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Document 62001CJ0482

Sommaire de l'arrêt

Mots clés
Sommaire

Mots clés

1. Libre circulation des personnes — Libre prestation des services — Citoyenneté de l'Union européenne — Droit de libre circulation et de libre séjour sur le territoire des États membres — Procédure préjudicielle portant sur la conformité avec le droit communautaire d'une réglementation nationale prescrivant, dans certaines circonstances, l'expulsion des ressortissants d'autres États membres — Informations ne permettant pas à la Cour d'établir les dispositions communautaires pertinentes — Vérification incombant au juge national — (Art. 18 CE, 39 CE, 43 CE, 46 CE, 49 CE, 55 CE et 234 CE; directive du Conseil 90/364)

2. Libre circulation des personnes — Dérogations — Raisons d'ordre public — Condamnation à certaines peines pour des délits spécifiques — Expulsion obligatoire d'un ressortissant communautaire sans prise en compte du comportement personnel — Inadmissibilité — (Directive du Conseil 64/221, art. 3)

3. Libre circulation des personnes — Dérogations — Raisons d'ordre public — Expulsion d'un ressortissant communautaire — Réglementation nationale excluant la possibilité de prendre en considération des circonstances intervenues entre la décision administrative et l'examen par une juridiction de la légalité de cette décision — Inadmissibilité — (Directive du Conseil 64/221, art. 3)

4. Libre circulation des personnes — Dérogations — Raisons d'ordre public — Condamnation à certaines peines pour des délits spécifiques — Expulsion d'un ressortissant communautaire basée sur une présomption et sans proprement tenir compte du comportement personnel ou du danger pour l'ordre public — Inadmissibilité — Expulsion d'un ressortissant communautaire constituant une menace actuelle pour l'ordre public — Intéressé pouvant invoquer des circonstances d'ordre familial — Admissibilité — Conditions — Appréciation au cas par cas dans le respect des principes généraux du droit communautaire, notamment des droits fondamentaux tels que la protection de la vie familiale — (Art. 39, § 3, CE; convention européenne des droits de l’homme, art. 8; directive du Conseil 64/221, art. 3)

5. Libre circulation des personnes — Dérogations — Décisions en matière de police des étrangers — Décision d'expulsion — Garanties juridictionnelles — Législation nationale ne prévoyant ni de procédure de réclamation ni de recours, comportant également un examen de l'opportunité — Inadmissibilité — (Directive du Conseil 64/221, art. 9, § 1)

Sommaire

1. En l’état actuel du droit communautaire, le droit des ressortissants d’un État membre de circuler et de séjourner sur le territoire d’un autre État membre n’est pas inconditionnel. Cela découle, d’une part, des dispositions en matière de libre circulation des personnes et des services contenues au titre III de la troisième partie du traité, à savoir les articles 39 CE, 43 CE, 46 CE, 49 CE et 55 CE, ainsi que des dispositions du droit dérivé prises pour leur application, et, d’autre part, des dispositions de la deuxième partie du traité, et plus spécialement l’article 18 CE, qui, tout en accordant aux citoyens de l’Union le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, renvoie expressément aux limitations et conditions prévues par le traité et par les dispositions prises pour son application.

Lorsque, dans le cadre d’une procédure en application de l’article 234 CE, la Cour est interrogée sur la conformité avec le droit communautaire d’une disposition nationale qui prescrit aux autorités compétentes d’expulser des ressortissants d’autres États membres qui ont été condamnés à certaines peines pour des délits spécifiques et que les renseignements dont la Cour dispose ne lui permettent pas d’établir avec certitude si le ressortissant en cause peut s’appuyer sur les dispositions de l’article 39 CE ou sur d’autres dispositions du traité et du droit dérivé relatives à la libre circulation des personnes ou à la libre prestation des services, alors qu’il est constant que, en sa qualité de citoyen de l’Union, l’intéressé dispose, aux termes de l’article 18 CE, du droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, sous réserve des limitations et conditions prévues par le traité et par les dispositions prises pour son application, il appartient à la juridiction de renvoi d’établir sur quelles dispositions du droit communautaire, outre l’article 18, paragraphe 1, CE, l’intéressé peut, le cas échéant, s’appuyer.

À cet égard, il incombe en particulier à ladite juridiction de vérifier si l’intéressé relève du champ d’application de l’article 39 CE, soit en qualité de travailleur, soit en tant qu’autre personne pouvant bénéficier, en vertu des dispositions du droit dérivé prises pour l’application de cet article, de la libre circulation, ou s’il peut s’appuyer sur d’autres dispositions du droit communautaire, telles que la directive 90/364, relative au droit de séjour, ou l’article 49 CE qui s’applique notamment aux destinataires de services.

(cf. points 47, 52-54, disp. 1)

2. L’article 3 de la directive 64/221 pour la coordination des mesures spéciales aux étrangers en matière de déplacement et de séjour justifiées par des raisons d’ordre public, de sécurité publique et de santé publique, qui prévoit que les mesures en cause doivent être fondées exclusivement sur le comportement personnel de l’individu qui en fait l’objet et que la seule existence de condamnations pénales ne peut automatiquement motiver ces mesures, s’oppose à une réglementation nationale qui impose aux autorités nationales d’ordonner l’expulsion du territoire des ressortissants d’autres États membres ayant fait l’objet d’une condamnation pénale pour mineurs d’au moins deux ans ou d’une condamnation à une peine privative de liberté pour infraction intentionnelle à la loi allemande sur les stupéfiants, si l’exécution de la peine n’a pas été assortie d’un sursis.

(cf. point 71, disp. 2)

3. L’article 3 de la directive 64/221 pour la coordination des mesures spéciales aux étrangers en matière de déplacement et de séjour justifiées par des raisons d’ordre public, de sécurité publique et de santé publique, qui prévoit que les mesures en cause doivent être fondées exclusivement sur le comportement personnel de l’individu qui en fait l’objet et que la seule existence de condamnations pénales ne peut automatiquement motiver ces mesures, s’oppose à une pratique nationale selon laquelle les juridictions nationales ne sont pas censées prendre en considération, en vérifiant la légalité de l’expulsion ordonnée à l’encontre d’un ressortissant d’un autre État membre, des éléments de fait intervenus après la dernière décision des autorités compétentes pouvant impliquer la disparition ou la diminution non négligeable de la menace actuelle que constituerait, pour l’ordre public, le comportement de la personne concernée. Tel est le cas surtout s’il s’est écoulé un long délai entre la date de la décision d’expulsion, d’une part, et celle de l’appréciation de cette décision par la juridiction compétente, d’autre part.

(cf. point 82, disp. 3)

4. Les articles 39 CE et 3 de la directive 64/221 pour la coordination des mesures spéciales aux étrangers en matière de déplacement et de séjour justifiées par des raisons d’ordre public, de sécurité publique et de santé publique, qui prévoit que les mesures en cause doivent être fondées exclusivement sur le comportement personnel de l’individu qui en fait l’objet et que la seule existence de condamnations pénales ne peut automatiquement motiver ces mesures, s’opposent à une législation ou à une pratique nationale selon laquelle l’expulsion du territoire d’un ressortissant d’un autre État membre qui a été condamné à une certaine peine pour des délits spécifiques est prononcée, malgré la prise en compte des considérations d’ordre familial, en se basant sur la présomption que celui-ci doit être expulsé, sans qu’il soit proprement tenu compte de son comportement personnel ni du danger qu’il représente pour l’ordre public.

En revanche, l’article 39 CE et la directive 64/221 ne s’opposent pas à l’expulsion d’un ressortissant d’un État membre qui a été condamné à une certaine peine pour des délits spécifiques et qui, d’une part, constitue une menace actuelle pour l’ordre public et, d’autre part, a séjourné de nombreuses années dans l’État membre d’accueil et peut invoquer des circonstances d’ordre familial à l’encontre de ladite expulsion, pourvu que l’appréciation effectuée au cas par cas par les autorités nationales de la question de savoir où se situe le juste équilibre entre les intérêts légitimes en présence soit faite dans le respect des principes généraux du droit communautaire et, notamment, en tenant dûment compte du respect des droits fondamentaux, tels que la protection de la vie familiale.

(cf. point 100, disp. 4-5)

5. L’article 9, paragraphe 1, de la directive 64/221 pour la coordination des mesures spéciales aux étrangers en matière de déplacement et de séjour justifiées par des raisons d’ordre public, de sécurité publique et de santé publique, qui a pour objet d’assurer une garantie procédurale minimale aux personnes à qui est opposée une décision d’éloignement du territoire, s’oppose à une disposition d’un État membre qui ne prévoit ni de procédure de réclamation ni de recours, comportant également un examen de l’opportunité, à l’encontre d’une décision d’expulsion d’un ressortissant d’un autre État membre prise par une autorité administrative, dès lors qu’aucune autorité indépendante de cette administration n’a été mise en place.

Lorsqu’il est constant que le contrôle des décisions en cause est fait par des juridictions administratives dans le cadre de procédures juridictionnelles mais qu’il subsiste un doute quant à l’étendue de ce contrôle, il appartient à la juridiction nationale de vérifier si les juridictions compétentes en la matière sont à même d’examiner l’opportunité des mesures d’expulsion.

(cf. points 105, 107, 112, 116, disp. 6)

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