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Document 62005TJ0021
Sommaire de l'arrêt
Sommaire de l'arrêt
1. Concurrence — Amendes — Lignes directrices pour le calcul des amendes — Méthode de calcul prenant en compte divers éléments de flexibilité
(Art. 229 CE; règlements du Conseil nº 17, art. 15, § 2, et nº 1/2003, art. 23, § 2; communication de la Commission 98/C 9/03)
2. Concurrence — Ententes — Accords entre entreprises — Participation prétendument sous contrainte
(Art. 81, § 1, CE)
3. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Critères — Gravité de l'infraction
(Règlements du Conseil nº 17, art. 15, § 2, et nº 1/2003, art. 23, § 3; communication de la Commission 98/C 9/03, point 1 A)
4. Concurrence — Ententes — Accords entre entreprises — Preuve de l'infraction à la charge de la Commission
(Art. 81, § 1, CE)
5. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Critères — Durée de l'infraction — Infractions de longue durée — Majoration de 10 % du montant de départ par année
(Règlements du Conseil nº 17, art. 15, § 2, et nº 1/2003, art. 23, § 2; communication de la Commission 98/C 9/03, point 1 B)
6. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Critères — Circonstances atténuantes — Cessation de l'infraction avant l'intervention de la Commission
(Règlements du Conseil nº 17, art. 15, § 2, et nº 1/2003, art. 23, § 2; communication de la Commission 98/C 9/03)
7. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Critères — Réduction du montant de l'amende en contrepartie d'une coopération de l'entreprise incriminée — Conditions
(Règlements du Conseil nº 17, art. 11, et nº 1/2003, art. 18; communication de la Commission 96/C 207/04)
8. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Critères — Durée de l'infraction — Infractions de longue durée — Majoration de 10 % du montant de départ par année — Conséquences
(Règlements du Conseil nº 17, art. 15, § 2, et nº 1/2003, art. 23, § 2; communication de la Commission 98/C 9/03)
1. Les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 15, paragraphe 2, du règlement nº 17 et de l'article 65, paragraphe 5, du traité CECA, bien qu’elles ne puissent être qualifiées de règle de droit, énoncent une règle de conduite indicative de la pratique à suivre, dont la Commission ne peut s’écarter, dans un cas particulier, sans donner des raisons qui soient compatibles avec le principe d’égalité de traitement. Il appartient donc au Tribunal de vérifier, dans le cadre du contrôle de la légalité des amendes infligées par une décision de la Commission, si cette dernière a exercé son pouvoir d’appréciation selon la méthode exposée dans lesdites lignes directrices et, dans la mesure où il devrait constater qu’elle s’en est départie, de vérifier si cet écart est justifié et motivé à suffisance de droit.
L’autolimitation du pouvoir d’appréciation de la Commission résultant de l’adoption des lignes directrices n’est pas incompatible avec le maintien d’une marge d’appréciation substantielle pour la Commission. Les lignes directrices contiennent différents éléments de flexibilité qui permettent à la Commission d’exercer son pouvoir discrétionnaire en conformité avec les dispositions des règlements nº 17 et nº 1/2003, telles qu’interprétées par la Cour de justice. Partant, dans les domaines où la Commission a conservé une marge d’appréciation, le contrôle de la légalité opéré sur ces appréciations se limite à celui de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation. La marge d’appréciation de la Commission et les limites qu’elle y a apportées ne préjugent pas, en principe, de l’exercice, par le juge, de sa compétence de pleine juridiction, qui l’habilite à supprimer, à réduire ou à majorer le montant de l’amende infligée par la Commission.
(cf. points 60-64)
2. Les pressions exercées par des entreprises et visant à amener d’autres entreprises à participer à une infraction au droit de la concurrence ne dégagent pas, quelle que soit leur importance, l’entreprise concernée de sa responsabilité pour l’infraction commise, ne modifient en rien la gravité de l’entente et ne sauraient constituer une circonstance atténuante aux fins du calcul des montants des amendes, dès lors que l’entreprise concernée aurait pu dénoncer les éventuelles pressions aux autorités compétentes et introduire auprès d’elles une plainte.
(cf. point 72)
3. Une entreprise dont la responsabilité est établie s’agissant de plusieurs branches d’une entente contribue davantage à l’efficacité et à la gravité de cette entente qu’une contrevenante uniquement impliquée dans une seule branche de cette même entente. Partant, la première entreprise commet une infraction plus grave que celle commise par la seconde.
Au titre du principe d’individualité des peines et de responsabilité personnelle, la Commission est tenue de prendre en compte, lors de l’appréciation de la gravité relative de la participation de chaque contrevenant à une entente, le fait que certains contrevenants, le cas échéant, ne sont pas tenus responsables pour l’ensemble des volets de cette entente.
Dans le cadre de l’application des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 15, paragraphe 2, du règlement nº 17 et de l'article 65, paragraphe 5, du traité CECA, cette appréciation doit nécessairement se faire au stade de la fixation du montant de départ spécifique, dès lors que la prise en considération de circonstances atténuantes permet seulement de moduler le montant de base de l’amende en fonction des modalités de mise en œuvre de l’entente par le contrevenant. Or, un contrevenant qui n’est pas tenu responsable de certaines branches de cette entente ne saurait avoir eu de rôle dans la mise en œuvre desdits volets. La violation des règles du droit de la concurrence est, du fait de l’étendue limitée de l’infraction retenue à son égard, moins grave que celle imputée aux contrevenants ayant participé à l’ensemble des volets de l’infraction.
La Commission enfreint donc le principe d’égalité de traitement en omettant de prendre en considération, lors du calcul du montant des amendes, le fait qu'une entreprise n'a participé qu'à une branche d'une entente, à la différence d'autres entreprises membres de cette entente, et en traitant, dès lors, des situations différentes de manière identique, sans qu’un tel traitement soit objectivement justifié.
(cf. points 99-101, 104)
4. Il suffit que la Commission démontre que l’entreprise concernée a participé à des réunions entre des concurrents au caractère manifestement anticoncurrentiel pour prouver à suffisance de droit la participation de ladite entreprise à l’entente. Lorsque la participation à de telles réunions est établie, il incombe à l’entreprise concernée d’avancer des indices de nature à établir que sa participation auxdites réunions était dépourvue de tout esprit anticoncurrentiel, en démontrant qu’elle avait indiqué à ses concurrents qu’elle participait à ces réunions dans une optique différente de la leur.
(cf. point 130)
5. Il ressort des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 15, paragraphe 2, du règlement nº 17 et de l'article 65, paragraphe 5, du traité CECA que la Commission n’a établi aucun chevauchement ni aucune interdépendance entre l’appréciation de la gravité et celle de la durée de l’infraction. Le fait qu'elle se soit réservé une possibilité de majoration par année d’infraction allant, s’agissant des infractions de douze mois ou plus, jusqu’à 10 % du montant retenu pour la gravité de l’infraction ne l’oblige nullement à fixer ce taux en fonction de l’intensité des activités de l’entente ou des effets de celle-ci, voire de la gravité de l’infraction. Il lui appartient en effet de choisir, dans le cadre de sa large marge d’appréciation, le taux de majoration qu’elle entend appliquer au titre de la durée de l’infraction.
(cf. points 141, 143)
6. La Commission n’a aucune obligation d’accorder, dans le cadre de son pouvoir d’appréciation, une réduction d’amende pour la cessation d’une infraction aux règles de concurrence qui a déjà pris fin avant la date des premières interventions de la Commission.
(cf. point 151)
7. Dans le cadre de l’appréciation de la coopération fournie par les membres d’une entente, la Commission bénéficie d'une large marge d'appréciation pour évaluer la qualité et l’utilité de la coopération fournie par une entreprise, notamment par rapport aux contributions d’autres entreprises. Seule une erreur manifeste d’appréciation de la part de la Commission est donc susceptible d’être censurée. La Commission ne saurait pour autant, dans le cadre de ladite appréciation, méconnaître le principe d’égalité de traitement.
En revanche, le Tribunal exerce un contrôle entier sur la question de savoir si la coopération fournie par une entreprise va au-delà de l’obligation lui incombant, au titre de l’article 11 du règlement nº 17 et de l’article 18 du règlement nº 1/2003, de répondre aux demandes de renseignements de la Commission.
(cf. points 162, 168)
8. Il ressort de l’économie des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 15, paragraphe 2, du règlement nº 17 et de l'article 65, paragraphe 5, du traité CECA que les entreprises qui participent le plus longtemps à une entente se verront imposer les amendes les plus faibles, si les montants sont divisés par le nombre de mois de participation au cartel ou par le nombre de réunions auxquelles ces entreprises ont participé, dès lors que la Commission s’est limitée, dans lesdites lignes directrices, à prévoir que le montant de départ des amendes serait majoré de 10 % au maximum par année infractionnelle. Une entreprise ne peut se prévaloir de cette autolimitation afin d’obtenir une réduction du montant de l’amende qui lui est infligée.
(cf. points 179-180)