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Document 62020CJ0300

Arrêt de la Cour (grande chambre) du 22 février 2022.
Bund Naturschutz in Bayern eV contre Landkreis Rosenheim.
Renvoi préjudiciel – Environnement – Directive 2001/42/CE – Évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement – Article 2, sous a) – Notion de “plans et programmes” – Article 3, paragraphe 2, sous a) – Actes élaborés pour certains secteurs et définissant un cadre dans lequel la mise en œuvre des projets énumérés aux annexes I et II de la directive 2011/92/UE pourra être autorisée à l’avenir – Article 3, paragraphe 4 – Actes définissant un cadre dans lequel la mise en œuvre des projets pourra être autorisée à l’avenir – Règlement de protection du paysage adopté par une autorité locale.
Affaire C-300/20.

Court reports – general – 'Information on unpublished decisions' section

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2022:102

Affaire C‑300/20

Bund Naturschutz in Bayern e.V.

contre

Landkreis Rosenheim

(demande de décision préjudicielle, introduite par le Bundesverwaltungsgericht)

Arrêt de la Cour (grande chambre) du 22 février 2022

« Renvoi préjudiciel – Environnement – Directive 2001/42/CE – Évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement – Article 2, sous a) – Notion de “plans et programmes” – Article 3, paragraphe 2, sous a) – Actes élaborés pour certains secteurs et définissant un cadre dans lequel la mise en œuvre des projets énumérés aux annexes I et II de la directive 2011/92/UE pourra être autorisée à l’avenir – Article 3, paragraphe 4 – Actes définissant un cadre dans lequel la mise en œuvre des projets pourra être autorisée à l’avenir – Règlement de protection du paysage adopté par une autorité locale »

  1. Environnement – Évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement – Directive 2001/42 – Plan et programme – Notion – Mesure nationale visant à protéger la nature et le paysage adoptée par une autorité locale – Inclusion – Caractère général et abstrait de ladite mesure – Absence d’incidence

    [Directive du Parlement européen et du Conseil 2001/42, art. 2, a)]

    (voir points 35-41)

  2. Environnement – Évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement – Directive 2001/42 – Champ d’application – Plans et programmes susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement – Secteurs visés aux annexes I et II de la directive 2011/92 – Mesure nationale visant à protéger la nature et le paysage et comportant des règles concernant des activités relevant de ces secteurs – Inclusion – Conditions – Acte établissant un ensemble significatif de critères et de modalités pour l’autorisation et la mise en œuvre de projets ayant des incidences notables sur l’environnement – Mesure énonçant des interdictions générales et des obligations d’autorisation sans prévoir des règles suffisamment détaillées sur ces projets – Exclusion

    [Directives du Parlement européen et du Conseil 2001/42, art. 3, § 2, a), et 2011/92, annexes I et II]

    (voir points 47-53, 55-70, disp. 1)

  3. Environnement – Évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement – Directive 2001/42 – Champ d’application – Plans et programmes susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement – Actes définissant un cadre pour l’autorisation de mise en œuvre de projets futurs – Notion – Acte établissant un ensemble significatif de critères et de modalités pour l’autorisation et la mise en œuvre de projets ayant des incidences notables sur l’environnement – Mesure nationale visant à protéger la nature et le paysage en énonçant des interdictions générales et des obligations d’autorisation sans prévoir des règles suffisamment détaillées sur ces projets – Exclusion

    (Directive du Parlement européen et du Conseil 2001/42, art. 3, § 4)

    (voir points 72-74, disp. 2)

Résumé

En 2013, le Landkreis Rosenheim (arrondissement de Rosenheim, Allemagne) a adopté un règlement relatif à une zone de protection du paysage (ci-après le « règlement Inntal Süd ») ( 1 ), sans avoir procédé au préalable à une évaluation environnementale au titre de la directive 2001/42 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement ( 2 ). Le règlement Inntal Süd a placé sous protection une zone d’environ 4021 ha, soit environ 650 ha de moins que la zone protégée sous les règlements antérieurs.

Bund Naturschutz in Bayern eV, une association de protection de l’environnement, a contesté ce règlement devant le Bayerischer Verwaltungsgerichtshof (tribunal administratif supérieur de Bavière, Allemagne). Sa demande ayant été rejetée comme étant irrecevable, l’association a formé un pourvoi en Revision contre cette décision devant le Bundesverwaltungsgericht (Cour administrative fédérale, Allemagne).

Cette dernière juridiction estime que le règlement Inntal Süd constitue un plan ou un programme au sens de la directive 2001/42. Nourrissant toutefois des doutes quant à l’obligation de l’arrondissement de Rosenheim de procéder, au titre de cette directive, à une évaluation environnementale préalablement à l’adoption dudit règlement, elle a décidé de soumettre cette question à la Cour par la voie préjudicielle.

Dans son arrêt, rendu en grande chambre, la Cour précise la notion de plans et programmes devant être soumis à une évaluation environnementale en vertu de la directive 2001/42.

Appréciation de la Cour

À titre liminaire, la Cour rappelle que la directive 2001/42 couvre les plans et programmes qui sont, d’une part, élaborés ou adoptés par une autorité au niveau national, régional ou local et, d’autre part, exigés par des dispositions législatives, réglementaires ou administratives.

Concernant la seconde condition, il ressort d’une jurisprudence constante que doivent être regardés comme étant « exigés », au sens et pour l’application de cette directive, les plans et les programmes dont l’adoption est encadrée par des dispositions législatives ou réglementaires nationales, lesquelles déterminent les autorités compétentes pour les adopter et leur procédure d’élaboration. Ainsi, une mesure doit être considérée comme « exigée » dès lors qu’il existe dans le droit national une base juridique particulière autorisant les autorités compétentes à procéder à son adoption, même si cette adoption ne revêt pas un caractère obligatoire.

Dès lors, le règlement Inntal Süd ayant été adopté par une autorité locale sur le fondement d’une disposition de la législation allemande, il constitue un plan ou un programme au sens de la directive 2001/42. À cet égard, la Cour relève que le caractère général dudit règlement, qui comporte des dispositions générales et abstraites énonçant des prescriptions générales, ne s’oppose pas à une telle qualification. En effet, la circonstance qu’un acte national ait un certain niveau d’abstraction et poursuive un objectif de transformation d’une zone géographique constitue une illustration de sa dimension planificatrice ou programmatique et ne fait pas obstacle à son inclusion dans la notion de « plans et programmes ».

Ensuite, la Cour examine si une mesure nationale telle que le règlement Inntal Süd, qui vise à protéger la nature et le paysage et énonce à cette fin des interdictions générales et des obligations d’autorisation, relève du champ d’application de l’article 3, paragraphe 2, sous a), de la directive 2001/42. Cette disposition prévoit l’obligation d’effectuer une évaluation environnementale pour tous les plans et les programmes qui satisfont à deux conditions cumulatives.

En premier lieu, les plans ou les programmes doivent « concerner » ou « traiter de » l’un des secteurs visés par l’article 3, paragraphe 2, sous a), de la directive 2001/42 ( 3 ). En l’occurrence, cette première condition apparaît remplie selon la Cour, ce qu’il appartient toutefois à la juridiction de renvoi de vérifier.

À cet égard, la Cour précise que la circonstance que l’objectif principal d’un plan ou d’un programme soit la protection de l’environnement n’exclut pas que celui-ci puisse également « concerner » ou « traiter de » l’un des secteurs énumérés par ladite disposition. En effet, l’essence même des mesures de portée générale élaborées en vue de la protection de l’environnement est précisément de réglementer les activités humaines ayant des incidences notables sur l’environnement, dont celles relevant des secteurs mentionnés.

En second lieu, les plans ou programmes doivent définir le cadre dans lequel la mise en œuvre des projets énumérés aux annexes I et II de la directive 2011/92 concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement ( 4 ) pourra être autorisée à l’avenir.

Cette exigence est remplie lorsqu’un plan ou un programme établit un ensemble significatif de critères et de modalités pour l’autorisation et la mise en œuvre d’un ou de plusieurs projets énumérés aux annexes I et II de la directive 2011/92, notamment en ce qui concerne la localisation, la nature, la taille et les conditions de fonctionnement de tels projets, ou l’allocation de ressources liée à ces projets. En revanche, lorsqu’un plan ou un programme, tel que le règlement Inntal Süd, se borne à définir des objectifs de protection du paysage en des termes généraux et à soumettre des activités ou des projets dans la zone de protection à une obligation d’autorisation, sans toutefois énoncer des critères ou des modalités pour l’autorisation et la mise en œuvre desdits projets, l’exigence susmentionnée n’est pas remplie, même si ledit règlement est susceptible d’exercer une certaine influence sur la localisation des projets.

Au regard de ces considérations, la Cour conclut que le règlement Inntal Süd ne constitue pas un plan ou programme devant être soumis à une évaluation environnementale au titre de l’article 3, paragraphe 2, sous a), de la directive 2001/42, dans la mesure où il ne prévoit pas de règles suffisamment détaillées en ce qui concerne le contenu, l’élaboration et la mise en œuvre de projets mentionnés aux annexes I et II de la directive 2011/92, ce qu’il appartient toutefois à la juridiction de renvoi de vérifier.

Enfin, la Cour juge qu’une mesure nationale qui vise à protéger la nature et le paysage et énonce à cette fin des interdictions générales ainsi que des obligations d’autorisation sans prévoir des règles suffisamment détaillées en ce qui concerne le contenu, l’élaboration et la mise en œuvre de projets ne relève pas non plus de l’article 3, paragraphe 4, de la directive 2001/42, aux termes duquel il appartient aux États membres de déterminer si les plans et programmes, autres que ceux visés au paragraphe 2 de cet article, qui définissent le cadre dans lequel la mise en œuvre des projets pourra être autorisée à l’avenir, sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement.


( 1 ) Verordnung des Landkreises Rosenheim über das Landschaftsschutzgebiet « Inntal Süd ».

( 2 ) Directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil, du 27 juin 2001, relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement (JO 2001, L 197, p. 30).

( 3 ) À savoir l’agriculture, la sylviculture, la pêche, l’énergie, l’industrie, les transports, la gestion des déchets, la gestion de l’eau, les télécommunications, le tourisme, l’aménagement du territoire urbain et rural ou l’affectation des sols.

( 4 ) Directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 2011, concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement (JO 2012, L 26, p. 1), qui a remplacé la directive 85/337/CEE du Conseil, du 27 juin 1985, concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement (JO 1985, L 175, p. 40).

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