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Document 62012CJ0370

Sommaire de l'arrêt

Affaire C‑370/12

Thomas Pringle

contre

Governement of Ireland e.a.

(demande de décision préjudicielle, introduite par la Supreme Court)

«Mécanisme de stabilité pour les États membres dont la monnaie est l’euro — Décision 2011/199/UE — Modification de l’article 136 TFUE — Validité — Article 48, paragraphe 6, TUE — Procédure de révision simplifiée — Traité MES — Politique économique et monétaire — Compétence des États membres»

Sommaire — Arrêt de la Cour (assemblée plénière) du 27 novembre 2012

  1. Questions préjudicielles – Appréciation de validité – Compétence de la Cour – Décision du Conseil européen prise conformément à la procédure de révision simplifiée du traité FUE – Inclusion – Portée

    (Art. 19, § 1, al. 1, TUE, et 48, § 6, TUE; art. 267 TFUE)

  2. Questions préjudicielles – Contrôle juridictionnel de la légalité des actes des institutions – Actes de portée générale – Nécessité pour les personnes physiques ou morales d’emprunter la voie de l’exception d’illégalité ou du renvoi préjudiciel en appréciation de validité – Obligation des juridictions nationales d’appliquer les règles procédurales nationales de manière à permettre la contestation de la légalité des actes de l’Union de portée générale – Limites – Question portant sur la validité d’une décision non attaquée sur le fondement de l’article 263 TFUE de manière à faire perdre la qualité pour agir ou à faire expirer les délais pour l’introduction d’un recours en annulation

    (Art. 263 TFUE et 267 TFUE)

  3. Politique économique et monétaire – Procédure de révision simplifiée du traité FUE – Modification de l’article 136 TFUE permettant l’institution d’un mécanisme de stabilité pour les États membres ayant l’euro comme monnaie – Appréciation de validité – Révision portant uniquement sur des dispositions de la troisième partie du traité FUE

    (Art. 4, § 1, TUE, 5, § 2, TUE et 48, § 6, TUE; art. 2, § 3, TFUE, 5, § 1, TFUE et 136 TFUE; décision du Conseil européen 2011/199)

  4. Politique économique et monétaire – Procédure de révision simplifiée du traité FUE – Modification de l’article 136 TFUE permettant l’instauration d’un mécanisme de stabilité pour les États membres ayant l’euro comme monnaie – Appréciation de validité – Révision n’accroissant pas les compétences de l’Union

    (Art. 48, § 6, TUE; art. 136 TFUE; décision du Conseil européen 2011/199)

  5. Questions préjudicielles – Recevabilité – Demande n’exposant pas les raisons justifiant le renvoi à la Cour – Irrecevabilité

    [Art. 267 TFUE; statut de la Cour de justice, art. 23; règlement de procédure de la Cour, art. 94, c)]

  6. Politique économique et monétaire – Politique monétaire – Compétence exclusive de l’Union – Conclusion par les États membres ayant l’euro comme monnaie d’un traité instituant un mécanisme européen de stabilité – Admissibilité

    [Art. 3, § 1, c), TFUE, 123, § 1 TFUE et 127 TFUE]

  7. Politique économique et monétaire – Politique monétaire – Compétence exclusive de l’Union- Conclusion par les États membres ayant l’euro comme monnaie d’un accord instituant un mécanisme européen de stabilité – Affectation des règles communes en matière de politique économique et monétaire de l’Union – Absence

    (Art. 4, § 1, TUE, et 5, § 2, TUE; art. 3, § 2, TFUE et 122, § 2, TFUE)

  8. Politique économique et monétaire – Politique économique – Coordination des politiques économiques – Conclusion par les États membres ayant l’euro comme monnaie d’un traité instituant un mécanisme européen de stabilité – Modification fondamentale de l’ordre juridique de l’Union – Absence

    (Art. 2, § 3, TFUE, 119 TFUE à 121 TFUE, 125 TFUE et 126, § 7 et 8, TFUE)

  9. Politique économique et monétaire – Politique économique – Compétence de l’Union pour accorder une assistance financière aux États membres en difficulté – Conclusion par les États membres ayant l’euro comme monnaie d’un traité instituant un mécanisme européen de stabilité – Absence d’affectation de cette compétence

    (Art. 122 TFUE)

  10. Politique économique et monétaire – Politique économique – Interdiction pour la Banque centrale européenne et les autres banques centrales d’accorder des découverts, des crédits ou d’acquérir des instruments de dette – Conclusion par les États membres ayant l’euro comme monnaie d’un traité instituant un mécanisme européen de stabilité – Admissibilité

    (Art. 123 TFUE)

  11. Politique économique et monétaire – Politique économique – Interdiction pour l’Union ou un État membre de répondre des engagements d’un autre État membre ou de les prendre à leur charge – Conclusion par les États membres ayant l’euro comme monnaie d’un traité instituant un mécanisme européen de stabilité – Admissibilité

    (Art. 125 TFUE)

  12. Politique économique et monétaire – Obligation de respecter le principe des compétences d’attribution – Attribution par le traité instituant le mécanisme européen de stabilité, conclu par des États membres, de nouvelles fonctions à la Commission, la Banque centrale européenne et la Cour de justice – Admissibilité

    (Art. 13, § 2, TUE, et 17 § 1, TUE; art. 273 TFUE)

  13. Droit de l’Union européenne – Principes généraux du droit – Règles et principes du traité et de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Protection juridictionnelle effective – Traité instituant le mécanisme européen de stabilité

    (Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 47)

  14. Politique économique et monétaire – Procédure de révision simplifiée du traité FUE – Compétence des États membres pour conclure et ratifier le traité instituant un mécanisme européen de stabilité modifiant l’article 136 TFUE avant l’entrée en vigueur de la décision modifiant cette disposition

    (Art. 48, § 6, TUE; art. 136 TFUE; décision du Conseil européen 2011/199, art. 1er)

  1.  Le traité de Lisbonne a introduit, à côté de la procédure de révision ordinaire du traité FUE, une procédure de révision simplifiée en vertu de l’article 48, paragraphe 6, TUE dont l’application est soumise au respect de plusieurs conditions. Le contrôle du respect desdites conditions étant nécessaire afin de constater si la procédure de révision simplifiée peut être appliquée, il incombe à la Cour de justice en tant qu’institution qui, en vertu de l’article 19, paragraphe 1, premier alinéa, TUE, assure le respect du droit dans l’interprétation et l’application des traités, d’examiner la validité d’une décision du Conseil européen fondée sur l’article 48, paragraphe 6, TUE.

    À cet effet, il appartient à la Cour de vérifier, d’une part, que les règles de procédure prévues audit article 48, paragraphe 6, ont été suivies et, d’autre part, que les modifications décidées ne portent que sur la troisième partie du traité FUE, ce qui implique qu’elles n’entraînent aucune modification des dispositions d’une autre partie des traités sur lesquels l’Union est fondée et qu’elles n’accroissent pas les compétences de cette dernière.

    (cf. points 31, 33-36)

  2.  Voir le texte de la décision.

    (cf. points 39-42)

  3.  La décision du Conseil européen 2011/199, modifiant l’article 136 du traité FUE en ce qui concerne un mécanisme de stabilité pour les États membres dont la monnaie est l’euro, satisfait à la condition énoncée à l’article 48, paragraphe 6, premier et deuxième alinéas TUE selon laquelle une révision du traité FUE au moyen de la procédure de révision simplifiée ne peut porter que sur des dispositions de la troisième partie du traité FUE.

    Premièrement, l’article 1er de la décision 2011/199 qui, par l’ajout d’un paragraphe 3 à l’article 136 TFUE, envisage l’institution d’un mécanisme de stabilité, n’est pas de nature à affecter la compétence exclusive reconnue à l’Union par l’article 3, paragraphe 1, sous c), TFUE dans le domaine de la politique monétaire pour les États membres dont la monnaie est l’euro. En effet, eu égard aux objectifs confiés au mécanisme de stabilité, aux moyens prévus aux fins d’atteindre ceux-ci ainsi qu’au lien étroit existant entre ce mécanisme d’une part, les dispositions du traité FUE relatives à la politique économique d’autre part, ainsi que le cadre réglementaire pour le renforcement de la gouvernance économique de l’Union, l’institution dudit mécanisme relève du domaine de la politique économique. Ainsi, en premier lieu, en ce qui concerne l’objectif poursuivi par ledit mécanisme, qui est de préserver la stabilité de la zone euro dans son ensemble, celui-ci se distingue clairement de l’objectif de maintenir la stabilité des prix, lequel constitue l’objectif principal de la politique monétaire de l’Union. En deuxième lieu, s’agissant des moyens envisagés afin d’atteindre l’objectif visé, la décision 2011/199 précise seulement que le mécanisme de stabilité accordera toute assistance financière nécessaire et elle ne comporte aucune autre indication sur le fonctionnement de ce mécanisme. Or, l’octroi d’une assistance financière à un État membre ne relève à l’évidence pas de la politique monétaire.

    Deuxièmement, la décision 2011/199 n’affecte pas la compétence de l’Union dans le domaine de la coordination des politiques économiques des États membres. En effet, dès lors que les articles 2, paragraphe 3, et 5, paragraphe 1, TFUE circonscrivent le rôle de l’Union dans le domaine de la politique économique à l’adoption de mesures de coordination, les dispositions des traités UE et FUE ne confèrent pas de compétence spécifique à l’Union pour établir un mécanisme de stabilité tel que celui envisagé par cette décision. Partant, eu égard aux articles 4, paragraphe 1, TUE et 5, paragraphe 2, TUE, les États membres dont la monnaie est l’euro sont compétents pour conclure entre eux un accord portant sur l’institution d’un mécanisme de stabilité, tel que celui envisagé par l’article 1er de la décision 2011/199. Toutefois, lesdits États membres ne peuvent s’affranchir du respect du droit de l’Union dans l’exercice de leurs compétences dans ce domaine. Or, la stricte conditionnalité à laquelle l’octroi d’une assistance financière par le mécanisme de stabilité est subordonné en vertu du paragraphe 3 de l’article 136 TFUE vise à assurer que, dans son fonctionnement, ce mécanisme respectera le droit de l’Union, y compris les mesures prises par l’Union dans le cadre de la coordination des politiques économiques des États membres.

    (cf. points 56, 57, 60, 63, 64, 68-70, 72, disp. 1)

  4.  La décision du Conseil européen 2011/199, modifiant l’article 136 du traité FUE en ce qui concerne un mécanisme de stabilité pour les États membres dont la monnaie est l’euro n’attribue aucune nouvelle compétence à l’Union. En effet, cette modification ne crée aucune base juridique en vue de permettre à l’Union d’engager une action qui n’était pas possible avant l’entrée en vigueur de cette modification du traité FUE. Par ailleurs, la circonstance que le traité instituant un mécanisme européen de stabilité recourt à des institutions de l’Union, notamment à la Commission et à la Banque centrale européenne, n’est pas de nature à affecter la validité de la décision 2011/199, qui, elle, ne prévoit que l’institution d’un mécanisme de stabilité par les États membres et reste muette sur tout rôle éventuel des institutions de l’Union dans ce cadre. Il s’ensuit que la décision 2011/199 satisfait à la condition énoncée à l’article 48, paragraphe 6, TUE, selon laquelle une révision du traité FUE au moyen de la procédure simplifiée ne peut pas conduire à un accroissement des compétences attribuées à l’Union dans les traités.

    (cf. points 73-75, disp. 1)

  5.  Voir le texte de la décision.

    (cf. points 84, 86)

  6.  Les articles 3, paragraphe 1, sous c), TFUE et 127 TFUE ne s’opposent pas à la conclusion entre les États membres dont la monnaie est l’euro d’un accord tel que le traité instituant un mécanisme européen de stabilité (traité MES) ni à la ratification de celui-ci par ces derniers.

    En effet, les activités du MES ne relèvent pas de la politique monétaire visée par ces dispositions du traité FUE car l’objectif de ce mécanisme n’est pas de maintenir la stabilité des prix mais de satisfaire les besoins de financement de ses membres, à savoir les États membres dont la monnaie est l’euro, qui connaissent ou risquent de connaître de graves problèmes de financement, si cela est indispensable pour préserver la stabilité financière de la zone euro dans son ensemble et de ses États membres. À cette fin, le MES n’est habilité ni à fixer les taux d’intérêts directeurs pour la zone euro ni à émettre des euros, l’assistance financière qu’il octroie devant être financée dans sa totalité, et en respectant l’article 123, paragraphe 1, TFUE, par du capital libéré ou par l’émission d’instruments financiers, comme le prévoit l’article 3 du traité instituant ledit mécanisme.

    L’effet éventuel des activités du MES sur la stabilité des prix n’est pas de nature à infirmer cette constatation. En effet, à supposer même que les activités dudit mécanisme puissent influer sur le niveau de l’inflation, une telle influence ne constituera que la conséquence indirecte des mesures de politique économique prises.

    (cf. points 95-98, disp. 2)

  7.  L’article 3, paragraphe 2, TFUE qui interdit aux États membres de conclure entre eux un accord qui serait susceptible d’affecter des règles communes ou d’en altérer la portée, ne s’oppose pas à la conclusion entre les États membres dont la monnaie est l’euro d’un accord tel que le traité instituant un mécanisme européen de stabilité (traité MES) ni à la ratification de celui-ci par ces derniers.

    En effet, d’une part, dès lors que la Facilité européenne de stabilité financière (FESF) a été instituée par les États membres dont la monnaie est l’euro en dehors du cadre de l’Union, la reprise par le mécanisme européen de stabilité (MES) du rôle attribué à cette facilité n’est pas susceptible d’affecter des règles communes de l’Union ou d’en altérer la portée.

    D’autre part, même s’il ressort du considérant 1 du traité instituant un mécanisme européen de stabilité (traité MES) que celui-ci assumera, parmi d’autres fonctions, le rôle jusqu’alors attribué temporairement au Mécanisme européen de stabilisation financière (MESF), institué sur le fondement de l’article 122, paragraphe 2, TFUE, cette circonstance n’est pas non plus de nature à affecter des règles communes de l’Union ou d’en altérer la portée. En effet, l’institution du MES n’affecte pas la compétence de l’Union d’accorder, sur la base de l’article 122, paragraphe 2, TFUE, une assistance financière ponctuelle à un État membre lorsqu’il est constaté que ce dernier connaît des difficultés ou une menace sérieuse de graves difficultés en raison de catastrophes naturelles ou d’événements exceptionnels échappant à son contrôle. Par ailleurs, dès lors que ni l’article 122, paragraphe 2, TFUE ni aucune autre disposition des traités UE et FUE ne confèrent une compétence spécifique à l’Union pour instituer un mécanisme de stabilité permanent tel que le MES, les États membres sont, eu égard aux articles 4, paragraphe 1, TUE et 5, paragraphe 2, TUE, habilités à agir dans ce domaine.

    (cf. points 101-105, disp. 2)

  8.  Les articles 2, paragraphe 3, TFUE, 119 TFUE à 121 TFUE et 126 TFUE ne s’opposent pas à la conclusion entre les États membres dont la monnaie est l’euro d’un accord tel que le traité instituant un mécanisme européen de stabilité (traité MES) ni à la ratification de celui-ci par ces derniers.

    En effet, les États membres sont compétents pour conclure entre eux un accord instituant un mécanisme de stabilité tel que le traité MES pour autant que les engagements pris par les États membres contractants dans le cadre d’un tel accord respectent le droit de l’Union. Dans ce contexte, le MES n’a pas pour objet la coordination des politiques économiques des États membres, mais constitue un mécanisme de financement. Si, certes, en vertu des articles 3, 12, paragraphe 1, et 13, paragraphe 3, premier alinéa, du traité instituant ce mécanisme, l’assistance financière fournie à un État membre, membre dudit mécanisme, est soumise à une stricte conditionnalité adaptée à l’instrument d’assistance choisi, qui peut prendre la forme d’un programme d’ajustement macroéconomique, la conditionnalité prévue ne constitue toutefois pas un instrument de coordination des politiques économiques des États membres, mais vise à assurer la compatibilité des activités du MES avec, notamment, l’article 125 TFUE et les mesures de coordination prises par l’Union.

    Enfin, le traité MES n’affecte pas non plus la compétence du Conseil d’émettre des recommandations sur le fondement de l’article 126, paragraphes 7 et 8, TFUE à l’égard d’un État membre qui connaît un déficit excessif.

    (cf. points 109-114, disp. 2)

  9.  L’article 122 TFUE a uniquement pour objet une assistance financière accordée par l’Union et non pas par les États membres. L’exercice par l’Union de la compétence qui lui est attribuée par cette disposition n’est pas affecté par l’institution du mécanisme européen de stabilité.

    (cf. points 119-122, disp. 2)

  10.  L’article 123 TFUE, qui interdit à la Banque centrale européenne et aux banques centrales des États membres d’accorder des découverts ou tout autre type de crédit aux autorités et organismes publics de l’Union et des États membres ainsi que d’acquérir directement, auprès d’eux, des instruments de leur dette, ne s’oppose pas à la conclusion entre les États membres dont la monnaie est l’euro d’un accord tel que le traité instituant un mécanisme européen de stabilité ni à la ratification de celui-ci par ces derniers. En effet, l’article 123 TFUE s’adresse spécifiquement à la Banque centrale européenne et aux banques centrales des États membres. L’octroi d’une assistance financière par un État membre ou un ensemble d’États membres à un autre État membre ne relève donc pas de ladite interdiction.

    (cf. points 123, 125, 128, disp. 2)

  11.  L’article 125 TFUE, selon lequel l’Union ou un État membre «ne répond pas des engagements» d’un autre État membre et «ne les prend pas à sa charge», ne s’oppose pas à la conclusion entre les États membres dont la monnaie est l’euro d’un accord tel que le traité instituant un mécanisme européen de stabilité (traité MES) ni à la ratification de celui-ci par ces derniers.

    En effet, si l’article 125 TFUE interdit à l’Union et aux États membres l’octroi d’une assistance financière qui aurait pour effet de porter atteinte à l’incitation de l’État membre bénéficiaire de cette assistance à mener une politique budgétaire saine, en revanche, cette disposition n’interdit pas l’octroi d’une telle assistance par un ou plusieurs États membres à un autre État membre dès lors que celui-ci demeure responsable de ses propres engagements à l’égard de ses créanciers et pourvu que les conditions attachées à une telle assistance soient de nature à inciter ce dernier à mettre en œuvre une politique budgétaire saine.

    S’agissant du traité MES, le MES ne se porte, en premier lieu, pas garant des dettes de l’État membre bénéficiaire. Ce dernier reste responsable, à l’égard de ses créanciers, pour ses engagements financiers, étant donné que conformément à l’article 13, paragraphe 6, du traité instituant ce mécanisme, toute assistance financière octroyée sur la base des articles 14 à 16 de celui-ci doit lui être remboursée par l’État membre bénéficiaire et que, conformément à l’article 20, paragraphe 1, dudit traité, le montant à rembourser est majoré d’une marge appropriée. Pour les mêmes motifs, le MES ne prend pas à sa charge la dette de l’État bénéficiaire d’un rachat de titres émis sur le marché primaire, qui est assimilable à l’octroi d’un prêt. L’État membre émetteur demeure, en outre, seul redevable des dettes contractées par l’achat sur le marché secondaire de titres émis par un État membre du MES.

    En deuxième lieu, un soutien à la stabilité ne peut être accordé que lorsqu’il est indispensable pour préserver la stabilité financière de la zone euro dans son ensemble ainsi que de ses États membres et l’octroi de ce soutien est subordonné à des conditions strictes adaptées à l’instrument d’assistance financière choisi, visant notamment à garantir la poursuite par les États membres d’une politique budgétaire saine.

    Enfin, lorsqu’un État membre du MES ne verse pas les fonds appelés et qu’un appel de fonds revu à la hausse est lancé à tous les autres membres, l’État membre défaillant dudit mécanisme demeure tenu de libérer sa part de capital. Ainsi, les autres membres du MES ne se portent pas garants de la dette du membre défaillant.

    Partant, un mécanisme tel que le MES et les États membres qui y participent ne répondent pas des engagements d’un État membre bénéficiaire d’un soutien à la stabilité et ne prennent pas non plus ceux-ci à leur charge au sens de l’article 125 TFUE.

    (cf. points 130, 136-143, 145-147, disp. 2)

  12.  L’article 13, paragraphe 2, TUE, qui dispose notamment que chaque institution agit dans les limites des attributions qui lui sont conférées dans les traités, conformément aux procédures, conditions et fins prévues par ceux-ci, ne s’oppose pas à la conclusion entre les États membres dont la monnaie est l’euro d’un accord tel que le traité instituant un mécanisme européen de stabilité (traité MES) ni à la ratification de celui-ci par ces derniers, l’attribution, par le traité MES, de nouvelles fonctions à la Commission, à la Banque centrale européenne et à la Cour de justice étant compatible avec leurs attributions telles que définies dans les traités.

    En effet, les États membres sont, dans les domaines qui ne relèvent pas de la compétence exclusive de l’Union, en droit de confier, en dehors du cadre de l’Union, des missions aux institutions, telles que la coordination d’une action collective entreprise par les États membres ou la gestion d’une assistance financière pour autant que ces missions ne dénaturent pas les attributions que les traités UE et FUE confèrent à ces institutions. Or, les fonctions confiées à la Commission et à la Banque centrale européenne dans le traité MES constituent de telles missions.

    Ces fonctions qui leur sont confiées dans le cadre du MES ne comportent aucun pouvoir décisionnel propre. Par ailleurs, ces fonctions ne dénaturent pas les attributions que les traités confèrent à ces institutions dans la mesure où la Commission, en vertu de l’article 17, paragraphe 1, TUE, promeut l’intérêt général et la Banque centrale européenne apporte son soutien aux politiques générales dans l’Union, conformément à l’article 282, paragraphe 2, TFUE.

    En ce qui concerne l’attribution d’une compétence à la Cour par l’article 37, paragraphe 3, du traité MES, elle s’appuie directement sur l’article 273 TFUE. En vertu de ce dernier article, la Cour est compétente pour statuer sur tout différend entre États membres en connexité avec l’objet des traités, si ce différend lui est soumis en vertu d’un compromis. S’il est vrai que l’article 273 TFUE subordonne la compétence de la Cour à l’existence d’un compromis, rien n’empêche, étant donné l’objectif poursuivi par cette disposition, qu’un tel accord soit donné préalablement, par référence à toute une catégorie de différends prédéfinis, et ce en vertu d’une clause telle que l’article 37, paragraphe 3, du traité MES. En outre, un litige lié à l’interprétation ou à l’application du traité MES est susceptible de porter également sur l’interprétation ou l’application des dispositions du droit de l’Union. Enfin, s’il est vrai que l’article 273 TFUE subordonne également la compétence de la Cour à la présence exclusive d’États membres dans le différend dont elle est saisie, dans la mesure où le MES est composé exclusivement d’États membres, un différend auquel le MES est partie peut être considéré comme un différend entre États membres au sens de l’article 273 TFUE.

    (cf. points 153, 158-165, 171, 172, 174-177, disp. 2)

  13.  Le principe général de protection juridictionnelle effective garanti par l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ne s’oppose pas à la conclusion entre les États membres dont la monnaie est l’euro d’un accord tel que le traité instituant un mécanisme européen de stabilité (traité MES) ni à la ratification de celui-ci par ces derniers.

    Conformément à l’article 51, paragraphe 1, de la Charte, les dispositions de celle-ci s’adressent aux États membres uniquement lorsqu’ils mettent en œuvre le droit de l’Union. En vertu du paragraphe 2 de ce même article, la Charte n’étend pas le champ d’application du droit de l’Union au-delà des compétences de l’Union, ni ne crée aucune compétence ni aucune tâche nouvelles pour l’Union et ne modifie pas les compétences et les tâches définies dans les traités. Ainsi, la Cour est appelée à interpréter, à la lumière de la Charte, le droit de l’Union dans les limites des compétences attribuées à celle-ci.

    Or, les États membres ne mettent pas en œuvre le droit de l’Union, au sens de l’article 51, paragraphe 1, de la Charte, lorsqu’ils instituent un mécanisme de stabilité tel que le MES pour l’institution duquel les traités UE et FUE n’attribuent aucune compétence spécifique à l’Union.

    (cf. points 179, 180, disp. 2)

  14.  Le droit d’un État membre de conclure et de ratifier le traité instituant le mécanisme européen de stabilité n’est pas subordonné à l’entrée en vigueur de la décision du Conseil européen 2011/199, modifiant l’article 136 du traité FUE en ce qui concerne un mécanisme de stabilité pour les États membres dont la monnaie est l’euro. En effet, la modification de l’article 136 TFUE par l’article 1er de la décision 2011/199 confirme l’existence d’une compétence dans le chef des États membres. Cette décision n’attribue ainsi aucune nouvelle compétence aux États membres.

    (cf. points 184, 185, disp. 3)

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Governement of Ireland e.a.

(demande de décision préjudicielle, introduite par la Supreme Court)

«Mécanisme de stabilité pour les États membres dont la monnaie est l’euro — Décision 2011/199/UE — Modification de l’article 136 TFUE — Validité — Article 48, paragraphe 6, TUE — Procédure de révision simplifiée — Traité MES — Politique économique et monétaire — Compétence des États membres»

Sommaire — Arrêt de la Cour (assemblée plénière) du 27 novembre 2012

  1. Questions préjudicielles — Appréciation de validité — Compétence de la Cour — Décision du Conseil européen prise conformément à la procédure de révision simplifiée du traité FUE — Inclusion — Portée

    (Art. 19, § 1, al. 1, TUE, et 48, § 6, TUE; art. 267 TFUE)

  2. Questions préjudicielles — Contrôle juridictionnel de la légalité des actes des institutions — Actes de portée générale — Nécessité pour les personnes physiques ou morales d’emprunter la voie de l’exception d’illégalité ou du renvoi préjudiciel en appréciation de validité — Obligation des juridictions nationales d’appliquer les règles procédurales nationales de manière à permettre la contestation de la légalité des actes de l’Union de portée générale — Limites — Question portant sur la validité d’une décision non attaquée sur le fondement de l’article 263 TFUE de manière à faire perdre la qualité pour agir ou à faire expirer les délais pour l’introduction d’un recours en annulation

    (Art. 263 TFUE et 267 TFUE)

  3. Politique économique et monétaire — Procédure de révision simplifiée du traité FUE — Modification de l’article 136 TFUE permettant l’institution d’un mécanisme de stabilité pour les États membres ayant l’euro comme monnaie — Appréciation de validité — Révision portant uniquement sur des dispositions de la troisième partie du traité FUE

    (Art. 4, § 1, TUE, 5, § 2, TUE et 48, § 6, TUE; art. 2, § 3, TFUE, 5, § 1, TFUE et 136 TFUE; décision du Conseil européen 2011/199)

  4. Politique économique et monétaire — Procédure de révision simplifiée du traité FUE — Modification de l’article 136 TFUE permettant l’instauration d’un mécanisme de stabilité pour les États membres ayant l’euro comme monnaie — Appréciation de validité — Révision n’accroissant pas les compétences de l’Union

    (Art. 48, § 6, TUE; art. 136 TFUE; décision du Conseil européen 2011/199)

  5. Questions préjudicielles — Recevabilité — Demande n’exposant pas les raisons justifiant le renvoi à la Cour — Irrecevabilité

    [Art. 267 TFUE; statut de la Cour de justice, art. 23; règlement de procédure de la Cour, art. 94, c)]

  6. Politique économique et monétaire — Politique monétaire — Compétence exclusive de l’Union — Conclusion par les États membres ayant l’euro comme monnaie d’un traité instituant un mécanisme européen de stabilité — Admissibilité

    [Art. 3, § 1, c), TFUE, 123, § 1 TFUE et 127 TFUE]

  7. Politique économique et monétaire — Politique monétaire — Compétence exclusive de l’Union- Conclusion par les États membres ayant l’euro comme monnaie d’un accord instituant un mécanisme européen de stabilité — Affectation des règles communes en matière de politique économique et monétaire de l’Union — Absence

    (Art. 4, § 1, TUE, et 5, § 2, TUE; art. 3, § 2, TFUE et 122, § 2, TFUE)

  8. Politique économique et monétaire — Politique économique — Coordination des politiques économiques — Conclusion par les États membres ayant l’euro comme monnaie d’un traité instituant un mécanisme européen de stabilité — Modification fondamentale de l’ordre juridique de l’Union — Absence

    (Art. 2, § 3, TFUE, 119 TFUE à 121 TFUE, 125 TFUE et 126, § 7 et 8, TFUE)

  9. Politique économique et monétaire — Politique économique — Compétence de l’Union pour accorder une assistance financière aux États membres en difficulté — Conclusion par les États membres ayant l’euro comme monnaie d’un traité instituant un mécanisme européen de stabilité — Absence d’affectation de cette compétence

    (Art. 122 TFUE)

  10. Politique économique et monétaire — Politique économique — Interdiction pour la Banque centrale européenne et les autres banques centrales d’accorder des découverts, des crédits ou d’acquérir des instruments de dette — Conclusion par les États membres ayant l’euro comme monnaie d’un traité instituant un mécanisme européen de stabilité — Admissibilité

    (Art. 123 TFUE)

  11. Politique économique et monétaire — Politique économique — Interdiction pour l’Union ou un État membre de répondre des engagements d’un autre État membre ou de les prendre à leur charge — Conclusion par les États membres ayant l’euro comme monnaie d’un traité instituant un mécanisme européen de stabilité — Admissibilité

    (Art. 125 TFUE)

  12. Politique économique et monétaire — Obligation de respecter le principe des compétences d’attribution — Attribution par le traité instituant le mécanisme européen de stabilité, conclu par des États membres, de nouvelles fonctions à la Commission, la Banque centrale européenne et la Cour de justice — Admissibilité

    (Art. 13, § 2, TUE, et 17 § 1, TUE; art. 273 TFUE)

  13. Droit de l’Union européenne — Principes généraux du droit — Règles et principes du traité et de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne — Protection juridictionnelle effective — Traité instituant le mécanisme européen de stabilité

    (Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 47)

  14. Politique économique et monétaire — Procédure de révision simplifiée du traité FUE — Compétence des États membres pour conclure et ratifier le traité instituant un mécanisme européen de stabilité modifiant l’article 136 TFUE avant l’entrée en vigueur de la décision modifiant cette disposition

    (Art. 48, § 6, TUE; art. 136 TFUE; décision du Conseil européen 2011/199, art. 1er)

  1.  Le traité de Lisbonne a introduit, à côté de la procédure de révision ordinaire du traité FUE, une procédure de révision simplifiée en vertu de l’article 48, paragraphe 6, TUE dont l’application est soumise au respect de plusieurs conditions. Le contrôle du respect desdites conditions étant nécessaire afin de constater si la procédure de révision simplifiée peut être appliquée, il incombe à la Cour de justice en tant qu’institution qui, en vertu de l’article 19, paragraphe 1, premier alinéa, TUE, assure le respect du droit dans l’interprétation et l’application des traités, d’examiner la validité d’une décision du Conseil européen fondée sur l’article 48, paragraphe 6, TUE.

    À cet effet, il appartient à la Cour de vérifier, d’une part, que les règles de procédure prévues audit article 48, paragraphe 6, ont été suivies et, d’autre part, que les modifications décidées ne portent que sur la troisième partie du traité FUE, ce qui implique qu’elles n’entraînent aucune modification des dispositions d’une autre partie des traités sur lesquels l’Union est fondée et qu’elles n’accroissent pas les compétences de cette dernière.

    (cf. points 31, 33-36)

  2.  Voir le texte de la décision.

    (cf. points 39-42)

  3.  La décision du Conseil européen 2011/199, modifiant l’article 136 du traité FUE en ce qui concerne un mécanisme de stabilité pour les États membres dont la monnaie est l’euro, satisfait à la condition énoncée à l’article 48, paragraphe 6, premier et deuxième alinéas TUE selon laquelle une révision du traité FUE au moyen de la procédure de révision simplifiée ne peut porter que sur des dispositions de la troisième partie du traité FUE.

    Premièrement, l’article 1er de la décision 2011/199 qui, par l’ajout d’un paragraphe 3 à l’article 136 TFUE, envisage l’institution d’un mécanisme de stabilité, n’est pas de nature à affecter la compétence exclusive reconnue à l’Union par l’article 3, paragraphe 1, sous c), TFUE dans le domaine de la politique monétaire pour les États membres dont la monnaie est l’euro. En effet, eu égard aux objectifs confiés au mécanisme de stabilité, aux moyens prévus aux fins d’atteindre ceux-ci ainsi qu’au lien étroit existant entre ce mécanisme d’une part, les dispositions du traité FUE relatives à la politique économique d’autre part, ainsi que le cadre réglementaire pour le renforcement de la gouvernance économique de l’Union, l’institution dudit mécanisme relève du domaine de la politique économique. Ainsi, en premier lieu, en ce qui concerne l’objectif poursuivi par ledit mécanisme, qui est de préserver la stabilité de la zone euro dans son ensemble, celui-ci se distingue clairement de l’objectif de maintenir la stabilité des prix, lequel constitue l’objectif principal de la politique monétaire de l’Union. En deuxième lieu, s’agissant des moyens envisagés afin d’atteindre l’objectif visé, la décision 2011/199 précise seulement que le mécanisme de stabilité accordera toute assistance financière nécessaire et elle ne comporte aucune autre indication sur le fonctionnement de ce mécanisme. Or, l’octroi d’une assistance financière à un État membre ne relève à l’évidence pas de la politique monétaire.

    Deuxièmement, la décision 2011/199 n’affecte pas la compétence de l’Union dans le domaine de la coordination des politiques économiques des États membres. En effet, dès lors que les articles 2, paragraphe 3, et 5, paragraphe 1, TFUE circonscrivent le rôle de l’Union dans le domaine de la politique économique à l’adoption de mesures de coordination, les dispositions des traités UE et FUE ne confèrent pas de compétence spécifique à l’Union pour établir un mécanisme de stabilité tel que celui envisagé par cette décision. Partant, eu égard aux articles 4, paragraphe 1, TUE et 5, paragraphe 2, TUE, les États membres dont la monnaie est l’euro sont compétents pour conclure entre eux un accord portant sur l’institution d’un mécanisme de stabilité, tel que celui envisagé par l’article 1er de la décision 2011/199. Toutefois, lesdits États membres ne peuvent s’affranchir du respect du droit de l’Union dans l’exercice de leurs compétences dans ce domaine. Or, la stricte conditionnalité à laquelle l’octroi d’une assistance financière par le mécanisme de stabilité est subordonné en vertu du paragraphe 3 de l’article 136 TFUE vise à assurer que, dans son fonctionnement, ce mécanisme respectera le droit de l’Union, y compris les mesures prises par l’Union dans le cadre de la coordination des politiques économiques des États membres.

    (cf. points 56, 57, 60, 63, 64, 68-70, 72, disp. 1)

  4.  La décision du Conseil européen 2011/199, modifiant l’article 136 du traité FUE en ce qui concerne un mécanisme de stabilité pour les États membres dont la monnaie est l’euro n’attribue aucune nouvelle compétence à l’Union. En effet, cette modification ne crée aucune base juridique en vue de permettre à l’Union d’engager une action qui n’était pas possible avant l’entrée en vigueur de cette modification du traité FUE. Par ailleurs, la circonstance que le traité instituant un mécanisme européen de stabilité recourt à des institutions de l’Union, notamment à la Commission et à la Banque centrale européenne, n’est pas de nature à affecter la validité de la décision 2011/199, qui, elle, ne prévoit que l’institution d’un mécanisme de stabilité par les États membres et reste muette sur tout rôle éventuel des institutions de l’Union dans ce cadre. Il s’ensuit que la décision 2011/199 satisfait à la condition énoncée à l’article 48, paragraphe 6, TUE, selon laquelle une révision du traité FUE au moyen de la procédure simplifiée ne peut pas conduire à un accroissement des compétences attribuées à l’Union dans les traités.

    (cf. points 73-75, disp. 1)

  5.  Voir le texte de la décision.

    (cf. points 84, 86)

  6.  Les articles 3, paragraphe 1, sous c), TFUE et 127 TFUE ne s’opposent pas à la conclusion entre les États membres dont la monnaie est l’euro d’un accord tel que le traité instituant un mécanisme européen de stabilité (traité MES) ni à la ratification de celui-ci par ces derniers.

    En effet, les activités du MES ne relèvent pas de la politique monétaire visée par ces dispositions du traité FUE car l’objectif de ce mécanisme n’est pas de maintenir la stabilité des prix mais de satisfaire les besoins de financement de ses membres, à savoir les États membres dont la monnaie est l’euro, qui connaissent ou risquent de connaître de graves problèmes de financement, si cela est indispensable pour préserver la stabilité financière de la zone euro dans son ensemble et de ses États membres. À cette fin, le MES n’est habilité ni à fixer les taux d’intérêts directeurs pour la zone euro ni à émettre des euros, l’assistance financière qu’il octroie devant être financée dans sa totalité, et en respectant l’article 123, paragraphe 1, TFUE, par du capital libéré ou par l’émission d’instruments financiers, comme le prévoit l’article 3 du traité instituant ledit mécanisme.

    L’effet éventuel des activités du MES sur la stabilité des prix n’est pas de nature à infirmer cette constatation. En effet, à supposer même que les activités dudit mécanisme puissent influer sur le niveau de l’inflation, une telle influence ne constituera que la conséquence indirecte des mesures de politique économique prises.

    (cf. points 95-98, disp. 2)

  7.  L’article 3, paragraphe 2, TFUE qui interdit aux États membres de conclure entre eux un accord qui serait susceptible d’affecter des règles communes ou d’en altérer la portée, ne s’oppose pas à la conclusion entre les États membres dont la monnaie est l’euro d’un accord tel que le traité instituant un mécanisme européen de stabilité (traité MES) ni à la ratification de celui-ci par ces derniers.

    En effet, d’une part, dès lors que la Facilité européenne de stabilité financière (FESF) a été instituée par les États membres dont la monnaie est l’euro en dehors du cadre de l’Union, la reprise par le mécanisme européen de stabilité (MES) du rôle attribué à cette facilité n’est pas susceptible d’affecter des règles communes de l’Union ou d’en altérer la portée.

    D’autre part, même s’il ressort du considérant 1 du traité instituant un mécanisme européen de stabilité (traité MES) que celui-ci assumera, parmi d’autres fonctions, le rôle jusqu’alors attribué temporairement au Mécanisme européen de stabilisation financière (MESF), institué sur le fondement de l’article 122, paragraphe 2, TFUE, cette circonstance n’est pas non plus de nature à affecter des règles communes de l’Union ou d’en altérer la portée. En effet, l’institution du MES n’affecte pas la compétence de l’Union d’accorder, sur la base de l’article 122, paragraphe 2, TFUE, une assistance financière ponctuelle à un État membre lorsqu’il est constaté que ce dernier connaît des difficultés ou une menace sérieuse de graves difficultés en raison de catastrophes naturelles ou d’événements exceptionnels échappant à son contrôle. Par ailleurs, dès lors que ni l’article 122, paragraphe 2, TFUE ni aucune autre disposition des traités UE et FUE ne confèrent une compétence spécifique à l’Union pour instituer un mécanisme de stabilité permanent tel que le MES, les États membres sont, eu égard aux articles 4, paragraphe 1, TUE et 5, paragraphe 2, TUE, habilités à agir dans ce domaine.

    (cf. points 101-105, disp. 2)

  8.  Les articles 2, paragraphe 3, TFUE, 119 TFUE à 121 TFUE et 126 TFUE ne s’opposent pas à la conclusion entre les États membres dont la monnaie est l’euro d’un accord tel que le traité instituant un mécanisme européen de stabilité (traité MES) ni à la ratification de celui-ci par ces derniers.

    En effet, les États membres sont compétents pour conclure entre eux un accord instituant un mécanisme de stabilité tel que le traité MES pour autant que les engagements pris par les États membres contractants dans le cadre d’un tel accord respectent le droit de l’Union. Dans ce contexte, le MES n’a pas pour objet la coordination des politiques économiques des États membres, mais constitue un mécanisme de financement. Si, certes, en vertu des articles 3, 12, paragraphe 1, et 13, paragraphe 3, premier alinéa, du traité instituant ce mécanisme, l’assistance financière fournie à un État membre, membre dudit mécanisme, est soumise à une stricte conditionnalité adaptée à l’instrument d’assistance choisi, qui peut prendre la forme d’un programme d’ajustement macroéconomique, la conditionnalité prévue ne constitue toutefois pas un instrument de coordination des politiques économiques des États membres, mais vise à assurer la compatibilité des activités du MES avec, notamment, l’article 125 TFUE et les mesures de coordination prises par l’Union.

    Enfin, le traité MES n’affecte pas non plus la compétence du Conseil d’émettre des recommandations sur le fondement de l’article 126, paragraphes 7 et 8, TFUE à l’égard d’un État membre qui connaît un déficit excessif.

    (cf. points 109-114, disp. 2)

  9.  L’article 122 TFUE a uniquement pour objet une assistance financière accordée par l’Union et non pas par les États membres. L’exercice par l’Union de la compétence qui lui est attribuée par cette disposition n’est pas affecté par l’institution du mécanisme européen de stabilité.

    (cf. points 119-122, disp. 2)

  10.  L’article 123 TFUE, qui interdit à la Banque centrale européenne et aux banques centrales des États membres d’accorder des découverts ou tout autre type de crédit aux autorités et organismes publics de l’Union et des États membres ainsi que d’acquérir directement, auprès d’eux, des instruments de leur dette, ne s’oppose pas à la conclusion entre les États membres dont la monnaie est l’euro d’un accord tel que le traité instituant un mécanisme européen de stabilité ni à la ratification de celui-ci par ces derniers. En effet, l’article 123 TFUE s’adresse spécifiquement à la Banque centrale européenne et aux banques centrales des États membres. L’octroi d’une assistance financière par un État membre ou un ensemble d’États membres à un autre État membre ne relève donc pas de ladite interdiction.

    (cf. points 123, 125, 128, disp. 2)

  11.  L’article 125 TFUE, selon lequel l’Union ou un État membre «ne répond pas des engagements» d’un autre État membre et «ne les prend pas à sa charge», ne s’oppose pas à la conclusion entre les États membres dont la monnaie est l’euro d’un accord tel que le traité instituant un mécanisme européen de stabilité (traité MES) ni à la ratification de celui-ci par ces derniers.

    En effet, si l’article 125 TFUE interdit à l’Union et aux États membres l’octroi d’une assistance financière qui aurait pour effet de porter atteinte à l’incitation de l’État membre bénéficiaire de cette assistance à mener une politique budgétaire saine, en revanche, cette disposition n’interdit pas l’octroi d’une telle assistance par un ou plusieurs États membres à un autre État membre dès lors que celui-ci demeure responsable de ses propres engagements à l’égard de ses créanciers et pourvu que les conditions attachées à une telle assistance soient de nature à inciter ce dernier à mettre en œuvre une politique budgétaire saine.

    S’agissant du traité MES, le MES ne se porte, en premier lieu, pas garant des dettes de l’État membre bénéficiaire. Ce dernier reste responsable, à l’égard de ses créanciers, pour ses engagements financiers, étant donné que conformément à l’article 13, paragraphe 6, du traité instituant ce mécanisme, toute assistance financière octroyée sur la base des articles 14 à 16 de celui-ci doit lui être remboursée par l’État membre bénéficiaire et que, conformément à l’article 20, paragraphe 1, dudit traité, le montant à rembourser est majoré d’une marge appropriée. Pour les mêmes motifs, le MES ne prend pas à sa charge la dette de l’État bénéficiaire d’un rachat de titres émis sur le marché primaire, qui est assimilable à l’octroi d’un prêt. L’État membre émetteur demeure, en outre, seul redevable des dettes contractées par l’achat sur le marché secondaire de titres émis par un État membre du MES.

    En deuxième lieu, un soutien à la stabilité ne peut être accordé que lorsqu’il est indispensable pour préserver la stabilité financière de la zone euro dans son ensemble ainsi que de ses États membres et l’octroi de ce soutien est subordonné à des conditions strictes adaptées à l’instrument d’assistance financière choisi, visant notamment à garantir la poursuite par les États membres d’une politique budgétaire saine.

    Enfin, lorsqu’un État membre du MES ne verse pas les fonds appelés et qu’un appel de fonds revu à la hausse est lancé à tous les autres membres, l’État membre défaillant dudit mécanisme demeure tenu de libérer sa part de capital. Ainsi, les autres membres du MES ne se portent pas garants de la dette du membre défaillant.

    Partant, un mécanisme tel que le MES et les États membres qui y participent ne répondent pas des engagements d’un État membre bénéficiaire d’un soutien à la stabilité et ne prennent pas non plus ceux-ci à leur charge au sens de l’article 125 TFUE.

    (cf. points 130, 136-143, 145-147, disp. 2)

  12.  L’article 13, paragraphe 2, TUE, qui dispose notamment que chaque institution agit dans les limites des attributions qui lui sont conférées dans les traités, conformément aux procédures, conditions et fins prévues par ceux-ci, ne s’oppose pas à la conclusion entre les États membres dont la monnaie est l’euro d’un accord tel que le traité instituant un mécanisme européen de stabilité (traité MES) ni à la ratification de celui-ci par ces derniers, l’attribution, par le traité MES, de nouvelles fonctions à la Commission, à la Banque centrale européenne et à la Cour de justice étant compatible avec leurs attributions telles que définies dans les traités.

    En effet, les États membres sont, dans les domaines qui ne relèvent pas de la compétence exclusive de l’Union, en droit de confier, en dehors du cadre de l’Union, des missions aux institutions, telles que la coordination d’une action collective entreprise par les États membres ou la gestion d’une assistance financière pour autant que ces missions ne dénaturent pas les attributions que les traités UE et FUE confèrent à ces institutions. Or, les fonctions confiées à la Commission et à la Banque centrale européenne dans le traité MES constituent de telles missions.

    Ces fonctions qui leur sont confiées dans le cadre du MES ne comportent aucun pouvoir décisionnel propre. Par ailleurs, ces fonctions ne dénaturent pas les attributions que les traités confèrent à ces institutions dans la mesure où la Commission, en vertu de l’article 17, paragraphe 1, TUE, promeut l’intérêt général et la Banque centrale européenne apporte son soutien aux politiques générales dans l’Union, conformément à l’article 282, paragraphe 2, TFUE.

    En ce qui concerne l’attribution d’une compétence à la Cour par l’article 37, paragraphe 3, du traité MES, elle s’appuie directement sur l’article 273 TFUE. En vertu de ce dernier article, la Cour est compétente pour statuer sur tout différend entre États membres en connexité avec l’objet des traités, si ce différend lui est soumis en vertu d’un compromis. S’il est vrai que l’article 273 TFUE subordonne la compétence de la Cour à l’existence d’un compromis, rien n’empêche, étant donné l’objectif poursuivi par cette disposition, qu’un tel accord soit donné préalablement, par référence à toute une catégorie de différends prédéfinis, et ce en vertu d’une clause telle que l’article 37, paragraphe 3, du traité MES. En outre, un litige lié à l’interprétation ou à l’application du traité MES est susceptible de porter également sur l’interprétation ou l’application des dispositions du droit de l’Union. Enfin, s’il est vrai que l’article 273 TFUE subordonne également la compétence de la Cour à la présence exclusive d’États membres dans le différend dont elle est saisie, dans la mesure où le MES est composé exclusivement d’États membres, un différend auquel le MES est partie peut être considéré comme un différend entre États membres au sens de l’article 273 TFUE.

    (cf. points 153, 158-165, 171, 172, 174-177, disp. 2)

  13.  Le principe général de protection juridictionnelle effective garanti par l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ne s’oppose pas à la conclusion entre les États membres dont la monnaie est l’euro d’un accord tel que le traité instituant un mécanisme européen de stabilité (traité MES) ni à la ratification de celui-ci par ces derniers.

    Conformément à l’article 51, paragraphe 1, de la Charte, les dispositions de celle-ci s’adressent aux États membres uniquement lorsqu’ils mettent en œuvre le droit de l’Union. En vertu du paragraphe 2 de ce même article, la Charte n’étend pas le champ d’application du droit de l’Union au-delà des compétences de l’Union, ni ne crée aucune compétence ni aucune tâche nouvelles pour l’Union et ne modifie pas les compétences et les tâches définies dans les traités. Ainsi, la Cour est appelée à interpréter, à la lumière de la Charte, le droit de l’Union dans les limites des compétences attribuées à celle-ci.

    Or, les États membres ne mettent pas en œuvre le droit de l’Union, au sens de l’article 51, paragraphe 1, de la Charte, lorsqu’ils instituent un mécanisme de stabilité tel que le MES pour l’institution duquel les traités UE et FUE n’attribuent aucune compétence spécifique à l’Union.

    (cf. points 179, 180, disp. 2)

  14.  Le droit d’un État membre de conclure et de ratifier le traité instituant le mécanisme européen de stabilité n’est pas subordonné à l’entrée en vigueur de la décision du Conseil européen 2011/199, modifiant l’article 136 du traité FUE en ce qui concerne un mécanisme de stabilité pour les États membres dont la monnaie est l’euro. En effet, la modification de l’article 136 TFUE par l’article 1er de la décision 2011/199 confirme l’existence d’une compétence dans le chef des États membres. Cette décision n’attribue ainsi aucune nouvelle compétence aux États membres.

    (cf. points 184, 185, disp. 3)

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