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Document 62000TJ0251
Sommaire de l'arrêt
Sommaire de l'arrêt
1. Recours en annulation - Actes susceptibles de recours - Actes produisant des effets juridiques obligatoires - Acte modifiant la motivation d'un acte précédent - Appréciation en fonction de l'impact de la modification sur la substance décisionnelle de l'acte en cause
(Art. 230 CE)
2. Concurrence - Concentrations - Examen par la Commission - Décision d'approbation - Sécurité juridique - Motivation se prononçant sur le caractère accessoire et nécessaire de restrictions notifiées à la concurrence - Appréciation juridique déterminant la substance de la décision énoncée dans le dispositif
[Règlement du Conseil n° 4064/89, art. 6, § 1, sous b)]
3. Actes des institutions - Retrait rétroactif - Conditions - Illégalité de l'acte retiré - Respect du principe de protection de la confiance légitime - Charge de la preuve
4. Actes des institutions - Motivation - Obligation - Portée
(Art. 253 CE)
1. Constituent des actes susceptibles de faire l'objet d'un recours en annulation au titre de l'article 230 CE les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts du requérant, en modifiant de façon caractérisée la situation juridique de celui-ci. Pour déterminer si un acte produit de tels effets, il y a lieu de s'attacher à sa substance. Ainsi, une décision par laquelle la Commission modifie la seule motivation d'une décision antérieure peut faire l'objet d'un recours si cette modification change la substance de ce qui a été décidé dans le dispositif de la décision en cause et, ce faisant, modifie de façon caractérisée la situation juridique de son destinataire. En effet, s'il est constant que seul le dispositif d'un acte est susceptible de produire des effets juridiques obligatoires et, par conséquent, de faire grief, il n'en demeure pas moins que le contenu des motifs d'un acte doit être pris en compte pour déterminer ce qui a été arrêté dans le dispositif.
( voir points 63-68 )
2. En vertu de l'article 6, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 4064/89, relatif au contrôle des opérations de concentrations entre entreprises, la décision par laquelle la concentration est déclarée compatible avec le marché commun couvre également les restrictions à la concurrence directement liées et nécessaires à sa réalisation.
Compte tenu de ses termes, du contexte législatif dans lequel elle s'insère ainsi que de sa genèse et de sa finalité, cette disposition doit être interprétée en ce sens que lorsque, dans les motifs de la décision d'approbation d'une opération de concentration, la Commission a qualifié les restrictions notifiées par les parties à cette opération de restrictions accessoires, de restrictions non accessoires ou de restrictions accessoires pour une durée limitée, elle n'a pas émis un simple avis sans force juridique contraignante mais a, au contraire, procédé à des appréciations juridiques qui déterminent la substance de ce qu'elle a décidé dans le dispositif de cette décision.
Si tel n'était pas le cas, les parties à une opération de concentration n'obtiendraient pas le bénéfice de la sécurité juridique pour l'ensemble de cette opération alors même que, lorsque les conditions prévues par ladite disposition sont effectivement remplies, cet ensemble est reconnu comme étant économiquement indissociable. Or, par l'insertion dans le règlement n° 4064/89 de l'article 6, paragraphe 1, le législateur communautaire a entendu instaurer un système décisionnel qui permet aux parties à une opération de concentration au sens de l'article 3 de ce règlement d'obtenir, en contrepartie du régime contraignant, institué par les articles 4 et 7 de ce règlement, de l'obligation de notification et de l'effet suspensif de cette obligation, la sécurité juridique non seulement en ce qui concerne l'opération de concentration, mais également en ce qui concerne les restrictions notifiées par les parties à cette opération comme étant directement liées et nécessaires à la réalisation de celle-ci.
Le fait d'obliger les parties à une opération de concentration, afin de bénéficier de la sécurité juridique concernant les restrictions qu'elles considèrent comme étant économiquement indissociables de cette opération, à procéder à la notification de ces restrictions en application d'autres dispositions, notamment, du règlement n° 17, parallèlement à la notification en vertu du règlement n° 4064/89, irait à l'encontre du principe de l'efficacité du contrôle des concentrations de dimension communautaire. D'ailleurs, dans l'introduction de sa communication relative aux restrictions accessoires, la Commission a elle-même souligné qu'il «n'y [aurait] pas de procédures parallèles de la Commission, l'une visant le contrôle de l'opération de concentration au titre du règlement [n° 4064/89] et l'autre l'application des articles [81 CE et 82 CE] aux restrictions accessoires à cette opération».
( voir points 101, 103-104, 109 )
3. L'organe compétent pour adopter un acte juridique déterminé est également compétent pour l'abroger ou le modifier par l'adoption d'un actus contrarius, à moins qu'une disposition expresse ne confère cette compétence à un autre organe.
À cet égard, si le retrait rétroactif d'un acte administratif légal ayant conféré des droits subjectifs ou des avantages similaires est contraire aux principes généraux du droit, le retrait rétroactif d'un acte administratif illégal doit en revanche être admis, mais à des conditions très strictes. Il n'est, en effet, admis que s'il intervient dans un délai raisonnable et s'il est suffisamment tenu compte de la confiance légitime du bénéficiaire de l'acte qui a pu se fier à la légalité de celui-ci.
Il appartient à l'institution dont émane l'acte retiré de prouver son illégalité et de démontrer que les autres conditions pour le retrait rétroactif d'un acte illégal sont satisfaites.
( voir points 130, 139-141 )
4. La portée de l'obligation de motivation dépend de la nature de l'acte en cause et du contexte dans lequel il a été adopté. La motivation doit faire apparaître de manière claire et non équivoque le raisonnement de l'institution, de façon, d'une part, à fournir aux intéressés une indication suffisante pour savoir si l'acte est fondé ou s'il est éventuellement entaché d'un vice permettant d'en contester la validité et, d'autre part, à permettre au juge communautaire d'exercer son contrôle de légalité.
( voir point 155 )