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Document 52022AB0016

Avis de la Banque Centrale Européenne du 27 avril 2022 sur une proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2013/36/UE en ce qui concerne les pouvoirs de surveillance, les sanctions, les succursales de pays tiers et les risques environnementaux, sociaux et de gouvernance. (CON/2022/16) 2022/C 248/03

CON/2022/16

JO C 248 du 30.6.2022, p. 87–96 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, GA, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

30.6.2022   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 248/87


AVIS DE LA BANQUE CENTRALE EUROPÉENNE

du 27 avril 2022

sur une proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2013/36/UE en ce qui concerne les pouvoirs de surveillance, les sanctions, les succursales de pays tiers et les risques environnementaux, sociaux et de gouvernance.

(CON/2022/16)

(2022/C 248/03)

Introduction et fondement juridique

Les 17 et 21 janvier 2022, la Banque centrale européenne (BCE) a reçu une demande de consultation de la part du Parlement européen et du Conseil de l’Union européenne portant sur une proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2013/36/UE en ce qui concerne les pouvoirs de surveillance, les sanctions, les succursales de pays tiers et les risques environnementaux, sociaux et de gouvernance (1) (ci-après les « modifications proposées de la CRD »).

Les modifications proposées de la CRD sont étroitement liées à une autre proposition au sujet de laquelle la BCE a reçu une demande de consultation, à savoir la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) n° 575/2013 en ce qui concerne les exigences pour risque de crédit, risque d’ajustement de l’évaluation de crédit, risque opérationnel et risque de marché et le plancher de fonds propres (2) (ci-après désignées, avec les modifications proposées de la CRD, comme le « paquet de réformes bancaires de la Commission »).

La BCE a compétence pour émettre un avis en vertu de l’article 127, paragraphe 4, et de l’article 282, paragraphe 5, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, étant donné que les modifications proposées de la CRD contiennent des dispositions ayant une incidence sur les missions de la BCE ayant trait à la surveillance prudentielle des établissements de crédit conformément à l’article 127, paragraphe 6, du traité, ainsi que des dispositions ayant une incidence sur la contribution du Système européen de banques centrales à la bonne conduite des politiques en ce qui concerne la stabilité du système financier, telle que visée à l’article 127, paragraphe 5, du traité. Conformément à l’article 17.5, première phrase, du règlement intérieur de la Banque centrale européenne, le présent avis a été adopté par le conseil des gouverneurs.

Observations générales

La BCE soutient fermement le paquet de réformes bancaires de la Commission, lequel met en œuvre des éléments importants du programme de réforme réglementaire mondial dans le droit de l’Union. Il consolidera le corpus réglementaire unique de l’Union et renforcera considérablement le cadre réglementaire dans les domaines où les autorités de surveillance ont détecté des lacunes susceptibles de se traduire par une surveillance et une couverture insuffisantes des risques.

Premièrement, le renforcement de la manière dont les risques en matière environnementale, sociale et de gouvernance (ESG) sont traités en imposant des exigences plus strictes et en étendant la boîte à outils de surveillance en la matière contribuera à garantir que les établissements développent de manière proactive des cadres renforcés de gestion des risques, réduisant ainsi la probabilité d’une accumulation de risques excessifs par les établissements individuels et par le système financier dans son ensemble.

Deuxièmement, la mise en œuvre fidèle du plancher de fonds propres réduira la variabilité injustifiée des pondérations de risque (3) et l’absence de double comptage des risques en rapport avec les autres exigences est bienvenue, les complexités opérationnelles devant en même temps être évitées.

Troisièmement, des dispositions harmonisées pour l’évaluation des administrateurs et du personnel clé des banques (évaluations de la compétence et de l’honorabilité) permettront une surveillance efficace et renforceront la bonne gouvernance.

Quatrièmement, un ensemble commun de règles pour les succursales de groupes bancaires de pays tiers opérant dans des États membres remplacera des approches nationales hétérogènes et renforcera le marché unique.

Cinquièmement, une harmonisation étendue des pouvoirs nationaux liés à l’acquisition de participations qualifiées, aux transferts d’actifs ou de passifs, aux fusions ou aux scissions, ainsi qu’au régime de sanctions, garantira la cohérence et la solidité du cadre.

Sixièmement, la BCE appelle à une cohérence entre la directive n° 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil (4) (ci-après la « CRD ») et le règlement (UE) n° 1024/2013 du Conseil (5) sur les questions relatives à l’indépendance de la surveillance en général et aux conflits d’intérêts en particulier. Pour limiter les éventuels conflits d’intérêts, il est important d’adopter une approche stricte mais proportionnée et souple, permettant de tenir dûment compte de chaque situation individuelle.

Enfin, le fait d’autoriser les autorités de surveillance à retirer l’agrément des établissements de crédit qui ont été déclarés en défaillance avérée ou prévisible, sans être toutefois éligibles à une résolution au motif que le critère de l’intérêt public n’est pas rempli, facilitera la sortie ordonnée du marché par ces banques (6).

Le présent avis traite de questions particulièrement importantes pour la BCE, lesquelles ont été réparties dans les sections présentées ci-dessous.

1.   Risques en matière environnementale, sociale et de gouvernance (risques ESG)

1.1.   Soutien des modifications proposées

La BCE est résolument favorable à la proposition de la Commission visant à renforcer les exigences relatives aux risques ESG pour les établissements de crédit et le mandat des autorités compétentes s’y rapportant. La BCE partage le point de vue selon lequel les risques ESG peuvent avoir des répercussions considérables sur la stabilité des établissements à titre individuel comme sur celle de l’ensemble du système financier. C’est à juste titre que la Commission a fixé des objectifs ambitieux pour l’adaptation de l’Union aux effets des risques ESG et sa transition vers une économie durable, impliquant des changements spécifiques de son système productif dans un horizon temporel limité. La stratégie prévue met en avant que « le succès du pacte vert pour l’Europe dépend de la contribution de tous les acteurs économiques et de leur incitation à atteindre nos objectifs. À cette fin, les établissements financiers doivent transposer les objectifs de durabilité de l’Union dans leurs stratégies de financement à long terme et dans leurs processus décisionnels. » (7) La transition et les risques qui y sont associés touchent presque tous les secteurs de l’économie et ont des effets généralisés à l’ensemble des régions. Ils dépendent en outre des politiques de décarbonation, de l’évolution des préférences des consommateurs et des investisseurs, ainsi que des évolutions technologiques. Ces effets généralisés justifient des stratégies adaptées ainsi qu’un renforcement des capacités de gestion des risques pour garantir la résilience des modèles commerciaux des établissements de crédit à court, moyen et long terme et éviter l’accumulation de risques de transition excessifs dans leurs portefeuilles. Il est donc essentiel que les établissements de crédit surveillent le risque découlant du décalage entre leurs portefeuilles et les objectifs de transition de l’Union, en établissant des calendriers ambitieux et concrets en conséquence, y compris des étapes intermédiaires, aux fins de leur planification stratégique.

La BCE soutient la proposition visant à couvrir les risques ESG de manière plus explicite dans les exigences prudentielles, ce qui contribuera à réduire au minimum les menaces que ces risques font peser sur les établissements individuels et la stabilité financière. Une récente évaluation prudentielle de la BCE a mis en évidence la nécessité d’une meilleure gestion interne des risques bancaires et d’une surveillance prudentielle accrue de ces risques. Cet exercice complet a révélé qu’aucun établissement n’est sur le point de parvenir à mettre ses pratiques à la hauteur des attentes prudentielles en matière de risques liés au climat et à l’environnement (C&E) et que les établissements eux-mêmes considèrent que 90 % de leurs pratiques déclarées sont seulement partiellement, si ce n’est aucunement, alignées sur les attentes prudentielles de la BCE (8).

La BCE reconnaît la hiérarchisation des risques C&E par rapport aux facteurs sociaux et de gouvernance, y compris au regard des différences de méthodologie. Les risques C&E liés au développement durable comprennent notamment les menaces découlant de la transition nécessaire vers une économie plus durable et de l’adaptation à des menaces physiques croissantes. Les risques de transition et les risques matériels sont particuliers en comparaison d’autres risques prudentiels et, étant donné qu’ils s’accroissent au fil du temps, une planification minutieuse et des stratégies d’atténuation claires sont nécessaires, des mesures décisives et immédiates à court terme pouvant par ailleurs être nécessaires pour atténuer les effets à long terme.

La BCE soutient l’exigence proposée visant à ce que les établissements de crédit élaborent des plans spécifiques pour surveiller et traiter les risques ESG à court, moyen et long termes. Cela permettra aux établissements de crédit de mesurer les risques ESG sur des horizons plus longs et d’évaluer en détail les changements structurels susceptibles de se produire dans les secteurs auxquels ils sont exposés, en fonction des trajectoires de transition définies par le cadre juridique de l’Union (9). L’exigence d’élaboration de tels plans accroîtra la transparence relative aux risques auxquels le système financier est exposé. Elle permettra en outre de garantir que les établissements de crédit vérifient de manière proactive, y compris en lien avec les objectifs de transition de l’Union, si leurs stratégies tiennent ou non suffisamment compte des considérations en matière ESG, atténuant ainsi les risques de réputation ou ceux découlant de l’appréhension d’une évolution rapide des marchés.

La BCE est prête à collaborer avec les agences de l’Union pour suivre les progrès accomplis par les établissements de crédit dans l’élaboration de leurs plans spécifiques (nouvel article 76, paragraphe 2) et souligne la nécessité d’agir rapidement sur ce front. La BCE estime qu’il est nécessaire de donner la priorité à la résilience et à l’adaptation des établissements aux effets négatifs à long terme des risques ESG. Les orientations proposées par l’Autorité bancaire européenne (ABE) sur le contenu des plans des établissements [nouvel article 87 bis, paragraphe 5, point b)] seront particulièrement importantes à cet égard, et la BCE estime donc que ces orientations devraient être publiées dans un délai de 12 mois. En revanche, un délai de 24 mois semble plus approprié en ce qui concerne les orientations proposées sur les normes minimales et les méthodes de référence [nouvel article 87 bis, paragraphe 5, point a)].

Une gestion interne adéquate des risques, y compris une planification spécifique, facilitera également l’évaluation des risques ESG par les autorités compétentes et macroprudentielles. Dans le contexte de l’articulation plus poussée de l’obligation incombant aux établissements de crédit de gérer tous les risques significatifs, en vérifiant leur résilience aux effets négatifs à long terme des risques de C&E, la BCE se félicite du renforcement des pouvoirs de surveillance y afférents selon des modalités cohérentes avec l’horizon temporel de la concrétisation des risques ESG. Cela permettra à la BCE de traiter plus efficacement les risques ESG, à commencer par les risques liés au climat et à l’environnement, qui affectent la situation prudentielle de l’établissement de crédit (par exemple, les fonds propres et la liquidité) à moyen et à long termes (c’est-à-dire de cinq à dix ans). Ces exigences aideront également les autorités macroprudentielles à atténuer les répercussions systémiques des risques ESG, notamment en analysant leurs aspects systémiques, par exemple au moyen de tests de résistance climatique à l’échelle de l’économie. Tous ces éléments devraient faire que la BCE dispose d’outils plus adéquats pour contribuer à éviter, conjointement avec les autres autorités compétentes, l’accumulation d’actifs échoués dans les bilans des établissements de crédit et à assurer la complémentarité entre les approches microprudentielle et macroprudentielle.

En ce qui concerne la boîte à outils macroprudentielle, la BCE se félicite également de la clarification apportée par les propositions de modification de la CRD, dans un considérant duquel il ressort que le cadre du coussin pour le risque systémique peut déjà être utilisé pour traiter différents types de risques systémiques, y compris les risques liés au changement climatique. Dans la mesure où les risques liés au changement climatique sont susceptibles d’avoir de graves conséquences négatives pour le système financier et l’économie réelle dans les États membres, un taux de coussin pour le risque systémique peut être introduit pour atténuer ces risques.

1.2.   Résilience aux effets négatifs à long terme des risques ESG

En ce qui concerne les scénarios et les méthodes d’évaluation de la résilience aux effets négatifs à long terme des risques ESG, en particulier le changement climatique et la dégradation de l’environnement, la BCE tient à souligner que les défis qu’ils posent au secteur financier ne peuvent être évalués et traités qu’en intégrant l’analyse scientifique dans l’élaboration des politiques. La contribution de la recherche scientifique, des entités du secteur financier et des agences environnementales jouera un rôle déterminant en la matière. La BCE est favorable à l’engagement pris par la Commission de renforcer la coopération entre toutes les autorités publiques concernées, y compris les autorités de surveillance, et à ce que cette coopération vise à « aider à définir des objectifs intermédiaires pour le secteur financier » (10). Néanmoins, il serait utile de rappeler, dans les considérants des propositions de modification de la CRD, l’engagement pris dans l’action n° 5, point c), de la stratégie pour le financement de la transition vers une économie durable [COM (2021) 390 final]. En particulier, il importe de souligner que la Commission s’est engagée à renforcer la coopération avec la BCE, le Comité européen du risque systémique, les autorités européennes de surveillance et l’Agence européenne pour l’environnement, et que cette coopération a pour but de contribuer à la définition d’objectifs intermédiaires pour le secteur financier, à mieux comprendre si les progrès en cours et futurs sont suffisants et, partant, à faciliter une action politique plus concertée de la part de toutes les autorités publiques concernées, lorsque cela est nécessaire. La BCE apprécierait qu’il soit fait référence à cet engagement également dans le cadre du mandat établi dans le nouvel article 87 bis, paragraphe 5, point c), de la CRD.

2.   Plancher de fonds propres

La BCE se félicite de l’introduction du plancher de fonds propres, lequel constitue un élément important des réformes de Bâle III (11). La BCE observe que les propositions de modifications de la CRD comprennent certains mécanismes régissant l’interaction entre le plancher de fonds propres et la fixation i) des exigences prudentielles du pilier 2 et ii) des coussins macroprudentiels.

La BCE souscrit à l’objectif général consistant à éviter un double comptage des risques dans les cadres microprudentiel et macroprudentiel, et à veiller à ce que les exigences correspondantes restent adéquates. En ce qui concerne les exigences du pilier 2, la BCE tient à souligner qu’il existe déjà une exigence générale d’éviter tout double comptage des risques et qu’elle est donc prête à veiller à ce qu’aucun double comptage des risques ne se produise dans le cadre de ses compétences. Pour ce qui est des coussins macroprudentiels, conformément à l’usage qui en est fait actuellement, ceux-ci portent sur des risques macroprudentiels, lesquels diffèrent de l’objectif du plancher de fonds propres consistant à réduire les risques de variabilité excessive ou de manque de comparabilité des pondérations de risque résultant de l’utilisation de modèles internes par un établissement.

En outre, la proposition exige que le montant nominal des exigences du pilier 2 n’augmente pas immédiatement dès qu’un établissement devient lié par le plancher de fonds propres. La BCE approuve l’objectif sous-jacent et l’esprit de ces dispositions visant à neutraliser les effets arithmétiques injustifiés des exigences du pilier 2 découlant de l’introduction du plancher de fonds propres et se tient prête à prendre les mesures nécessaires pour neutraliser ces effets.

Il est important que les mécanismes proposés respectent les pratiques de surveillance et macroprudentielles existantes, et qu’ils évitent les complexités opérationnelles et les charges administratives pour les autorités compétentes et macroprudentielles. En particulier, en ce qui concerne les exigences du pilier 2, comme cela a déjà été mentionné, la BCE considère que les autorités compétentes ont déjà pour mandat, dans le cadre réglementaire actuel, d’éviter un double comptage des risques et les modifications injustifiées des exigences prudentielles, et que les orientations émises par l’ABE en vertu de l’article 107, paragraphe 3, de la CRD fournissent une base juridique solide pour établir une méthode commune pour y parvenir. Si la BCE ne voit donc pas la nécessité d’inscrire de manière permanente dans la législation de niveau 1 la manière dont le plancher de fonds propres devrait être pris en compte lors de la fixation des exigences du pilier 2, elle prend note de la proposition législative spécifique sur cette question et souligne la nécessité de veiller à ce que la disposition proposée – y compris le gel temporaire – n’interfère pas de manière permanente avec l’approche actuelle du pilier 2 et sa fréquence. La BCE estime que la neutralisation instantanée devrait avoir lieu dès que la banque devient liée par le plancher. Les années suivantes, tout ajustement nécessaire serait effectué dans le cadre du processus régulier de contrôle et d’évaluation prudentiels.

Il serait souhaitable que les législateurs de l’Union confient à l’ABE un mandat spécifique pour élaborer des orientations relatives à la manière dont les autorités compétentes devraient traiter l’incidence du plancher de fonds propres lors de la fixation des exigences du pilier 2, comme prévu dans la proposition de règlement modifiant le règlement (UE) n° 575/2013 présentée par la Commission (article 465, paragraphe 1). Au cas où les législateurs de l’Union souhaiteraient inclure une référence législative à cette question, la BCE a également formulé des suggestions dans le document de travail technique concernant la manière dont le projet législatif pourrait être modifié pour respecter à la fois l’approche actuelle du pilier 2 et sa fréquence, tout en réglementant explicitement l’interaction entre le plancher de fonds propres et les exigences du pilier 2 dans le texte de niveau 1.

En ce qui concerne le coussin pour le risque systémique, la BCE est très préoccupée par l’exigence proposée d’un examen obligatoire de son calibrage, laquelle prévoit un plafonnement dynamique pour le coussin gelant celui-ci aux niveaux antérieurs au plancher de fonds propres jusqu’à ce que l’examen en question soit achevé et que les résultats soient publiés.

Il y a trois raisons à ces préoccupations.

La première est que l’examen obligatoire proposé complexifie le cadre et accroît la charge administrative en ce qu’il implique que les autorités devraient examiner le calibrage du coussin pour le risque systémique de chaque établissement de crédit devenant lié individuellement par le plancher de fonds propres. La deuxième est que le plafonnement temporaire et l’examen spécifique à chaque établissement du coussin pour le risque systémique sont en décalage avec la nature macroprudentielle du coussin et de son application (sous-)sectorielle. Il en résulterait un traitement spécifique injustifié de chaque établissement de crédit concerné par un coussin pour le risque systémique devenant lié par le plancher de fonds propres. La troisième est que la CRD contient déjà des dispositions adéquates pour l’examen régulier des coussins de fonds propres, lesquelles sont suffisantes pour garantir toute modification requise des taux appliqués.

La BCE a des préoccupations similaires en ce qui concerne l’exigence proposée consistant à examiner le calibrage du coussin des autres établissements d’importance systémique (autres EIS) lorsque le plancher de fonds propres devient contraignant. Tout comme l’examen du coussin pour le risque systémique, cette obligation d’examiner le coussin pour les autres EIS complexifie le cadre et accroît la charge administrative. En outre, les examens réguliers du coussin pour les autres EIS sont déjà prévus dans la CRD.

Au lieu du mécanisme d’examen proposé en rapport avec le coussin pour le risque systémique lorsque le plancher de fonds propres devient contraignant pour un établissement de crédit, la BCE propose de préciser explicitement que le coussin pour le risque systémique ne peut pas être utilisé pour traiter le risque pris en compte par le plancher de fonds propres, indépendamment du fait que le plancher de fonds propres devienne contraignant ou non pour un établissement donné. Cette clarification devrait de préférence être insérée dans les considérants, mais elle pourrait également être insérée dans un article de la CRD. Il conviendrait qu’elle réponde à toute préoccupation éventuelle relative au double comptage des risques au titre du plancher de fonds propres et du coussin pour le risque systémique. Le même raisonnement et la même clarification pourraient également être appliqués en ce qui concerne le coussin pour les autres EIS.

3.   Compétence et honorabilité

3.1.   Soutien des propositions de modification

La BCE est résolument favorable à la proposition de la Commission de réviser le cadre de compétence et d’honorabilité. La surveillance de la compétence et de l’honorabilité des membres du conseil d’administration des établissements de crédit est un outil de surveillance clé pour améliorer la gouvernance des établissements de crédit. La bonne gouvernance des établissements de crédit renforce leur résilience face aux évolutions défavorables des marchés et constitue une condition préalable essentielle à la stabilité financière. Dans le cadre de ses activités de surveillance, la BCE constate toujours un besoin considérable de combler les lacunes et de renforcer la qualité des cadres de gouvernance (12). Elle est donc résolument favorable au renforcement de la boîte à outils de surveillance proposé par la Commission. Le cadre actuel de compétence et d’honorabilité se distingue comme étant l’un des domaines les moins harmonisés du droit applicable en matière de surveillance en raison des divergences entre les législations nationales de mise en œuvre de la CRD. Ces différences nuisent à l’efficacité de la surveillance de la BCE en matière de compétence et d’honorabilité et ont fait obstacle à l’égalité des conditions au sein de l’Union. Les propositions de la Commission constituent une avancée majeure, car elles garantiraient une surveillance plus cohérente, plus efficiente et plus efficace des membres du conseil d’administration et des titulaires de postes clés, en mettant l’accent sur les questions les plus importantes pour la surveillance prudentielle. Cette remarque vaut notamment pour des questions telles que i) l’établissement de délais et de procédures clairs pour tous les États membres ; ii) la nécessité de la survenance de faits nouveaux pour évaluer les renouvellements des mandats ; iii) les évaluations ex ante obligatoires pour les établissements les plus importants ; iv) l’évaluation des titulaires de postes clés ; v) la suppression de la dérogation accordée au directeur général/président à l’article 88 de la CRD; et vi) la responsabilité incombant à l’établissement de crédit de veiller à l’aptitude des membres de son conseil d’administration.

La BCE estime qu’un niveau adéquat de proportionnalité devrait être intégré dans le nouveau cadre, lequel bénéficierait également d’une approche encore mieux proportionnée des évaluations de la compétence et de l’honorabilité par les autorités compétentes. Si le cadre proposé adopte déjà, en général, une approche dûment proportionnée en ce qui concerne les évaluations de la compétence et de l’honorabilité (y compris en limitant les évaluations ex ante aux grands établissements), la BCE est disposée à étudier et à examiner plus en détail les moyens de garantir le niveau approprié de proportionnalité du nouveau cadre. En particulier, la proportionnalité permet aux autorités compétentes de concentrer leurs ressources sur les évaluations les plus importantes.

Enfin, la BCE note que les évaluations ex ante de la compétence et de l’honorabilité envisagées dans les modifications proposées de la CRD n’affectent pas les droits légaux de certains organismes de nommer des représentants aux conseils d’administration des entités soumises à la surveillance prudentielle en vertu du droit national.

Indépendamment de son soutien général appuyé des propositions de modifications, la BCE formule, tant ci-dessous que dans le document de travail technique, un certain nombre d’observations sur des aspects spécifiques.

3.2.   Clarification à propos de la nature uniquement procédurale des évaluations ex ante proposées concernant la compétence et l’honorabilité Considérant 38 des propositions de modifications de la CRD

Le considérant 38 souligne l’importance de l’évaluation de l’aptitude des membres de l’organe de direction des grands établissements avant qu’ils ne prennent leurs fonctions. Si la BCE soutient fermement le projet d’évaluation ex ante proportionnée, elle estime qu’il pourrait être précisé que les dispositions proposées en matière d’évaluation ex ante de la compétence et de l’honorabilité sont essentiellement procédurales et n’affectent pas les droits légaux nationaux de certains organes ou entités juridiques de désigner des représentants dans les organes de direction des entités soumises à la surveillance prudentielle en vertu du droit national applicable. Par conséquent, la BCE propose d’apporter une clarification supplémentaire au considérant 38 afin de rassurer les États membres sur le fait que les modifications proposées de la CRD n’affectent aucunement les droits légaux basés sur le droit national applicable. Néanmoins, des garanties appropriées devraient être mises en place pour veiller à l’aptitude de ces représentants, notamment par une surveillance efficace de l’aptitude de l’organe de direction dans son ensemble (aptitude collective) et des mesures de suivi pour lutter contre les éventuels conflits d’intérêts et les problèmes liés au temps consacré et à l’expérience, lorsque cela est nécessaire.

3.3.   Introduction d’un délai de deux jours pour accuser réception : nouvel article 91 ter, paragraphe 3, et nouvel article 91 quinquies, paragraphe 3, de la CRD

Le délai proposé de seulement deux jours pour accuser réception par écrit serait en pratique extrêmement difficile à respecter par toutes les autorités compétentes concernées en raison du flux entrant très élevé de demandes d’approbation de la compétence et de l’honorabilité ainsi que de la documentation abondante à contrôler. En particulier, dans les nombreux cas où la demande concerne plusieurs personnes nommées, les autorités de surveillance risquent de ne pas pouvoir respecter ce délai. Dans l’ensemble, cette disposition risque de compromettre le respect du délai fixé pour les procédures de compétence et d’honorabilité.

La BCE demande donc instamment la suppression de ce délai de deux jours.

3.4.   Mandat pour développer des normes techniques d’exécution relatives aux formulaires, modèles et procédures normalisés pour la fourniture d’informations : nouvel article 91 ter, paragraphe 10, et nouvel article 91, quinquies, paragraphe 8, de la CRD.

La BCE est chargée de veiller au fonctionnement efficace et cohérent du mécanisme de surveillance unique (MSU). À cet égard, des progrès ont été accomplis au sein du MSU en ce qui concerne l’utilisation cohérente des formulaires et des solutions informatiques pour le traitement des demandes d’approbation de la compétence et de l’honorabilité. La BCE souligne donc que les normes techniques d’exécution devraient être cohérentes avec cet effort d’harmonisation et pourraient éventuellement tirer profit d’un effet de levier en rapport avec les infrastructures déjà développées.

À la lumière de ce qui précède, la BCE propose d’insérer, dans les dispositions ou considérants pertinents, une référence encourageant l’ABE à s’appuyer sur les meilleurs outils et pratiques en place lors de l’élaboration des normes techniques d’exécution.

3.5.   Conséquences procédurales en cas de non-respect des obligations et des délais par les entités soumises à la surveillance prudentielle : nouvel article 91 ter, paragraphe 7, et nouvel article 91 quinquies, paragraphe 6, de la CRD.

Les pouvoirs de surveillance dont disposent les autorités de surveillance lorsque les entités ne répondent pas aux demandes d’informations supplémentaires dans le délai imparti ne leur permettent pas de déclarer la demande incomplète et d’exiger, en conséquence, la présentation d’une nouvelle demande. La BCE demande donc l’introduction d’une base juridique supplémentaire permettant aux autorités compétentes de considérer qu’une demande est incomplète et que celle-ci doit donc être présentée à nouveau. Cela assurerait l’existence d’une conséquence procédurale en cas de non-respect des délais de fourniture de documents ou d’informations supplémentaires, sans préjudice de la possibilité pour l’entité de présenter une nouvelle demande et d’engager ainsi une nouvelle procédure.

À la lumière de ce qui précède, la BCE propose d’ajouter une telle conséquence procédurale supplémentaire dans le nouvel article 91 ter, paragraphe 4, et le nouvel article 91 quinquies, paragraphe 4, de la CRD.

3.6.   Possibilité de prolonger la période d’évaluation lorsque des informations sont demandées à d’autres parties

Le nouvel article 91 ter, paragraphe 4, et le nouvel article 91 quater, paragraphe 4, de la CRD permettent de prolonger la période d’évaluation lorsque les autorités compétentes demandent des documents ou des informations supplémentaires aux entités, mais pas lorsque des documents ou des informations sont demandés par d’autres parties, par exemple, des autorités judiciaires et/ou d’autres autorités de contrôle. Il s’agit d’un cas très fréquent qui demande souvent plus de temps.

La BCE propose donc que ces dispositions soient modifiées de manière à couvrir également les cas où d’autres entités/autorités exigent des documents ou des informations.

3.7.   Possibilité pour les entités d’effectuer l’évaluation de l’aptitude (interne) des membres du conseil d’administration après qu’ils aient pris leurs fonctions : nouvel article 91 bis, paragraphe 2, de la CRD.

Le nouvel article 91 bis, paragraphe 2, deuxième alinéa, de la CRD permet la nomination de membres de l’organe de direction sans aucune sorte d’évaluation de l’aptitude dans des situations urgentes. La BCE craint que cette possibilité ne conduise à la nomination de candidats inadéquats, notamment en raison de l’ambiguïté sous-jacente dans l’interprétation des termes « absolument nécessaire » et « immédiatement » utilisés dans ce cadre.

Par conséquent, la BCE propose que les entités soient tenues de procéder à une évaluation de l’aptitude avant que les membres de l’organe de direction ne prennent leurs fonctions, même dans les cas les plus exceptionnels. Dans un tel scénario, une évaluation plus légère pourrait toutefois être justifiée, dans des conditions à préciser dans les orientations élaborées par l’ABE. Ces orientations fourniraient également des lignes directrices sur les situations pouvant être considérées comme urgentes, c’est-à-dire lorsqu’il est absolument nécessaire de remplacer immédiatement des membres du conseil d’administration.

4.   Exigences applicables aux succursales de pays tiers (SPT)

L’harmonisation du cadre SPT est importante pour établir une vision globale des activités des groupes de pays tiers dans l’Union, pour harmoniser les pratiques au sein de l’Union et pour garantir des conditions équitables pour les groupes de pays tiers dans l’Union et les établissements de crédit européens en réduisant les possibilités d’arbitrage réglementaire, sans pour autant empêcher les groupes de pays tiers d’accéder au marché financier de l’Union en établissant des succursales. La BCE estime qu’il est essentiel de fournir aux autorités compétentes concernées des outils de surveillance efficaces. L’harmonisation du cadre SPT est également l’occasion de mettre en conformité les exigences de l’Union avec les normes comparables d’autres grands territoires et de maintenir l’ouverture mondiale du marché unique.

Dans ce contexte, la BCE est favorable aux normes minimales harmonisées relatives à l’octroi et au retrait des agréments des succursales, ainsi qu’à celles relevant du domaine de la gouvernance interne et des contrôles des risques, et aux obligations de déclaration plus harmonisées. La BCE est également favorable à ce que les autorités compétentes disposent du pouvoir d’exiger des SPT qu’elles établissent une filiale en cas d’importance systémique, sachant que ce pouvoir ne devrait pas faire l’objet d’un déclenchement automatique, mais plutôt d’un mécanisme d’évaluation prudentielle à l’issue ouverte, une fois certains seuils atteints. En outre, le nouveau cadre permettra une surveillance complète grâce à une coopération renforcée entre les autorités de surveillance, par exemple en incluant les SPT de catégorie 1 dans les collèges d’autorités de surveillance. À cet égard, la BCE apprécie également les efforts déployés par la Commission pour garantir une participation adéquate des autorités de surveillance des autres entités du groupe (c’est-à-dire les filiales) aux décisions qui ont une incidence sur la structure des opérations des groupes de pays tiers dans l’Union.

En outre, la BCE soutient la clarification de laquelle il ressort que les SPT ne peuvent exercer que les activités pour lesquelles elles ont été agréées et uniquement sur le territoire de l’État membre qui a délivré cet agrément, l’exercice de telles activités sur une base transfrontalière sur le territoire de l’Union étant expressément interdit.

En plus de soutenir fermement cette proposition, la BCE propose des modifications dans les domaines mentionnés ci-après.

Afin de s’assurer que la taille réelle des activités d’une succursale soit prise en compte, contribuant ainsi à éviter que des groupes de pays tiers ne recourent à des pratiques comptables spécifiques pour rester sous les seuils, il est important de prendre en considération non seulement les actifs comptabilisés dans la succursale, mais également ceux qui proviennent de la succursale en étant toutefois comptabilisés à distance dans un autre lieu, dans la mesure où la nouvelle législation permet une telle pratique. Si les modifications qu’il est proposé d’apporter à la CRD prévoient que l’ABE soit chargée d’élaborer des normes techniques de réglementation concernant les dispositifs de comptabilisation, la BCE estime qu’il serait plus efficace d’inclure dans la CRD elle-même une clarification directe relative aux modes de calcul des actifs d’une succursale aux fins de l’évaluation des seuils (par exemple, pour la classification des succursales dans la catégorie 1 et pour l’évaluation de l’importance systémique).

En outre, la BCE propose que les informations agrégées sur les éléments d’actifs et de passif détenus ou comptabilisés par les filiales d’un groupe de pays tiers et les SPT dans l’Union, que les SPT sont tenues de déclarer à leur autorité compétente, soient également mises à disposition des autorités compétentes chargées de la surveillance des filiales de ce groupe de pays tiers. Cette proposition permettra une vue et une analyse complètes de l’empreinte des groupes de pays tiers dans l’Union. À cette fin, la BCE propose également d’élargir le champ d’application de cette obligation de déclaration relative aux services fournis par l’entreprise de rattachement de manière à prendre également en compte la fourniture directe de services d’investissement transfrontaliers par le groupe de pays tiers ainsi que les services d’investissement fournis par le groupe de pays tiers sur la base d’une sollicitation inversée.

5.   Fourniture directe de services bancaires dans l’Union par des entreprises de pays tiers

5.1.   Exigence d’«établir une succursale pour les prestations de services bancaires par des entreprises de pays tiers : nouvel article 21 quater de la CRD

La BCE est favorable à la clarification apportée dans le nouvel article 21 quater de la CRD selon laquelle, pour fournir des services bancaires au sein de l’Union, les entreprises de pays tiers doivent soit établir une succursale soit créer une filiale dans l’un des États membres afin d’éviter que des activités non réglementées et non surveillées ne créent des risques pour la stabilité financière dans l’Union.

La BCE estime toutefois que le champ d’application des services bancaires de base inclus dans le nouvel article 21 quater de la CRD n’est pas clair. Par conséquent, la BCE invite les organes législatifs de l’Union à clarifier la formulation du nouvel article 21 quater de la CRD et, en particulier, à fournir une liste claire des services bancaires de base visés par cet article, en tenant également compte des exigences existantes dans d’autres actes législatifs de l’Union réglementant certains services, tels que les services de paiement et la monnaie électronique, ainsi que des effets du nouvel article sur la liquidité des marchés financiers mondiaux.

6.   Pouvoirs de surveillance

La BCE est favorable aux propositions de modifications de la CRD concernant les pouvoirs de surveillance en ce qu’elles renforcent l’harmonisation de trois types de pouvoirs en exigeant de l’autorité compétente qu’elle évalue i) les acquisitions de participations dans des entités du secteur financier et non-financier ; ii) les transferts importants d’actifs ; et iii) les fusions/scissions. Les divergences actuelles entre les pouvoirs nationaux sur ces trois aspects et le fait que la BCE n’exerce actuellement de tels pouvoirs que lorsque le droit national le prévoit conduisent à des conditions inéquitables et rendent moins efficaces les mesures de surveillance de la BCE dans le cadre du MSU. Un ensemble commun de règles relatives aux pouvoirs prudentiels de base favorisera simultanément l’harmonisation au sein du marché intérieur et accroîtra la qualité et l’efficacité globales de la surveillance. Il est nécessaire de renforcer la coordination entre ces nouveaux pouvoirs de surveillance et les pouvoirs déjà prévus dans la CRD. À cette fin, la BCE formule quelques recommandations de rédaction dans le document de travail technique.

La BCE se félicite, en particulier, que la proposition de la Commission reconnaisse la nécessité d’aligner les pouvoirs prévus au titre III, chapitres 3, 4 et 5, de la CRD concernant les acquisitions de participations qualifiées dans un établissement de crédit et les acquisitions d’une participation significative par un établissement. Toutefois, cet alignement devrait prévoir non seulement l’échange d’informations entre les autorités compétentes, mais également le processus et le calendrier des procédures pertinentes entrant simultanément en jeu pour une même opération.

En plus de cet alignement procédural, il convient d’établir une distinction claire entre la notion de “ participation qualifiée ”, laquelle devrait se concentrer sur les effets d’une acquisition sur l’établissement de crédit cible, et celle d» « acquisition significative », laquelle devrait se concentrer sur les effets d’une acquisition sur l’acquéreur.

En outre, conformément à sa position exprimée précédemment (13), la BCE encourage l’inclusion de pouvoirs de surveillance supplémentaires en ce qui concerne i) la modification des statuts des établissements de crédit, ii) les opérations avec des parties liées et iii) les dispositifs d’externalisation importants. L’harmonisation de ces pouvoirs reste nécessaire et contribuerait à continuer d’avancer vers un véritable corpus réglementaire unique et à réduire la fragmentation réglementaire au sein du MSU.

7.   Sanctions administratives

Les modifications proposées de la CRD reflètent la position de la BCE en la matière (14). Tous les efforts visant à harmoniser et à renforcer davantage les pouvoirs de sanction et d’exécution au niveau de l’Union sont les bienvenus, sachant qu’ils favoriseront l’application effective des exigences prudentielles au sein de l’Union. Il convient en particulier de noter que les pouvoirs d’exécution des autorités compétentes sont améliorés par l’introduction de la possibilité d’imposer des astreintes en tant que nouvelle mesure d’exécution visant à rétablir le respect des exigences prudentielles et que cette mesure est sans préjudice de la possibilité ultérieure de sanctionner la commission de l’infraction. Il est donc essentiel que la distinction entre cette nouvelle mesure d’exécution, les sanctions administratives et les autres mesures administratives relevant de la CRD se reflète également dans la transposition en droit national effectuée par les États membres. En outre, la BCE se félicite également de l’élargissement de la liste des infractions faisant l’objet de sanctions administratives et de la clarification de la définition du « chiffre d’affaires annuel total ».

8.   Analyse comparative prudentielle

La BCE est favorable aux modifications proposées visant l’article 78 de la CRD et, en particulier, à l’extension par ces modifications du champ d’application de l’analyse comparative prudentielle aux modèles utilisés par les établissements de crédit pour calculer les pertes de crédit attendues selon la norme IFRS9. Ce point est très important pour garantir la solidité des modèles utilisés, entre autres, par les établissements de crédit qui ne disposent pas de modèles internes approuvés pour déterminer leurs exigences de fonds propres pour risque de crédit. L’ajout de l’approche standard alternative pour le risque de marché au champ d’application de l’analyse comparative prudentielle est également bienvenu en tant que complément des informations provenant de l’approche fondée sur les modèles internes et en tant qu’étape supplémentaire vers la mise en œuvre complète au sein de l’Union du dispositif de Bâle sur le risque de marché.

En outre, la BCE se félicite de la proposition visant à donner à l’ABE la latitude nécessaire pour effectuer les exercices d’analyse comparative tous les deux ans. La BCE recommande de donner encore plus de latitude à l’ABE pour fixer la fréquence de ces exercices. La BCE propose également que les exercices soient définis plus clairement.

Enfin, la BCE suggère que les établissements ne devraient pas être tenus de communiquer les résultats de leurs calculs aux autorités compétentes chaque année, c’est-à-dire également au cours des années où l’ABE ne conduit pas d’exercice. Au lieu de cela, la BCE propose que les fréquences des communications et des évaluations soient harmonisées, ce qui réduirait la charge de déclaration pour les établissements.

9.   Publication

La BCE est favorable à l’objectif de la nouvelle plateforme intégrée gérée par l’ABE pour les publications effectuées par les établissements de crédit au titre du pilier III, à savoir réduire la charge pesant sur les banques et faciliter l’utilisation des informations relevant de ce pilier par toutes les parties intéressées. Une plateforme centralisée de publication pourrait être profitable aux autorités de surveillance en ce qu’elle les aiderait à garantir la qualité des informations relevant du pilier III.

Il est proposé d’appliquer une approche différente concernant la publication quantitative entre, d’une part, celle effectuée par les établissements de petite taille et non complexes et, d’autre part, celle effectuée par les établissements de plus grande taille. Pour les établissements de petite taille et non complexes, l’ABE utilisera les déclarations prudentielles pour compiler les publications (quantitatives) correspondantes sur la base d’une mise en correspondance prédéfinie, tandis que, pour les établissements de plus grande taille, l’ABE recevra les fichiers d’information complets « sous forme électronique » et devra les publier le jour même de leur réception. Or, cette approche différente ne semble pas justifiée. Tous les établissements de crédit, indépendamment de leur taille et de leur complexité, pourraient donner lieu à la même approche en matière de publication quantitative dans l’objectif de réduire la charge de déclaration pesant sur tous les établissements de crédit. En outre, le calendrier de publication par l’ABE des informations relevant du pilier III sur la plateforme centralisée ne permet pas de rapprocher les informations des déclarations prudentielles et celles fournies dans les publications relevant du pilier III, ce qui pourrait entraîner une charge de travail supplémentaire pour les autorités de surveillance et un manque de clarté pour les investisseurs et les autres utilisateurs des informations relevant du pilier III. En outre, les publications qualitatives et certaines publications quantitatives ne peuvent pas être extraites des déclarations prudentielles sur la base de la mise en correspondance prédéfinie. Ce problème concerne à la fois les établissements de petite taille et non complexes et les autres établissements. Par conséquent, il convient de clarifier la procédure à suivre pour effectuer ces publications destinées à l’ABE. Des considérations supplémentaires concernant la plateforme de publication centralisée envisagée au titre du pilier III sont présentées dans le cadre de l’avis CON/2022/11.

Lorsque la BCE recommande de modifier les modifications proposées de la CRD, des suggestions de rédaction particulières, accompagnées d’une explication, sont formulées dans un document de travail technique séparé. Le document de travail technique peut être consulté en anglais sur le site internet EUR-Lex.

Fait à Francfort-sur-le-Main, le 27 avril 2022.

La présidente de la BCE

Christine LAGARDE


(1)  COM(2021) 663 final.

(2)  COM(2021) 664 final.

(3)  Voir, en ce qui concerne la mise en œuvre générale du plancher de fonds propres, l’avis CON/2022/11 de la Banque centrale européenne du 24 mars 2022 sur une proposition de modification du règlement (UE) n° 575/2013 en ce qui concerne les exigences pour risque de crédit, risque d’ajustement de l’évaluation de crédit, risque opérationnel et risque de marché et le plancher de fonds propres. Tous les avis de la BCE sont publiés sur EUR-Lex.

(4)  Directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et la surveillance prudentielle des établissements de crédit et des entreprises d’investissement, modifiant la directive 2002/87/CE et abrogeant les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE (JO L 176 du 27.6.2013, p. 338).

(5)  Règlement (UE) n° 1024/2013 du Conseil du 15 octobre 2013 confiant à la Banque centrale européenne des missions spécifiques ayant trait aux politiques en matière de surveillance prudentielle des établissements de crédit (JO L 287 du 29.10.2013, p. 63).

(6)  Voir, en particulier, le document ECB contribution to the European Commission’s targeted consultation on the review of the crisis management and deposit insurance framework [Contribution de la BCE à la consultation ciblée de la Commission européenne relative à l’examen du cadre de gestion des crises et de garantie des dépôts], p. 9, disponible en anglais sur le site internet de la BCE : www.ecb.europa.eu

(7)  Voir la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions : stratégie pour le financement de la transition vers une économie durable, 6 juillet 2021, COM(2021) 390 final, p. 14.

(8)  The state of climate and environmental risk management in the banking sector – Report on the supervisory review of banks’ approaches to manage climate and environmental risks [L’état de la gestion des risques climatiques et environnementaux dans le secteur bancaire – Rapport sur la surveillance prudentielle des approches des banques pour gérer les risques climatiques et environnementaux], novembre 2021, disponible en anglais sur le site internet de la BCE : www.ecb.europa.eu

(9)  Par exemple, dans le règlement (UE) 2019/631 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 établissant des normes de performance en matière d’émissions de CO2 pour les voitures particulières neuves et pour les véhicules utilitaires légers neufs, et abrogeant les règlements (CE) n° 443/2009 et (UE) n° 510/2011 (JO L 111 du 25.4.2019, p. 13). De telles normes affectent directement les établissements de crédit, au travers de leurs contreparties, à court, moyen et long termes.

(10)  Voir la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions : stratégie pour le financement de la transition vers une économie durable, 6 juillet 2021, COM(2021) 390 final, p. 17.

(11)  Voir également l’avis CON/2022/11, qui contient des observations plus détaillées sur la mise en œuvre du plancher de fonds propres, notamment en ce qui concerne son niveau d’application et les dispositions transitoires.

(12)  Les lacunes dans les capacités de pilotage des organes de direction comptent parmi les principales vulnérabilités des établissements de crédit énumérés dans les priorités de la BCE en matière de surveillance pour la période 2022-2024 qui éclaireront le processus de contrôle et d’évaluation prudentiels, disponibles sur le site internet de la BCE : www.ecb.europa.eu

(13)  Voir le point 1.12.2 de l’avis de la Banque centrale européenne du 8 novembre 2017 sur les modifications du cadre de l’Union pour les exigences de fonds propres des établissements de crédit et des entreprises d’investissement (CON/2017/46) (JO C 34 du 31.1.2018, p. 5).

(14)  Voir point 1.15 de l’avis CON/2017/46.


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