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Document 52021DC0738

RAPPORT DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL sur le fonctionnement du cadre des fonds européens d’investissement à long terme (ELTIF)

COM/2021/738 final

Bruxelles, le 25.11.2021

COM(2021) 738 final

RAPPORT DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL

sur le fonctionnement du cadre des fonds européens d’investissement à long terme (ELTIF)


Table des matières

 

1.    Contexte    

2.    Fonctionnement du cadre des ELTIF: évaluation    

3.    Dispositions relatives aux remboursements et cycle de vie des ELTIF    

4.    Seuil minimal d’actifs éligibles à l’investissement    

5.    Commercialisation des ELTIF par les gestionnaires de FIA inférieurs aux seuils    

6.    Actifs et investissements éligibles    

7.    Règles de diversification et de composition du portefeuille    

8.    Emprunt de liquidités    

9.    Conclusions    


1.    Contexte

Le règlement (UE) 2015/760 relatif aux fonds européens d’investissement à long terme (ci-après le «règlement ELTIF») 1 établit un cadre réglementaire européen pour les fonds d’investissement alternatifs (FIA) qui permettent d’investir dans des projets à long terme. L’objectif de ces fonds est de lever des capitaux et de les acheminer vers les investissements européens à long terme dans l’économie réelle, ainsi que de promouvoir l’objectif de l’Union d’une croissance intelligente, durable et inclusive.

Les fonds européens d’investissement à long terme (ELTIF) permettent d’investir dans toute une série de projets, comme les infrastructures sociales et de transport, les actifs physiques et les petites et moyennes entreprises (PME). Les ELTIF ont pour but de faciliter les investissements à long terme et de fournir une autre source de financement, non bancaire, à l’économie réelle. En juin 2020, le forum de haut niveau sur l’union des marchés des capitaux (UMC) a publié un rapport 2 dans lequel il recommande un réexamen ciblé des ELTIF afin de remédier à leur faible utilisation par le marché et d’augmenter le flux de financement à long terme 3 .

Le plan d’action révisé concernant l’union des marchés des capitaux 4 reconnaît la nécessité d’encourager le financement des projets d’investissement à long terme ainsi que la participation des investisseurs de détail. La Commission s’est également engagée à réviser le règlement ELTIF 5 . Cet exercice touche de près à l’union des marchés des capitaux, au pacte vert pour l’Europe 6 , à l’union européenne de l’énergie 7 , à la stratégie en matière de finance durable et à d’autres initiatives majeures de l’UE 8 . Le 2 décembre 2020, le Conseil de l’Union européenne a invité la Commission à réviser le règlement ELTIF 9 .

L’article 37 du règlement ELTIF énonce l’obligation de réexaminer le fonctionnement du cadre réglementaire des ELTIF et prévoit que le réexamen analyse les politiques de remboursement, les obligations de diversification des actifs, le degré de commercialisation des ELTIF dans l’Union ainsi que la nécessité d’une actualisation de la liste des actifs et investissements éligibles 10 .

Le présent rapport tient compte de l’avis technique de l’Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) 11 , des recherches documentaires et des réactions des parties prenantes à la consultation publique. Il recense plusieurs obstacles à la croissance du marché ainsi que d’autres problèmes touchant au fonctionnement du cadre des ELTIF 12 . Le rapport vise à informer le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne des principaux thèmes abordés lors du réexamen, dont il présente brièvement les principales conclusions 13 .

Dans le contexte du réexamen du cadre des ELTIF, le présent rapport résume les principales conclusions de l’évaluation du fonctionnement du cadre réglementaire.

2.    Fonctionnement du cadre des ELTIF: évaluation

En octobre 2021, seuls quelque 57 ELTIF, avec environ 2,4 milliards d’EUR d’actifs nets sous gestion, avaient reçu une autorisation de fonctionnement. Ces ELTIF étaient domiciliés dans quatre États membres seulement (la France, le Luxembourg, l’Italie et l’Espagne). Selon les informations rassemblées par l’AEMF, le volume total du marché des ELTIF est passé d’un peu plus de 1,5 milliard d’EUR en 2020 à environ 2,4 milliards d’EUR en 2021. Malgré cette croissance relative, les ELTIF restent un segment très limité en comparaison avec la taille globale du marché des FIA de l’Union (quelque 6 800 milliards d’EUR) 14 .

Le faible nombre d’ELTIF, leur faible valeur nette d’inventaire, leur concentration géographique et la composition de leur portefeuille indiquent que le secteur des ELTIF est sous-développé. De ce fait, le cadre des ELTIF n’a pas réalisé tout son potentiel, qu’il s’agisse du volume qu’il pourrait atteindre (en particulier les actifs sous gestion et le nombre de fonds) ou des possibilités qu’il pourrait offrir (choix des projets et investissements éligibles, par ex.) 15 . Les ELTIF n’ont pas rencontré l’intérêt du marché grand public ni réalisé leur potentiel pour acheminer le financement des capitaux vers les investissements à long terme.

2.1.    Restrictions du côté de la demande

Les règles qui imposent des restrictions et rendent difficile l’investissement dans les ELTIF pour les investisseurs sont les principaux facteurs à l’origine des problèmes rencontrés du côté de la demande. Il semble que les règles actuelles créent des obstacles inutiles qui empêchent les investisseurs de détail d’entrer sur le marché. Dans le règlement ELTIF, l’obligation selon laquelle le gestionnaire d’actifs est tenu d’évaluer la connaissance et l’expérience de l’investisseur de détail, par exemple, fait en partie double emploi avec l’évaluation de l’adéquation visée dans la directive 2014/65/UE concernant les marchés d’instruments financiers (MiFID II) 16 .

Qui plus est, ainsi qu’il a été indiqué dans l’analyse d’impact, le fait que le montant minimum initial investi ne puisse être inférieur à 10 000 EUR et que l’investissement soit limité à 10 % du montant total du portefeuille pour les investisseurs dont le portefeuille financier ne dépasse pas 500 000 EUR constitue un obstacle majeur pour les investisseurs de détail 17 . Même si un investisseur souhaite investir 10 000 EUR dans un seul et même ELTIF, il pourrait s’avérer difficile pour lui d’investir dans d’autres ELTIF et de diversifier son portefeuille à long terme, compte tenu de l’obligation de ne pas dépasser 10 % du montant total 18 . En outre, ces valeurs d’exposition de 500 000 EUR et de 10 % reposent toutes les deux sur les déclarations des investisseurs de détail eux-mêmes, et les gestionnaires d’actifs ou les distributeurs n’ont aucun moyen de vérifier de manière indépendante la véritable exposition des investisseurs de détail.

2.2.    Restrictions du côté de l’offre

Les principaux éléments du cadre des ELTIF qui sont à l’origine des problèmes rencontrés du côté de l’offre concernent les statuts restrictifs de ces fonds qui limitent l’univers d’investissement, les structures des fonds et les stratégies d’investissement disponibles et rendent la création d’ELTIF moins intéressante pour les gestionnaires d’actifs.

Les statuts actuels des ELTIF contiennent des dispositions qui empêchent les gestionnaires de poursuivre une gamme plus élargie de stratégies d’investissement. Si cet exercice était plus facile, il serait possible d’acheminer davantage de financement vers les projets d’investissement à long terme. De telles dispositions semblent donc perturber le fonctionnement des ELTIF et rendre ces derniers moins intéressants pour les gestionnaires par rapport aux autres structures de fonds concurrentes. Par conséquent, au moment de définir un véhicule d’investissement comme un ELTIF, tous les gestionnaires de FIA doivent se soumettre à un ensemble uniforme de règles, indépendamment du groupe client ciblé, de la stratégie d’investissement privilégiée et du profil de risque des actifs sous-jacents détenus dans le portefeuille.

Dans ce contexte, l’AEMF, dans son avis technique du 3 février 2021 adressé à la Commission, a reconnu l’existence d’un paradoxe profond dans le cadre des ELTIF, du fait que ce dernier vise à répondre à la fois aux besoins des professionnels et aux besoins des investisseurs de détail à l’aide d’un seul et même corpus réglementaire. L’AEMF a ainsi recommandé l’adoption de règles qui établiraient une distinction plus explicite entre les ELTIF commercialisés seulement auprès des investisseurs professionnels et les ELTIF commercialisés auprès des investisseurs de détail.

L’évaluation du cadre des ELTIF a conclu que des statuts identiques tant pour les professionnels que pour les investisseurs de détail ne permettent pas de répondre aux attentes de deux catégories d’investisseurs très différentes, dont les horizons temporels, l’appétence au risque et les besoins d’investissement ne sont pas les mêmes, et pourraient être perçus comme un obstacle empêchant les gestionnaires de proposer des produits sur mesure 19 .

3.    Dispositions relatives aux remboursements et cycle de vie des ELTIF

Les politiques de remboursement des ELTIF sont définies à l’article 18 du règlement. Le statut prévoit, par défaut, que les investisseurs dans un ELTIF ne peuvent obtenir le remboursement de leurs parts ou actions avant la fin de la vie de l’ELTIF. À cette fin, la règle générale du cadre juridique des ELTIF dans ce domaine veut que les investisseurs dans un ELTIF ne puissent obtenir le remboursement de leurs parts ou actions avant la fin de la vie de l’ELTIF.

Les gestionnaires d’actifs peuvent introduire des dérogations (en général dans les statuts ou dans les documents constitutifs) autorisant des remboursements avant la fin de la vie de l’ELTIF. Néanmoins, ces remboursements constituent plutôt une exception et ne sont autorisés que si des conditions strictes sont remplies 20 .

Un grand nombre de parties prenantes ont soulevé la question des investisseurs qui ne sont pas autorisés à obtenir un remboursement avant la date de fin de vie d’un fonds. Les parties prenantes ont estimé qu’il s’agissait potentiellement d’une faille dans le cadre des ELTIF qui pourrait constituer un problème pour les investisseurs. Elles ont demandé une plus grande flexibilité afin de permettre un remboursement anticipé pendant le cycle de vie d’un ELTIF, de manière à faire de l’ELTIF un instrument de placement plus intéressant.

Néanmoins, la structure de remboursement des ELTIF ressemble à celle des fonds à capital fermé qui n’autorisent les remboursements qu’à la fin de la vie du fonds, sauf dans certaines circonstances limitées. Cette restriction quant au remboursement se justifie par la nature illiquide des actifs dans lesquels un ELTIF investit et par la difficulté à se faire une idée de la juste valeur des investissements en continu. Normalement, la juste valeur peut seulement être déterminée au moment du désinvestissement.

Le règlement ELTIF contient également une disposition relative à la négociation sur le marché secondaire 21 . Cette disposition garantit que la durée prédéfinie du cycle de vie et l’absence de droits de remboursement avant la fin de la vie d’un ELTIF n’empêchent pas que ses parts ou actions soient admises sur un marché réglementé ou dans un système multilatéral de négociation. Elle permet aussi aux investisseurs de vendre leurs parts ou actions avant la fin de la vie de l’ELTIF sur le marché secondaire.

Dans ce contexte, les dispositions du règlement ELTIF contiennent une base qui laisse les gestionnaires de fonds plus libres de décider de la mise en place ou non de droits de remboursement lors de la création de l’ELTIF, en fonction de la stratégie d’investissement prédéfinie de l’ELTIF. Ces stratégies d’investissement pourraient également tirer parti des dispositions du règlement ELTIF qui permettent la négociation des parts ou actions des ELTIF sur le marché secondaire, comme le mécanisme de la fenêtre de liquidité qui fait correspondre les demandes de souscription des nouveaux investisseurs et les demandes de remboursement des investisseurs existants.

4.    Seuil minimal d’actifs éligibles à l’investissement 

L’article 13, paragraphe 1, du règlement ELTIF dispose qu’un ELTIF devrait investir au moins 70 % de son capital dans des actifs éligibles à l’investissement. Ce seuil a été adopté pour garantir que les ELTIF concentrent clairement leur activité sur les investissements à long terme et pour garantir une attention continue aux investisseurs de détail qui, autrement, ne connaîtraient pas bien les stratégies d’investissement moins classiques.

Selon certaines parties prenantes, ce seuil de 70 % est trop élevé. De l’avis de nombreuses parties prenantes, un abaissement permettrait de poursuivre des stratégies d’investissement plus différenciées.

Une minorité de parties prenantes ont considéré que le seuil actuel d’actifs éligibles était approprié. Selon elles, le cadre des ELTIF a pour objectif de promouvoir l’investissement à long terme et de privilégier les actifs illiquides.

Dans ce contexte, il conviendrait d’envisager sérieusement s’il est approprié d’abaisser et d’adapter les seuils minimaux d’investissements éligibles pour les ELTIF afin de promouvoir le profil de liquidité des ELTIF et d’augmenter la flexibilité des gestionnaires d’ELTIF dans l’exécution de leurs stratégies d’investissement.

5.    Commercialisation des ELTIF par les gestionnaires de FIA inférieurs aux seuils

L’article 37, paragraphe 1, point c), du règlement ELTIF dispose que la Commission analyse le degré de commercialisation des ELTIF dans l’Union, et notamment l’intérêt que la commercialisation d’ELTIF peut présenter pour les gestionnaires de FIA inférieurs aux seuils relevant de l’article 3, paragraphe 2, de la directive sur les gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs (directive GFIA).

Plusieurs parties prenantes ont estimé que le cadre réglementaire des ELTIF n’était probablement pas adéquat pour les gestionnaires de FIA inférieurs aux seuils. Ces parties prenantes ont cité, à l’appui de leur point de vue, la complexité et les exigences opérationnelles, y compris les préoccupations liées à la protection des investisseurs, ainsi que le fait qu’il faudrait que les gestionnaires de FIA respectent toutes les exigences de la directive GFIA, ce qui pourrait s’avérer trop onéreux pour ces gestionnaires.

Certaines parties prenantes ont estimé que les règles de l’UE sur les gestionnaires de FIA inférieurs aux seuils visés à l’article 3, paragraphe 2, de la directive GFIA manquaient d’harmonie, ce qui signifie qu’améliorer la «passeportabilité» des FIA ou des ELTIF gérés par les gestionnaires de FIA inférieurs à ces seuils soulèverait d’importants problèmes de concurrence et ouvrirait la voie à un arbitrage réglementaire. De l’avis de ces parties prenantes, faciliter la commercialisation des ELTIF par des gestionnaires de FIA relevant de l’article 3, paragraphe 2, de la directive GFIA ne devrait en aucun cas être la priorité.

6.    Actifs et investissements éligibles 

Les règles sur les actifs et investissements éligibles prévoient des catégories claires d’actifs dans lesquels les ELTIF peuvent investir afin de garantir que les fonds ne se lancent pas dans des transactions financières qui pourraient entraîner des risques plus grands que ceux auxquels on pourrait s’attendre dans le cadre d’un fonds ciblant des investissements à long terme.

Qui plus est, les dispositions du règlement ELTIF se concentrent clairement sur les investissements à long terme et définissent une série de conditions et de restrictions qui empêchent les ELTIF de mener des stratégies d’investissement qui ne pourraient pas être considérées comme purement «à long terme», comme l’interdiction d’investir dans des instruments financiers dérivés, sauf dans un but de couverture des risques, l’interdiction d’investir dans des «entreprises financières», l’exclusion des matières premières et des investissements «spéculatifs».

Dans ce contexte, les parties prenantes ont vivement recommandé d’élargir la gamme des actifs éligibles à l’investissement d’une manière qui convienne, d’une part, à l’exécution optimale des stratégies d’investissement par les gestionnaires d’ELTIF et qui soit, de l’autre, conforme aux objectifs sous-jacents de croissance durable à long terme.

Les parties prenantes ont également demandé plus de sécurité juridique et de flexibilité en ce qui concerne la facilitation des stratégies de fonds de fonds, les critères d’investissement dans des entreprises de pays tiers, l’inclusion des «entreprises financières», l’élargissement de la définition des «actifs réels» et le calibrage de certains seuils numériques fixés dans le règlement ELTIF, tels que le seuil de 500 millions d’EUR de capitalisation boursière pour les entreprises cotées et le seuil de 10 millions d’EUR pour les actifs réels. De l’avis d’un grand nombre de parties prenantes, une définition plus large et une plus grande clarté juridique concernant l’éligibilité des actifs et des investissements rendraient le cadre juridique des ELTIF plus attrayant pour les gestionnaires d’actifs.

Dans ce contexte, il semble approprié de revoir la définition des actifs et investissements éligibles de sorte que les gestionnaires d’ELTIF puissent poursuivre un plus large éventail de stratégies d’investissement adaptées aux circonstances du marché, à l’expertise en matière d’investissement et à la demande des investisseurs.

7.    Règles de diversification et de composition du portefeuille 

Le règlement ELTIF contient des exigences précises concernant la composition du portefeuille et la diversification. Ces règles ont été mises en place afin de limiter la prise de risques des ELTIF et de réduire le risque de contrepartie en imposant des obligations de diversification claires.

L’article 13, paragraphe 2, dispose qu’un ELTIF n’investit pas: plus de 10 % de son capital en instruments émis par une seule et même entreprise éligible au portefeuille ou en prêts consentis à une seule et même entreprise de portefeuille éligible; plus de 10 % de son capital directement ou indirectement dans un seul et même actif physique; plus de 10 % de son capital en parts ou actions d’un seul et même ELTIF, fonds de capital-risque européen (EuVECA) ou fonds d’entrepreneuriat social européen (EuSEF); plus de 5 % de son capital dans des actifs visés dans la directive 2009/65CE concernant certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) 22 , lorsqu’ils ont été émis par une seule et même entité.

La valeur totale des parts ou actions d’ELTIF, d’EuVECA ou d’EuSEF dans le portefeuille d’un ELTIF ne peut dépasser 20 % de la valeur du capital de l’ELTIF. Le règlement fixe également des règles précises visant à limiter le pouvoir dont disposent les gestionnaires d’ELTIF pour s’écarter des conditions de diversification et de la pondération des actifs.

Dans l’ensemble, les parties prenantes ont déclaré préférer moins d’exigences réglementaires et plus de flexibilité en ce qui concerne la composition du portefeuille et la diversification. En général, l’obligation de limiter à 10 % le capital d’un ELTIF investi dans un seul et même autre ELTIF, EuVECA ou EuSEFF soulève quelques critiques, en ce qu’elle empêche les ELTIF de poursuivre des stratégies de fonds de fonds. Les parties prenantes ont fermement défendu l’idée selon laquelle investir dans un fonds de fonds offrirait aux investisseurs des niveaux plus élevés de diversification, une volatilité réduite et des possibilités supplémentaires en matière de sélection et de diversification. Pour ces parties prenantes, l’accès des ELTIF aux stratégies d’investissement de fonds de fonds constitue un avantage tangible du cadre des ELTIF et la protection des investisseurs, par exemple contre la possibilité d’une accumulation des frais, pourrait être assurée de manière efficace.

L’abolition des limites de concentration applicables aux structures de fonds de fonds a été largement soutenue par les parties prenantes qui souhaitent promouvoir une sélection plus large de styles d’investissement pour les investisseurs, sans diminuer la diversification des actifs sous-jacents. La limitation du capital à 10 % a été ressentie comme une gageure, surtout pendant la période de montée en puissance.

Il importe de noter que les participants du secteur ont explicitement insisté pour qu’aucune obligation de diversification spécifique ne soit imposée aux ELTIF vendus exclusivement aux investisseurs professionnels. La majorité des répondants ont proposé d’augmenter les limites de diversification à 20 %. Qui plus est, le ratio de concentration de 25 % a lui aussi été jugé trop restrictif, compte tenu du fait que les gestionnaires d’actifs adoptent parfois des structures dans lesquelles ils peuvent être l’unique investisseur ou l’investisseur principal dans un autre fonds. Certaines parties prenantes étaient d’avis que les règles de diversification actuelles étaient appropriées pour les ELTIF commercialisés auprès d’investisseurs de détail. Néanmoins, celles-ci semblent trop contraignantes par rapport aux autres FIA commercialisés auprès d’investisseurs professionnels.

Dans ce contexte, il conviendrait d’envisager sérieusement la possibilité de prévoir des obligations de diversification et de composition du portefeuille ainsi que des limites de concentration différentes pour les ELTIF uniquement commercialisés auprès des investisseurs professionnels et pour les ELTIF commercialisés auprès des investisseurs de détail.

8.    Emprunt de liquidités 

La majorité des parties prenantes ont recommandé de relever les limites de levier ou de supprimer le seuil de levier de 30 % et d’aligner le cadre juridique des ELTIF sur celui de la directive GFIA. Elles considèrent que cette flexibilité accrue renforcera la capacité des ELTIF à soutenir le financement des actifs (en particulier des PME) et à améliorer le rendement des fonds. Il a été avancé que la restriction de 30 % sur les emprunts est moins avantageuse que pour les autres fonds grand public (y compris les OPCVM réglementés par produit, qui peuvent obtenir un effet de levier allant jusqu’à 100 % de leurs actifs).

Certaines parties prenantes ont recommandé de relever à au moins 100 % le levier total autorisé des ELTIF, et que les ELTIF accessibles seulement aux investisseurs institutionnels puissent dépasser ce plafond, s’ils remplissent les conditions liées à la stratégie d’investissement, à la gouvernance, à la base d’investisseurs et à la surveillance.

Plusieurs parties prenantes ont estimé que, même si les limites d’emprunt étaient augmentées, une telle hausse ne serait pas automatiquement assortie d’un risque accru pour les investisseurs.

En général, des éléments de preuve concrets semblent indiquer que le relèvement des limites d’emprunt serait justifié et ne créerait pas de risque systémique supplémentaire, car les ELTIF visent une stratégie d’investissement à long terme et leurs possibilités de remboursement sont limitées.

9.    Conclusions 

Le cadre réglementaire des ELTIF a été réexaminé compte tenu de la nécessité d’évaluer le faible taux d’utilisation des ELTIF et de veiller à ce que le fonctionnement du cadre des ELTIF réponde en permanence aux objectifs du règlement ELTIF. Le règlement ELTIF fixe plusieurs objectifs, dont l’acheminement des flux de capitaux vers les investissements dans l’économie réelle, la fourniture d’un produit de FIA accessible aux investisseurs de détail dont les besoins d’investissement se conçoivent à long terme et l’établissement d’un passeport européen pour la commercialisation des ELTIF. Dans ce contexte, la Commission a procédé à une évaluation détaillée afin de déterminer dans quelle mesure les règles actuelles relatives aux ELTIF ont atteint leurs principaux objectifs et, en particulier, si elles ont été efficientes, efficaces, cohérentes et pertinentes et si elles ont apporté une valeur ajoutée à l’UE.

Pour financer les investissements à long terme dans l’économie européenne, les gouvernements et les entreprises doivent avoir accès à un financement à long terme prévisible. La disponibilité de ce financement dépend de la capacité du système financier à acheminer l’épargne des gouvernements, des entreprises et des ménages vers les bons investissements, en toute sécurité et avec efficacité, en passant par des marchés ouverts et concurrentiels. Les ELTIF pourraient avoir un rôle capital à jouer dans ce domaine, car ils offrent un produit d’investissement spécifique destiné à mobiliser les capitaux en faveur du financement de projets dans des domaines tels que l’infrastructure de transport, la production ou la distribution d’énergie durable, l’infrastructure sociale (comme les logements pour personnes âgées ou les hôpitaux) et le déploiement de nouvelles technologies et nouveaux systèmes qui réduisent l’utilisation des ressources et de l’énergie et dynamisent la croissance du secteur des PME en Europe.

L’évaluation du cadre réglementaire des ELTIF a permis de rassembler suffisamment d’éléments de preuve pour justifier une intervention politique et une révision ciblée du règlement ELTIF de sorte que davantage d’investissements soient dirigés vers les entreprises qui ont besoin de capitaux et vers les projets d’investissement à long terme. Cette révision aurait pour but de renforcer le recours aux ELTIF dans l’intérêt de l’économie de l’Union et des investisseurs, ce qui, dans un deuxième temps, encouragerait le développement continu de l’union des marchés des capitaux (UMC) dont le but est aussi de permettre aux entreprises de l’UE d’accéder plus facilement à un financement à long terme plus stable et plus diversifié.

(1)

   Règlement (UE) 2015/760 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2015 relatif aux fonds européens d’investissement à long terme (JO L 123 du 19.5.2015, p. 98).

(2)

Rapport final du forum de haut niveau sur l’union des marchés des capitaux «A new vision for Europe’s capital markets» (Une nouvelle vision pour les marchés des capitaux européens), 10 juin 2020. Source: https://ec.europa.eu/info/files/200610-cmu-high-level-forum-final-report_en

(3)

Ibid., p. 12.

(4)

   Communication de la Commission européenne, «Une union des marchés des capitaux au service des personnes et des entreprises – nouveau plan d’action», COM(2020) 590 final, 24 septembre 2020. Source: https://ec.europa.eu/info/law/better-regulation/have-your-say/initiatives/12498-Une-union-des-marches-des-capitaux-au-service-des-particuliers-et-des-entreprises-nouveau-plan-d%E2%80%99action_fr

(5)

Ibid., p. 8 (action nº 3).

(6)

Un pacte vert pour l’Europe. Source: https://ec.europa.eu/info/strategy/priorities-2019-2024/european-green-deal_fr

(7)

Stratégie de l’union de l’énergie. Source: https://ec.europa.eu/energy/topics/energy-strategy/energy-union_en

(8)

La révision du cadre des ELTIF contribuerait notamment au programme de l’UE en faveur de la finance durable en orientant les financements vers les différents projets à long terme et pourrait potentiellement promouvoir les objectifs en matière de durabilité visés dans le règlement (UE) 2020/852 sur l’établissement d’un cadre visant à favoriser les investissements durables (règlement de l’UE établissant la taxinomie; JO L 198 du 22.6.2020, p. 13).

(9)

Plus précisément, le Conseil a demandé instamment à la Commission «de faire porter en priorité ses efforts et d’accélérer ses travaux [...] sur ce qui suit: [...] améliorer le cadre réglementaire applicable aux instruments de placement à long terme en réexaminant le règlement relatif aux fonds européens d’investissement à long terme (ELTIF), tout en prenant particulièrement en compte la nécessité de soutenir le financement non bancaire des PME et de l’investissement à long terme dans les infrastructures qu’appelle la transition vers une économie durable et numérique». Conclusions du Conseil de l’Union européenne sur le plan d’action de la Commission concernant l’UMC, 12898/1/20, ECOFIN 1023, point 19, sous-point e), adoptées le 2 décembre 2020. Source: https://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-12898-2020-REV-1/fr/pdf

(10)

L’article 37, paragraphe 2, du règlement ELTIF dispose qu’«à la suite du réexamen [...] et après consultation de l’AEMF, la Commission présente au Parlement européen et au Conseil un rapport évaluant la contribution du présent règlement et des ELTIF à l’achèvement de l’union des marchés de capitaux et à la réalisation des objectifs énoncés à l’article 1er, paragraphe 2. Le rapport est accompagné, le cas échéant, d’une proposition législative».

(11)

 Voir la réponse de l’AEMF à la Commission européenne du 3 février 2021 sur le fonctionnement du cadre réglementaire des ELTIF, ESMA34-46-99. Source: https://www.esma.europa.eu/press-news/esma-news/esma-provides-input-commission-improvements-eltif

(12)

Voir, en particulier, l’analyse de la politique de remboursement et de la vie des ELTIF à la section 3, de la diversification des actifs à la section 4, de certains aspects de la commercialisation des ELTIF à la section 5, de l’éligibilité des actifs et des investissements à la section 6, de la diversification et de la composition du portefeuille à la section 7 ainsi que les dispositions sur les emprunts de liquidités à la section 8.

(13)

À cet effet, les sections 2 à 7 résument l’évaluation du cadre des ELTIF, les dispositions concernant les remboursements et le cycle de vie des ELTIF, le seuil minimal d’actifs éligibles à l’investissement, la commercialisation des ELTIF par des gestionnaires de FIA inférieurs aux seuils, les actifs et investissements éligibles, les règles de diversification et de composition du portefeuille et les dispositions relatives aux emprunts de liquidités.

(14)

Rapport statistique 2021 de l’AEMF, Fonds d’investissement alternatifs de l’Union, p. 6. Source: https://www.esma.europa.eu/document/eu-alternative-investment-funds-2021-statistical-report (7 juin 2021).

(15)

Les fonds sont tous domiciliés dans quatre États membres seulement (le Luxembourg, la France, l’Italie et l’Espagne), tandis que les autres États membres n’en accueillent aucun sur leur territoire. Registre des ELTIF autorisés, ESMA34-46-101. Source: https://www.esma.europa.eu/document/register-authorised-european-long-term-investment-funds-eltifs

(16)

JO L 173 du 12.6.2014, p. 349, tel que modifié.

(17)

Le seuil de 10 % s’applique sur le montant total. Autrement dit, le montant total investi par les investisseurs de détail dans tous les ELTIF ne devrait pas dépasser 10 % du portefeuille de l’investisseur.

(18)

Imaginons un scénario suivant lequel un investisseur de détail dont la valeur du portefeuille financier s’élève à 180 000 EUR fait l’acquisition de parts ou d’actions d’un ELTIF pour un montant de 10 000 EUR. Cet investisseur ne pourrait pas, en vertu des règles actuellement en vigueur, acheter d’autres ELTIF, parce qu’il est autorisé, au total, à placer 18 000 EUR ou 10 % de son portefeuille total dans des ELTIF. Or, en achetant le premier ELTIF, l’investisseur se trouverait dans l’impossibilité de placer les 8 000 EUR restants pour acheter un autre ELTIF, en raison de la règle relative à l’investissement minimal de 10 000 EUR.

(19)

De plus, la participation des investisseurs de détail dans un ELTIF pourrait entraîner des charges administratives et des coûts connexes plus importants liés à la commercialisation des ELTIF auprès des investisseurs de détail, en comparaison avec les ELTIF commercialisés seulement auprès des investisseurs professionnels. Si ces charges peuvent paraître administratives dans la pratique (l’obligation de publier un document d’informations clés, un droit de rétractation de deux semaines sans pénalité, des procédures et du personnel supplémentaires pour traiter les plaintes des investisseurs de détail, etc.), il a été considéré que les dispositions en question rendent les ELTIF commercialisés seulement auprès des investisseurs professionnels moins intéressants.

(20)

Voir l’article 18, paragraphe 2, du règlement ELTIF. À cette fin, l’AEMF est chargée d’élaborer des projets de normes techniques de réglementation précisant les circonstances dans lesquelles la vie d’un ELTIF est considérée comme étant suffisamment longue pour couvrir le cycle de vie de chacun des actifs qui le composent.    

(21)

L’article 19, paragraphes 1 et 2, dispose que «les statuts ou documents constitutifs d’un ELTIF n’empêchent pas que ses parts ou actions soient admises à la négociation sur un marché réglementé ou dans un système multilatéral de négociation». En outre, ces «statuts ou documents constitutifs d’un ELTIF n’empêchent pas les investisseurs de céder librement leurs parts ou actions à des tiers autres que le gestionnaire de l’ELTIF».

(22)

JO L 302 du 17.11.2009, p. 32, tel que modifié.

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