COMMISSION EUROPÉENNE
Bruxelles, le 19.4.2017
COM(2017) 183 final
COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS
Initiative en faveur du développement durable de l'économie bleue dans la Méditerranée occidentale
{SWD(2017) 130 final}
1. Introduction
L’économie maritime de la région de la Méditerranée occidentale dispose d'un énorme potentiel de développement dans tous les secteurs connexes. La région compte 200 ports et terminaux et près de 40 % (en valeur) de l’ensemble des marchandises transitent par la Méditerranée.
La Méditerranée occidentale est la région qui attire le plus grand nombre de touristes dans le bassin méditerranéen, en raison notamment de sa richesse artistique et culturelle. Elle jouit d'une grande diversité biologique, abritant 481 zones marines protégées, dont des sites Natura 2000. La région est une zone de pêche riche, qui représente plus de 30 % de la valeur totale des débarquements au stade de la première vente dans la Méditerranée et fournit plus de 36 000 emplois directs à bord des navires de pêche.
Malgré ces atouts, la région connaît un certain nombre de difficultés qui viennent se greffer à son instabilité géopolitique: une crise économique et financière prolongée avec un taux élevé de chômage des jeunes dans plusieurs pays, une urbanisation côtière croissante, une surexploitation des stocks halieutiques, une pollution marine et, dernier point, mais non des moindres, la crise des réfugiés.
Le changement climatique a une forte incidence sur la région et l’élévation du niveau de la mer constitue une menace considérable pour les économies et les écosystèmes côtiers. D’autres facteurs, tels que la croissance démographique et le vieillissement de la population, la migration et la mondialisation croissante vont encore exacerber ces pressions.
Une initiative conjointe s'impose donc afin de permettre à l’Union européenne (UE) et aux pays limitrophes de collaborer par-delà les frontières de manière à:
accroître la sécurité et la sûreté;
promouvoir une croissance durable de l’économie bleue et la création d’emplois;
préserver les écosystèmes et la diversité biologique dans la Méditerranée occidentale.
En ce qui concerne la gouvernance maritime, le fait d'unir leurs forces permettra également aux pays de coordonner leurs actions, d’utiliser les instruments de manière plus efficace et d'utiliser les fonds et les instruments financiers de manière optimale, en leur offrant la possibilité d'attirer davantage d’investissements privés que s'ils agissaient isolément, y compris en exploitant la plateforme d’investissement pour le voisinage qui a récemment été instituée par l’UE.
Par conséquent, en 2015, la déclaration ministérielle de l’Union pour la Méditerranée sur l’économie bleue a invité les pays participants à examiner la valeur ajoutée et la faisabilité de stratégies maritimes appropriées au niveau sous-régional, et à s’appuyer sur l’expérience acquise dans le cadre du Dialogue 5 + 5. En octobre 2016, les ministres des affaires étrangères de l’Algérie, l'Espagne, la France, l’Italie, la Libye, Malte, la Mauritanie, le Maroc, le Portugal et la Tunisie ont encouragé la poursuite des travaux relatifs à une initiative en faveur du développement durable de l’économie bleue, en collaboration avec le secrétariat de l’Union pour la Méditerranée.
La présente initiative découle de cette demande et comprend la présente communication et le cadre d’action y afférent. Ces deux documents ont été élaborés en étroite coopération avec les pays concernés et le secrétariat de l’Union pour la Méditerranée. La communication expose les principaux problèmes, les lacunes qui doivent être comblées et les solutions éventuelles. Le cadre d’action présente les priorités proposées et leur valeur ajoutée, les actions et les projets détaillés, ainsi que des objectifs quantitatifs et des délais pour suivre les progrès accomplis au fil du temps.
L’initiative se fonde sur la longue expérience de la Commission en ce qui concerne les stratégies relatives aux bassins maritimes et les stratégies macrorégionales (telles que la stratégie pour la région atlantique, la stratégie de l’UE pour la région de la mer Baltique et la stratégie de l’UE pour la région de l’Adriatique et de la mer Ionienne). Elle se fonde également sur plus de deux décennies de travaux au sein du Dialogue 5 + 5, qui a tissé des liens solides entre les pays participants. Elle s’appuie aussi sur d’autres politiques de l’UE liées à la région, telles que les priorités mentionnées dans la révision de la politique européenne de voisinage et la récente communication sur la gouvernance internationale des océans. L’initiative bénéficie:
-du dialogue régional sur la politique maritime et de l’économie bleue sous les auspices de l’Union pour la Méditerranée;
-de la coopération en matière de gestion des pêches, qui a été renforcée récemment par le processus de Catane, lancé en 2016, et de la coopération sur le développement durable de l’aquaculture, qui s'inscrivent toutes deux dans le cadre de la Commission générale des pêches pour la Méditerranée;
-de la coopération dans le cadre de la convention de Barcelone pour la protection de l’environnement marin et des régions côtières de la Méditerranée et du programme de développement durable à l'horizon 2030 des Nations unies, ainsi que des efforts déployés dans la mise en œuvre de la stratégie méditerranéenne pour le développement durable.
Bien que l’initiative se concentre sur la région de la Méditerranée occidentale et les dix pays susmentionnés, son champ d’action — et les avantages potentiels — pourrait facilement s’étendre au-delà de ce sous-bassin. Par conséquent, en fonction des besoins, les actions pourront réunir des partenaires de la zone centrale de la Méditerranée et de l’Atlantique du Nord-Est, et resteront ouvertes à d’autres partenaires.
Étant donné qu’elle concerne à la fois l’UE et les pays partenaires, elle devra d'abord être approuvée au niveau politique dans l’UE, et ensuite au sein de l’Union pour la Méditerranée, qui regroupe l’ensemble des dix pays concernés.
2. Problèmes et lacunes
Des consultations approfondies entre les parties prenantes et les autorités nationales ont révélé une série de problèmes et de lacunes qui relèvent de trois grands domaines et se résument comme suit:
2.1 Sécurité et sûreté
En moyenne, les transports maritimes génèrent environ 60 accidents par an en Méditerranée occidentale, dont 15 concernent des navires-citernes transportant du pétrole ou des produits chimiques. Près de la moitié des accidents ayant entraîné des déversements considérables (100 tonnes ou davantage) au cours de la dernière décennie ont eu lieu en Méditerranée occidentale. La région se porte toujours relativement bien par rapport à d’autres sous-bassins, mais les nouveaux développements économiques risquent de l’exposer à davantage de risques, en particulier dans les régions où le trafic maritime est saturé (comme dans le détroit de Gibraltar, le détroit de Bonifacio ou le détroit de Sicile), et dans les ports et terminaux. Le doublement du canal de Suez risque également d’aggraver les encombrements. La concentration de navires augmente le risque de collisions, la pollution environnementale et les nuisances sonores, ainsi que le risque d'accidents.
Cette région est aussi particulièrement sensible du point de vue de la sûreté. Au cours de la période 2013-2015, une moyenne de 11 000 migrants clandestins ont traversé ses eaux chaque mois, suscitant des préoccupations de plus en plus graves en ce qui concerne tant les vies humaines que les activités économiques. Il est probable que les tendances démographiques actuelles et le changement climatique renforcent encore la concurrence pour les ressources et alimentent l’instabilité géopolitique de la région.
Il est essentiel de garantir la sécurité et la sûreté des activités maritimes pour favoriser le développement durable des secteurs de l’économie bleue et la prospérité et la stabilité de la région. Parmi les efforts consentis pour se prémunir contre ces risques et menaces figurent:
-le plan d’action régional de transport pour la région méditerranéenne
et les projets de l'AESM/SAFEMED;
-la stratégie de sûreté maritime de l’UE et son plan d’action;
-la stratégie maritime intégrée de l’Afrique de 2050 et la déclaration de Lomé sur la sécurité maritime;
-le paquet «garde-frontières et garde-côtes européens»
et un projet pilote connexe lancés en 2016 afin d’améliorer la coopération opérationnelle en ce qui concerne les fonctions de garde-côtes entre les trois agences de l’UE (Frontex, l’AECP et l’AESM) dans la Méditerranée occidentale.
Depuis que la crise des réfugiés et le contrôle des migrations sont devenus une priorité en 2015, de nombreuses activités axées sur la migration ont été élaborées dans le cadre de l’agenda européen en matière de migration. Le réseau méditerranéen «Seahorse», le forum européen des services de surveillance côtière et le forum des services de surveillance côtière de la Méditerranée ont également contribué à améliorer la coopération entre les pays concernés.
Toutefois, les initiatives et les projets sont encore relativement dispersés sur l’ensemble de la région, et les capacités répressives, la disponibilité, l’accessibilité, le traitement et la compréhension des données sont encore inégaux et fragmentés entre les deux rives. La coopération entre les États membres de l’UE et les pays partenaires du Sud doit donc être renforcée afin de combler ces lacunes en facilitant l’interopérabilité et les échanges de données, en renforçant les capacités et en améliorant la réaction aux situations d’urgence en temps réel.
2.2 Taux élevé de chômage des jeunes et vieillissement de la main-d'œuvre dans le secteur maritime
Il existe un paradoxe dans la région de la Méditerranée occidentale en ce sens que le taux de chômage des jeunes est extrêmement élevé, il se situe entre 14 % et 58 %, alors que les entreprises maritimes, tant dans le secteur traditionnel que dans les secteurs émergents, ne parviennent pas à trouver les profils et compétences qu'elles recherchent. Cette inadéquation entre l’offre et la demande est principalement due à un manque de dialogue et de coopération entre le secteur et les différents niveaux d’éducation.
Il existe également un double défi en matière de R&D. D’une part, des activités telles que le tourisme, le transport et la pêche, qui sont traditionnellement à la pointe de l’économie bleue, exigent davantage d’innovation et de diversification pour rester durables, compétitives et rentables au fil du temps et fournir des emplois qualifiés. D’autre part, plusieurs activités émergentes et chaînes de valeur (telles que la biotechnologie bleue, les énergies marines renouvelables, les ressources vivantes et minérales) nécessitent un soutien spécifique pour pouvoir atteindre leur plein potentiel, parvenir à une masse critique suffisante et attirer les investissements et activités de R&D adaptés.
Un certain nombre d’initiatives et de cadres stratégiques sont actuellement encouragés dans l’ensemble de la Méditerranée occidentale pour stimuler l’activité économique, la recherche et l’innovation. Parmi ces initiatives figurent:
-la stratégie «Croissance bleue» et la politique maritime de l'UE,
-la stratégie européenne pour plus de croissance et d’emploi dans le tourisme côtier et maritime,
-l’initiative BLUEMED,
-l'initiative en faveur de la croissance bleue de la FAO.
Ces initiatives ciblent soit l'Union européenne, soit les pays limitrophes, mais pas les deux à la fois. Les initiatives mises en œuvre à la demande de l’Union européenne ne tiennent pas toujours compte des besoins spécifiques des bénéficiaires dans la région de la Méditerranée occidentale, et le soutien à des activités transversales entre des parties prenantes du sud et du nord est généralement limité. Il faut intervenir pour corriger les asymétries en ce qui concerne leur champ d'application géographique, aligner les instruments de financement et générer une masse critique pour des activités économiques actuellement non attrayantes pour les investisseurs privés. Il faut aussi remédier à l’actuelle inadéquation entre l’offre et la demande de compétences bleues et augmenter les capacités des parties prenantes à créer des partenariats entre les deux rives de la région. Enfin, il faut stimuler les investissements et créer des emplois dans la région.
D’autres initiatives couvrent les deux rives de la région, comme le plan d’action pour la consommation et la production durables et le plan d’action régional de transport pour la région méditerranéenne. Elles présentent un réel potentiel et bénéficieraient d'une meilleure synergie et coopération entre les parties prenantes et d'une plus grande participation du secteur privé dans leur mise en œuvre au niveau de la Méditerranée occidentale.
2.3. Intérêts divergents et concurrents en mer
La Méditerranée occidentale détient la plus grande diversité biologique et le plus grand nombre d’espèces endémiques de tout le bassin. Toutefois, comme le reste du bassin maritime, plusieurs de ses stocks halieutiques ont longtemps fait l'objet d'une surpêche. Les zones marines protégées et les sites Natura 2000 désignés à l'échelle nationale représentent quelque 3,5 % de ses eaux, ce qui est encore très loin de l'objectif de conservation de 10 % des zones marines et côtières.
La région génère 48 % de la valeur ajoutée brute et 45 % de l’emploi de la région méditerranéenne dans son ensemble grâce aux principaux secteurs maritimes, à savoir le tourisme, l’aquaculture, la pêche et les transports. Il s’agit d’une zone critique sur le plan des pressions économique, démographique et environnementale, qui compte sept des treize zones de la Méditerranée où l’activité économique intense interagit vivement avec les aspects de conservation.
Les activités économiques maritimes susceptibles d’entrer en concurrence dans les mêmes eaux peuvent décourager ou empêcher des investissements. Ces activités peuvent également augmenter la production de déchets et la consommation d’énergie et d’eau, aggraver l’exploitation des ressources biologiques et d'autres ressources et entraîner davantage de pollution et une grave détérioration des écosystèmes marins et côtiers.
C’est pourquoi des efforts ont été déployés dans la région pour mettre en œuvre un large éventail d’initiatives et d’accords tels que la directive-cadre relative à la planification de l'espace maritime et la directive-cadre intitulée «Stratégie pour le milieu marin» de l'Union européenne, l’initiative en faveur de la croissance bleue de la FAO, le plan d’action pour la Méditerranée du PNUE, la Convention de Barcelone et son plan d’action régional pour lutter contre les déchets marins et le protocole sur la gestion intégrée des zones côtières, entre autres. La récente stratégie à moyen terme (2017-2020) de la Commission générale des pêches pour la Méditerranée visant à assurer la durabilité des pêches dans la Méditerranée et la mer Noire et MEDFISH 4EVER offrent également une bonne base pour lutter contre la surexploitation actuelle des stocks halieutiques.
Bien qu’il existe une véritable volonté politique pour résoudre les problèmes de l’environnement et de la pêche, la région ne dispose pas encore de politiques appropriées de sensibilisation, de diffusion et fondées sur des données intersectorielles probantes. De nombreuses lacunes subsistent également dans la mise en œuvre et l’application de la législation, en particulier aux niveaux national et local.
En outre, des tests de résistance en matière de données marines révèlent de graves lacunes dans les connaissances sur la nature géologique et écologique des eaux méridionales et une diminution de l’investissement public dans les programmes de surveillance dans le nord. Les lacunes dans les informations sur les captures et l’effort de pêche artisanale compliquent encore le soutien au secteur de la pêche.
3. La solution: des mesures destinées à régler les problèmes et combler les lacunes
Un cadre d’action évolutif (voir le document de travail des services ci-joint) relève les lacunes qui doivent être comblées et la valeur ajoutée potentielle des priorités et des actions proposées. L’initiative sera financée au niveau international, au niveau de l'Union européenne et aux niveaux national et régional par des fonds et instruments existants, qui seront coordonnés et complémentaires. Cela devrait créer un effet de levier et attirer des financements d’autres investisseurs publics et privés. Les sources de financement potentielles sont indicatives et sous réserve et sans préjudice de l'appréciation des procédures et critères d'évaluation pour les fonds, les programmes et les projets concernés.
En favorisant la coordination et la coopération entre les dix pays, cette initiative vise à:
accroître la sécurité et la sûreté;
promouvoir une croissance durable de l’économie bleue et la création d’emplois; et
préserver les écosystèmes et la diversité biologique dans la région de la Méditerranée occidentale.
À la suite de consultations approfondies avec les autorités nationales et les parties prenantes, l’initiative sera axée sur trois grands objectifs qui visent à régler trois problèmes principaux.
3.1 Objectif n° 1 - Un espace maritime plus sûr et plus sécurisé
Garantir la sécurité et la sûreté des activités en mer est essentiel pour assurer le développement durable de l’économie maritime, la préservation et la création d’emplois et la bonne gouvernance des mers et des côtes.
Priorités:
1.1.
La coopération entre les garde-côtes
À l’heure actuelle, il existe plusieurs initiatives visant à renforcer la sûreté et la sécurité maritimes, mais les moyens sont déployés à des niveaux différents ou par des partenaires différents dans la région de la Méditerranée occidentale. Des progrès ont été accomplis pour faciliter l’échange volontaire de données, mais la coopération entre les garde-côtes des deux rives reste limitée et la réaction en temps réel aux situations d’urgence en mer doit encore être améliorée.
Mesures:
Accroître la coopération entre les garde-côtes des deux rives de la Méditerranée occidentale au moyen d’actions telles que des réseaux de centres de formation, des formations communes et des échanges de personnel.
Soutenir le renforcement des capacités dans des domaines tels que la lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée, le service du trafic maritime, la recherche et le sauvetage en mer, la lutte contre le trafic de migrants et d’autres trafics illicites en mer (y compris par la poursuite du développement du réseau méditerranéen «Seahorse»).
Sources de financement potentielles: le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP), l’instrument européen de voisinage (IEV), le Fonds européen de développement régional (FEDER), l’instrument de coopération au développement (ICD).
1.2.
La sécurité maritime et la lutte contre la pollution marine
L'échange des données maritimes doit être optimal entre les deux rives de la Méditerranée occidentale afin d’améliorer la connaissance de la situation, de garantir une utilisation efficace des financements nationaux et d’améliorer la coopération en matière d’opérations transfrontières. Certains pays partenaires échangent leurs données environnementales par l’intermédiaire de l’AESM/SAFEMED, mais des goulets d’étranglement empêchent leur accès à SafeSeaNet.
Mesures:
Encourager l'échange de données sur le trafic maritime en apportant un soutien aux pays du sud afin d'améliorer leurs infrastructures (système d’identification automatique/système d'information et de gestion du trafic maritime) et leur faciliter l’accès aux plateformes existantes (SafeSeaNet et système commun de communication et d’information d'urgence sur la pollution marine).
Renforcer les capacités (planification, préparation et instruments) pour prévenir et lutter contre la pollution marine due à des accidents.
Sources de financement potentielles: ENI, FEDER, programme Horizon 2020 de l’UE, fonds nationaux.
Résultats à atteindre pour l'objectif n° 1
Couverture complète du système d’identification automatique d'ici à 2018 dans le but de partager davantage de données de suivi du trafic maritime au niveau régional.
Renforcement de la surveillance des frontières en associant les pays voisins dans le réseau méditerranéen «Seahorse» d’ici à 2018.
3.2 Objectif n° 2 - Une économie bleue intelligente et résiliente
L’innovation et le partage des connaissances sont essentiels pour faire face à la relève des générations sur le marché du travail et rendre la région plus durable, plus compétitive et plus résistante aux crises et aux chocs cycliques. Cet objectif s’appuie largement sur des initiatives existantes, telles que BLUEMED
et son programme stratégique de recherche et d’innovation, et encourage une plus forte participation des pays partenaires.
Priorités:
2.1
La recherche et l’innovation stratégiques
Mesures:
Promouvoir les industries et services novateurs utilisant des processus de production biologiques, y compris les ingrédients alimentaires, les produits pharmaceutiques, les cosmétiques, les produits chimiques, les matières premières et l’énergie.
Développer de nouvelles technologies d’observation et de surveillance des océans, y compris des ressources biologiques et autres des eaux profondes et des fonds marins.
Encourager l’élaboration de nouveaux concepts et protocoles par des entreprises privées et des opérateurs maritimes afin d’optimiser l’utilisation des infrastructures, des navires et des plateformes à des fins scientifiques, environnementales, de sécurité et de sûreté .
Mettre au point des solutions sur mesure et de nouvelles technologies afin d’exploiter les énergies renouvelables marines et d’atténuer les effets du changement climatique et de s’y adapter.
Promouvoir le renforcement des capacités en vue du transfert de connaissances et de technologies.
Les partenaires et parties prenantes de la rive sud de la Méditerranée occidentale seront invités à se joindre à l’initiative BLUEMED afin de réaliser des économies d’échelle et d’encourager les partenariats entre la recherche et l’industrie entre les deux rives.
Sources de financement potentielles: Horizon 2020, fonds nationaux, FEAMP, FEDER, IEV, LIFE, Fonds vert pour le climat
2.2
Le développement de pôles d’activités maritimes
Mesures:
Soutenir le développement des micro, petites et moyennes entreprises de l’économie bleue (par l’intermédiaire de pôles d’activités maritimes nationaux, de pépinières d’entreprises, de boosters, de services providentiels et d’instruments financiers sur mesure).
Promouvoir un réseau efficace de pôles d’activités maritimes dans l’ensemble de la région.
Créer des pôles régionaux concernant les énergies renouvelables, le bien-être et le vieillissement actif, sur la base des ressources et technologies marines et maritimes.
Les pôles d’activités maritimes contribuent clairement à stimuler l’innovation, l’emploi et la croissance. Ils jouent un rôle essentiel en créant la masse critique nécessaire pour des activités économiques qui n’attirent actuellement pas les investisseurs privés.
Sources de financement potentielles: FEAMP, COSME, IEV, FEDER, fonds nationaux, Fonds européen pour les investissements stratégiques (EFSI), Fonds européen pour le développement durable (FEDD)
2.3
Le développement et la circulation des compétences
Les établissements de formation et d’enseignement dans le domaine maritime ont recensé un certain nombre de solutions envisageables pour remédier à l’inadéquation actuelle entre l’offre et la demande de compétences dans le secteur maritime et renforcer la coopération.
Mesures:
Favoriser le développement de compétences maritimes innovantes par une série de mesures stratégiques visant à rapprocher l’offre et la demande.
Promouvoir la mise en réseau et les échanges entre instituts et académies maritimes, portuaires et logistiques.
Sensibiliser aux professions maritimes et accroître leur attractivité auprès des jeunes.
Rapprocher l’offre et la demande d’emplois dans les services de transport multimodal de marchandises, les chaînes d’approvisionnement et les infrastructures.
Harmoniser les compétences et fonctions existantes pour la gestion des questions de migration dans l’ensemble de la région et promouvoir une migration circulaire plus efficace.
Sources de financement potentielles: FEAMP, initiative en faveur de la croissance bleue de la FAO, Fonds social européen (FSE), IEV, Erasmus+, Mécanisme pour l’interconnexion en Europe (MIE), fonds nationaux
2.4
La consommation et la production durables (transport maritime, ports, tourisme maritime et côtier, aquaculture marine)
Mesures:
Mettre en œuvre des modèles et pratiques de consommation et de production durables; encourager l’utilisation de sources d’énergie propres pour le dessalement de l’eau de mer; promouvoir l’efficacité énergétique et l’adaptation au changement climatique dans les villes côtières.
Promouvoir un transport maritime écologique et des infrastructures portuaires pour carburants alternatifs; optimiser les infrastructures, interfaces et procédures/opérations portuaires; développer le réseau transeuropéen de transport, les autoroutes de la mer et les connexions portuaires correspondantes.
Mettre au point de nouveaux produits et services touristiques thématiques, y compris:
-des itinéraires naturels, culturels et historiques, le tourisme nautique et de croisière, des marinas durables, le pescatourisme et la pêche de loisir;
-la création de récifs artificiels respectueux de l’environnement;
-l’établissement de liaisons entre des attractions en mer et sur la terre ferme (dans les domaines de la gastronomie, de la culture, des sports, etc.).
Élaborer des normes techniques communes pour une aquaculture marine durable dans les différents pays, diversifier le secteur et renforcer les capacités.
Les activités maritimes et terrestres, ainsi que l’urbanisation progressive du littoral, exercent une pression sur les écosystèmes marins et côtiers du sous-bassin et peuvent avoir une incidence sur la viabilité à long terme de secteurs tels que l’aquaculture marine et le tourisme maritime et côtier. Cette priorité encouragera la mise en œuvre du plan d’action pour une consommation et une production durables dans la région et une transition vers une mobilité plus intelligente et plus verte, un tourisme durable et des pratiques aquacoles durables.
Sources de financement potentielles: FEAMP, COSME, MIE, LIFE, IEV, FEDER, Horizon 2020, fonds nationaux, initiative en faveur de la croissance bleue de la FAO, portail européen de projets d’investissement, EFSI, EFSD
Résultats à atteindre pour l’objectif n° 2
-Inclure d’ici 2017 les pays de la Méditerranée occidentale dans l’initiative BLUEMED et dans son programme stratégique de recherche et d’innovation.
-D’ici 2022, augmenter de 25 % le nombre d’«écoports» et de marinas.
-D’ici 2022, augmenter de 20 % la valeur de la production aquacole durable.
-D’ici 2022, augmenter de 20 % les arrivées touristiques hors saison.
3.3 Objectif n° 3 - Une meilleure gouvernance de la mer
Parvenir à des écosystèmes marins et côtiers sains tout en promouvant le développement socio-économique nécessite un solide cadre institutionnel, juridique et technique permettant de trouver un juste équilibre entre les demandes concurrentes pesant sur des ressources naturelles et un territoire limités.
Priorités:
3.1 La planification de l'espace et la gestion des zones côtières
Mesures:
Améliorer la gestion des zones maritimes et côtières par les acteurs locaux et garantir une mise en œuvre appropriée et coordonnée de la directive PEM et du protocole GIZC, y compris une approche fondée sur les écosystèmes.
Améliorer la connaissance des interactions terre-mer et développer des solutions d’ingénierie respectueuses de l’environnement pour le bon état écologique des mers et des côtes.
Développer des outils afin de sélectionner des sites appropriés pour les installations offshore et de remplir les exigences énergétiques et environnementales de la région.
La cohérence sera recherchée dans la mise en œuvre de la directive relative à la planification de l’espace maritime (PEM), de la directive-cadre «stratégie pour le milieu marin» et du protocole «gestion intégrée des zones côtières» (GIZC).
Sources de financement potentielles: FEAMP, FEDER, IEV, Horizon 2020, fonds nationaux
3.2 Les connaissances marines et maritimes
L'élaboration de politiques fondées sur des données probantes exige des données marines et maritimes harmonisées et récentes dans des domaines tels que les investissements, la valeur ajoutée brute, l’emploi, la production et l’élimination des déchets, la bathymétrie, la qualité de l’eau et le suivi environnemental. Les données nécessaires sont souvent soit indisponibles soit disponibles uniquement pour certains pays.
Mesures:
Promouvoir la collecte de données ainsi que leur conservation et leur stockage par les instruments, bases de données et projets existants (notamment le réseau européen d’observation et de données du milieu marin - EMODNET, le centre virtuel de connaissances consacré à la Méditerranée qui est géré par le secrétariat de l’Union pour la Méditerranée et les projets Horizon 2020) et étendre leur champ d’application géographique et thématique dans l’ensemble de la région.
Maintenir et mettre à jour les informations relatives aux phénomènes d’érosion et aux risques côtiers; harmoniser et développer des systèmes de suivi au niveau du sous-bassin, et développer des outils communs pour évaluer les incidences des activités humaines.
Développer les véhicules autonomes sans équipage et les infrastructures sous-marines connexes.
Renforcer les capacités dans le domaine des affaires maritimes.
Sources de financement potentielles: FEAMP, IEV, FEDER, LIFE, Horizon 2020, fonds nationaux, Fonds vert pour le climat
3.3 La biodiversité et la conservation de l’habitat marin
Mesures:
Évaluer les pressions atmosphériques, terrestres et maritimes ainsi que les risques tant pour les écosystèmes que pour la santé humaine.
Contribuer à établir et à gérer des zones marines protégées, à réduire les déchets marins, à gérer les eaux de ballast et à surveiller la pollution sonore.
Renforcer la capacité locale d’identifier les espèces exotiques envahissantes et les voies d’invasion ainsi que la structure et le fonctionnement des écosystèmes marins.
Promouvoir des campagnes de sensibilisation sur l’environnement marin et la biodiversité ainsi que le volontariat environnemental dans l’ensemble de la région.
La biodiversité de la région est menacée par la pollution, l’eutrophisation et la destruction des habitats marins et côtiers, les perturbations des routes migratoires de la faune sauvage, les changements dans la dynamique côtière, les déchets marins et les nuisances sonores marines. Les pays seront soutenus dans leurs efforts pour respecter les engagements internationaux pris, tels que la convention de Barcelone, y compris son plan régional contre les déchets marins en Méditerranée et la convention sur la diversité biologique.
Sources de financement potentielles: LIFE, FEDER, IEV, FEAMP, Horizon 2020, fonds nationaux
3.4 Le développement des pêcheries durables et des communautés côtières
Les mesures sont actuellement fragmentées entre les deux rives. Une plus grande coordination et coopération régionales seront recherchées par la mise en œuvre de la stratégie à moyen terme de la Commission générale des pêches pour la Méditerranée (2017-2020). Cette stratégie vise à assurer la durabilité des pêches en Méditerranée et en mer Noire et permettra également de garantir une mise en œuvre plus cohérente de la politique commune de la pêche au niveau des sous-bassins.
Mesures:
Favoriser le développement durable de la pêche artisanale et des communautés côtières en augmentant la capacité de la région à gérer les stocks halieutiques au moyen de plans de pêche pluriannuels, de mesures techniques, de fermetures de zones et d’autres mesures de conservation spécifiques.
Renforcer la capacité de la région à garantir une collecte appropriée de données, des évaluations scientifiques régulières et un cadre juridique adéquat en matière de contrôle et d’inspection.
Créer des groupes techniques locaux chargés d’analyser les possibilités et menaces spécifiques et de définir des mesures et techniques d’intervention conjointes.
Diffuser les meilleures pratiques pour la commercialisation des produits de la pêche, augmenter leur valeur ajoutée et diversifier les activités économiques dans les communautés côtières (y compris par des approches ascendantes telles que le développement local mené par les acteurs locaux).
Sources de financement potentielles: FEAMP, IEV, initiative en faveur de la croissance bleue de la FAO, CGPM.
Résultats à atteindre pour l’objectif n° 3
-Faire en sorte que d’ici 2021, 100 % des eaux sous juridiction nationale et 100 % des côtes soient couvertes par la planification de l’espace maritime et la gestion intégrée des zones côtières ainsi que leurs mécanismes de mise en œuvre.
-Faire en sorte que d’ici 2020, au moins 10 % des zones côtières et marines soient couvertes par des zones marines protégées et d’autres mesures de conservation efficaces par zone.
-D’ici 2024, réduire de 20 % les déchets marins sur les plages.
-D’ici 2020, inclure les pays du sud de la Méditerranée dans EMODNET.
-D’ici 2020, doter tous les États d’un cadre juridique adéquat et de capacités humaines et techniques leur permettant d’assumer leurs responsabilités en matière de contrôle et d’inspection des pêches en tant qu’États du pavillon, États du port et États côtiers.
-D’ici 2020, soumettre 100 % des principaux stocks méditerranéens
à une collecte appropriée de données, scientifiquement évaluées sur une base régulière et gérées au moyen d’un plan de pêche pluriannuel.
4. Gouvernance et mise en œuvre
4.1 Coordination
La coordination politique sera assurée par les mécanismes et processus existants de l’Union pour la Méditerranée, y compris des réunions de hauts responsables et de rencontres ministérielles. La coordination opérationnelle sera assurée par une task-force WestMED liée au groupe de travail sur l’économie bleue de l’Union pour la Méditerranée et comprendra des points focaux nationaux des ministères concernés, de la Commission européenne et du secrétariat de l’Union de la Méditerranée. Des représentants des organisations régionales existantes de la Méditerranée pourraient être également invités à participer à la task-force.
4.2 Mise en œuvre et rapports
Pour que l’initiative porte ses fruits, un certain nombre de conditions doivent être réunies:
-approbation ministérielle reconnaissant que l’initiative couvre plusieurs politiques, ministères et niveaux de gouvernement. Les pays fixent les priorités, deviennent parties prenantes du processus et assument leurs responsabilités, adaptent les politiques et les financements au niveau national et fournissent aux décideurs et à ceux qui mettent en œuvre les politiques les pouvoirs et les ressources appropriés à tous les niveaux administratifs;
-la Commission garantit une approche stratégique au niveau de l’Union, y compris la coordination avec les initiatives existantes liées à l’UE;
-les gouvernements surveillent, font rapport à la task-force, évaluent les progrès accomplis au niveau national et fournissent des orientations pour la mise en œuvre;
-la coordination avec les travaux des organisations régionales existantes est assurée par le secrétariat de l’Union pour la Méditerranée;
-les principales parties prenantes y sont associées: les autorités locales, régionales et nationales, y compris les autorités de gestion, les acteurs économiques et sociaux, les citoyens, les universités et les organisations non gouvernementales. Les manifestations publiques permettront également de promouvoir cette participation (par exemple, forums annuels, événements interentreprises, présentations destinées à attirer les investisseurs et à obtenir des financements rapides);
-un mécanisme d’assistance spécifique fournit une aide initiale aux pays et à la task-force; le soutien devrait également inclure la participation des parties prenantes et un partenariat entre celles-ci, ainsi que la collecte des données nécessaires pour établir des points de référence, assurer le suivi des progrès réalisés et en rendre compte.
5. Liens avec les politiques de l’Union européenne
Plutôt que de créer une nouvelle législation, cette initiative vise à atteindre les objectifs de l’Union (les priorités sur «l’emploi, la croissance et l’investissement», «l’Union de l’énergie et le changement climatique», «les migrations» et «Une Europe plus forte sur la scène internationale»), en renforçant les politiques relatives à la région et en favorisant le respect du droit de l’Union.
L’accent est mis sur une meilleure coordination entre les instruments de financement et sur une approche véritablement intégrée, qui regroupe les différents volets d’action et relie fortement entre elles les politiques et initiatives de l’UE, telles que la politique maritime, la politique commune de la pêche, la politique de cohésion, les politiques environnementales et marines et côtières, la stratégie globale pour la politique étrangère et de sécurité de l’UE, le corps de garde-frontières et de garde-côtes européens, les stratégies relatives à la croissance bleue, la sécurité maritime, MEDFISH 4EVER, la biodiversité, l’adaptation au changement climatique, le 7e programme d’action pour l’environnement, les programmes-cadres de R&D et les communications sur «Un partenariat pour la démocratie et une prospérité partagée avec le sud de la Méditerranée»
et sur la «gouvernance internationale des océans»
.
6. Renforcement des liens
Une coordination est nécessaire avec les programmes
et initiatives à l’échelle de la Méditerranée, avec le plan d’action pour l’Atlantique, avec la stratégie de l’UE pour la région de l’Adriatique et de la mer Ionienne, ainsi qu’avec les initiatives BLUEMED et PRIMA
. Le programme INTERACT peut apporter une aide à cet égard dans la limite de ses compétences.
L’initiative doit également être cohérente avec la législation existante. Des synergies doivent être recherchées avec le processus de l’Union pour la Méditerranée, le Dialogue 5+5, le plan d’action régional pour les transports dans la région méditerranéenne, le réseau transméditerranéen de transport et des cadres plus larges, tels que ceux prévus par la convention de Barcelone et la Commission générale des pêches pour la Méditerranée.
Par la présentation d’idées durables et la création d’emplois et de croissance, les projets soutenus par l’initiative pourraient être étendus à d'autres parties de la Méditerranée, de sorte que l’initiative servirait de passerelle pour une croissance durable dans le bassin.
7. Conclusion
La Commission invite le Parlement européen et le Conseil à approuver la présente communication. La Commission invite également le Comité des régions et le Comité économique et social européen à émettre des avis sur la présente initiative.
La Commission fera rapport sur la mise en œuvre de la présente initiative au Conseil et au Parlement européen d’ici 2022, sur la base des rapports des pays.