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Document 51996AC1262

Avis du Comité économique et social sur l'«Action pour l'emploi - Un pacte de confiance»

JO C 56 du 24.2.1997, p. 36–47 (ES, DA, DE, EL, EN, FR, IT, NL, PT, FI, SV)

51996AC1262

Avis du Comité économique et social sur l'«Action pour l'emploi - Un pacte de confiance»

Journal officiel n° C 056 du 24/02/1997 p. 0036


Avis du Comité économique et social sur l'«Action pour l'emploi - Un pacte de confiance»

(97/C 56/09)

Par lettre de M. Santer en date du 26 juin 1996, le Comité a été invité par la Commission à donner son avis sur la Communication de la Commission sur l'«Action pour l'emploi en Europe - Un pacte de confiance».

Lors de sa réunion du 10 juillet 1996, l'Assemblée plénière a décidé, conformément aux dispositions de l'article 19, premier alinéa, de son Règlement intérieur, de constituer un sous-comité pour préparer les travaux en la matière. Le Sous-Comité a élaboré un projet d'avis le 14 octobre 1996 (rapporteur: M. Chevalier; corapporteurs: MM. Schmitz et Walker).

Le Comité économique et social, au cours de sa 339e session plénière des 30 et 31 octobre 1996 (séance du 31 octobre 1996), a adopté l'avis suivant par 124 voix pour, 4 voix contre et 10 abstentions.

1. Résumé

Le «Pacte de confiance» se définit comme un moyen exceptionnel dans «l'action pour l'emploi en Europe». Le Comité économique et social le situe parmi les éléments de la cohésion économique et sociale voulue par le Traité instituant la Communauté et l'Union; il est conscient que cela confère une importance particulière à l'avis qu'il émet à ce sujet.

Par sa dénomination, le rôle qui lui est assigné et sa composition, le Comité a toujours considéré comme indissociables les deux ordres de préoccupations: l'économique et le social, l'un et l'autre se soutenant réciproquement.

Au cours de la construction de l'Europe, le Comité a apporté une contribution reconnue et appréciée au progrès des facteurs économiques. Il se réjouit des résultats acquis en ce domaine.

Bien qu'en matière de dispositions sociales, de graves et profondes lacunes subsistent encore, le Comité estime très positives les améliorations déjà acquises qu'il a toujours soutenues et qu'il a souvent proposées.

Mais, le Comité lance aujourd'hui un cri d'alarme: l'édifice européen, inachevé et fragile, sera condamné à stagner voire à s'effondrer si, contre le chômage et pour la promotion de l'emploi, les États de l'Union ne prennent pas, dès maintenant, les mesures d'urgence porteuses de solutions nouvelles et d'une extraordinaire gravité qui s'imposent absolument.

1.1. C'est pourquoi le Comité économique et social se félicite de l'initiative prise par M. Jacques Santer, Président de la Commission, en vue d'une «action pour l'emploi en Europe» sous forme d'un «pacte de confiance». Dans l'avis qu'il émet sur le document présenté par M. Santer, le Comité approuve sans réserves les objectifs du pacte de confiance. Le Comité soutient les propositions concrètes visant la traduction de ceux-ci dans les faits, et il ajoute quelques suggestions supplémentaires. Le présent résumé ne répétera pas les points sur lesquels le Comité exprime son accord. Il retiendra seulement les sujets qui ont amené le Comité soit à insister sur le texte de la Commission soit à y ajouter certains éléments.

1.2. Le Comité souligne d'abord la gravité de la crise engendrée par le chômage permanent et la récession de l'emploi. Il estime qu'en Europe, le chômage a pris des proportions critiques. Si l'on n'agit pas efficacement pour réduire le nombre considérable de ses victimes, la cohésion et les valeurs sociales de l'Europe seront menacées et la crédibilité de l'Union et des États qui la composent se trouvera affaiblie. Il pourrait en résulter des divisions sociales mettant en péril le tissu même de la société. La création d'emplois n'est pas seulement une question de bon sens au plan économique, elle est aussi d'une importance vitale au plan social.

1.3. Face à cette situation dramatique, le Comité en appelle à tous les acteurs de la vie politique, économique et sociale pour qu'à tous les niveaux, international, national, régional et, plus encore, local, chacun s'engage et agisse efficacement.

1.4. Dans cette perspective, le Comité demande que, dans le prolongement des Sommets d'Essen (décembre 1994) et de Dublin (septembre 1996), le Sommet des chefs d'État et de gouvernement qui se tiendra à Dublin en décembre 1996 adopte solennellement le «Pacte pour l'emploi» et définisse un plan pluriannuel assorti de mesures concrètes et d'un calendrier impératif.

1.5. La nécessité de relancer l'économie est unanimement reconnue. Elle conduit à une concertation entre les pouvoirs publics et les partenaires sociaux afin d'élaborer une correction des politiques budgétaires qui aboutisse à une consolidation crédible et équilibrée sur le plan social et à une utilisation des marges de manoeuvre pour une politique monétaire et une politique des revenus qui favorisent l'emploi.

1.6. Le Comité pense que la conférence intergouvernementale devrait inscrire la coordination des politiques de l'emploi dans le Traité sur l'Union européenne et proposer, pour ce faire, les additions et rectifications nécessaires aux textes existants.

1.7. Le Comité insiste sur la nécessité de donner une impulsion supplémentaire aux travaux d'infrastructures des transports, à la mise en place de la société d'information, aux divers champs possibles de la politique industrielle. Convaincu que le marché des services constitue un sérieux espoir de création d'emplois de haute qualité, le Comité soutient la proposition visant l'élaboration d'une communication sur l'emploi et les services, destinée au Conseil européen de Dublin.

1.8. Le Comité est conscient de l'importance du marché mondial. Il estime que l'Union européenne doit encore définir son rôle en matière de politique commerciale internationale, traduire concrètement la fonction de représentativité reconnue à la Commission par le Traité et élaborer les procédures permettant d'arrêter ses positions dans les négociations internationales.

1.9. Pour conforter la place de l'Europe dans la compétition mondiale, il faut consolider le marché intérieur en complétant la législation. La mise au point d'un statut de la société européenne a pris du retard. Le Comité escompte que dans ce domaine, un accord pourra être dégagé le plus rapidement possible sur la base des avis qu'il a émis sur les questions d'information, de consultation et de participation. Il espère également que les investissements de biotechnologie vont enfin bénéficier d'un cadre juridique et rappelle les avis qu'il a adoptés à ce propos.

1.10. Le Comité souligne l'importance que revêt la fixation d'un calendrier pour l'adoption des mesures restantes requises pour l'achèvement du marché intérieur, et soutient la Commission dans les efforts qu'elle déploie pour faire en sorte que les États membres transposent les directives relatives au marché intérieur dans leur législation et les appliquent dans la pratique. La réalisation de l'Union économique et monétaire dans les délais fixés doit accompagner ces diverses mesures.

1.11. Cependant, il est tout aussi utile de simplifier la législation. En particulier, le Comité estime justifié un programme allégeant les contraintes d'ordre administratif et réglementaire qui sont d'un coût beaucoup trop élevé en Europe et qui désavantagent spécialement les PME et, parmi elles, plus encore les microentreprises. À cet égard, le Comité accueille avec satisfaction l'initiative SLIM et souhaiterait que son application soit étendue à d'autres domaines dans les meilleurs délais.

1.12. Le Comité attache une grande importance à la réalisation, en temps voulu, de l'Union monétaire européenne afin de favoriser la confiance et l'emploi.

1.13. Persuadé que s'impose une restructuration fondamentale des Fonds structurels, le Comité entend souligner que ces fonds doivent servir à créer des emplois durables s'ajoutant aux emplois existants. Mais comme la mobilisation de ressources nouvelles à cet effet augmenterait les dépenses publiques et donc la charge fiscale, il estime que des crédits devraient être redistribués entre les objectifs. Il existe, dès 1997, une possibilité de réorienter les Fonds de telle manière que leur impact sur les perspectives d'emploi se fasse davantage sentir et le Comité a la ferme conviction qu'il convient de saisir cette occasion.

1.14. Le Comité invite les autorités régionales et locales à tenir compte de l'importance des pactes territoriaux conclus entre organisations socio-économiques et administrations publiques en vue de favoriser les initiatives de développement local.

1.15. À plusieurs reprises, l'avis du Comité met l'accent sur le rôle essentiel joué par les PME; une définition plus précise doit en être donnée, pour faire apparaître la notion de microentreprise. En ce sens, il convient de renforcer la rédaction de l'article 118 A du Traité, de créer une Banque européenne des PME (BEIPME) distincte de la BEI et d'alléger les charges financières et les excès de réglementation qui pèsent sur les PME plus lourdement que sur les grandes entreprises.

1.16. Le Comité reconnaît la nécessité d'appliquer une politique des revenus génératrice de concurrence et d'emploi. Il souhaite toutefois faire observer qu'elle ne doit pas être synonyme d'une économie de bas salaires.

1.17. Il convient aussi de se rappeler que les coûts de main-d'oeuvre ne sont pas le seul élément déterminant de la compétitivité: dans certains cas, ils peuvent être compensés par la qualité, la conception et des éléments de «compétitivité autre que la compétitivité par le prix».

1.18. Le Comité est parfaitement conscient de l'interaction qui s'exerce entre les taux d'intérêt, les salaires, les investissements, l'emploi et la productivité. Il invite les États membres et les différents intervenants dans ces domaines à rechercher les équilibres nécessaires selon leurs traditions et la situation de leur pays, notamment en tenant compte des diversités géographiques. Mais il souligne avec insistance qu'aucune des mesures prises au nom de l'emploi ne doit avoir l'effet pervers de diminuer les garanties d'hygiène, de sécurité et de protection sanitaire ou sociale.

1.19. Le Comité approuve dans son principe la politique consistant à réorienter des sommes consacrées à l'indemnisation du chômage vers des mesures actives en faveur de l'emploi, mais il a le sentiment qu'une réflexion considérable est nécessaire quant à la manière de procéder aussi efficacement que possible en ce domaine. En particulier, la création d'emplois ne doit pas entraîner la disparition d'emplois existants.

1.20. Le Comité constate que les partenaires sociaux ont progressé dans la recherche d'un cadre conventionnel en matière d'organisation du travail, de flexibilité et de réduction du temps de travail et estime que ces matières méritent d'être approfondies. Il considère qu'une contribution de valeur est ainsi apportée à la préparation du Livre vert que la Commission va engager sur ces mêmes thèmes. Il salue également l'initiative d'un autre Livre vert sur les aspects sociaux et sociétaux de la société de l'information.

1.21. Enfin, le Comité attache une importance toute particulière aux actions susceptibles d'améliorer la formation initiale, la formation professionnelle, l'adaptation permanente aux évolutions technologiques et structurelles, les liens entreprises-écoles, la reconnaissance mutuelle des qualifications, les transferts d'épargne personnelle et des droits à pension.

1.22. Ainsi, le Comité économique et social pense-t-il contribuer aux efforts de tous ceux qui cherchent à revaloriser les remèdes qui paraissent usés ou dépassés et à recourir à des idées nouvelles et constructives. Grâce à quoi, l'économie relancée redonnerait confiance à ceux qui craignent de perdre leur emploi, aux chômeurs qui désespèrent de leur réintégration et surtout aux jeunes qui doutent de leur avenir.

2. Introduction

2.1. Le Comité économique et social se félicite de l'initiative prise par M. Jacques Santer, Président de la Commission, en vue d'une «action pour l'emploi en Europe» sous forme d'un «pacte de confiance». Cette proposition répond au voeu exprimé par le Comité dans son avis sur le «Rapport économique annuel 1996» () qui «demande à la Commission de définir plus précisément une alliance pour l'emploi et la stabilité et de développer en ce sens le pacte européen de confiance pour l'emploi lancé par le Président Santer».

2.2. L'avis du Comité est que le chômage permanent que connaît l'Europe actuellement a pris des proportions critiques et que si l'on n'agit pas efficacement pour réduire le nombre considérable de victimes du chômage, la cohésion et les valeurs sociales de l'Europe seront menacées; si l'on ne parvient pas, dans les États membres de l'Union européenne à fournir un emploi aux citoyens, il risque de se créer une fracture sociale qui mettra en péril le tissu même de la société.

2.3. Le Comité remarque avec la plus grande satisfaction que cette initiative du Président de la Commission vise à l'adoption de mesures positives dans le but d'éradiquer la plaie du chômage en Europe.

2.4. C'est pourquoi le Comité économique et social approuve les objectifs du Pacte de confiance consistant à:

- dépasser les mesures ponctuelles qui restent inefficaces;

- restaurer la confiance autour d'une stratégie globale;

- mobiliser tous les acteurs à tous les niveaux dans la poursuite d'un même objectif;

- valoriser l'effet multiplicateur européen;

- obtenir de toutes les parties concernées des engagements concrets.

2.5. Le Comité regrette que trop souvent les mesures antérieures aient été inefficaces. Il insiste sur la nécessité, d'une part, de recourir à des idées nouvelles et constructives et, d'autre part, de concrétiser dans les faits les mesures indispensables qui ont déjà été suffisamment annoncées (Livre blanc de Jacques Delors, résolutions d'Essen). La volonté d'accepter des changements radicaux de politique est une nécessité impérative.

2.6. Le Comité est également favorable à l'invitation qui est faite à toutes les parties concernées de s'engager dans la mesure nécessaire, parce que sans action concertée, aucun grand progrès n'est possible.

Le Comité lance un appel à tous les acteurs pour qu'ils se montrent pleinement à la hauteur de leurs responsabilités. Quel que soit le rôle particulier joué par les instances étatiques, il est inacceptable que beaucoup d'intervenants aient tendance, avant de s'engager dans l'action, à attendre que leurs partenaires se soient impliqués.

2.7. Ainsi que le précise le Président de la Commission, les solutions relèvent de différents responsables. C'est pourquoi le Comité regroupe les observations qui suivent selon l'implication principale des acteurs. Le Comité reconnaît l'importance capitale du rôle des acteurs nationaux. Pour que des marges de manoeuvre puissent être dégagées au plan européen, il est capital que les mesures nécessaires en matière de politique de l'emploi soient prises dans les États membres. Conformément aux conclusions du Sommet de Dublin, prolongeant celles d'Essen, le Comité demande instamment de leur part, lors du Sommet des chefs d'État et de gouvernement qui se tiendra à Dublin en décembre 1996, un engagement solennel, assorti de mesures concrètes et d'un calendrier, en faveur d'une priorité absolue à la résorption du chômage et à la promotion de l'emploi.

3. Mesures relevant principalement des États

3.1. Politique macroéconomique

3.1.1. Dans son document intitulé «Action pour l'emploi en Europe - un pacte de confiance», la Commission met notamment l'accent sur la nécessité de créer un cadre macroéconomique favorable. Le Comité reprend à son compte l'avis de la Commission lorsqu'elle estime que «pour créer des emplois, la croissance est indispensable. Mais pas n'importe quelle croissance. Celle-ci doit être soutenable, fondée sur la stabilité monétaire et sur une politique financière saine. Elle doit être tirée par la demande et poussée par l'investissement productif. Enfin, elle doit être riche en emplois. C'est ainsi qu'une réduction des déficits publics est nécessaire pour faire baisser les taux d'intérêts, qu'il faut une politique salariale raisonnable et que les coûts indirects du travail doivent baisser».

3.1.2. Dans le cadre d'une stratégie macroéconomique globale et coordonnée, le Comité considère avec la Commission que pour ce faire, il est nécessaire d'associer à égale responsabilité, les pouvoirs publics et les partenaires sociaux compétents pour conclure des accords aux niveaux appropriés et de définir dans le pacte de confiance les engagements respectifs de chacun. Au Conseil européen de Dublin en décembre prochain, les gouvernements devront faire preuve d'un engagement beaucoup plus important dans le processus que constitue le pacte de confiance.

3.2. Budgets, impôts et prélèvements sociaux

3.2.1. Les États se sont réservé les décisions en matière de politique fiscale. Pour que la politique fiscale remplisse le rôle essentiel qui est le sien dans la création des conditions favorables à l'accroissement des investissements et de l'emploi, le Comité économique et social se considère néanmoins fondé à formuler les observations suivantes.

3.2.2. Le Comité appuie les principes de politique budgétaire énoncés par la Commission:

- les réductions de dépenses sont préférables à des augmentations d'impôts;

- indépendamment de la réduction des dépenses publiques, il convient d'augmenter la part de celles-ci qui est consacrée à l'investissement immatériel en capital humain et en recherche-développement, à l'innovation et aux infrastructures nécessaires à la compétitivité;

- sans remettre en cause les aides sociales indispensables à la lutte contre l'exclusion, les États membres devraient envisager la transformation en mesures actives des dépenses passives consacrées à la compensation du chômage;

- il faudrait diminuer les charges fiscales pesant sur le travail.

3.2.3. Le Comité constate que la politique fiscale menée par la majorité des États membres ne correspond pas à ces principes et escompte qu'ils corrigeront leurs politiques budgétaires. Il est indispensable de mener une politique de consolidation crédible et équilibrée sur le plan social si l'on veut pouvoir plus raisonnablement escompter que les banques centrales et les partenaires sociaux utilisent les marges de manoeuvre dont ils disposent pour une politique monétaire et une politique des revenus qui favorisent l'emploi.

3.2.4. Dans la plupart des États, les déficits budgétaires sont trop élevés. Cette situation a pour effet non seulement de rendre plus difficile la nécessaire baisse des taux d'intérêt mais de réduire durablement la marge de manoeuvre politico-fiscale des États pour la conduite d'une politique d'emploi active. Le Comité est d'accord avec la Commission pour estimer que la consolidation des finances publiques doit se poursuivre. La réduction des déficits doit s'effectuer d'une manière qui soit cohérente avec les exigences conjoncturelles. À cet égard, le Comité souligne que les critères de convergence politico-financiers du Traité instituant la CE offrent la souplesse requise pour mener une politique financière adaptée à la conjoncture.

3.2.5. La politique fiscale revêt également une grande importance pour la promotion de l'emploi. Le poids de l'impôt ne peut pas devenir un frein pour les investissements (entreprises, État) et la disponibilité du travail (salariés, indépendants). Le système fiscal doit être reconfiguré dans un sens plus favorable à l'emploi. On peut observer à l'échelle mondiale que la faible fiscalité favorise la croissance et l'emploi. Le Comité insiste néanmoins sur la nécessité d'équilibrer socialement ces mesures. Il ne faut pas que les réductions de la fiscalité soient effectuées aux dépens de services publics essentiels et de la protection sociale.

3.3. Mise en oeuvre des résolutions d'Essen

3.3.1. Le Comité a soutenu dès le départ les résolutions du Conseil européen d'Essen qui, en décembre 1994, ont cerné les points saillants d'une stratégie de l'Union européenne axée sur l'emploi:

- amélioration des perspectives d'emploi des travailleurs;

- augmentation de l'intensité en emploi de la croissance;

- abaissement des coûts salariaux indirects, afin de stimuler la création d'emplois;

- accroissement de l'efficacité de la politique du marché du travail;

- renforcement des mesures en faveur des groupes particulièrement touchés par le chômage.

Dans la foulée de la mise en oeuvre de cette stratégie de politique pour l'emploi, les États membres ont élaboré en 1995 les premiers programmes pluriannuels en faveur de l'emploi et les ont soumis à la Commission, conformément à l'obligation de faire rapport qui leur avait été imposée à la même occasion.

3.3.2. Le rapport intérimaire présenté au Conseil européen de Florence montre toutefois que dans leur politique de l'emploi, les États membres ne s'écartent guère des sentiers battus et que le lancement ou la mise en oeuvre de mesures neuves reste à la traîne. De l'avis du Comité, l'objectif de coordination au niveau européen des politiques de l'emploi ne peut se résumer à rendre compte une fois l'an de tels programmes pluriannuels. Le Comité estime nécessaire de rappeler aux États membres que les engagements souscrits au niveau de l'UE revêtent un caractère contraignant et contribuent à accroître et pérenniser l'efficacité de la stratégie européenne pour l'emploi.

3.4. Initiatives en matière de qualification

3.4.1. Le Comité rappelle que les cinq objectifs définis par le Livre blanc sur l'éducation et la formation doivent jouer un rôle clé pour l'édification de la société cognitive (). Le système éducatif, qui relève de la compétence quasi exclusive des États membres, est en crise. La formation actuellement dispensée est le plus souvent inadaptée et insuffisante. Le Comité insiste pour que soient renforcés les liens entre l'école (y compris l'enseignement supérieur) et la pratique professionnelle et pour que les systèmes éducatifs accordent plus de place à la formation vers des métiers d'avenir (médias, télécommunications, environnement, santé, tourisme, etc.).

3.4.2. La Commission a également raison de mettre le doigt sur le déficit existant dans le domaine de la formation continue. La combinaison du travail et de la formation dans des formules telles que l'apprentissage et la formation en alternance est une nécessité pour l'ensemble des travailleurs sans discrimination pour quelque motif que ce soit, en particulier elle ne peut être réservée aux seuls salariés qui ont bénéficié d'une formation académique. Il est indispensable de prendre des mesures permettant de comparer les formations professionnelles et de parvenir en la matière à la délivrance d'attestations comparables et exploitables sur le marché du travail, au sein de l'UE dans le but de faciliter la mobilité.

3.4.3. La formation générale et la formation professionnelle constituent des exemples de secteurs d'activités nationales intéressant les partenaires sociaux dans le cadre d'un pacte de confiance. Les employeurs savent quels sont les besoins de formation des salariés, et les salariés sont demandeurs de formation générale et de formation professionnelle afin de pouvoir conserver leur emploi, assurer leur promotion ou trouver un nouvel emploi. Une main-d'oeuvre possédant des compétences qui correspondent aux besoins fait partie des intérêts communs des partenaires sociaux. La mobilité peut s'améliorer, tant à l'intérieur de l'entreprise qu'entre les entreprises. C'est pourquoi nous encourageons les partenaires sociaux à souscrire à des pactes d'emploi relatifs à la formation générale et à la formation professionnelle, dans le but de faire remonter le niveau d'emploi.

3.5. Conférence intergouvernementale

3.5.1. Le Comité estime nécessaire:

- d'inscrire une référence claire à la coordination des politiques de l'emploi dans le Traité instituant la Communauté européenne;

- de faire figurer dans la liste des compétences communautaires de l'article 3 de ce Traité une «coordination des politiques de promotion de l'emploi»;

- d'inclure dans le Traité une procédure obligatoire de coordination, y compris un dispositif de contrôle multilatéral; elle devra notamment comprendre des programmes nationaux pluriannuels basés sur des orientations que les ministres de l'Économie et des Finances et les ministres du Travail et des Affaires sociales auront établies pour la politique de l'emploi au niveau communautaire, sur proposition de la Commission et avec la participation du Parlement et du CES.

3.5.2. En outre, le Comité demande qu'à l'occasion de la révision du Traité de Maastricht, les chapitres relatifs à la politique macroéconomique (article 103), à la politique industrielle (article 130), à la cohésion économique et sociale (article 130 A), à la politique agricole commune, ainsi qu'à la recherche et au développement technologique (article 130 F) soient renforcés vers la politique de l'emploi.

3.5.3. Le Comité demande de reformuler l'article 118 A du Traité pour le rendre particulièrement favorable aux microentreprises. En effet, l'article 118 A dispose expressément que les directives concernant la santé et la sécurité «évitent d'imposer des contraintes administratives, financières et juridiques telles qu'elles contrarieraient la création et le développement de petites et moyennes entreprises». Le Comité souhaite faire valoir l'idée que l'on n'a pas suffisamment prêté attention à cette importante disposition, notamment en ce qui concerne les microentreprises. Mais le Comité insiste pour que ces mesures n'introduisent pas une distorsion de concurrence.

4. Mesures situées au niveau de l'Union européenne

Sans manquer aux obligations de la subsidiarité, il faut que toutes les compétences reconnues à l'Union européenne soient utilisées au maximum de leurs possibilités et de leur efficacité. En matière de chômage et d'emploi, le problème ne saurait être limité aux seuls aspects du marché du travail, d'autant que l'Union ne possède que des compétences limitées dans ce domaine. L'Union européenne est compétente pour intervenir sur les aspects «marché intérieur», «recherche et développement», «politique structurelle», etc., mais aussi sur les données économiques, financières et monétaires.

4.1. Le marché intérieur

4.1.1. Dans le document «Action pour l'emploi en Europe. Un pacte de confiance» (), la Commission propose une offensive sur quatre fronts pour parachever et approfondir le marché intérieur:

- achever le marché intérieur et le mettre en oeuvre de façon plus efficace;

- renforcer l'environnement concurrentiel global en Europe;

- aider les petites et moyennes entreprises à exploiter le marché intérieur;

- élargir l'accès au marché mondial.

Le Comité marque expressément son accord sur ces propositions.

4.1.2. Le développement d'une infrastructure européenne (réseaux transeuropéens) revêt une grande importance pour l'achèvement du marché intérieur. Depuis le Livre blanc de Jacques Delors, cet objectif n'a donné lieu, en dehors d'une multitude d'annonces qu'à bien peu de mesures concrètes. Le Comité est pleinement conscient des problèmes administratifs et juridiques qu'il soulève. Il n'arrive cependant pas à comprendre pourquoi les difficultés financières ne font pas l'objet d'une approche qui ait toute l'ampleur voulue. Le Comité exprime son soutien à la proposition de M. Santer, Président de la Commission, visant à dégager un financement de substitution provenant du budget européen pour donner une impulsion supplémentaire au démarrage des travaux concernant les mesures prioritaires dans le domaine de l'infrastructure de transport.

4.1.3. Le Comité reprend à son compte les propositions de la Commission pour la concrétisation d'une société européenne de l'information. Il y voit l'une des pièces maîtresses d'une politique industrielle européenne qui ne soit pas axée sur l'intervention dans les marchés mais ambitionne d'améliorer l'environnement général offert aux entreprises européennes. Le Comité préconise cependant de prendre également en considération, au-delà de la société de l'information, d'autres champs de la politique industrielle et propose que les points essentiels du programme d'action en matière de politique industrielle soient intégrés dans le «pacte de confiance».

4.1.4. En raison des retards de l'Europe en matière de recherche et développement, le Comité juge positivement l'initiative de la Commission de centrer désormais l'aide à la recherche sur quelques points clés et de l'axer davantage sur les applications. Le Comité soutient l'élaboration de concepts stratégiques, par exemple dans le domaine du transport combiné, de la voiture de demain, des logiciels éducatifs multimédias, de la technologie de l'environnement ou de l'eau.

4.1.5. Il est dit dans le Pacte de confiance que «le marché intérieur reste incomplet ou inégalement réalisé, (...). Les PME ont plus de mal à en exploiter tout le potentiel que les grands opérateurs économiques. Par ailleurs, la libéralisation n'est pas une fin en soi, mais un instrument pour accroître la coopération et la prospérité en Europe, renforcer la confiance des consommateurs et la qualité des services rendus aux usagers. (...) C'est dans ce sens que la Commission, dans son avis sur la Conférence intergouvernementale, a insisté sur la notion de services universels et d'intérêt économique général».

4.1.6. Le Comité partage le sentiment de la Commission selon lequel le marché des services constitue notre plus sérieux espoir de création d'emplois de haute qualité. Le Comité approuve aussi la Commission quand elle estime que de trop nombreuses restrictions pèsent sur le développement des services à forte valeur ajoutée. Le Comité accueille avec satisfaction la proposition de la Commission visant l'élaboration d'une communication approfondie sur l'emploi et les services, destinée au Conseil européen de Dublin et devant contenir des propositions précises et un échéancier concernant la suppression des restrictions existantes.

4.1.7. Le Comité se félicite de l'initiative de la Commission d'élaborer des orientations pour une coordination plus étroite des politiques fiscales en Europe, dans le double but d'instaurer un climat plus propice à la création d'emplois et de contrer la tendance à l'accroissement continu des prélèvements obligatoires sur le travail.

4.1.8. Comme le démontre l'exemple américain, il y a lieu de considérer que l'évolution de la croissance et de l'emploi dépend moins du commerce mondial que du développement du marché intérieur. En Europe, nous devrions en arriver à ce que, dans une économie d'échelle, notre marché intérieur joue, pour notre économie, un rôle comparable à celui du marché intérieur américain dans l'économie américaine.

4.2. Élargir l'accès au marché mondial

4.2.1. Le Comité approuve les propositions particulières ci-après:

- renforcement de l'OMC;

- priorité à la mise en oeuvre et au respect des résultats du cycle de l'Uruguay;

- efforts visant à intégrer la Russie et la Chine dans l'OMC et, de façon générale, dans le système économique international;

- lutte contre la piraterie intellectuelle;

- adaptation de la politique commerciale commune aux mutations du commerce international.

Le Comité recommande qu'au cours de ces adaptations, la dimension sociale des problèmes soit toujours prise en compte.

4.2.2. La Commission insiste à bon droit sur l'importance du marché mondial. Ses propositions à ce sujet reçoivent l'approbation du Comité. Toutefois, l'Union européenne doit définir son rôle en matière de politique commerciale internationale, traduire concrètement la fonction de représentativité reconnue à la Commission par le Traité et élaborer les procédures permettant d'arrêter ses positions dans les négociations internationales.

4.3. Compléter la législation

4.3.1. Le Comité rappelle la demande qu'il formulait dans son avis sur le «Rapport de la Commission au Conseil et au Parlement européen sur le marché unique en 1995» () et qui invitait la Commission à «préciser, à l'occasion du rapport sur l'impact du marché unique qu'elle présentera au second semestre 1996, un calendrier pour adopter les dernières mesures requises, axé sur l'étape clé de réalisation de l'UEM en 1999, et comportant une méthodologie imposant une convergence communautaire face aux logiques administratives nationales, même si certains chantiers de longue haleine pourront nécessiter des délais supplémentaires».

4.3.2. Le Comité soutient la Commission dans les efforts qu'elle déploie pour que les États membres transposent dans leur législation et appliquent effectivement les directives sur le marché intérieur, y compris pour les marchés publics et le secteur des services. Pour plus d'efficacité, le règlement doit être préféré à la directive. Le Comité souligne avec insistance qu'aucune des mesures prises au nom de l'emploi ne doit avoir l'effet pervers de diminuer les garanties d'hygiène, de sécurité et de protection sanitaire ou sociale.

4.3.3. Quelle que soit leur taille, les entreprises continuent à souffrir de l'absence de dispositions d'ensemble.

4.3.4. Le Comité demande donc que soient comblées les lacunes qui subsistent. La mise au point d'un statut de la société européenne a pris du retard. Le Comité escompte que dans ce domaine, un accord pourra être dégagé le plus rapidement possible sur la base des avis qu'il a émis sur les questions d'information, de consultation et de participation. Il espère également que les investissements de biotechnologie vont enfin bénéficier d'un cadre juridique et rappelle les avis qu'il a adoptés à ce propos.

4.4. Simplifier la législation

4.4.1. Dans cette perspective, la définition des normes de qualité et celle des règles de structuration et de fonctionnement du marché sont indispensables. Si l'on veut que les salariés acceptent les exigences croissantes de flexibilité, il faut que de nouvelles formes d'emploi plus flexibles offrent des possibilités de développement individuel, professionnel et de protection sociale. Cependant, le Comité est persuadé que l'on contribuerait grandement à la création d'emplois en réduisant, lorsqu'elles sont trop lourdes, les charges de réglementation et de fiscalité; la remarque s'applique à coup sûr au secteur des microentreprises ainsi qu'à la main-d'oeuvre faiblement rémunérée mais aussi, si possible, à d'autres catégories. Ces problèmes existent surtout en plus grande mesure au niveau national.

4.4.2. Il convient de se rappeler que les coûts non salariaux ne se limitent pas à la fiscalité que l'État fait peser sur l'emploi; le coût de l'application des réglementations relatives à l'emploi en fait aussi partie. Au moment de décider s'il y a lieu d'embaucher, l'employeur prend en considération tous les coûts qu'entraîne sa décision, y compris les coûts encourus dans l'éventualité où il devrait revenir sur cette décision, et ceux qui les dissuadent d'embaucher.

4.4.3. Aussi le Comité estime-t-il que toutes les dispositions européennes nouvelles doivent être examinées sous l'angle de l'efficacité et que la révision des dispositions existantes s'impose dans ce même souci.

4.4.4. À cet égard, le Comité accueille avec satisfaction l'initiative SLIM et souhaiterait que son application soit étendue à d'autres domaines dans les meilleurs délais. L'Union européenne devrait montrer la voie à ses États membres en passant en revue tous les aspects de sa réglementation et, en particulier, de la réglementation en matière d'emploi. Le principe directeur de ce passage en revue devrait être que l'on supprimera une disposition de la réglementation à moins qu'il n'existe des arguments entièrement convaincants en faveur de son maintien.

4.4.5. On déplorera la prolifération des normes dans le domaine de la politique agricole commune, qui nuit gravement à la prise de décisions par les entrepreneurs, en raison de la quantité excessive d'informations à réunir, et dissuade souvent les agriculteurs de saisir les chances offertes par l'Union européenne.

4.4.6. Le Comité constate avec satisfaction que l'effet particulièrement désavantageux des réglementations pour les PME a été reconnu et approuve le principe d'un programme d'action visant à leur venir en aide, mais il est d'avis que ce programme devrait se concentrer principalement sur les microentreprises qui sont les sources premières de création d'emplois et qui constituent aussi le secteur le plus gravement touché par l'excès de réglementation.

4.4.7. Le Comité estime que la définition des PME est trop large; à l'extrême supérieur de cette catégorie se trouvent des entreprises de dimensions non négligeables, tandis qu'à l'extrême inférieur, elle inclut les sociétés unipersonnelles. Le problème que connaissent ces deux formes d'entreprises et le type d'assistance dont elles ont besoin sont trop différents pour qu'un regroupement unique puisse se justifier. De ce fait, les mesures d'aide qui leur sont destinées ne sont pas ajustées avec précision.

4.4.8. Le Comité estime que l'on pourrait adopter une mesure positive consistant à subdiviser la catégorie des PME et à définir les microentreprises selon la recommandation de la Commission en date du 3 avril 1996. En effet, il a été démontré que, dans tous les pays développés, les PME, et plus particulièrement les microentreprises, constituent la source la plus importante d'emplois nouveaux. Toute stratégie visant à améliorer les perspectives d'emploi dans l'Union européenne doit privilégier ces microentreprises. Il est nécessaire de créer une économie d'entreprise dans laquelle les entrepreneurs existants puissent prendre de l'expansion et où les entrepreneurs en puissance soient encouragés à faire leur entrée sur le marché avec des chances raisonnables de réussite.

4.5. La monnaie unique

4.5.1. Le Comité a, plusieurs fois, émis l'opinion qu'il est politiquement capital que l'Union économique et monétaire se réalise dans les délais fixés. Il insiste sur le fait qu'il ne s'agira pas seulement d'une question de déclarations mais que cette réalisation dépendra avant tout de la capacité des acteurs concernés à assumer leurs responsabilités en arrêtant des mesures concrètes. L'Union économique et monétaire ne contribuera à stabiliser le contexte général de l'économie que si elle offre un cadre ouvert permettant d'adhérer aux États qui n'auront pu y prendre part et qui le solliciteraient ultérieurement.

4.5.2. Le Comité souligne qu'un report de l'Union monétaire ne contribue pas à une politique active de l'emploi. En revanche, le Comité craint qu'un report de l'Union monétaire ne perturbe les politiques monétaires, ce qui pourrait menacer les emplois dépendant des exportations dans les pays à monnaie forte et entraînerait une hausse des taux d'intérêt dans les autres États. Il en résulterait inévitablement une nouvelle récession.

4.6. Les Fonds structurels

4.6.1. Le Comité partage le sentiment de la Commission selon lequel les Fonds structurels de l'Union européenne doivent être «prioritairement mis au service de l'emploi». Il entend toutefois souligner la nécessité de faire en sorte que ces Fonds soient utilisés pour créer des emplois durables et que la création d'emplois n'entraîne pas la suppression d'emplois existants.

D'ailleurs, le Comité avait déjà fait sien ce concept dans son avis sur les initiatives de développement local, dès octobre 1995, lorsqu'il faisait part de la nécessité «de réorienter un pourcentage plus important des cadres communautaires d'appui vers les objectifs du Livre blanc en matière d'emploi (développement local, PME, nouveaux gisements d'emploi)» (avis sur «Les initiatives locales de développement de la politique régionale», Bruxelles les 24 et 25 octobre 1995, paragraphe 9.7.1).

4.6.2. Le Comité estime que, pour ce faire, une restructuration des Fonds structurels s'impose.

4.6.3. Les objectifs 1, 2, 5b et 6 ont un caractère spécifiquement régional et portent sur des mesures limitées à certaines régions ou à certaines zones à l'intérieur de régions. Les régions pouvant bénéficier d'aides ne sont pas toutes des régions à chômage élevé; dans certaines d'entre elles, les niveaux de chômage sont très faibles; à l'inverse, dans certaines régions n'ayant pas droit à des aides au titre de ces objectifs, les niveaux de chômage sont relativement élevés. Les objectifs 3, 4 et 5a, quant à eux, couvrent l'ensemble de l'Union européenne.

4.6.3.1. Selon le cinquième rapport périodique de la Commission sur la situation économique et sociale et le développement des régions dans l'Union européenne, le chômage médian dans les régions éligibles à l'objectif 1 a augmenté en fait de 15,4 % en 1986 à 16,7 % en 1993. Durant cette même période, dans les régions éligibles à l'objectif 2, le chômage médian a baissé de 14,7 % à 12,1 % et dans les régions éligibles à l'objectif 5b, il a diminué de 8,3 % à 7,3 %. Il apparaît donc que l'objectif 2 a eu le meilleur impact favorable sur l'emploi.

4.6.4. L'objectif 3 vise spécifiquement, entre autres choses, à lutter contre le chômage de longue durée et à faciliter l'intégration des jeunes dans la vie active. Le Comité conclut que la meilleure manière de mettre les Fonds structurels au service de l'emploi consisterait à augmenter et aussi à utiliser de façon plus efficace les ressources allouées aux objectifs qui sont spécifiquement orientés vers l'emploi.

4.6.5. Le Comité ne croit pas qu'il y ait lieu de mobiliser des ressources nouvelles à cet effet, sous peine d'augmenter le niveau des dépenses publiques et la charge fiscale. C'est pourquoi le Comité estime que des ressources devraient être transférées entre objectifs. Cet éventuel transfert ne peut remettre en question les engagements officiellement pris et contractés entre l'Union et les différents États membres. Par ailleurs, il ne pourra jamais affecter les régions qui, tout en connaissant des taux de chômage en dessous de la moyenne communautaire, continuent d'enregistrer un niveau de développement économique inférieur à la moyenne européenne du PIB par habitant, comme c'est le cas par exemple pour le Portugal.

La priorité de l'objectif emploi doit toujours être intégrée à l'objectif communautaire plus global de cohésion économique et sociale.

4.6.6. La Commission indique qu'une révision à mi-parcours des objectifs 1, 3, 4 et 5b est prévue pour le début de l'année 1997. S'il en est ainsi, il existe donc une possibilité de réorienter les Fonds de telle manière que leur impact sur les perspectives d'emploi dans l'Union européenne se fasse davantage sentir et le Comité à la ferme conviction qu'il convient de saisir cette occasion.

4.6.7. Une autre mesure qui ferait aussi des Fonds structurels un instrument plus adapté à la lutte contre le chômage consisterait à modifier les critères d'éligibilité à des aides au titre des objectifs 1, 5b et, éventuellement 2, afin que les régions qui souffrent de taux de chômage élevés et d'un faible PIB par habitant puissent prétendre davantage au bénéfice de ces régimes. Ces régions pourraient être définies comme toute région dont le taux de chômage est supérieur à la moyenne de l'Union européenne ou encore dont le taux d'activité est inférieur à la moyenne européenne, en tenant compte de certaines marges.

Cette réorientation peut être efficace, vu que les trois quarts des moyens prévus doivent encore être engagés.

4.6.8. Le Comité soutient pleinement la Commission en demandant que les autorités régionales et locales tiennent compte de l'importance des pactes territoriaux conclus entre organisations socio-économiques et administrations publiques en vue de favoriser les initiatives de développement local.

4.6.8.1. L'objectif du large partenariat qui est à la base des pactes territoriaux est de mobiliser toutes les volontés et les ressources locales en faveur d'une stratégie intégrée qui permette une meilleure coordination des actions en faveur de l'emploi.

4.6.9. Malgré les efforts d'information menés par la Commission, les initiatives locales pour l'emploi tardent à se répandre. Il faut espérer qu'il sera tenu compte de l'appel du Conseil européen de Florence visant à sélectionner les régions et les zones pilotes pour la mise en oeuvre des pactes territoriaux.

4.6.9.1. Le Comité estime qu'il serait opportun de permettre aux régions et aux collectivités locales de présenter directement leurs projets en la matière, afin d'éviter des filtres bureaucratiques et politiques qui provoqueraient des retards.

4.6.9.2. Un rôle important pourrait être attribué au Comité économique et social et aux organismes nationaux analogues en ce qui concerne la diffusion des expériences et des méthodologies ainsi que le suivi des travaux préparatoires aux pactes, de leur contenu final et des résultats obtenus.

4.7. Les PME

4.7.1. Le Comité marque son accord sur les propositions de la Commission concernant:

- des mesures novatrices en faveur des PME;

- l'anticipation des mutations industrielles et

- le développement d'initiatives locales.

4.7.2. Un domaine bien précis où l'on pourrait apporter une aide constructive aux PME est celui de «la faille des capitaux», problème que l'on pourrait aider les PME à résoudre; ce problème existe dans de nombreux pays aux quatre coins de l'UE. La plupart des petites entreprises, en particulier celles qui se créent, et plus spécialement celles qui se trouvent dans les secteurs novateurs des technologies de pointe, éprouvent davantage de difficultés à trouver des capitaux «de démarrage» que leurs homologues des États-Unis et d'autres pays où existent des marchés financiers modernes.

4.7.3. Quelles que puissent en être les raisons et abstraction faite des politiques menées en matière de financement des PME par les États membres, il reste que les instruments financiers de la Communauté orientés vers les PME (BEI, FEI, instruments de soutien budgétaire) ne produisent pas l'effet escompté et, il faut se demander en particulier si la BEI est le meilleur mécanisme pour obtenir les résultats souhaités.

4.7.4. Le Comité propose la création d'une BEIPME (Banque européenne d'investissement des PME) qui serait un établissement distinct ayant uniquement à s'occuper des PME.

4.7.5. À cet égard, le Comité entend, une fois encore, mettre l'accent sur la nécessité d'accorder la priorité aux besoins des microentreprises, ainsi que des autres sous-catégories de petites entreprises appartenant à la catégorie des PME.

5. Mesures relevant des catégories de la vie économique et sociale

5.1. Les revenus

5.1.1. Dans le domaine de la politique des revenus, une augmentation modérée des salaires réels, modulée selon le développement de la productivité des différentes régions de l'Union, est également nécessaire. Cette hausse contribuerait à stabiliser la demande tout en élargissant l'espace disponible pour une politique d'investissement orientée vers l'emploi. Par ailleurs, les régions moins développées pourraient résorber une partie de leur retard en matière de salaires, grâce à une productivité plus élevée, la progression des salaires accompagnant le développement.

5.1.2. Le Comité s'accorde avec la Commission pour estimer que l'évolution modérée des salaires et traitements depuis le début des années 1990 a contribué à la maîtrise de l'inflation et au rétablissement de la rentabilité.

5.1.3. Le Comité reconnaît la nécessité d'appliquer une politique des revenus génératrice de concurrence et d'emploi. Il souhaite toutefois faire observer qu'elle ne doit pas être synonyme d'une économie de bas salaires. Les hausses de salaires accompagnées de gains équivalents ou supérieurs en productivité n'ont pas d'effet inflationniste, pas plus qu'elles n'ont de conséquences négatives pour la compétitivité. Ce qui importe n'est pas le niveau des salaires, mais le niveau des coûts de la main-d'oeuvre par unité; pendant des années, les industriels japonais ont eu, en même temps, à la fois les salaires les plus élevés et les coûts de main-d'oeuvre par unité les plus bas des grandes nations. Dans la mesure où les entreprises industrielles européennes ont une productivité moins élevée que les entreprises américaines et japonaises, il faut que les hausses de salaires soient inférieures aux gains de productivité, mais une fois cet écart comblé, les hausses de salaires et les gains de productivité peuvent se rapprocher bien davantage.

5.1.4. Il convient aussi de se rappeler que les coûts de main-d'oeuvre par unité ne sont pas le seul élément déterminant de la compétitivité. Dans certains cas, des coûts élevés de main-d'oeuvre par unité peuvent être compensés par la qualité, la conception et d'autres éléments qualitatifs de «compétitivité autre que la compétitivité par le prix». Les entreprises européennes doivent fournir des efforts importants afin de rattraper leur retard dans ce domaine.

5.1.5. Le Comité est parfaitement conscient de l'interaction qui s'exerce entre les taux d'intérêt, les salaires, les investissements, l'emploi et la productivité. Il invite les États membres et les différents intervenants dans ces domaines à rechercher les équilibres nécessaires selon leurs traditions et la situation de leur pays, notamment en tenant compte des diversités géographiques.

5.2. La protection sociale

5.2.1. Le Comité souligne l'importance d'une politique de consolidation équilibrée du point de vue social. Il ne s'agit pas pour l'État, de favoriser les dépenses d'investissement au détriment des dépenses de consommation. Le point capital est de parvenir à une répartition socialement équitable des charges dans le domaine de la politique fiscale, d'une part, et dans celui des dépenses de consommation, d'autre part.

5.2.2. Le Comité approuve, dans son principe la politique consistant à réorienter des sommes consacrées à l'indemnisation du chômage vers des mesures actives en faveur de l'emploi, mais il a le sentiment qu'une réflexion considérable est nécessaire quant à la manière de procéder aussi efficacement que possible en ce domaine.

5.3. L'organisation du travail et la flexibilité

5.3.1. Sur la question de l'avenir du travail, la Commission invite à «anticiper une conception nouvelle du contenu et du rôle du travail dans nos sociétés».

5.3.2. Le Comité constate que les partenaires sociaux ont progressé dans la recherche d'un cadre conventionnel en matière d'organisation du travail, de flexibilité et de réduction du temps de travail et estime que ces matières méritent d'être approfondies. Il considère qu'une contribution de valeur est ainsi apportée à la préparation du Livre vert que la Commission va préparer sur ces mêmes thèmes. Il salue également l'initiative d'un autre Livre vert sur les aspects sociaux et sociétaux de la société de l'information.

5.4. L'emploi des jeunes

5.4.1. Le Comité marque son accord pour que les projets suivants soient étudiés en urgence:

- initiative commune sur l'insertion des jeunes;

- cadre de références en matière d'accès aux compétences;

- statut européen de l'apprenti.

5.4.2. Le Comité approuve l'idée d'utiliser l'enseignement et la formation comme clefs pour ouvrir les portes de l'emploi, mais souhaite faire observer que cette exploitation doit être coordonnée avec la création d'emplois. Par elle-même, la formation ne créera pas d'emplois; elle ne fera que créer une main-d'oeuvre mieux préparée à occuper les emplois qui pourraient se présenter. La formation sans création d'emplois aboutira seulement à la constitution d'un vivier de chômeurs hautement qualifiés.

5.4.3. Le Comité attache une importance toute particulière aux actions ci-après qui sont proposées par la Commission en vue de l'intégration des jeunes:

- développement des liens entre les écoles et les entreprises;

- développement d'un programme Erasmus d'apprentissage et lancement de discussions avec les gouvernements et les partenaires sociaux en vue de l'élaboration d'un statut de l'apprenti.

5.4.3.1. Le Comité soutient également un statut européen et le développement du programme Erasmus pour les jeunes qui reçoivent leur formation professionnelle dans le cadre d'une quelconque forme de coopération avec des entreprises, mettant en place un «apprentissage européen moderne».

5.5. Mobilité transfrontalière

5.5.1. Le Comité estime que l'Union européenne doit créer davantage de possibilités d'emploi en supprimant les entraves à l'emploi et à l'exercice d'activités professionnelles en qualité de travailleur indépendant et en améliorant la liberté de circulation à l'intérieur de l'Union.

5.5.2. Cela nécessitera des services de l'emploi transfrontaliers, l'ouverture, dans chaque pays de l'Union, des emplois du secteur public aux ressortissants des autres États membres, la reconnaissance mutuelle des qualifications et une plus grande facilité de transfert de l'épargne personnelle et des droits à pension.

Bruxelles, le 31 octobre 1996.

Le Président du Comité économique et social

Tom JENKINS

() JO n° C 204 du 15. 7. 1996.

() JO n° C 295 du 7. 10. 1996, p. 5.

() Doc. CSE (96) 1 final du 5. 6. 1996.

() JO n° C 212 du 22. 7. 1996, paragraphe 4.5.

ANNEXE à l'avis du Comité économique et social

Les amendements suivants ayant recueilli un nombre de voix favorables, représentant au moins un quart des suffrages exprimés, ont été repoussés au cours des débats.

Sous-paragraphe 3.2.5

Supprimer la quatrième phrase:

«On peut observer à l'échelle mondiale que la faible fiscalité favorise la croissance et l'emploi.»

Exposé des motifs

Il existe aussi des exemples de l'effet contraire. Ce n'est pas le niveau général d'imposition qui détermine la croissance et l'emploi.

Résultat du vote

Voix pour: 34, voix contre: 67, abstentions: 8.

Paragraphe 3.5.3

Ajouter une nouvelle phrase:

«Cela ne doit pas avoir pour conséquence la détérioration de la santé et de la sécurité des employés par rapport aux employés des entreprises plus importantes.»

Résultat du vote

Voix pour: 35, voix contre: 57, abstentions: 20.

Paragraphe 4.6.2

Supprimer.

Insérer:

«Le Comité estime que, pour ce faire, l'impact des Fonds structurels doit être évalué en termes d'effets sur la création d'emplois durables.»

Exposé des motifs

Le libellé actuel énonce une conclusion qui peut être en contradiction avec les preuves lorsque celles-ci sont disponibles.

Résultat du vote

Voix pour: 39, voix contre: 63, abstentions: 15.

Paragraphe 4.6.5

Supprimer.

Exposé des motifs

Ce paragraphe préjuge une conclusion qui n'est pas encore étayée par des preuves. Les Fonds structurels doivent être réexaminés dans le contexte du budget global de l'UE.

Résultat du vote

Voix pour: 38, voix contre: 73, abstentions: 11.

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