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Document 62006CJ0308

    Sommaire de l'arrêt

    Affaire C-308/06

    The Queen, à la demande de:

    International Association of Independent Tanker Owners (Intertanko) e.a.

    contre

    Secretary of State for Transport

    [demande de décision préjudicielle, introduite par la High Court of Justice (England & Wales), Queen's Bench Division (Administrative Court)]

    «Transport maritime — Pollution causée par les navires — Directive 2005/35/CE — Validité — Convention de Montego Bay — Convention Marpol 73/78 — Effets juridiques — Invocabilité — Négligence grave — Principe de sécurité juridique»

    Conclusions de l'avocat général Mme J. Kokott, présentées le 20 novembre 2007   I - 4060

    Arrêt de la Cour (grande chambre) du 3 juin 2008   I - 4100

    Sommaire de l'arrêt

    1. Questions préjudicielles – Compétence de la Cour – Limites

      (Directive du Parlement européen et du Conseil 2005/35)

    2. Questions préjudicielles – Compétence de la Cour – Limites

    3. Transports – Transports maritimes – Pollution causée par les navires et introduction de sanctions en cas d'infractions – Directive 2005/35

      (Art. 249 CE; directive du Parlement européen et du Conseil 2005/35, art. 4 et 8)

    1.  Étant donné que les accords internationaux conclus par la Communauté bénéficient de la primauté sur les actes de droit communautaire dérivé, la validité d'un acte communautaire dérivé peut être affectée du fait de l'incompatibilité de ce dernier avec de telles règles du droit international. Lorsque cette invalidité est invoquée devant une juridiction nationale, la Cour vérifie ainsi, en application de l'article 234 CE, la validité de l'acte communautaire concerné au regard de toutes les règles du droit international, sous réserve du respect de deux conditions. Premièrement, la Communauté doit être liée par ces règles. Deuxièmement, la Cour ne peut procéder à l'examen de la validité d'une réglementation communautaire au regard d'un traité international que lorsque la nature et l'économie de celui-ci ne s'y opposent pas et que, par ailleurs, ses dispositions apparaissent, du point de vue de leur contenu, inconditionnelles et suffisamment précises.

      Dès lors que la Communauté n’est pas liée par la convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires (convention Marpol 73/78), la seule circonstance que la directive 2005/35, relative à la pollution causée par les navires et à l'introduction de sanctions en cas d'infractions, a pour objet d’incorporer dans le droit communautaire certaines règles qui figurent dans cette dernière ne suffit pas pour qu’il appartienne à la Cour de contrôler la légalité de cette directive au regard de ladite convention. Certes, les compétences de la Communauté doivent être exercées dans le respect du droit international, y compris des dispositions des conventions internationales dans la mesure où elles codifient des règles coutumières consacrées par le droit international général. Les règles 9, 11, sous b), de l'annexe I et 5 et 6, sous b), de l'annexe II de ladite convention Marpol ne constituant cependant pas l'expression de règles coutumières consacrée par le droit international général, la validité de la directive 2005/35 ne peut être appréciée au regard de cette convention bien que les États membres soient liés par celle-ci.

      (cf. points 42-45, 50-52, disp. 1)

    2.  S'agissant de la convention des Nations unies sur le droit de la mer, signée à Montego Bay le 10 décembre 1982 (convention de Montego Bay), celle-ci a été signée par la Communauté et approuvée par la décision 98/392, ce qui a pour conséquence de lier la Communauté, les dispositions de cette convention faisant, par suite, partie intégrante de l'ordre juridique communautaire. Toutefois, la convention de Montego Bay ne met pas en place des règles destinées à s’appliquer directement et immédiatement aux particuliers et à conférer à ces derniers des droits ou des libertés susceptibles d’être invoqués à l’encontre des États, indépendamment de l'attitude de l'État du pavillon du navire. Il s’ensuit que la nature et l’économie de la convention de Montego Bay s’opposent à ce que la Cour puisse apprécier la validité d'un acte communautaire au regard de cette dernière.

      (cf. points 53, 64, 65, disp. 1)

    3.  L'article 4 de la directive 2005/35, relative à la pollution causée par les navires et à l'introduction de sanctions en cas d'infractions, lu en combinaison avec l'article 8 de cette dernière, oblige les États membres à sanctionner les rejets par des navires de substances polluantes s'ils ont été commis «intentionnellement, témérairement ou à la suite d'une négligence grave», sans définir pour autant ces notions. Toutefois, ces différentes notions, notamment celle de «négligence grave», correspondent à des critères d'engagement de la responsabilité ayant vocation à s'appliquer à un nombre indéfini de situations qu'il est impossible d'envisager à l'avance et non à des comportements précis susceptibles d'être détaillés dans un acte normatif, de droit communautaire ou de droit national. Par ailleurs, ces notions sont pleinement intégrées et utilisées dans les systèmes juridiques respectifs des États membres. À cet égard, la notion de «négligence grave» au sens dudit article 4 doit être entendue comme impliquant une action ou omission involontaire par laquelle la personne responsable viole, d'une manière caractérisée, l'obligation de diligence qu'elle aurait dû et aurait pu respecter compte tenu de ses qualités, de ses connaissances, de ses aptitudes et de sa situation individuelle. Enfin, conformément à l'article 249 CE, la directive 2005/35 doit être transposée par les États membres dans leurs ordres juridiques respectifs. Ainsi, la définition même des infractions visées à l'article 4 de cette directive et les sanctions applicables sont celles qui résultent des règles édictées par les États membres.

      Il s'ensuit que l'article 4 de la directive 2005/35, lu en combinaison avec l'article 8 de cette dernière, n'enfreint pas le principe général de sécurité juridique en tant qu'il impose aux États membres de sanctionner les rejets par des navires de substances polluantes commis à la suite d'une «négligence grave», sans définir cette notion.

      (cf. points 72-74, 77-79, disp. 2)

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