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Document 62015FJ0067
Arrêt du Tribunal de la fonction publique (deuxième chambre) du 19 juillet 2016.
Luisa Opreana contre Commission européenne.
Fonction publique – Agent temporaire – Agent temporaire occupant un emploi permanent – Non-renouvellement d’un contrat à durée déterminée – État de grossesse – Acte faisant grief – Incompétence de l’auteur de l’acte faisant grief – Droit d’être entendu – Devoir de sollicitude.
Affaire F-67/15.
Arrêt du Tribunal de la fonction publique (deuxième chambre) du 19 juillet 2016.
Luisa Opreana contre Commission européenne.
Fonction publique – Agent temporaire – Agent temporaire occupant un emploi permanent – Non-renouvellement d’un contrat à durée déterminée – État de grossesse – Acte faisant grief – Incompétence de l’auteur de l’acte faisant grief – Droit d’être entendu – Devoir de sollicitude.
Affaire F-67/15.
Court reports – Reports of Staff Cases
ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE
(deuxième chambre)
19 juillet 2016
Luisa Opreana
contre
Commission européenne
«Fonction publique — Agent temporaire — Agent temporaire occupant un emploi permanent — Non-renouvellement d’un contrat à durée déterminée — État de grossesse — Acte faisant grief — Incompétence de l’auteur de l’acte faisant grief — Droit d’être entendu — Devoir de sollicitude»
Objet :
Recours, introduit au titre de l’article 270 TFUE, applicable au traité CEEA en vertu de son article 106 bis, par lequel Mme Luisa Opreana demande l’annulation de la décision de la Commission européenne de ne pas renouveler son contrat d’agent temporaire arrivé à échéance le 31 août 2014.
Décision :
La décision de la Commission européenne de ne pas renouveler le contrat d’agent temporaire de Mme Luisa Opreana arrivé à échéance le 31 août 2014 est annulée. La Commission européenne supporte ses propres dépens et est condamnée à supporter les dépens exposés par Mme Opreana.
Sommaire
Recours des fonctionnaires – Acte faisant grief – Notion – Lettre adressée à un agent temporaire et lui rappelant la date d’expiration de son contrat – Exclusion – Décision de ne pas renouveler un contrat – Inclusion
(Statut des fonctionnaires, art. 90, § 2)
Fonctionnaires – Agents temporaires – Recrutement – Non-renouvellement d’un contrat à durée déterminée – Adoption de la décision sans donner la possibilité préalable à l’intéressé de présenter ses observations – Violation du droit d’être entendu – Conséquences
[Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 41, § 2, a)]
Fonctionnaires – Agents temporaires – Recrutement – Renouvellement d’un contrat à durée déterminée – Pouvoir d’appréciation de l’administration – Devoir de sollicitude incombant à l’administration – Prise en considération des intérêts de l’agent concerné – Contrôle juridictionnel – Limites
(Régime applicable aux autres agents, art. 2)
Constituent des actes ou décisions susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation les seules mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter directement et immédiatement les intérêts de la partie requérante en modifiant, de façon caractérisée, la situation juridique de celle-ci. En revanche, un acte qui ne contient aucun élément nouveau par rapport à un acte antérieur constitue un acte purement confirmatif de celui-ci et ne saurait, de ce fait, avoir pour effet d’ouvrir un nouveau délai de recours.
En particulier, une lettre se bornant à rappeler à un agent les stipulations de son contrat relatives à la date d’expiration de celui-ci et ne contenant aucun élément nouveau par rapport auxdites stipulations ne constitue pas un acte faisant grief.
En revanche, dans un cas où le contrat peut faire l’objet d’un renouvellement, la décision prise par l’administration de ne pas le renouveler constitue un acte faisant grief, distinct du contrat en question et susceptible de faire l’objet d’une réclamation, voire d’un recours, dans les délais statutaires. En effet, une telle décision, qui intervient à la suite d’un réexamen de l’intérêt du service et de la situation de l’intéressé, contient un élément nouveau par rapport au contrat initial et ne saurait être regardée comme purement confirmative de celui-ci.
(voir points 23 à 25)
Référence à :
Cour : arrêts du 14 avril 1970, Nebe/Commission, 24/69, EU:C:1970:22, point 8 ; du 10 décembre 1980, Grasselli/Commission, 23/80, EU:C:1980:284, point 18, et du 14 septembre 2006, Commission/Fernández Gómez, C‑417/05 P, EU:C:2006:582, point 46
Tribunal de première instance : arrêts du 19 octobre 1995, Obst/Commission, T‑562/93, EU:T:1995:181, point 23, et du 15 octobre 2008, Potamianos/Commission, T‑160/04, EU:T:2008:438, point 21
Tribunal de la fonction publique : arrêts du 15 septembre 2011, Bennett e.a./OHMI, F‑102/09, EU:F:2011:138, points 57 et 59 et jurisprudence citée ; du 23 octobre 2013, Solberg/OEDT, F‑124/12, EU:F:2013:157, points 17 et 18, et du 5 février 2014, Drakeford/EMA, F‑29/13, EU:F:2014:10, point 23
Les droits de la défense s’imposent comme principe général du droit de l’Union dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief à celle-ci qui doit être assuré même en l’absence de toute réglementation concernant la procédure en cause. Si la procédure de renouvellement des contrats d’agent temporaire n’est pas une procédure diligentée à l’encontre dudit agent, il n’en demeure pas moins que la décision de ne pas renouveler son contrat affecte défavorablement la situation de ce dernier, en ce qu’elle a pour conséquence de le priver de la possibilité de poursuivre sa relation de travail avec son institution. Or, les droits de la défense, tels que désormais consacrés par l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, lequel est d’application générale, recouvrent, tout en étant plus étendus, le droit procédural, prévu au paragraphe 2, sous a), dudit article, de toute personne d’être entendue avant qu’une mesure individuelle qui l’affecterait défavorablement ne soit prise à son égard. En conséquence, il incombe à l’institution de permettre à l’agent concerné de faire valoir utilement ses observations avant d’adopter la décision de ne pas renouveler son contrat.
Toutefois, pour qu’une violation du droit d’être entendu puisse aboutir à l’annulation de la décision de non-renouvellement, encore faut-il établir si, en l’absence de cette irrégularité, l’agent concerné aurait effectivement eu la possibilité d’influencer le processus décisionnel en cause.
(voir points 66 et 74)
Référence à :
Cour : arrêt du 1er juillet 2010, Knauf Gips/Commission, C‑407/08 P, EU:C:2010:389, point 23 et jurisprudence citée
Tribunal de la fonction publique : arrêts du 17 septembre 2014, Wahlström/Frontex, F‑117/13, EU:F:2014:215, points 25 à 27 et jurisprudence citée, et du 5 février 2016, GV/SEAE, F‑137/14, EU:F:2016:14, point 79 et jurisprudence citée
La possibilité de renouveler un contrat d’agent temporaire est une simple possibilité laissée à l’appréciation de l’autorité compétente, les institutions disposant d’un large pouvoir d’appréciation dans l’organisation de leurs services, en fonction des missions qui leur sont dévolues, et dans l’affectation, en vue de celles-ci, du personnel qui se trouve à leur disposition, à condition que cette affectation se fasse dans l’intérêt du service. En outre, l’autorité compétente est tenue, lorsqu’elle statue à propos de la situation d’un agent, de prendre en considération l’ensemble des éléments qui sont susceptibles de déterminer sa décision, c’est-à-dire non seulement l’intérêt du service, mais aussi, notamment, celui de l’agent concerné. Cela résulte, en effet, du devoir de sollicitude de l’administration, qui reflète l’équilibre des droits et obligations réciproques que le statut et, par analogie, le régime applicable aux autres agents ont créé dans les relations entre l’autorité publique et ses agents. Compte tenu du large pouvoir d’appréciation dévolu aux institutions dans ce contexte, le contrôle du juge est limité à la vérification de l’absence d’erreur manifeste ou de détournement de pouvoir.
(voir point 89)
Référence à :
Cour : arrêt du 29 juin 1994, Klinke/Cour de justice, C‑298/93 P, EU:C:1994:273, point 38
Tribunal de première instance : arrêts du 18 avril 1996, Kyrpitsis/CES, T‑13/95, EU:T:1996:50, point 52, et du 8 septembre 2009, ETF/Landgren, T‑404/06 P, EU:T:2009:313, point 162 et jurisprudence citée
Tribunal de l’Union européenne : arrêts du 21 mai 2014, Commission/Macchia, T‑368/12 P, EU:T:2014:266, point 49 ; du 10 octobre 2014, EMA/BU, T‑444/13 P, EU:T:2014:865, point 28, et du 24 novembre 2015, Commission/D’Agostino, T‑670/13 P, EU:T:2015:877, point 32 et jurisprudence citée