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Document 52016JC0024

    COMMUNICATION CONJOINTE AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL Éléments d’une stratégie de l’UE à l’égard du Myanmar/de la Birmanie: un partenariat spécial pour la démocratie, la paix et la prospérité

    JOIN/2016/024 final

    Bruxelles, le 1.6.2016

    JOIN(2016) 24 final

    COMMUNICATION CONJOINTE AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL

    Éléments d’une stratégie de l’UE à l’égard du Myanmar/de la Birmanie: un partenariat spécial pour la démocratie, la paix et la prospérité


    1. MYANMAR/BIRMANIE: LE RÔLE DE L’UNION DANS UNE TRANSITION DÉMOCRATIQUE RÉUSSIE

    Le Myanmar/la Birmanie a connu une évolution remarquable depuis le lancement de réformes en 2011. L’arrivée au pouvoir, en avril 2016, d’un nouveau gouvernement démocratiquement élu constitue une opportunité historique. Il est dans l’intérêt stratégique de l’Union européenne d’apporter tout son soutien à la réussite du processus de transition vers une véritable gouvernance démocratique et un développement durable et de mobiliser, pour ce faire, l’ensemble de ses politiques et instruments.

    Le 8 novembre 2015, la population du Myanmar/de la Birmanie a voté, à une écrasante majorité, en faveur de l'abandon du régime militaire, en donnant à l’opposition, la Ligue nationale pour la démocratie (LND), une majorité absolue au Parlement. Htin Kyaw, l'allié d'Aung San Suu Kyi, a été élu à la présidence le 15 mars 2016. Il est le premier président civil du pays depuis plus de cinq décennies. Quant à elle, elle assume les fonctions de conseiller d’État, de ministre des affaires étrangères et de ministre du cabinet de la présidence.

    La nouvelle administration, dont l'expérience en matière de gouvernance est limitée, devra relever d'énormes défis. Elle devra notamment consolider la démocratie, promouvoir la paix et la réconciliation ethniques, faire progresser les réformes constitutionnelles, le renforcement des institutions et la réforme du secteur de la sécurité, et œuvrer en faveur de l’état de droit et des droits de l’homme. Le gouvernement de la LND devra répondre aux attentes considérables des citoyens en matière d'augmentation des revenus agricoles et d'amélioration des services de base grâce à une croissance économique et à un développement inclusif et durable.

    L’UE a joué un rôle crucial dans la transformation du pays

    Au cours des cinq dernières années, l’UE a joué un rôle premier plan dans les efforts déployés par la communauté internationale pour rétablir des relations avec le Myanmar/la Birmanie. Tenant compte des réformes menées par le gouvernement précédent, l’UE a adopté une approche globale vis-à-vis de la transition complexe du pays, en associant un dialogue sur les questions de fond et des instruments financiers et stratégiques. Elle a suspendu les sanctions et ouvert un bureau en 2012. En 2013, elle a levé les sanctions, ouvert une délégation de l'UE à part entière et réinstauré des préférences commerciales dans le cadre du régime «Tout sauf les armes». La même année, elle a défini ses priorités dans le «cadre global» 1 qui visait précisément à orienter sa politique dans la période qui a précédé les élections de novembre 2015, à l’occasion desquelles elle a déployé la plus grande mission d’observation électorale internationale.

    En 2012-2013, l’Union a augmenté son aide au développement en faveur du pays, avec une première dotation de 150 millions d’EUR, tandis qu’en décembre 2014, le programme indicatif pluriannuel 2014-2020 pour le Myanmar/la Birmanie 2 , financé au titre de l’instrument de coopération au développement, a été adopté avec une enveloppe indicative de 688 millions d’EUR. Pour favoriser l’efficacité de l’aide, l’UE et ses États membres mènent depuis 2013 une programmation conjointe dans le domaine de la coopération au développement 3 , qui devrait se poursuivre en étroite concertation avec le nouveau gouvernement afin de garantir une réponse cohérente de l’UE aux défis recensés.

    Avec l’arrivée d’un nouveau gouvernement démocratiquement élu, l’UE doit intensifier son action

    Dans ce contexte de démocratisation et d'évolution politique notable, les attentes sont grandes dans l'UE. L’Union a jeté un regard neuf sur sa stratégie afin de revoir son action dans les domaines de la démocratie et des droits de l’homme, du processus de paix, de l’économie et du développement durable.

    Il est également dans l'intérêt de l'UE de coopérer avec le nouveau gouvernement dans un contexte régional, en particulier en ce qui concerne l’intégration de l’ASEAN. Une transition démocratique réussie au Myanmar/en Birmanie constituera un exemple important et positif pour l’ensemble de la région.

    Il est évident que l’UE doit continuer de jouer un rôle particulier pour encourager ce qui est un exemple positif de réformes et de démocratisation dans un pays important sur le plan stratégique en Asie du Sud-Est et dans l’ensemble de la région Asie-Pacifique. Le fait de renforcer l’action de l’UE au Myanmar/en Birmanie et de travailler en étroite coopération avec le gouvernement sera également le meilleur moyen de faire avancer les réformes socio-économiques inclusives et d'optimiser les possibilités pour les entreprises de l’UE, à mesure que le pays progresse sur la voie des réformes. En résumé, l’UE a tout intérêt à ce que la transition en cours soit couronnée de succès et donc à contribuer à sa réalisation.

    La présente communication conjointe vise, pour l'UE, à définir une approche cohérente ainsi que des engagements concrets en matière de soutien sur les plans politique, de sécurité et du développement ainsi que d’engagement économique pour les années à venir.

    2. DOMAINES D’ACTION

    2.1 Démocratie, état de droit et bonne gouvernance

    Pour transformer le Myanmar/la Birmanie en une démocratie viable et respectant pleinement l’état de droit, l’UE devrait contribuer à mettre sur pied des institutions efficaces, soutenir la réforme du secteur de la sécurité et dialoguer davantage et différemment avec l’ensemble de la société (des autorités locales au secteur de la justice en passant par les parlements et la société civile). Par ailleurs, elle devrait nouer un dialogue avec les militaires au sujet de leur rôle dans une démocratie moderne et soutenir la modernisation et la transformation des services de police.

    Le paysage politique après les élections de novembre 2015

    Depuis sa victoire écrasante en 2015, la Ligue nationale pour la démocratie bénéficie d’une légitimité démocratique sans précédent et se trouve de facto investie d’un mandat clair pour présenter des réformes de grande ampleur. Plus de 400 nouveaux députés ont pris leurs fonctions le 1er février 2016 et ont besoin de se familiariser avec tous les aspects d’un parlement moderne.

    Les militaires occupent toujours 25 % des sièges au Parlement, ont un droit de veto sur les modifications apportées à la Constitution et conservent trois postes ministériels clés (ministères de l'intérieur, de la défense et des frontières). Le nouveau contexte invite l'armée à redéfinir son rôle dans une société démocratique.

    La mission d’observation électorale de l’UE a salué le bon déroulement du scrutin de novembre 2015 4 , le qualifiant d'ouvert, mais a souligné la nécessité de poursuivre les réformes. Le fait que les anciens titulaires d’une carte d’enregistrement temporaire (essentiellement des communautés ethniques) aient été privés de leur droit de vote est particulièrement préoccupant 5 . Sur la base des recommandations figurant dans le rapport final de la mission d’observation électorale de l’UE 6 , l'Union continuera à apporter un soutien pour renforcer l'efficacité, l'indépendance et la transparence de l'administration électorale ainsi que l'obligation pour celle-ci de rendre des comptes et pour améliorer l’appropriation du processus électoral par la population.

    L’état de droit et la bonne gouvernance constituent des priorités absolues pour le nouveau gouvernement. Les défis sont nombreux et les institutions manquent souvent de personnel et d'expertise en matière de processus législatifs. L’amélioration de l’état de droit aura pour effet de renforcer la confiance dans les institutions de l’État, d'accroître la transparence, de lutter contre la corruption et de consolider le rôle et l’indépendance du pouvoir judiciaire. La réforme du secteur de la sécurité, et notamment des services de police, fait partie intégrante de ce processus.

    D’une structure institutionnelle dirigée par l'armée vers une démocratie viable: le rôle de l’UE

    Les réformes constitutionnelles restent essentielles pour consolider la gouvernance démocratique. La Constitution de 2008 a joué un rôle déterminant dans le processus de transition et des réformes supplémentaires sont attendues. L’UE pourrait partager son expérience considérable en ce qui concerne le passage d’un régime autoritaire à la démocratie, en mettant l’accent sur les systèmes parlementaires multipartites et sur une participation accrue de la société civile et des médias indépendants.

    Le projet de l'UE en matière de formation de la police (2013-2015) a aidé les services de police du Myanmar à adopter une approche plus professionnelle, notamment au sein des communautés locales. Des mesures simples mais efficaces ont été prises pour améliorer tant le travail de la police au niveau des communautés que ses relations avec la population locale. Des agents de police expérimentés des États membres de l’UE ont montré comment garantir et protéger le droit démocratique des citoyens à se réunir librement. 4 000 agents de police ont été formés aux bonnes pratiques internationales de gestion des foules. L'un des volets du projet portait en outre sur les relations de la police avec les médias et la société civile afin de favoriser une meilleure compréhension mutuelle.

    Le programme MyJustice (2015-2019) améliore l’accès des populations pauvres, vulnérables et marginalisées à la justice dans l'ensemble du pays. Il donne aux collectivités, aux professionnels du droit et aux institutions judiciaires les moyens d'appliquer des approches novatrices, telles que la médiation au niveau des communautés et la fourniture de services d'assistance juridique. Myjustice est un programme axé sur les personnes, qui a pour objectif d'encourager l’apprentissage, la confiance et la collaboration entre tous les acteurs. Il permet aux communautés de trouver elles-mêmes des solutions adaptées aux problèmes juridiques qu’elles rencontrent et d'exercer une influence durable sur la façon dont les litiges sont résolus et dont la justice est rendue.

    L’UE collaborera avec la société civile afin de mettre en œuvre la feuille de route pour le dialogue avec la société civile, adoptée en septembre 2015. Les organisations de la société civile ont toujours joué un rôle essentiel dans la fourniture des services de base, en particulier dans les zones touchées par le conflit. Elles jouent également un rôle moteur dans la promotion et la protection de la démocratie, notamment en ce qui concerne les missions d’observation électorale au niveau national, les droits de l’homme et la diversité culturelle. La société civile se heurte néanmoins encore à de nombreuses restrictions.

    Les initiatives que l'UE pourrait mener dans ce domaine sont les suivantes:

    conclure un partenariat avec le gouvernement du Myanmar/de la Birmanie afin d’intensifier le dialogue politique et de répondre aux besoins qui se font jour en nouant un dialogue stratégique avec les institutions gouvernementales et en leur proposant une coopération technique en vue de renforcer l’appareil d’État. L’UE devrait coopérer avec un large éventail de partenaires — des associations citoyennes aux parlements en passant par les organisations de défense d'intérêts divers, les syndicats et les médias — afin de soutenir les efforts en faveur de la démocratie locale;

    nouer un dialogue avec les militaires afin de partager l’expérience de l’UE en ce qui concerne la transition démocratique et le rôle de l’armée dans une démocratie moderne, notamment en matière de respect des droits de l’homme et d’état de droit;

    améliorer l'accès des personnes pauvres et vulnérables à la justice et à l'aide juridique, développer les capacités juridiques des professionnels du secteur de la justice et renforcer certaines institutions chargées de faire respecter l'état de droit afin qu'elles soient mieux à même de remplir leur mandat;

    accroître le soutien aux forces de police du Myanmar afin de transformer celles-ci en une organisation moderne au service de la population et jouissant de la confiance de cette dernière, notamment en renforçant l'obligation de rendre des comptes conformément aux meilleures pratiques internationales ainsi que le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales et en poursuivant les efforts déployés pour soigner les relations avec les médias et les communautés locales;

    s'employer à parachever et à mettre en œuvre un plan d’action pour la démocratie avec le pays partenaire;

    prôner une coopération interparlementaire durable entre le Parlement européen et le Parlement du Myanmar afin de renforcer les capacités législatives, le contrôle des pouvoirs publics et les partis politiques, dans le cadre notamment de la stratégie globale de soutien à la démocratie adoptée par le Parlement européen.

    2.2 Le processus de paix

    La paix conclue récemment au Myanmar/en Birmanie est fragile. L’UE, seul témoin occidental de l’accord national de cessez-le-feu, devrait œuvrer, avec toutes les parties concernées, à la mise en place d'une architecture de paix inclusive, au désarmement, à la démobilisation et à la réintégration des anciens combattants. Pour soutenir la paix, l’UE partagera son expérience en matière de fédéralisme et s'emploiera à renforcer la confiance entre les parties et à favoriser leur réconciliation.

    Accord décisif pour mettre fin à un passé mouvementé

    Le Myanmar/la Birmanie a beaucoup souffert du conflit armé qui a sévi pendant des décennies entre les forces armées du Myanmar («Tatmadaw) et les groupes ethniques de cultures distinctes vivant dans des zones frontalières reculées et riches en ressources naturelles. Un grand nombre de ces territoires n’ont jamais été entièrement sous le contrôle du gouvernement central et jouissent, à différents niveaux, d’une autonomie administrative. Il existe des intérêts économiques dans des activités illicites telles que la contrebande, le commerce illégal de jade et de bois, la production d’opium et le trafic de drogue. Environ 100 000 personnes ont été déplacées depuis 2011 dans l'État de Kachin et dans le nord de l’État Shan et les affrontements en cours continuent d'entraîner des déplacements internes de populations et de faire des victimes. Quelque 106 000 réfugiés, appartenant principalement aux ethnies karen et karenni, vivent dans des camps du côté thaïlandais de la frontière. Les combats ont également entraîné des violations des droits de l’homme. La persistance de violations graves du droit humanitaire international a eu un effet déstabilisateur sur la population touchée.

    En 2011, le président Thein Sein a fait de la paix une priorité essentielle. Le 15 octobre 2015, le gouvernement et huit groupes ethniques armés ont conclu un accord national de cessez-le-feu, que l’UE a signé en tant que témoin international, tout comme les Nations unies, la Chine, le Japon, l’Inde et la Thaïlande. Certains groupes, notamment les Kachins, ne sont pas encore parties à l’accord. Un dialogue politique national portant sur des questions importantes et sensibles a été lancé en janvier 2016.

    Le processus de paix est une priorité absolue pour le nouveau gouvernement. L’instauration d’un climat de confiance entre les parties prenantes et le maintien de leur engagement seront indispensables. Les minorités ethniques attendent beaucoup de la Ligue nationale pour la démocratie en ce qui concerne la mise en place d'une union fédérale multiethnique et démocratique offrant un accès plus équitable aux débouchés économiques. En dernier lieu, un accord de paix global nécessitera des modifications de la Constitution.

    Consolidation d’une paix durable: la contribution de l'UE

    En tant que l’un des principaux donateurs en faveur du processus de paix, l'UE est bien placée pour continuer à contribuer à l’instauration d’une paix durable. Le Centre pour la paix au Myanmar, que l’UE soutient depuis sa création en 2012, a joué un rôle crucial à cet égard, amenant le gouvernement et les groupes ethniques armés à la table des négociations et fournissant des conseils d’experts à l'ensemble des parties concernées. Pour permettre au processus de paix de continuer à porter ses fruits, il est essentiel qu'il soit inclusif et que chacun y prenne part, y compris la société civile et les femmes. L'aide de l'UE a profité essentiellement aux groupes ethniques. Les activités sont axées sur le développement des communautés dans les zones de conflit, la réconciliation, la consolidation de la paix, la mise en œuvre des cessez-le-feu et le contrôle de ceux-ci par des civils. D’autres projets visent à améliorer l’accès aux moyens de subsistance, à réduire la pauvreté et à développer les régions ethniques. L’UE a pris la tête des efforts déployés pour mettre en place le nouveau fonds commun multidonateurs pour la paix, qui vise à soutenir le processus de paix de manière plus coordonnée.

    Le nouveau fonds commun pour la paix soutient les efforts menés au niveau national pour parvenir, de manière flexible, réactive et cohérente, à un règlement durable du conflit armé ethnique. Il travaillera de concert avec le gouvernement, les groupes ethniques, la société civile et le monde universitaire et encouragera la participation des femmes. Les activités de consolidation de la paix serviront à renforcer l’inclusion, la confiance et la participation dans le processus de paix et contribueront à garantir la sécurité des communautés vulnérables. Le fonds commun pour la paix a commencé ses activités en avril 2016, avec plus de 100 millions d'USD promis par l’UE et neuf autres donateurs.

    L’UE est déterminée à veiller à ce que toutes les activités financées tiennent compte des situations conflictuelles et du principe visant à «ne pas nuire» et qu'elles soient mises en œuvre de manière inclusive, transparente et impartiale.

    Par ailleurs, l'Union continue d’apporter une aide humanitaire dans des zones difficiles d'accès qui sont touchées par le conflit et par des déplacements de populations. Un accès humanitaire sans restrictions à toutes les populations victimes du conflit est essentiel.

    Les initiatives qui pourraient être menées dans ce domaine sont les suivantes:

    fournir un soutien politique et financier important en faveur d’une architecture de paix inclusive, notamment par la mise en œuvre de l'accord national de cessez-le-feu, tout en encourageant les efforts visant à inciter les groupes qui n’ont pas encore signé cet accord à le faire;

    mener des activités de prévention des conflits et de consolidation de la paix, en soutenant, par exemple, des mesures de renforcement de la confiance, la participation des communautés, le dialogue interculturel, la participation des femmes, le développement inclusif et l’amélioration des moyens de subsistance dans les régions ethniques, au besoin en établissant un lien entre l’aide d’urgence, les mesures de redressement et le développement;

    renforcer les capacités de l’ensemble des parties prenantes à faire face aux difficultés inhérentes au processus, y compris en ce qui concerne la réforme du secteur de la sécurité et le désarmement, la démobilisation et la réintégration;

    soutenir la sensibilisation aux problèmes posés par les mines et appuyer le déminage et les activités connexes;

    contribuer au débat mené au Myanmar/en Birmanie sur le transfert des pouvoirs exécutifs aux autorités locales et sur la décentralisation, sur la base des différents modèles appliqués dans les États membres de l’UE;

    fournir des exemples comparatifs d'expériences en matière de dialogues menés au niveau national après un conflit, que ce soit dans l’UE ou dans des pays tiers.

    2.3 Droits de l'homme

    Le Myanmar/la Birmanie devra régler plusieurs problèmes relatifs aux droits de l’homme, en particulier en ce qui concerne la situation dans l’État de Rakhine, où les minorités musulmanes se heurtent à diverses formes de discrimination. L’UE devrait s'attacher, avec le gouvernement, à lutter contre les discours de haine et l’intolérance. Il convient de mettre en œuvre les résolutions sur les droits de l’homme et d'aligner la législation sur les normes internationales.

    Malgré les progrès importants qui ont été accomplis, la défense des droits de l’homme reste l’une des principales difficultés du pays.

    La transition du pays a indiscutablement entraîné une évolution positive en termes de droits de l’homme. Des mesures ont été prises pour libérer les prisonniers politiques, faire progresser la liberté d’expression, de réunion et d’association et lutter contre le travail forcé. Le pays a engagé des dialogues sur les droits de l’homme avec l’Union européenne, le Japon et les États-Unis, tout en développant la coopération avec les Nations unies 7 , notamment avec le Rapporteur spécial sur les droits de l'homme, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme et l’Organisation internationale du travail.

    Même si des progrès ont été accomplis, des militants, des journalistes et même de simples citoyens continuent à être victimes d’arrestations et de détentions arbitraires pour avoir exercé leurs droits civils et politiques. Les communautés musulmanes ont été la cible d'incitations à la haine et de discours de haine. En dépit des fortes critiques internationales, un ensemble de projets de loi discriminatoires intitulés «projets de loi relatifs à la protection de la race et de la religion» et portant sur la conversion religieuse, les mariages interreligieux, la monogamie et le contrôle démographique ont été adoptés en 2015.

    Des progrès restent à faire dans tous les domaines, notamment en ce qui concerne l'adhésion aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, la réforme judiciaire, le renforcement des institutions et des capacités et la sensibilisation à la situation générale des droits de l’homme. Compte tenu de l’héritage du passé, il convient tout particulièrement d'améliorer l’indépendance du pouvoir judiciaire, l’accès à la justice, les droits des femmes et l’égalité des sexes, ainsi que les droits des enfants, eu égard notamment à l'utilisation persistante d’enfants-soldats. La libération de plus de 280 prisonniers politiques par le nouveau gouvernement dans les premières semaines suivant son arrivée au pouvoir montre clairement que celui-ci est attaché aux libertés fondamentales.

    Le principal problème en matière de droits de l’homme au Myanmar/en Birmanie reste la situation dans l’État de Rakhine, où la minorité musulmane qui se définit comme des Rohingya se heurte à de multiples formes de discrimination et dont les membres sont le plus souvent apatrides. Ils se voient refuser le droit à la liberté de mouvement et n'ont pas accès aux services de base et aux moyens de subsistance. Quelque 120 000 musulmans restent internés dans des camps à la suite de violences intercommunautaires qui ont eu lieu en 2012. Seuls quelques-uns d’entre eux ont été autorisés à rentrer chez eux ou à s'installer ailleurs. La ségrégation continue de régir la vie des communautés. Les populations déplacées à l’intérieur du pays et d'autres populations vulnérables dépendent de l’aide humanitaire, notamment de celle qui est fournie par l’UE.

    Cette situation précaire a contraint des dizaines de milliers de personnes à fuir le pays par voie maritime ou terrestre, ce qui en fait des proies faciles pour les réseaux de passeurs et de traite d'êtres humains. La crise migratoire de 2015 en mer d’Andaman a poussé la Thaïlande, la Malaisie et l’Indonésie à lancer une initiative régionale pour trouver des solutions. Le Bangladesh a accueilli environ 500 000 Rohingyas. Le nouveau gouvernement devra montrer la voie en développant l'ensemble de l'État, sans exclusive, et en améliorant la situation des droits de l’homme. Faute de solution, la situation risque de compromettre la transition démocratique et de ternir l’image du nouveau Myanmar/de la nouvelle Birmanie.

    Une priorité essentielle pour l’UE: agir efficacement

    Pour relever les défis complexes dans l’État de Rakhine, l’UE a adopté une approche globale en mobilisant tous les instruments dont elle dispose (dialogue politique, aide humanitaire et coopération au développement), en étroite coordination avec les autorités et les communautés locales.

    L’UE demeure résolue à améliorer la situation des défenseurs des droits de l’homme, les droits des minorités et des groupes vulnérables ainsi que les droits économiques et sociaux.

    La participation active du représentant spécial de l’UE pour les droits de l’homme souligne la ferme volonté de l’UE d'aider le pays à progresser en matière de droits de l’homme. L’UE a présenté des résolutions sur la situation des droits de l’homme à l’Assemblée générale des Nations unies et au Conseil des droits de l’homme.

    Les initiatives qui pourraient être menées dans ce domaine sont les suivantes:

    travailler avec le gouvernement à la réponse à apporter aux préoccupations relatives aux droits de l’homme exposées dans les résolutions de l'Assemblée générale des Nations unies et du Conseil des droits de l’homme et à la signature et à la ratification des principales conventions internationales relatives aux droits de l’homme; créer un bureau du Haut-commissariat des Nations unies aux droits de l’homme; et coopérer dans le cadre des procédures spéciales des Nations unies et avec l’Organisation internationale du travail;

    nouer un dialogue avec le gouvernement et le Parlement afin d'aligner la législation, qu'elle soit nouvelle ou existante, sur les normes internationales relatives aux droits de l’homme et abroger les lois obsolètes;

    encourager le gouvernement à prendre la tête des efforts visant à lutter contre la pauvreté et à favoriser un développement inclusif dans l’État de Rakhine et dans d’autres régions ethniques au moyen d'une approche globale. Les restrictions à la libre circulation doivent être levées et les dispositions locales discriminatoires vis-à-vis des minorités doivent être abrogées. Les acteurs humanitaires et du développement doivent se voir accorder un accès plus large aux populations touchées;

    sensibiliser davantage à la situation générale des droits de l’homme, et promouvoir notamment les droits économiques, sociaux et culturels, ainsi que le respect des droits fondamentaux, notamment des libertés de parole, d’expression, d’association et de réunion ou encore la liberté de religion ou de conviction; partager l'expérience acquise dans la lutte contre les discours de haine et l’intolérance à l'égard des minorités;

    militer pour l’élimination du statut d’apatride, avec des droits égaux pour tous les citoyens et la délivrance de papiers d’identité.

    2.4. Réduction de la pauvreté et développement durable

    Le Myanmar/la Birmanie figure parmi les pays les plus pauvres du monde. La transition ouvre la voie à une intensification de la coopération au développement de l’UE dans des domaines tels que l’éducation, le développement rural et la gouvernance, passant notamment par des actions d'appui budgétaire de grande ampleur en 2016 et au-delà. La coopération technique ciblée sera également élargie pour soutenir la réalisation des objectifs de développement durable (ODD) ainsi que pour aider le pays à tirer parti des possibilités offertes par le programme Erasmus+ et le programme de recherche de l’UE «Horizon 2020».

    Un pays en transition cherchant à briser le cercle vicieux de la pauvreté

    Le Myanmar/la Birmanie figure parmi les pays les moins avancés et se classe en 148e position sur 189 pays selon l'indice du développement humain pour 2015 du Programme des Nations unies pour le développement. Le taux de pauvreté est estimé à 37,5 % 8 , le plus élevé de l’Asie du Sud-est. 60 % des habitants du pays vivent dans les zones rurales, où la pauvreté est concentrée de façon disproportionnée. Le PIB par habitant est de 1 204 USD 9 . Le Myanmar/la Birmanie a l’espérance de vie la plus faible et le deuxième taux le plus élevé de mortalité infantile et juvénile de tous les pays de l’ASEAN. Plus d’un tiers des enfants souffrent de malnutrition chronique. Moins d’un tiers de la population a accès à l’électricité.

    Le pays est sujet aux catastrophes naturelles et est extrêmement vulnérable aux effets du changement climatique. En raison du faible niveau actuel de préparation aux catastrophes, les chocs extérieurs peuvent avoir une incidence majeure sur la résilience de la population et sur l’économie.

    Le gouvernement espère arriver à une paix durable et à remettre l’économie sur les rails afin de transformer le Myanmar/la Birmanie en un pays à revenu intermédiaire. Le nouveau gouvernement devrait concentrer ses efforts de développement sur la réduction de la pauvreté, la création d’emplois, la durabilité et l’inclusion, par le maintien de taux de croissance élevés, le renforcement du capital humain, l'amélioration des services sociaux, la réduction des incidences sur l’environnement et le renforcement de la résilience. Le développement rural, y compris la sécurité alimentaire et nutritionnelle, la réforme foncière, l’éducation et la santé sont des priorités absolues. La réduction des risques de catastrophe à tous les niveaux devrait être inscrite à l’ordre du jour. Le renforcement des droits fonciers sera un autre enjeu pour le nouveau gouvernement qui devra notamment remédier aux injustices résultant de la confiscation des terres.

    L’UE devrait montrer la voie en adoptant un programme de coopération au développement ambitieux et ciblé

    L'UE est un partenaire de premier plan des efforts déployés par le Myanmar/la Birmanie pour réaliser ses objectifs de développement durable définis dans le Programme de développement durable à l'horizon 2030 10 . Dans le cadre de la coopération bilatérale au développement au titre du programme indicatif pluriannuel 2014-2020 11 (688 millions d’EUR), l’UE continue de soutenir le programme de réforme du pays dans quatre secteurs: 1) le développement rural, l’agriculture et la sécurité alimentaire et nutritionnelle; 2) l'éducation; 3) la gouvernance, l’état de droit et le renforcement des capacités de l'État; et 4) le soutien au maintien de la paix 12 . L’UE peut fournir au gouvernement une coopération technique supplémentaire, à la fois ciblée et souple, en ce qui concerne les politiques clés. Une coordination efficace entre les donateurs reste essentielle pour éviter les doubles emplois et la fragmentation de l’aide.

    Le fonds multilatéral d’affectation spéciale pour les moyens de subsistance et la sécurité alimentaire (LIFT) 13 a été mis en place pour répondre aux besoins en matière de redressement rapide et de réhabilitation au lendemain du passage dévastateur du cyclone Nargis (2008). Au fil des ans, LIFT a progressivement élargi le champ de ses activités et s'est adapté aux changements intervenus au Myanmar/en Birmanie dans le but d’améliorer les conditions de vie des petits exploitants et des populations pauvres sans terres des zones rurales. Quelque 330 millions d’EUR, dont 115 millions d’EUR proviennent de l’UE, ont été engagés pour soutenir plus de trois millions de personnes par l’intermédiaire de 90 projets. Les projets LIFT contribuent à de meilleures récoltes et à l’amélioration de l’accès au crédit et aux marchés. En conséquence, le revenu des ménages ciblés a augmenté et la sécurité alimentaire et nutritionnelle a été améliorée. LIFT est un modèle de bonne pratique pour la transformation économique rurale inclusive.

    Une stratégie et un plan d'action nationaux de lutte contre le changement climatique, qui bénéficient du soutien de l'Alliance mondiale contre le changement climatique+ par l'intermédiaire de l'Alliance du Myanmar contre le changement climatique, sont en cours d’élaboration pour intégrer l’adaptation au changement climatique dans la politique de développement et le programme de réforme du Myanmar/de la Birmanie et promouvoir la planification et l’élaboration de politiques reposant sur des données factuelles. Cela permettra au Myanmar/à la Birmanie de s'orienter vers une économie plus verte et plus résiliente.

    En recourant à des instruments de financement mixte (combinant des subventions et d'autres ressources d'un autre type), notamment à la facilité d’investissement pour l’Asie, l’UE fait un usage plus stratégique de ses subventions pour exercer un effet de levier et mobiliser des sources de financement s de banques de développement et d'institutions financières européennes et autres, ainsi que du secteur privé afin d'accroître l'incidence des projets d'investissement sur le développement. La Banque européenne d’investissement a signé un accord-cadre avec le Myanmar/la Birmanie en mars 2015 et plusieurs projets d’investissement sont en préparation.

    Les initiatives qui pourraient être menées dans ce domaine sont les suivantes:

    renforcer l’efficacité de l’aide grâce à une meilleure coordination des donateurs et à un appui budgétaire en tant qu’expression du soutien sans faille de l’UE au nouveau gouvernement;

    élaborer, avec les États membres, un nouveau document de programmation conjointe de l’UE qui s’aligne sur les priorités du nouveau gouvernement;

    promouvoir les possibilités offertes par le programme Erasmus+, notamment pour échanger des étudiants, des chercheurs et du personnel universitaire, et renforcer la coopération avec le ministère responsable et les universités afin de contribuer à la modernisation de l’enseignement supérieur;

    établir des liens entre la science, la recherche et l’innovation et les besoins de développement du pays par l’intermédiaire du programme de recherche de l’UE Horizon 2020, et favoriser la coopération en matière de recherche au niveau régional;

    intégrer la lutte contre le changement climatique, l'égalité hommes-femmes et les objectifs de développement durable dans toutes les nouvelles actions de coopération au développement.

    2.5. Action dans le secteur économique

    Si le Myanmar/la Birmanie parvient à relever les défis importants qui subsistent, sa transition peut lui ouvrir de vastes possibilités économiques et commerciales. L’UE est idéalement placée pour soutenir cette transition et contribuer à exploiter ces possibilités. Elle s’efforcera de conclure les négociations concernant l’accord sur la protection des investissements, contribuera à améliorer le cadre réglementaire et les normes de travail, et préparera les négociations en vue d'un accord de partenariat volontaire (APV) sur l'application des réglementations forestières, la gouvernance et les échanges commerciaux (FLEGT).

    Un pays au potentiel économique considérable attendant d’être concrétisé

    Le Myanmar/la Birmanie occupe une position stratégique entre l’Inde et la Chine. Il a la chance de posséder d’abondantes ressources naturelles (terres, eau, forêts, combustibles fossiles, minerais et pierres précieuses) et une main-d’œuvre jeune (55 % de la population a moins de 30 ans). Avec une population de 51,5 millions d’habitants, il constitue un marché qui représente un potentiel important pour les exportateurs et les investisseurs européens. Le Myanmar/la Birmanie est également membre de l’ASEAN, où vivent plus de 600 millions de personnes, et bénéficiera du processus ambitieux d’intégration économique. Les possibilités de moderniser, diversifier et libéraliser l’économie dans pratiquement tous les secteurs ne manquent pas. Le pays est également le marché du tourisme dont la croissance est la plus rapide dans la région.

    L’attrait du Myanmar/de la Birmanie en tant que destination d’investissement va néanmoins de pair avec un certain nombre de défis. Le pays est toujours classé au 167e rang sur 189 pays dans l’indice de la facilité à faire des affaires de la Banque mondiale pour 2016. Les aspects juridiques et réglementaires, en particulier dans le domaine de la protection des investisseurs et de l’exécution des contrats, l’accès aux services financiers et la création d’entreprises sont reconnus comme autant de difficultés à surmonter Selon le rapport 2014 de la Banque mondiale sur l'évaluation du climat d'investissement au Myanmar, l’accès au financement, aux terres, à l’électricité et aux travailleurs qualifiés constituent des obstacles majeurs pour les opérateurs commerciaux.

    Les exportations sont dominées par les ressources naturelles, notamment le gaz (40 %), qui offrent peu de possibilités de création d’emplois et de liens avec les secteurs tournés vers le marché national. Bien que les coûts du travail soient parmi les plus faibles d’Asie 14 , la productivité est également très basse. Le rythme dramatique de la déforestation 15 , principalement due à l’exploitation illégale des forêts, est particulièrement préoccupant sur le plan environnemental et économique. Enfin, la persistance de conflits ethniques continue à réduire sensiblement les possibilités de développement économique durable dans de nombreuses parties du pays.

    Des mesures ont été prises au cours des deux à trois dernières années pour réaliser des réformes fondées sur le marché et créer un environnement plus favorable aux entreprises, notamment des réformes budgétaires et fiscales, la libéralisation du contrôle des changes, la suppression des licences d’exportation pour quelque 4 000 produits, l'autorisation d'une participation étrangère de 100 % dans certains secteurs et l’établissement de zones économiques spéciales. À la suite de ces premières réformes, l’investissement direct étranger est passé de 3,2 milliards d’USD en 2013/2014 à environ 8 milliards d'USD en 2014/2015, principalement stimulé par le secteur du gaz, les télécommunications et l’industrie manufacturière. En 2014/2015, l'économie a enregistré une croissance de 8,5 % et selon les prévisions, la croissance annuelle pour les cinq prochaines années devrait s’élever à 7,9 %. Le pays est bien placé pour développer son secteur manufacturier à forte intensité de main-d’œuvre peu qualifiée, indispensable à la croissance de l’emploi, et pourrait, ainsi que cela a été le cas dans d’autres pays asiatiques, libéraliser les marchés agricoles pour accélérer la réduction de la pauvreté.

    L’UE favorise l’adoption d’un cadre pour des possibilités d’échanges et d’investissements mutuellement avantageux et respectueux des normes du travail

    L’UE et le Myanmar/la Birmanie possèdent des économies fortement complémentaires. L’UE a joué un rôle déterminant pour stimuler le développement commercial et économique du pays en supprimant les sanctions 16 et en rétablissant ses préférences commerciales dans le cadre du régime «Tout sauf les armes» en 2013. Les échanges bilatéraux ont représenté 1,2 milliard d’EUR en 2015 contre 404 millions d’EUR en 2012. Les exportations vers l’UE ont quadruplé entre 2012 et 2015, passant de 165 millions d'EUR à 675 millions d’EUR. Le textile représente plus de 60 % des exportations du Myanmar/de la Birmanie vers l’UE. Les machines et les appareils électriques représentent près de la moitié des exportations de l’UE. Au fur et à mesure de son développement, le pays aura besoin de davantage de biens d’équipement pour les infrastructures et le secteur manufacturier, offrant ainsi davantage d'opportunités aux entreprises européennes. Depuis 2011, les exportations de services de l’UE vers le Myanmar/la Birmanie ont été multipliées par six - même si le niveau de départ était très bas. Le secteur des services devrait se développer rapidement.

    Selon les statistiques officielles du pays (en janvier 2016), l’UE était le 4e plus grand investisseur étranger en 2015. Cependant, avec moins de 10 % de l’investissement total, elle demeure toujours loin derrière la Chine, Singapour et Hong Kong. Elle travaille à la conclusion d’un accord de protection des investissements en vue de permettre aux entreprises européennes de tirer parti de toutes les potentialités offertes par l’économie du pays.

    Des négociations en vue d’un accord sur la protection des investissements ont été ouvertes en mars 2014. Dès qu'il sera en vigueur, cet accord permettra de créer des conditions de concurrence équitables pour tous les investisseurs de l’UE et garantira la protection et le traitement équitable des investissements des deux parties; il favorisera également la transparence et la bonne conduite administrative en ce qui concerne les mesures ayant une incidence sur l’investissement. Cet accord a également pour but de protéger les droits des travailleurs et l’environnement, ainsi que de stimuler un comportement responsable des entreprises. Conjointement avec d’autres initiatives de l’UE en matière de gouvernance, d’état de droit et de consolidation de l’État, cet accord améliorera la sécurité juridique et la prévisibilité des investissements, créant ainsi des débouchés commerciaux et assurant le développement bien nécessaire. Une évaluation de l'impact sur le développement durable 17 fournit une analyse approfondie de l'impact potentiel de l’accord dans les domaines économique, social, environnemental et des droits de l’homme.

    L’UE a démontré sa ferme volonté d’œuvrer avec le gouvernement, l’Organisation internationale du travail et d’autres partenaires (par exemple les États-Unis et le Japon) en matière de droits du travail et de responsabilité sociale des entreprises en adhérant, en mai 2015, à l’initiative visant à promouvoir les droits et pratiques fondamentaux du travail au Myanmar. Grâce à cette initiative, l’UE entend contribuer à garantir le respect des droits fondamentaux des travailleurs et des conditions de travail décentes, et encourager des relations solides entre le gouvernement, les entreprises et les salariés et les autres parties prenantes. Elle crée également des opportunités pour les entreprises locales et contribue à transformer le pays en un partenaire commercial et d’investissement attractif. Des approches plurilatérales telles que l’initiative phare de l'UE dans le domaine du textile, peuvent contribuer à un comportement responsable des entreprises dans le secteur du textile. L’UE encourage par ailleurs le nouveau gouvernement à mettre l’accent sur la réforme foncière et l'amélioration des droits du travail, notamment des conditions de travail de quelque deux millions de travailleurs migrants en Thaïlande, ainsi que sur la lutte contre le travail forcé. Le Myanmar/la Birmanie s'intègre de plus en plus dans des chaînes d’approvisionnement au niveau mondial, rendant la promotion du travail décent et de la sécurité sur les lieux de travail plus importante que jamais.

    L’UE, par son soutien spécifique financé au titre des programmes UE-ASEAN, par exemple, renforcera son action en faveur du développement du commerce et du secteur privé afin d'améliorer les capacités en ce qui concerne les chaînes de valeur, la réforme du commerce, la facilitation et la promotion des échanges, la gestion de la qualité des exportations, la protection des consommateurs, ainsi que la production et la diffusion de statistiques officielles. L’UE entend s’impliquer dans la formation professionnelle afin de contribuer à la faire répondre aux besoins du marché du travail. L'Eurochambre, qui a été créée récemment, peut jouer un rôle important en représentant les intérêts commerciaux de l’UE dans le pays.

    Les initiatives qui pourraient être menées dans ce domaine sont les suivantes:

    soutenir les réformes destinées à améliorer le cadre juridique et réglementaire, ce qui permettra d’accélérer l’investissement direct étranger et facilitera l’intégration du pays dans la Communauté économique de l’ASEAN;

    conclure et mettre en œuvre l’accord sur la protection des investissements, ce qui améliorerait l’environnement d’investissement et renforcerait l’engagement envers des investissements responsables et une croissance durable;

    encourager les efforts de libéralisation du secteur agricole;

    concevoir des initiatives de sensibilisation spécifiques et efficaces pour favoriser la collaboration entre les entreprises;

    soutenir la participation aux chaînes d’approvisionnement au niveau mondial par la promotion du comportement responsable des entreprises, de la responsabilité sociale des entreprises et du travail décent, ainsi que l’adhésion à des conventions internationales du travail et de l’environnement, et contribuer ainsi à un climat favorable et au développement durable;

    renforcer les services et les politiques de l’emploi du pays, grâce à la réforme du droit du travail, au développement des capacités et à la consultation des parties prenantes, dans le cadre, notamment, de l’initiative visant à promouvoir les droits et pratiques fondamentaux du travail au Myanmar;

    travailler avec le gouvernement à la mise au point d'un système d'enseignement et de formation professionnels (EFP) en vue de donner un rôle fort au secteur privé;

    procéder à des préparatifs en vue d’une participation éventuelle au processus des accords de partenariat volontaire FLEGT permettant de renforcer la transparence et la durabilité en matière de commerce des produits du bois. Des actions de sensibilisation à la gouvernance forestière et des actions d'information à l'intention de la société civile et du secteur privé ont débuté en 2014. Les progrès dépendront des résultats du processus de paix, étant donné que de vastes zones forestières sont situées dans des régions ethniques.

    3. LE MYANMAR/LA BIRMANIE AU SEIN DE L’ASEAN ET DE LA RÉGION

    La transition du pays ouvre de nouvelles perspectives de coopération régionale entre l’UE et l’ASEAN et entre l’UE et les pays du bas Mékong.

    De l’isolement à un acteur régional actif

    Le Myanmar/la Birmanie est rapidement devenu un membre respecté de la communauté internationale au fur et à mesure de sa progression vers la démocratie et du rétablissement de ses relations avec le reste du monde. Le pays a adhéré à l’ASEAN en juillet 1997 et en a assuré la présidence avec succès en 2014. Au cours des décennies d’isolement, l’ASEAN a fourni une plateforme importante pour les contacts avec les pays de la région et d’autres puissances extérieures. La création officielle de la Communauté de l’ASEAN en 2015 peut contribuer au développement économique du pays et à son intégration dans la région.

    L’ouverture du pays a déjà entraîné un rééquilibrage de ses relations extérieures, qui a eu globalement pour effet une diversification de ses relations essentielles avec la Chine et l’Inde. Le nouveau gouvernement devrait donner un nouvel élan au repositionnement du pays dans une région Asie-Pacifique en rapide évolution et saisir les opportunités tout en préservant ses intérêts nationaux et son autonomie et en maintenant de bonnes relations avec les pays voisins.

    Un partenariat renforcé permettra de faire progresser les intérêts stratégiques de l’UE dans la région Asie-Pacifique

    L’UE œuvrera à la mise en œuvre du projet de Communauté économique de l’ASEAN 2025, avec un nouveau programme phare UE-ASEAN, ARISE+, axé sur la facilitation des échanges, les normes, les douanes et le transport, l’aviation civile, les droits de propriété intellectuelle, les statistiques et la surveillance de l'intégration. L’UE soutient activement la coopération entre pays du bas Mékong grâce au dialogue politique et à la coopération au développement, particulièrement dans le domaine de la gestion durable des ressources naturelles et de la problématique sécurité alimentaire-énergie-eau.

     

    Le Myanmar/la Birmanie et l’UE sont membres du Forum régional de l’ASEAN (FRA), qui offre la possibilité d'une coopération plus complète sur les questions liées à la défense et à la sécurité dans la région Asie-Pacifique. L’UE et le Myanmar/la Birmanie ont coprésidé la réunion du groupe intersessions de soutien du FRA consacré aux mesures de renforcement de la confiance et à la diplomatie préventive, ainsi que le dialogue des responsables de la défense qui ont eu lieu en décembre 2013 à Yangon et en avril 2014 à Bruxelles. Cela a fourni une bonne occasion de collaborer avec les hauts diplomates du pays ainsi qu'avec les responsables de la défense, jetant ainsi les bases d’une coopération plus poussée. L’ASEM (dialogue Asie-Europe) est l'autre enceinte multilatérale où l’UE et le Myanmar/la Birmanie coopèrent. Les deux parties auront amplement la possibilité de renforcer leur coopération à l’avenir, en particulier au vu de la décision du Myanmar/de la Birmanie d’accueillir la 13e réunion des ministres des affaires étrangères de l’ASEM en 2017.

    Le repositionnement du Myanmar/de la Birmanie sous la houlette du nouveau gouvernement au sein de l’ASEAN et au-delà offrira de bonnes perspectives d’approfondir la coopération avec l’UE. Il sera par exemple largement possible pour le pays de jouer un rôle plus actif dans le renforcement de la coopération entre l’UE et l’ASEAN dans les domaines prioritaires et d'accroître sa visibilité et son importance stratégique.

    La stabilité et la prospérité du Myanmar/de la Birmanie constitueront également un exemple encourageant de transition politique réussie qui renforcera davantage le processus d’intégration de l’ASEAN, conformément aux priorités établies dans la communication conjointe de l’UE de 2015 sur les relations UE-ASEAN 18 et dans les conclusions subséquentes du Conseil 19 ainsi qu'aux priorités stratégiques de l’UE dans la région Asie-Pacifique.

    Les initiatives qui pourraient être menées dans ce domaine sont les suivantes:

    entamer le dialogue avec le Myanmar/la Birmanie pour travailler conjointement sur le fond d’un éventuel partenariat stratégique UE-ASEAN, prévoyant un plus grand rôle pour l’Union dans tous les forums régionaux menés par l'ASEAN;

    poursuivre le soutien sans faille en faveur de l'intégration de l’ASEAN, ce qui contribuera à favoriser la croissance économique et le développement au Myanmar/en Birmanie, en portant une attention particulière aux pays du bas Mékong, notamment à la gestion des ressources naturelles, afin de supprimer les écarts au sein de l'ASEAN.

    4. CONCLUSION

    La présente communication conjointe expose clairement les priorités et les éléments clés d'une coopération ambitieuse et tournée vers l'avenir entre l'UE et le Myanmar/la Birmanie en vue de continuer à soutenir efficacement le nouveau gouvernement élu démocratiquement dans ses efforts pour renforcer la démocratie, transformer l’économie et renforcer la justice sociale. L’UE devrait tirer pleinement parti de tous les instruments dont elle dispose pour relever les défis que pose encore le processus de transition, notamment l’apatridie, la discrimination et les violations des droits de l’homme, qui, s’ils sont ignorés, risquent de mettre en péril les progrès accomplis. Les nouveaux domaines de coopération impliquent de travailler directement avec les autorités pour ce qui concerne les réformes et l’élaboration des politiques dans le cadre d'initiatives de renforcement de l’État. L’UE a l’intention d’établir le dialogue avec l’armée, qui reste un acteur politique influent, en partageant son expérience en ce qui concerne la transition démocratique et le rôle de l’armée dans une démocratie moderne. Dans le cadre du processus de paix, le dialogue politique national offre la possibilité de coopérer avec toutes les parties prenantes sur les questions du fédéralisme, du transfert des pouvoirs exécutifs aux autorités locales et de la décentralisation. Il n’y aura pas de paix durable sans un accord sur ces principes. Le soutien apporté par l'UE au processus de paix, au moyen du fonds commun pour la paix, lui permettra de travailler simultanément avec les représentants du gouvernement et des minorités ethniques pour répondre aux besoins des populations touchées par le conflit et, notamment, de relever de nouveaux défis comme la réforme du secteur de la sécurité. La conclusion de l’accord sur la protection des investissements entre l'UE et le Myanmar/la Birmanie stimulera l’intérêt des entreprises européennes pour une région stratégique et contribuera à une croissance inclusive et durable. Le succès de la transition démocratique du Myanmar/de la Birmanie renforcera l’intégration de l’ASEAN et favorisera le rôle stratégique de l’UE dans la région Asie-Pacifique.

    La haute représentante et la Commission invitent le Conseil et le Parlement européenà approuver les initiatives présentées dans la présente communication conjointe et à œuvrer de concert pour renforcer l’engagement de l’UE en faveur de la transition démocratique historique du Myanmar/de la Birmanie.

    (1) https://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/EN/foraff/138272.pdf   
    (2) http://eeas.europa.eu/delegations/myanmar/documents/eu_myanmar/eu-multi-annual-indicative-programme-2014-2020_en.pdf  
    (3) http://eeas.europa.eu/delegations/myanmar/documents/eu_myanmar/joint-eu-development-partners-transitional-strategy-for-myanmar-2014-2016_en.pdf   
    (4) http://www.eueom.eu/files/dmfile/101115-ps-myanmar_en.pdf.  
    (5) Il s’agissait notamment de restrictions abusives portant sur les droits de vote et d’éligibilité et d'incertitudes relatives à l’indépendance de la commission électorale de l’Union du Myanmar/de Birmanie.
    (6) http://eeas.europa.eu/eueom/missions/2015/myanmar/index_en.htm.   
    (7) Le Myanmar/la Birmanie a signé le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et le protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant la participation d’enfants aux conflits armés en 2015. Les progrès réalisés dans la mise en œuvre du plan d’action de 2012 pour mettre un terme à l'enrôlement et à l’utilisation d’enfants soldats par les forces armées ont débouché, depuis 2012, sur la libération de quelque 700 mineurs enrôlés.
    (8) http://www.worldbank.org/content/dam/Worldbank/document/EAP/Myanmar/WBG_SCD_Full_Report_English.pdf  
    (9) http://data.worldbank.org/indicator/NY.GDP.PCAP.CD   
    (10) https://sustainabledevelopment.un.org/post2015/transformingourworld   
    (11) http://eeas.europa.eu/delegations/myanmar/documents/eu_myanmar/eu-multi-annual-indicative-programme-2014-2020_en.pdf   
    (12) Les programmes et instruments régionaux et thématiques de l’Union complètent ce programme dans des domaines tels que le commerce, les infrastructures, l’environnement, le changement climatique, la réduction des risques de catastrophe, le développement du secteur privé et la gouvernance.
    (13) www.lift-fund.org   
    (14) 100 USD contre 181 USD par mois pour le Viêt Nam selon la Banque asiatique de développement.
    (15) Les zones forestières sont passées de 59 % en 1992 à 48 % en 2012, ce qui s’est traduit par la perte d’habitats riches en espèces, tels que les forêts de mangrove, les zones humides et les prairies, menaçant la vie sauvage et les écosystèmes.
    (16) L’UE maintient un embargo sur les armes et les équipements susceptibles d’être utilisés à des fins de répression interne.
    (17) http://www.eu-myanmarsia.com/guide.php?id=6   
    (18) «L'UE et l'ASEAN: un partenariat à visée stratégique», JOIN(2015) 22 du 18.5.2015.
    (19) http://www.consilium.europa.eu/fr/press/press-releases/2015/06/22-fac-asean-conclusions/
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