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Document 52020AE3578

    Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — Un plan d’action pour une fiscalité équitable et simplifiée à l’appui de la stratégie de relance [COM(2020) 312 final], sur la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil relative à la bonne gouvernance fiscale dans l’UE et au-delà [COM(2020) 313 final] et sur la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 2011/16/UE du Conseil relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal [COM(2020) 314 final — 2020/0148 (CNS)]

    EESC 2020/03578

    JO C 155 du 30.4.2021, p. 8–19 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

    30.4.2021   

    FR

    Journal officiel de l'Union européenne

    C 155/8


    Avis du Comité économique et social européen sur

    la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — Un plan d’action pour une fiscalité équitable et simplifiée à l’appui de la stratégie de relance

    [COM(2020) 312 final]

    la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil relative à la bonne gouvernance fiscale dans l’UE et au-delà

    [COM(2020) 313 final]

    la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 2011/16/UE du Conseil relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal

    [COM(2020) 314 final — 2020/0148 (CNS)]

    (2021/C 155/02)

    Rapporteur:

    Krister ANDERSSON

    Corapporteur:

    Javier DOZ ORRIT

    Consultation

    Conseil de l’Union européenne, 28.7.2020

    Commission européenne, 12.8.2020

    Base juridique

    Articles 113 et 115 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

    Compétence

    Section «Union économique et monétaire et cohésion économique et sociale»

    Adoption en section

    12.2.2021

    Adoption en session plénière

    24.2.2021

    Session plénière no

    558

    Résultat du vote

    (pour/contre/abstentions)

    220/0/7

    1.   Conclusions et recommandations

    1.1.

    Le CESE soutient dans l’ensemble les propositions législatives de la Commission et applaudit à leur coordination avec les discussions de portée mondiale menées au niveau de l’OCDE/du cadre inclusif afin de faire émerger un consensus mondial.

    1.2.

    Le CESE souscrit à l’approche retenue par la Commission selon laquelle une bonne gouvernance fiscale — qui constitue le fondement de l’équité devant l’impôt — requiert, en matière fiscale, de la transparence grâce à l’échange d’informations entre les autorités compétentes, une concurrence loyale, l’absence de mesures dommageables, des mesures plus efficaces et l’application de normes convenues au niveau international.

    1.3.

    Le CESE s’accorde en outre avec la Commission à reconnaître que la concurrence fiscale n’est pas un problème en soi (1). On n’en constate pas moins certaines inquiétudes quant à l’existence d’une concurrence fiscale déloyale au sein de l’Union européenne, qui favorise l’évasion fiscale. Le Comité considère que pour être efficace, une union monétaire a besoin de cohérence dans sa politique fiscale et entre les règles fiscales de ses membres.

    1.4.

    Le CESE soutient la Commission dans son initiative de révision du code de conduite et la félicite d’avoir tenu dûment compte, dans sa proposition, des travaux menés par l’OCDE ainsi que de l’importance d’adhérer à des normes convenues au niveau international, notamment pour ce qui concerne des principes mondiaux qui déboucheraient sur un taux effectif minimum d’imposition des sociétés.

    1.5.

    Le CESE estime que le résultat et les succès obtenus par le code de conduite devraient être mis à jour de manière plus régulière et rendus publics à l’intention de la société civile, conformément à l’objectif de la Commission d’accroître la transparence concernant les activités concrètement menées et les résultats du code.

    1.6.

    Le CESE soutient la décision de la Commission de prendre des mesures législatives visant à renforcer la coopération entre les autorités fiscales et à harmoniser davantage les règles de procédure dans l’ensemble du marché intérieur.

    1.7.

    Le CESE partage l’avis de la Commission selon lequel la fraude et l’évasion fiscales demeurent une menace pour les finances publiques, en particulier en temps de crise, comme l’ont clairement démontré les estimations les plus récentes de la Commission; la perte de recettes dans l’Union qui est causée par des actes de fraude fiscale internationale commis par des particuliers, couvrant l’impôt sur le revenu des personnes physiques, les impôts sur le revenu des capitaux et les impôts sur la fortune et les droits de succession, a en effet été estimée à 46 milliards d’EUR selon ses derniers chiffres. L’écart de TVA a été estimé à 140 milliards d’EUR, ce montant incluant quelque 50 milliards d’EUR de fraudes transfrontières (2).

    1.8.

    Le CESE prend acte de la réduction de l’écart estimé (3) dû à l’évasion fiscale des entreprises, lequel s’élève à environ 35 milliards d’EUR par an selon plusieurs estimations, contre quelque 50 à 70 milliards d’EUR selon les estimations de la Commission antérieures à l’introduction de mesures de lutte contre l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (BEPS), et il note la corrélation, analysée par la Commission, entre une telle amélioration et les efforts législatifs déployés par la précédente Commission en matière d’évasion fiscale (4). Ce phénomène n’en demeure pas moins une source de préoccupation dans le contexte où les dépenses publiques engagées pour soutenir l’économie et la société revêtent une si grande importance.

    1.9.

    Une action efficace passe nécessairement par une lutte intensive contre les infractions et l’évasion fiscales, qui doit être améliorée au moyen d’une coopération administrative renforcée et d’un cadre juridique mieux harmonisé. Un cadre fiscal ne peut pas être perçu comme équitable si certains États membres disposent de facilités pour le contourner aisément, ce qui décourage les autres et nuit à l’efficacité.

    1.10.

    Compte tenu de la complexité qui découle actuellement de 27 systèmes fiscaux différents, et sachant à quel point une telle multiplicité des modèles pèse sur les entreprises et les particuliers exerçant des activités transfrontières, le CESE encourage les États membres à harmoniser leurs obligations de déclaration en matière fiscale, dans le respect de la souveraineté fiscale, et à améliorer la coopération entre les administrations fiscales.

    1.11.

    Les 25 actions prévues par la Commission paraissent raisonnables. La plupart d’entre elles se rapportent à la TVA, ce qui est une bonne chose compte tenu du niveau élevé de la perte de recettes subie en la matière. Elles ne sont toutefois décrites que succinctement et il reste difficile, pour le moment, d’évaluer pleinement l’incidence spécifique de telles mesures sur les activités quotidiennes des citoyens et des entreprises en Europe.

    1.12.

    Le Comité se réjouit vivement de l’adoption d’un système d’enregistrement à la TVA unique. Il s’agit là d’une étape importante vers la création d’un marché unique approfondi, qui réduit les incertitudes et les coûts pour les opérations transfrontières.

    1.13.

    Le CESE accueille favorablement la proposition de la Commission européenne de moderniser et d’harmoniser les obligations de déclaration en matière de TVA grâce à un recours accru aux déclarations sur la base des opérations («en temps réel») et à la facturation électronique.

    1.14.

    Le CESE se félicite aussi que l’opportunité de soumettre les services financiers à la TVA soit réexaminée. Une analyse d’impact minutieuse est nécessaire à cet égard, y compris concernant le régime de TVA appliqué aux services financiers dans les pays tiers.

    1.15.

    Le CESE soutient l’initiative de la Commission en faveur d’un «cadre de conformité coopérative au niveau de l’Union» pour régler, sur la base d’une confiance et d’une coopération renforcées entre de multiples administrations fiscales, les différends transfrontières relatifs à l’imposition des sociétés. Il importe dans ce cadre de traiter sur un pied d’égalité les PME et les grandes entreprises. Le Comité relève que la charge supportée pour se conformer aux règles est substantiellement plus élevée pour les PME que pour les grandes entreprises multinationales, et invite instamment la Commission à prendre des mesures pour réduire la charge pesant sur les PME.

    1.16.

    Le CESE considère que la question du remboursement de l’impôt est cruciale, en particulier en temps de crise comme c’est le cas actuellement, cette situation posant un risque d’assèchement de la liquidité aussi bien pour les particuliers que pour les entreprises.

    1.17.

    Le CESE demande à la Commission d’évaluer comment un mécanisme simplifié et mieux harmonisé d’allégement de la TVA en cas de créance irrécouvrable pourrait être proposé. Ce mécanisme devrait garantir que les entreprises puissent récupérer rapidement et en temps utile auprès des autorités fiscales la TVA qu’elles n’ont pas été en mesure de percevoir auprès de leurs clients mais qu’elles ont déjà versée aux mêmes autorités.

    1.18.

    Le CESE considère qu’il est très important de disposer de règles claires et cohérentes sur le plan international en matière de fiscalité et d’emploi pour les plateformes numériques. Le CESE soutient l’effort déployé pour accroître la transparence des plateformes numériques afin de prévenir les déclarations de revenu incohérentes, qui comportent un risque élevé d’évasion fiscale. Les obligations de déclaration et les formulaires fiscaux devraient être les mêmes dans tous les États membres.

    1.19.

    Le CESE souligne que les audits conjoints, qui sont en principe un outil utile et efficace, devraient être conduits dans le respect des droits des contribuables, y compris ceux énoncés dans la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, s’agissant notamment de leurs droits de la défense et de la prévisibilité des règles les concernant, tant dans la procédure que sur le fond, ainsi que de la collecte de preuves par les autorités fiscales chargées des enquêtes en vue de possibles sanctions.

    1.20.

    En dépit des progrès constatés dans la conduite de pays et territoires inscrits sur la liste répertoriant ceux qui ne sont pas coopératifs à des fins fiscales, le volume global des capitaux concernés par la fraude, l’évasion, l’évitement et le blanchiment demeure si élevé que des efforts accrus doivent être déployés.

    1.21.

    Le CESE fait sienne la position de la Commission selon laquelle il est temps de réviser la liste et d’examiner comment la rendre plus efficace et équitable, en tenant compte également des défis nouveaux qui se posent dans une économie mondiale numérisée. Le CESE souscrit également au critère posé par la Commission consistant à donner à certains pays et territoires présentant un risque faible et possédant des capacités limitées la possibilité d’améliorer leurs normes de bonne gouvernance et de transparence fiscales dans un délai raisonnable lorsqu’ils figurent sur la liste ou pourraient y être inscrits.

    1.22.

    Le CESE a proposé (5) le lancement d’un pacte européen afin de lutter efficacement contre la fraude et l’évasion fiscales, l’évitement de l’impôt et le blanchiment de capitaux. Le CESE a invité la Commission européenne à lancer une initiative politique qui associe les gouvernements nationaux et les autres institutions européennes à la poursuite de cet objectif, en encourageant à dégager les consensus nécessaires à cette fin et en ouvrant la démarche à la participation de la société civile. Le pilier essentiel de ce pacte devrait être la coopération entre les États membres.

    1.23.

    Le CESE souligne que la coopération entre les organisations de la société civile au sens large et les gouvernements pourrait contribuer à la sensibilisation à la fiscalité environnementale ainsi qu’au développement en faisant émerger des sociétés plus équitables et durables dans les pays en développement comme dans les pays développés.

    1.24.

    Le CESE encourage la Commission à poursuivre son évaluation de l’efficacité des directives antérieures en matière de coopération administrative.

    2.   Le contexte et les propositions de la Commission

    2.1.   Contexte

    2.1.1.

    Mettre en place une fiscalité équitable et efficace est l’un des principaux objectifs de la Commission (6) pour l’actuelle mandature. Un tel objectif apparaît d’autant plus stratégique au lendemain de la crise de la COVID-19. En vertu du traité, les règles fiscales relèvent de la compétence des États membres. Ces derniers peuvent toutefois convenir d’adopter des directives et règlements pour améliorer le fonctionnement du marché intérieur. Pour être efficace, une union monétaire a besoin de cohérence dans sa politique fiscale et entre les règles fiscales de ses membres.

    2.1.2.

    La pandémie de COVID-19 a déstabilisé les économies partout dans le marché intérieur. L’Union européenne se trouve par ailleurs confrontée à la crise de la COVID-19 à un moment charnière, marqué par les défis environnementaux, des innovations continues dans le domaine du numérique et une hausse des inégalités entre les citoyens. Les États membres et les institutions européennes sont donc dans l’obligation d’opposer une réaction inédite, en usant de l’ensemble des ressources et des outils à leur disposition.

    2.1.3.

    Les propositions de la Commission (7) visent à la fois à concevoir une réponse appropriée à la crise de la COVID-19 et à gérer la transition vers un modèle plus écologique et plus numérique, conformément aux principes d’une économie sociale de marché inscrits dans les traités.

    2.1.4.

    Une fiscalité équitable et efficace joue un rôle important à cet égard. L’efficacité de la réponse apportée aux immenses défis posés par la crise dépend dans une large mesure, d’une part de la possibilité donnée aux entreprises de poursuivre leurs activités nationales et transfrontières, dans des conditions de concurrence égales et avec le soutien d’un système fiscal efficace et simple, et d’autre part des États membres, qui doivent dégager les recettes fiscales nécessaires pour financer la relance au moyen d’une imposition équitable des citoyens et des entreprises. La lutte contre la fraude et l’évasion fiscales ainsi que le soutien aux entreprises européennes au moyen d’une simplification et d’une harmonisation des formalités fiscales dont elles s’acquittent au quotidien revêtent une importance cruciale pour surmonter efficacement les défis actuels (8).

    2.1.5.

    La fiscalité est aussi un instrument de la politique menée pour atteindre la neutralité climatique à l’horizon 2050 (9), ainsi que d’autres objectifs environnementaux du pacte vert pour l’Europe (10). Il est donc primordial d’injecter des recettes fiscales adéquates dans les budgets publics afin de soutenir une transition écologique. Les politiques économiques doivent, dans le même temps, tenir compte de l’évolution défavorable de la démographie, dans un contexte de vieillissement de la population.

    2.1.6.

    La proposition de la Commission établissant un plan d’action pour une fiscalité plus efficace et équitable est divisée en trois parties distinctes. La première est une communication qui expose les mesures visant à réduire les obstacles liés à la fiscalité des entreprises dans le marché unique. La Commission ambitionne en particulier de se servir de la simplification de la fiscalité comme d’un outil pour améliorer l’environnement des entreprises. La seconde est une proposition législative visant à réviser la directive relative à la coopération administrative grâce à un échange automatique d’informations entre les autorités fiscales afin de permettre l’imposition adéquate des revenus générés par les vendeurs sur les plateformes numériques. Enfin, la troisième est une communication de la Commission relative à la bonne gouvernance fiscale dans l’Union européenne et au-delà visant à améliorer les pratiques en la matière tant dans l’Union que dans les pays et territoires tiers.

    2.1.7.

    La Commission fait observer que le plan d’action fait partie d’un programme fiscal pour l’Union plus large et plus ambitieux, qui inclura très prochainement i) une fiscalité environnementale; ii) une réforme de la fiscalité des entreprises visant à réaligner les droits d’imposition sur la création de valeur et à fixer un niveau minimal d’imposition effective des bénéfices des entreprises; iii) une recommandation selon laquelle les États membres devraient subordonner leur soutien financier en faveur des entreprises dans l’Union à l’absence de liens entre ces entreprises et les pays et territoires (11) figurant sur la liste de l’Union des pays et territoires non coopératifs; et iv) un examen des leviers permettant d’adopter des propositions en matière fiscale suivant la procédure législative ordinaire prévue à l’article 116 du TFUE.

    2.1.8.

    Le CESE a exposé, dans de nombreux avis, ses positions quant à certaines mesures nécessaires pour renforcer l’efficacité du marché unique, à savoir l’augmentation des ressources propres de l’Union et le lancement d’un débat sur le vote à la majorité qualifiée pour les questions fiscales. Il demande maintenant que l’on agisse dans les plus brefs délais pour donner suite aux propositions formulées par la Commission dans son train de mesures pour une fiscalité équitable et simplifiée.

    2.2.   Le plan d’action pour une fiscalité équitable et simplifiée

    2.2.1.

    Dans sa communication sur la simplification fiscale, la Commission expose une nouvelle approche, qui combine des mesures de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales à des mesures visant à simplifier la vie des contribuables. Le plan comprend 25 actions, dont la mise en œuvre est programmée de manière échelonnée sur les prochaines années, jusqu’en 2024 (12).

    2.2.2.

    Des actions spécifiques ont été prévues concernant les obligations d’enregistrement (identification et enregistrement TVA). Un enregistrement efficace et efficient est considéré comme crucial pour que tous les contribuables paient leur juste part. En conséquence, la Commission met en avant plusieurs actions visant à maintenir les bases de données contenant les données des contribuables en bon état de fonctionnement et constamment à jour. La simplicité de l’enregistrement est également considérée comme importante, en particulier lorsque les contribuables circulent d’un État membre à un autre.

    2.2.3.

    Un autre ensemble d’actions spécifiques est prévu pour ce qui concerne les obligations de déclaration. Les déclarations des contribuables doivent être aussi efficaces que possible et reposer sur une collaboration réciproque avec les autorités fiscales. Les déclarations fiscales doivent être simples, les données demandées doivent être limitées au minimum et leur traitement doit être effectué suivant des procédures simples, par l’intermédiaire d’un service numérique sous forme de «guichet unique». De nombreux États membres ont allégé certaines règles de paiement de la TVA en réaction à la pandémie de COVID-19.

    2.2.4.

    Des mesures supplémentaires sont attendues pour faciliter le paiement de l’impôt, en particulier par des modes de paiement électroniques mis à la disposition des contribuables, par exemple des applications sur smartphone (13). Le montant des impôts dus devrait être correct dès le départ, afin d’éviter si possible des procédures fastidieuses de remboursement. Lorsque des remboursements sont attendus, les administrations fiscales devraient les traiter rapidement afin d’éviter les problèmes de trésorerie pour les contribuables.

    2.2.5.

    Apporter une sécurité juridique aux contribuables est l’un des objectifs premiers du plan d’action de la Commission, tout comme le règlement efficace des éventuels différends. Il convient de prévenir l’apparition de différends qui, le cas échéant, doivent être promptement résolus entre les États membres dans le cadre de leurs systèmes juridiques et du droit de l’Union européenne.

    2.2.6.

    La Commission juge important d’offrir la possibilité de corriger ou de clarifier tout malentendu afin d’éviter une escalade des différends. La prévention des litiges est donc encouragée, tout comme le règlement rapide des affaires en instance, afin d’économiser le temps et l’argent des contribuables comme des autorités fiscales. Certaines parties prenantes ont déjà exprimé leur préférence pour une intervention accrue au niveau de l’Union afin de prévenir et de régler les différends (14).

    2.3.   La coopération administrative entre les autorités fiscales

    2.3.1.

    Ces dernières années, l’Union a concentré ses efforts sur la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales, contre la planification fiscale agressive, ainsi que sur le renforcement de la transparence grâce à une coopération adéquate entre les autorités fiscales. Même si d’importants progrès ont été réalisés concernant l’échange d’informations, la Commission souligne dans sa proposition qu’il est nécessaire d’améliorer encore les dispositions en vigueur.

    2.3.2.

    La Commission vise en particulier à mieux relever les défis posés par la numérisation de l’économie, notamment pour ce qui concerne les plateformes numériques, dont l’utilisation rend plus difficiles la traçabilité et la détection des faits générateurs de l’impôt par les autorités fiscales (15). Le problème est encore plus aigu lorsque ces transactions sont effectuées par l’intermédiaire de plateformes numériques établies dans un autre État membre ou dans un pays ou territoire tiers (16).

    2.3.3.

    Un consensus semble s’être dégagé entre les représentants des opérateurs de plateformes numériques sur les avantages de disposer d’un cadre juridique harmonisé dans l’Union pour la collecte d’informations provenant des plateformes, et sur les possibles avantages d’une solution analogue au guichet unique pour la TVA.

    2.3.4.

    Concernant la question de l’échange d’informations sur demande, la Commission insiste dans sa proposition sur le concept de pertinence vraisemblable. L’article 5 bis prévoit une définition de la norme de pertinence vraisemblable qui s’applique en cas de demande d’informations et établit les éléments de la norme et les exigences procédurales que l’autorité concernée doit respecter. La demande d’informations peut concerner un ou plusieurs contribuables, pour autant qu’ils soient identifiés individuellement. La norme de pertinence vraisemblable ne devrait pas s’appliquer lorsque la demande d’informations est envoyée à titre de suivi de la décision fiscale anticipée en matière transfrontière ou de l’accord préalable en matière de prix de transfert ayant fait l’objet d’un échange d’informations.

    2.3.5.

    Avant de demander des informations, l’autorité fiscale est tenue d’exploiter toutes les sources habituelles d’information auxquelles elle peut avoir recours pour obtenir les informations demandées ainsi que tous les moyens disponibles. Toutefois, si ce faisant l’autorité requérante est confrontée à des difficultés disproportionnées et risque de mettre en péril la réalisation de ses objectifs, l’obligation ne s’applique pas. Si l’autorité requérante n’a pas respecté cette obligation, l’autorité requise peut refuser de fournir les informations.

    2.3.6.

    La section II bis établit un cadre juridique pour la réalisation d’audits conjoints. Un audit conjoint y est défini comme une enquête administrative menée conjointement par les autorités compétentes de deux États membres ou plus. Les autorités compétentes des États membres concernés procèdent, de manière coordonnée et conformément à leurs systèmes juridiques, à l’examen d’une affaire liée à un ou plusieurs contribuables présentant un intérêt commun ou complémentaire pour eux.

    2.4.   La bonne gouvernance fiscale dans l’Union européenne et au-delà

    2.4.1.

    La communication de la Commission européenne relative à la bonne gouvernance fiscale prend pour point de départ le fait que l’équité fiscale est au cœur du modèle social et économique de l’Union et que la bonne gouvernance fiscale constitue la base de l’équité fiscale et de la stabilité des recettes permettant de pérenniser ce modèle (17). La communication contient des propositions visant à i) réformer le code de conduite dans le domaine de la fiscalité des entreprises; ii) réviser la liste des pays et territoires non coopératifs; et iii) promouvoir la bonne gouvernance fiscale au niveau international.

    2.4.2.

    Depuis son établissement en 1997, le code de conduite dans le domaine de la fiscalité des entreprises (ci-après le «code») (18) est le principal instrument de l’Union pour prévenir la concurrence fiscale dommageable. Il énonce des principes pour une concurrence fiscale loyale et est utilisé pour déterminer le caractère éventuellement dommageable d’un régime fiscal (19).

    2.4.3.

    En dépit des résultats qu’il a permis d’obtenir, le code doit être modernisé. La nature de la concurrence fiscale et les formes qu’elle prend ont considérablement changé ces dernières années, du fait de la mondialisation, de la numérisation, du rôle croissant des multinationales dans l’économie mondiale et des régimes d’incitation complexes mis en place par certains États membres.

    2.4.4.

    Plus spécifiquement, la Commission vise à étendre le champ d’application du code de manière à couvrir toutes les mesures qui créent un risque de concurrence fiscale déloyale. En outre, le code devrait aussi être mis à jour pour faire en sorte que le plus grand nombre possible de cas d’imposition très faible soient dûment examinés, dans l’Union comme hors de celle-ci.

    2.4.5.

    Les principes énoncés dans le code font partie des critères utilisés pour évaluer les pays tiers dans le cadre de la liste de l’Union des pays et territoires non coopératifs à des fins fiscales. La Commission entend réviser le champ d’application géographique de la liste de l’Union, en mettant à jour le tableau de bord utilisé à l’origine pour sélectionner les pays et territoires les plus intéressants à évaluer.

    2.4.6.

    Les réflexions sur le champ d’application géographique de la liste de l’Union porteront également sur les critères que doivent respecter les pays et territoires sélectionnés. Retirer de la liste tout pays ou territoire qui relève actuellement de son champ d’application aurait des répercussions sur l’égalité des conditions et nuirait aux efforts positifs déjà fournis par la plupart d’entre eux. Il convient cependant de se demander si les critères d’inscription sur la liste de l’Union pourraient être appliqués de manière plus ciblée pour certains pays ou territoires.

    2.4.7.

    Dans son dialogue avec les pays tiers — et conformément à l’approche adoptée au sein de l’Union — la Commission insistera aussi sur les objectifs environnementaux, ainsi que sur le «principe du pollueur-payeur», qui commande d’intégrer le coût des externalités dommageables pour l’environnement. D’après la communication de la Commission, il existe un potentiel sous-exploité de taxes environnementales qui pourraient contribuer à un développement durable au niveau mondial ainsi qu’à des sociétés plus équitables dans les pays en développement. Une coopération entre les organisations de la société civile au sens large pourrait contribuer à la sensibilisation à ces questions.

    2.4.8.

    Sur la base du lien juridiquement contraignant en vigueur entre les normes de bonne gouvernance fiscale et l’utilisation de fonds de l’Union, la Commission estime que ces fonds pourraient être mieux utilisés pour renforcer les principes de la bonne gouvernance fiscale (20). À cet égard, la Commission exhorte également les États membres à inscrire les exigences de l’Union dans leurs politiques nationales de financement et dans les règles de conformité appliquées par leurs banques et agences de développement.

    2.4.9.

    La Commission a également adressé aux États membres une recommandation les invitant à subordonner le soutien financier qu’ils accordent à l’absence de liens entre les entreprises bénéficiaires et des pays et territoires figurant sur la liste de l’Union des pays et territoires non coopératifs. Elle ajoute toutefois qu’une exception devrait être possible pour les entreprises ayant une présence économique substantielle (corroborée par la présence de personnel, de matériel, de biens et de locaux) dans les pays ou territoires répertoriés. La mise en œuvre des efforts déployés par les États membres dans ce domaine doit être conciliable avec la nécessité de veiller à l’équité fiscale internationale.

    3.   Observations générales et particulières

    3.1.   Le plan d’action pour une fiscalité équitable et simplifiée

    3.1.1.

    Le CESE soutient les propositions législatives de la Commission et applaudit à leur coordination avec les discussions de portée mondiale menées au niveau de l’OCDE/du cadre inclusif afin de faire émerger un consensus mondial (21). Il attire en particulier l’attention sur l’urgence de parvenir à un accord sur des règles uniformes quant aux modalités de répartition des bénéfices imposables entre les pays au niveau de l’OCDE/du cadre inclusif, en conséquence de la numérisation rapide des économies qui est à l’œuvre et de la nécessité de lutter efficacement contre l’évasion fiscale.

    3.1.2.

    Le CESE apprécie également l’approche réglementaire que la Commission a adoptée pour développer ses propositions tout au long des dispositions législatives à l’examen. L’objectif est d’améliorer l’efficacité globale des systèmes d’imposition, de sorte qu’ils soient équitables et procurent les recettes nécessaires à la mise en œuvre des politiques publiques, tout en offrant dans le même temps des perspectives pour l’emploi et la croissance.

    3.1.3.

    Le CESE partage l’avis de la Commission selon lequel la fraude et l’évasion fiscales demeurent une menace pour les finances publiques, en particulier en temps de crise, comme l’ont clairement démontré les estimations les plus récentes, citées dans les propositions à l’examen. D’après la Commission, la perte de recettes dans l’Union causée par des actes de fraude fiscale internationale commis par des particuliers, couvrant l’impôt sur le revenu des personnes physiques, les impôts sur le revenu des capitaux, ainsi que les impôts sur la fortune et les droits de succession, a en effet été estimée à 46 milliards d’EUR en 2016. L’écart de TVA a quant à lui été estimé à 140 milliards d’EUR environ, ce montant incluant quelque 50 milliards d’EUR de fraude transfrontière (22). Les États membres doivent prendre des mesures énergiques pour combler leur écart de TVA national.

    3.1.4.

    Le CESE se réjouit de la réduction de l’écart estimé dû à l’évasion fiscale des entreprises, lequel s’élève à environ 35 milliards d’EUR par an contre 50 à 70 milliards d’EUR selon les estimations antérieures de la Commission, et il note la corrélation, analysée par la Commission, entre une telle amélioration et les efforts législatifs déployés par la précédente Commission en matière d’évasion fiscale (plus de vingt directives en matière fiscale en cinq ans) (23).

    3.1.5.

    Afin de soutenir pleinement les particuliers comme les entreprises en ces temps d’épreuve imposés par la crise de la COVID-19, le CESE invite instamment la Commission à poursuivre ses travaux sur la réduction des coûts de conformité liés aux obligations fiscales. Ces coûts de conformité fiscale représenteraient pour les grandes entreprises environ 2 % des impôts acquittés, mais s’élèveraient à 30 % de ceux-ci dans le cas des PME.

    3.1.6.

    Compte tenu de la complexité qui découle actuellement de 27 systèmes fiscaux différents, et sachant à quel point une telle multiplicité des modèles pèse sur les entreprises et les particuliers exerçant des activités transfrontières, le CESE encourage les États membres à harmoniser leurs obligations de déclaration en matière fiscale et à améliorer la coopération entre les administrations fiscales. Les travaux revus et étendus du groupe «Code de conduite» doivent conduire à éliminer les mesures fiscales dommageables afin d’instaurer des conditions de concurrence égales et contribuer, conjointement avec des réformes législatives, à favoriser des niveaux de convergence fiscale suffisants pour éviter une concurrence fiscale déloyale.

    3.1.7.

    Les 25 actions prévues par la Commission paraissent raisonnables. Dans l’ensemble, le CESE y apporte son soutien. La plupart d’entre elles se rapportent à la TVA, ce qui est une bonne chose compte tenu du niveau élevé de la perte de recettes subie en la matière. Ces actions ne sont toutefois décrites que succinctement et il reste difficile, pour le moment, d’évaluer pleinement l’incidence spécifique de telles mesures sur les activités quotidiennes des citoyens et des entreprises en Europe. Les États membres doivent agir de manière résolue pour assurer le respect de leurs règles nationales et réduire les problèmes de TVA qui se posent à leur niveau, tout en renforçant leur coopération par-delà les frontières.

    3.1.8.

    On ne peut que se féliciter de l’adoption d’un système d’enregistrement à la TVA unique au moyen d’un nouvel élargissement du guichet unique, comme dans le train de mesures sur le commerce électronique. En dépit de l’absence de précisions supplémentaires sur les secteurs qui seront couverts, un élargissement du guichet unique aux articles 36 et 39 de la directive 2006/112/CE (24) («directive relative à la TVA») pour y inclure la fourniture de biens par les entreprises aux consommateurs peut être considéré comme un progrès très significatif. Par exemple, l’extension du guichet unique à la livraison transfrontière de gaz, d’électricité, de chaleur ou de froid (article 39 de la directive relative à la TVA) pourrait aussi aider à l’approfondissement du marché de l’énergie de l’Union et à la transition énergétique.

    3.1.9.

    Le CESE accueille favorablement la proposition de la Commission européenne de moderniser et d’harmoniser les obligations de déclaration en matière de TVA grâce à un recours accru aux déclarations sur la base des opérations («en temps réel») et à la facturation électronique. Des déclarations sur la base des opérations permettent aux administrations fiscales d’avoir une vue d’ensemble complète des différentes chaînes d’approvisionnement en temps réel, ce qui permettrait d’effectuer des audits mieux ciblés et de détecter à un stade bien plus précoce les fraudes et les opérateurs présentant potentiellement des risques. Les obligations de déclaration doivent toutefois être simples à respecter et ne pas entraîner des coûts administratifs élevés ou de fortes dépenses d’investissement, en particulier pour les PME (25). De même, un recours accru à la facturation électronique et une norme harmonisée en la matière pourraient réduire les coûts de stockage et de conformité pour les entreprises et améliorerait la lutte contre la fraude à la TVA.

    3.1.10.

    Le CESE se félicite aussi que l’opportunité de soumettre les services financiers à la TVA soit réexaminée. De nombreuses entreprises subissent des coûts supplémentaires car certaines entreprises ou institutions financières ne sont pas assujetties à la TVA. En outre, les entités exonérées ne peuvent prétendre à des déductions de la TVA payée en amont si la valeur ajoutée créée n’est pas soumise à la TVA. Il s’agit d’une question complexe et le CESE escompte que des analyses d’impact exhaustives seront réalisées. Le CESE fait observer qu’une augmentation des recettes issues de la TVA aurait aussi une incidence positive sur le budget de l’Union.

    3.1.11.

    Le CESE relève que les États membres ont la faculté de recourir à un système d’autoliquidation pour lutter contre la fraude à la TVA. Cette possibilité a été utilisée dans la lutte contre la fraude à la TVA de type «carrousel». Le CESE demande à la Commission d’évaluer quelle méthode est la plus efficace et la moins génératrice de charge administrative afin de parer à la fraude «carrousel».

    3.1.12.

    Pour le bon fonctionnement des administrations fiscales, il est nécessaire que les contribuables fournissent des informations correctes, et certains États membres ont mis en place des systèmes de «conformité coopérative» pour renforcer ce partenariat. Pour le moment, hélas, ces systèmes ne fonctionnent qu’à l’échelle nationale. À la lumière de ces éléments, le CESE soutient l’initiative de la Commission en faveur d’un «cadre de conformité coopérative au niveau de l’Union» pour régler, sur la base d’une confiance et d’une coopération renforcées entre de multiples administrations fiscales, les différends transfrontières relatifs à l’imposition des sociétés. Il importe dans ce cadre de traiter sur un pied d’égalité les PME et les grandes entreprises.

    3.1.13.

    Les modalités pratiques de ce cadre de conformité coopérative de l’Union restent cependant floues, et le CESE attend avec intérêt d’évaluer ces développements et d’y apporter sa contribution constructive au cours du processus d’élaboration et de mise en œuvre.

    3.1.14.

    À première vue, le dialogue préventif prévu par la Commission pour le règlement des différends fiscaux transfrontières paraît constituer une évolution utile et positive, d’autant que c’est une demande formulée de longue date par le monde des entreprises. Une approche harmonisée dans plusieurs États membres serait très appréciée, même s’il reste à voir comment une telle approche peut être concrètement mise en œuvre à partir du paysage réglementaire hétérogène qui existe actuellement (26).

    3.1.15.

    La question du remboursement de l’impôt est toujours cruciale, en particulier en temps de crise comme c’est le cas actuellement, cette situation posant un risque d’assèchement de la liquidité aussi bien pour les particuliers que pour les entreprises. Durant la pandémie de COVID-19, plusieurs pays ont procédé plus rapidement à leurs remboursements de TVA et à leurs remboursements de manière générale, afin de faire en sorte que les entreprises disposent de liquidités suffisantes pour surmonter une situation économique inédite et déstabilisatrice.

    3.1.16.

    Sachant que certaines entreprises souffrent déjà de problèmes de liquidité, des factures pourraient être payées en retard, voire ne pas être payées du tout à terme, la conséquence étant que les entreprises ayant facturé la TVA devront en produire le montant aux autorités fiscales lors de la période de déclaration correspondante sans avoir perçu cette TVA (il s’agit là d’une «créance irrécouvrable»). À la lumière de ces éléments, le CESE demande à la Commission européenne d’évaluer comment un mécanisme simplifié et mieux harmonisé d’allégement de la TVA en cas de créance irrécouvrable pourrait être proposé. Ce mécanisme devrait garantir que les entreprises puissent récupérer rapidement et en temps utile auprès des autorités fiscales la TVA qu’elles n’ont pas été en mesure de percevoir auprès de leurs clients mais qu’elles ont déjà versée aux mêmes autorités.

    3.1.17.

    Le CESE invite instamment les administrations fiscales nationales à poursuivre un tel traitement rapide des remboursements, pour les impôts aussi bien directs qu’indirects, et propose qu’une approche administrative harmonisée soit adoptée partout en Europe, faisant observer qu’un système commun de retenue à la source pour les investissements de portefeuille transfrontières constituerait une première étape pour avancer.

    3.1.18.

    La fraude et l’évasion fiscales ainsi que les infractions liées font l’objet de poursuites ressortissant à une palette diverse de code pénaux devant les juridictions nationales des États membres. Toutefois, ces infractions fiscales ont dans bien des cas une dimension transnationale. Le Comité estime donc qu’il importe de tenir compte de cet élément ainsi que de la structure des pénalités, en particulier dans le cas d’audits conjoints entre États membres. Il conviendrait d’évaluer les implications de ces différences dans les pénalités appliquées selon les États membres.

    3.1.19.

    Le CESE accueille favorablement l’initiative de la Commission relative à une recommandation sur les droits des contribuables dans le marché unique. Apporter aux États membres une vue d’ensemble des bonnes pratiques en matière de fiscalité dans les domaines de la simplification et de la numérisation peut contribuer à décrisper les relations entre les contribuables et les autorités fiscales dans toute l’Union, à mieux informer les citoyens sur la fiscalité et à améliorer la perception des recettes. Le CESE considère qu’il s’agit là d’un bon exemple d’initiative non contraignante.

    3.2.   La coopération administrative entre les autorités fiscales

    3.2.1.

    Le CESE soutient la décision de la Commission de prendre des mesures législatives visant à renforcer la coopération entre les autorités fiscales et à harmoniser davantage les règles de procédure dans l’ensemble du marché intérieur.

    3.2.2.

    De fait, la proposition est pleinement conforme au principe de subsidiarité énoncé à l’article 5 du TFUE, puisqu’elle envisage une intervention du législateur européen afin de remédier à des problèmes qui ne peuvent être réglés efficacement par les États membres.

    3.2.3.

    Le CESE souscrit à l’intention de renforcer les compétences du réseau Eurofisc, de sorte qu’il devienne un centre de référence pour les infractions fiscales transfrontières.

    3.2.4.

    L’application des dispositions de la directive en vigueur a de fait prouvé l’existence de divergences significatives entre les États membres, puisque certains d’entre eux sont disposés à pleinement coopérer en échangeant des informations, tandis que d’autres appliquent une approche restrictive de l’échange d’informations, voire le rejettent.

    3.2.5.

    Le CESE soutient aussi l’effort déployé pour accroître la transparence des plateformes numériques afin de prévenir les déclarations de revenu incohérentes, qui comportent un risque élevé d’évasion fiscale. Bien que certains États membres aient imposé une obligation de déclaration dans leur système juridique national, l’expérience montre que les dispositions nationales visant à lutter contre l’évasion fiscale ne sont pas toujours pleinement efficaces, en particulier lorsque les activités ciblées sont transfrontières. La sécurité et la clarté juridiques peuvent donc être garanties par un ensemble unique d’exigences et de formulaires de déclaration s’appliquant à tous les États membres.

    3.2.6.

    Le CESE se félicite également de la proportionnalité de la proposition de la Commission en ce qui concerne la coopération entre les autorités fiscales dans les procédures, puisque les modifications présentées ne semblent pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif d’un échange d’informations plus efficace et d’une meilleure coopération administrative.

    3.2.7.

    Le système de sanctions pour les opérateurs de plateformes qui ne respectent pas leurs obligations de déclaration, comme indiqué à l’article 25 bis de la proposition de directive DAC 7, même s’il s’agit d’une compétence nationale, doit être appliqué de manière aussi homogène que possible dans tous les États afin d’en garantir l’efficacité.

    3.2.8.

    Étant donné que les distorsions liées aux opérateurs de plateformes qui sont détectées dans le fonctionnement du marché intérieur s’étendent généralement au-delà des frontières d’un seul État membre, les règles communes de l’Union représentent le strict minimum nécessaire pour résoudre les problèmes de manière efficace. Suivant le même raisonnement, le CESE encourage la Commission à développer plus avant son rôle et sa collaboration au sein de l’OCDE concernant la numérisation des économies, afin de faire émerger une approche internationale commune entre les autorités fiscales pour traiter des problèmes mondiaux.

    3.2.9.

    L’article 12 bis, paragraphe 6, dispose que les audits conjoints sont menés conformément aux modalités de procédure applicables dans l’État membre où les actions liées à un audit sont réalisées. Les éléments de preuve recueillis au cours de l’audit conjoint devraient être mutuellement reconnus par toutes les autorités compétentes des États membres participants.

    3.2.10.

    Le CESE souligne que les audits conjoints, qui sont en principe un outil utile et très efficace, devraient être conduits dans le respect des droits des contribuables, en observant rigoureusement les principes énoncés dans la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (27), s’agissant notamment de leurs droits de la défense et de la prévisibilité des règles les concernant, tant dans la procédure que sur le fond, ainsi que de la collecte de preuves par les autorités fiscales chargées des enquêtes en vue de possibles sanctions.

    3.2.11.

    En particulier, l’ensemble de données à échanger et à transmettre aux administrations fiscales devrait être défini de manière à ne prendre en compte que les données minimales nécessaires pour détecter les cas non conformes de sous-déclaration ou de non-déclaration, conformément aux obligations du RGPD (28), qui doivent être interprétées et appliquées de manière rigoureuse. Les éventuelles incidences négatives sur les données à caractère personnel devraient être réduites au minimum grâce à des mesures adéquates sur le plan informatique et procédural, au regard notamment de leur collecte, de leur traitement et de leur stockage ultérieur.

    3.2.12.

    Le CESE souligne que, conformément aux règles du RGPD, les demandes groupées doivent être dûment motivées et traitées avec précaution, de manière à ne pas porter atteinte aux droits des personnes physiques et morales, et à ne pas donner lieu à des «pêches aux renseignements».

    3.2.13.

    Le CESE encourage la Commission à poursuivre son évaluation de l’efficacité des directives antérieures en matière de coopération administrative (29).

    3.3.   La bonne gouvernance fiscale dans l’Union européenne et au-delà

    3.3.1.

    Le CESE souscrit à l’approche retenue par la Commission selon laquelle une bonne gouvernance fiscale — qui constitue le fondement de l’équité devant l’impôt — requiert, en matière fiscale, de la transparence grâce à l’échange d’informations entre les autorités compétentes, la prévention d’une concurrence déloyale, l’absence de mesures dommageables et l’application de normes convenues au niveau international. Il s’accorde également avec le Parlement européen à considérer que l’Union devrait prendre des mesures décisives pour lutter contre la concurrence fiscale dommageable et la planification fiscale agressive, en particulier dans les paradis fiscaux.

    3.3.2.

    Le CESE soutient la Commission dans son initiative de révision du code de conduite et la félicite d’avoir tenu dûment compte, dans sa proposition, des travaux menés par l’OCDE ainsi que de l’importance d’adhérer à des normes convenues au niveau international, notamment pour ce qui concerne des principes mondiaux qui déboucheraient sur un taux effectif minimum d’imposition des sociétés.

    3.3.3.

    Le CESE estime que le résultat et les succès obtenus par le code de conduite devraient être mis à jour de manière plus régulière et rendus publics à l’intention de la société civile, conformément à l’objectif de la Commission d’accroître la transparence concernant les activités concrètement menées et les résultats du code.

    3.3.4.

    La Commission reconnaît dans son approche de la question que la concurrence fiscale n’est pas un problème en soi (30). Dans le même temps, toutefois, la Commission et le Parlement européen ont à maintes occasions exprimé leur préoccupation quant à l’existence d’une concurrence fiscale déloyale au sein de l’Union européenne, qui favorise l’évasion fiscale. Le Comité considère que des travaux sérieux sont nécessaires pour résoudre ce problème complexe. Dans un avis qu’il a récemment adopté (31), il a proposé le lancement d’un pacte européen, afin de lutter efficacement contre la fraude et l’évasion fiscales, l’évitement de l’impôt et le blanchiment de capitaux. Le CESE a invité la Commission européenne à lancer une initiative politique qui associe les gouvernements et les autres institutions européennes pour atteindre cet objectif, en encourageant à dégager les consensus nécessaires à cette fin et en ouvrant la démarche à la participation de la société civile. Le pilier essentiel de ce pacte devrait être la coopération entre les États membres.

    3.3.5.

    Le CESE souscrit également à cet autre choix réglementaire que constitue l’élargissement du champ d’application du code de conduite dans l’Union afin d’y inclure d’autres mesures concernant la concurrence fiscale. Il est plus que temps de procéder à une mise à jour et de faire ainsi en sorte que les régimes aboutissant à une taxation très faible ou nulle à l’intérieur comme à l’extérieur de l’Union soient soumis à un examen. Toutefois, le code est un instrument non contraignant, appelé à régler des questions qui ne relèvent pas de la législation européenne.

    3.3.6.

    La Commission fait valoir qu’il est aussi nécessaire de rendre le processus d’inscription sur la liste plus clair pour les pays tiers, en renforçant la transparence quant aux raisons de l’inscription ou non d’un pays ou territoire sur cette liste. Une plus grande harmonisation des normes adoptées par les États membres de l’Union et une meilleure coordination entre les listes nationales et celle de l’Union seraient utiles, puisque l’Union et plusieurs États membres observent des normes différentes, ce qui peut être une source de confusion.

    3.3.7.

    La Commission évalue également la «liste noire des paradis fiscaux», mise en place depuis 2017, et a examiné des centaines de régimes fiscaux dommageables de par le monde, y compris dans bon nombre de pays et territoires ayant pris des engagements devant le Conseil en vue de lever les inquiétudes concernant une concurrence fiscale déloyale et une transparence limitée. Le CESE fait sienne la position de la Commission selon laquelle il est temps de réviser la liste et d’examiner comment la rendre plus efficace et équitable, en tenant compte des défis nouveaux qui se posent dans une économie mondiale numérisée. Le CESE souscrit également au critère posé par la Commission consistant à donner à certains pays et territoires présentant un risque faible et possédant des capacités limitées la possibilité d’améliorer leurs normes de bonne gouvernance et de transparence fiscales dans un délai raisonnable lorsqu’ils figurent sur la liste ou pourraient y être inscrits.

    Bruxelles, le 24 février 2021.

    La présidente du Comité économique et social européen

    Christa SCHWENG


    (1)  «[Le code de conduite] fonctionne sur le postulat que, si la concurrence fiscale entre pays n’est pas en soi problématique, il faut, par contre, soumettre à des principes communs la mesure dans laquelle les pays peuvent utiliser leurs régimes fiscaux et leurs politiques en la matière pour attirer les entreprises et les bénéfices. C’est particulièrement important dans un marché unique, où les libertés inscrites dans le traité accroissent la mobilité des bénéfices et des investissements» [COM(2020) 313 final, p. 3].

    (2)  Voir aussi: «Écart de TVA: les pays de l’UE ont perdu 140 milliards d’EUR de recettes de TVA en 2018, chiffre qui risque d’augmenter en 2020 en raison de la COVID-19» (https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/ip_20_1579).

    (3)  COM(2020) 312 final, p. 5. Selon d’autres estimations, par exemple celles du Parlement européen, les pertes dues à la criminalité financière ainsi qu’à la fraude et à l’évasion fiscales s’élèveraient à 190 milliards d’EUR. D’après les travaux approfondis présentés par l’OCDE dans son rapport sur l’action 11 du projet relatif à l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (BEPS), la perte de recettes au niveau mondial avant qu’aucune des mesures visant à lutter contre ces phénomènes ne soit adoptée était grossièrement comprise entre 100 et 240 milliards d’USD, soit 0,35 % du PIB mondial. La Commission a estimé que 50 à 70 milliards d’EUR pouvaient en être attribués à l’Union européenne avant que ses États membres ne s’accordent sur les directives sur la lutte contre l’évasion fiscale I et II.

    (4)  La Commission européenne a produit 20 propositions législatives majeures durant son précédent mandat quinquennal.

    (5)  Voir l’avis du CESE sur le thème «Lutter contre la fraude fiscale, l’évasion fiscale et le blanchiment de capitaux» (JO C 429 du 11.12.2020, p. 6).

    (6)  Orientations politiques pour la prochaine Commission européenne, 2019-2024.

    (7)  Voir COM(2020) 312 final, COM(2020) 313 final, COM(2020) 314 final.

    (8)  Voir l’avis du CESE sur le thème «Lutter contre la fraude fiscale, l’évasion fiscale et le blanchiment de capitaux» (JO C 429 du 11.12.2020, p. 6).

    (9)  Voir COM(2020) 312 final. Voir aussi l’avis du CESE sur des «Mécanismes fiscaux pour réduire les émissions de CO2» (JO C 364 du 28.10.2020, p. 21).

    (10)  Voir COM(2019) 640 final.

    (11)  Cette disposition concerne les juridictions visées à l’annexe 1 des conclusions du Conseil à ce sujet. La liste en est régulièrement mise à jour: https://ec.europa.eu/taxation_customs/tax-common-eu-list_fr

    (12)  Ces actions sont énumérées dans le document COM(2020) 312 final.

    (13)  Commission européenne (2018), étude sur les coûts de conformité fiscale pour les PME (en anglais).

    (14)  Réponses à la consultation publique sur l’évaluation de la directive relative à la coopération administrative dans le domaine de la fiscalité, résumées en annexe 2 du document de travail des services de la Commission — Évaluation de la directive 2011/16/UE du Conseil relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/799/CEE» [SWD(2019) 328 final].

    (15)  Des demandes ont été formulées en faveur d’un enregistrement dans chacun des États membres. Une telle démarche augmenterait la charge administrative et compliquerait la tâche des PME qui souhaitent étendre leurs activités à de nouveaux pays et secteurs.

    (16)  Proposition de directive du Conseil relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal [COM(2020) 314 final].

    (17)  Communication relative à la bonne gouvernance fiscale [COM(2020) 313 final].

    (18)  Résolution du Conseil et des représentants des gouvernements des États membres, réunis au sein du Conseil du 1er décembre 1997 sur un code de conduite dans le domaine de la fiscalité des entreprises (JO C 2 du 6.1.1998, p. 2).

    (19)  La manière dont la Commission a exprimé son point de vue sur ce qui constitue une concurrence fiscale loyale ou bien dommageable a évolué au fil du temps. Quand elle a présenté son projet de directive concernant une assiette commune consolidée pour l’impôt sur les sociétés, la Commission soulignait qu’une concurrence fiscale loyale, fondée sur les taux, offrait davantage de transparence et devait être encouragée [COM(2011) 121 final, p. 4]. Dans la communication relative à la bonne gouvernance fiscale qu’elle a présentée en 2020, la concurrence fiscale n’est pas considérée comme problématique en soi, mais des principes communs sur la manière dont les pays peuvent utiliser leurs régimes fiscaux sont jugés nécessaires [COM(2020) 313 final, p. 3]. Il apparaît raisonnable d’en conclure qu’il existe d’une part une bonne concurrence fiscale et d’autre part une concurrence fiscale déloyale et dommageable. Les États membres décident de leurs régimes fiscaux, mais ils sont tenus de le faire d’une manière ouverte et transparente, dans le respect des traités en s’abstenant d’édicter des règles dommageables et discriminatoires. L’Union et ses États membres doivent veiller au bon fonctionnement du marché unique, dont le niveau de convergence doit être suffisant, y compris en matière fiscale.

    (20)  Plusieurs instruments de financement permettent d’éviter de financer des projets qui contribuent à l’évasion fiscale. Voir: règlement financier, Fonds européen pour le développement durable (FEDD), Fonds européen pour les investissements stratégiques (EFSI) et mandat de prêt extérieur (MPE). Voir la communication de la Commission sur les nouvelles exigences visant à lutter contre l’évasion fiscale introduites dans la législation de l’Union européenne régissant les opérations de financement et d’investissement [C(2018) 1756 du 21.3.2018].

    (21)  Voir les avis du CESE intitulés «Lutter contre la fraude fiscale, l’évasion fiscale et le blanchiment de capitaux» [JO C 429 du 11.12.2020, p. 6]; «La fiscalité dans l’économie numérique» [JO C 353 du 18.10.2019, p. 17] et «L’imposition des bénéfices des multinationales dans l’économie numérique» [JO C 367 du 10.10.2018, p. 73].

    (22)  Voir aussi: «Écart de TVA: les pays de l’UE ont perdu 140 milliards d’EUR de recettes de TVA en 2018, chiffre qui risque d’augmenter en 2020 en raison de la COVID-19» (https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/ip_20_1579).

    (23)  Selon d’autres estimations, par exemple celles du Parlement européen, les pertes dues à la criminalité financière ainsi qu’à la fraude et à l’évasion fiscales s’élèveraient à 190 milliards d’EUR. D’après les travaux approfondis présentés par l’OCDE dans son rapport sur l’action 11 du projet relatif à l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (BEPS), la perte de recettes au niveau mondial avant qu’aucune des mesures visant à lutter contre ces phénomènes ne soit adoptée était grossièrement comprise entre 100 et 240 milliards d’USD, soit 0,35 % du PIB mondial. La Commission a estimé que 50 à 70 milliards d’EUR pouvaient en être attribués à l’Union européenne avant que ses États membres ne s’accordent sur les directives sur la lutte contre l’évasion fiscale I et II.

    (24)  Directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO L 347 du 11.12.2006, p. 1).

    (25)  On trouve de nombreux bons exemples illustrant la manière dont certains pays ont réduit leur écart de TVA. La réforme menée en 2014 en Estonie a notamment été citée à ce titre.

    (26)  Voir l’avis sur le thème «Améliorer les mécanismes de règlement des différends en matière de double imposition» (JO C 173 du 31.5.2017, p. 29).

    (27)  Voir la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (JO C 202 du 7.6.2016, p. 389).

    (28)  Document de travail des services de la Commission — Évaluation de la directive 2011/16/UE du Conseil relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/799/CEE [SWD(2019) 328 final]. JO L 119 du 4.5.2016, p. 1.

    (29)  SWD(2019) 327 final.

    (30)  Il est évident que la Commission, tout comme l’OCDE, opère la distinction entre une bonne concurrence fiscale, qui a lieu dans la transparence, et une concurrence fiscale déloyale.

    (31)  Voir l’avis du CESE sur le thème «Lutter contre la fraude fiscale, l’évasion fiscale et le blanchiment de capitaux» [JO C 429 du 11.12.2020, p. 6].


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