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Document 62012CJ0365

Sommaire de l'arrêt

Affaire C‑365/12 P

Commission européenne

contre

EnBW Energie Baden-Württemberg AG

«Pourvoi — Règlement (CE) no 1049/2001 — Accès aux documents des institutions — Documents afférents à une procédure relative à l’application de l’article 81 CE — Règlements (CE) no 1/2003 et (CE) no 773/2004 — Refus d’accès — Exceptions relatives à la protection des activités d’enquête, des intérêts commerciaux et du processus décisionnel des institutions — Obligation de l’institution concernée de procéder à un examen concret et individuel du contenu des documents visés dans la demande d’accès aux documents»

Sommaire – Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 27 février 2014

  1. Institutions de l’Union européenne — Droit d’accès du public aux documents — Règlement no 1049/2001 — Exceptions au droit d’accès aux documents — Protection des objectifs des activités d’inspection, d’enquête et d’audit — Protection des intérêts commerciaux — Application aux dossiers administratifs afférents aux procédures de contrôle des ententes — Documents échangés entre la Commission et les parties notifiantes ou des tiers — Présomption générale d’application de l’exception au droit d’accès à l’ensemble des documents du dossier administratif — Renversement de cette présomption générale — Limites

    (Art. 15, § 3, TFUE et 101, § 1, TFUE; règlement du Parlement européen et du Conseil no 1049/2001, art. 4, § 2 et 3; règlement du Conseil no 1/2003; règlement de la Commission no 773/2004)

  2. Institutions de l’Union européenne — Droit d’accès du public aux documents — Règlement no 1049/2001 — Exceptions au droit d’accès aux documents — Application aux dossiers administratifs afférents aux procédures de contrôle des ententes — Présomption générale d’application de l’exception au droit d’accès à l’ensemble des documents du dossier administratif — Renversement de cette présomption générale — Accès d’une personne lésée par une entente et entendant obtenir réparation aux documents figurant dans le dossier afférent à une procédure relative à l’application de l’article 101, paragraphe 1, TFUE — Charge de la preuve incombant à l’intéressé — Obligation de mise en balance des intérêts en présence

    (Art. 101, § 1, TFUE; règlement du Parlement européen et du Conseil no 1049/2001, art. 4)

  3. Institutions de l’Union européenne — Droit d’accès du public aux documents — Règlement no 1049/2001 — Exceptions au droit d’accès aux documents — Protection du processus décisionnel — Protection des avis juridiques — Application aux dossiers administratifs afférents aux procédures de contrôle des ententes — Documents internes de la Commission afférents à une procédure non achevée — Présomption générale d’application de l’exception au droit d’accès à l’ensemble des avis — Renversement de cette présomption générale — Limites

    (Art. 101, § 1, TFUE; règlement du Parlement européen et du Conseil no 1049/2001, art. 4, § 3)

  1.  Lorsque les documents visés par la demande d’accès aux documents fondée sur le règlement no 1049/2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission, relèvent d’un domaine particulier du droit de l’Union, tel qu’une procédure d’application de l’article 81 CE, les exceptions au droit d’accès aux documents qui figurent, notamment, à l’article 4 dudit règlement ne sauraient être interprétées sans tenir compte des règles spécifiques régissant l’accès à ces documents, lesquelles sont prévues, en l’occurrence, par les règlements no 1/2003 et no 773/2004, relatif aux procédures mises en œuvre par la Commission en application des articles 81 CE et 82 CE.

    Ces règlements ne comportant pas de disposition prévoyant expressément la primauté de l’un sur l’autre, il convient d’assurer une application de chacun desdits règlements qui soit compatible avec celle de l’autre et en permette ainsi une application cohérente. Or, d’une part, si le règlement no 1049/2001 vise à conférer au public un droit d’accès aux documents des institutions qui soit le plus large possible, ce droit est soumis à certaines limites fondées sur des raisons d’intérêt public ou privé. D’autre part, les articles 27, paragraphe 2, et 28 du règlement no 1/2003 ainsi que les articles 6, 8, 15 et 16 du règlement no 773/2004 régissent de manière restrictive l’usage des documents figurant dans le dossier relatif à une procédure d’application de l’article 81 CE. Ainsi, non seulement les parties à une procédure d’application de l’article 81 CE ne disposent pas d’un droit d’accès illimité aux documents figurant dans le dossier de la Commission, mais, en outre, les tiers, à l’exception des plaignants, ne disposent pas, dans le cadre d’une telle procédure, du droit d’accès aux documents du dossier de la Commission. Si des personnes autres que celles disposant du droit d’accès au dossier au titre des règlements no 1/2003 et no 773/2004 ou celles qui, disposant en principe d’un tel droit, ne l’ont pas utilisé ou se sont vu opposer un refus étaient en mesure d’obtenir l’accès aux documents sur le fondement du règlement no 1049/2001, le régime d’accès au dossier institué par les règlements no 1/2003 et no 773/2004 serait mis en cause. Or, si le droit de consulter le dossier dans le cadre d’une procédure d’application de l’article 81 CE et le droit d’accès aux documents en vertu du règlement no 1049/2001 se distinguent juridiquement, ils conduisent à une situation comparable d’un point de vue fonctionnel.

    Partant, autoriser un accès généralisé sur la base du règlement no 1049/2001 aux documents figurant dans un dossier relatif à l’application de l’article 81 CE, serait de nature à mettre en péril l’équilibre que le législateur de l’Union a voulu assurer dans les règlements no 1/2003 et no 773/2004 entre l’obligation pour les entreprises concernées de communiquer à la Commission des informations commerciales éventuellement sensibles aux fins de permettre à celle-ci de déceler l’existence d’une entente et d’en apprécier la compatibilité avec ledit article, d’une part, et la garantie de protection renforcée s’attachant, au titre du secret professionnel et du secret des affaires, aux informations ainsi transmises à la Commission, d’autre part. Il en résulte que, la Commission, aux fins de l’application des exceptions prévues à l’article 4, paragraphe 2, premier et troisième tirets, du règlement no 1049/2001, est en droit de présumer, sans procéder à un examen concret et individuel de chacun des documents figurant dans un dossier relatif à une procédure d’application de l’article 81 CE, que la divulgation de ces documents porte, en principe, atteinte à la protection des intérêts commerciaux des entreprises impliquées dans une telle procédure ainsi qu’à la protection des objectifs des activités d’enquête relatives à celle-ci. À cet égard, les activités d’enquête relatives à une procédure d’application de l’article 81 CE ne peuvent être considérées comme achevées que lorsque la décision prise par la Commission dans le cadre de cette procédure revêt un caractère définitif.

    Cette présomption générale n’exclut pas la possibilité de démontrer qu’un document donné, dont la divulgation est demandée, n’est pas couvert par cette présomption ou qu’il existe un intérêt public supérieur justifiant la divulgation de ce document, en vertu de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001. En revanche, l’exigence imposant de vérifier si la présomption générale en question s’applique réellement ne saurait être interprétée en ce sens que la Commission devrait examiner individuellement tous les documents demandés en l’espèce, ce qui priverait cette présomption générale de son effet utile, à savoir permettre à la Commission de répondre à une demande d’accès globale d’une manière également globale.

    (cf. points 83-90, 93, 99-101)

  2.  Certes, le droit pour toute personne de demander réparation du dommage que lui aurait causé une violation de l’article 81 CE renforce le caractère opérationnel des règles de l’Union relatives à la concurrence, en contribuant au maintien d’une concurrence effective dans l’Union. Toutefois, des considérations aussi générales ne sauraient, en tant que telles, être de nature à primer les raisons justifiant le refus de divulgation des documents figurant dans un dossier relatif à l’application de l’article 81 CE.

    Aux fins d’assurer une protection effective du droit à réparation dont bénéficie un demandeur, il n’est pas nécessaire que tout document relevant d’une procédure d’application de l’article 81 CE soit communiqué à un demandeur, étant donné qu’il est peu probable que l’action en réparation doive se fonder sur l’intégralité des éléments figurant dans le dossier afférent à cette procédure. Il incombe à toute personne qui veut obtenir la réparation du dommage subi en raison d’une violation de l’article 81 CE d’établir la nécessité qu’il y a, pour elle, d’accéder à l’un ou l’autre document figurant dans le dossier de la Commission, afin que cette dernière puisse, au cas par cas, mettre en balance les intérêts justifiant la communication de tels documents et la protection de ceux-ci, en prenant en compte tous les éléments pertinents de l’affaire. À défaut d’une telle nécessité, l’intérêt qu’il y a à obtenir la réparation du préjudice subi en raison d’une violation de l’article 81 CE ne saurait constituer un intérêt public supérieur, au sens de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission.

    (cf. points 104-108)

  3.  Si, au moment de l’examen de la demande d’accès à des avis établis dans le cadre d’une procédure fondée sur l’article 81 CE, des recours juridictionnels visant à obtenir l’annulation de la décision de la Commission relative à l’application de cette disposition sont en cours, cette dernière pourrait, en fonction de l’issue de ces procédures juridictionnelles, être amenée à reprendre ses activités aux fins de l’adoption éventuelle d’une nouvelle décision. Il convient, dès lors, d’admettre l’existence d’une présomption générale, selon laquelle l’obligation qui serait faite à ladite institution de divulguer, au cours de ces procédures, des avis au sens de l’article 4, paragraphe 3, second alinéa, du règlement no 1049/2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission, porterait gravement atteinte au processus décisionnel de cette institution. En raison même de cette présomption générale, la Commission ne saurait être tenue de démontrer, dans sa décision relative à l’accès aux documents, que chaque document concerné constitue un avis, au sens de cette disposition. Toutefois, la présomption générale susvisée n’exclut pas la possibilité de démontrer qu’un document donné, dont la divulgation est demandée, n’est pas couvert par cette présomption ou qu’il existe un intérêt public supérieur justifiant la divulgation de ce document, en vertu de l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001.

    (cf. points 114, 116, 117)

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