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Document 62011TJ0346
Sommaire de l'arrêt
Sommaire de l'arrêt
1. Privilèges et immunités de l’Union européenne – Membres du Parlement européen – Immunité pour les opinions exprimées et les votes émis dans l’exercice de leurs fonctions – Notion d’opinion exprimée dans l’exercice de fonctions – Nécessité d’un lien direct et évident entre l’opinion exprimée et les fonctions parlementaires – Opinions exprimées en qualité de politicien national – Absence de lien – Inapplicabilité de l’immunité
(Protocole sur les privilèges et immunités de l’Union européenne, art. 8 et 9)
2. Privilèges et immunités de l’Union européenne – Membres du Parlement européen – Immunité pour les opinions exprimées et les votes émis dans l’exercice de leurs fonctions – Étendue – Impossibilité de la levée de cette immunité – Vérification par le Parlement des conditions pour la reconnaissance de celle-ci
(Protocole sur les privilèges et immunités de l’Union européenne, art. 8 et 9)
3. Privilèges et immunités de l’Union européenne – Membres du Parlement européen – Immunité – Demande de défense de l’immunité – Portée de la décision du Parlement – Demande présentée parallèlement à la demande de levée de l’immunité
(Protocole sur les privilèges et immunités de l’Union européenne, art. 8 et 9)
4. Privilèges et immunités de l’Union européenne – Membres du Parlement européen – Immunité – Demande de levée de l’immunité – Pouvoir d’appréciation du Parlement – Contrôle juridictionnel – Portée
(Protocole sur les privilèges et immunités de l’Union européenne, art. 9)
5. Privilèges et immunités de l’Union européenne – Membres du Parlement européen – Immunité – Demande de levée de l’immunité – Acte accompli par le membre sur le territoire national – Reconnaissance de l’immunité sur la base des règles de l’État membre
(Protocole sur les privilèges et immunités de l’Union européenne, art. 8 et 9)
6. Droit de l’Union – Principes – Protection de la confiance légitime – Communication d’une commission du Parlement européen concernant la pratique en matière de privilèges et immunités des membres – Communication n’ayant pas la nature d’un acte du Parlement – Acte ne comportant pas de renseignements précis, inconditionnels et concordants susceptibles de constituer des assurances précises pour fonder une confiance légitime – Décision s’écartant de ladite communication – Violation du principe de sécurité juridique – Absence
7. Privilèges et immunités de l’Union européenne – Membres du Parlement européen – Immunité pour les opinions exprimées et les votes émis dans l’exercice de leurs fonctions – Opinions relevant de l’incitation à la haine raciale – Décision du Parlement de lever l’immunité – Obligation de motivation – Respect des principes d’égalité de traitement et de bonne administration
(Art. 296 TFUE ; charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 11 ; protocole sur les privilèges et immunités de l’Union européenne, art. 9, al. 3)
8. Privilèges et immunités de l’Union européenne – Membres du Parlement européen – Déchéance du mandat parlementaire – Procédure judiciaire nationale pouvant aboutir à cette déchéance – Obligation pour les États membres d’informer le Parlement européen – Absence
(Règlement intérieur du Parlement européen, art. 3, § 6)
9. Privilèges et immunités de l’Union européenne – Membres du Parlement européen – Immunité – Décision de levée de l’immunité – Décision adoptée sans débat en séance plénière – Présentation des observations du député concerné devant la commission parlementaire – Violation du droit d’être entendu – Absence
[Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 41, § 2, a) ; règlement intérieur du Parlement européen, art. 7, § 3, et 138, § 2]
10. Responsabilité non contractuelle – Conditions – Caractère cumulatif – Illégalité – Absence – Lien de causalité – Absence – Rejet du recours
(Art. 340, al. 2, TFUE)
1. Il ressort du libellé de l’article 8 du protocole sur les privilèges et immunités de l’Union européenne que, pour être couverte par l’immunité, une opinion d’un député au Parlement européen doit avoir été émise « dans l’exercice de [ses] fonctions », impliquant ainsi l’exigence d’un lien entre l’opinion exprimée et les fonctions parlementaires. Tel n’est pas le cas des opinions exprimées par un député européen, en dehors de l’enceinte parlementaire, dans le cadre de fonctions exercées par ce député en tant que membre d’un organe régional d’un État membre et en tant que président d’un groupe politique au sein de ce même organe.
(cf. points 40, 77, 78)
2. L’inviolabilité parlementaire établie à l’article 9 du protocole sur les privilèges et immunités de l’Union européenne peut être levée par le Parlement européen, conformément au troisième alinéa dudit article 9, alors que l’immunité prévue à l’article 8 du protocole ne le peut pas. Ainsi, lorsqu’une demande de levée de l’immunité lui est transmise par une autorité nationale, il appartient tout d’abord au Parlement de vérifier si les faits à l’origine de la demande de levée sont susceptibles d’être couverts par cet article 8, auquel cas une levée de l’immunité est impossible. Si le Parlement aboutit à la conclusion que cette disposition ne s’applique pas, il lui incombe ensuite de vérifier si le député concerné bénéficie de l’immunité prévue par l’article 9 du protocole pour les faits qui lui sont reprochés et, si tel est le cas, de décider s’il y a lieu ou non de lever cette immunité.
(cf. points 45-47)
3. Dès lors que l’inviolabilité du député européen prévue à l’article 9 du protocole sur les privilèges et immunités de l’Union européenne est de droit et que celui-ci ne peut en être privé que si le Parlement européen l’a levée, la défense de cette immunité ne se conçoit que dans l’hypothèse où, en l’absence de demande de levée de l’immunité d’un député transmise par les autorités nationales compétentes au Parlement, l’inviolabilité dudit député, telle qu’elle résulte des dispositions du droit national de l’État membre d’origine de celui-ci, est compromise, notamment, par l’action des autorités de police ou des autorités juridictionnelles de cet État membre. Dans de telles circonstances, le député peut demander au Parlement de défendre son immunité, ainsi que le prévoit l’article 6, paragraphe 3, du règlement intérieur du Parlement. La défense de l’immunité constitue ainsi une manière pour le Parlement de s’interposer, à la demande d’un député au Parlement, lorsque les autorités nationales violent ou s’apprêtent à violer l’immunité de l’un de ses membres.
En revanche, si une demande de levée de l’immunité est formée par les autorités nationales, le Parlement doit prendre la décision de lever ou de ne pas lever l’immunité. Dans un tel cas, la défense de l’immunité n’a plus de raison d’être, puisque soit le Parlement lève l’immunité et la défense de celle-ci ne se conçoit plus, soit il refuse de lever cette immunité et la défense de celle-ci est inutile, puisque les autorités nationales sont avisées que leur demande de levée a été rejetée par le Parlement et que l’immunité fait donc obstacle aux mesures que pourraient ou voudraient prendre ces dernières.
(cf. points 52-56)
4. Si les privilèges et immunités reconnus à l’Union par le protocole sur les privilèges et immunités de l’Union européenne revêtent un caractère fonctionnel, en ce qu’ils visent à éviter qu’une entrave ne soit apportée au fonctionnement et à l’indépendance de l’Union, il n’en demeure pas moins qu’ils ont été expressément accordés aux membres du Parlement européen ainsi qu’aux fonctionnaires et autres agents des institutions de l’Union. Le fait que les privilèges et immunités reconnus à l’Union sont prévus dans l’intérêt public de l’Union justifie le pouvoir donné aux institutions de lever, le cas échéant, l’immunité, mais ne signifie pas que ces privilèges et immunités soient accordés à l’Union exclusivement et non pas également à ses fonctionnaires, à ses autres agents et aux membres du Parlement. Le protocole crée donc un droit subjectif au profit des personnes visées, dont le respect est garanti par le système des voies de recours établi par le traité.
Certes, le Parlement a un très large pouvoir d’appréciation quant à l’orientation qu’il entend donner à une décision faisant suite à une demande de levée d’immunité ou de défense de l’immunité, en raison du caractère politique que revêt une telle décision. Cependant, l’exercice de ce pouvoir n’est toutefois pas soustrait à tout contrôle juridictionnel, dans le cadre duquel le juge de l’Union doit vérifier le respect des règles de procédure, l’exactitude matérielle des faits retenus par l’institution, l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation de ces faits ou l’absence de détournement de pouvoir.
(cf. points 58-60)
5. Voir le texte de la décision.
(cf. points 82-90)
6. Une communication établie par le seul secrétariat général du Parlement européen, reprenant un document de la commission juridique et du marché intérieur sur sa pratique décisionnelle relative à la levée de l’immunité parlementaire et visant à sensibiliser les députés au regard de cette pratique, n’est pas un acte du Parlement et ne saurait donc pas lier ce dernier. Il s’ensuit qu’un tel document ne saurait comporter des renseignements précis, inconditionnels et concordants, émanant du Parlement, susceptibles de constituer des assurances précises de sa part pour fonder une confiance légitime chez un député européen.
De plus, en s’écartant de cette communication, le Parlement ne saurait violer le principe de sécurité juridique, dès lors que ladite communication n’est pas un acte de cette institution et ne peut pas être considérée comme une réglementation claire et précise permettant aux justiciables de connaître sans ambiguïté leurs droits et obligations et de prendre leurs dispositions en conséquence.
(cf. points 107, 115, 124)
7. Voir le texte de la décision.
(cf. points 109-114)
8. L’article 3, paragraphe 6, du règlement intérieur du Parlement européen ne prévoit aucune obligation pour les États membres d’informer celui-ci de l’existence d’une procédure susceptible d’aboutir à la déchéance du mandat de l’un de ses membres. Cette disposition prévoit uniquement que, lorsque les autorités compétentes des États membres entament une procédure susceptible d’aboutir à la déchéance du mandat d’un député, le président du Parlement leur demande d’être régulièrement informé de l’état de la procédure et saisit la commission compétente pour la vérification des pouvoirs, sur proposition de laquelle le Parlement peut se prononcer. Les dispositions de cet article prévoient ainsi la procédure à suivre par le président du Parlement et non par les États membres. Au demeurant, aucune obligation à la charge des États membres ne peut être établie sur le fondement du règlement intérieur du Parlement.
Par ailleurs, l’objet de ladite disposition de ce règlement est d’assurer le bon fonctionnement interne du Parlement et elle ne constitue donc pas une formalité substantielle de la procédure de levée de l’immunité d’un député dont la violation peut entraîner l’annulation d’une décision du Parlement.
(cf. points 132-137, 141)
9. Conformément au principe fondamental du respect des droits de la défense, consacré par l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, l’intéressé doit avoir eu la possibilité, préalablement à l’adoption d’une décision le concernant, de faire valoir utilement son point de vue sur la réalité et la pertinence des faits et circonstances sur la base desquels cette décision a été adoptée. Il s’ensuit que, conformément à ce principe, une décision ne saurait être adoptée sur le fondement d’éléments de fait et de circonstances sur lesquels l’intéressé n’aurait pas été en mesure de faire utilement valoir son point de vue avant l’adoption de cette décision.
Toutefois, le droit d’être entendu n’implique pas nécessairement la tenue d’un débat public dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief à celle-ci. Le respect des droits de la défense et du contradictoire n’implique par conséquent pas que l’adoption, par le Parlement européen, d’une décision concernant la levée de l’immunité d’un député soit nécessairement précédée d’un débat en séance plénière, mais elle peut être adoptée selon la procédure sans débat et sans amendement, conformément à l’article 138, paragraphe 2, du règlement intérieur du Parlement. Par ailleurs, au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement intérieur du Parlement, le député concerné par une demande de levée de son immunité se voit offrir la possibilité de s’expliquer devant la commission parlementaire compétente et il peut présenter autant de documents et d’éléments d’appréciation écrits qu’il juge pertinents.
(cf. points 167, 175-179)
10. Voir le texte de la décision.
(cf. points 210-212, 222)
Affaires jointes T‑346/11 et T‑347/11
Bruno Gollnisch
contre
Parlement européen
«Privilèges et immunités — Membre du Parlement européen — Décision de lever l’immunité — Activité sans lien avec les fonctions de député — Procédure de levée de l’immunité — Décision de ne pas défendre les privilèges et immunités — Disparition de l’intérêt à agir — Non-lieu à statuer»
Sommaire – Arrêt du Tribunal (première chambre) du 17 janvier 2013
Privilèges et immunités de l’Union européenne – Membres du Parlement européen – Immunité pour les opinions exprimées et les votes émis dans l’exercice de leurs fonctions – Notion d’opinion exprimée dans l’exercice de fonctions – Nécessité d’un lien direct et évident entre l’opinion exprimée et les fonctions parlementaires – Opinions exprimées en qualité de politicien national – Absence de lien – Inapplicabilité de l’immunité
(Protocole sur les privilèges et immunités de l’Union européenne, art. 8 et 9)
Privilèges et immunités de l’Union européenne – Membres du Parlement européen – Immunité pour les opinions exprimées et les votes émis dans l’exercice de leurs fonctions – Étendue – Impossibilité de la levée de cette immunité – Vérification par le Parlement des conditions pour la reconnaissance de celle-ci
(Protocole sur les privilèges et immunités de l’Union européenne, art. 8 et 9)
Privilèges et immunités de l’Union européenne – Membres du Parlement européen – Immunité – Demande de défense de l’immunité – Portée de la décision du Parlement – Demande présentée parallèlement à la demande de levée de l’immunité
(Protocole sur les privilèges et immunités de l’Union européenne, art. 8 et 9)
Privilèges et immunités de l’Union européenne – Membres du Parlement européen – Immunité – Demande de levée de l’immunité – Pouvoir d’appréciation du Parlement – Contrôle juridictionnel – Portée
(Protocole sur les privilèges et immunités de l’Union européenne, art. 9)
Privilèges et immunités de l’Union européenne – Membres du Parlement européen – Immunité – Demande de levée de l’immunité – Acte accompli par le membre sur le territoire national – Reconnaissance de l’immunité sur la base des règles de l’État membre
(Protocole sur les privilèges et immunités de l’Union européenne, art. 8 et 9)
Droit de l’Union – Principes – Protection de la confiance légitime – Communication d’une commission du Parlement européen concernant la pratique en matière de privilèges et immunités des membres – Communication n’ayant pas la nature d’un acte du Parlement – Acte ne comportant pas de renseignements précis, inconditionnels et concordants susceptibles de constituer des assurances précises pour fonder une confiance légitime – Décision s’écartant de ladite communication – Violation du principe de sécurité juridique – Absence
Privilèges et immunités de l’Union européenne – Membres du Parlement européen – Immunité pour les opinions exprimées et les votes émis dans l’exercice de leurs fonctions – Opinions relevant de l’incitation à la haine raciale – Décision du Parlement de lever l’immunité – Obligation de motivation – Respect des principes d’égalité de traitement et de bonne administration
(Art. 296 TFUE ; charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 11 ; protocole sur les privilèges et immunités de l’Union européenne, art. 9, al. 3)
Privilèges et immunités de l’Union européenne – Membres du Parlement européen – Déchéance du mandat parlementaire – Procédure judiciaire nationale pouvant aboutir à cette déchéance – Obligation pour les États membres d’informer le Parlement européen – Absence
(Règlement intérieur du Parlement européen, art. 3, § 6)
Privilèges et immunités de l’Union européenne – Membres du Parlement européen – Immunité – Décision de levée de l’immunité – Décision adoptée sans débat en séance plénière – Présentation des observations du député concerné devant la commission parlementaire – Violation du droit d’être entendu – Absence
[Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 41, § 2, a) ; règlement intérieur du Parlement européen, art. 7, § 3, et 138, § 2]
Responsabilité non contractuelle – Conditions – Caractère cumulatif – Illégalité – Absence – Lien de causalité – Absence – Rejet du recours
(Art. 340, al. 2, TFUE)
Il ressort du libellé de l’article 8 du protocole sur les privilèges et immunités de l’Union européenne que, pour être couverte par l’immunité, une opinion d’un député au Parlement européen doit avoir été émise «dans l’exercice de [ses] fonctions», impliquant ainsi l’exigence d’un lien entre l’opinion exprimée et les fonctions parlementaires. Tel n’est pas le cas des opinions exprimées par un député européen, en dehors de l’enceinte parlementaire, dans le cadre de fonctions exercées par ce député en tant que membre d’un organe régional d’un État membre et en tant que président d’un groupe politique au sein de ce même organe.
(cf. points 40, 77, 78)
L’inviolabilité parlementaire établie à l’article 9 du protocole sur les privilèges et immunités de l’Union européenne peut être levée par le Parlement européen, conformément au troisième alinéa dudit article 9, alors que l’immunité prévue à l’article 8 du protocole ne le peut pas. Ainsi, lorsqu’une demande de levée de l’immunité lui est transmise par une autorité nationale, il appartient tout d’abord au Parlement de vérifier si les faits à l’origine de la demande de levée sont susceptibles d’être couverts par cet article 8, auquel cas une levée de l’immunité est impossible. Si le Parlement aboutit à la conclusion que cette disposition ne s’applique pas, il lui incombe ensuite de vérifier si le député concerné bénéficie de l’immunité prévue par l’article 9 du protocole pour les faits qui lui sont reprochés et, si tel est le cas, de décider s’il y a lieu ou non de lever cette immunité.
(cf. points 45-47)
Dès lors que l’inviolabilité du député européen prévue à l’article 9 du protocole sur les privilèges et immunités de l’Union européenne est de droit et que celui-ci ne peut en être privé que si le Parlement européen l’a levée, la défense de cette immunité ne se conçoit que dans l’hypothèse où, en l’absence de demande de levée de l’immunité d’un député transmise par les autorités nationales compétentes au Parlement, l’inviolabilité dudit député, telle qu’elle résulte des dispositions du droit national de l’État membre d’origine de celui-ci, est compromise, notamment, par l’action des autorités de police ou des autorités juridictionnelles de cet État membre. Dans de telles circonstances, le député peut demander au Parlement de défendre son immunité, ainsi que le prévoit l’article 6, paragraphe 3, du règlement intérieur du Parlement. La défense de l’immunité constitue ainsi une manière pour le Parlement de s’interposer, à la demande d’un député au Parlement, lorsque les autorités nationales violent ou s’apprêtent à violer l’immunité de l’un de ses membres.
En revanche, si une demande de levée de l’immunité est formée par les autorités nationales, le Parlement doit prendre la décision de lever ou de ne pas lever l’immunité. Dans un tel cas, la défense de l’immunité n’a plus de raison d’être, puisque soit le Parlement lève l’immunité et la défense de celle-ci ne se conçoit plus, soit il refuse de lever cette immunité et la défense de celle-ci est inutile, puisque les autorités nationales sont avisées que leur demande de levée a été rejetée par le Parlement et que l’immunité fait donc obstacle aux mesures que pourraient ou voudraient prendre ces dernières.
(cf. points 52-56)
Si les privilèges et immunités reconnus à l’Union par le protocole sur les privilèges et immunités de l’Union européenne revêtent un caractère fonctionnel, en ce qu’ils visent à éviter qu’une entrave ne soit apportée au fonctionnement et à l’indépendance de l’Union, il n’en demeure pas moins qu’ils ont été expressément accordés aux membres du Parlement européen ainsi qu’aux fonctionnaires et autres agents des institutions de l’Union. Le fait que les privilèges et immunités reconnus à l’Union sont prévus dans l’intérêt public de l’Union justifie le pouvoir donné aux institutions de lever, le cas échéant, l’immunité, mais ne signifie pas que ces privilèges et immunités soient accordés à l’Union exclusivement et non pas également à ses fonctionnaires, à ses autres agents et aux membres du Parlement. Le protocole crée donc un droit subjectif au profit des personnes visées, dont le respect est garanti par le système des voies de recours établi par le traité.
Certes, le Parlement a un très large pouvoir d’appréciation quant à l’orientation qu’il entend donner à une décision faisant suite à une demande de levée d’immunité ou de défense de l’immunité, en raison du caractère politique que revêt une telle décision. Cependant, l’exercice de ce pouvoir n’est toutefois pas soustrait à tout contrôle juridictionnel, dans le cadre duquel le juge de l’Union doit vérifier le respect des règles de procédure, l’exactitude matérielle des faits retenus par l’institution, l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation de ces faits ou l’absence de détournement de pouvoir.
(cf. points 58-60)
Voir le texte de la décision.
(cf. points 82-90)
Une communication établie par le seul secrétariat général du Parlement européen, reprenant un document de la commission juridique et du marché intérieur sur sa pratique décisionnelle relative à la levée de l’immunité parlementaire et visant à sensibiliser les députés au regard de cette pratique, n’est pas un acte du Parlement et ne saurait donc pas lier ce dernier. Il s’ensuit qu’un tel document ne saurait comporter des renseignements précis, inconditionnels et concordants, émanant du Parlement, susceptibles de constituer des assurances précises de sa part pour fonder une confiance légitime chez un député européen.
De plus, en s’écartant de cette communication, le Parlement ne saurait violer le principe de sécurité juridique, dès lors que ladite communication n’est pas un acte de cette institution et ne peut pas être considérée comme une réglementation claire et précise permettant aux justiciables de connaître sans ambiguïté leurs droits et obligations et de prendre leurs dispositions en conséquence.
(cf. points 107, 115, 124)
Voir le texte de la décision.
(cf. points 109-114)
L’article 3, paragraphe 6, du règlement intérieur du Parlement européen ne prévoit aucune obligation pour les États membres d’informer celui-ci de l’existence d’une procédure susceptible d’aboutir à la déchéance du mandat de l’un de ses membres. Cette disposition prévoit uniquement que, lorsque les autorités compétentes des États membres entament une procédure susceptible d’aboutir à la déchéance du mandat d’un député, le président du Parlement leur demande d’être régulièrement informé de l’état de la procédure et saisit la commission compétente pour la vérification des pouvoirs, sur proposition de laquelle le Parlement peut se prononcer. Les dispositions de cet article prévoient ainsi la procédure à suivre par le président du Parlement et non par les États membres. Au demeurant, aucune obligation à la charge des États membres ne peut être établie sur le fondement du règlement intérieur du Parlement.
Par ailleurs, l’objet de ladite disposition de ce règlement est d’assurer le bon fonctionnement interne du Parlement et elle ne constitue donc pas une formalité substantielle de la procédure de levée de l’immunité d’un député dont la violation peut entraîner l’annulation d’une décision du Parlement.
(cf. points 132-137, 141)
Conformément au principe fondamental du respect des droits de la défense, consacré par l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, l’intéressé doit avoir eu la possibilité, préalablement à l’adoption d’une décision le concernant, de faire valoir utilement son point de vue sur la réalité et la pertinence des faits et circonstances sur la base desquels cette décision a été adoptée. Il s’ensuit que, conformément à ce principe, une décision ne saurait être adoptée sur le fondement d’éléments de fait et de circonstances sur lesquels l’intéressé n’aurait pas été en mesure de faire utilement valoir son point de vue avant l’adoption de cette décision.
Toutefois, le droit d’être entendu n’implique pas nécessairement la tenue d’un débat public dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief à celle-ci. Le respect des droits de la défense et du contradictoire n’implique par conséquent pas que l’adoption, par le Parlement européen, d’une décision concernant la levée de l’immunité d’un député soit nécessairement précédée d’un débat en séance plénière, mais elle peut être adoptée selon la procédure sans débat et sans amendement, conformément à l’article 138, paragraphe 2, du règlement intérieur du Parlement. Par ailleurs, au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement intérieur du Parlement, le député concerné par une demande de levée de son immunité se voit offrir la possibilité de s’expliquer devant la commission parlementaire compétente et il peut présenter autant de documents et d’éléments d’appréciation écrits qu’il juge pertinents.
(cf. points 167, 175-179)
Voir le texte de la décision.
(cf. points 210-212, 222)