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Document 52021AE2534

Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — «La stratégie de l’UE en matière de retour volontaire et de réintégration» [COM(2021) 120 final]

EESC 2021/02534

JO C 517 du 22.12.2021, p. 86–90 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

22.12.2021   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 517/86


Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — «La stratégie de l’UE en matière de retour volontaire et de réintégration»

[COM(2021) 120 final]

(2021/C 517/13)

Rapporteur:

José Antonio MORENO DÍAZ

Saisine

Commission européenne, 31.5.2021

Base juridique

Article 304 du TFUE

Compétence

Section «Emploi, affaires sociales et citoyenneté»

Adoption en section

7.9.2021

Adoption en session plénière

22.9.2021

Session plénière no

563

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

219/1/4

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

La stratégie en matière de retour volontaire et de réintégration à caractère durable entend instaurer une approche partagée pour la conception, le développement et la mise en œuvre des programmes promus par les États membres en matière de retour volontaire assisté et de réintégration, ou AVRR selon le sigle anglais, en définissant des objectifs communs et en favorisant la cohérence de ces dispositifs nationaux entre eux et avec ceux de l’Union européenne. Elle s’efforce également de susciter la création et la mise en œuvre d’outils conjoints entre les États membres et d’améliorer leur coopération dans ces domaines.

1.2.

En matière de retour volontaire, il existe aujourd’hui une multitude d’instruments et approches, formant ainsi tout un écheveau d’initiatives, programmes et projets qui, souvent, pâtissent d’un manque de cadres de référence communs, si bien qu’il est ardu non seulement de les évaluer mais, même, d’assurer leur mise en œuvre efficace. La stratégie à l’examen a pour objectif de poser des jalons sur la voie d’une harmonisation de ces cadres de référence et de stimuler la coopération menée entre les pays européens pour développer les programmes de retour volontaire et de réintégration.

1.3.

Le CESE accueille favorablement la stratégie, en ce qu’elle offre un instrument de gestion qui s’efforce d’améliorer la coordination entre les États membres et leurs objectifs communs dans le domaine de la gouvernance migratoire. Le CESE adhère à la logique de la Commission quand elle entend réaliser des avancées pour ce qui est de l’harmonisation des instruments, de la collecte de données et des mécanismes de conseil aux personnes concernées, de façon à surmonter le morcellement actuel des approches, diminuer le coût des retours, ou revaloriser les enveloppes financières des programmes afférents, pour ne citer que quelques-uns des défis qui se posent aujourd’hui.

1.4.

Toutefois, ainsi qu’il l’a déjà déploré en d’autres occasions, le CESE regrette que les mesures prises pour progresser en ce qui concerne les filières d’entrée régulières, soit celles qui intéressent la majorité de la population étrangère résidant dans l’Union européenne, soient déployées plus tardivement, et de manière plus limitée, que les propositions destinées à résoudre les problèmes en rapport avec les situations d’irrégularité. Une vision globale de la mobilité est indispensable pour offrir des pistes de substitution qui aillent au-delà du contrôle aux frontières et du retour.

1.5.

Le CESE souligne que la majeure partie des procédures de retour ne sont pas exécutées correctement, parce que les pays d’origine n’y prennent pas part et que, par ailleurs, les personnes en situation irrégulière n’y sont associées qu’à leur corps défendant. Sur ce point, et bien qu’il porte une appréciation positive sur les efforts de la Commission, le CESE ne peut qu’exprimer des doutes quant à l’efficacité de certaines des propositions qu’elle formule, comme le dispositif de la prise en charge des retours.

1.6.

Le rôle que Frontex est appelé à jouer inquiète également le CESE, en particulier dans la perspective de la publication du Parlement européen concernant les violations de droits commises par cette agence européenne (1). Pour le Comité, il est indispensable de mettre en place des mécanismes souples et agissants qui supervisent et contrôlent efficacement les activités de Frontex quant à sa responsabilité et qui garantissent que ses interventions sont menées dans le respect des droits de l’homme.

1.7.

Le CESE est favorable à ce que la coordination entre tous les acteurs concernés soit améliorée, et il soutient les avancées qui sont préconisées pour renforcer la solidarité entre les États membres et la coopération avec les pays tiers, tout comme il appuie les efforts d’amélioration concernant les conseils et orientations dispensés en matière de retour et la participation de la société civile dans les actions de rapatriement et, en particulier, de réintégration durable. De même, il juge favorablement que la proposition à l’examen s’attache à réaliser des progrès pour ce qui est de la disponibilité des ressources et de la collecte de données, ainsi que de l’échange de bonnes pratiques dans ces domaines.

1.8.

Le CESE fait part de ses inquiétudes concernant l’objectif susmentionné d’augmenter le nombre de retours volontaires rapides depuis les frontières extérieures, étant donné qu’ils sont susceptibles de se traduire par des déficiences en matière de garanties, et il s’alarme tout particulièrement que l’expression de «retour volontaire» puisse se muer en un simple euphémisme, employé pour désigner des expulsions ou ouvrir la possibilité d’accorder une compensation financière aux pays de destination, lesquels recevront les personnes soumises à une décision de retour sans tenir compte ni de leurs souhaits, ni même, de manière encore plus préoccupante, de leurs droits. En outre, le CESE tient à souligner qu’il est incohérent d’offrir de tels dispositifs incitatifs dans le cadre de programmes qui impliquent l’existence de personnes en situation irrégulière, étant donné que les pays d’origine risquent ainsi d’être dissuadés de faire le moindre effort pour faire baisser ces flux.

1.9.

À cet égard, le CESE reste d’avis qu’une des faiblesses stratégiques de la politique d’immigration et d’asile de l’Union européenne est d’être axée, de manière quasi exclusive, sur la lutte contre les situations irrégulières, qu’elle soit menée aux frontières ou s’exerce par les retours, volontaires ou forcés. C’est pour cette raison qu’une fois de plus, il invite la Commission à revoir son cadre de référence et à œuvrer réellement dans l’optique de conférer à cette politique une vision globale, qui favorise une mobilité ordonnée, régulière et sûre.

2.   Contexte

2.1.

Aux termes de la directive sur le retour et comme le prévoit le nouveau pacte sur la migration et l’asile, l’un des objectifs stratégiques de la politique migratoire de l’Union européenne consiste à faciliter les retours volontaires.

2.2.

L’expression de «retour volontaire» s’applique au dispositif qui permet à des migrants qui se trouvent en séjour irrégulier sur le territoire de l’Union européenne de retourner volontairement dans leur pays d’origine. Il suppose qu’il laisse aux personnes migrantes le choix de prendre cette décision en toute liberté, qu’il facilite leur réadmission dans leur État de départ et qu’il leur ouvre la possibilité de mieux se réinsérer dans leur société d’accueil que dans le cas des procédures de retour forcé. En 2019, sur les 491 195 ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier qui ont reçu l’ordre de quitter le territoire de l’Union européenne, seuls 142 320 ont effectivement regagné un pays tiers.

2.3.

La stratégie a pour objectif d’instaurer une approche partagée pour la conception, le développement et la mise en œuvre de programmes promus par les États membres en matière de retour volontaire assisté et de réintégration, ou AVRR selon le sigle anglais, en définissant des objectifs communs et en favorisant la cohérence de ces dispositifs nationaux entre eux et avec ceux de l’Union européenne. Son but consiste également à susciter la création et la mise en œuvre d’outils conjoints entre les États membres et améliorer leur coopération.

2.4.

La visée que poursuit l’aide au retour et à la réintégration est d’apporter une assistance aux migrants en situation irrégulière afin qu’ils retournent volontairement dans leur pays d’origine et commencent à y mener une existence autonome et que le risque qu’ils émigrent à nouveau irrégulièrement s’en trouve ainsi réduit. L’aide au retour peut consister, par exemple, à donner des conseils avant le départ, à dispenser une aide d’ordre psychosocial et une assistance pour organiser le voyage, à fournir un appui pour répondre à des besoins médicaux immédiats, ou encore à apporter une contribution financière pour faciliter le rapatriement du migrant et stabiliser ses conditions de vie après son arrivée. L’aide à la réintégration, quant à elle, vise à aider la personne rapatriée à se réintégrer avec succès dans la société et peut prendre la forme d’une assistance et de conseils, assurés immédiatement après son arrivée, d’un soutien pour la recherche ou la création d’activités qui lui procurent un revenu, ou encore d’initiatives menées avec les communautés locales.

2.5.

Par des voies directes ou par l’intermédiaire des programmes des États membres, l’Union européenne finance un grand nombre d’actions liées au retour volontaire et à la réintégration. Entre 2014 et 2018, les ressources du fonds «Asile, migration et intégration» (FAMI) ont financé quelque 60 programmes d’aide au retour volontaire et à la réintégration, tandis que d’autres l’ont été par le truchement du Fonds européen de développement et de dispositifs comme l’instrument de financement de la coopération au développement (ICD) et l’instrument d’aide de préadhésion (IAP). Par ailleurs, nombre d’États membres disposent de leur propre programme d’aide au retour volontaire et à la réintégration.

2.6.

De par leur multiplicité, ces instruments forment tout un écheveau d’initiatives, programmes et projets qui, souvent, pâtissent d’un manque de cadres de référence communs, si bien qu’il est ardu non seulement de les évaluer mais, même, d’assurer leur mise en œuvre efficace. La stratégie à l’examen a pour objectif de poser des jalons sur la voie d’une harmonisation de ces cadres de référence et de stimuler la coopération entre les pays européens pour développer les programmes de retour volontaire et de réintégration.

2.7.

La stratégie présentée par la Commission a dégagé les objectifs suivants: 1) augmenter l’adhésion aux retours volontaires parmi les personnes qui ont migré, ainsi que la part de ce dispositif dans le nombre total de retours, 2) créer un canal supplémentaire de coopération et de solidarité entre les États membres, en favorisant la prise en charge des retours, 3) améliorer l’efficacité de l’assistance individuelle et collective, en supprimant les lacunes et les doublons et en renforçant les synergies avec d’autres donateurs et avec les pays tiers, y compris par une meilleure protection des migrants vulnérables, 4) configurer les actions de retour et de réintégration durables de telle manière qu’elles prennent en compte les besoins individuels et y répondent, 5) favoriser la durabilité des retours et faire baisser la réimmigration irrégulière, notamment par le soutien aux communautés d’accueil, 6) rendre plus durables les actions de réintégration, au niveau des individus et des communautés, et leur contribution aux plans de développement des pays tiers, entre autres en les articulant avec d’autres activités financées en vue du développement au niveau national ou communautaire, 7) accroître les capacités et l’engagement des pays tiers vis-à-vis des processus de retour, de réadmission et de réintégration, 8) inscrire les buts énumérés ci-dessus dans une optique fondée sur les droits et centrée sur les personnes migrantes.

2.8.

Aux personnes qui optent pour lui, le retour volontaire ouvre un véritable horizon, et il tient compte de leurs besoins, de leurs attentes et de leurs perspectives une fois qu’elles sont revenues sur place. En outre, il peut s’appuyer, dans le cadre de la coopération de l’Union avec les pays tiers, sur un engagement de l’État dans lequel elles retournent. La réintégration, quant à elle, représente un facteur essentiel d’efficacité et de crédibilité des programmes de retour, dans la mesure où elle implique de développer des outils qui aideront les migrants à surmonter les difficultés, d’ordre socio-économique ou psychologique et social, rencontrées lors de leur réintégration dans leur communauté et auront pour effet que leur retour sera plus durable. La réintégration doit être conçue avec le concours des pouvoirs publics nationaux et territoriaux, des communautés locales d’accueil et de la société civile, afin de contribuer à offrir, à la personne rapatriée comme à son environnement sur place, des perspectives tangibles concernant son avenir.

2.9.

En soutien aux acteurs concernés par sa mise en œuvre, la stratégie proposera des moyens d’élaborer des méthodes pratiques pour atteindre les objectifs susmentionnés, ainsi qu’une panoplie d’outils qui iront des ressources d’intelligence artificielle, visant à combler les lacunes en matière d’information et à faciliter la gestion des données, à des dispositifs d’orientation, s’agissant de gérer les projets, programmer le développement et renforcer les capacités.

2.10.

La stratégie constitue l’aboutissement d’un processus de participation ouverte, auquel ont pris part différents intervenants clés, ainsi que les autorités nationales chargées des programmes d’aide au retour volontaire et à la réintégration, les acteurs qui sont engagés dans des projets de retour, les réseaux de services et bien d’autres partenaires.

3.   Observations concernant la présentation de la stratégie en matière de retour volontaire et de réintégration

3.1.

Le CESE accueille favorablement la stratégie européenne en matière de retour volontaire et de réintégration, en ce qu’elle offre un instrument de gestion qui s’efforce d’améliorer, dans le domaine de la gouvernance migratoire, la coordination entre les États membres, ainsi que leurs objectifs communs.

3.2.

Le CESE juge que la révision d’un dispositif tel que le retour volontaire et la réintégration donne bien lieu à des avancées du type de celles que la Commission met en évidence dans sa communication. Dépasser le morcellement actuel des approches, diminuer le coût des retours, améliorer la collecte d’information, réaliser des avancées dans le système de conseil aux personnes soumises à un retour, assurer une meilleure coordination entre les acteurs intéressés, favoriser la durabilité des projets de retour volontaire et de réintégration, ou encore revaloriser les enveloppes financières des programmes afférents sont autant d’aspects qu’il est nécessaire d’aborder, estime le CESE, si l’on veut augmenter l’efficacité de ces mécanismes. Il tient également pour indispensable de mieux collecter les données et repérer les bonnes pratiques, afin de partager les leçons qui en ont été tirées.

3.3.

Toutefois, ainsi qu’il l’a déjà déploré en d’autres occasions, comme dans son avis SOC/649 (2), le CESE regrette que les mesures visant à progresser en ce qui concerne les filières d’entrée régulières, soit celles qui intéressent la majorité de la population étrangère résidant dans l’Union européenne, soient déployées plus tardivement, et de manière plus limitée, que les propositions destinées à résoudre les problèmes en rapport avec les situations d’irrégularité. Il rappelle qu’une vision globale de la mobilité est indispensable pour offrir des pistes de substitution qui aillent au-delà du contrôle aux frontières et du retour.

3.4.

Le CESE a conscience des difficultés que la majeure partie des États membres éprouvent pour réaliser effectivement des retours, ainsi que de la volonté de la Commission de progresser vers un système européen efficace et commun pour y procéder. Il n’en entend pas moins rappeler que la majeure partie de ces procédures ne sont pas exécutées correctement, parce que les pays d’origine n’y prennent pas part et que, par ailleurs, les personnes en situation irrégulière n’y sont associées qu’à leur corps défendant. On ne peut considérer qu’effectuer un retour volontaire pour éviter d’être expulsé de force constituerait une action non contrainte.

3.5.

Le CESE réitère ses doutes concernant le dispositif de prise en charge des retours, car on ne voit pas bien pour quels motifs les États membres inclineraient à participer à ce mécanisme, qui continue à reposer sur la solidarité exercée à titre volontaire.

3.6.

Le CESE reconnaît les efforts que la Commission déploie en matière de retour, tant pour le suivi des programmes nationaux que dans le cadre des initiatives financées par l’Union elle-même. Sur ce point, il y a lieu de mettre à l’honneur le réseau européen pour le retour et la réintégration, qui facilite la coopération entre les autorités compétentes en matière de migration. Que la Commission ait prévu qu’à partir de 2022, Frontex reprendrait les activités dudit réseau ne peut que susciter une vive inquiétude au sein du CESE, eu égard au rapport du groupe de travail du Parlement européen sur les violations de droits commises par cette agence européenne. Pour le Comité, cette disposition nécessite de mettre en place des mécanismes souples et opérants qui supervisent et contrôlent efficacement les activités de Frontex quant à sa responsabilité et qui garantissent que ses interventions sont menées dans le respect de droits de l’homme (3). Il est indispensable de mettre l’accent sur ce point, car la protection de ces droits représente un élément clé dans toutes les actions de l’Union européenne, y compris la politique migratoire et les procédures de retour et de réintégration, et il convient que l’activité de Frontex puisse être suivie, et corrigée au besoin, en temps réel.

3.7.

Les programmes de retour et de réintégration font intervenir, dans les pays de départ comme d’arrivée, tout un éventail d’intervenants, prestataires de services, formations, échanges d’informations et ressources. La base de cette dynamique est la présence de personnes en situation irrégulière sur le territoire européen, et il est inquiétant de penser qu’elle puisse donner naissance à un secteur d’activité dont la pérennité nécessitera précisément l’existence desdites personnes et, qu’en conséquence, elle aboutisse à favoriser cette filière d’immigration, par les perspectives de retour, volontaire ou forcé, qui sont ainsi ouvertes.

4.   Observations complémentaires concernant l’approche de la stratégie

4.1.

Le CESE reste d’avis qu’une des faiblesses stratégiques de la politique d’immigration et d’asile de l’Union européenne est d’être axée, de manière quasi exclusive, sur la lutte contre les situations irrégulières, qu’elle soit menée aux frontières ou s’exerce par les retours, volontaires ou forcés. Pour remédier à cette lacune, il est nécessaire de mettre en place, en matière d’entrées, des mécanismes qui soient réguliers, souples, sûrs et efficaces, et qui, de surcroît, limitent les possibilités de créer des espaces où ils peuvent servir de base à une exploitation économique.

4.2.

Le CESE fait part de ses inquiétudes concernant l’objectif susmentionné d’augmenter le nombre de retours volontaires rapides depuis les frontières extérieures, étant donné qu’ils sont susceptibles de se traduire par des déficiences en matière de garanties. Si ce processus de «retour volontaire» est compris comme une décision qui est mûrement réfléchie par l’intéressé et s’accompagne d’actions visant à sa réinsertion, avec la participation des administrations des deux pays concernés, il est inconcevable que l’on fasse le pari de mettre ce modèle en œuvre aux frontières, car on pourrait alors comprendre que l’expression se ramène à un simple euphémisme, employé pour désigner des expulsions ou ouvrir la possibilité d’accorder une compensation financière aux pays de destination, lesquels recevront les personnes soumises à une décision de retour sans tenir compte ni de leurs souhaits, ni même, de manière encore plus préoccupante, de leurs droits.

4.3.

Une coordination efficace entre toutes les parties prenantes. Le CESE apporte bien évidemment son soutien aux améliorations proposées concernant la coordination entre les parties prenantes d’une politique publique. Il ne s’en inquiète pas moins de constater l’extension que va prendre le spectre des intervenants et acteurs intéressés, lesquels pourraient voir dans le retour volontaire l’occasion de faire des affaires, sans veiller dûment aux besoins des personnes soumises à cette procédure.

4.4.

Améliorer la solidarité et la coopération. Il convient que les actions de retour et d’intégration soient menées dans un cadre de coopération et de solidarité entre les États membres. L’enjeu est de renforcer les outils de coordination bien au-delà de la contribution financière, en fournissant également une assistance concernant les connaissances, les engagements et les retours d’expérience. En outre, la base sur laquelle il y a lieu de fonder toutes les actions doit être de respecter les pays tiers où elles se déroulent et de coopérer avec eux, en ne se limitant pas à encourager leurs institutions à y participer mais en incitant aussi leur société civile à y collaborer et y contribuer.

4.5.

L’aide au retour volontaire et à la réintégration de migrants à partir des pays tiers et de l’un à l’autre. De l’avis du CESE, la coopération avec les pays tiers revêt une importance capitale pour la gouvernance des migrations. Il ne semble pas que la manière la plus judicieuse de nouer pareille collaboration consiste à l’axer sur des instruments qui créent un lien entre l’octroi de ressources et les situations d’irrégularité.

4.6.

Des conseils et une orientation efficace en matière de retour. Les droits de la personne étant inaliénables et devant être garantis même dans le cadre d’une procédure d’expulsion, il est primordial d’améliorer l’information fournie aux migrants tout au long du processus. Pour cette raison précise, et du fait de la multiplicité des acteurs qui, dans un programme de retour volontaire, sont appelés à intervenir pour qu’il soit mené à bonne fin, dans le lieu d’origine ou de destination, au sein des diasporas ou ailleurs, il n’est pas possible de considérer ces dispositifs comme des outils qui revêtiraient un caractère expéditif et de ne pas les lier clairement à des projets de réinsertion.

4.7.

La garantie de la qualité de l’aide. Le CESE ne peut que souscrire à la nécessité de doter l’aide au retour volontaire d’un large éventail de services et prestations, qui vont du conseil et de l’aide médicale et psychologique à l’assistance financière, juridique et logistique pour la réalisation du voyage. Pour autant, il ne peut se dispenser de relever qu’on ne peut considérer les programmes d’aide au retour volontaire et à la réintégration comme des outils qui se prêtent à un usage massif et généralisé: en ce qui concerne les familles, par exemple, ce retour exige de porter aux mineurs, filles ou garçons, une attention spécifique, alors qu’il n’en va pas de même dans les autres cas de figure. Pour l’heure, le rôle joué par Frontex pour assurer et évaluer certains de ces services ne laisse pas d’inquiéter.

4.8.

La promotion de la durabilité de l’aide à la réintégration et de l’adhésion des pays partenaires. Cette action joue un rôle essentiel non seulement pour assurer l’avenir des personnes rapatriées mais également par rapport à l’objectif d’éviter qu’elles n’immigrent à nouveau de manière irrégulière dans l’Union européenne. Encore une fois, le CESE tient à souligner qu’il est incohérent d’offrir de tels dispositifs incitatifs dans le cadre de programmes qui, par nature, nécessitent l’existence de personnes en situation irrégulière, étant donné que les pays d’origine risquent ainsi d’être dissuadés de faire le moindre effort pour endiguer ces flux. En outre, une démarche qui fait dépendre une politique telle que celle des retours volontaires de la volonté des pays tiers peut créer une faille majeure dans la crédibilité et la cohérence de l’action menée par l’Union en matière migratoire.

4.9.

Le financement du retour volontaire et de la réintégration. Il va de soi que l’Union européenne est l’un des intervenants clés du financement des programmes d’aide au retour volontaire et à la réintégration, dans leurs différentes facettes. Il est indispensable que la coopération avec des pays tiers, en quelque domaine que ce soit, soit attentive à l’engagement qu’ils ont pris de respecter le droit public international, ainsi que d’assurer la protection des droits de l’homme et des libertés individuelles fondamentales. Le Parlement européen devrait réserver bon accueil à tout espace de coopération avec des pays tiers, quel qu’il soit, au sein duquel il est possible de traiter de questions en rapport avec les droits de l’homme. Inversement, il apparaît que faire de la coopération en matière de retour un rouage essentiel de l’action extérieure et de la politique de voisinage de l’Union européenne, bien loin de mettre un frein aux situations d’irrégularité, a pour effet de les encourager encore davantage.

Bruxelles, le 22 septembre 2021.

La présidente du Comité économique et social européen

Christa SCHWENG


(1)  Voir le Report on the fact-finding investigation on Frontex concerning alleged fundamental rights violations («Rapport sur l’enquête Frontex relative aux violations présumées des droits fondamentaux par Frontex») de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures (LIBE) du Parlement européen, en date du 14 juillet 2021, https://www.europarl.europa.eu/cmsdata/238156/14072021%20Final%20Report%20FSWG_en.pdf (en anglais).

(2)  JO C 123 du 9.4.2021, p. 15.

(3)  Voir les recommandations en ce sens qui sont reprises dans le Report on the fact-finding investigation on Frontex concerning alleged fundamental rights violations («Rapport sur l’enquête Frontex relative aux violations présumées des droits fondamentaux par Frontex») de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures (LIBE) du Parlement européen, en date du 14 juillet 2021, https://www.europarl.europa.eu/cmsdata/238156/14072021%20Final%20Report%20FSWG_en.pdf (en anglais).


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