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Document 62008TJ0199

    Sommaire de l'arrêt

    Mots clés
    Sommaire

    Mots clés

    1. Concurrence — Ententes — Délimitation du marché — Objet

    (Art. 81 CE; communication de la Commission 2004/C 101/07)

    2. Actes des institutions — Lignes directrices relatives à la notion d'affectation du commerce — Acte à caractère contraignant

    (Communication de la Commission 2004/C 101/07)

    3. Concurrence — Amendes — Décision infligeant des amendes — Obligation de motivation — Portée

    (Art. 253 CE; communication de la Commission 2006/C 210/02)

    4. Concurrence — Procédure administrative — Respect des droits de la défense — Accès au dossier — Portée

    5. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Critères — Gravité de l'infraction — Appréciation selon la nature de l'infraction

    (Communication de la Commission 2006/C 210/02, § 19 et 21 à 23)

    6. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Circonstances atténuantes — Cessation de l'infraction avant l'intervention de la Commission — Exclusion

    (Communication de la Commission 2006/C 210/02, § 29, 1er tiret)

    7. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Circonstances atténuantes — Comportement anti-concurrentiel autorisé ou encouragé par les autorités publiques

    (Communication de la Commission 2006/C 210/02, § 29, dernier tiret)

    8. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Réduction en raison de difficultés économiques — Conditions

    (Communication de la Commission 2006/C 210/02, § 35)

    Sommaire

    1. L'article 81, paragraphe 1, CE n'est pas applicable si l'incidence de l'entente sur les échanges intracommunautaires ou sur la concurrence n'est pas « sensible ». En effet, un accord échappe à l'interdiction édictée par l'article 81, paragraphe 1, CE lorsqu'il ne restreint la concurrence ou n'affecte le commerce entre États membres que d'une manière insignifiante. Par conséquent, l'obligation d'opérer une délimitation de marché dans une décision adoptée en application de l'article 81 CE s'impose à la Commission lorsque, sans une telle délimitation, il n'est pas possible de déterminer si l'accord ou la pratique concertée en cause est susceptible d'affecter le commerce entre États membres et a pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence.

    Ainsi, si toute transaction transfrontalière était automatiquement susceptible d'affecter sensiblement le commerce entre États membres, la notion de caractère sensible, qui est une condition d'application de l'article 81, paragraphe 1, CE, serait vidée de tout contenu. Même dans le cas d'une infraction par objet, il est nécessaire que l'infraction soit susceptible d'affecter les échanges intracommunautaires d'une manière sensible. Cela ressort des lignes directrices relatives à la notion d'affectation du commerce figurant aux articles 81 et 82 du traité, puisque la présomption positive, prévue au paragraphe 53 de celles-ci, ne s'applique qu'aux accords ou aux pratiques qui sont, par leur nature même, susceptibles d'affecter le commerce entre États membres. Le fait qu'une entreprise n'a pas contesté l'existence de l'entente n'inclut pas nécessairement l'admission de l'affectation sensible du commerce par cette entente. L'absence d'une telle affectation, condition d'application de l'article 81, paragraphe 1, CE, entraînerait l'annulation de la décision relative à l'entente pour absence de compétence de la Commission.

    Cependant, dès lors que la Commission établit à suffisance de droit que la seconde condition alternative envisagée dans la présomption énoncée au paragraphe 53 desdites lignes directrices était remplie, en fournissant notamment une description suffisamment détaillée du secteur en cause, en ce compris l'offre, la demande et la portée géographique, elle a cerné de façon précise les services concernés ainsi que le marché. Une telle description du secteur peut être suffisante dans la mesure où elle est suffisamment détaillée pour permettre au Tribunal de vérifier les affirmations de base de la Commission et où, sur cette base, la part de marché cumulée dépasse de toute évidence largement le seuil de 5 %. Ainsi, exceptionnellement, la Commission peut se fonder sur la seconde condition alternative du paragraphe 53 desdites lignes directrices sans opérer explicitement une définition du marché au sens du paragraphe 55 de ces dernières.

    En effet, dans le cadre de la présomption positive prévue au paragraphe 53 desdites lignes directrices, il suffit qu'une seule des deux conditions alternatives soit remplie pour prouver le caractère sensible de l'affectation du commerce entre États membres.

    (cf. points 44-45, 50, 53, 69-70, 72-73)

    2. En adoptant les règles de conduite que sont les lignes directrices relatives à la notion d'affectation du commerce figurant aux articles 81 et 82 du traité et en annonçant par leur publication qu'elle les appliquera dorénavant aux cas concernés par celles-ci, la Commission s'autolimite dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation et ne saurait se départir de ces règles sous peine de se voir sanctionner, le cas échéant, au titre d'une violation de principes généraux du droit, tels que l'égalité de traitement ou la protection de la confiance légitime.

    (cf. point 67)

    3. Les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement nº 1/2003, ont entraîné un changement fondamental de méthodologie pour le calcul des amendes. En particulier, le classement des infractions en trois catégories (« peu grave », « grave » et « très grave ») a été aboli et une échelle allant de 0 à 30% a été introduite afin de permettre une différenciation plus fine. En outre, le montant de base de l’amende est désormais « lié à une proportion de la valeur des ventes, déterminée en fonction du degré de gravité de l’infraction, multipliée par le nombre d’années d’infraction » (paragraphe 19 desdites lignes directrices). En règle générale, « la proportion de la valeur des ventes prise en compte doit être fixée à un niveau pouvant aller jusqu’à 30% » (paragraphe 21). S’agissant des accords horizontaux de fixation de prix, de répartition de marché et de limitation de production, « qui comptent, par leur nature même, parmi les restrictions de concurrence les plus graves », la proportion des ventes prise en compte doit généralement être retenue « en haut de l’échelle » (paragraphe 23).

    Dans ces conditions, la Commission ne peut plus, en principe, se contenter de motiver uniquement la qualification d’une infraction de « très grave » et non le choix de la proportion des ventes prise en compte. En effet, le corollaire de la marge d’appréciation dont jouit la Commission en matière d’amendes est une obligation de motivation qui permet au justiciable de connaître les justifications de la mesure prise et au Tribunal d’exercer son contrôle.

    Dès lors que la Commission a fixé le taux à un niveau à peine plus élevé que la moitié de cette échelle, à savoir à 17 %, en motivant son choix seulement par la nature « très grave » de l’infraction mais en n’ayant pas expliqué d’une manière plus circonstanciée comment la qualification de l’infraction de « très grave » l’a amenée à fixer le taux à 17 % et non à une proportion nettement plus « en haut de l’échelle », cette motivation ne peut être suffisante que dans la situation où la Commission applique un taux très proche de la limite inférieure de la fourchette prévue pour les restrictions les plus graves, qui est en outre très favorable à l'entreprise. En effet, dans ce cas, une motivation additionnelle, qui va au-delà de la motivation inhérente dans les lignes directrices, n’est pas nécessaire. En revanche, si elle avait voulu appliquer un taux plus élevé, elle aurait dû fournir une motivation plus détaillée.

    (cf. points 91-93)

    4. Sur la seule base de la communication des griefs, une entreprise individuelle concernée n’a guère la possibilité de vérifier si les chiffres d'affaires utilisés afin de prouver le caractère sensible de l’affectation des échanges entre États membres et les parts de marché consolidés de tous les membres d’une entente excèdent les seuils de 40 millions d’euros ou de 5 %. Chaque entreprise ne peut contester, avec certitude, que ses propres chiffres. Dès lors, afin de contester la taille du marché et les parts de marché des autres sociétés en cause et afin de faire valoir ses propres arguments quant à ces chiffres, la connaissance de la ventilation du chiffre d’affaires des autres sociétés est indispensable, faute de quoi l'entreprise concernée n’est pas en mesure de faire connaître utilement son point de vue sur la réalité et la pertinence des faits, des griefs et des circonstances allégués par la Commission.

    (cf. point 118)

    5. L'appréciation de la gravité d'une infraction doit être effectuée en tenant compte, notamment, de la nature des restrictions apportées à la concurrence. La gravité de l'infraction peut être établie par référence à la nature et à l'objet des comportements abusifs. Les éléments relevant de l'objet d'un comportement peuvent ainsi avoir plus d'importance aux fins de la fixation du montant de l'amende que ceux relatifs à ses effets.

    Une infraction ayant pour objet une fixation des prix et une répartition des marchés est, par sa nature, particulièrement grave.

    En outre, le paragraphe 20 des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement nº 1/2003, prévoit que « l'appréciation de la gravité sera faite au cas par cas pour chaque type d'infraction, en tenant compte de toutes les circonstances pertinentes de l'espèce ». Lesdites lignes directrices ont introduit une échelle allant de 0 à 30 % afin de permettre une différenciation plus fine. Ainsi, selon le paragraphe 19 desdites lignes directrices, le montant de base de l'amende doit être « lié à une proportion de la valeur des ventes, déterminée en fonction du degré de gravité de l'infraction ». En règle générale, selon le paragraphe 21 desdites lignes directrices, « la proportion de la valeur des ventes prise en compte sera fixée à un niveau pouvant aller jusqu'à 30 % ».

    Dès lors, la Commission ne saurait exercer la marge d'appréciation dont elle dispose en matière d'imposition d'amendes, et ainsi déterminer le taux précis, situé entre 0 et 30 %, sans tenir compte des circonstances particulières de l'affaire. Le paragraphe 22 desdites lignes directrices prévoit que, « [a]fin de décider si la proportion de la valeur des ventes à prendre en considération dans un cas donné devrait être au bas ou au haut de cette échelle, la Commission tiendra compte d'un certain nombre de facteurs, tels que la nature de l'infraction, la part de marché cumulée de toutes les parties concernées, l'étendue géographique de l'infraction et la mise en œuvre ou non de l'infraction ».

    Cette difficulté de déterminer un pourcentage précis est dans une certaine mesure réduite en cas d'accords horizontaux secrets de fixation des prix et de répartition du marché dans lesquels, en vertu du paragraphe 23 desdites lignes directrices, la proportion des ventes prise en compte sera généralement retenue à un niveau situé « en haut de l'échelle ». Il ressort de ce paragraphe que, pour les restrictions les plus graves, le taux devrait, à tout le moins, être supérieur à 15 %.

    Il n'y a donc pas lieu d'annuler la décision de la Commission ayant fixé le taux de 17 % sur le seul fondement de la nature intrinsèquement grave de l'infraction. En effet, lorsque la Commission se contente d'appliquer un taux égal ou presque égal au taux minimal prévu pour les restrictions les plus graves, il n'est pas nécessaire de prendre en compte des éléments ou des circonstances additionnels. Cela s'imposerait seulement si un taux plus élevé devait être retenu.

    (cf. points 136-137, 139-142)

    6. La cessation de la pratique infractionnelle ne constitue pas une circonstance atténuante justifiant une réduction de l'amende lorsque la société mise en cause a cessé de participer à l'infraction seulement quelques jours avant les inspections de la Commission.

    Le paragraphe 29, premier tiret, des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement nº 1/2003, prévoit que, si le montant de base de l'amende peut être réduit lorsque l'entreprise concernée apporte la preuve qu'elle a mis fin à l'infraction dès les premières interventions de la Commission, cela « ne s'appliquera pas aux accords ou aux pratiques de nature secrète (en particulier les cartels) ». De surcroît, le bénéfice de cette circonstance atténuante est limité aux cas où l'infraction cesse à la suite des premières interventions de la Commission.

    (cf. points 151-152)

    7. À supposer que des faits connus d'une personne travaillant pour la Commission puissent être imputés à celle-ci en tant qu'institution, il y a lieu d'observer que la seule connaissance du comportement anti-concurrentiel n'implique pas que ce comportement a implicitement été « autorisé ou encouragé » par la Commission au sens du paragraphe 29, dernier tiret, des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement nº 1/2003. Une prétendue inaction ne peut en effet être assimilée à un acte positif tel qu'une autorisation ou un encouragement. En outre, dès lors que la violation des règles de concurrence est tellement patente, un opérateur diligent ne saurait invoquer une croyance légitime en la licéité de cette pratique.

    (cf. points 157-158)

    8. Afin de bénéficier d'une réduction exceptionnelle de l'amende en raison de difficultés économiques en vertu du paragraphe 35 des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement nº 1/2003, outre une demande, deux conditions cumulatives doivent être remplies, à savoir, premièrement, la difficulté insurmontable de payer l'amende et, deuxièmement, la présence d'un « contexte social et économique particulier ».

    L'appréciation de la première condition doit être fondée sur la prise en compte de la situation concrète de l'entreprise concernée. Un simple calcul du pourcentage que représente l'amende par rapport au chiffre d'affaires mondial de l'entreprise ne saurait à lui seul fonder la conclusion que l'amende n'est pas de nature à mettre irrémédiablement en danger la viabilité économique de cette entreprise. Si tel était le cas, il serait possible d'indiquer des seuils concrets pour l'application du paragraphe 35 desdites lignes directrices.

    (cf. points 165, 167)

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