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Document 52014AE2865

    Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant une plate-forme européenne dans l'objectif de renforcer la coopération visant à prévenir et à décourager le travail non déclaré [COM(2014) 221 final — 2014/0124 (COD)]

    JO C 458 du 19.12.2014, p. 43–51 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

    19.12.2014   

    FR

    Journal officiel de l'Union européenne

    C 458/43


    Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant une plate-forme européenne dans l'objectif de renforcer la coopération visant à prévenir et à décourager le travail non déclaré

    [COM(2014) 221 final — 2014/0124 (COD)]

    (2014/C 458/08)

    Rapporteur:

    Stefano PALMIERI

    Corapporteure:

    Ana BONTEA

    Le Parlement européen, en date du 16 avril 2014, et le Conseil, en date du 29 avril 2014, ont décidé, conformément à l'article 153, paragraphe 2, point a) et de l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

    «Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant une plateforme européenne dans l’objectif de renforcer la coopération visant à prévenir et à décourager le travail non déclaré»

    COM(2014) 221 final — 2014/0124 (COD).

    La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 27 août 2014.

    Lors de sa 501e session plénière des 10 et 11 septembre 2014 (séance du 10 septembre 2014), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 172 voix pour, 88 voix contre et 22 abstentions.

    1.   Conclusions et recommandations

    Le Comité économique et social européen (CESE):

    1.1

    Considère que le travail non déclaré est un problème qui concerne, à des degrés certes différents, tous les États membres et qu'il met dès lors en péril les idéaux européens en matière de légalité, de sécurité, de solidarité, de justice sociale et fiscale, de libre concurrence des marchés et de libre circulation des travailleurs dans l'UE.

    1.2

    Estime que la lutte contre le travail non déclaré, reposant sur des mesures de prévention, de contrôle et d'action pertinentes, constitue un choix stratégique fondamental pour permettre de régulariser ledit travail et dynamiser la compétitivité du système économique et social de l'Union européenne (UE) conformément aux priorités et aux lignes directrices définies par la stratégie Europe 2020.

    1.3

    Salue la proposition de créer une plateforme européenne pour renforcer la coopération en matière de lutte contre le travail non déclaré. Cette proposition est en cohérence avec diverses déclarations par lesquelles le Parlement européen, le Conseil et le CESE lui-même ont rappelé, ces dernières années, la nécessité de mettre en œuvre une stratégie de création d'emplois, de croissance intelligente, durable et inclusive et de collaboration accrue en matière de lutte contre le travail non déclaré qui soit coordonnée à l'échelon européen et vienne ainsi combler le vide existant au sein de l'UE, le travail non déclaré ayant jusqu'à présent été traité de manière asymétrique et insuffisamment coordonnée.

    1.4

    Accueille favorablement la proposition relative à la mise en place d'une plateforme européenne à laquelle participeraient obligatoirement tous les États membres et estime qu'une participation conjointe et coordonnée de tous les pays de l'UE permettrait de s'attaquer aux aspects transfrontaliers et aux problèmes liés à la présence de travailleurs extracommunautaires non déclarés en situation irrégulière.

    1.5

    Tout en reconnaissant que le travailleur non déclaré et le travailleur indépendant faussement déclaré — ou faux indépendant — sont deux notions distinctes, estime correct d'intégrer le faux travail indépendant parmi les formes de travail non déclaré que la plateforme doit prévenir, décourager et réprimer en raison de ses conséquences négatives sur: i) les droits et garanties des travailleurs; ii) le déroulement normal de la libre concurrence des marchés et iii) la libre circulation des travailleurs dans l'UE.

    1.5.1

    Espère que les travaux de la plateforme, s'exerçant dans le respect des législations et pratiques nationales, permettront, grâce à la définition de la catégorie du faux indépendant et à l'évaluation des expériences acquises dans les différents États membres, de déboucher sur une stratégie de lutte efficace.

    1.6

    Souscrit pleinement aux missions et tâches de la plateforme, mais considère que le mandat de celle-ci peut être étendu à la possibilité de formuler des recommandations sur des actes législatifs, tant au niveau de l'UE que des États membres, à même de garantir la mise en œuvre d'une stratégie plus efficace (par exemple en proposant des actions de coopération transfrontalières plus poussées en matière d'inspection, de contrôles et de répression).

    1.7

    Estime que les États membres doivent obligatoirement associer à la désignation du point de contact national les partenaires sociaux et les organisations représentant la société civile qui, ayant déjà développé une connaissance spécifique du travail non déclaré, apportent très certainement une valeur ajoutée à la stratégie de lutte contre ce phénomène.

    1.7.1

    Juge opportun que les réunions de la plateforme européenne soient correctement préparées grâce à des réunions préparatoires et des réunions d'information permettant la diffusion des résultats des travaux de la plateforme (et garantissant ainsi une transparence complète de ses activités).

    1.8

    Considère que les mesures destinées à prévenir et à décourager le travail non déclaré doivent conjuguer divers instruments — des mesures de réglementation intelligente soutenues par des contrôles et des sanctions — visant à garantir un cadre juridique stable et prévisible; il convient de réduire les coûts de mise en œuvre de la législation, d'éviter une imposition excessive du travail, d'utiliser des moyens efficaces d’encourager les employeurs à déclarer leur main-d’œuvre et à se conformer à la loi, y compris par des incitations fiscales et des systèmes simplifiés de paiement des impôts et des cotisations sociales, et d'introduire des mesures d'incitation fiscale pour favoriser la régularisation du travail non déclaré.

    1.9

    Dans le cadre de la stratégie définie par l'UE afin de lutter contre le travail non déclaré, le CESE s'est constamment efforcé, ces dernières années, de promouvoir et de stimuler le partage d'outils, de politiques et de bonnes pratiques en la matière afin d'intervenir tant sur les facteurs économiques que sur le contexte culturel et social. Aussi le CESE espère-t-il qu'à la faveur de la création de la plateforme, son rôle sera officiellement reconnu et qu'il sera invité à faire partie de ses observateurs.

    1.10

    S'agissant de la sensibilisation de l'opinion publique, est d'avis qu'il conviendrait de renforcer la capacité d'implication de la société civile, en particulier grâce à une action conjointe du CESE et des conseils économiques et sociaux nationaux dans le cadre des activités menées par le comité de pilotage de la stratégie Europe 2020 et des autres organes du CESE.

    1.11

    Attend de la plateforme qu'elle reconnaisse le rôle que pourront jouer:

    Eurostat, en élaborant des évaluations permettant de cerner l'ampleur et la dynamique de l'économie souterraine et du travail non déclaré dans l'UE;

    Eurofound, en créant une banque de données interactive des bonnes pratiques en matière de lutte contre le travail non déclaré au niveau européen;

    l'OCDE, en fournissant un appui technique pour comprendre le phénomène.

    1.12

    Juge opportun que la plateforme se dote d'un système de suivi et d'évaluation grâce à un système d'indicateurs «ad hoc» et d'évaluateurs externes à la Commission.

    2.   Le phénomène du travail non déclaré dans l'Union européenne

    2.1

    Au sein de l’Union européenne (UE), le travail non déclaré est défini comme «toute activité rémunérée de nature légale, mais non déclarée aux pouvoirs publics, […] tenant compte des différences existant entre les systèmes réglementaires des États membres» (1). Relève également de cette définition le travail faussement déclaré, ou faux travail indépendant, à savoir le fait, pour un travailleur, d'exercer une activité salariée en vertu d'un contrat de prestation de services et compte tenu de la législation et des pratiques nationales en vigueur, bien qu'il soit officiellement déclaré comme travailleur indépendant (2).

    2.2

    Le travail non déclaré et le travail indépendant faussement déclaré sont des aspects divers d'un phénomène ayant des retombées négatives sur les droits et les garanties des travailleurs, le fonctionnement normal de la concurrence sur un marché libre et la libre circulation des travailleurs dans l'UE. Il est parfaitement cohérent d'intégrer le faux travail indépendant parmi les formes de travail non déclaré contre lesquelles doit lutter la plateforme, dans la mesure où ce type d'irrégularité prend de l'ampleur en raison de la tertiarisation du travail non déclaré et prive les travailleurs de leurs droits et garanties de la même manière que le travail non déclaré (3).

    2.2.1

    Comme l'a déjà fait observer le CESE (4), pour l'instant, il n'existe pas au niveau européen de définition univoque du travail indépendant et par conséquent, chaque autorité compétente se réfère au cadre législatif national, ce qui complique la mise en œuvre d'une stratégie de lutte contre le travail indépendant faussement déclaré au niveau européen, en particulier dans le contexte du travail transfrontalier.

    2.2.2

    Dans ce contexte, le CESE s'est déjà déclaré favorable à la réalisation d'une évaluation des différentes expériences acquises dans les États membres afin de tirer une série de conclusions et de formuler des recommandations en faveur d'une stratégie efficace de lutte contre le travail indépendant fictif ou faussement déclaré. Dans son avis sur «L'abus du statut de travailleur indépendant» (5), le CESE soulignait la nécessité de parvenir à une réglementation fiable en adoptant une définition du statut de faux travailleur indépendant à même de protéger les indépendants et les véritables microentreprises contre les risques d'une concurrence déloyale.

    2.2.2.1

    Cette position est cohérente avec la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne qui, dans le but de garantir le fonctionnement normal des marchés et la libre circulation des travailleurs tout en réaffirmant la compétence des États membres en matière de définition du statut de salarié et d'indépendant, a fourni des orientations pour une définition générale, au moyen de normes, dans le but de garantir une application uniforme des dispositions prévues par les traités (6).

    2.2.2.2

    Le Comité estime que, grâce à cette orientation, le rôle socio-économique du travail indépendant serait encore renforcé, puisque seuls les authentiques travailleurs indépendants entreraient dans cette catégorie. Toute personne qui peut librement choisir d'offrir ses services de façon indépendante verrait ainsi respecter son statut de travailleur indépendant. Le CESE se limite à donner des orientations aux États membres en leur proposant des modèles de bonnes pratiques.

    2.3

    Le phénomène du travail non déclaré ou faussement déclaré est hétérogène et complexe et concerne un grand nombre d'acteurs très différents: salariés non couverts par la sécurité sociale, sans contrat ou payés en partie «de la main à la main», travailleurs familiaux, travailleurs ne déclarant pas une deuxième activité, indépendants choisissant de ne pas se régulariser, faux indépendants, immigrés en situation irrégulière qui effectuent un travail non déclaré ou travailleurs de pays tiers réalisant de la sous-traitance pour les États membres de l'UE sans bénéficier des normes minimales d'un travail décent (7). Cette hétérogénéité rend le travail non déclaré difficile à combattre et exige la mise en œuvre de stratégies spécifiques.

    2.4

    Le travail non déclaré est un problème qui concerne l'ensemble des États membres et un phénomène en contradiction avec les idéaux européens de légalité, de sécurité, de solidarité, de justice sociale et fiscale, de libre concurrence des marchés et de libre circulation des travailleurs dans l'UE.

    2.4.1

    S'il est nécessaire de s'attaquer sérieusement au travail non déclaré, c'est en raison de ses multiples effets, tant sur les entreprises que sur les travailleurs, ainsi que sur les budgets publics:

    la concurrence entre les entreprises est faussée en raison de la concurrence déloyale qui s'exerce entre celles qui respectent les règles et celles qui ne le font pas, ce qui contribue à maintenir en vie des activités qui auraient probablement été écartées du marché; en outre, le fait que des entreprises ne s'agrandissent pas afin de rester dans l'économie souterraine, ne disposent pas d'un accès au crédit et ne peuvent avoir accès aux possibilités offertes par les marchés publics est source d'inefficacité dynamique;

    les travailleurs vivent dans des conditions d'insécurité sur le plan physique, ainsi qu'en matière de revenus, d'emploi et de sécurité sociale, ce qui a des conséquences non seulement sur le plan éthique, cette situation affectant leur dignité, mais aussi du point de vue professionnel, étant donné qu'ils ne bénéficient pas de possibilités de formation permanente, de recyclage professionnel, de réévaluation des fonctions, des processus de production et des produits;

    les finances publiques accusent ainsi une perte de recettes, ce qui a pour effet de faire baisser les rentrées fiscales et les prélèvements sociaux (manque à gagner fiscal) et de contribuer à une répartition inéquitable du coût des services publics et de l'État providence (parasitisme).

    2.4.2

    Actuellement, le travail non déclaré existe, à des degrés variés, au sein de l'UE dans différents secteurs: l'agriculture, la construction, le secteur manufacturier artisanal (textile, habillement, chaussures, etc.), le commerce de détail, l'hôtellerie, la restauration, les services de manutention et de réparation, les services de soins aux personnes et les services domestiques (8).

    2.5

    Les estimations en matière de travail non déclaré varient largement et la quantification statistique du phénomène à l'échelle de l'UE est assez complexe. Ce problème est mis en évidence par les conclusions des dernières études réalisées en la matière (9). Cette opacité a évidemment une incidence directe sur la capacité à mettre en œuvre des mesures efficaces qui exigeraient des actions ciblées à caractère sectoriel.

    2.5.1

    Dans l'une des dernières études réalisées par Eurofound, 18,6 % des personnes interrogées dans les 27 États membres de l'UE déclaraient avoir exercé, en 2008, un travail non déclaré (10). De ces 18,6 %, 31,3 % étaient des salariés dont la rémunération était payée en partie «de la main à la main» et non déclarée par l'employeur (en général un quart environ du salaire); 14,4 % étaient des salariés non déclarés; 14,4 % des travailleurs indépendants non déclarés et 39,7 % prestaient des services rémunérés entre personnes ayant des liens familiaux, sociaux, amicaux, etc. Selon le dernier sondage Eurobaromètre (11) de 2013 (12), 4 % seulement des personnes interrogées ont admis qu’elles effectuaient du travail non déclaré. Toutefois, 11 % ont reconnu avoir fait l’acquisition de biens ou de services au cours de l’année précédente, alors qu’elles avaient de bonnes raisons de croire qu’ils provenaient du travail non déclaré. Il existe des variations considérables entre les divers pays de l’UE (13).

    2.5.2

    À ce jour, il existe une incertitude quant à la dynamique de l'économie souterraine au cours de la crise. Ce phénomène risque de s'accentuer dans les secteurs d'activité et pour les types d'empois où il existe déjà, et de s'étendre à d'autres (par exemple avec le développement des technologies de l'information et de la communication) (14).

    2.6

    Par ailleurs, le processus de mondialisation et les changements sociaux et démographiques créent plus d'espace pour l'économie souterraine et le travail non déclaré, raison pour laquelle les politiques de lutte doivent pouvoir évoluer en conséquence. Dans ce contexte, la capacité d'intervention des différents pays est certainement limitée. C'est particulièrement évident en ce qui concerne les aspects transnationaux du travail non déclaré.

    2.7

    La participation des sans-papiers au travail non déclaré est un problème sérieux qui doit être résolu dans le cadre d'une stratégie globale de lutte contre l'immigration irrégulière. Pour nombre d'immigrés en situation irrégulière, le travail non déclaré est un passage obligé qui constitue une stratégie de survie. En outre, le travail non déclaré peut favoriser grandement l'immigration irrégulière.

    3.   Observations générales

    3.1

    La décision de créer une plateforme européenne a été prise au terme d'un long processus de prise de conscience de la gravité de ce phénomène et élaborée soigneusement par les principales institutions européennes (15).

    3.2

    Le CESE considère que la proposition consistant à créer une plateforme européenne à laquelle tous les États membres sont tenus de participer est une initiative cohérente de la part de l'UE, dans la mesure où le travail non déclaré est un problème qui concerne aujourd'hui l'ensemble des États membres, à des degrés certes différents mais avec un certain nombre de points communs.

    3.2.1

    En outre, la mise en place de cette forme de coopération entre les États membres est d'autant plus importante qu'il convient de garantir le respect et la sauvegarde des idéaux européens de solidarité et de justice sociale, de la libre concurrence des marchés et des principes fondamentaux de libre circulation des travailleurs de l'UE, et de répondre aux questions liées aux aspects transfrontières du travail non déclaré ainsi qu'aux défis que pose la mobilité du travail.

    3.2.2

    La création de la plateforme devra garantir une meilleure coordination entre les différents comités et groupes de travail en place dans les États membres, comblant ainsi le vide qui existe au niveau de l'UE, au sein de laquelle le travail non déclaré a jusqu'à présent été traité de manière asymétrique et insuffisamment coordonnée.

    3.2.3

    La participation conjointe et coordonnée de tous les États membres de l'UE est essentielle pour renforcer l'engagement en matière de lutte contre les différentes formes de travail non déclaré (y compris le faux travail indépendant), de traitement des aspects transfrontières et des problèmes liés à la présence de travailleurs extracommunautaires non déclarés en situation irrégulière.

    3.3

    Le CESE se félicite que la proposition relative à la plateforme, telle qu'elle est formulée, respecte pleinement, et devra continuer de respecter, les principes de subsidiarité et de proportionnalité en vigueur dans l'UE.

    3.3.1

    Les mesures visant à prévenir et à décourager le travail non déclaré restent de la compétence des États membres. Les sanctions non pénales (administratives ou non) et pénales sont fixées sur la base du principe de légalité, dans le respect de la procédure et des actes juridiques en vigueur dans les différents États.

    3.4

    La lutte contre le travail irrégulier est un choix stratégique essentiel pour l'UE. Cette stratégie permet de régulariser le travail non déclaré, facteur de croissance économique essentiel, afin de dynamiser la compétitivité du système économique et social de l'UE sur la base des lignes directrices définies par la stratégie Europe 2020.

    3.5

    Les mesures visant à prévenir et à décourager le travail non déclaré doivent cibler les causes réelles de ce phénomène et prendre en compte la nécessité de conjuguer les instruments de lutte contre le travail non déclaré — au moyen de contrôles et de sanctions destinées à combattre les pratiques commerciales ou entrepreneuriales déloyales, inéquitables et non déclarées — et des mesures de réglementation intelligente visant à garantir un cadre juridique stable et prévisible.

    3.5.1

    Il est souhaitable de créer un environnement favorable aux entreprises et aux travailleurs qui réduise les coûts de mise en œuvre des dispositions, réforme et simplifie les procédures administratives et budgétaires, et améliore les législations relatives au travail et à la sécurité sur le lieu de travail, au travail saisonnier et occasionnel et aux nouvelles formes de travail.

    3.5.2

    Les politiques d'incitation fiscale peuvent jouer un rôle important dans le cadre des actions visant à prévenir et à décourager le travail non déclaré, grâce à l'introduction de réductions d'impôts récompensant les comportements marqués par le respect des règles et favorisant la régularisation du travail non déclaré, notamment le travail domestique et les services de soins aux personnes.

    3.6

    Lors de la création de la plateforme européenne, il convient d'éviter tout chevauchement avec les initiatives et les formes de coopération existantes, ainsi que des obligations de déclaration inefficaces pour résoudre le problème et, partant, superflues.

    4.   Observations particulières

    4.1

    Au vu des informations disponibles — souvent lacunaires — sur l'ampleur et les dynamiques du travail non déclaré, il est tout à fait évident que l'action des autorités nationales chargées de faire appliquer la législation serait renforcée par l'apport des connaissances directes dont disposent les partenaires sociaux ainsi que les organisations de PME, les professions libérales, l'économie sociale et, d'une manière plus générale, les organisations représentant la société civile. Ce flux d'informations est en effet la meilleure garantie pour guider les travaux de la plateforme de la manière la plus efficace.

    4.2

    S'agissant de la désignation du point de contact unique, il importe que les États membres soient tenus d'associer les partenaires sociaux et invitent les organisations de la société civile qui jouent un rôle déterminant dans la lutte contre le travail non déclaré à l'échelon national.

    4.2.1

    Il est essentiel que les réunions de la plateforme européenne soient bien préparées dans chaque État membre — dans le cadre d'une réunion préparatoire — et suivies par une réunion au niveau national qui permettra de diffuser les conclusions des travaux de la plateforme.

    4.3

    Le CESE a souligné la nécessité de renforcer la lutte contre ce type de travail par un «échange systématique d'informations, de données et d'analyses au niveau de l'UE, de manière à assurer la participation et la coopération des autorités responsables et des partenaires sociaux concernés» (16).

    4.3.1

    Le CESE s'est constamment efforcé de promouvoir et de stimuler le partage d'outils, de politiques et de bonnes pratiques afin d'intervenir tant sur les facteurs économiques que sur le contexte culturel et social. Aussi le Comité demande-t-il qu'à la faveur de la création de la plateforme, son rôle soit officiellement reconnu et qu'il fasse donc partie des observateurs de la plateforme.

    4.4

    L'action de sensibilisation de l'opinion publique prévue par la plateforme est, pour tous les États membres, une occasion importante d'imprimer un certain élan aux mesures de prévention, de réduction et de répression du phénomène du travail non déclaré. À cet égard, il ne faudrait pas sous-estimer la capacité d'implication de la société civile, au travers d'une action conjointe du CESE et des conseils économiques et sociaux nationaux dans le cadre du comité de pilotage de la stratégie Europe 2020 et d'autres structures du CESE.

    4.4.1

    Les autorités nationales ayant joué un rôle insuffisant en matière de prévention, d'information et de conseil (17), il importe que la plateforme examine des mesures de ce type notamment dans le cadre d'activités communes, telles que des campagnes européennes, qui sont du reste prévues à l'article 4, point h).

    4.5

    Le CESE souscrit pleinement à la définition des missions et des tâches de la plateforme. L'échange de bonnes pratiques et d'informations ainsi que le développement d'analyses, de recherches et de compétences (au moyen de cours de formation communs) constituent certainement un premier pas vers la mise en œuvre d'actions opérationnelles transfrontières coordonnées. À cet égard, le CESE serait favorable à un élargissement du mandat de la plateforme afin qu'elle puisse également formuler des recommandations sur des actes législatifs, tant au niveau de l'UE que des États membres, à même de garantir la mise en œuvre d'une stratégie de lutte plus efficace (par exemple en proposant des actions de coopération transfrontalières plus poussées en matière d'inspection, de contrôles et de répression).

    4.6

    Comme le CESE l'a mentionné dans un de ses précédents avis, la plateforme devrait promouvoir les conditions permettant de réaliser une évaluation quantitative et qualitative i) du phénomène du travail irrégulier (qui varie fortement d'un État membre à l'autre); ii) des incidences économiques et sociales négatives qui ont à leur tour des répercussions différentes dans les États membres en fonction des conditions structurelles et du contexte; iii) de l'efficacité des mesures de répression mises en œuvre au sein des États membres.

    4.6.1

    Dans ce contexte, la création de la plateforme revêt une importance particulière et il est souhaitable qu'Eurostat et Eurofound puissent jouer un rôle important au sein de celle-ci.

    Eurostat pourrait fournir un soutien technique pour résoudre les problèmes méthodologiques concernant les estimations de la portée et de l'évolution de l'économie souterraine et du travail non déclaré, qui ne sont toujours ni complètes ni communes;

    Eurofound pourrait développer, à l'appui des travaux de la plateforme, la base de données dont cet organe dispose actuellement pour en faire une base de données interactive (banque de connaissances interactive) des bonnes pratiques en matière de lutte contre le travail non déclaré.

    4.7

    L'OCDE développe depuis plusieurs années une expérience spécifique sur le travail non déclaré (18), et le CESE juge dès lors opportun qu'elle soit invitée à participer à la plateforme européenne en qualité d'observateur.

    4.8

    Le suivi des travaux de la plateforme doit non seulement être continu et ne pas se limiter à un examen tous les quatre ans, mais doit aussi impérativement veiller à ce que des évaluateurs externes participent véritablement à la sélection des indicateurs de résultat et d'incidence ainsi qu'à l'évaluation du programme de la plateforme.

    Bruxelles, le 10 septembre 2014.

    Le Président du Comité économique et social européen

    Henri MALOSSE


    (1)  COM (2007) 628.

    (2)  COM(2014) 221 final.

    (3)  Parlement européen (2013), Social protection rights of economically dependent self-employed workers. Étude de B. Floren (2013), Fake Self-employment in the EU — A comparison between the Netherlands and the UK. Université de Tilburg.

    (4)  CES2063-2012_00_00_TRA_PA.

    (5)  JO C 161 du 6.6.2013, pp. 14-19.

    (6)  Comme le fait observer B. Floren (2013), op. cit., l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) C-66/85 du 3.7.1986 dans l'affaire Lawrie-Blum contre Land Baden-Württemberg, définit le travailleur salarié comme «une personne qui accomplit, pendant un certain temps, en faveur d'une autre et sous la direction de celle-ci, des prestations en contrepartie desquelles elle touche une rémunération». Cette définition ayant été adoptée dans de récents arrêts de la CJUE (affaires jointes C-22/08 et C-23/08, Athanasios Vatsouras et Josif Koupatantze contre Arbeitsgemeinschaft (ARGE) Nürnberg 900; C-289/99 du 20/11/2001, Jany et autres), elle a implicitement fixé les conditions pour définir également, par exclusion, le travail indépendant. En témoigne le fait que dans son arrêt C-268/99, la CJUE affirmait déjà explicitement que «doit être qualifiée d'activité non salariée (...) l'activité qu'une personne exerce hors d'un lien de subordination».

    (7)  Commission européenne (2014), Le travail non déclaré au sein de l'Union européenne. Eurobaromètre spécial 402; A.T. Kearney, VISA, Schneider, F., (2013) The Shadow Economy in Europe.

    (8)  Commission européenne (2014), Op. cit.; Commission européenne (2013), Employment and Social Developments in Europe; Hazans, Mihails (2011), Informal Workers across Europe: Evidence from 30 European Countries. Banque mondiale; Koettl, Johannes; Packard, Truman; Montenegro, Claudio E. (2012), In From the Shadow: Integrating Europe's Informal Labor. Washington DC, Banque mondiale.

    (9)  Voir en particulier: Eurofound (2013), Le travail non déclaré dans les 27 États membres de l'UE et en Norvège: approches et mesures depuis 2008; Eurofound (2013) [b], Lutte contre le travail au noir en Croatie et dans quatre pays candidats à l'adhésion à l'UE; Rapport Eurobaromètre spécial 402, Le travail non déclaré dans l'UE, mars 2014.

    (10)  Eurofound (2013) [b].

    (11)  Tous les chiffres sont le résultat d’enquêtes directes, fondées sur des entretiens en face à face avec des citoyens de l’UE. Le degré de sensibilisation, les définitions nationales, la transparence du travail non déclaré et la confiance dans l’enquêteur sont donc autant de facteurs importants qui incitent les citoyens à indiquer s’ils ont effectué ou bénéficié du travail non déclaré.

    (12)  Eurobaromètre spécial no 402 sur le travail non déclaré dans l'Union européenne, 2013

    http://ec.europa.eu/public_opinion/archives/ebs/ebs_402_en.pdf

    (13)  COM(2014) 221 final.

    (14)  Commission européenne, 2013, op. cit.

    (15)  Voir les documents suivants: COM(2010) 2020, COM(2012) 173, décision 2010/707/UE du Conseil du 21 octobre 2010, résolution du Parlement européen du 14 janvier 2014 (2013/2112(INI) –14/01/2014).

    (16)  JO C 177 du 11.6.2014, pp. 9-14.

    (17)  Dans le cadre des recommandations par pays de 2014, il a été recommandé spécifiquement aux pays suivants de prendre des mesures pour lutter contre le phénomène: Bulgarie, Croatie, Hongrie, Italie, Lettonie, Roumanie et Espagne.

    (18)  OCDE, 2003, Manuel sur la mesure de l'économie non observée; OCDE, 2014, The Non-Observed Economy in the System of National Accounts, Gyomai, G:, van de Ven, P., Statistics Brief, no 18.


    ANNEXE

    à l'Avis du Comité économique et social européen

    Les amendements suivants ont été rejetés, bien qu'ils aient recueilli au moins le quart des suffrages exprimés:

    Paragraphe 1.5

    Modifier comme suit:

    «Tout en reconnaissant Fait observer que le travailleur non déclaré et le travailleur indépendant faussement déclaré – ou faux indépendant – sont deux notions distinctes, estime correct d'intégrer le faux travail indépendant parmi les formes de travail non déclaré que la plateforme doit prévenir, décourager et réprimer en raison de ses conséquences négatives sur i) les droits et garanties des travailleurs; ii) le déroulement normal de la libre concurrence des marchés et iii) la libre circulation des travailleurs dans l'UE. Le CESE a déjà souligné  (1) que “davantage de preuves fiables sont nécessaires” en la matière, en recommandant que “le règlement des problèmes spécifiques des indépendants fasse l'objet d’un examen dans le cadre du dialogue social, à l'échelon aussi bien européen que national, et que les organisations qui représentent leurs intérêts aient la possibilité de participer au dialogue social”.»

    Résultat du vote

    Voix pour

    :

    107

    Voix contre

    :

    153

    Abstentions

    :

    12

    Paragraphe 1.5.1

    Modifier comme suit:

    «Espère que les travaux de la plateforme, s'exerçant dans le respect des législations et pratiques nationales et sur la base de l'évaluation des expériences acquises dans les différents États membres, encourageront la coopération entre États membres par le biais d’initiatives visant à améliorer les connaissances, à développer les échanges d’informations et de meilleures pratiques, à promouvoir des approches novatrices et à évaluer les expériences permettront, grâce à la définition de la catégorie du faux indépendant et à l'évaluation des expériences acquises dans les différents États membres, de déboucher sur une stratégie de lutte efficace».

    Résultat du vote

    Voix pour

    :

    113

    Voix contre

    :

    149

    Abstentions

    :

    10

    Paragraphe 1.6

    Modifier comme suit:

    «Souscrit pleinement aux missions et tâches de la plateforme, mais considère que le mandat de celle-ci peut être étendu à la possibilité de formuler des recommandations sur des actes législatifs, tant au niveau de l'UE que des États membres, à même de garantir la mise en œuvre d'une stratégie plus efficace (par exemple en proposant des actions de coopération transfrontalières plus poussées en matière d'inspection, de contrôles et de répression). Souscrit pleinement aux missions et tâches de la plateforme, dans la mesure où elles n'ont qu'une valeur indicative ».

    Résultat du vote

    Voix pour

    :

    114

    Voix contre

    :

    150

    Abstentions

    :

    9

    Paragraphe 2.1

    Modifier comme suit:

    «Au sein de l’Union européenne (UE), le travail non déclaré est défini comme “toute activité rémunérée de nature légale, mais non déclarée aux pouvoirs publics, […] tenant compte des différences existant entre les systèmes réglementaires des États membres”  (2) . Relève également de cette définition le travail faussement déclaré, ou faux travail indépendant, à savoir le fait, pour un travailleur, d'exercer une activité salariée en vertu d'un contrat de prestation de services et compte tenu de la législation et des pratiques nationales en vigueur, bien qu'il soit officiellement déclaré comme travailleur indépendant (3) ».

    Résultat du vote

    Voix pour

    :

    104

    Voix contre

    :

    142

    Abstentions

    :

    6

    Paragraphe 2.2

    Modifier comme suit:

    «Le travail non déclaré et le travail indépendant faussement déclaré sont des aspects divers d'un phénomène ayant des retombées négatives sur les droits et les garanties des travailleurs, le fonctionnement normal de la concurrence sur un marché libre et la libre circulation des travailleurs dans l'UE. Le statut des indépendants faussement déclarés est fixé par le cadre juridique national, par la définition et les limites juridiques distinguant entre travail salarié et travail indépendant, et l'adoption des mesures nécessaires pour respecter le régime adéquat en matière d'imposition et de paiement des cotisations de sécurité sociale relève de la compétence de chaque État membre. Ainsi, le problème du faux travail indépendant ne peut être traité au niveau de l'UE sans qu'il soit fait référence à la disparité des définitions et des statuts du travailleur indépendant suivant les États membres. Il est parfaitement cohérent d'intégrer le faux travail indépendant parmi les formes de travail non déclaré contre lesquelles doit nécessaire de lutter contre le faux travail indépendant la plateforme, dans la mesure où ce type d'irrégularité prend de l'ampleur en raison de la tertiarisation du travail non déclaré et prive les travailleurs de leurs droits et garanties de la même manière que le travail non déclaré6».

    Résultat du vote

    Voix pour

    :

    112

    Voix contre

    :

    142

    Abstentions

    :

    10

    Paragraphe 2.2.1

    Modifier comme suit:

    «Comme l'a déjà fait observer le CESE4, pour l'instant, il n'existe pas au niveau européen de définition univoque du travail indépendant et par conséquent, chaque autorité compétente se réfère au cadre législatif national, ce qui complique la mise en œuvre d'une stratégie de lutte contre le travail indépendant faussement déclaré au niveau européen, en particulier dans le contexte du travail transfrontalier. Le CESE a déjà fait valoir que  (4) : “Le travail indépendant prend des formes différentes d'un État membre à l'autre” et que “Les définitions divergent non seulement d'un pays européen à l'autre, mais aussi dans le droit de l'UE” ».

    Résultat du vote

    Voix pour

    :

    115

    Voix contre

    :

    151

    Abstentions

    :

    5

    Paragraphe 2.2.2

    Modifier comme suit:

    «Dans ce contexte, le CESE s'est déjà déclaré favorable à la réalisation d'une évaluation des différentes expériences acquises dans les États membres afin de tirer une série de conclusions et de formuler des recommandations en faveur d'une stratégie efficace de lutte contre le travail indépendant fictif ou faussement déclaré. Dans son avis sur “L'abus du statut de travailleur indépendant”5, le CESE soulignait la nécessité de parvenir à une réglementation fiable en adoptant une définition du statut de faux travailleur indépendant à même de protéger les indépendants et les véritables microentreprises contre les risques d'une concurrence déloyale que “davantage de preuves fiables sont nécessaires pour évaluer le nombre de travailleurs concernés et les frontières les plus touchées. Par conséquent, des recherches d'experts plus approfondies s'imposent.” Le CESE recommandait par ailleurs que “le règlement des problèmes spécifiques des indépendants fasse l'objet d’un examen dans le cadre du dialogue social, à l'échelon aussi bien européen que national, et que les organisations qui représentent leurs intérêts aient la possibilité de participer au dialogue social” ».

    Résultat du vote

    Voix pour

    :

    113

    Voix contre

    :

    156

    Abstentions

    :

    9

    Paragraphe 3.3

    Modifier comme suit:

    «Le CESE se félicite que l La proposition relative à la plateforme, telle qu'elle est formulée, doit respecter pleinement, et devra continuer de respecter, l'acquis communautaire et les principes de subsidiarité et de proportionnalité en vigueur dans l'UE».

    Résultat du vote

    Voix pour

    :

    105

    Voix contre

    :

    152

    Abstentions

    :

    13


    (1)  JO C 161, 6.6.2013, pp. 14-19.

    (2)  COM(2007) 628.

    (3)  COM(2014) 221 final.

    (4)  JO C 161, 6.6.2013, pp. 14-19.


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