement sur la restauration de la nature (17), présenté par la CE le 22 juin 2022. En particulier, l’article 8 du projet consacrerait l’objectif contraignant pour les EM de renverser le déclin des populations de pollinisateurs d’ici 2030, et l’article 9 consacrerait des engagements de restauration des écosystèmes agricoles, comme couvrir au moins 10 % des espaces agricoles de l’UE avec des éléments aux «caractéristiques paysagères à haute diversité» d’ici 2030.

2.3.5.

Concernant l’accompagnement des agriculteurs dans la transition: la nouvelle PAC 2023-2027 est un outil clé pour atteindre les objectifs ambitieux du pacte vert pour l’Europe et accompagner les agriculteurs. Un rapport spécial de la Cour des comptes avait montré en 2020 que la contribution de la PAC actuelle n’avait pas permis d’enrayer le déclin de la biodiversité dans les terres agricoles (18). La Cour des comptes avait conclu que «le suivi, par la CE, des dépenses liées à la biodiversité est peu fiable, que l’impact des paiements directs dans le cadre de la PAC est limité ou inconnu, et enfin, que la CE et les EM ont favorisé des mesures de développement rural ayant un impact assez faible». La nouvelle PAC prévoit de nouvelles mesures pour améliorer son impact environnemental, comme une conditionnalité améliorée.

2.3.6.

Des textes et travaux européens dans d’autres secteurs que l’agriculture peuvent aussi avoir un effet indirect en faveur des pollinisateurs, comme le paquet législatif «Ajustement à l’objectif 55», en référence à l’objectif de l’UE de réduire ses émissions de carbone de 55 % d’ici 2030 (les abeilles étant affectées également par le changement climatique), le plan d’action «zéro pollution» destiné à supprimer la pollution dans l’air, l’eau et les sols, la directive sur les énergies renouvelables, ou encore la nouvelle stratégie européenne pour les forêts, avec l’ambition de la CE de planter trois milliards d’arbres à travers l’Europe d’ici 2030.

3.   Observations générales

3.1.

Le CESE souligne l’importance des ICE en tant qu’outil de participation directe des citoyens européens. En effet, l’ICE est l’outil de démocratie participative le plus puissant existant au niveau européen. Le CESE, en tant que pont entre les organisations de la société civile et les institutions européennes, a renforcé au fil des années la place donnée aux ICE et augmenté leur visibilité dans le travail quotidien des institutions européennes. Il se félicite que cet avis soit le premier à être adopté sur une ICE, avant la réponse de la CE, et invite cette dernière à répondre de manière précise aux demandes formulées.

3.2.

Le CESE déplore que la principale proposition de l’ICE, qui consiste à renoncer progressivement aux pesticides de synthèse jusqu’à leur interdiction complète en 2035, ne soit pas mise en lumière dans le titre retenu: «Sauvons les abeilles et les agriculteurs». Il souligne que de nombreux actes juridiques sont en cours d’élaboration ou ont déjà été adoptés par la CE pour tenter de répondre à ces demandes, mais reconnaît que ces mesures n’ont pas permis d’atteindre pleinement leurs objectifs. C’est pourquoi il appelle la CE à prendre des mesures complémentaires pour atteindre concrètement et plus rapidement ses objectifs. Le CESE insiste néanmoins sur la nécessité de prendre en compte l’ensemble des trois piliers de la durabilité (environnemental, social et économique), dans un contexte essentiel de durabilité des systèmes et de souveraineté alimentaire, et de réaliser des études d’impact avant de prendre toute décision, pour évaluer notamment les coûts de l’initiative sur la production agricole et sur l’économie.

4.   Observations particulières

4.1.

Concernant la demande de l’ICE de «réduire progressivement de 80 % l’utilisation de pesticides de synthèse dans l’agriculture de l’UE d’ici à 2030, en commençant par supprimer les produits les plus dangereux, de manière à ne plus recourir à des pesticides de synthèse à l’horizon 2035»:

4.1.1.

Le CESE met en garde contre la proposition de fixer des objectifs idéalistes ou inatteignables dans un délai trop contraint. Il souligne que la CE propose déjà de réduire de 50 % l’utilisation et le risque des pesticides chimiques ainsi que l’utilisation des pesticides les plus dangereux d’ici 2030. De manière plus globale, il s’oppose à la fixation d’objectifs de réduction des pesticides sans lien avec la disponibilité de solutions alternatives efficaces et accessibles pour les agriculteurs.

4.1.2.

Le CESE souligne que l’encadrement réglementaire des PPP en Europe est parmi les plus exigeants au monde en termes d’objectifs, puisqu’il fixe comme principe l’absence d’effets inacceptables sur l’environnement.

4.1.3.

Pour le CESE, le déclin des abeilles domestiques et des pollinisateurs sauvages ayant des causes multifactorielles, la sortie des pesticides ne devrait pas être perçue comme le levier unique ou principal pour assurer leur sauvetage. Il est essentiel de lutter contre l’ensemble des facteurs de déclin. Par exemple, pour l’abeille domestique, la lutte contre le varroa et le frelon asiatique sont des préoccupations majeures pour les apiculteurs professionnels, qui espèrent de nouvelles solutions de traitement pour mieux protéger leurs abeilles.

4.1.4.

Le CESE fait le constat de l’importance des abeilles domestiques, des pollinisateurs sauvages et des autres insectes pour l’agriculture (pollinisation des cultures, régulation naturelle des ravageurs, etc.). Il donne en exemple les partenariats gagnants-gagnants entre agriculteurs et apiculteurs, de type «Adopte une ruche» (19), lancés par les agriculteurs. En effet, les agriculteurs qui adoptent des ruches veillent particulièrement à la protection des abeilles lors de la réalisation de traitements phytosanitaires destinés à protéger leurs cultures. Il faudrait également développer les dispositifs de type «ApiAlert» (20), permettant de compter la mortalité des ruches et d’objectiver les causes réelles de leur mortalité.

4.2.

Concernant la demande de l’ICE de «restaurer les écosystèmes naturels dans les zones agricoles pour que l’agriculture devienne un moyen de rétablir la biodiversité»:

4.2.1.

Le CESE souligne que l’activité humaine, comme certaines pratiques agricoles, fait partie des causes du déclin des pollinisateurs et de la biodiversité, mais que l’agriculture peut également être une solution. Il souhaite par exemple que soient davantage soutenus des projets comme la replantation de haies ou le développement de ressources mellifères par les agriculteurs, afin de consacrer ces derniers en tant qu’acteurs de la sauvegarde des abeilles et de la biodiversité. Par ailleurs, il sera essentiel de mieux rémunérer les agriculteurs pour les services écosystémiques qu’ils rendent, afin de les soutenir dans la réalisation de ce type de projets.

4.2.2.

Le CESE constate la forte ambition de la CE pour que l’agriculture devienne un moyen de rétablir la biodiversité, avec les objectifs et mesures des stratégies «Biodiversité» et «De la ferme à la table» et le projet de règlement sur la restauration de la nature, et il s’inquiète pour le respect de la souveraineté alimentaire de l’Union européenne.

4.2.3.

Le CESE considère qu’il faudrait également valoriser les démarches volontaires d’initiatives agricoles en faveur des pollinisateurs ou de la biodiversité qui essaiment dans toute l’Europe. Par exemple, en France, la FNSEA a publié un recueil des initiatives agricoles favorables aux pollinisateurs (21). Visant la multiplication des bonnes pratiques «Api-Agri», celui-ci recense des initiatives volontaires en France en faveur des pollinisateurs, en compilant des exemples inspirants, positifs et pragmatiques. Sur le même principe, une campagne de communication intitulée «10 actions favorables aux abeilles dans votre ferme» (22) a été lancée en 2018 au Danemark. Elle fait la promotion de différentes initiatives volontaires que les agriculteurs peuvent prendre au niveau de leur ferme, comme planter des haies, implanter des bandes fleuries, ou encore limiter la dérive lors de l’application de produits phytopharmaceutiques, en pulvérisant dans les conditions climatiques appropriées (ex: vent faible) ou en utilisant des systèmes de réduction de la dérive.

4.2.4.

Le CESE considère que pour restaurer les écosystèmes naturels dans les zones agricoles, la CE devra s’appuyer sur un ensemble de leviers: la maintenance et la restauration d’infrastructures agroécologiques, la diversification des cultures pour favoriser la mise en place d’une mosaïque de cultures dans le paysage, le développement de l’agroforesterie, de l’agriculture biologique et des produits sous signes d’identification de qualité et d’origine (SIQO), le maintien des prairies permanentes, la réduction de l’utilisation et des impacts des pesticides, etc.

4.3.

Concernant la demande de l’ICE de «réformer l’agriculture en accordant la priorité à une agriculture diversifiée et durable à petite échelle, en favorisant une augmentation rapide des pratiques agroécologiques et biologiques et en permettant une formation des agriculteurs et une recherche indépendantes en matière d’agriculture sans pesticides»:

4.3.1.

Le CESE signale l’existence d’un rapport de 300 experts de 23 EM, qui ont analysé les impacts potentiels de la future PAC sur la protection et la restauration de la biodiversité (23). Les scientifiques formulent des propositions concrètes pour améliorer l’impact de la PAC sur la biodiversité et accompagner les agriculteurs dans cette transition. Le CESE recommande à la CE et aux EM de s’en inspirer dans le cadre de la réforme de la PAC, qui est un outil puissant de réforme de l’agriculture.

4.3.2.

Néanmoins, le CESE considère que la transition agroécologique et l’amélioration de la biodiversité ne pourront pas se faire uniquement depuis Bruxelles via la PAC, et souligne également l’importance de l’échelon local. En effet, pour s’adapter aux spécificités des territoires, des solutions locales doivent aussi être développées, auprès des agriculteurs et des propriétaires fonciers.

4.3.3.

De plus, le CESE tient à souligner son attachement à la recherche d’alternatives efficaces, afin de ne laisser aucun agriculteur sans solution. C’est pourquoi il souhaiterait encourager davantage l’agriculture de précision, l’agriculture numérique, le biocontrôle, la robotique, mais aussi l’agroécologie, avec un volet financier conséquent pour le développement de la recherche, la concrétisation des innovations et leur adoption par les filières et les agriculteurs.

4.3.4.

Le CESE reconnaît l’importance de l’apiculture comme secteur économique dans de nombreux EM, qui contribue notamment au développement rural et au maintien des populations dans les territoires. Face au déficit de production de miel en Europe, le soutien à l’apiculture et à la valorisation économique du miel et des autres produits de la ruche (pollen, cire, gelée royale, etc.) devrait être renforcé pour maintenir une apiculture professionnelle et respectueuse de l’environnement, capable de répondre aux besoins de consommation de miel de l’Europe. Le CESE souligne par ailleurs l’importance pour les apiculteurs de se rassembler au sein des organisations professionnelles pour mieux se structurer et défendre plus efficacement les intérêts de l’apiculture européenne. En particulier, il souhaite que la CE saisisse l’opportunité de la révision à venir de la directive relative au miel pour renforcer l’étiquetage du miel et la traçabilité, afin de lutter plus efficacement contre les fraudes et les importations des pays tiers ne respectant pas nos normes, qui affaiblissent la production européenne de miel.

4.3.5.

Enfin, pour que la transition agroécologique soit acceptable pour les agriculteurs européens, le CESE recommande à la CE de concrétiser rapidement la mise en œuvre de la réciprocité des normes, afin de limiter les distorsions de concurrence pour les agriculteurs européens.

Bruxelles, le 15 décembre 2022.

La présidente du Comité économique et social européen

Christa SCHWENG


(1)  Règlement (UE) 2019/788 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 relatif à l’initiative citoyenne européenne (JO L 130 du 17.5.2019, p. 55).

(2)  Nieto et al., 2014. European Red List of Bees.

(3)  Williams, 1994. The dependence of crop production within the European Union on pollination by honeybees.

(4)  Ollerton et al., 2011. How many flowering plants are pollinated by animals?

(5)  IPBES, 2016. Rapport d’évaluation sur les pollinisateurs, la pollinisation et la production alimentaire.

(6)  ITSAP, 2015. Ressources alimentaires pour les abeilles.

(7)  IPBES, 2019. Le rapport de l’évaluation mondiale de la biodiversité et des services écosystémiques.

(8)  INRAE et Ifremer, 2022. Impacts des produits phytopharmaceutiques sur la biodiversité et les services écosystémiques.

(9)  Cour des comptes européenne. Rapport spécial 15/2020.

(10)  COM(2021) 261 final.

(11)  COM(2022) 305 final.

(12)  Règlement (CE) no 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil (JO L 309 du 24.11.2009, p. 1).

(13)  EFSA, 2022. Revised guidance on the risk assessment of plant protection products on bees (Apis mellifera, Bombus spp. and solitary bees).

(14)  Directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages (JO L 20 du 26.1.2010, p. 7).

(15)  Directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (JO L 206 du 22.7.1992, p. 7).

(16)  COM(2020) 380 final.

(17)  COM(2022) 304 final.

(18)  Cour des comptes européenne. Rapport spécial 13/2020.

(19)  Le Betteravier. Quand 14 agriculteurs de l’Aisne deviennent apiculteurs.

(20)  20 Minutes. Toulouse: Pour suivre la mortalité des abeilles, BeeGuard met au point un compteur vidéo sur ses ruches connectées.

(21)  FNSEA, 2022. Recueil des initiatives agricoles favorables aux pollinisateurs.

(22)  Danish Agriculture & Food Council, 2018. 10 bee-friendly recommendations for your farm.

(23)  Pe’er et al., 2022. How can the European Common Agricultural Policy help halt biodiversity loss? Recommendations by over 300 experts.


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