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Document 52018DC0635

    COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL Développer les voies d'entrée légales en Europe: un volet indispensable pour une politique migratoire équilibrée et globale Contribution de la Commission européenne à la réunion des dirigeants Salzbourg, 19 et 20 septembre 2018

    COM/2018/635 final

    Bruxelles, le 12.9.2018

    COM(2018) 635 final

    COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL

    Développer les voies d'entrée légales en Europe: un volet indispensable pour une politique migratoire équilibrée et globale













    Contribution de la Commission européenne à la réunion des dirigeants




    Salzbourg, 19 et 20 septembre 2018





































































    «Je souhaite promouvoir une nouvelle politique européenne en matière de migration légale. Une telle politique pourrait nous aider à remédier aux pénuries de qualifications spécifiques et à attirer des talents afin d'être mieux à même de relever les défis démographiques qui se posent à l'Union européenne. Je veux que l'Europe devienne au moins aussi attrayante que les destinations migratoires favorites que sont l'Australie, le Canada et les États-Unis. Dans un premier temps, j'ai l'intention de réexaminer la législation sur la «carte bleue», et sa mise en œuvre peu satisfaisante.

    Je pense aussi que nous devons nous attaquer plus résolument à la question de l'immigration clandestine, notamment par une meilleure coopération avec les pays tiers, notamment en matière de réadmission.

    Orientations politiques pour la prochaine Commission européenne, Jean-Claude Juncker, candidat à la présidence de la Commission européenne, 22 octobre 2014

    1.Introduction

    Les migrations et la mobilité au niveau mondial sont déjà devenues des caractéristiques intrinsèques du XXIe siècle et elles le demeureront. Dès lors, l’Union entend poursuivre l’adoption de toutes les mesures nécessaires pour mettre en place une politique migratoire européenne qui soit équitable et équilibrée, fondée sur des valeurs communes, et qui gère efficacement les flux de migration régulière et irrégulière d’une manière globale. Dans ses conclusions de juin 2018, le Conseil européen a réaffirmé qu’une politique migratoire européenne qui fonctionne passe nécessairement par une approche globale, dans laquelle les actions intérieures et les actions extérieures vont de pair pour assurer un contrôle efficace des frontières extérieures de l’UE, une politique de retour ferme et une politique de migration légale et d’asile bien gérée. 

    Les efforts déployés en commun pour endiguer les flux de migration irrégulière ont abouti à des progrès notables. La même détermination politique est nécessaire lorsqu’il s’agit de développer les voies d’entrée légales en Europe, ce qui demandera un surcroît d’efforts. Une migration légale contrôlée, pour des raisons humanitaires ou en fonction des besoins du marché du travail, constitue et devrait demeurer un volet indispensable pour une politique migratoire équilibrée et globale, ainsi que l’évoquait également l’agenda européen en matière de migration 1 . Elle implique de mettre en place une politique de migration légale plus efficace qui puisse prendre en compte les besoins de l’économie européenne. Elle suppose également de renforcer notre coopération avec les pays tiers, y compris du fait du besoin constant d’offrir des voies d’entrée sûres et contrôlées grâce à la réinstallation. Enfin, et surtout, pour que les voies d’entrée légales fonctionnent, il faut des politiques d’intégration efficaces en faveur de ces ressortissants de pays tiers en séjour régulier dans l’UE.

    Dans une économie européenne en amélioration constante, l’un des impératifs doit être la pleine activation, la formation et le perfectionnement professionnel de la main-d’œuvre de l’UE. Mais pour que l’Union demeure compétitive dans l’économie mondiale, elle doit aussi attirer des personnes qualifiées et talentueuses du monde entier - tout en respectant pleinement la compétence des États membres pour décider combien de travailleurs migrants en provenance de pays tiers ils admettront sur leur territoire.

    Nous devons donc accélérer nos travaux sur les voies d’entrée légales. Nous devons avancer sur des mesures essentielles telles que la réforme de la carte bleue européenne proposée par la Commission, grâce à laquelle l’UE attirerait et retiendrait plus facilement les ressortissants de pays tiers hautement qualifiés, en faisant de cette migration ciblée une opportunité et un atout pour l’économie et la société. Les voies d’entrée légales doivent devenir un volet incontournable de notre approche des partenariats avec les pays tiers. Nous ne pouvons pas négliger ce volet indispensable de l’approche globale.

    2.Voies d’entrée légales: ÉLÉMENTS CLÉS D’UNE MEILLEURE GESTION DES MIGRATIONS 

    Depuis 2003, l’Union a élaboré un large éventail d’instruments pour mettre en place un cadre commun de gestion de la migration légale, tandis que les États membres demeurent compétents pour déterminer le nombre de travailleurs migrants qui seront admis à partir des pays tiers. Ce cadre offre diverses possibilités aux ressortissants de pays tiers qui souhaitent bénéficier de la migration légale vers l’Europe, soit en qualité de travailleurs, notamment ceux hautement qualifiés, les étudiants ou les chercheurs, soit par le regroupement familial. Une évaluation globale de la législation de l’Union relative à la migration légale a été réalisée au cours des deux dernières années, dans le cadre d’un bilan de qualité, et la Commission en publiera les résultats à un stade ultérieur. Dans cette perspective, la présente communication n’aborde pas toutes les formes d’entrée légales mais se concentre sur la voie humanitaire que constitue la réinstallation et sur les voies ouvertes à la migration de main-d’œuvre.

    2.1 Migration de main-d’œuvre et carte bleue européenne

    Une migration bien gérée de la main-d’œuvre réduirait non seulement les incitations à recourir aux filières illégales mais permettrait aussi à l’UE d’attirer le bon dosage de talents et de compétences et d’aligner les admissions sur les besoins du marché du travail, contribuant ainsi à la prospérité générale de l’Union. 

    La politique de migration de la main-d’œuvre et les stratégies d’intégration en Europe devraient être conçues et élaborées en tenant pleinement compte des contextes existants du marché du travail, ainsi que des politiques et institutions sociales. Le monde du travail étant en constante évolution, il est essentiel de concevoir des politiques qui répondent aux besoins du marché de l’emploi et d’adopter une approche commune dans tous les services publics de l’Union. 

    Avec la proposition de la Commission visant à créer une Autorité européenne du travail 2 , l’UE peut améliorer davantage la coopération et la coordination entre les autorités nationales chargées du marché du travail, en vue de faciliter la gestion d’un marché du travail européen plus intégré. Cette autorité recouvrira tout d’abord divers outils et structures existants liés à la mobilité transfrontière, comme EURES (le portail européen de la mobilité de l’emploi), la coordination européenne de la sécurité sociale et la carte européenne d’assurance maladie. Ses activités concerneront les ressortissants de pays tiers qui résident légalement dans l’Union, tels que les titulaires de la carte bleue européenne, les personnes faisant l’objet d’un transfert intragroupe ou les résidents de longue durée et les membres de leur famille. L’Autorité s’appuiera également sur l’expertise disponible en matière de tendances de l’emploi et de prévision des compétences, pour réaliser des analyses du marché du travail. Elle pourra ainsi définir les secteurs et les professions qui souffrent d’un déficit de main-d'œuvre en Europe.

    Développer les voies d’entrée légales en Europe est d’autant plus pertinent et urgent aujourd’hui si l’on considère les tendances récentes et futures.

    Au cours des dernières années, grâce aux efforts déployés à tous les niveaux, l’Europe a bénéficié d’une croissance solide et d’une forte création d’emplois. Le chômage dans l’UE est à son niveau le plus bas en dix ans et le nombre de personnes ayant un emploi a atteint un niveau record. Même si cela n’est toujours pas ressenti de manière homogène dans toute l’Europe, le nombre de postes vacants augmente dans plusieurs États membres et l’on constate des pénuries structurelles de compétences dans quelques secteurs économiques, comme les technologies de l’information et de la communication ou la santé, ainsi que dans certaines professions 3 . La proportion d’employeurs faisant état de difficultés à pouvoir les postes est en augmentation, dépassant en moyenne 40%, et est même supérieure à 50 % en Allemagne, en Pologne, en Slovaquie et en Hongrie 4 . Parmi les professions les plus déficitaires figurent les métiers qualifiés, les ingénieurs, les techniciens et les informaticiens, mais également des professions nécessitant moins de compétences formelles, telles que les vendeurs et les chauffeurs 5 .

    Ces tendances auront une incidence croissante à l’avenir car l’UE est confrontée à une diminution progressive de sa population en âge de travailler (15-64). Ce phénomène devrait s’intensifier: du fait du vieillissement démographique, et compte tenu des tendances récentes en matière de migration, on estime que la population en âge de travailler déclinera de près de 22 millions d’individus (soit une réduction de 7 %) au cours des deux prochaines décennies. Même si une participation accrue des femmes et des travailleurs âgés au marché de l’emploi est susceptible de compenser en partie cette tendance, les projections 6 en termes de main-d'œuvre globale vont dans le même sens: dans un proche avenir (sur la période 2015-2035), on estime que la main-d’œuvre dans l’UE diminuera de 18,3 millions d’unités (soit une réduction de 7,4%) 7 .

    En même temps, il est probable que la demande de compétences spécifiques augmente et change au fil des évolutions de la société et de la technologie. Par exemple, la demande de qualifications de haut niveau devrait dépasser l’offre de main-d’œuvre, puisque 43 % des emplois qu’il est prévu de créer d’ici à 2030 exigeront un haut niveau de formation. Les offres d’emplois jusqu’en 2030 devraient être nombreuses dans des professions telles que les spécialistes en administration d’entreprises, mais également dans des professions traditionnellement considérées comme moyennement qualifiées, telles que le personnel de vente, d’entretien et auxiliaire 8 . Bien que l’UE veuille en priorité utiliser encore mieux les talents et le capital humain existants, notamment par la formation et la mise à niveau de la main-d’œuvre nationale, une migration de travailleurs bien gérée peut aider à répondre à certains besoins actuels et futurs du marché de l’emploi européen.

    Cette situation n’est pas particulière à l’Europe. Mais à l’heure actuelle, l’Union n’est pas idéalement placée ni équippée pour attirer les travailleurs migrants dont elle a besoin. Jusqu’à présent, elle a été moins compétitive que d’autres pays de l’OCDE — ses concurrents les plus évidents en termes de profil économique – pour attirer les travailleurs, en ne prenant aucune initiative d’envergure, notamment pour attirer les migrants hautement qualifiés. Sur la totalité des immigrés résidant dans les pays de l’OCDE en 2015-16, seuls 25 % de ceux ayant un niveau élevé d’éducation ont choisi l’UE pour destination, tandis que 75 % ont choisi un pays tiers (principalement les États-Unis, le Canada, l’Australie), voir le graphique ci-dessous.

    Répartition des résidents nés à l’étranger, possédant un niveau d’éducation faible ou élevé,
    par pays de destination, 2015-16, en %

    Source:    Base de données sur les immigrés dans les pays de l'OCDE (DIOC), 2015-16. Note: UE désigne l’EU-28 à l’exception de la Croatie, en raison de données manquantes. Pour l’Islande, le Japon, la Nouvelle-Zélande et la Turquie, les données proviennent de la DIOC 2010-11. Pour l’UE, seuls les immigrés ressortissants de pays tiers sont inclus.

    Ces dernières années, seuls quelque 50 000 travailleurs par an ont été admis au titre de programmes destinés aux personnes hautement qualifiées (carte bleue ou programmes nationaux) 9 , ce qui représente 5 % du total des permis de travail. En termes relatifs, ce chiffre est bien inférieur à celui d’autre pays de l’OCDE tels que les États-Unis, le Canada, l’Australie ou la Nouvelle-Zélande. À l’heure actuelle, le nombre de ressortissants de pays tiers admis dans l’UE au titre de programmes destinés aux travailleurs hautement qualifiés représente environ 0,01% de la population totale de l’Union, alors qu’au Canada, les 150 000 migrants économiques arrivant chaque année constituent près de 0,4% de la population totale, et les 120 000 migrants économiques annuels en Australie, 0,5% de sa population 10 (dans ces deux pays, la plupart des migrants économiques de long terme sont admis dans le cadre d’un système de «manifestation d’intérêt») 11 . Cela indique que les politiques européennes de migration légale n’ont pas été particulièrement stratégiques et proactives, ni très adaptées aux besoins du marché du travail de l’UE.

    Si les États membres demeurent compétents pour déterminer les volumes de travailleurs migrants à admettre à partir des pays tiers, l’Union a un marché unique et elle devrait donc également agir en acteur unique vis-à-vis du monde extérieur, afin de réaliser des économies d’échelle et de mieux rivaliser avec les autres grandes destinations pour attirer les travailleurs qualifiés, et particulièrement ceux très qualifiés. Dans l’intérêt de l’Europe, davantage devrait être fait au niveau européen en matière d’adéquation entre l’offre et la demande d’emploi, de reconnaissance des qualifications étrangères et de facilitation de la mobilité professionnelle des migrants dans tout le marché unique.

    Des règles particulières ont été mises en place dans l’Union pour attirer les migrants hautement qualifiés. Or il est manifeste que le système de «carte bleue européenne» instauré en 2009 n’atteint pas le potentiel qui était escompté de ce système à l’échelle européenne censé attirer des ressortissants de pays tiers talentueux et hautement qualifiés 12 . Les conditions d’admission adoptées en 2009 sont beaucoup trop restrictives, la directive offre peu de cohérence et d’harmonisation, et surtout, la mobilité intra-UE des titulaires de la carte est très limitée. Pour l’essentiel, il n’existe pas de système unique de carte bleue européenne, puisqu’une variété de programmes nationaux destinés aux travailleurs hautement qualifiés existe parallèlement à cette carte, créant ainsi un cadre fragmenté soumis à de nombreuses règles et procédures différentes.

    C’est pourquoi il y a déjà plus de deux ans, la Commission avait présenté une proposition – la réforme de la directive «carte bleue» 13 – pour améliorer les règles censées attirer les migrants hautement qualifiés. L’objectif général est de rendre la carte bleue européenne plus attrayante en instaurant un système unique pour toute l’Union, avec des conditions d’admission plus souples, et en améliorant et facilitant les procédures d’admission. Concrètement, la proposition développe la mobilité au sein de l’UE en simplifiant les procédures pour les courtes durées (voyages d’affaires de courte durée jusqu’à 90 jours entre les États membres) et les longues durées; elle abaisse le seuil salarial en créant une fourchette souple à l’intérieur de laquelle les États membres peuvent moduler le seuil en fonction de la situation de leur marché du travail; et elle prévoit de meilleures conditions pour les jeunes diplômés et les travailleurs ressortissants de pays tiers dans les secteurs souffrant d’une pénurie de main-d’œuvre. La proposition renforce en outre les droits des titulaires de la carte bleue (accès plus rapide au statut de résident de longue durée; accès immédiat et plus flexible au marché du travail) et des membres de leur famille (possibilité pour ceux-ci de rejoindre simultanément le titulaire de la carte bleue européenne), ce qui devrait faire de l’UE une destination plus attrayante pour les travailleurs dotés de compétences élevées dont notre économie a besoin. De plus, dans le système «carte bleue», les bénéficiaires hautement qualifiés d’une protection internationale pourraient également demander cette carte.

    Cependant, les négociations interinstitutionnelles sur la proposition de réforme de la carte bleue sont actuellement au point mort. Alors que le Parlement européen a bien accueilli les objectifs et l’approche définis dans la proposition de la Commission, au sein du Conseil, les États membres sont divisés et, jusqu’à présent, il n’a pas été possible de trouver de terrain d’entente pour améliorer le présent cadre peu satisfaisant. 

    La Commission appelle le Conseil à adopter rapidement une position apportant un réel progrès par rapport à la carte bleue actuelle, conformément aux objectifs fixés dans la proposition de la Commission. Les négociations pourront ainsi reprendre en vue de parvenir à un accord ambitieux avec le Parlement européen, de sorte que l’adoption de la proposition de la Commission réformant la directive «carte bleue» ait lieu avant les élections au Parlement européen.

    2.2 Réinstallation

    La réinstallation de ressortissants de pays tiers ou d’apatrides constitue une importante solution humanitaire qui peut être offerte aux personnes déplacées ayant besoin d’une protection internationale, pour leur permettre d’entrer dans l’Union européenne de manière légale et en toute sécurité. Elle s’inscrit dans l’objectif plus large d’offrir une protection aux personnes qui en ont besoin, par des voies sûres et légales, pour éviter qu’elles n’entreprennent un périlleux voyage clandestin. Ces voies sûres et légales sapent en outre le modèle économique des réseaux de passeurs et contribuent à réduire la migration irrégulière. La réinstallation est aussi un instrument de solidarité internationale et de partage des responsabilités avec les pays tiers vers lesquels un grand nombre de personnes ayant besoin d’une protection internationale ont été déplacées. 

    Les initiatives de réinstallation prises par l’UE conjointement avec les États membres au cours des dernières années ont donné de bons résultats et ont permis de renforcer les partenariats et la solidarité de l’Union avec les pays tiers. Depuis 2015, les programmes de réinstallation de l’UE ont aidé 38 000 personnes parmi les plus vulnérables à trouver refuge dans l’Union. De plus, les États membres ont pris le plus large engagement en matière de réinstallation que l’UE ait jamais connu, dans le nouveau programme de réinstallation mis en place au niveau européen en septembre 2017. Plus de 50 000 personnes en bénéficieront et le budget de l’UE contribue à son financement à hauteur de 500 millions d’euros. Les huit premiers mois de mise en œuvre du programme ont donné de bons résultats, plus de 13 200 personnes ayant déjà été réinstallées à partir des régions prioritaires. Il importe de poursuivre et de renforcer encore les engagements politiques des États membres et de les concrétiser rapidement.

    En parallèle devrait être mis en place un cadre européen structuré pour la réinstallation. C’est pourquoi, dans le cadre de la réforme globale du régime d’asile européen commun, la Commission a proposé, en juillet 2016, l’adoption d’un règlement instituant un cadre de l’Union pour la réinstallation. On créerait ainsi pour la première fois un cadre permanent pour regrouper de façon plus systématique les efforts de réinstallation et faciliter la mise en œuvre des engagements pris en la matière, en appliquant des règles communes. Il est essentiel que le Parlement européen et le Conseil concluent rapidement leurs négociations pour que cet instrument puisse être adopté sans tarder.

    Les efforts de réinstallation peuvent encore être étendus par le développement d’autres voies d’entrée légales. À cet égard, des programmes de parrainage privé, en particulier, pourraient compléter les canaux sûrs d’admission dans l’UE qui existent pour les personnes ayant besoin d’une protection internationale, et assurer une meilleure intégration sociale. Les résultats d’une étude sur la faisabilité de tels programmes 14 confirment qu’ils pourraient contribuer à réaliser l’objectif de favoriser des voies d’admission sûres et légales, en associant activement la société civile et les communautés locales et augmentant ainsi l’engagement du public dans la protection internationale et l’intégration. En outre, les parrainages privés sont aussi susceptibles de faciliter l’intégration des bénéficiaires en offrant des ressources supplémentaires au niveau individuel et communautaire.

    La Commission réfléchira au meilleur moyen d’aider les États membres à établir et/ou à élargir des programmes de parrainage privé. Il pourrait s’agir, par exemple, de mesures telles que des programmes de formation, un développement des capacités, des outils et des orientations pratique, et des activités d’apprentissage entre pairs et/ou des possibilités de financement ciblé.

    ·La Commission appelle les États membres à intensifier leurs efforts pour concrétiser les 50 000 places promises dans le cadre de l’actuel programme de réinstallation de l’UE.

    ·Après les progrès significatifs qui ont été accomplis dans le trilogue avec le Parlement européen et le Conseil, ces discussions doivent maintenant arriver à leur terme et le règlement sur le cadre de l’Union pour la réinstallation devrait être adopté sans tarder.

    2.3 Coopération avec les pays tiers

    Les voies d’entrée légales revêtent également une importance pour que l’UE puisse approfondir sa coopération avec les pays tiers et elles devraient permettre d’adopter une approche coordonnée, holistique et structurée de la migration, en profitant pleinement des synergies et en recourant aux mesures d’incitation et de pression nécessaires. En agissant de concert, l’UE peut avoir une position plus solide vis-à-vis des pays tiers dans la coopération sur la gestion des migrations. Comme le prévoit l’approche du cadre de partenariat mise au point par l’Union ces dernières années, la migration légale devrait être pleinement intégrée dans la dimension extérieure de l’UE. Une coopération renforcée et individualisée en cette matière avec les pays tiers d’origine et de transit des migrants contribuera à réduire la migration irrégulière en offrant d’autres solutions sûres et légales aux personnes souhaitant émigrer, elle permettra de remédier aux pénuries dans certains secteurs du marché du travail des États membres, et elle incitera les pays tiers à faciliter la coopération sur des questions telles que la prévention de la migration irrégulière, la réadmission et le retour des migrants en situation irrégulière. Le développement des voies d’entrée légales constitue aussi un complément important de la communication de la Commission relative à une nouvelle «Alliance Afrique-Europe pour des investissements et des emplois durables: hisser notre partenariat pour l’investissement et l’emploi au niveau supérieur» 15 .

    Dans ce contexte, ces dernières années, l’UE a fait une promotion active du volet «migration légale» de la politique migratoire extérieure, qui complète son engagement plus large en matière extérieure et de développement. Elle l’a faite en particulier, mais pas exclusivement, auprès des pays africains: d’abord dans le cadre du plan d’action conjoint de La Valette 16 et, plus récemment, en coordonnant l’élaboration par les États membres de projets-pilotes avec certains pays africains, et en promouvant les programmes de migration légale aux fins de travail ou de stage, avec le soutien financier de l’UE. Des difficultés ont toutefois surgi, principalement en raison de la réticence des États membres à appliquer intégralement le concept convenu et à lancer des projets concrets. 

    Le lien entre les politiques de migration et de mobilité, d’une part, et les politiques commerciales, d’autre part, revêt aussi une importance, particulièrement dans le secteur des services, où les personnes investissent et fournissent des services sur le territoire de l’autre partie. Il est essentiel de faciliter leur mobilité pour conclure avec les pays tiers des accords commerciaux constructifs, fondés sur la réciprocité, dans le domaine des services, où l’UE a un avantage concurrentiel croissant.

    La Commission continuera de développer les synergies entre ces différentes politiques, notamment en ce qui concerne les prestataires de services, en facilitant la délivrance des visas de court séjour et de long séjour.

    La Commission appelle les États membres à s’engager et coopérer pleinement pour élaborer des projets pilotes sur la migration légale avec certains pays africains, ainsi qu’avec d’autres pays tiers à l’avenir, avec l’objectif de lancer les premiers projets d’ici à la fin de l’année. Elle continuera de soutenir les États membres dans cette entreprise, au moyen de financements et d’une coordination pratique, en vue d’encourager la coopération en matière de gestion globale des migrations, notamment sur le retour et la réadmission.

    2.4 Intégration

    Enfin, la gestion des migrations ne pourra être améliorée que si l’UE et ses États membres intensifient aussi leurs efforts en matière d’intégration des ressortissants de pays tiers en séjour régulier dans l’Union, en y associant toutes les autorités publiques concernées et la société civile. Dans le cadre financier pluriannuel proposé, la Commission entend augmenter le soutien financier aux mesures d’intégration et accroître la participation de plusieurs parties prenantes, dont les acteurs économiques et sociaux à tous les niveaux.

    Bien que l’intégration relève en premier lieu de la responsabilité des États membres, dans son plan d’action pour l’intégration de 2016, l’Union a inclus des mesures pour les aider à élaborer et appliquer de nouvelles stratégies efficaces, dans tous les domaines d’action concernés, pour améliorer l’intégration 17 . L’application de ce plan a déjà produit des résultats sur bien des aspects. Par exemple, la Commission a lancé des initiatives concrètes en vue de promouvoir plus particulièrement l’intégration sur le marché du travail, en y associant les employeurs ainsi que les partenaires économiques et sociaux. 

    Ainsi, en mai 2017, la Commission a lancé l’initiative «Employers for integration» afin de promouvoir les efforts des employeurs visant à favoriser l’intégration des ressortissants de pays tiers sur le marché du travail 18 . Elle a aussi instauré un partenariat européen pour l’intégration avec les partenaires sociaux et économiques au niveau européen, en vue d’une collaboration plus étroite devant favoriser une intégration plus rapide et plus effective des réfugiés sur le marché du travail européen 19 . Par ailleurs, un soutien accru est apporté aux autorités locales et régionales, notamment grâce au partenariat du programme urbain sur l’inclusion des migrants et des réfugiés. Dans ce contexte, un projet pilote lié à l’Urban Academy on integration a été lancé avec succès au mois d’avril, pour former les professionnels locaux sur divers aspects de l’intégration et les politiques en la matière au niveau local. Enfin, une aide financière supplémentaire a récemment été mise à disposition pour continuer à soutenir des actions concrètes menées par les États membres dans ce domaine. La Commission a aussi lancé un outil de profilage des compétences 20 pour aider les États membres à réaliser le profilage initial des compétences et qualifications des ressortissants de pays tiers, qui permet de définir les besoins particuliers des personnes en vue de leur intégration sur le marché du travail et qui simplifie la mise en adéquation des demandes et des offres d’emploi.

    L’intégration demeure essentielle pour assurer la cohésion sociale et la performance économique, en promouvant et en respectant les valeurs fondamentales de l’UE et en évitant que des savoir-faire et des compétences ne soient gaspillés ou sous-utilisés. À cet égard, en éliminant l’écart qui existe actuellement en matière d’emploi entre les ressortissants de pays tiers et les citoyens de l’UE, on pourrait améliorer les soldes budgétaires dans plusieurs États membres 21 .

    La Commission appelle les États membres à continuer d’investir dans les politiques d’intégration destinées aux immigrés en séjour régulier, avec un soutien financier de l’UE accru, mieux ciblé et davantage coordonné, ainsi que le propose le prochain cadre financier pluriannuel, qu’il convient d’adopter rapidement, ainsi qu’avec la participation de toutes les parties concernées à tous les niveaux, notamment les acteurs économiques et sociaux.

    3.Étapes suivantes

    Une approche globale des migrations est indispensable pour substituer aux filières clandestines et dangereuses des voies d’entrée légales, ordonnées et sûres, pour les personnes qui ont besoin d’une protection, et des voies attrayantes et efficaces, pour les personnes dont nos marchés du travail ont besoin. L’UE doit agir rapidement, avec efficacité et de concert pour que cet objectif devienne une réalité. La Commission est résolue à jouer pleinement son rôle dans la mise en œuvre de cette approche globale.

    La Commission appelle en particulier le Conseil et les États membres à agir sur trois points déterminants pour développer les voies d’entrée légales à court terme:

    ·arrêter une position qui permette d’instaurer un système de carte bleue européenne attrayant et efficace;

    ·concrétiser les 50 000 places promises pour la réinstallation et adopter le cadre de l’Union pour la réinstallation;

    ·élaborer et lancer rapidement des projets pilotes sur la migration légale avec des pays d’Afrique et avec d’autres pays partenaires qui se montrent attachés à un partenariat pour gérer les migrations, notamment pour la réadmission des migrants en situation irrégulière. 

    En outre, la Commission appelle le Parlement européen et le Conseil à adopter la réforme de la directive «carte bleue» et le cadre de l’Union pour la réinstallation avant l’élection du Parlement européen de 2019. 

    À plus long terme, les travaux doivent également se poursuivre afin de moderniser intégralement la politique de migration légale de l’UE et de l’adapter aux besoins actuels et futurs de l’Union européenne. À cette fin, la Commission lancera un processus de consultation à haut niveau avec toutes les parties prenantes, au vu des conclusions du «bilan de qualité».

    (1)

         Communication de la Commission intitulée «Un agenda européen en matière de migration» du 13.5.2015, COM (2015)240 final.

    (2)

       COM (2018)131 final.

    (3)

         Au premier trimestre 2018, on comptait au moins 3,8 millions de postes vacants dans l’ensemble de l’UE, tandis que le taux de vacance d’emploi (la proportion d’emplois vacants par rapport au nombre total d’emplois) augmente régulièrement depuis 2012, atteignant 2,2% au T1-2018 (en étant proche ou supérieur à 3 % dans des États membres tels que la République tchèque, la Belgique, l’Allemagne, la Suède, les Pays-Bas et l’Autriche). Source: Eurostat, statistiques sur les emplois vacants.

    (4)

         Manpower Talent Shortage Survey (T3 2018).

    (5)

         Ibidem.

    (6)

         Selon le scénario Medium (SSP2) du CEPAM en termes de comportements démographiques et de migration, Centre commun de recherche de la Commission européenne (2018), Demographic and Human Capital Scenarios for the 21st Century: 2018 assessment for 201 countries, Wolfgang Lutz, Anne Goujon, Samir KC, Marcin Stonawski, Nikolaos Stilianakis.

    (7)

         Bien que les taux croissants de participation des femmes et des travailleurs âgés puissent retarder cet effet, la main-d'œuvre globale déclinera inévitablement à long terme dans l’UE et dans tous ses États membres. ESDE 2017, chapitre 3, Intergenerational fairness and solidarity today and challenges ahead,      http://ec.europa.eu/social/main.jsp?catId=738&langId=en&pubId=8030&furtherPubs=yes

    (8)

         Selon les prévisions jusqu’à 2030 du CEDEFOP (2018). Elles fournissent également des estimations par grands secteurs économiques: alors que l’emploi continuera de décliner dans le secteur primaire et de stagner dans l’industrie manufacturière, il augmentera rapidement dans les «affaires et autres services», de manière modérée dans le secteur «distribution et transport» et quelque peu dans les «services non marchands».

    (9)

         Ce nombre comprend environ 10 000 ressortissants de pays tiers admis au titre de programmes nationaux dans les trois pays de l’UE qui ne sont pas liés par la directive «carte bleue» (Danemark, Irlande et Royaume-Uni).

    (10)

         Source: Rapport du CESP (2018, à venir) «Towards a new paradigm of legal labour migration». Pour le Canada: cela concerne, dans une grande majorité, des travailleurs étrangers admis par un système de points destiné aux migrants qualifiés; pour l’Australie: pour la plupart, selon un système de points ou de parrainage par l’employeur. Ces chiffres incluent également les membres de la famille qui les accompagnent.

    (11)

         Ces modèles de gestion de la migration de main-d’œuvre permettent une présélection, en créant un réservoir de candidats à la migration pré-examinés, favorisant une meilleure adéquation entre l’offre et la demande d’emploi. L’OCDE a réalisé une étude sur ces programmes, en examinant également dans quelle mesure ces derniers, ou certains de leurs éléments, pourraient être appropriés dans le contexte de l’Union.

    (12)

         Selon les estimations, en 2017, les 25 États membres de l’UE dans lesquels s’applique la directive «carte bleue» ont émis près de 11 500 de ces cartes (comme premier titre de séjour, c’est-à-dire en ne comptant pas les personnes changeant de statut qui résidaient déjà dans l’UE auparavant), contre environ 28 500 titres délivrés dans le cadre des programmes nationaux destinés aux travailleurs hautement qualifiés. Dans l’ensemble, le nombre de titres de séjour délivrés par les États membres de l’UE aux travailleurs hautement qualifiés demeure limité.

    (13)

         COM(2016) 378 final.

    (14)

         Voir l’étude de la Commission européenne sur la possibilité d’adopter des programmes de parrainage, et sur leur valeur ajoutée, pour créer des voies d’accès à l’Union sûres, notamment la réinstallation (2018).

    (15)

         COM(2018) 643 final.

    (16)

          https://www.consilium.europa.eu/media/21839/action_plan_en.pdf  

    (17)

         COM(2016) 377 final.

    (18)

          https://ec.europa.eu/home-affairs/what-we-do/policies/legal-migration/european-dialogue-skills-and-migration/integration-pact_en  

    (19)

          https://ec.europa.eu/home-affairs/sites/homeaffairs/files/e-library/documents/policies/legal-migration/integration/docs/20171220_european_partnership_for_integration_fr.pdf  

    (20)

    https://ec.europa.eu/migrantskills/#/

    (21)

       Perspectives des migrations internationales (2013), OCDE.

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