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Document 61999CJ0515
Sommaire de l'arrêt
Sommaire de l'arrêt
1. Questions préjudicielles - Compétence de la Cour - Limites - Identification de l'objet de la question
(Art. 234 CE)
2. Questions préjudicielles - Compétence de la Cour - Limites - Question manifestement dénuée de pertinence
(Art. 234 CE)
3. Liberté d'établissement - Libre circulation des capitaux - Dispositions du traité - Champ d'application - Législation nationale réglementant l'acquisition de la propriété foncière - Inclusion
(Art. 44, § 2, e), CE; directive du Conseil 88/361, annexe I)
4. Libre circulation des capitaux - Restrictions à l'acquisition de biens immobiliers - Régime de déclaration préalable à l'acquisition de biens immobiliers - Admissibilité - Régime d'autorisation préalable à l'acquisition de terrains à bâtir - Inadmissibilité
(Art. 56 CE à 60 CE)
1. Si la Cour n'a pas compétence, aux termes de l'article 234 CE, pour appliquer la règle communautaire à un litige déterminé et, partant, pour qualifier une disposition de droit national au regard de cette règle, elle peut cependant, dans le cadre de la coopération judiciaire instaurée par cet article, à partir des éléments du dossier, fournir à une juridiction nationale les éléments d'interprétation du droit communautaire qui pourraient lui être utiles dans l'appréciation des effets de cette disposition.
( voir point 22 )
2. La circonstance que tous les éléments d'un litige sont cantonnés à l'intérieur d'un seul État membre n'implique pas qu'il n'y a pas lieu de répondre aux questions préjudicielles posées à la Cour dans le cadre de ce litige. En effet, il appartient aux seules juridictions nationales d'apprécier, au regard des particularités de chaque affaire, tant la nécessité d'une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre leur jugement que la pertinence des questions qu'elles posent à la Cour. Le rejet d'une demande formée par une juridiction nationale n'est possible que s'il apparaît de manière manifeste que l'interprétation sollicitée du droit communautaire n'a aucun rapport avec la réalité ou l'objet du litige au principal.
( voir points 24-25 )
3. Des mesures nationales qui réglementent l'acquisition de la propriété foncière aux fins d'interdire l'installation de résidences secondaires dans certaines zones, au nom d'impératifs d'aménagement du territoire, sont soumises au respect des dispositions du traité concernant la liberté des mouvements de capitaux.
En effet, d'une part, le droit d'acquérir, d'exploiter et d'aliéner des biens immobiliers sur le territoire d'un autre État membre, qui constitue le complément nécessaire de la liberté d'établissement, ainsi qu'il ressort de l'article 44, paragraphe 2, sous e), CE, génère, lorsqu'il est exercé, des mouvements de capitaux.
D'autre part, les mouvements de capitaux comprennent les opérations par lesquelles des non-résidents effectuent des investissements immobiliers sur le territoire d'un État membre, ainsi qu'il ressort de la nomenclature des mouvements de capitaux figurant à l'annexe I de la directive 88/361 pour la mise en oeuvre de l'article 67 du traité [article abrogé par le traité d'Amsterdam], cette nomenclature conservant la valeur indicative qui était la sienne pour définir la notion de mouvements de capitaux.
( voir points 28-30 )
4. Les articles 56 CE à 60 CE ne s'opposent pas à une procédure de déclaration préalable telle que celle prévue par le régime d'acquisition des biens fonciers institué par le Salzburger Grundverkehrsgesetz 1997 (loi du Land de Salzbourg relative à l'acquisition et à la vente de biens fonciers, SGVG), qui soumet tout acquéreur de biens fonciers à l'obligation de produire une déclaration indiquant qu'il est autrichien ou ressortissant d'un autre État membre et qu'il affectera le terrain à sa résidence principale ou à des fins professionnelles.
En effet, si cette mesure restreint par son objet même la liberté de circulation des capitaux, une telle restriction peut néanmoins être admise si, comme le régime en cause, les règles nationales poursuivent de manière non discriminatoire un objectif d'intérêt général et si elles respectent le principe de proportionnalité, c'est-à-dire si d'autres mesures moins contraignantes ne permettraient pas de parvenir au même résultat.
En ce qui concerne la première condition, des restrictions à l'installation de résidences secondaires dans une zone géographique déterminée qu'un État membre instaure afin de maintenir, dans un but d'aménagement du territoire, une population permanente et une activité économique autonome par rapport au secteur touristique peuvent être regardées comme contribuant à un objectif d'intérêt général. Cette constatation ne peut qu'être renforcée par les autres préoccupations susceptibles d'être à l'origine des mêmes mesures, comme celles tenant à la protection de l'environnement. En outre, il résulte des dispositions du SGVG qu'elles n'instituent aucune différence de traitement entre les acquéreurs autrichiens et les résidents d'autres États membres qui font usage des libertés garanties par le traité.
S'agissant de la seconde condition, une exigence de déclaration préalable à l'achat de terrains à bâtir, assortie d'une possibilité de sanctions en cas de violation de la déclaration souscrite, dans un but d'aménagement du territoire, est conforme au droit communautaire. Or, la procédure instaurée par le SGVG a un caractère essentiellement déclaratif dans son principe. L'exigence minimale de déclaration préalable présente l'avantage d'offrir une certaine sécurité juridique à l'acquéreur, à la différence de modalités de contrôle qui ne seraient exercées qu'a posteriori. En outre, il est permis de penser qu'un examen préalable est mieux à même de prévenir certains dommages difficilement réparables, occasionnés par la réalisation rapide de projets de construction. Ainsi, la formalité de la déclaration préalable peut être analysée comme une démarche complémentaire des sanctions pénales et de l'action en nullité de l'acte de vente que l'administration peut exercer devant le juge national. Dans ces conditions, cet aspect de la procédure instituée par le SGVG peut être considéré comme compatible avec le droit communautaire.
En revanche, les articles 56 CE à 60 CE s'opposent à une procédure d'autorisation préalable telle que celle prévue par ledit régime, qui soumet l'acquisition d'un bien foncier à une autorisation préalable lorsque, au vu de la déclaration visée, une attestation de l'autorité compétente n'a pas été délivrée.
En effet, les restrictions à la libre circulation des capitaux résultant de l'exigence d'une autorisation préalable peuvent être éliminées, grâce à un système de déclaration adéquat, sans nuire pour autant à l'efficacité des buts que cette réglementation poursuit.
( voir points 32-37, 40 et disp. )