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Document 52015IP0457

Résolution du Parlement européen du 16 décembre 2015 contenant des recommandations à la Commission en vue de favoriser la transparence, la coordination et la convergence des politiques en matière d'impôt sur les sociétés au sein de l'Union (2015/2010(INL))

JO C 399 du 24.11.2017, p. 74–91 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

24.11.2017   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 399/74


P8_TA(2015)0457

Favoriser la transparence, la coordination et la convergence des politiques en matière d'impôt sur les sociétés

Résolution du Parlement européen du 16 décembre 2015 contenant des recommandations à la Commission en vue de favoriser la transparence, la coordination et la convergence des politiques en matière d'impôt sur les sociétés au sein de l'Union (2015/2010(INL))

(2017/C 399/09)

Le Parlement européen,

vu l'article 225 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne,

vu le projet de rapport de la commission spéciale sur les rescrits fiscaux et autres mesures similaires par leur nature ou par leur effet (2015/2066(INI)) (commission spéciale TAXE 1),

vu le rapport final de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)/G20 relatif à l'érosion de la base d'imposition et au transfert de bénéfices (BEPS), publié le 5 octobre 2015,

vu les articles 46 et 52 de son règlement,

vu le rapport de la commission des affaires économiques et monétaires et l'avis de la commission de l'industrie, de la recherche et de l'énergie (A8-0349/2015),

Principaux enseignements du scandale LuxLeaks

A.

considérant qu'un consortium de journalistes, le consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ), qui a enquêté sur les rescrits fiscaux et d'autres pratiques dommageables au Luxembourg (LuxLeaks) a révélé en novembre 2014 que près de 340 entreprises multinationales avaient conclu des accords secrets avec le Luxembourg permettant à un grand nombre d'entre elles de réduire leur facture fiscale globale au minimum, aux dépens de l'intérêt général de l'Union, alors que l'activité économique qu'elles créaient au sein même du Luxembourg était faible, voire nulle;

B.

considérant que ces révélations ont montré que des conseillers fiscaux ont aidé, sciemment et de manière ciblée, les entreprises multinationales à obtenir au moins 548 rescrits fiscaux au Luxembourg entre 2002 et 2010; que ces accords secrets relèvent des structures financières complexes visant à créer des réductions fiscales substantielles;

C.

considérant que ces rescrits fiscaux ont permis à de nombreuses entreprises de bénéficier d'un taux d'imposition effectif inférieur à 1 % sur les bénéfices qu'elles ont transférés vers le Luxembourg; que si les multinationales tirent parti de différents biens et services publics des pays où elles exercent leurs activités, certaines ne paient pas leur juste part d'impôts; que des taux d'imposition effectifs pratiquement nuls pour les bénéfices générés par certaines multinationales peuvent porter préjudice à l'Union et à d'autres économies;

D.

considérant que, dans de nombreux cas, les filiales luxembourgeoises, dont le chiffre d'affaires s'élève à plusieurs centaines de millions d'euros, ne maintiennent qu'une faible présence et n'exercent qu'une activité économique réduite au Luxembourg, certaines adresses abritant plus de 1 600 entreprises;

E.

considérant que l'enquête menée par la commission spéciale TAXE 1 a révélé que la pratique des rescrits fiscaux ne se limite pas exclusivement au Luxembourg, mais qu'elle est courante dans l'ensemble de l'Union; que les rescrits fiscaux peuvent être utilisés légitimement pour assurer la sécurité juridique nécessaire aux entreprises et réduire le risque financier pour les entreprises honnêtes, mais qu'ils risquent néanmoins d'être utilisés de manière abusive et à des fins d'évasion fiscale, et pourraient créer, en n'offrant une sécurité juridique qu'à certains acteurs, une situation d'inégalité entre les entreprises auxquelles des rescrits ont été accordés et les entreprises qui n'y ont pas recours;

F.

considérant qu’il a été tenu compte du rapport de l’OCDE du 12 février 2013 intitulé «Lutter contre l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices», dans lequel l'OCDE a proposé de nouvelles normes internationales pour lutter contre le BEPS;

G.

considérant qu'il a également été tenu compte du communiqué publié à la suite de la réunion des ministres des finances et des gouverneurs des banques centrales du G20, qui s'est tenue le 5 octobre 2015;

H.

considérant qu'en dehors de quelques exceptions louables, les dirigeants politiques nationaux ne se sont pas montrés suffisamment disposés à lutter contre le problème de l'évasion fiscale dans le cadre de la fiscalité des entreprises;

I.

considérant que l'Union européenne a réalisé d'importants progrès sur la voie de l'intégration économique, notamment avec l'Union économique et monétaire et l'union bancaire, et que la coordination des politiques fiscales au niveau de l'Union dans le cadre du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne est essentielle dans le processus d'intégration;

L'impôt sur les sociétés et l'optimisation fiscale agressive

J.

considérant que les recettes provenant de l'impôt sur les sociétés pour les 28 États membres de l'Union s'élevaient, en moyenne, à 2,6 % du PIB en 2012 (1);

K.

considérant que, dans un contexte où les investissements et la croissance font défaut, il est important de retenir les entreprises dans l'Union ou d'y en attirer de nouvelles; que, par conséquent, il est crucial de promouvoir l'attractivité de l'Union pour les entreprises locales et étrangères;

L.

considérant que toute optimisation fiscale devrait se dérouler dans les limites du droit et des traités applicables;

M.

considérant que l'optimisation fiscale agressive consiste à tirer parti des subtilités d'un système fiscal, des incohérences entre deux ou plusieurs systèmes fiscaux ou de l'existence de vides juridiques afin de réduire les obligations fiscales;

N.

considérant que les dispositifs d'optimisation fiscale agressive conduisent souvent à l'utilisation d'une combinaison d'incohérences fiscales au niveau international, de règles fiscales nationales spécifiques très favorables et des paradis fiscaux;

O.

considérant qu'à la différence de l'optimisation fiscale agressive, la fraude et l'évasion fiscales constituent surtout des activités illégales consistant à se soustraire à l'assujettissement à l'impôt;

P.

considérant que la réponse la plus adéquate à l'optimisation fiscale agressive semble être une législation appropriée, une mise en œuvre effective de celle-ci et une coordination internationale en ce qui concerne les résultats souhaités;

Q.

considérant que le manque à gagner global pour les États résultant du contournement de l'impôt sur les sociétés est généralement compensé par une augmentation du niveau général de taxation, une réduction des services publics ou une hausse des emprunts nationaux, ce qui a pour effet de léser les autres contribuables et de porter préjudice à l'économie en général;

R.

considérant que, selon une étude (2), le manque à gagner, pour l'Union, résultant du contournement de l'impôt sur les sociétés pourrait atteindre un montant de l'ordre de 50 à 70 milliards d'euros par an, cette somme représentant le manque à gagner dû aux transferts de bénéfices, et que, selon cette étude, ce manque à gagner résultant du contournement de l'impôt sur les sociétés pourrait en réalité s'élever, pour l'Union, à environ 160 à 190 milliards d'euros si l'on tient compte des régimes fiscaux spéciaux, du manque d'efficacité au niveau de la perception de l'impôt et d'autres activités de ce type;

S.

considérant que, selon cette étude, l'efficacité de l'impôt sur les sociétés est estimée à 75 %, bien que l'étude confirme également que cela ne représente pas le montant pouvant être recouvré par les autorités fiscales, car un certain pourcentage de ce montant serait bien trop coûteux ou techniquement difficile à percevoir; que, toujours selon la même étude, si une solution complète au problème de BEPS pouvait être trouvée et mise en œuvre dans l'ensemble de l'Union, les retombées positives estimées en matière de recettes fiscales pour les gouvernements des États membres s'élèveraient à 0,2 % du total des recettes fiscales;

T.

considérant que le manque à gagner généré par le BEPS risque de compromettre le bon fonctionnement du marché intérieur ainsi que la crédibilité, l'efficacité et l'équité des systèmes de fiscalité des entreprises au sein de l'Union; que la même étude précise également que ses calculs ne tiennent pas compte de l'estimation de l'activité économique souterraine, que l'opacité des structures et des paiements de certaines entreprises rend plus difficile l'évaluation précise de l'incidence sur les recettes fiscales, laquelle peut donc être nettement supérieure aux estimations du rapport;

U.

considérant que le manque à gagner dû au BEPS traduit également clairement l'absence de conditions de concurrence équitables entre, d'une part, les entreprises qui exercent leurs activités dans un seul État membre, notamment les PME, les entreprises familiales et les indépendants, et qui payent leurs impôts dans ce même pays et, d'autre part, certaines multinationales qui parviennent à transférer des bénéfices d'un pays à taux d'imposition élevé vers un autre à faible taux d'imposition et qui se livrent à une optimisation fiscale agressive, réduisant ainsi leur base d'imposition globale et accentuant la pression sur les finances publiques aux dépens des citoyens de l'Union et des PME;

V.

considérant que le recours par les multinationales à l'optimisation fiscale agressive est contraire au principe de la concurrence loyale et de la responsabilité des entreprises, consacré par la communication COM(2011)0681, dans la mesure où l'élaboration de stratégies d'optimisation fiscale requiert des ressources dont seules disposent les grandes entreprises et où cette situation crée des conditions de concurrence inégales entre les PME et les grandes entreprises, qu'il convient de corriger de toute urgence;

W.

considérant par ailleurs que la concurrence fiscale dans l'Union et vis-à-vis des pays tiers peut parfois être dommageable et peut engendrer un nivellement par le bas des taux d'imposition, tandis que l'amélioration de la transparence, de la coordination et de la convergence fournit un cadre efficace permettant de garantir une concurrence loyale entre les entreprises de l'Union et de protéger les budgets des États contre des effets défavorables;

X.

considérant que les mesures permettant l'optimisation fiscale agressive sont incompatibles avec le principe de coopération loyale entre les États membres;

Y.

considérant que l'optimisation fiscale agressive est facilitée par la complexification du monde des entreprises et par la numérisation et la mondialisation de l'économie, entre autres facteurs, ce qui entraîne des distorsions de concurrence préjudiciables à la croissance et aux entreprises de l'Union, notamment aux PME;

Z.

considérant que la lutte contre l'optimisation fiscale agressive ne peut être menée par les États membres individuellement; que les politiques opaques et non coordonnées en matière de fiscalité des entreprises représentent un risque pour la politique fiscale des États membres, pouvant entraîner des résultats non productifs, tels qu'une augmentation de la fiscalité des bases d'imposition moins mobiles;

AA.

considérant que l'absence d'action coordonnée incite de nombreux États membres à adopter des mesures nationales unilatérales; que ces mesures se sont souvent avérées inefficaces, insuffisantes et parfois même contre-productives;

AB.

considérant qu'il convient d'adopter une approche coordonnée et sur plusieurs fronts aux niveaux national, européen et international;

AC.

considérant que l'Union a fait figure de pionnière dans la lutte internationale contre l'optimisation fiscale agressive, notamment en promouvant les progrès au niveau de l'OCDE concernant le projet BEPS; que l'Union devrait continuer à jouer un rôle de précurseur dans le développement du projet BEPS, en cherchant à prévenir les dommages que pourrait causer le BEPS aux États membres, ainsi qu'aux pays en développement partout dans le monde, notamment en prenant des mesures à l'égard du BEPS et des problèmes qui se posent au-delà du BEPS revêtant de l'importance pour les pays en développement, tels que ceux détaillés dans le rapport du groupe de travail du G20 pour le développement de 2014;

AD.

considérant que la Commission et les États membres doivent s'assurer que l'intégralité du train de mesures de l'OCDE relatif au BEPS est mis en œuvre en tant que norme minimale au niveau de l'Union et demeure ambitieux; qu'il est de la plus haute importance que tous les pays de l'OCDE mettent en œuvre le projet BEPS;

AE.

considérant que la Commission devrait indiquer clairement la manière dont elle envisage de mettre en œuvre les quinze actions prévues dans le projet BEPS de l'OCDE et du G20, au-delà et en plus des domaines d'action figurant déjà dans ce rapport, en proposant le plus rapidement possible un plan ambitieux prévoyant des mesures législatives, de manière à encourager d'autres pays à suivre les principes directeurs de l'OCDE ainsi que l'exemple de l'Union dans la mise en œuvre du plan d'action; que la Commission devrait aussi déterminer les domaines dans lesquels l'Union devrait aller plus loin que les normes minimales recommandées par l'OCDE;

AF.

considérant qu'en vertu des traités de l'Union, le pouvoir de légiférer dans le domaine de la fiscalité des entreprises appartient actuellement aux États membres, alors que la grande majorité des problèmes liés à l'optimisation fiscale agressive sont de nature multinationale;

AG.

considérant qu'un renforcement de la coordination des politiques fiscales nationales est dès lors le seul moyen réaliste de créer des conditions équitables et d'éviter des mesures qui favorisent les grandes multinationales aux dépens des PME;

AH.

considérant que l'absence de coordination entre les politiques fiscales des États membres entraîne des coûts et des charges administratives significatifs pour les citoyens et pour les entreprises menant des activités dans plus d'un État membre au sein de l'Union — a fortiori pour les PME — , et aboutit à une double imposition involontaire ou à une double non-imposition, ou facilite l'optimisation fiscale agressive, et qu'il convient de remédier à une telle situation par une transparence accrue et des solutions plus simples;

AI.

considérant que, lors de l'élaboration des règles fiscales et de la conception de procédures administratives proportionnées, une attention particulière devrait être accordée aux PME et aux entreprises familiales, qui constituent l'épine dorsale de l'économie de l'Union;

AJ.

considérant qu'un registre européen d'identification des bénéficiaires effectifs doit être opérationnel pour le 26 juin 2017, en vue de contribuer à tracer les cas possibles de fraude fiscale et de transfert des bénéfices;

AK.

considérant que les révélations du scandale LuxLeaks et les travaux réalisés par la commission spéciale TAXE 1 montrent clairement la nécessité que l'Union prenne des mesures législatives pour améliorer la transparence, la coordination et la convergence des politiques en matière d'impôt sur les sociétés au sein de l'Union;

AL.

considérant que la fiscalité des entreprises devrait être guidée par le principe de l'imposition des bénéfices là où ils sont réalisés;

AM.

considérant que la Commission et les États membres devraient continuer à jouer un rôle très actif sur la scène internationale afin d'œuvrer à l'établissement de normes internationales fondées en priorité sur les principes de la transparence, de l'échange d'informations et de l'élimination des mesures fiscales dommageables;

AN.

considérant que le principe de «cohérence des politiques au service du développement», tel qu'il est prévu dans le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, impose à l'Union de veiller à ne pas remettre en cause, mais plutôt à promouvoir, l'objectif de développement durable à tous les stades de l'élaboration des politiques et dans tous les domaines, y compris en matière de fiscalité des entreprises;

AO.

considérant qu'une approche coordonnée de la fiscalité des entreprises au niveau de l'Union permettrait de lutter contre la concurrence déloyale et d'améliorer la compétitivité des entreprises de l'Union, en particulier des PME;

AP.

considérant que la Commission et les États membres devraient continuer à mettre en place des solutions électroniques dans les procédures fiscales afin de réduire les charges administratives et de simplifier les procédures transfrontalières;

AQ.

considérant que la Commission devrait évaluer les incidences des avantages fiscaux accordés aux zones économiques spéciales existantes dans l'Union; qu'il convient d'encourager, à cet égard, l'échange des bonnes pratiques entre les autorités fiscales;

Transparence

AR.

considérant qu'une transparence accrue dans le domaine de la fiscalité des entreprises peut améliorer la perception des impôts et aider les autorités fiscales à travailler plus efficacement et est essentielle pour renforcer la confiance des citoyens dans les systèmes fiscaux et les gouvernements et qu'il convient d'en faire une importante priorité;

(i)

considérant qu'il est essentiel d'améliorer la transparence dans les activités des grandes multinationales, notamment en ce qui concerne les bénéfices réalisés, les impôts payés sur les bénéfices, les subventions reçues, les remboursements des impôts payés, le nombre de salariés et les actifs détenus, afin de veiller à ce que les administrations fiscales luttent, de manière efficace, contre le BEPS; qu'il convient de trouver un juste équilibre entre la transparence, la protection des données à caractère personnel et le caractère commercialement sensible, et de prendre en considération les incidences pour les plus petites entreprises; qu'il est essentiel que cette transparence se traduise notamment par la publication d'informations par pays; que toutes les propositions de l'Union relatives à la publication d'informations par pays devraient, dans un premier temps, s'appuyer sur le modèle de l'OCDE; que l'Union peut aller plus loin que les principes directeurs de l'OCDE et rendre cette publication obligatoire et publique, et que le Parlement européen a voté en faveur de la publication de l'intégralité des informations par pays, en adoptant, le 8 juillet 2015 (3), ses amendements à la proposition de révision de la directive sur les droits des actionnaires; que la Commission a procédé à une consultation sur cette question entre le 17 juin et le 9 septembre 2015 afin d'examiner les différentes possibilités de mise en œuvre d'un système de publication d'informations par pays (4); que 88 % des participants à cette consultation publique ont déclaré être favorables à la publication par les entreprises d’informations fiscales;

(ii)

considérant que la pratique d'une optimisation fiscale agressive par les entreprises est incompatible avec la responsabilité sociale des entreprises; que certaines entreprises au sein de l'Union ont déjà commencé à montrer qu'elle respectent pleinement la réglementation fiscale en demandant d'obtenir ou en se prévalant d'avoir obtenu un label attribué aux contribuables «loyaux» (5), que de telles mesures peuvent avoir un effet dissuasif puissant et modifier les comportements, en raison du risque pour la réputation des entreprises en infraction, et qu'un label de ce type devrait être fondé sur des critères communs au niveau européen;

(iii)

considérant qu'il serait possible de renforcer la transparence si les États membres s'informaient mutuellement et informaient la Commission de tout nouvel abattement, allègement, exemption, avantage ou autre mesure similaire qui pourrait avoir une incidence significative sur leurs taux d'imposition effectifs; qu'un système de notification de ce type aiderait les États membres à recenser les pratiques fiscales dommageables;

(iv)

considérant que, malgré l'accord conclu récemment par le Conseil en vue de modifier la directive 2011/16/UE du Conseil (6) en ce qui concerne l'échange automatique des rescrits fiscaux, il subsiste le risque que les États membres ne communiquent pas suffisamment entre eux sur les conséquences que les régimes fiscaux qu'ils accordent à certaines entreprises peuvent avoir sur la perception des impôts dans d'autres États membres; que les autorités fiscales nationales devraient s’échanger automatiquement des informations sur tous les rescrits fiscaux directement après leur conclusion; que la Commission devrait avoir accès aux rescrits fiscaux par l'intermédiaire d'un répertoire central sécurisé; que les rescrits fiscaux signés par les autorités fiscales devraient faire l'objet d'une plus grande transparence, mais qu'il y a toutefois lieu de préserver les informations confidentielles et les informations commerciales sensibles;

(v)

considérant que les ports francs seraient utilisés pour dissimuler des transactions aux autorités fiscales;

(vi)

considérant que les progrès réalisés dans la lutte contre la fraude fiscale, l’évasion fiscale et l'optimisation fiscale agressive ne peuvent être surveillés qu'au moyen d'une approche harmonisée capable de chiffrer l'ampleur des manques à gagner fiscaux directs et indirects dans tous les États membres et dans l'ensemble de l'Union; qu'une estimation du manque à gagner fiscal ne devrait être que la première étape de la fourniture d'informations supplémentaires en matière fiscale;

(vii)

considérant que l'actuel cadre juridique de l'Union relatif à la protection des lanceurs d'alerte est insuffisant et que méthodes de protection de ces personnes varient considérablement d'un État membre à l'autre; qu'en l'absence d'une telle protection, les employés qui détiennent des informations essentielles seront, à juste titre, peu enclins à se faire connaître et que ces informations ne seront, par conséquent, pas communiquées; qu'étant donné que les lanceurs d'alerte ont contribué à sensibiliser les citoyens à la question de la fiscalité inéquitable, les États membres devraient envisager des mesures permettant de protéger cette démarche; qu'il conviendrait donc d'offrir une protection à l'échelle de l'Union aux lanceurs d'alerte qui révèlent leurs soupçons en matière d'inconduite, de méfait, de fraude ou d'activité illégale aux autorités nationales ou européennes ou, en cas d'inconduite, de méfait, de fraude ou d'activité illégale persistante impunie susceptible de porter atteinte à l'intérêt public, à l'ensemble de la population; que cette protection devrait être cohérente avec l'ensemble du système juridique; qu'une telle protection devrait être efficace contre les poursuites judiciaires injustifiées, les sanctions économiques et les discriminations;

Coordination

AS.

considérant que le pouvoir de légiférer dans le domaine de la fiscalité des entreprises appartient aux États membres, alors que la grande majorité des problèmes liés à l'optimisation fiscale agressive sont de nature multinationale; qu'une plus grande coordination des politiques fiscales nationales constitue donc le seul moyen envisageable de faire face aux problèmes de BEPS et de l'optimisation fiscale agressive;

(i)

considérant que la création, à l'échelle de l'Union, d'une assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés (ACCIS) obligatoire constituerait un pas important vers la résolution des problèmes liés à l'optimisation fiscale agressive au sein de l'Union et qu'elle devrait être mise en place de toute urgence; que l'objectif ultime est la mise en place d'une ACCIS complète et obligatoire, pouvant être assortie d'une exemption provisoire pour les PME qui ne sont pas des multinationales et les entreprises qui n'ont pas d'activité transfrontalière, et reposant sur une clé de répartition fondée sur une combinaison de variables objectives; que, dans l'attente de la pleine mise en place de l'ACCIS, la Commission envisage de prendre des mesures provisoires afin de réduire les possibilités de transfert de bénéfices; qu'il y a lieu de veiller à ce que ces mesures, notamment la compensation transfrontalière des pertes, n'augmentent pas le risque de BEPS; que ces mesures ne sont pas un substitut parfait de la consolidation et que du temps serait nécessaire pour rendre ce nouveau régime entièrement opérationnel;

(ii)

considérant que, malgré les travaux du groupe «code de conduite» sur les pratiques fiscales dommageables des entreprises, des mesures d'optimisation fiscale agressive continuent d'être prises dans l'ensemble de l'Union; que les tentatives précédentes de renforcer la gouvernance et le mandat du groupe et d'adapter et d'élargir les méthodes de travail et les critères fixés dans le code afin de lutter contre les nouvelles formes de pratiques fiscales dommageables dans le contexte économique actuel n'ont pas été fructueuses; que les activités du groupe se caractérisent par un manque général de transparence et de responsabilité; que, par conséquent, l'efficacité et le fonctionnement du groupe devraient être revus en profondeur et rendus plus effectifs et plus transparents, notamment par la publication des comptes rendus et des rapports annuels, y compris de la position des États membres; que le groupe devrait être en mesure de prendre position sur les questions liées aux politiques fiscales menées dans plusieurs États membres sans qu'une petite minorité d'États membres ne bloque les recommandations;

(iii)

considérant que le principe général de la fiscalité des entreprises dans l'Union devrait consister à imposer les entreprises dans le pays où elles exercent réellement leurs activités économiques et où elles créent de la valeur; qu'il y a lieu d'établir des critères pour atteindre cet objectif; que, pour toute utilisation d'un régime fiscal favorable aux brevets ou d'autres régimes fiscaux préférentiels, il convient également de veiller à ce que les impôts soient payés dans le pays où la valeur est créée, conformément aux critères définis dans l'action 5 du projet BEPS, tout en établissant également des définitions communes à l'échelle européenne sur ce qui relève de la promotion de la recherche et du développement et ce qui n'en relève pas et sur l'harmonisation du recours aux régimes fiscaux favorables aux brevets et à l'innovation, notamment en avançant au 30 juin 2017 l'abolition de l'ancien régime;

(iv)

considérant que certains États membres ont introduit unilatéralement des règles relatives aux sociétés étrangères contrôlées (SEC), afin de veiller de manière adéquate à ce que les bénéfices placés dans des pays à taux d'imposition faible ou nul soient effectivement imposés; qu'il y a lieu de coordonner ces règles afin d'éviter que la disparité entre les règles nationales relatives aux sociétés étrangères contrôlées au sein de l'Union ne perturbe le fonctionnement du marché intérieur;

(v)

considérant que la directive 2011/16/UE prévoit une coopération entre les États membres en matière de contrôles fiscaux et encourage l'échange des bonnes pratiques entre les autorités fiscales; considérant néanmoins que les instruments prévus dans ladite directive ne sont pas suffisamment efficaces et que la disparité entre les approches nationales à l'égard des entreprises d'audit contraste avec les techniques d'optimisation fiscale très bien organisées de certaines entreprises;

(vi)

considérant qu'il y a lieu d'instaurer un système commun de numéro européen d'identification fiscale afin d'assurer l'efficacité de l'échange automatique d'informations en général et d'informations sur les rescrits fiscaux en particulier; que la Commission devrait envisager la création d'un registre européen commun des entreprises;

(vii)

considérant que la Commission a décidé de prolonger le mandat de la plateforme pour la bonne gouvernance fiscale, qui devait expirer en 2016, d'étendre son champ d'application et d'améliorer ses méthodes de travail; que la plateforme peut contribuer à la mise en place du nouveau plan d'action pour renforcer la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales, faciliter les discussions sur les rescrits fiscaux des États membres, compte tenu de la proposition de nouvelles règles d'échange d'informations, et fournir un retour d'information sur les nouvelles initiatives de lutte contre l'évasion fiscale; considérant toutefois que la Commission doit renforcer la visibilité et l'efficacité de la plateforme pour la bonne gouvernance fiscale et élargir sa composition;

(viii)

considérant que la Commission devrait analyser des réformes des administrations fiscales et demander leur mise en œuvre dans le cadre du processus du semestre européen, afin de renforcer la capacité de perception de l'impôt des administrations fiscales nationales et européennes, de leur permettre de mener à bien leur mission et donc de favoriser les effets positifs d'une perception de l'impôt efficace et de mesures efficaces contre la fraude et l'évasion fiscales sur les recettes des États membres;

Convergence

AT.

considérant que l'amélioration de la coordination ne suffira pas, à elle seule, à résoudre les problèmes fondamentaux découlant du fait que les règles en matière de fiscalité des entreprises varient d'un État membre à l'autre; qu'une partie de la réponse globale apportée à l'optimisation fiscale agressive doit inclure la convergence d'un nombre limité de pratiques fiscales nationales; que cet objectif peut être atteint tout en préservant la souveraineté des États membres en ce qui concerne d'autres éléments de leur système d'impôt sur les sociétés;

(i)

considérant que les pratiques d'optimisation fiscale agressive peuvent parfois découler des avantages cumulés résultant de la conclusion, entre différents États membres, de conventions en matière de double imposition, qui se traduisent paradoxalement par une double non-imposition; que l'augmentation du nombre de conventions en matière de double imposition conclues à titre individuel par les États membres avec des pays tiers peut conduire à de nouvelles possibilités de contourner la législation; qu'au titre de l'action 15 du projet BEPS de l'OCDE et du G20, il est nécessaire de mettre en place un instrument multilatéral permettant de modifier les conventions fiscales bilatérales; que la Commission devrait être chargée de négocier les accords fiscaux avec des pays tiers au nom de l'Union en lieu et place de la pratique actuelle des négociations bilatérales, laquelle est contre-performante; que la Commission devrait s'assurer que ces accords comprennent des clauses de réciprocité et empêchent tout effet préjudiciable sur les citoyens et les entreprises de l'Union, notamment les PME, pouvant résulter de l'application extraterritoriale de la législation de pays tiers sur le territoire de l'Union et de ses États membres;

(ii)

considérant que l'Union devrait disposer de sa propre définition actualisée de paradis fiscaux;

(iii)

considérant que l'Union devrait prendre des mesures de rétorsion à l'égard des entreprises qui ont recours à ces paradis fiscaux; que le Parlement européen a déjà formulé cette demande dans son rapport sur le rapport annuel sur la fiscalité 2014 (7), qui préconisait «l'instauration de sanctions fortes, de façon à décourager les entreprises d'enfreindre ou d'esquiver les normes de l'Union en matière fiscale, en refusant l'attribution de fonds de l'Union et l'accès aux aides d'État ou aux marchés publics aux entreprises fraudeuses ou aux entreprises situées dans des paradis fiscaux ou des pays qui faussent la concurrence en proposant des conditions fiscales favorables» et priait «instamment les États membres de récupérer toute forme d'aide publique accordée aux entreprises lorsqu'elles sont impliquées dans la violation de normes fiscales de l'Union»; que les États membres devraient également faire l'objet de contre-mesures au cas où ils refuseraient de modifier leurs régimes fiscaux préférentiels dommageables qui nuisent à la neutralité concurrentielle au sein de l'Union;

(iv)

considérant qu'il convient d'adopter une nouvelle définition contraignante de l'«établissement stable» afin de veiller à ce que l'imposition s'effectue dans le pays où l'activité économique a lieu et où la valeur est créée; que cette nouvelle définition devrait s'accompagner de critères contraignants minimaux afin de déterminer si l'activité économique est suffisamment développée pour être imposée dans un État membre, le but étant d'éviter le problème des «sociétés boîtes à lettres», en particulier compte tenu des défis posés par l'économie numérique;

(v)

considérant que l'enquête menée actuellement par la Commission sur des allégations d'infraction aux règles relatives aux aides d'État de l'Union a laissé transparaître un manque de transparence inopportun quant à la manière dont ces règles doivent être appliquées; que, pour remédier à cette situation, la Commission devrait publier des lignes directrices en matière d'aides d'État afin de définir clairement la notion d'aide d'État de nature fiscale, de façon à renforcer la sécurité juridique pour les entreprises et les États membres; que, dans le cadre de la modernisation du régime des aides d'État, la Commission devrait veiller à un contrôle ex post effectif de la légalité des aides d'État octroyées;

(vi)

considérant qu'un des effets non voulus de la directive 2003/49/CE du Conseil (8) est que les revenus transfrontaliers découlant d'intérêts et de redevances peuvent ne pas être assujettis à l'impôt (ou peuvent être soumis à un très faible taux d'imposition); qu'il y a lieu d'insérer une clause générale anti-abus dans cette directive et dans la directive 2005/19/CE du Conseil (9), ainsi que dans d'autres textes législatifs de l'Union en la matière;

(vii)

considérant qu'une retenue à la source à l'échelle de l'Union ou une mesure similaire par son effet permettrait de s'assurer que tous les bénéfices générés dans l'Union et qui quitteront celle-ci soient imposés au moins une fois dans l'Union avant qu'ils ne quittent son territoire;

(viii)

considérant que le cadre actuel de l'Union en matière de règlement des litiges relatifs à la double imposition entre les États membres ne fonctionne pas correctement et devrait être assorti de règles plus claires et de délais plus stricts, en s'inspirant des systèmes déjà en place;

(ix)

considérant que les conseillers fiscaux jouent un rôle crucial dans la promotion de l'optimisation fiscale agressive en aidant les sociétés à établir des structures juridiques complexes afin de tirer profit des incohérences et des lacunes résultant de systèmes fiscaux différents; qu'une révision fondamentale du système d'impôt sur les sociétés ne peut avoir lieu sans un examen des pratiques de ces sociétés de conseil; que cet examen doit également prendre en considération les conflits d'intérêts inhérents à ces sociétés, qui conseillent à la fois les gouvernements nationaux sur l'instauration de systèmes fiscaux et les entreprises sur la meilleure manière d'optimiser leurs obligations fiscales dans le cadre de ces systèmes;

AU.

considérant que l'efficacité globale de la perception de l'impôt, la notion de l'équité fiscale et la crédibilité des administrations fiscales nationales ne sont pas mises en péril uniquement par l'optimisation fiscale agressive et par le BEPS; que l'Union et les États membres devraient de la même manière prendre des mesures décisives afin de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales, aussi bien au niveau de l'impôt sur les personnes physiques que de l'impôt sur les sociétés, et de résoudre les problèmes liés à la perception d'impôts autres que celui sur les sociétés, notamment de la TVA; que ces autres éléments de la perception de l'impôt et de l'administration fiscale représentent une part substantielle du manque à gagner fiscal existant;

AV.

considérant que la Commission devrait, dès lors, également examiner la manière d'aborder ces questions plus générales, en particulier le respect des règles relatives à la TVA dans les États membres et leur application dans un contexte transfrontalier, les inefficacités de la perception de la TVA (qui constitue, dans certains États membres, une source importante de revenu national) et les pratiques de contournement de la TVA ainsi que les conséquences néfastes de certaines amnisties fiscales ou de certains systèmes de remise d'impôt manquant de transparence; que ces nouvelles mesures devraient tenir compte de l'équilibre entre les coûts et les avantages;

1.

demande à la Commission de présenter au Parlement, d'ici à juin 2016, une ou plusieurs propositions législatives donnant suite aux recommandations formulées en annexe;

2.

confirme que ces recommandations respectent les droits fondamentaux et le principe de subsidiarité;

3.

estime que les incidences financières de la proposition demandée doivent être couvertes par des enveloppes budgétaires adéquates;

4.

charge son Président de transmettre la présente résolution et les recommandations détaillées qui l'accompagnent à la Commission et au Conseil, ainsi qu'aux gouvernements et aux parlements des États membres.


(1)  http://ec.europa.eu/taxation_customs/resources/documents/taxation/gen_info/economic_analysis/tax_structures/2014/report.pdf

(2)  «Valeur ajoutée européenne du rapport législatif intitulé “Favoriser la transparence, la coordination et la convergence des politiques en matière d'impôt sur les sociétés au sein de l'Union européenne”», de Benjamin Ferrett, Daniel Gravino et Silvia Merler — publication attendue.

(3)  Textes adoptés du 8 juillet 2015, P8_TA(2015)0257.

(4)  http://ec.europa.eu/finance/consultations/2015/further-corporate-tax-transparency/index_fr.htm.

(5)  Par exemple, le label «Fair Tax»: http://www.fairtaxmark.net/.

(6)  Directive 2011/16/UE du Conseil du 15 février 2011 relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/799/CEE (JO L 64 du 11.3.2011, p. 1).

(7)  http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+REPORT+A8-2015-0040+0+DOC+XML+V0//FR

(8)  Directive 2003/49/CE du Conseil du 3 juin 2003 concernant un régime fiscal commun applicable aux paiements d'intérêts et de redevances effectués entre des sociétés associées d'États membres différents (JO L 157 du 26.6.2003, p. 49).

(9)  Directive 2005/19/CE du Conseil du 17 février 2005 modifiant la directive 90/434/CEE concernant le régime fiscal commun applicable aux fusions, scissions, apports d'actifs et échanges d'actions intéressant des sociétés d'États membres différents (JO L 58 du 4.3.2005, p. 19).


ANNEXE À LA RÉSOLUTION

RECOMMANDATIONS DÉTAILLÉES CONCERNANT LE CONTENU DE LA PROPOSITION DEMANDÉE

A.     Transparence

Recommandation A1. Informations par pays et concernant tous les secteurs que les multinationales sont tenues de publier

Le Parlement européen invite de nouveau la Commission européenne à prendre toutes les mesures nécessaires pour introduire, d'ici au premier trimestre 2016, la communication complète et publique d'informations par pays, concernant tous les secteurs, par toutes les multinationales.

Il convient de donner suite à cette proposition en partant des exigences définies par l'OCDE dans son modèle de données concernant les informations par pays, publié en septembre 2014 (action 13 du projet BEPS de l'OCDE/G20).

Lors de l'élaboration de cette proposition, la Commission devrait également tenir compte des:

résultats de la consultation de la Commission en ce qui concerne les informations par pays, qui a été menée du 17 juin au 9 septembre 2015 et a examiné différentes options possibles de mise en œuvre de la communication d'information par pays dans l'Union;

propositions visant l'accès complet du public aux informations par pays, figurant dans la directive révisée relative aux droits des actionnaires, telle que votée par le Parlement européen le 8 juillet 2015 (1), ainsi que des résultats des trilogues en cours qui portent sur cette directive.

Recommandation A2. Un nouveau label «Contribuable loyal» pour les entreprises respectant les bonnes pratiques fiscales

Le Parlement européen invite la Commission européenne à présenter, dans les meilleurs délais, une proposition de label européen «Contribuable loyal» à titre volontaire.

Cette proposition devrait inclure un cadre européen de critères d'éligibilité, dont le respect autoriserait l'attribution du label par les autorités nationales.

Ce cadre de critères d'éligibilité devrait clairement préciser que le label «Contribuable loyal» n'est octroyé qu'aux entreprises dont le respect des exigences ne se limite pas à la lettre du droit national et de l'Union.

Ce label «Contribuable loyal» devrait encourager les entreprises à faire du paiement d'une part équitable des impôts un élément essentiel de leur politique de responsabilité sociale, ainsi qu'à communiquer, dans leur rapport annuel, leur position en matière fiscale.

Recommandation A3. Communication obligatoire des nouvelles mesures fiscales

Le Parlement européen demande à la Commission européenne de présenter, dans les meilleurs délais, une proposition portant sur un nouveau mécanisme contraignant chaque État membre à informer, sans tarder, les autres États membres et la Commission de son intention d'adopter toute nouvelle mesure fiscale de type abattement, allègement, exemption ou avantage, susceptible d'avoir une incidence significative sur le taux d'imposition effective dans cet État membre ou sur l'assiette fiscale d'un autre État membre.

Ces communications présentées par les États membres doivent contenir des analyses portant sur l'incidence significative des nouvelles mesures fiscales sur les autres États membres et les pays en développement, en vue de soutenir le travail du groupe «code de conduite» en matière de recensement des pratiques fiscales dommageables.

Il convient d'intégrer également ces nouvelles mesures fiscales dans le processus du semestre européen et d'émettre des recommandations concernant leur suivi.

Le Parlement européen devrait régulièrement être tenu informé de ces communications ainsi que des évaluations effectuées par la Commission européenne.

Il conviendrait d'envisager des sanctions à l'encontre des États membres qui ne respectent pas de telles obligations de déclaration.

La Commission devrait également évaluer s'il est opportun de contraindre les cabinets de conseil fiscal à informer les autorités fiscales nationales lorsqu'ils élaborent et commencent à promouvoir certains régimes fiscaux visant à aider les entreprises à réduire globalement leur assujettissement à l'impôt, comme cela est le cas actuellement dans certains États membres; elle devrait, en outre, déterminer si le partage de telles informations entre les États membres par l'intermédiaire du groupe «code de conduite» constituerait un instrument efficace permettant des améliorations dans le domaine de la fiscalité des entreprises dans l'Union.

Recommandation A4. Application à tous les rescrits fiscaux de l'échange automatique d'informations, qui seraient, dans une certaine mesure, rendues publiques

Le Parlement européen invite la Commission européenne à compléter la directive 2011/16/UE, qui comporte certains éléments relatifs à l'échange automatique d'informations sur les rescrits fiscaux, de la manière suivante:

élargissement du champ d'application de l'échange automatique d'informations au-delà des rescrits fiscaux transfrontaliers afin d'englober tous les rescrits fiscaux relevant du domaine de l'impôt sur les sociétés. Les informations fournies doivent être exhaustives et présentées sous une forme définie d'un commun accord afin de pouvoir être utilisées efficacement par les autorités fiscales des pays concernés;

renforcement significatif de la transparence en matière de rescrits fiscaux à l'échelle de l'Union, en prenant dûment en considération la confidentialité des affaires et les secrets commerciaux, et les bonnes pratiques en vigueur applicables dans certains États membres, par la publication d'un rapport annuel qui synthétise les principaux dossiers figurant dans le futur répertoire central sécurisé de la Commission contenant les rescrits fiscaux et les accords préalables en matière de prix de transfert;

les informations figurant dans le rapport doivent être présentées sous une forme harmonisée et définie d'un commun accord afin de pouvoir être utilisées efficacement par le public;

garantie que la Commission joue un rôle effectif et significatif dans l'échange d'informations obligatoire sur les rescrits fiscaux avec la création d'un répertoire central sécurisé accessible aux États membres et à la Commission concernant l'ensemble des rescrits fiscaux conclus dans l'Union;

garantie que des sanctions appropriées sont appliquées aux États membres qui n'échangent pas automatiquement — alors qu'ils le devraient — les informations sur les rescrits fiscaux.

Recommandation A5. Transparence des ports francs

Le Parlement européen invite la Commission européenne à présenter une proposition législative ayant pour objectif de:

fixer un délai maximal pendant lequel les biens peuvent être vendus dans les ports francs sans être soumis aux droits de douanes, d'accise ou à la TVA;

contraindre les autorités des ports francs à informer immédiatement les autorités fiscales des États membres et des pays tiers concernés de toute transaction effectuée par leurs résidents fiscaux dans l'enceinte des ports francs.

Recommandation A6. Évaluation par la Commission du manque à gagner imputable à l'impôt sur les sociétés

Le Parlement européen invite la Commission européenne à:

élaborer, en se fondant sur les bonnes pratiques actuellement en vigueur dans les États membres, une méthodologie harmonisée, qui devrait être rendue publique et qui pourrait être utilisée par les États membres pour estimer l'ampleur du manque à gagner direct et indirect imputable à l'impôt sur les sociétés, c’est-à-direla différence entre l'impôt sur les sociétés dû et perçu, dans tous les États membres;

collaborer avec les États membres afin de garantir la collecte de toutes les données nécessaires destinées à être analysées à l'aide de la méthodologie élaborée afin d'aboutir aux chiffres les plus exacts possibles;

utiliser la méthodologie convenue et toutes les données nécessaires afin de produire et de publier, semestriellement, une estimation du manque à gagner direct et indirect imputable à l'impôt sur les sociétés dans l'ensemble de l'Union.

Recommandation A7. Protection des lanceurs d'alerte

Le Parlement européen invite la Commission européenne à présenter une proposition législative disposant ce qui suit:

il y a lieu de protéger les lanceurs d'alertes exclusivement mus par l'intérêt général (et qui ne poursuivent pas en parallèle un but lucratif ou autre but personnel) qui dévoilent des cas d'inconduite, de méfait, de fraude ou d'activité illégale dans le domaine de l'impôt sur les sociétés dans tout État membre de l'Union européenne. Ces lanceurs d'alertes devraient être protégés lorsqu'ils font part à l'autorité compétente concernée de leurs soupçons d'inconduite, de méfait, de fraude ou d'activité illégale tout comme ils devraient être protégés lorsque, confrontés à une situation persistante impunie d'inconduite, d'actes répréhensibles, de fraude ou d'activité illégale relative à l'impôt sur les sociétés et susceptible de porter préjudice à l'intérêt général, ils font part de leurs préoccupations au public en général;

il convient de veiller à ce que le droit à la liberté d'expression et d'information soit préservé dans l'Union européenne;

cette protection devrait être cohérente avec l'ensemble du système juridique et efficace contre toutes poursuites judiciaires, sanctions économiques ou discriminations injustifiées;

cette proposition législative devrait avoir comme base juridique le règlement (UE) no 596/2014 du Parlement européen et du Conseil (2) et prendre en considération toute législation future de l'Union dans ce domaine;

cette proposition législative pourrait également prendre en considération la recommandation CM/Rec(2014)71 du Conseil de l'Europe (3) sur la protection des lanceurs d'alerte et notamment la définition du lanceur d'alerte désignant «toute personne qui fait des signalements ou révèle des informations concernant des menaces ou un préjudice pour l'intérêt général dans le contexte de sa relation de travail, qu'elle soit dans le secteur public ou dans le secteur privé».

B.     Coordination

Recommandation B1. Introduction d'une assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés

Le Parlement européen invite la Commission européenne à présenter, dans les meilleurs délais, une proposition législative visant à introduire une assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés.

Dans un premier temps, d'ici à juin 2016, une assiette commune pour l'impôt sur les sociétés (ACIS) obligatoire dans l'Union, assortie d'une éventuelle exemption provisoire pour les PME qui ne sont pas des multinationales et les sociétés n'ayant pas d'activité transfrontalière, afin de disposer d'une série unique de règles applicables aux sociétés actives dans plusieurs États membres et servant à calculer leurs bénéfices imposables.

Dans un deuxième temps, dès que possible et quoi qu'il en soit fin 2017 au plus tard, une ACCIS obligatoire, en tenant dûment compte de la gamme d'options (intégrant les coûts, par exemple, de l'incorporation des PME et des sociétés n'ayant pas d'activité transfrontalière).

L'ACCIS devrait reposer sur une clé de répartition qui rende compte des activités économiques réelles des entreprises et n’avantage pas indûment certains États membres.

Pendant la période de transition comprise entre l'introduction d’une ACIS obligatoire et d’une ACCIS pleine et entière, une série de mesures visant à réduire les transferts de bénéfices (principalement via les prix de transfert), prévoyant au moins une proposition législative «anti-BEPS» de l'Union. Ces mesures ne devraient pas inclure un régime de compensation transfrontalière des pertes à moins que la Commission ne soit en mesure de garantir qu'il sera transparent et n'offrira pas la possibilité d'être détourné dans un objectif d'optimisation fiscale agressive.

La Commission devrait examiner dans quelle mesure l'élaboration d'un ensemble unique de principes comptables communément admis serait nécessaire en vue de préparer les données comptables sous-jacentes à utiliser pour les ACCIS.

Toute proposition d'ACIS ou d'ACCIS pleine et entière devrait inclure une clause contre l'évasion fiscale.

Recommandation B2. Renforcer le mandat et améliorer la transparence du groupe «code de conduite» du Conseil (fiscalité des entreprises)

Le Parlement européen invite la Commission à présenter une proposition visant à incorporer le groupe «code de conduite» à la méthode communautaire, en tant que groupe de travail du Conseil, avec la participation de la Commission européenne et du Parlement européen en tant qu'observateurs.

La transparence, l'efficacité et la responsabilité du groupe «code de conduite» devraient être renforcées notamment par:

la fourniture, les actualisations et la publication régulières des résultats de sa surveillance de la mesure dans laquelle les États membres respectent les recommandations formulées par le groupe «code de conduite» dans son rapport semestriel d'avancement adressé aux ministres des finances;

la fourniture, les actualisations et la publication régulières, tous les deux ans, d’une liste des pratiques fiscales dommageables;

la rédaction, la fourniture et la publication régulières de ses procès-verbaux, y compris d'une transparence accrue dans l'élaboration des recommandations, notamment par la présentation de la position des représentants des États membres;

la nomination d'un président politique par les ministres des finances;

la nomination par chaque État membre d'un représentant de haut niveau et d'un suppléant afin d'accroître la visibilité de l'organe.

Les tâches du groupe «code de conduite» sont les suivantes:

recenser les pratiques fiscales dommageables dans l'Union;

proposer des mesures et des délais pour l'élimination des pratiques fiscales dommageables, et suivre les résultats des recommandations ou des mesures proposées;

examiner les rapports sur les répercussions des nouvelles mesures fiscales fournis par les États membres, tel que mentionné ci-avant, et déterminer s'il y a lieu d'intervenir;

proposer d'autres initiatives axées sur des mesures fiscales dans le cadre de la politique extérieure de l'Union;

renforcer les mécanismes de protection contre les pratiques qui facilitent l'optimisation fiscale agressive.

Recommandation B3. Régime fiscal favorable aux brevets et autres régimes préférentiels: établir un lien entre régimes préférentiels et création de valeur

Le Parlement européen invite la Commission européenne à continuer de dispenser des conseils aux États membres sur la manière de mettre en place des régimes fiscaux favorables aux brevets, conformes à l'«approche du lien modifié» afin de veiller à ce qu'ils ne soient pas dommageables.

Ces conseils devraient préciser que les régimes préférentiels, tels que ceux favorables aux brevets, doivent être fondés sur l'«approche du lien modifié», telle que définie dans l'action 5 du projet BEPS de l'OCDE, à savoir qu'un lien direct doit exister entre les avantages fiscaux et les activités de recherche et développement sous-jacentes.

Des régimes favorables aux brevets, peu contraignants, n'établissant aucun lien avec l'origine géographique ou l'«âge» du savoir-faire sont à considérer comme des pratiques dommageables.

Si, après une période de 12 mois, les États membres n'appliquent toujours pas cette nouvelle approche de manière homogène, il convient que la Commission présente une proposition législative contraignante.

La Commission devrait présenter des propositions visant des normes et des définitions communes à l'échelle européenne sur ce qui relève de la promotion de la recherche et du développement et ce qui n'en relève pas, et visant à harmoniser le recours aux régimes fiscaux favorables aux brevets et à l'innovation, notamment en avançant au 30 juin 2017 l'abolition de l'ancien régime en raccourcissant la phase de maintien des droits acquis;

Recommandation B4. Société sous contrôle étranger

Le Parlement européen invite la Commission européenne à présenter une proposition législative en vue:

d'instaurer un cadre coordonné à l'échelle de l'Union pour les règles relatives aux sociétés étrangères contrôlées, afin de garantir que les bénéfices maintenus dans les pays à taux d'imposition faible ou inexistant sont effectivement imposés et d'éviter un effet de distorsion sur le fonctionnement du marché intérieur provoqué par les disparités entre les règles nationales relatives aux sociétés sous contrôle étranger dans l'Union. Ce cadre devrait assurer la pleine utilisation de la législation relative aux sociétés étrangères contrôlées au-delà des cas de montages complètement artificiels. Cela ne doit pas empêcher les États membres d'instaurer des règles plus strictes.

Recommandation B5. Améliorer la coordination entre les États membres en matière de contrôles fiscaux

Le Parlement européen invite la Commission européenne à présenter une proposition de modification de la directive 2011/16/UE, afin:

de garantir des contrôles fiscaux simultanés plus efficaces lorsque deux ou plusieurs autorités fiscales nationales conviennent de procéder à des contrôles d'une ou plusieurs personnes présentant un intérêt commun ou complémentaire;

de veiller à ce qu'une société mère et ses filiales basées dans l'Union soient contrôlées par leurs autorités fiscales respectives au cours de la même période, sous la direction des autorités fiscales de la société mère, afin de garantir des flux d'information efficaces entre autorités fiscales. Dans ce cadre:

les autorités fiscales devraient régulièrement échanger des informations concernant leurs enquêtes afin de veiller à ce que les groupes ne tirent pas profit d'incohérences ou de lacunes dans la combinaison des différents systèmes fiscaux nationaux;

les délais prévus pour les échanges d'informations sur les contrôles en cours devraient être réduits au minimum;

les autorités fiscales d'une société devraient informer systématiquement les autorités fiscales des autres entités au sein du même groupe des résultats d'un contrôle fiscal;

une autorité fiscale ne devrait prendre aucune décision concernant les résultats d'un contrôle fiscal avant d'avoir informé les autres autorités fiscales concernées.

Recommandation B6. Introduction d'un numéro d'identification fiscale européen commun

Le Parlement européen invite la Commission européenne à présenter une proposition de numéro d'identification fiscale européen.

La proposition est fondée sur le schéma relatif à un numéro d'identification fiscale européen commun contenu dans le plan d'action de la Commission pour renforcer la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales de 2012 (action 22) (4), et les résultats de la consultation qui a suivi en 2013 (5).

C.   Convergence

Recommandation C1. Un nouvelle approche à l'égard des régimes fiscaux internationaux

Le Parlement européen invite la Commission européenne à présenter une proposition législative visant à permettre à l'Union de s'exprimer d'une seule voix sur la question des régimes fiscaux internationaux.

La Commission devrait être chargée de négocier les accords fiscaux avec des pays tiers au nom de l'Union en lieu et place de la pratique actuelle des négociations bilatérales, laquelle est contre-performante, en particulier pour les pays en développement.

La Commission doit s'assurer que ces accords comprennent des clauses de réciprocité et empêchent tout effet préjudiciable aux citoyens et aux entreprises de l'Union, notamment aux PME, pouvant résulter de l'application extraterritoriale de la législation de pays tiers sur le territoire de l'Union et de ses États membres.

Un accord multilatéral commun à l'Union portant sur la fiscalité devrait être introduit afin de remplacer les nombreuses conventions fiscales bilatérales entre les États membres ou entre ces derniers et des pays tiers.

Tout nouvel accord commercial international conclu par l'Union devrait inclure une clause de bonne gouvernance fiscale.

Tous les régimes fiscaux internationaux doivent prévoir un mécanisme d'exécution.

Recommandation C2. Établir une définition commune et stricte des «paradis fiscaux»

Le Parlement européen invite la Commission européenne à présenter une proposition en vue d'établir des critères stricts de définition des «paradis fiscaux», en collaboration avec l'OCDE et les Nations unies.

Ces critères devraient être fondés sur des indicateurs exhaustifs, transparents, solides, vérifiables de façon objective et généralement reconnus, participant à l'élaboration des principes d'une bonne gouvernance tels que définis par la Commission dans sa communication de 2009 «Encourager la bonne gouvernance dans le domaine fiscal» (6): l'échange d'informations et la coopération administrative, la concurrence fiscale loyale et la transparence.

Ces critères devraient couvrir des concepts tels que le secret bancaire, l'enregistrement de la propriété des entreprises, des trusts et des fondations, la publication de la comptabilité des entreprises, l'aptitude à échanger des informations, l'efficacité de l'administration fiscale, la promotion de l'évasion fiscale, l'existence d'instruments juridiques dommageables, la prévention du blanchiment d'argent, l'automaticité de l'échange d'informations, l'existence de conventions bilatérales, les engagements internationaux en matière de transparence et la coopération judiciaire.

La Commission, en se fondant sur ces critères, devrait dresser une liste révisée des paradis fiscaux, en remplacement de sa liste provisoire présentée en juin 2015.

Cette liste de paradis fiscaux devrait servir, dans la législation fiscale applicable, de point de référence pour les autres politiques et dispositions législatives.

La Commission devrait réviser cette liste au moins deux fois par an, ou à la demande motivée d'une des juridictions figurant sur la liste.

Recommandation C3. Mesures de rétorsion contre les sociétés ayant recours aux paradis fiscaux

Le Parlement européen invite la Commission européenne à présenter une proposition visant à établir un arsenal de mesures de rétorsion applicables par l'Union et les États membres, en tant qu'actionnaires et bailleurs de fonds d'organismes publics, de banques et de programmes de financement, aux sociétés ayant recours à des paradis fiscaux afin de mettre en place des systèmes d'optimisation fiscale agressive et ne respectant donc pas les normes de l'Union en matière de bonne gouvernance fiscale.

Parmi ces mesures de rétorsion devraient figurer:

l'interdiction de bénéficier d'aides d'État ou de participer aux marchés publics à l'échelle nationale ou de l'Union;

l'interdiction de bénéficier de certains fonds de l'Union.

Parmi les moyens déployés à cet effet devraient figurer entre autres:

la modification des statuts de la Banque européenne d'investissement (BEI) (protocole no 5 annexé aux traités), afin de s'assurer qu'aucun bénéficiaire final ou intermédiaire financier ayant recours à des paradis fiscaux ou ayant des pratiques fiscales dommageables ne puisse bénéficier d'un financement de la BEI (7);

la modification du règlement (UE) 2015/1017 du Parlement européen et du Conseil (8) afin de garantir que ces entreprises n'auront pas accès à un financement par l'EFSI (9);

la modification des règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) no 1305/2013 (10), (UE) no 1306/2013 (11), (UE) no 1307/2013 (12) et (UE) no 1308/2013 (13) afin de s'assurer que ces entreprises ne pourront pas bénéficier de financements destinés à la PAC;

la poursuite du processus de modernisation des aides d'État afin de veiller à ce que les États membres n'apportent aucune aide à ces entreprises (14);

la modification du règlement (UE) no 1303/2013 du Parlement européen et du Conseil (15) portant dispositions communes afin de garantir que ces entreprises ne pourront bénéficier des montants alloués par les cinq Fonds structurels et d'investissement européens (Fonds européen de développement régional, Fonds social européen, Fonds de cohésion, Fonds européen agricole pour le développement rural et Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche);

la modification de l'accord portant création de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) afin de veiller à ce que cette dernière ne finance ces entreprises en aucune manière (16);

l'interdiction de la conclusion d'accords commerciaux entre l'Union et des juridictions qualifiées de «paradis fiscaux» par la Commission.

La Commission examine si des accords commerciaux existants avec des pays considérés comme étant des paradis fiscaux peuvent être suspendus ou résiliés.

Recommandation C4. Établissement stable

Le Parlement européen invite la Commission européenne à présenter une proposition législative ayant pour objectif:

d'adapter la définition d'«établissement stable» afin d'ôter aux entreprises toute possibilité de parvenir à éviter artificiellement d'avoir une présence fiscale dans les États membres dans lesquels elles exercent une activité économique. Cette définition devrait également porter sur les cas où des sociétés se livrant pleinement à des activités numériques dématérialisées sont considérées comme ayant un établissement stable dans un État membre si elles maintiennent une présence numérique significative dans l'économie de ce pays;

d'introduire une définition de l'Union en matière de «substance économique» minimale, couvrant également l'économie numérique, de manière à garantir que les sociétés créent véritablement de la valeur et contribuent à l'économie de l'État membre dans lequel elles ont une présence fiscale.

Ces deux définitions devraient relever d'une interdiction concrète desdites «sociétés boîte à lettres».

Recommandation C5. Améliorer le cadre relatif aux prix de transfert dans l'Union

Le Parlement européen invite la Commission européenne à présenter une proposition législative en vue:

d'élaborer, en se fondant sur sa propre expérience et sur une analyse des nouveaux principes de l'OCDE applicables en matière de prix de transfert, des lignes directrices de l'Union sur l'application desdits principes et la manière de les interpréter dans le contexte de l'Union, afin:

de refléter la réalité économique du marché intérieur;

d'apporter certitude, clarté et équité aux États membres et aux entreprises en activité dans l'Union;

de réduire le risque de détournement de la réglementation dans un but de transférer des bénéfices.

Recommandation C6. Dispositifs hybrides

Le Parlement européen invite la Commission européenne à présenter une proposition législative visant:

à harmoniser les définitions nationales de dette, de fonds propres, d'entité peu transparente ou transparente, à harmoniser l'affectation des actifs et des passifs à un établissement stable, et à harmoniser la répartition des coûts et des bénéfices entre différentes entités d'un même groupe; ou

à prévenir la double non-imposition, en présence d'incohérences.

Recommandation C7. Modification du régime d'aides d'État de l'Union en matière de fiscalité

Le Parlement européen invite la Commission européenne à présenter, au plus tard au milieu de l'année 2017, une proposition législative tenant compte des éléments suivants:

des lignes directrices en matière d'aides d'État précisant ce qui, aux yeux de la Commission, constitue une aide d'État de nature fiscale, et apportant ainsi une plus grande sécurité juridique aux entreprises et aux États membres, étant donné que, dans d'autres secteurs, de telles lignes directrices se sont révélées très efficaces pour prévenir les pratiques des États membres qui sont contraires au droit de l'Union en matière d'aides d'État ou pour y mettre un terme, ce qui ne peut être obtenu que moyennant un niveau élevé de détail dans les lignes directrices, notamment des seuils numériques;

la désignation publique des politiques fiscales qui ne sont pas conformes à la politique en matière d'aides d'État afin d'orienter les États membres et les entreprises et leur apporter une plus grande sécurité juridique. À cette fin, la Commission devrait réaffecter des ressources à la DG Concurrence de manière à lui permettre d'agir efficacement sur des problèmes d'aides d'État illégales (y compris d'avantages fiscaux sélectifs).

Le Parlement européen invite également la Commission européenne à évaluer, à long terme, la possibilité de modifier la réglementation actuelle afin d'éviter que les montants récupérés à la suite d'une infraction aux règles relatives aux aides d'État de l'Union ne soient rendus à l'État membre qui a accordé l'aide fiscale illégale, comme c'est le cas actuellement. À titre d'exemple, le montant de l'aide d'État récupérée pourrait être affecté au budget de l'Union ou reversé aux États membres qui ont subi une érosion de leur base d'imposition.

Recommandation C8. Modification des directives du Conseil 90/435/CEE  (17) , 2003/49/CE et 2005/19/CE ainsi que d'autres actes législatifs pertinents de l’Union, et instauration d'une clause générale anti-abus

Le Parlement européen invite la Commission européenne à présenter une proposition qui tienne compte des éléments suivants:

après l'insertion d'une clause générale anti-abus dans la directive 90/435/CEE, procéder dans les meilleurs délais à l'intégration d'une clause générale anti-abus dans la directive 2003/49/CE et présenter des propositions visant à introduire une clause générale anti-abus dans la directive 2005/19/CE et dans d'autres actes législatifs pertinents de l’Union;

inclure cette clause générale anti-abus dans tout nouvel acte législatif de l'Union qui concerne les questions fiscales ou ayant des répercussions en matière fiscale;

en ce qui concerne la directive 2003/49/CE, en plus d'introduire une clause générale anti-abus, supprimer l'exigence pour les États membres de traiter favorablement les paiements d'intérêts et de redevances lorsqu'aucune imposition véritable n'intervient ailleurs dans l'Union;

en ce qui concerne la directive 2005/19/CE, en plus d'introduire une clause générale anti-abus, incorporer des obligations supplémentaires en matière de transparence et — si ces modifications s'avèrent insuffisantes pour prévenir l'optimisation fiscale agressive — prévoir une disposition relative à une imposition minimale exigée pour pouvoir bénéficier d'«avantages fiscaux» (tels que la non-imposition des dividendes) ou d'autres mesures ayant un effet similaire.

Recommandation C9. Améliorer les mécanismes de règlement des litiges transfrontaliers en matière de fiscalité

Le Parlement européen invite la Commission européenne à présenter, d'ici à l'été 2016, une proposition visant à:

améliorer les mécanismes actuels permettant de résoudre les litiges transfrontaliers en matière de fiscalité au sein de l'Union, en se concentrant non seulement des cas de double imposition mais également de ceux de double non-imposition. L'objectif consiste à définir une approche plus coordonnée de la part de l'Union à l'égard de la résolution des litiges, en établissant des règles plus précises et des délais plus stricts, en s'appuyant sur les systèmes déjà en place;

assurer la transparence des travaux et des décisions du mécanisme de règlement des litiges, de manière à réduire toute incertitude pour les entreprises en ce qui concerne l'application du droit fiscal.

Recommandation C10. Instaurer une retenue à la source ou une mesure ayant un effet similaire afin d'éviter que les bénéfices ne quittent l'Union sans être imposés

Le Parlement européen demande à la Commission de présenter d'ici à l'été 2016 une proposition visant à introduire une retenue à la source ou une mesure d'effet équivalent, afin de veiller à ce que tous les bénéfices générés à l'intérieur de l'Union, et qui doivent quitter l’Union, soient effectivement imposés dans l'Union avant de quitter les frontières de l'Union.

D.     Autres mesures

Recommandation D1. Mesures supplémentaires pour lutter contre le manque à gagner fiscal

Le Parlement européen invite la Commission européenne à s'intéresser également à d'autres facteurs au-delà de l'optimisation fiscale agressive et les activités de type «BEPS» qui contribuent à aggraver le manque à gagner fiscal existant, notamment à:

enquêter sur les causes du manque d'efficacité dans la perception de l'impôt, notamment celle de la TVA;

enquêter sur la causes de l'iniquité fiscale et du manque de crédibilité des administrations fiscales dans des domaines autres que l'impôt sur les sociétés;

définir des principes en matière d'amnisties fiscales, en précisant notamment dans quels cas elles seraient appropriées et dans quels cas d'autres solutions stratégiques seraient préférables, et établir une exigence pour les États membres d'informer au préalable la Commission de toute nouvelle amnistie fiscale, afin d'éliminer les conséquences néfastes de ces politiques sur les futurs recouvrements des impôts;

proposer un niveau minimal de transparence en ce qui concerne les dispositifs de remises d'impôts et les allègements fiscaux discrétionnaires mis en place par les gouvernements nationaux;

donner davantage de liberté aux États membres pour que le respect des obligations fiscales par les entreprises, et notamment les cas de non-respect systématique, soient des facteurs à prendre en considération lors de la passation de marchés publics;

veiller à ce que les autorités fiscales disposent d'un accès total et significatif aux registres centraux d'identification des bénéficiaires effectifs des entreprises et des trusts, et à ce que ces registres soient tenus et vérifiés de manière appropriée.

Cet objectif peut être atteint si les États membres transposent rapidement la quatrième directive relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux, en assurant un accès large et simplifié aux renseignements figurant dans les registres centraux des bénéficiaires effectifs, y compris pour les organisations de la société civile, les journalistes et les citoyens.


(1)  Textes adoptés du 8 juillet 2015, P8_TA(2015)0257.

(2)  Règlement (UE) no 596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché (règlement relatif aux abus de marché) et abrogeant la directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil et les directives 2003/124/CE, 2003/125/CE et 2004/72/CE de la Commission (JO L 173 du 12.6.2014, p. 1).

(3)  http://www.coe.int/t/dghl/standardsetting/cdcj/Whistleblowers/protecting_whistleblowers_fr.asp

(4)  COM(2012)0722.

(5)  https://circabc.europa.eu/faces/jsp/extension/wai/navigation/container.jsp

(6)  http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=COM:2009:0201:FIN:FR:PDF

(7)  http://www.eib.org/attachments/general/governance_of_the_eib_fr.pdf

(8)  Règlement (UE) 2015/1017 du Parlement européen et du Conseil du 25 juin 2015 sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques, la plateforme européenne de conseil en investissement et le portail européen de projets d'investissement et modifiant les règlements (UE) no 1291/2013 et (UE) no 1316/2013 — le Fonds européen pour les investissements stratégiques (JO L 169 du 1.7.2015, p. 1).

(9)  http://ec.europa.eu/priorities/jobs-growth-investment/plan/docs/proposal_regulation_efsi_fr.pdf

(10)  Règlement (UE) no 1305/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 relatif au soutien au développement rural par le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) et abrogeant le règlement (CE) no 1698/2005 du Conseil (JO L 347 du 20.12.2013, p. 487).

(11)  Règlement (UE) no 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune et abrogeant les règlements (CEE) no 352/78, (CE) no 165/94, (CE) no 2799/98, (CE) no 814/2000, (CE) no 1290/2005 et (CE) no 485/2008 du Conseil (JO L 347 du 20.12.2013, p. 549).

(12)  Règlement (UE) no 1307/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 établissant les règles relatives aux paiements directs en faveur des agriculteurs au titre des régimes de soutien relevant de la politique agricole commune et abrogeant le règlement (CE) no 637/2008 du Conseil et le règlement (CE) no 73/2009 du Conseil (JO L 347 du 20.12.2013, p. 608).

(13)  Règlement (UE) no 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles et abrogeant les règlements (CEE) no 922/72, (CEE) no 234/79, (CE) no 1037/2001 et (CE) no 1234/2007 du Conseil (JO L 347 du 20.12.2013, p. 671).

(14)  http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P7-TA-2013-0026+0+DOC+XML+V0//FR

(15)  Règlement (UE) no 1303/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant dispositions communes relatives au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion, au Fonds européen agricole pour le développement rural et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, portant dispositions générales applicables au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, et abrogeant le règlement (CE) no 1083/2006 du Conseil (JO L 347 du 20.12.2013, p. 320).

(16)  http://www.ebrd.com/news/publications/institutional-documents/basic-documents-of-the-ebrd.html

(17)  Directive 90/435/CEE du Conseil du 23 juillet 1990 concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d'États membres différents (JO L 225 du 20.8.1990, p. 6).


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