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Document 52011AE0359

Avis du Comité économique et social européen sur la «Feuille de route pour un système à faible intensité de carbone d’ici à 2050» (avis exploratoire)

JO C 107 du 6.4.2011, p. 37–43 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

6.4.2011   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 107/37


Avis du Comité économique et social européen sur la «Feuille de route pour un système à faible intensité de carbone d’ici à 2050» (avis exploratoire)

2011/C 107/08

Rapporteur: M. PEZZINI

Le 12 mai 2010, la Commission européenne a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Feuille de route pour un système à faible intensité de carbone d’ici à 2050»

(avis exploratoire).

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 2 février 2011.

Lors de sa 469e session plénière des 16 et 17 février 2011 (séance du 17 février 2011), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 193 voix pour, 3 voix contre et 5 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le Comité estime qu’il est très important de définir une véritable politique européenne intégrée de l’énergie et d’introduire dans ce cadre une stratégie communautaire à moyen et long terme, qui établisse une feuille de route à l’horizon 2050 visant à réduire de manière compétitive et durable la teneur en CO2 de l’énergie produite, afin d’apporter une réponse globale aux défis des changements climatiques et de satisfaire les besoins sociétaux et industriels de l’UE.

1.2   Pour mettre en place une politique énergétique commune dans un contexte global, le Comité juge nécessaire de créer une «Communauté énergétique intégrée», comme il est prévu à l’article 194 du Traité.

1.3   De l’avis du CESE, la feuille de route 2050 pour une «décarbonisation» de l’énergie devrait être en mesure de:

présenter un éventail de voies de développement possibles pour la production et l’utilisation de l’énergie en Europe;

examiner des pistes consensuelles en matière de transition économique;

définir les modalités du dialogue permanent sur la feuille de route aux différents niveaux;

identifier les actions nécessaires pour une meilleure compréhension des décisions stratégiques;

définir des systèmes de compatibilité économique, respectueux de la concurrence et acceptés par la société;

mettre en évidence les éléments de flexibilité indispensables afin de pouvoir s’adapter rapidement aux changements climatiques, aux nouvelles technologies et au développement économique mondial.

1.4   Le CESE estime qu’il est indispensable de se doter de systèmes de combinaisons de mesures présentant les caractéristiques suivantes:

mesures d’efficacité énergétique;

systèmes sûrs de captage et de stockage du CO2 (CSC);

mécanismes robustes d’échanges de quotas d’émissions;

développement compétitif des énergies renouvelables;

transformation des centrales électriques au profit de systèmes à faible intensité de carbone;

conversion des moyens de transport à la durabilité;

normalisation technique appropriée, à l’échelle internationale;

mesures visant à développer la cogénération efficace (production combinée de chaleur et d’électricité).

1.5   Le Comité considère qu’il faut, lors de l’élaboration de la feuille de route 2050, tenir compte de quatre variables clés:

forte accélération du progrès technique, scientifique et technologique;

engagement de tous les pays et de tous les secteurs concernés à prendre clairement leurs responsabilités;

cadre financier soutenable et fiable dans le temps;

objectifs intermédiaires mesurables et adaptables aux progrès techniques et scientifiques.

1.6   En ce qui concerne les «instruments» du marché énergétique européen intégré, le CESE estime qu’il est indispensable de prévoir dès maintenant, de manière planifiée et consensuelle, des investissements dans les secteurs suivants:

les réseaux intelligents («smart grids») et l’amélioration des réseaux de transport de l’énergie;

la recherche et le développement de programmes conjoints dans les secteurs des énergies durables, des nanosciences et des nanotechnologies, de l’informatique appliquée aux macrosystèmes de réseaux, et des microsystèmes de la domotique;

la capacité à gérer des systèmes complexes et à garantir un cadre de référence stable pour l’industrie et les opérateurs publics et privés;

le renforcement d’un dialogue structuré et interactif avec les partenaires sociaux, les consommateurs et l’opinion publique;

un cadre solide de concertation et de coopération internationale, capable d’associer des pays industrialisés de longue date et des pays plus récemment industrialisés sur des objectifs mesurables définis d’un commun accord.

1.7   Pour ce qui concerne les objectifs à mettre en chantier à court terme, le CESE considère qu’il convient de mettre immédiatement en œuvre les points suivants:

des mesures d’efficacité énergétique, en particulier dans la construction et les transports, en accordant davantage d’attention aux directives européennes;

l’amélioration et la diffusion rapides des mécanismes d’échange de quotas d’émissions;

des systèmes concrets pour la décarbonisation progressive du secteur de l’électricité, avec l’accélération et la diffusion des projets pilotes en cours;

un fort soutien aux expériences menées pour développer l’éventail des technologies à basse émission de carbone à coût raisonnable;

un recours étendu aux énergies alternatives, grâce à des incitations fiscales et financières;

une amélioration des systèmes d’éducation et de formation dans les disciplines scientifiques, fondés sur des modèles multidisciplinaires intégrés;

développement des infrastructures énergétiques et des réseaux transeuropéens, et diffusion de réseaux intelligents normalisés, via des systèmes européens de normalisation;

cadre viable pour la coopération internationale.

1.8   Le Comité est d’avis qu’il faudrait assurer, à moyen terme:

un marché mondial de la technologie à faible émission de carbone, avec des coûts raisonnables et des normes techniques communes au niveau international;

la vérification en temps utile des objectifs intermédiaires, grâce à une prise de responsabilité au sein de l’UE et sur le marché mondial;

une mise à jour des objectifs, en fonction des changements survenus, des découvertes scientifiques et des transformations de la géographie économique et commerciale mondiale;

une redéfinition éventuelle des stratégies qui sont nécessaires pour réduire les émissions de gaz à effet de serre de 60 à 80 %;

une diffusion concrète des instruments communs de gestion des réseaux et des plateformes de stockage et de distribution d’énergie;

une amélioration des mécanismes de gouvernance, favorisant le consensus et le dialogue interactif entre tous les acteurs concernés;

le développement de la technologie de fission nucléaire en passant de la 3e à la 4e génération dans les États membres qui veulent continuer à utiliser cette technologie et le développement de techniques de réutilisation de la plupart des matériaux;

un soutien à la recherche sur la fusion nucléaire, sur la base de l’accord EFDA (European Fusion Development Agreement) et en particulier l’expérimentation JET (Joint European Torus) soutenue par la Commission européenne, qui permettra de lancer ITER après 2020;

un renforcement de la lutte contre la pauvreté énergétique, qui menace d’exclure des couches de plus en plus larges de la population, voire des pays entiers.

1.9   Le Comité estime que, dans une phase préliminaire, il faut mettre en place:

des engagements politiques à adopter un système énergétique intégré à l’échelle de l’UE, avec des règles communes;

des cadres réglementaires harmonisés et stables;

la définition de normes techniques communautaires;

des centrales européennes avec des normes d’interopérabilité compatibles;

des programmes européens pour une formation homogène du personnel;

des mécanismes efficaces d’échange des meilleures pratiques et des technologies disponibles;

des systèmes informatiques interopérables de contrôle et de sécurité;

une politique favorisant la diffusion d’une culture de la durabilité énergétique.

1.10   Le Comité estime qu’il est essentiel de développer et de renforcer une politique de communication cohérente à l’échelle européenne, capable de délivrer efficacement des messages crédibles et accessibles aux différents destinataires concernés, et surtout au grand public.

2.   Introduction

2.1   Si l’existence du changement climatique qui se produit au niveau mondial est largement reconnue, la nature et la portée de ses conséquences le sont moins.

2.2   L’UE doit décider quelle Europe elle souhaite pour 2020 et au-delà. La Commission propose de réaliser une croissance durable au moyen de sa stratégie pour l’énergie 2011-2020, accompagnée d’une feuille de route qui vise à la «décarbonisation» de l’énergie à l’horizon 2050.

2.3   La Commission a invité le CESE à lui présenter deux avis exploratoires distincts sur les perspectives de développement à moyen et long terme: le premier pour l’horizon 2020, et le second pour l’horizon 2050. Le présent avis exploratoire concerne les perspectives à l’horizon 2050.

2.4   La feuille de route 2050 pour une «décarbonisation» de l’énergie devrait être en mesure de:

présenter un éventail de voies de développement compétitif possibles pour la production et l’utilisation de l’énergie en Europe, s’inscrivant dans la ligne des objectifs climatiques à long terme au niveau mondial et des besoins sociétaux et industriels de l’UE;

examiner des pistes consensuelles de transition économique, portant sur les décisions liées à la politique énergétique d’aujourd’hui et de demain, qui soient acceptées par les partenaires sociaux et la société civile, grâce à un dialogue interactif permanent;

définir les modalités du dialogue permanent sur la feuille de route aux différents niveaux, entre décideurs politiques, autorités publiques, gestionnaires et fournisseurs d’énergie, industrie, syndicats, associations environnementales, secteur du commerce et services, usagers des secteurs de l’électricité, de l’immobilier, du tertiaire et des transports, communautés scientifiques et technologiques, établissements d’enseignement, système financier et de crédit, agriculteurs, consommateurs et citoyens;

identifier les actions nécessaires pour une meilleure compréhension des décisions stratégiques nécessaires pour atteindre les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 60 à 80 %, et en particulier en introduisant massivement des nouvelles technologies énergétiques, en vue de stabiliser, à long terme, la concentration de CO2 dans l’air sous les 450 ppmv (parties par million de volume);

définir des systèmes de compatibilité économique, respectueux de la concurrence et acceptés par la société, pour les financements publics et privés, l’imposition fiscale et les programmations budgétaires;

mettre en évidence les éléments de flexibilité indispensables, qui découlent des changements, parfois subits, de la recherche scientifique, du devenir économique et de l’évolution de la culture sociale.

2.5   Parmi tous les scénarios qui sont pour l’instant disponibles en matière de réduction de 80 % des émissions à l’horizon 2050, le CESE estime qu’il convient de conférer un rôle central aux systèmes de combinaisons de mesures présentant les caractéristiques suivantes:

mesures en faveur de l’efficacité énergétique;

diffusion sur le territoire de systèmes de captage et de stockage du CO2 (CSC), et renforcement des mécanismes de régulation des échanges de quotas d’émissions;

augmentation significative de la part des énergies renouvelables;

développement de la technologie de fission nucléaire en passant de la 3e à la 4e génération et soutien à la recherche sur la fusion nucléaire;

augmentation importante de la proportion d’énergie électrique produite avec des systèmes à faible intensité de carbone;

efforts notables pour développer la conversion du transport routier, aérien et naval et réduire la consommation d’énergie dans les logements et le secteur tertiaire;

investissements dans la RDT&D et les transferts de technologies, dans le cadre de l’innovation de marché;

accélération des travaux de normalisation technique, au niveau de l’UE et à l’échelle internationale;

mesures visant à développer la cogénération efficace (production combinée de chaleur et d’électricité).

2.6   En ce qui concerne les «instruments» du marché énergétique européen intégré, qui seront indispensables quelles que soient la combinaison de mesures adoptée et les découvertes effectuées, le CESE estime qu’il convient d’investir pour:

développer des réseaux intelligents («smart grids») et des configurations de réseaux capables de développer les technologies de stockage de l’électricité et de la chaleur;

intégrer de manière fonctionnelle dans l’espace énergétique européen de la recherche et de l’innovation les différents programmes de RDT & D et d’innovation technologique;

mettre en place un cadre politique stable et solide qui permette à tous les acteurs concernés d’opérer avec un niveau de certitude raisonnable;

adopter des mesures vigoureuses de renforcement des capacités pour créer un système de niveaux de gouvernance efficaces et précis;

identifier des canaux de coopération internationale stables et pourvus d’une bonne assise.

2.7   Au niveau mondial, le rapport de l’AIE (Agence internationale de l’énergie) ainsi que diverses autres organisations internationales font état d’une série de scénarios selon lesquels le maintien dans la durée de la gestion énergétique actuelle se révélerait indéfendable de différents points de vue: environnemental, économique et social.

2.8   Au niveau mondial, tous les pays devraient s’engager à adopter, d’ici à 2011, des stratégies de développement à faible teneur de carbone dans les secteurs à fortes émissions. Dans le cas contraire, les industries européennes à forte intensité énergétique risquent de voir leur compétitivité baisser sur le plan mondial et donc de délocaliser leur production (fuite de carbone) en dehors de l’Europe sans nullement réduire leurs émissions de CO2. Ces stratégies devraient également inclure, par exemple, une diminution rapide de la déforestation tropicale.

2.9   Les zones stratégiques d’intervention mondiale, identifiées par le G20, se subdivisent en deux groupes, dont le premier est axé sur le court terme et le second sur le moyen terme.

2.9.1   Le premier groupe comporte les mesures visant à promouvoir la demande et à soutenir le rendement, notamment:

l’amélioration de l’efficacité énergétique;

l’amélioration des infrastructures dans le souci de réduire les émissions de carbone;

le soutien des marchés grâce aux technologies propres.

2.9.2   Les mesures à moyen et à long terme visent en revanche à «fidéliser» les investisseurs et les entrepreneurs privés, dans des secteurs destinés à devenir les piliers d’un développement écocompatible. Il s’agit notamment des mesures suivantes:

lancement de projets-pilotes, notamment en matière de CSC;

aide à la recherche au niveau international;

incitations pour investir dans les technologies à faible émission de carbone.

2.10   Selon certains scénarios, les émissions, à l’échelle mondiale, pourraient être réduites de 50 % à l’horizon 2050, grâce à des mesures liées essentiellement aux quatre facteurs suivants:

l’efficacité énergétique pour plus de la moitié;

les sources d’énergie renouvelables pour environ un cinquième;

le captage et la séquestration de CO2 pour un autre cinquième;

le reste étant assuré par des sources d’énergie nucléaires.

En réalité, certaines des technologies prévues par ce scénario ne sont pas encore disponibles ou doivent être sensiblement améliorées et devenir beaucoup moins coûteuses.

2.11   Parmi les technologies à utiliser, le Comité suggère de privilégier le CSC et le développement des véhicules électriques.

2.11.1   S’agissant de ces derniers, l’on s’attend à des progrès technologiques importants concernant:

la capacité de recharge des batteries;

la recharge grâce à l’apport des énergies renouvelables, mises en relation au sein de réseaux intelligents (smart grids);

les techniques d’amortissement, afin de remédier à la discontinuité de certaines énergies renouvelables et au problème du stockage et de la conservation de l’énergie;

les procédures de normalisation, en vue d’un remplacement rapide des batteries des véhicules dans des centres de recharge équipés.

2.12   D’importants progrès sont également attendus, probablement au-delà de 2020, concernant le développement de véhicules à piles à combustible hydrogène.

2.13   Un cadre juridique européen adéquat fait actuellement défaut concernant les véhicules électriques. La Commission a l’intention de remédier à cette situation à court terme (COM(2010) 186 final).

2.14   De l’avis du CESE, une production d’électricité décarbonée offrirait des chances importantes de réduire les émissions dans les secteurs finaux (par exemple, en passant du chauffage au moyen de sources fossiles à l’utilisation de pompes à chaleur au gaz efficaces.

2.15   Le scénario «vertueux» qui permettrait de réduire significativement les émissions dans l’air comporte une combinaison de diverses mesures (dont une production qui combine sources renouvelables et nucléaire, l’efficacité énergétique, des investissements dans les nouvelles technologies et la séquestration de CO2) et l’on estime (rapport PTE 2010, AEI, – Scénarios et stratégies à l’horizon 2050) que pour réduire les émissions de moitié, «le financement public des activités de RD & D concernant les technologies à faible teneur en carbone devra représenter de deux à cinq fois les niveaux actuels», et qu’il faudra adopter «les meilleures pratiques de conception et de mise en œuvre».

2.15.1   Le rapport 2010 de l’AIE sur les perspectives des technologies de l’énergie analyse et compare divers scénarios en présentant les principales options susceptibles de créer un avenir énergétique plus sûr et durable.

2.16   Le CESE juge fondamental de considérer que de nombreux défis énergétiques ont un impact énorme sur les populations locales, lesquelles souhaitent trouver des solutions liées au contexte spécifique dans lequel elles vivent et nourrissent des craintes concernant des réductions ou des limitations de leur niveau de vie et de développement.

2.17   Les progrès à accomplir et/ou à prévoir, sur la base de la feuille de route 2050, pour une véritable révolution énergétique fondée sur des technologies à faibles émissions de carbone, conjugueront plusieurs options, basées sur cinq variables clés:

accélération du progrès technique, scientifique et technologique;

engagement de tous les pays et de tous les secteurs concernés à prendre clairement leurs responsabilités;

cadre financier qui soit soutenable et fiable dans le temps;

objectifs intermédiaires mesurables et adaptables aux progrès techniques et scientifiques;

comportements des différents acteurs par rapport à la «politique annoncée» et au risque de désinformation (excès d’optimisme ou catastrophisme).

3.   Scénarios et options

3.1   Il existe déjà différents scénarios et options proposés par des organismes internationaux publics et privés et par des organisations à but non lucratif, visant à «offrir» des bases pour des stratégies, des politiques et des outils opérationnels.

3.2   Le scénario de référence de ces opérations repose pratiquement toujours sur l’hypothèse que les gouvernements ne mettent pas en place de nouvelles politiques énergétiques et climatiques.

3.3   La différence essentielle que présentent les scénarios basés sur des objectifs réside moins dans l’ampleur de leurs effets que dans les délais de survenue de ceux-ci; ces scénarios définissent les objectifs de réduction de 30 % des émissions de CO2 liées à la consommation d’énergie à l’horizon 2030 et leur réduction de moitié à l’horizon 2050 (par rapport aux niveaux de 2005), et examinent les moyens d’atteindre ces objectifs au moindre coût et le plus rapidement possible, avec un déploiement de technologies peu coûteuses et à faible teneur en carbone:

l’investissement dépasserait de 36 000 milliards d’euros (1 EURO = 1,28 USD) (+ 17 %) celui du scénario de référence, mais les économies de combustible obtenues seraient supérieures de 87 000 milliards d’euros à celles du scénario de référence;

la technologie de CSC serait utilisée et 9,4 Gt de CO2 émis seraient captées dans les installations de production d’électricité (55 %), les installations industrielles (21 %) et les installations de transformation de combustibles (24 %);

les émissions de CO2 générées par les secteurs résidentiel et tertiaire seraient réduites de deux tiers grâce à l’utilisation d’électricité à faibles émissions de CO2, à l’amélioration de l’efficacité énergétique et à l’adoption de technologies peu carbonées ou sans carbone;

environ 80 % des ventes de véhicules légers concerneraient des véhicules hybrides rechargeables, des véhicules électriques ou des véhicules à pile à combustible hydrogène;

les émissions de CO2 dues à la production d’électricité seraient réduites de 76 %; l’intensité de CO2 de cette production tomberait à 67 g de CO2/kWh;

les émissions de CO2 du secteur industriel diminueraient d’environ 25 %, en raison surtout de l’amélioration de l’efficacité énergétique, de la substitution de combustibles, du recyclage des matériaux utilisés, de la valorisation énergétique et du CSC.

3.3.1   Pour tenter d’atteindre ces objectifs, il faudra un ensemble de technologies à faible teneur en carbone et à coûts réduits. Aucune technologie seule ni aucun ensemble réduit de technologies ne sauraient, isolément, assurer un changement de l’ampleur requise.

3.4   La décarbonisation du secteur de l’électricité est cruciale et passera nécessairement par une progression spectaculaire des parts d’énergies renouvelables et du nucléaire, membres qui ont choisi de l’utiliser, ainsi que par l’équipement des centrales thermoélectriques à combustibles fossiles de systèmes de CSC et par le développement de la cogénération.

3.5   Les efforts en matière de recherche, de démonstration et de commercialisation sont fondamentaux si l’on veut que la mise en œuvre des technologies évolue au même rythme que les objectifs de décarbonisation proposés.

3.6   Scénario concernant le développement de la fusion nucléaire

La fusion est la source d’énergie qui alimente le soleil et les étoiles. Sur terre, elle offre la perspective d’une option énergétique à long terme, sûre, à impact bénin pour l’environnement qui peut répondre aux besoins en énergie d’une population mondiale croissante. Dans le cadre de l’accord EFDA, les scientifiques spécialisés dans la fusion manipulent désormais des plasmas à plusieurs centaines de millions de degrés, dans des appareils à fusion à l’échelle industrielle. Le plus grand de ces appareils est le JET (Jet European Torus). Sur la base de ces éléments et d’autres réalisations internationales, le réacteur expérimental ITER – qui représente le projet de recherche sur l’énergie le plus important au monde – est actuellement en construction en France, sa puissance de fusion sera équivalente à celle fournie par un réacteur de dimensions moyennes (500/700 MW). Le réacteur ITER constituera un pont vers un premier réacteur de démonstration et ensuite un réacteur commercial capable de produire en moyenne 1,5 GWe (une centrale électrique à fusion nucléaire consomme peu de combustible. Pour fonctionner pendant un an, une centrale de 1 GW a besoin d’environ 100 kg de deutérium et de trois tonnes de lithium, et génère environ 7 milliards de kilowatts heure. Pour produire la même quantité d’énergie, une centrale au charbon aurait besoin d’environ 1,5 million de tonnes de combustible fossile (source: http://fusionforenergy.europa.eu)).

3.6.1   La réaction primaire qui est à la base de la fusion ne produit ni émissions polluantes, ni déchets nucléaires (il importe de noter que, bien que les parois de la chambre de réaction deviennent radioactives, au cours de la vie du réacteur, grâce à un choix judicieux des matériaux, la radioactivité baisse en quelques décennies. Après 100 ans, tous les matériaux peuvent être recyclés dans un nouveau réacteur [source: www.jet.efda.org ]). La réaction se produit par fusion d’atomes très répandus dans la nature, surtout dans l’eau de mer. De plus, le processus est intrinsèquement sûr.

3.6.2   Les éléments chimiques qui interviennent dans la réaction primaire sont le deutérium, le tritium, le lithium et l’hélium. Le processus de fusion de ces atomes dégage une grande quantité d’énergie, qui est relâchée sous forme de chaleur, dans un échangeur, à une température de 550/650 °C (un réacteur à fission nucléaire de taille moyenne génère une température moyenne de 700 °C). Le développement de matériaux avancés permettrait d’atteindre des températures de 1 000 °C. La vapeur produite alimente la turbine (rotor), qui, à son tour, génère du courant induit (stator).

3.6.3   Un noyau de deutérium (1 proton + 1 neutron) fusionne avec un atome de tritium (1 proton + 2 neutrons). Cette fusion fait naître un noyau d’hélium (2 protons + 2 neutrons) et libère un neutron. Ce neutron fusionne avec un atome de lithium (3 protons + 3 neutrons) et génère un atome d’hélium (2 protons + 2 neutrons) et un atome de tritium (1 proton + 2 neutrons). À l’intérieur de la chambre de réaction (tore), la matière se trouve dans un état particulier qu’on appelle le plasma, qui est à une température moyenne de 200 millions de degrés Celsius.

3.6.3.1   Dans l’ITER, l’énergie nécessaire pour chauffer le plasma est d’environ 50 MW. L’énergie obtenue par le processus de fusion représente donc plus du décuple de celle qui est nécessaire pour démarrer le processus: Q>10.

4.   Observations générales

4.1   Le CESE tient à mettre l’accent sur les questions suivantes concernant la feuille de route 2050:

Coûts et retour sur investissements: passer d’une moyenne annuelle d’environ 130 milliards d’euros, au cours des trois dernières années, à une moyenne de 600 milliards;

Mobilisation de fonds pour l’investissement: assurer un cadre stable pour les investisseurs, prévoir des schémas de retour sur investissement appropriés, garantir des soutiens financiers et des allégements fiscaux;

Décarbonisation du secteur de l’électricité: un changement radical des politiques énergétiques assorti d’investissements considérables pour mettre fin à la dépendance à l’égard des sources fossiles;

Élaboration de projet, fonctionnement et mise en œuvre des réseaux électriques, en assurant la souplesse des réseaux intelligents et des postes de transformation pour mieux gérer les crêtes de charge ainsi que recueillir et redistribuer les différentes formes d’énergie de manière rationnelle (l’apport de sources d’énergie renouvelables grâce à l’utilisation de compteurs intelligents modifie le mode de transport de l’énergie);

Programmes d’efficacité énergétique, en particulier pour réduire les émissions de CO2 du secteur industriel (22 % du total);

Réduction des émissions globales directes et indirectes du secteur du bâtiment (40 % du total), en agissant sur tous les éléments structurels;

Pour le secteur des transports (38 % du total), sur lequel le CESE prépare actuellement un avis séparé, parvenir à une réduction importante des émissions de CO2 à l’horizon 2050 se fera au prix d’une utilisation moindre des carburants traditionnels, d’une augmentation de la proportion d’éthanol et de biodiesel, d’une amélioration de la qualité des carburants gazeux (GPL, GNC [gaz naturel compressé], biogaz) et de découvertes et d’innovations technologiques;

Coordination internationale: il conviendrait que l’Europe, les USA, le Japon, la Chine, l’Inde et le Brésil fixent des objectifs communs pour la période 2030-2050, lesquels tiendraient compte des spécificités de chacun de ces territoires sur le plan du développement économique et de la richesse en ressources naturelles.

4.2   Les objectifs pour la réduction de 20 % des émissions de CO2 à l’horizon 2020 ont déjà été fixés. Le CESE élabore actuellement un avis sur le sujet.

4.3   Le CESE estime qu’il convient, parmi les perspectives de la feuille de route 2050, d’insister sur les aspects fondamentaux suivants:

accélération du progrès technique, scientifique et technologique: augmentation des fonds et programmes, non seulement en matière de changement climatique et de sources d’énergie, mais aussi et surtout concernant l’utilisation et la préservation des ressources naturelles et stratégiques;

engagement de tous les pays, secteurs et acteurs concernés, pour identifier clairement les responsabilités à assumer au sein de l’UE;

viabilité d’un cadre financier fiable dans la durée, conforme au budget de l’UE, au pacte de stabilité et aux politiques budgétaires des États membres;

mesurabilité des objectifs intermédiaires, qui doivent pouvoir s’adapter à l’évolution technique et scientifique;

comportements des différents acteurs sociaux concernant la «politique prévue et annoncée» et le risque de désinformation;

soutien à la culture scientifique et technique et mesures incitatives sur le plan culturel et financier pour augmenter le nombre d’étudiants dans les établissements d’enseignement supérieur à orientation scientifique;

nécessité pour les États membres d’observer et d’appliquer avec plus de rigueur les directives européennes sur l’efficacité énergétique et les économies d’énergie (cf. par exemple le retard de transposition de la directive 2002/91/CE sur la performance énergétique des bâtiments);

amélioration des dispositifs d’enseignement et de formation dans les disciplines scientifiques: ingénierie, physique, chimie fondamentale, architecture, urbanisme et ingénierie des industries de transformation, en veillant à créer des modèles systémiques intégrés, notamment dans le secteur des nanosciences et des nanotechnologies appliquées aux systèmes énergétiques, capables de produire de l’énergie à faibles émissions de CO2;

engagement politique en faveur d’un système communautaire intégré de l’énergie pourvu de règles communes; d’un cadre réglementaire harmonisé et stable; de normes techniques communautaires; d’une normalisation des centrales nucléaires européennes; de schémas communautaires en vue d’harmoniser la formation du personnel; d’échanges des meilleures pratiques et d’informations sur les meilleures technologies disponibles; de systèmes informatiques interopérables de contrôle et de sécurité.

4.4   Aux quatre initiatives industrielles lancées en juillet 2010 (énergie éolienne; solaire; CSC; réseaux intelligents), il convient d’ajouter la bioénergie et la fission nucléaire, plus l’Initiative technologique conjointe sur les piles à combustible et l’hydrogène (FCH JTI), et le projet ITER, pour la fusion nucléaire.

4.5   Le CESE estime qu’il est fondamental de promouvoir une utilisation plus efficace non seulement de l’énergie, mais aussi de toutes les ressources naturelles, en particulier les ressources hydriques.

4.6   Le CESE répète qu’il importe de «donner la priorité au développement de carburants de substitution et de nouvelles technologies pour la production d’énergie motrice, de chaleur et de lumière. Face au changement climatique, la meilleure stratégie est de diversifier les choix énergétiques par rapport aux combustibles fossiles» (cf. CESE 766/2010).

4.7   Le CESE estime nécessaire d’aller plus loin dans la lutte contre la pauvreté énergétique qui menace d’exclure des couches de plus en plus larges de la population (les options «vertes» peuvent s’avérer coûteuses (tarifs majorés et/ou charges fiscales), notamment pour les groupes les plus défavorisés), et de mutualiser l’expertise européenne en vue de créer de nouveaux emplois «verts» - effectifs, durables et compétitifs - et de réduire les inégalités (1), en garantissant aux «citoyens en tant que consommateurs l’accès aux services énergétiques et à l’emploi généré par une économie faiblement émettrice de carbone» (2).

4.8   Selon le CESE, la production d’énergie électrique constitue un champ d’action prioritaire pour le développement des parts de sources d’énergie renouvelable et de production par fission nucléaire en passant du troisième au quatrième type (avec déchets réduits au minimum). Il faut investir dans les technologies de traitement des déchets, en étudiant les possibilités de les réutiliser dans le cadre des nanosciences.

4.9   De l’avis du CESE, les systèmes de CSC revêtent une grande importance pour réduire les émissions; dès à présent, «il convient d’essayer d’accélérer le développement de ce procédé - à un coût abordable et compétitif - afin qu’il puisse être mis en œuvre dès que possible» (3), sans le limiter aux cinq projets pilotes.

4.10   Le CESE estime fondamental de renforcer le marché unique de l’énergie «concernant les infrastructures, le régime de marchés publics, le bon fonctionnement du marché et la protection des consommateurs. […] L’essentiel est de développer les infrastructures énergétiques et les réseaux transeuropéens pour constituer le marché intérieur de l’énergie» (4).

4.11   Le CESE juge indispensable qu’il existe une communauté énergétique intégrée, pour donner corps à l’article premier du traité (TFUE) (5), à travers un cadre de référence européen intégré en matière de compétitivité, de bien-être et de création d’emplois pour les citoyens européens.

Bruxelles, le. 17 février 2011.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  Cf. JO C 48 du 15.02.2011, p.65.

(2)  Cf. JO C 48 du 15.02.2011, p.81.

(3)  JO C 27 du 3.2.2009, page 75.

(4)  Cf. JO C 48 du 15.02.2011, p. 81.

(5)  JO C 83 du 30.3.2010, p.47.


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