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Document 52020IR0541

Avis du Comité européen des régions — Bilan de qualité de la directive-cadre sur l’eau, de la directive sur la protection des eaux souterraines, de la directive sur les normes de qualité environnementale et de la directive «Inondations»

COR 2020/00541

JO C 324 du 1.10.2020, p. 28–34 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, GA, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

1.10.2020   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 324/28


Avis du Comité européen des régions — Bilan de qualité de la directive-cadre sur l’eau, de la directive sur la protection des eaux souterraines, de la directive sur les normes de qualité environnementale et de la directive «Inondations»

(2020/C 324/05)

Rapporteur:

Piotr CAŁBECKI (PL/PPE), maréchal de la voïvodie de Cujavie-Poméranie

Texte de référence:

SEC(2019) 438

SWD(2019) 439

SWD(2019) 440

RECOMMANDATIONS POLITIQUES

LE COMITÉ EUROPÉEN DES RÉGIONS

A.   Observations liminaires

1.

se félicite de l’exécution en temps utile du bilan de qualité de la directive-cadre sur l’eau (DCE) et de la directive «Inondations», conformément à l’article 19, paragraphe 2, de la DCE, qui dispose que «la Commission réexamine la présente directive au plus tard dix-neuf ans après sa date d’entrée en vigueur et propose toute modification jugée nécessaire»;

2.

affirme que l’eau est notre bien commun le plus précieux et qu’elle constitue une ressource limitée qui doit être protégée et utilisée de manière durable, sur le plan aussi bien de la qualité que de la quantité. Sa protection et sa gestion transcendent les frontières régionales et nationales, étant donné que 60 % des bassins hydrographiques de l’Union européenne se situent sur le territoire de plus d’un État membre;

3.

souligne que les secteurs de l’Union qui dépendent de l’eau génèrent 3 400 milliards d’EUR par an, soit 26 % de la valeur ajoutée brute annuelle de l’Union, et emploient quelque 44 millions de personnes; dans le même temps, note avec inquiétude que 40 % seulement des eaux de surface européennes sont considérées comme étant dans un bon état écologique, et 38 % seulement dans un bon état chimique (1);

4.

plaide, dans le contexte de la pandémie de COVID-19, en faveur d’une amélioration de la stérilisation des eaux résiduaires, d’une intensification de la recherche sur l’amélioration de la préservation des eaux usées (eaux ménagères et eaux vannes), ainsi que d’un élargissement du déploiement de solutions fondées sur la nature, afin d’éliminer toute menace épidémiologique contre la qualité de l’eau;

5.

souligne que l’eau est un élément essentiel pour l’environnement et pour la vie humaine. Les collectivités locales et régionales des États membres ont un rôle essentiel à jouer dans les actions de contrôle, et dans la prise de mesures préventives et correctives, en vue d’obtenir et de conserver une eau de qualité. Les villes et les régions jouent un rôle précurseur lorsqu’il s’agit d’assurer l’accès universel à l’eau et à l’assainissement en tant que droit fondamental. Il importe de surmonter le déficit d’expertise, l’excès de bureaucratie et l’absence d’approche à plusieurs niveaux qui ont eu un effet négatif sur l’efficacité et qui risquent de rendre le recours à de bonnes pratiques au niveau local et régional impossible;

6.

insiste sur l’importance de l’eau pour les citoyens européens, dont l’un des premiers recours à l’initiative citoyenne européenne (ICE) avait pour but d’obtenir une réponse face à leurs préoccupations concernant la politique de l’eau de l’Union. Ce bilan de qualité fait également suite aux engagements pris par la Commission en réponse à l’initiative citoyenne européenne Right2Water (L’eau, un droit humain) (2) visant à promouvoir l’accès à l’eau et à l’assainissement;

B.   Conclusions du bilan de qualité

7.

prend acte de la conclusion du bilan de qualité selon laquelle les directives sont largement adaptées à leur finalité, bien qu’il existe une certaine marge d’amélioration. Les directives ont conduit à un niveau plus élevé de protection pour les masses d’eau et de gestion des risques d’inondation. Le fait que les objectifs de la DCE n’ont pas encore été pleinement atteints est dû en grande partie à un financement inadapté, à des lenteurs dans la mise en œuvre et à l’intégration insuffisante des objectifs environnementaux dans les politiques sectorielles, plutôt qu’à une lacune dans la législation;

8.

note que le bilan de qualité identifie la thématique des produits chimiques comme un domaine dans lequel il est possible de progresser et d’obtenir de meilleurs résultats. Si certains éléments tendent à démontrer que la DCE, la directive sur les normes de qualité environnementale (DNQE) et la directive sur la protection des eaux souterraines ont entraîné une diminution de la pollution chimique des eaux de l’Union, l’analyse met en évidence trois domaines dans lesquels le cadre législatif actuel n’est pas optimal: les différences entre les États membres (différences entre les listes de polluants locaux) et les valeurs limites que ces polluants ne devraient pas dépasser; la liste des substances prioritaires (un processus de longue haleine); et le fait que la DNQE et la directive sur la protection des eaux souterraines évaluent le risque pour les personnes et l’environnement en se basant principalement sur des substances individuelles, sans tenir compte des effets combinés des mélanges, et ne couvrent inévitablement qu’une partie infime des substances présentes dans l’environnement;

9.

souligne que la qualité des ressources en eau potable reste menacée; déplore par conséquent que le bilan de qualité ne se concentre pas sur le fonctionnement et la mise en œuvre de l’article 7 de la DCE concernant la non-détérioration de la qualité des masses d’eau utilisées pour le captage d’eau potable et la réduction du degré de traitement de purification nécessaire à la production d’eau potable, sachant que les opérateurs du secteur de l’eau potable devraient pouvoir tabler sur des ressources en eau de haute qualité pour réduire le coût des traitements; invite la Commission et les colégislateurs à garantir des normes de qualité et de sécurité élevées, ainsi que la cohérence des politiques en vue de la refonte de la directive relative à l’eau potable, et notamment de ses dispositions sur l’accès à l’eau (3);

10.

exprime sa déception quant au fait que le bilan de qualité n’analyse pas de manière plus approfondie les conséquences induites par l’arrêt Weser de la Cour de justice (4). L’application des clauses de détérioration et d’amélioration énoncées à l’article 4, paragraphe 1, et des clauses d’exemption prévues à l’article 4, paragraphes 4 à 7, de la DCE est une source d’incertitudes juridiques tant pour les opérateurs que pour les autorités. En particulier, il convient de procéder à une analyse plus approfondie des conséquences sur les dispositifs de protection de l’environnement (par exemple, les stations d’épuration des eaux usées) ou les mesures qui contribuent à la transition climatique et à la gestion de l’énergie et des ressources;

11.

souligne que, puisqu’à l’heure actuelle, plus de la moitié des masses d’eau européennes font l’objet d’exemptions, l’obtention de résultats fructueux à l’horizon 2027 impliquera de surmonter des obstacles à tout le moins non négligeables, ce qui semble peu probable à ladite échéance de 2027, et qu’il conviendra donc de progresser sensiblement sur le plan des efforts déployés, des ressources engagées, de la mise en œuvre et de l’application de la DCE; insiste sur le fait que, même après 2027, la protection des eaux par les organismes visés par la directive-cadre doit se poursuivre;

12.

invite la Commission à compléter son évaluation par l’expérience des États membres qui appliquent la directive-cadre sur l’eau conformément aux principes énoncés dans l’arrêt Weser. Il est préoccupant de constater que plusieurs pays ne mettent pas correctement en œuvre la directive, mais ce n’est pas une raison pour ignorer les problèmes juridiques qui se sont posés là où elle est appliquée;

C.   Cohérence des politiques: la DCE et le reste de la législation de l’Union

13.

demande instamment que les réflexions sur l’eau soient moins cloisonnées, et qu’une plus grande cohérence et une meilleure coordination soient assurées entre toutes les législations interconnectées de l’Union, notamment pour ce qui est des préoccupations liées au changement climatique, à l’économie circulaire et aux polluants émergents. Une gestion de l’eau à l’épreuve du changement climatique devrait être intégrée dans toutes les politiques de l’Union, et un objectif clair et ambitieux en matière d’atténuation du changement climatique et d’adaptation à celui-ci devrait être défini dans la DCE;

14.

insiste sur les liens d’interdépendance qui existent entre, d’une part, la DCE et la directive «Inondations» et, d’autre part, les autres politiques dans lesquelles les collectivités locales et régionales ont un rôle crucial à jouer, telles que l’aménagement du territoire, l’agriculture, la production d’énergie, et notamment l’hydroélectricité (et l’approvisionnement énergétique) ainsi que l’utilisation thermique de l’eau pour le chauffage et le refroidissement, le transport par voie d’eau, la santé humaine, le tourisme, ou encore la mise en œuvre de la directive relative au traitement des eaux urbaines résiduaires et de la directive sur les nitrates;

15.

se félicite à cet égard de l’évaluation, réalisée en parallèle, de la directive relative au traitement des eaux urbaines résiduaires, qui constitue l’un des principaux piliers des services relatifs aux eaux résiduaires en Europe. Celle-ci a débouché sur des conclusions similaires à celles du bilan de qualité, à savoir la nécessité de mettre en œuvre de manière efficace et efficiente les instruments juridiques existants, porteurs d’avantages substantiels sur le plan sociétal et environnemental. Le Comité regrette toutefois que l’évaluation n’ait pas analysé l’efficacité de cette directive en ce qui concerne les rejets d’eaux résiduaires industrielles dans les systèmes de collecte et les installations de traitement des eaux urbaines résiduaires. De même, il déplore que l’incidence du manque de cohérence entre l’article 4 de la DCE et les articles 10, 7 et 2, paragraphe 9, de la directive relative au traitement des eaux urbaines résiduaires sur les stations d’épuration les plus efficaces en Europe n’ait pas fait l’objet d’une analyse juridique;

16.

souligne en outre les divergences d’approche entre les États membres en ce qui concerne le phosphore et l’eutrophisation, et préconise une plus grande cohérence entre la directive relative au traitement des eaux urbaines résiduaires et la DCE;

17.

estime essentiel que la Commission européenne œuvre à renforcer l’application des obligations juridiques relatives aux principales pressions qui pèsent sur le milieu aquatique, telles que celles découlant de la directive sur les nitrates et de la directive relative au traitement des eaux urbaines résiduaires. Il convient d’accorder une attention toute particulière aux nouveaux composés traces organiques toxiques émergents, notamment les microplastiques et les produits pharmaceutiques, étant donné que les technologies actuelles utilisées dans les stations d’épuration ne sont pas entièrement en mesure d’éliminer les micropolluants;

18.

souligne que l’une des pressions majeures sur les eaux de surface et les eaux souterraines est exercée par l’agriculture intensive, notamment le prélèvement et la pollution par les pesticides, les engrais et les résidus pharmaceutiques provenant d’antibiotiques pour le bétail. La prochaine politique agricole commune doit pleinement tenir compte de l’impact sur l’eau de l’activité agricole et favoriser le passage à des pratiques plus respectueuses de l’eau. Au nombre des solutions possibles figurent des propositions visant à élargir la conditionnalité environnementale de l’accès aux paiements à toutes les dispositions de la directive-cadre sur l’eau, à promouvoir une agriculture plus verte par des «programmes écologiques», ainsi qu’à encourager dialogue et échanges de bonnes pratiques avec une participation active des opérateurs du secteur de l’eau, des ONG concernées et des agriculteurs;

19.

rappelle que l’eau est un déterminant majeur du bon fonctionnement de la biosphère, de la bioproductivité et de la capacité d’absorption, et aussi qu’elle affecte — et que l’affectent — les activités de nombreux secteurs économiques différents, en particulier l’agriculture, l’énergie et l’industrie. Les discussions en cours ou à venir dans le cadre du cycle législatif actuel sont une excellente occasion de faire en sorte que l’eau et les objectifs généraux de la directive-cadre sur l’eau soient inclus dans les politiques couvrant d’autres secteurs; souligne que le pacte vert pour l’Europe énonce des objectifs ambitieux pour réduire l’utilisation des ressources, la pollution et la toxicité; par conséquent, des stratégies telles que le «nouveau plan d’action en faveur de l’économie circulaire», le plan d’action «zéro pollution» et les nouvelles stratégies en faveur de la biodiversité ou «de la ferme à la table» devraient clairement intégrer les objectifs de la directive-cadre sur l’eau en vue d’une cohérence pleine et entière des politiques;

20.

met en exergue les possibilités qu’offre l’usage de l’eau de récupération pour l’irrigation agricole afin de réduire la rareté de l’eau, de favoriser l’adaptation au changement climatique et de promouvoir l’économie circulaire; se félicite, à cet égard, de l’adoption par le Conseil et le Parlement européen du règlement relatif aux exigences minimales requises pour la réutilisation de l’eau et réaffirme sa position en cette dernière matière, telle qu’il l’a exprimée dans son avis y afférent (5);

21.

invite la Commission à mettre en place un système de contrôle pleinement opérationnel pour la collecte régulière de données mesurées et à jour sur les résidus de pesticides dans l’environnement (en particulier dans les sols et les eaux), en s’inspirant éventuellement de l’expérience fructueuse du système de surveillance des sols de l’enquête statistique aréolaire sur l’utilisation/l’occupation des sols (LUCAS);

22.

se félicite de la décision de la Commission du 13 janvier 2020 d’interdire le thiaclopride, un pesticide néonicotinoïde qui soulève des préoccupations environnementales, notamment en ce qui concerne son incidence sur les eaux souterraines, et qui est jugé dangereux pour la santé humaine par l’Autorité européenne de sécurité des aliments; plaide aussi pour l’interdiction du glyphosate et une PAC qui accompagne la fin de l’utilisation des pesticides;

D.   Prochaines étapes pour parvenir à un bon état des masses d’eau de l’Union

23.

souligne avec force que la DCE est devenue un jalon essentiel sur la voie d’une amélioration des ressources hydriques en Europe et un point de référence pour les autres continents. Toutefois, compte tenu des défis émergents (tels que le changement climatique, les microplastiques, les produits pharmaceutiques, les produits chimiques, les antibiotiques, etc.) et des nouvelles solutions (nouvelles technologies et méthodologies) apparues ces vingt dernières années, et à la lumière des objectifs de développement durable et du pacte vert pour l’Europe, la DCE doit être modernisée de toute urgence;

24.

préconise à cet égard un changement de paradigme, pour considérer la biosphère d’un point de vue évolutionniste (sensibilisation des citoyens au fait que la biosphère est en évolution constante) et d’une manière qui soit davantage écosystémique (intégrant la durabilité des bassins hydrographiques et la décarbonation), ainsi que la promotion d’une meilleure compréhension des processus écologiques, y compris les cycles de l’eau, du carbone, de l’azote et du phosphore;

25.

souligne que, dans le contexte de ce nouveau paradigme, chaque bassin hydrographique doit être considéré comme un «superorganisme platonicien» unique dans lequel la combinaison de la géomorphologie, du climat, des écosystèmes (parcelles naturelles et anthropisées) et des diverses formes d’activité humaine influe sur le cycle de l’eau et l’état écologique. Cette démarche doit être envisagée non seulement sous l’angle de la sécurité et des ressources, mais aussi et surtout comme un moyen d’assurer à chacun un avenir durable, un bon état de santé et une bonne qualité de vie;

26.

souhaite que les conclusions du bilan de qualité accélèrent le développement d’un paradigme intégrateur transdisciplinaire et de solutions novatrices connexes pour parvenir à l’objectif «zéro pollution» pour l’air, l’eau et les sols fixé dans le pacte vert pour l’Europe; juge indispensable de préserver et de restaurer la biodiversité dans les rivières, les lacs, les zones humides et les estuaires, ainsi que de prévenir et de limiter au maximum les dommages causés par les inondations;

27.

préconise de concevoir une nouvelle dimension globale pour la DCE, dans laquelle la prévention des inondations devrait être intégrée à la gestion de la prévention de la sécheresse et aux mesures visant à renforcer le potentiel de durabilité des bassins hydrographiques (dans une perspective hydroécologique axée sur cinq éléments: l’eau, la biodiversité, la résistance au changement climatique, les services écosystémiques pour la société et les autres incidences, notamment en matière de culture et d’éducation — WBSRC, d’après les initiales anglaises);

28.

insiste sur la nécessité de développer et de mettre en œuvre de bonnes pratiques de gestion et des technologies innovantes pour réduire la pollution due aux composés traces organiques et notamment aux pesticides, aux antibiotiques, aux microplastiques et aux autres substances dangereuses, et souligne que la pollution doit être traitée à la source, au moyen d’une approche globale fondée sur des processus informés et participatifs qui associent les citoyens, et dans lesquels tous les acteurs ont un rôle à jouer et les solutions les plus justes et les plus efficaces au regard des coûts sont privilégiées. Les solutions doivent être adaptées aux conditions locales, prévoir les conséquences de leur non-application et répondre à des besoins bien identifiés et à des considérations de long terme au lieu de s’appuyer sur des «solutions technologiques faciles», comme le souligne le bilan de qualité de la Commission européenne;

29.

demande un surcroît de recherche et d’innovation en vue de diversifier les sources d’approvisionnement en eau afin d’en garantir la sécurité, en particulier pour les villes d’Europe qui attirent un nombre croissant de citoyens, et pour ses régions qui sont de plus en plus touchées par de longues périodes de sécheresse;

30.

propose de mettre en œuvre d’urgence des outils innovants en vue de parvenir à un bon état écologique des bassins hydrographiques européens, tels que les solutions écohydrologiques fondées sur la nature (SEHFN — voir le rapport mondial de l’Unesco sur la mise en valeur des ressources en eau: «Les solutions fondées sur la nature pour la gestion de l’eau»); souligne que les SEHFN renforcent l’efficacité des infrastructures hydrotechniques, en particulier dans les paysages agricoles et urbains, pour ce qui est de l’atténuation du changement climatique en cours et de l’adaptation à celui-ci, qu’elles améliorent le potentiel multidimensionnel de durabilité des bassins hydrographiques que représente le WBSRC (eau, biodiversité, services écosystémiques pour la société, résistance au changement climatique, culture et éducation) (6), et qu’elles promeuvent une approche globale en encourageant les sciences et l’éducation transdisciplinaires en matière de durabilité;

31.

attire l’attention sur les installations de traitement des eaux usées de taille petite et moyenne, qui font face à un problème permanent de baisse périodique de leur efficacité, et recommande de recourir aux SEHFN, en l’occurrence à des systèmes séquentiels de filtration biologique par sédimentation pour réduire les pointes de polluants dans les effluents afin de parvenir à un bon état écologique des écosystèmes d’eau douce;

32.

souligne que, selon le récent rapport mondial sur l’évaluation des ressources en eau, les SEHFN ne sont utilisées que dans 5 % des investissements liés à l’eau, alors que ce chiffre devrait être bien supérieur. Les pollutions de source non ponctuelle et les eaux pluviales urbaines représentent presque 50 % de l’ensemble des pollutions d’un bassin hydrographique (pollution de source non ponctuelle issue des paysages agricoles, des eaux pluviales urbaines et des surfaces consacrées aux infrastructures de transport, et charge en phosphore et en azote résultant d’une pollution de source non ponctuelle, par exemple dans la mer Baltique). Les SEHFN constituent la manière la plus efficace de les atténuer. Cela signifie qu’il convient d’y recourir dix fois plus souvent qu’à présent pour atténuer les effets de la pollution, principalement au moyen de solutions fondées sur la nature mises en œuvre dans le cadre des principes écohydrologiques;

33.

souligne que face aux incidences toujours plus fortes du changement climatique, la directive «Inondations» devrait être intégrée à la DCE afin de renforcer l’alimentation des nappes souterraines, ainsi que les capacités de rétention des vallées fluviales par la rétention dans les plaines d’inondation et les polders et le rétablissement des niveaux d’eau dans les lacs et les zones humides environnants; souligne qu’il est essentiel de renforcer les capacités de rétention des bassins hydrographiques, car l’eau, en stimulant la productivité biologique, accroît l’accumulation de carbone et la circulation des nutriments, ce qui empêche les fuites de nutriments dans l’eau et l’atmosphère et évite l’eutrophisation et les proliférations d’algues toxiques;

34.

souligne que la politique agricole commune, la directive sur les nitrates et le règlement sur les produits phytosanitaires devraient être harmonisés avec la DCE en vue de réduire la pollution de source non ponctuelle (azote et phosphore), qui génère à l’heure actuelle entre 20 et 50 % de la charge en matières nutritives dans les lacs, les réservoirs et les zones côtières. Dans les régions où s’est concentré l’élevage industrialisé, il semble difficile d’atteindre cet objectif si la PAC et les politiques nationales n’engagent pas — en accord avec les objectifs du pacte vert et les stratégies en faveur de la biodiversité et «de la ferme à la table» — une forte réduction de cette forme d’élevage. La construction d’écotones, constitués de barrières géochimiques et de dénitrification, formant une frontière très efficace entre les terres et les eaux, y contribuerait également. Le Comité fait valoir qu’accroître la complexité du paysage agricole (au moyen d’écotones entre milieux aquatiques et terrestres, de rangées d’arbres et de rideaux-abris) permet de réduire les pertes d’eau des sols dues à des vents violents, mais également d’empêcher la perte de masse organique et de carbone des sols. Il convient dès lors d’intégrer à la stratégie bioéconomique les moyens qui viennent d’être cités, ainsi que d’autres mesures visant à accroître la capacité de rétention dans le paysage. Il serait ainsi possible d’augmenter considérablement le captage et le stockage du carbone, qui constituent l’une des priorités du pacte vert;

35.

souligne qu’étant donné que les eaux pluviales des zones urbaines peuvent générer 10 à 20 % de la charge polluante en nutriments d’un bassin hydrographique, il est possible d’atténuer efficacement cette incidence, surtout dans les nouvelles zones résidentielles, grâce à des SEHFN avancées à faibles coûts, telles que les systèmes séquentiels de sédimentation-biofiltration et les systèmes hybrides intégrant dans les SEHFN des infrastructures hydrotechniques traditionnelles. Cette approche devrait aller de pair avec des mesures visant à adapter l’environnement bâti au changement climatique. Dans la mesure du possible, ces solutions devraient également être appliquées aux agglomérations existantes;

36.

rappelle que, dans son avis sur la réforme de la PAC, il propose d’inclure dans la prochaine PAC cinq objectifs environnementaux quantifiables (d’ici à 2027), y compris la garantie que 100 % des eaux de surface et souterraines seront conformes à la directive sur les nitrates, sans exemption;

37.

souligne que le calendrier de mise en œuvre des mesures comprises dans les plans de gestion des bassins hydrographiques concernés est trop serré, étant donné que le temps de réaction de l’environnement peut être bien supérieur à un cycle de six ans, préconise dès lors d’étendre le calendrier de programmation, en prévoyant au moins deux périodes allant jusqu’à 2039, et encourage les collectivités locales et régionales à concevoir des projets innovants à long terme (7);

38.

estime que, dans certains États membres, les plans de gestion des bassins hydrographiques et les plans nationaux manquent souvent de solutions pour les zones d’habitation présentant un faible risque d’inondation, où il est devenu impossible de construire et notamment de procéder à des aménagements qui favorisent la protection contre les inondations. À cet égard, la Commission et ses agences devraient aider davantage les États membres à trouver des solutions réalisables;

39.

insiste sur la nécessité d’une plus grande cohérence entre la DCE, la directive 2009/128/CE du Parlement européen et du Conseil (8) instaurant un cadre d’action communautaire pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable ainsi qu’avec les objectifs environnementaux de l’Union, et le règlement (CE) no 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil (9) concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), afin de renforcer les efforts de surveillance et, par la suite, d’identifier les meilleures mesures. Il convient d’éliminer les substances chimiques dangereuses à la source et d’augmenter la responsabilité des producteurs de substances chimiques mises sur le marché;

40.

demande d’étudier le recours aux organismes aquatiques dans la mise en œuvre du pacte vert, et tout particulièrement le potentiel que recèlent les fermes d’algues, sachant que ces dernières constituent un moyen naturel de capter le carbone et une source d’énergie neutre en carbone et d’alimentation du bétail;

41.

estime que la mise en œuvre du programme de développement durable à l’horizon 2030 et des 17 objectifs de développement durable des Nations unies devrait faire partie intégrante de la directive-cadre révisée sur l’eau;

42.

invite la Commission européenne à mieux intégrer les caractéristiques territoriales locales et régionales dans la directive-cadre sur l’eau. Compte tenu de la fragilité relative des zones de collines et de montagne locales et régionales en raison des conditions climatiques et du caractère de plus en plus temporaire des masses d’eau fluviales, notamment dans les Apennins, la référence aux conditions définies pour ce type de masses d’eau (et probablement les méthodes de surveillance mises en place) ne représente pas correctement les objectifs. Il en résulte une classification qui sous-estime leur qualité même en l’absence de pression anthropique, un aspect critique exacerbé par le changement climatique;

43.

invite la Commission à contribuer à renforcer le potentiel de mise en œuvre dans les villes et les régions de l’Union en développant les plateformes existantes de partage de bonnes pratiques et de savoir-faire, ainsi qu’en fournissant des instruments financiers qui permettent de soutenir le transfert de méthodes innovantes et de solutions systémiques entre les régions;

44.

compte tenu des dimensions culturelle, historique et sociale des masses d’eau, et eu égard à la DCE et à sa portée générale, préconise de promouvoir la coopération transdisciplinaire et la transparence, et de donner aux citoyens, en tant que «parties concernées», les moyens de participer aux processus décisionnels, y compris sur les aspects économiques, en couvrant tous les services environnementaux et non uniquement ceux liés à l’approvisionnement en eau et au traitement des eaux;

45.

dans ce contexte, et sur la base des principes de bonne gouvernance, demande qu’une méthodologie soit élaborée aux fins d’un dialogue régulier entre l’ensemble des parties prenantes, décideurs, organisations de la société et scientifiques concernés («science citoyenne»), afin de renforcer leur engagement dans l’élaboration et la mise en œuvre de solutions innovantes;

46.

encourage les autorités nationales, régionales et locales disposant d’une entreprise publique de gestion de l’eau à participer à l’initiative «Erasmus de l’eau», qui permet à des membres du personnel technique d’effectuer des visites auprès d’homologues d’autres États membres et de s’inspirer de leurs pratiques de gestion de l’eau. Les échanges de ce type, ainsi que d’autres initiatives telles que les ateliers techniques, devraient être développés à plus grande échelle, étant donné qu’ils offrent la possibilité de sensibiliser les participants, d’encourager le dialogue, de s’informer sur les solutions disponibles et de renforcer les capacités;

47.

invite la Commission à mettre en œuvre tous les instruments permettant d’éviter tout type de gaspillage des ressources en eau et d’assurer le bon entretien des installations de gestion de débit des eaux;

48.

invite la Commission à rappeler à toutes les institutions nationales et locales que l’eau est un bien public essentiel et, à ce titre, à mieux mettre en œuvre les politiques de tarification de l’eau conformément au principe de récupération des coûts consacré à l’article 9 de la DCE, à désigner les ménages, les exploitations agricoles et l’industrie comme des «utilisateurs d’eau», et à recommander le recours à des mesures tarifaires pour promouvoir la préservation des ressources, telles que les tarifs d’été ou la tarification par blocs de consommation. En outre, le principe du «pollueur-payeur» devrait être pleinement appliqué par l’entremise d’instruments de financement durables tels que la responsabilité élargie des producteurs;

49.

souligne que la diminution des ressources mondiales en eau crée des disparités au niveau mondial, qui peuvent déboucher sur des conflits régionaux et mondiaux. Pour éviter que cela ne se produise, il est primordial de partager de nouveaux paradigmes, de nouvelles méthodologies et de nouvelles solutions systémiques à l’échelle mondiale, en particulier dans les régions où les ressources en eau sont limitées, comme l’Afrique et le Moyen-Orient. Le Comité propose dès lors que la Commission se penche sur le potentiel de coopération avec le programme hydrologique intergouvernemental de l’Unesco, de manière à renforcer le rôle moteur de l’Europe dans la mise en place d’une gestion durable de l’eau à l’échelle mondiale;

50.

demande de faire en sorte d’assurer réellement la protection des sources d’eau dans les pays candidats et en voie d’adhésion à l’Union européenne.

Bruxelles, le 2 juillet 2020.

Le président du Comité européen des régions

Apostolos TZITZIKOSTAS


(1)  Rapport de l’AEE no 7/2018, p. 6.

(2)  https://europa.eu/citizens-initiative/water-and-sanitation-are-human-right-water-public-good-not-commodity_fr

(3)  Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine (refonte) [COM/2017/0753 final — 2017/0332(COD)].

(4)  Communiqué de presse de la CJUE: https://curia.europa.eu/jcms/upload/docs/application/pdf/2015-07/cp150074fr.pdf

Texte intégral de l’arrêt de la Cour de justice: http://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?text=&docid=165446&pageIndex=0&doclang=FR&mode=lst&dir=&occ=first&part=1&cid=1784620

(5)  Avis du Comité européen des régions sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux exigences minimales requises pour la réutilisation de l’eau» (JO C 86 du 7.3.2019, p. 353).

(6)  Ecohydrology as an integrative science from molecular to basin scale: historical evolution, advancements and implementation activities.

Pr M. Zalewski, Ecohydrology and Hydrologic Engineering: Regulation of Hydrology-Biota Interactions for Sustainability.

(7)  Un exemple en la matière est la réintroduction du saumon, qui avait progressivement disparu du Rhin dans les années 50. La Commission du Rhin a commencé à mettre en œuvre des mesures concrètes en 1991, mais les premiers succès n’ont été observés que vingt ans plus tard.

(8)  Directive 2009/128/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 instaurant un cadre d’action communautaire pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable (JO L 309 du 24.11.2009, p. 71).

(9)  Règlement (CE) no 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2006 concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), instituant une agence européenne des produits chimiques, modifiant la directive 1999/45/CE et abrogeant le règlement (CEE) no 793/93 du Conseil et le règlement (CE) no 1488/94 de la Commission ainsi que la directive 76/769/CEE du Conseil et les directives 91/155/CEE, 93/67/CEE, 93/105/CE et 2000/21/CE de la Commission (JO L 396 du 30.12.2006, p. 1).


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