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Document 62005TJ0109

Sommaire de l'arrêt

Mots clés
Sommaire

Mots clés

1. Recours en annulation — Intérêt à agir — Requérant attaquant une décision lui refusant l'accès à des documents d'une institution

(Art. 230 CE)

2. Union européenne — Institutions — Droit d'accès du public aux documents — Règlement nº 1049/2001 — Exceptions au droit d'accès aux documents — Obligation de motivation — Portée

(Art. 253 CE; règlement du Parlement européen et du Conseil nº 1049/2001)

3. Recours en annulation — Actes susceptibles de recours — Notion — Actes produisant des effets juridiques obligatoires — Actes préparatoires — Exclusion

(Art. 230 CE; règlement du Parlement européen et du Conseil nº 1049/2001)

4. Union européenne — Institutions — Droit d'accès du public aux documents — Règlement nº 1049/2001 — Exceptions au droit d'accès aux documents — Interprétation et application strictes

(Règlement du Parlement européen et du Conseil nº 1049/2001, art. 4, § 2, 3)

5. Union européenne — Institutions — Droit d'accès du public aux documents — Règlement nº 1049/2001 — Exceptions au droit d'accès aux documents — Protection des intérêts commerciaux d’un tiers — Possibilité de se fonder sur des présomptions générales s’appliquant à certaines catégories de documents

(Art. 255 CE; règlement du Parlement européen et du Conseil nº 1049/2001, art. 4, § 2, 1er tiret; règlement du Conseil nº 659/1999)

6. Union européenne — Institutions — Droit d'accès du public aux documents — Règlement nº 1049/2001 — Exceptions au droit d'accès aux documents — Protection des intérêts commerciaux d’un tiers — Notion de secret d'affaires

(Art. 287 CE; règlement du Parlement européen et du Conseil nº 1049/2001, art. 4, § 2, 1er tiret)

7. Union européenne — Institutions — Droit d'accès du public aux documents — Règlement nº 1049/2001 — Exceptions au droit d'accès aux documents — Intérêt public supérieur justifiant la divulgation de documents

(Règlement du Parlement européen et du Conseil nº 1049/2001, art. 4, § 2 et 3)

8. Union européenne — Institutions — Droit d'accès du public aux documents — Règlement nº 1049/2001 — Exceptions au droit d'accès aux documents — Documents émanant d'un État membre

(Règlement du Parlement européen et du Conseil nº 1049/2001, art. 4, § 5)

9. Union européenne — Institutions — Droit d'accès du public aux documents — Règlement nº 1049/2001 — Exceptions au droit d'accès aux documents — Documents émanant d'un État membre — Faculté de l'État membre de demander à l'institution la non-divulgation de documents

(Art. 10 CE; règlement du Parlement européen et du Conseil nº 1049/2001, art. 4, § 1 à 3 et 5, 7 et 8)

10. Actes des institutions — Motivation — Obligation — Portée — Régularisation d'un défaut de motivation au cours de la procédure contentieuse — Inadmissibilité

(Art. 253 CE)

Sommaire

1. Toute personne peut demander à avoir accès à n’importe quel document des institutions, sans qu’une justification particulière à l’accès aux documents ne soit demandée. Par conséquent, une personne qui s’est vu refuser l’accès à un document ou à une partie d’un document a déjà, de ce seul fait, un intérêt à l’annulation de la décision de refus. Le fait que la décision ayant motivé la demande d'accès aux documents ait été annulée n'empêche pas l'intéressé de conserver un intérêt à agir contre une décision de refus d'accès à des documents, lorsque les documents demandés n'ont pas été divulgués et que la décision de refus d'accès reste en vigueur.

(cf. points 62-63)

2. S’agissant d’une demande d’accès à des documents, lorsque l’institution en cause refuse un tel accès, elle doit démontrer dans chaque cas d’espèce, sur la base des informations dont elle dispose, que les documents auxquels l’accès est sollicité relèvent effectivement des exceptions énumérées dans le règlement nº 1049/2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission. Toutefois, il peut être impossible d’indiquer les raisons justifiant la confidentialité à l’égard de chaque document, sans divulguer le contenu de ce dernier, et, partant, priver l’exception de sa finalité essentielle.

Il appartient donc à l’institution ayant refusé l’accès à un document de fournir une motivation permettant de comprendre et de vérifier, d’une part, si le document demandé est effectivement concerné par le domaine visé par l’exception invoquée et, d’autre part, si le besoin de protection relatif à cette exception est réel. La motivation d’une décision refusant l’accès à des documents doit ainsi contenir, à tout le moins pour chaque catégorie de documents concernée, les raisons spécifiques pour lesquelles l’institution en cause considère que la divulgation des documents demandés tombe sous le coup d’une des exceptions prévues par le règlement nº 1049/2001.

Il n’est donc pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences du règlement nº 1049/2001 doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée.

(cf. points 82-84, 88)

3. Dans le cadre de la procédure d’accès du public aux documents de la Commission, il ressort de l’article 8 du règlement nº 1049/2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission, que la réponse à la demande initiale ne constitue qu’une première prise de position, conférant au demandeur la possibilité d’inviter le secrétaire général de la Commission à réexaminer la position en cause.

Par conséquent, seule la mesure adoptée par le secrétaire général de la Commission, ayant la nature d’une décision et remplaçant intégralement la prise de position précédente, est susceptible de produire des effets juridiques de nature à affecter les intérêts du demandeur et, partant, de faire l’objet d’un recours en annulation. Il s’ensuit que la réponse à la demande initiale ne produit pas d’effets juridiques et ne peut être considérée comme constituant un acte attaquable.

(cf. points 101-102)

4. Les exceptions à l’accès aux documents doivent être interprétées et appliquées de manière stricte, de façon à ne pas tenir en échec l’application du principe général consistant à conférer au public le plus large accès possible aux documents détenus par les institutions.

L’examen requis pour le traitement d’une demande d’accès aux documents doit revêtir un caractère concret. La seule circonstance qu’un document concerne un intérêt protégé par une exception ne saurait suffire à justifier l’application de cette dernière. Une telle application ne saurait, en principe, être justifiée que dans l’hypothèse où l’institution a préalablement apprécié, premièrement, si l’accès au document était susceptible de porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé et, deuxièmement, dans les hypothèses visées à l’article 4, paragraphes 2 et 3, du règlement nº 1049/2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission, s’il n’existait pas un intérêt public supérieur justifiant la divulgation du document visé. De surcroît, le risque d’atteinte à un intérêt protégé doit être raisonnablement prévisible et non purement hypothétique.

Par ailleurs, le droit d’accès du public à un document des institutions ne vise que des documents et non pas des informations entendues de manière plus générale et n’implique pas, pour les institutions, le devoir de répondre à toute demande de renseignements d’un particulier.

(cf. points 123-125, 129)

5. Pour procéder à une appréciation concrète et individuelle du contenu des documents visés par une demande d'accès à des documents, il est loisible à l’institution concernée de se fonder sur des présomptions générales s’appliquant à certaines catégories de documents, des considérations d’ordre général similaires étant susceptibles de s’appliquer à des demandes de divulgation portant sur des documents de même nature. En ce qui concerne les procédures de contrôle des aides d’État, de telles présomptions générales peuvent résulter du règlement nº 659/1999, portant modalités d’application de l’article [88 CE], ainsi que de la jurisprudence relative au droit de consulter les documents du dossier administratif de la Commission.

Toutefois, aux fins de l'interprétation de l'exception prévue à l'article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement nº 1049/2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission, même lorsque les documents en cause relèvent du dossier administratif de la Commission dans le cadre du contrôle d'une aide d'État, il ne peut être présumé que la divulgation de tous les éléments de ce dossier porterait atteinte à la protection des intérêts commerciaux de la personne en cause. Une telle présomption générale irait à l’encontre de la communication sur le secret professionnel dans les décisions en matière d’aides d’État qui prévoit en son considérant 17 que les informations relatives à l’organisation et aux coûts des services publics ne seront normalement pas considérées comme constituant d’autres informations confidentielles.

(cf. points 131-132, 135-136)

6. Dans le cadre de l'appréciation par la Commission d'une demande d'accès à des documents, celle-ci est tenue, en vertu de l’article 287 CE, de ne pas divulguer aux intéressés des informations qui, par leur nature, sont couvertes par le secret professionnel, telles que, notamment, des données relatives au fonctionnement interne d'une entreprise bénéficiaire d'une aide d'État.

Les secrets d'affaires sont des informations dont non seulement la divulgation au public, mais également la simple transmission à un sujet de droit différent de celui qui a fourni l’information, peut gravement léser les intérêts de celui-ci. Il est cependant nécessaire que les intérêts susceptibles d’être lésés par la divulgation de l’information soient objectivement dignes de protection. L’appréciation du caractère confidentiel d’une information nécessite ainsi une mise en balance entre les intérêts légitimes qui s’opposent à sa divulgation et l’intérêt général qui veut que les activités des institutions se déroulent dans le plus grand respect du principe d’ouverture.

Les informations relatives à l’organisation et aux coûts des services publics ne sont normalement pas considérées comme constituant des informations confidentielles comme il ressort du considérant 17 de la communication sur le secret professionnel dans les décisions en matière d’aides d’État. Toutefois, de telles informations peuvent relever des secrets d'affaires lorsqu'elles ont trait à une entreprise et possèdent une valeur économique réelle, ou potentielle, et leur divulgation ou leur utilisation pourrait présenter une valeur économique pour d’autres entreprises.

(cf. points 140, 143-144)

7. Le règlement nº 1049/2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission, prévoit que l’application des exceptions consacrées par son article 4, paragraphes 2 et 3, est écartée si la divulgation du document en cause est justifiée par un intérêt public supérieur. Dans ce contexte, il y a lieu pour l'institution de mettre en balance, d’une part, l’intérêt spécifique devant être protégé par la non-divulgation du document concerné et, d’autre part, notamment, l’intérêt général à ce que ce document soit rendu accessible, eu égard aux avantages découlant, ainsi qu’il est précisé au considérant 2 du règlement nº 1049/2001, d’une transparence accrue, à savoir une meilleure participation des citoyens au processus décisionnel ainsi qu’une plus grande légitimité, efficacité et responsabilité de l’administration à l'égard des citoyens dans un système démocratique.

L'intérêt particulier que peut faire valoir un demandeur à l'accès à un document le concernant personnellement ne saurait, toutefois, être pris en compte en tant qu'intérêt public supérieur au sens des dispositions de l'article 4, paragraphe 2, du règlement nº 1049/2001.

(cf. points 147-148)

8. Loin de ne viser que les documents dont les États membres sont les auteurs ou qui auraient été établis par ces derniers, l’article 4, paragraphe 5, du règlement nº 1049/2001, relatif à l'accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission, concerne potentiellement tout document émanant d’un État membre, c’est-à-dire l’intégralité des documents, quel qu’en soit l’auteur, qu’un État membre transmet à une institution. En l’occurrence, le seul critère pertinent est celui de la provenance du document et du dessaisissement par l’État membre concerné d’un document qui était en sa possession.

Interpréter ledit article 4, paragraphe 5, comme investissant l’État membre d’un droit de veto général et inconditionnel à l’effet de s’opposer, de manière purement discrétionnaire et sans avoir à motiver sa décision, à la divulgation de tout document détenu par une institution du seul fait que ledit document émane de cet État n’est pas compatible avec les objectifs poursuivis par le règlement nº 1049/2001.

En revanche, divers éléments militent en faveur d’une interprétation dudit article 4, paragraphe 5, selon laquelle l’exercice du pouvoir dont cette disposition investit l’État membre concerné se trouve encadré par les exceptions matérielles qu’énumèrent les paragraphes 1 à 3 de ce même article, l’État membre se voyant à cet égard simplement reconnaître un pouvoir de participation à la décision communautaire. Dans cette perspective, l’accord préalable de l’État membre auquel se réfère ledit paragraphe 5 s’apparente ainsi non pas à un droit de veto discrétionnaire, mais à une forme d’avis conforme quant à l’absence de motifs d’exception tirés des paragraphes 1 à 3.

(cf. points 188, 191-192)

9. Dès lors que la mise en œuvre de l’article 4, paragraphe 5, du règlement nº 1049/2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission, est confiée conjointement à l’institution et à l’État membre qui a exercé la faculté ouverte par ce paragraphe 5, et que, partant, une telle mise en œuvre est tributaire du dialogue devant se nouer entre eux, ceux-ci sont tenus, conformément à l’obligation de coopération loyale énoncée à l’article 10 CE, d’agir et de coopérer de sorte que lesdites règles puissent recevoir une application effective.

Un État membre qui, au terme du dialogue avec une institution communautaire concernant l’application éventuelle des exceptions prévues à l’article 4, paragraphes 1 à 3, du règlement nº 1049/2001, serait opposé à la divulgation du document en cause est tenu de motiver cette opposition au regard desdites exceptions. L’institution ne saurait en effet donner suite à l’opposition manifestée par un État membre à la divulgation d’un document qui émane de lui si cette opposition est dénuée de toute motivation ou si la motivation avancée n’est pas articulée par référence aux exceptions énumérées à l’article 4, paragraphes 1 à 3, du règlement nº 1049/2001. Lorsque, nonobstant l’invitation expresse en ce sens adressée par l’institution à l’État membre concerné, ce dernier demeure en défaut de lui fournir une telle motivation, ladite institution doit, si elle considère pour sa part qu’aucune desdites exceptions ne s’applique, donner accès au document sollicité.

L'obligation de motivation qui, ainsi qu’il ressort notamment des articles 7 et 8 dudit règlement, incombe à l’institution implique que cette dernière fasse état, dans sa décision, non seulement de l’opposition manifestée par l’État membre concerné à la divulgation du document demandé, mais également des raisons invoquées par cet État membre aux fins de conclure à l’application de l’une des exceptions au droit d’accès prévues à l’article 4, paragraphes 1 à 3, du même règlement. De telles indications sont, en effet, de nature à permettre au demandeur de comprendre l’origine et les raisons du refus qui lui est opposé et à la juridiction compétente d’exercer, le cas échéant, le contrôle qui lui est dévolu.

(cf. points 193, 195-196)

10. La motivation d’une décision doit figurer dans le corps même de celle-ci et des explications postérieures fournies par la Commission ne sauraient, sauf circonstances exceptionnelles, être prises en compte. Il s’ensuit qu'une décision doit se suffire à elle-même et sa motivation ne saurait résulter des explications écrites ou orales données ultérieurement, alors que la décision en question fait déjà l’objet d’un recours devant le juge de l’Union.

(cf. point 199)

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