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Document 52014IP0024

    Résolution du Parlement européen du 18 septembre 2014 sur les violations des droits de l'homme au Bangladesh (2014/2834(RSP))

    JO C 234 du 28.6.2016, p. 10–13 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

    28.6.2016   

    FR

    Journal officiel de l'Union européenne

    C 234/10


    P8_TA(2014)0024

    Violations des droits de l'homme au Bangladesh

    Résolution du Parlement européen du 18 septembre 2014 sur les violations des droits de l'homme au Bangladesh (2014/2834(RSP))

    (2016/C 234/03)

    Le Parlement européen,

    vu ses résolutions précédentes sur le Bangladesh,

    vu l'accord de coopération CE-Bangladesh de 2001,

    vu les articles 33 et 35 de la Constitution du Bangladesh, qui dispose que nul ne peut faire l'objet de torture ou de châtiment ou de traitement cruel, inhumain ou dégradant et que nul ne peut être arrêté ou placé en détention sans avoir été informé des motifs d'une telle arrestation,

    vu la décision de la Cour suprême du Bangladesh, qui a établi des mesures de sauvegarde contre les arrestations arbitraires par la police en vertu de l'article 54 du Code de procédure pénale, qui exige également que tous les incidents de décès survenus en garde à vue soient instruits par un magistrat, et que les procédures judiciaires nécessaires soient engagées,

    vu le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui a été ratifié par le Bangladesh en 2000,

    vu l'article 135, paragraphe 5, et l'article 123, paragraphe 4, de son règlement,

    A.

    considérant que l'Union européenne entretient depuis longtemps de bonnes relations avec le Bangladesh, y compris dans le cadre de l'accord de coopération en matière de partenariat et de développement;

    B.

    considérant que le Bangladesh a réalisé des progrès significatifs au cours des dernières années, en particulier en ce qui concerne les objectifs du Millénaire pour le développement et sa performance économique;

    C.

    considérant que le gouvernement du Bangladesh a annoncé une politique de «tolérance zéro» à l'égard des violations des droits de l'homme par les services répressifs, et a adopté une loi de réforme de la police qui prévoit un code de conduite, des postes de police modèles et des centres d'aide aux victimes dans les postes de police clés;

    D.

    considérant que le gouvernement du Bangladesh a annoncé qu'il met en œuvre, en collaboration avec le Comité international de la Croix-Rouge, des programmes de formation et d'engagement actif pour les services répressifs et les autorités pénitentiaires sur les sauvegardes internationales contre la torture;

    E.

    considérant que ces dernières années, le Bangladesh a connu un certain nombre de tragédies dans ses ateliers de confection, la plus meurtrière étant l'effondrement de l'immeuble Rana Plaza, faisant plus de 1 100 victimes; considérant qu'après l'effondrement du Rana Plaza, le Bangladesh, en collaboration avec les principales parties prenantes dans le secteur de l'habillement, a lancé un programme de réforme visant à assurer des conditions de travail sûres et décentes; considérant que l'UE soutient ce programme par le biais du Pacte sur la durabilité de Bangladesh, mais que certains intervenants sont réticents à y prendre part;

    F.

    considérant que les disparitions (impliquant souvent, semble-t-il, les forces de sécurité de l'État), l'utilisation de la torture et d'autres formes de mauvais traitements persistent au Bangladesh, malgré les garanties prévues par la Constitution, le Code pénal et la loi interdisant la torture et le décès en détention, tout comme les restrictions concernant le droit à la liberté d'expression;

    G.

    considérant qu'après les élections générales du 5 janvier 2014, qui ont été boycottées par le Parti nationaliste du Bangladesh (BNP) - le principal parti d'opposition - et éclipsées par les grèves incitées par le PNB et les actes de violence qui en ont résulté, le gouvernement de la Ligue Awami dirigé par Sheikh Hasina a pris plusieurs mesures visant à restreindre les droits civils;

    H.

    considérant que le Bataillon d'action rapide (RAB), créé il y a 10 ans comme une mesure d'urgence pour lutter contre les menaces à la sécurité émanant de groupes militants, comprend à la fois des militaires et des policiers, impliquant de fait l'armée dans le maintien de l'ordre civil sans mécanisme transparent de responsabilité; considérant que les organisations indépendantes des droits de l'homme prétendent que le RAB est responsable de quelque 800 morts, sans poursuite ou sanction à l'encontre des agents responsables; considérant qu'à part les arrestations récentes de plusieurs membres du RAB en relation avec un contrat de meurtre présumé d'un homme politique du parti au pouvoir, d'autres abus graves restent impunis;

    I.

    considérant que le 6 août 2014, le gouvernement du Bangladesh a publié sa nouvelle politique sur les médias; Considérant que les éléments de cette politique imposent des limites à la liberté des médias, par exemple en interdisant les discours qui sont «anti-État», «ridiculisent l'idéologie nationale» ou qui sont «incompatibles avec la culture du Bangladesh» et en limitant les propos faisant état «d'anarchie, de rébellion, ou de violence»; considérant que le gouvernement envisage d'introduire un cadre législatif permettant d'appliquer cette politique; considérant que le Bangladesh se classe 145e sur 179 pays dans le classement mondial de la liberté de la presse;

    J.

    considérant que le gouvernement du Bangladesh a proposé une nouvelle loi qui imposerait, semble-t-il, de sévères restrictions aux organisations non-gouvernementales (ONG); considérant que le nouveau projet de loi relatif à la réglementation des dons étrangers réglementerait les opérations et le financement de tous les groupes bénéficiant de fonds étrangers, et soumettrait à l'approbation du Bureau des affaires afférentes aux ONG auprès du cabinet du Premier ministre les projets à capitaux étrangers; considérant que le nouveau projet de loi exigerait également que toute personne engagée dans des activités de volontariat obtienne une approbation avant de voyager à l'étranger pour les besoins de son travail sur un projet; considérant que les ONG craignent que cette loi n'entraîne davantage d'agents de l'État dans le processus en tant que contrôleurs, évaluateurs et approbateurs - avec la possibilité de retards et de mauvaises pratiques;

    K.

    considérant que le 27 août 2014, Hana Shams Ahmed, coordinateur de la «International Chittagong Hill Tracts Commission» (CHTC), et un ami ont été brutalement attaqués par 8 à 10 membres de Somo Odhikar Andolon lors d'une visite privée à Shoilopropat au Bandarban dans les Chittagong Hill Tracts; considérant que les quatre membres de la direction des détectives de police (DB) qui étaient censés assurer leur sécurité ne sont pas intervenus, et qu'ils ont même disparu pendant l'assaut;

    L.

    considérant que les actes de violence à motivation ethnique ou religieuse, notamment l'attaque par plusieurs douzaines d'hommes armés au début du mois de juillet 2014 du couvent de l'Institut pontifical des missions étrangères (PIME) religieuses à Boldipuku, ne se poursuivent; considérant que, pendant cette attaque, le couvent a été pillé et les religieuses agressées physiquement;

    M.

    considérant qu'au moins quatre blogueurs et deux défenseurs des droits de l'homme ont été inculpés au cours des deux dernières années en vertu de la section 57 de la loi relative à la technologie de l'information et des communications (TIC);

    N.

    considérant que le tribunal international pour les crimes de guerre (ICT) pour le Bangladesh, qui vise à enquêter sur les crimes de guerre liés à la guerre d'indépendance du Bangladesh, a rendu 10 verdicts jusqu'à présent, dont 8 condamnations à mort et 2 peines d'emprisonnement à vie; considérant que le politicien islamiste Abdul Quader Mollah a été le premier à être exécuté; considérant que l'ICT fait l'objet de virulentes critiques parce qu'il ne respecterait pas les normes internationales; considérant qu'il y aurait plus de 1 000 personnes dans le couloir de la mort au Bangladesh;

    O.

    considérant qu'après l'effondrement tragique de l'immeuble Rana Plaza en avril 2013, le gouvernement du Bangladesh et les détaillants occidentaux ont mis en place un système d'inspection de plus de 3 500 ateliers de confection pour contrôler l'intégrité structurelle et la sécurité incendie et électrique; considérant que, tandis que les contrôles effectués par les détaillants occidentaux sont en cours et publics, ceux qui sont réalisés par le gouvernement du Bangladesh n'ont pas encore été rendus publics;

    P.

    considérant que le Fonds des donateurs créé par le Comité de coordination du Plaza Rana pour aider les victimes et les survivants - qui se compose de représentants du gouvernement du Bangladesh, de l'industrie du vêtement, des syndicats et d'organisations non-gouvernementales, et qui est présidé par l'Organisation internationale du Travail (OIT) - n'a pas encore atteint son objectif de 40 millions de dollars; considérant que, selon la campagne «vêtements propres», la moitié seulement des entreprises essentiellement européennes et américaines liées à des ateliers situées dans le bâtiment Rana Plaza ont versé des contributions au Fonds des donateurs;

    Q.

    considérant que malgré quelques réformes du droit du travail, les travailleurs continuent de dénoncer le harcèlement et l'intimidation visant à les empêcher de rejoindre ou de former des syndicats, et que les actes de violence contre les organisateurs syndicaux continuent d'être signalés; considérant que la loi sur le travail de 2013, n'est toujours pas conforme aux normes internationales en matière de liberté d'association, y compris le droit de grève et de négociation collective;

    1.

    félicite le gouvernement du Bangladesh pour les progrès accomplis vers la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement, qui a abouti à des améliorations significatives de la vie réelle pour des millions de ses citoyens; reconnaît en outre le fait que ces améliorations ont été faites dans des circonstances nationales difficiles, notamment sous la menace constante d'attaques violentes par des groupes radicaux comme le parti Jamaat-e-Islami affilié au BNP; salue, à cet égard, l'adoption de la loi sur la prévention du mariage des enfants, le 15 septembre 2014;

    2.

    exprime sa préoccupation, toutefois, quant aux persistantes violations des droits de l'homme par le RAB et d'autres forces de sécurité, y compris les disparitions forcées et les exécutions extrajudiciaires de militants de l'opposition; réitère son appel à l'abolition de la peine de mort et se félicite de la décision de la Cour suprême du 16 septembre 2014 de commuer la peine de mort prononcée par le Tribunal pénal international à l'encontre du vice-président du Jamaat-e-Islami, Delwar Hossain Sayedee, à la prison à vie;

    3.

    invite le gouvernement du Bangladesh à libérer immédiatement toutes les personnes soumises à une disparition forcée, à moins qu'elles puissent être inculpées d'une infraction reconnue par la loi, auquel cas, elles doivent être traduites immédiatement devant un tribunal; invite les autorités du Bangladesh à enquêter sur les auteurs, en tenant compte de la responsabilité de commandement, et à traduire les responsables en justice dans un procès équitable; exhorte le gouvernement à mettre en place un organe indépendant pour enquêter sur ces affaires et réitère sa demande au gouvernement de créer une commission des droits de l'homme efficace et totalement indépendante;

    4.

    exhorte le gouvernement à recourir le moins possible à la force pour rétablir l'ordre public et à respecter strictement les Principes de base de l'ONU sur le recours à la force et l'utilisation des armes à feu; condamne fermement les attaques violentes perpétrées par des groupes d'opposition contre des cibles civiles et gouvernementales; invite les groupes d'opposition à ne prendre part qu'à des manifestations pacifiques;

    5.

    prie instamment le gouvernement du Bangladesh de ramener les forces de sécurité de l'État, notamment la police et le RAB, dans les limites de la loi; demande instamment aux autorités du Bangladesh de mettre fin à l'impunité du RAB en ordonnant des enquêtes et des poursuites pour les meurtres illégaux qui auraient été perpétrés par les forces du RAB; souligne qu'il suivra de près les procédures dans l'affaire de Narayanganj, dans le cadre de laquelle trois agents du RAB ont été arrêtés et sont en attente de procédures judiciaires à la suite de l'enlèvement et du meurtre de sept personnes à Narayanganj en avril 2014;

    6.

    insiste sur l'importance que revêtent l'indépendance, l'impartialité et l'accessibilité du système judiciaire pour renforcer le respect de l'état de droit et des droits fondamentaux de la population et réformer le tribunal international pour les crimes de guerre; reconnaît qu'il est plus important que jamais de renforcer la confiance du public dans les institutions de justice, de sécurité et des droits de l'homme, compte tenu de l'aggravation des menaces dans la région émanant d'organisations terroristes comme al-Qaïda;

    7.

    exprime sa préoccupation face à la proposition de loi sur les ONG; demande instamment au gouvernement du Bangladesh de poursuivre ses consultations avec les groupes indépendants sur le contenu de ce projet de loi et de faire en sorte que, s'il est finalement adopté, il soit conforme aux normes internationales et aux conventions sur les droits civiques auxquelles le Bangladesh a souscrit;

    8.

    demande instamment au gouvernement du Bangladesh de reconnaître et de respecter la liberté de la presse et des médias et de permettre aux groupes de défense des droits de l'homme de jouer un rôle important dans le renforcement de la responsabilité et dans l'instruction des violations des droits de l'homme; prie les autorités du Bangladesh de révoquer la nouvelle politique des médias et de se conformer à leurs obligations en permettant la liberté d'opinion et d'expression;

    9.

    est très préoccupé par les actes récurrents de violence pour des raisons ethniques et religieuses; demande instamment au gouvernement du Bangladesh d'offrir une meilleure protection et des garanties aux minorités telles que les hindous, les bouddhistes et les chrétiens, mais aussi les Biharis; se félicite de l'arrestation de suspects dans le cadre de l'attaque criminelle du couvent de Boldipuku;

    10.

    prie le gouvernement du Bangladesh d'assurer l'application du droit du travail et demande instamment la poursuite des réformes afin de les mettre en conformité avec les normes de l'OIT, en particulier la possibilité pour les travailleurs de constituer librement des syndicats et de s'y affilier;

    11.

    prend note des programmes de réforme dans l'industrie du vêtement, mais exhorte le gouvernement à mettre pleinement en œuvre le plan d'action qu'il a accepté et signé avec l'OIT en mai 2013, notamment le recrutement et la formation des inspecteurs et des inspections approfondies, avec des rapports publics, de ses milliers d'ateliers; demande instamment aux signataires de l'Accord sur les incendies et la sécurité au Bangladesh de respecter leurs engagements, notamment en matière de compensation financière pour les victimes et de normes minimales;

    12.

    déplore le fait qu'en juin 2014, le montant total des fonds levés par des dons volontaires des entreprises au Fonds des donateurs était seulement de 17 millions de dollars, 23 millions de dollars restant en suspens; conclut donc que le principe du volontariat n'a pas aidé les victimes de la catastrophe du Rana Plaza et qu'un mécanisme obligatoire est indispensable;

    13.

    charge son Président de transmettre la présente résolution au gouvernement et au parlement du Bangladesh, au Conseil, à la Commission, à la vice-présidente de la Commission/haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, ainsi qu'aux gouvernements et aux parlements des États membres.


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