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Document 61996TJ0132

    Sommaire de l'arrêt

    Mots clés
    Sommaire

    Mots clés

    1 Recours en annulation - Personnes physiques ou morales - Actes les concernant directement et individuellement - Décision de la Commission adressée à un État membre et constatant l'incompatibilité d'une aide avec le marché commun - Recours d'une autorité régionale ayant octroyé ladite aide - Recevabilité

    [Traité CE, art. 173 (devenu, après modification, art. 230 CE)]

    2 Aides accordées par les États - Interdiction - Dérogations - Aides en faveur des régions affectées par la division de l'Allemagne - Portée de la dérogation - Interprétation stricte - Désavantages économiques causés par l'isolement engendré par le tracé de la frontière entre les deux zones

    [Traité CE, art. 92, § 2, sous c) (devenu, après modification, art. 87, § 2, sous c), CE)]

    3 Aides accordées par les États - Interdiction - Dérogations - Devoir de collaboration de l'État membre sollicitant une dérogation

    [Traité CE, art. 92, § 2 (devenu, après modification, art. 87, § 2, CE)]

    4 Actes des institutions - Motivation - Obligation - Portée - Décision s'inscrivant dans la ligne de décisions précédentes - Motivation sommaire

    [Traité CE, art. 190 (devenu art. 253 CE)]

    5 Aides accordées par les États - Interdiction - Dérogations - Aides pouvant être considérées comme compatibles avec le marché commun - Aides destinées à remédier à une perturbation grave de l'économie d'un État membre - Interprétation stricte - Perturbation affectant l'ensemble de l'économie de l'État membre concerné

    [Traité CE, art. 92, § 3, sous b) (devenu, après modification, art. 87, § 3, sous b), CE)]

    6 Aides accordées par les États - Interdiction - Dérogations - Aides pouvant être considérées comme compatibles avec le marché commun - Pouvoir d'appréciation de la Commission - Contrôle juridictionnel - Limites

    [Traité CE, art. 92, § 3 (devenu, après modification, art. 87, § 3, CE)]

    7 Aides accordées par les États - Interdiction - Dérogations - Aides pouvant être considérées comme compatibles avec le marché commun - Aides visant au développement de régions déterminées - Appréciation par la Commission - Obligation de prendre en considération les effets de l'aide au niveau communautaire

    [Traité CE, art. 92, § 3, sous a) et sous c) (devenu, après modification, art. 87, § 3, sous a) et sous c), CE)]

    8 Aides accordées par les États - Examen par la Commission - Mise en place d'un encadrement des aides dans un secteur économique - Absence d'effet contraignant en l'absence d'accord des États membres - Prise en considération par la Commission en vue de l'application des articles 92 du traité (devenu, après modification, article 87 CE) et 93 du traité (devenu article 88 CE) - Admissibilité

    [Traité CE, art. 92 (devenu, après modification, art. 87 CE) et art. 93 (devenu art. 88 CE)]

    9 Aides accordées par les États - Décision de la Commission - Appréciation de la légalité en fonction des éléments d'information disponibles au moment de l'adoption de la décision - Prise en considération de l'évolution prévisible de la concurrence

    [Traité CE, art. 92, § 1, et 173 (devenus, après modification, art. 87, § 1, CE et 230 CE)]

    10 Aides accordées par les États - Examen par la Commission - Obligation de prendre position dans un délai raisonnable - Possibilité de recours en carence en cas d'abstention

    [Traité CE, art. 92 (devenu, après modification, art. 87 CE) et art. 93 et 175 (devenus art. 88 CE et 232 CE)]

    11 Aides accordées par les États - Examen par la Commission - Possibilité de recourir à des critères opérationnels préétablis - Atteinte aux prérogatives du Conseil - Absence - Distinction entre investissements «en rase campagne» et «d'extension» - Qualification relevant du droit communautaire

    [Traité CE, art. 92 (devenu, après modification, art. 87 CE) et art. 93 (devenu art. 88 CE)]

    Sommaire

    1 L'entité infra-étatique qui jouit de la personnalité juridique en vertu de son droit national peut introduire un recours en annulation en vertu de l'article 173 du traité (devenu, après modification, article 230 CE) contre les décisions dont elle est le destinataire et contre les décisions qui, bien que prises sous l'apparence d'un règlement ou d'une décision adressée à une autre personne, la concernent directement et individuellement.

    A cet égard, est individuellement concernée par une décision de la Commission, adressée à un État membre, déclarant certaines aides d'État incompatibles avec le marché commun, l'entité infra-étatique qui a accordé les aides, en partie au moyen de ses ressources propres, et qui, en raison de la décision, se voit empêchée d'exercer, comme elle l'entend, ses compétences autonomes et obligée d'engager la procédure administrative de récupération des aides auprès des bénéficiaires, qu'elle est seule compétente pour mettre en oeuvre au niveau national.

    Elle doit être considérée comme directement concernée par ladite décision dès lors que les autorités nationales, destinataires de la décision, n'ont exercé aucun pouvoir d'appréciation lorsqu'elles la lui ont communiquée.

    Elle a, par ailleurs, un intérêt à attaquer cette décision distinct de celui de l'État membre dont elle fait partie.

    2 L'article 92, paragraphe 2, sous c), du traité (devenu, après modification, article 87, paragraphe 2, sous c), CE), aux termes duquel sont compatibles avec le marché commun «les aides octroyées à l'économie de certaines régions de la République fédérale d'Allemagne affectées par la division de l'Allemagne, dans la mesure où elles sont nécessaires pour compenser les désavantages économiques causés par cette division», ayant été maintenu en vigueur par le traité de Maastricht et le traité d'Amsterdam, et une disposition identique ayant été insérée à l'article 61, paragraphe 2, sous c), de l'accord sur l'Espace économique européen, il ne saurait être présumé que cette disposition est devenue sans objet depuis la réunification de l'Allemagne.

    Toutefois, s'agissant d'une dérogation au principe général d'incompatibilité avec le marché commun des aides d'État énoncé à l'article 92, paragraphe 1, du traité, l'article 92, paragraphe 2, sous c), est d'interprétation stricte. Par ailleurs, il y a lieu, pour l'interpréter, de tenir compte non seulement de ses termes, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont il fait partie.

    A cet égard, les termes «division de l'Allemagne» se référant, historiquement, à l'établissement de la ligne de partage entre les deux zones, en 1948, les «désavantages économiques causés par cette division» ne sauraient viser que les désavantages économiques causés par l'isolement qu'a engendré l'établissement ou le maintien de cette frontière, tels que l'enclavement de certaines régions, la rupture des voies de communication, ou bien encore la perte des débouchés naturels de certaines entreprises qui ont, dès lors, besoin de soutien soit pour pouvoir s'adapter aux conditions nouvelles, soit pour pouvoir survivre à ce désavantage.

    Méconnaîtrait tant le caractère dérogatoire de cette disposition que son contexte et les objectifs qu'elle poursuit l'interprétation selon laquelle l'article 92, paragraphe 2, sous c), du traité permet de compenser intégralement le retard économique incontestable dont souffrent les nouveaux Länder, jusqu'à ce que ceux-ci aient atteint un niveau de développement comparable à celui des anciens Länder. En effet, les différences de développement entre les anciens et les nouveaux Länder s'expliquent par d'autres causes que par la division de l'Allemagne en tant que telle, et notamment par les régimes politico-économiques différents mis en place dans chaque État de part et d'autre de la frontière.

    3 L'État membre qui demande à pouvoir octroyer des aides en dérogation aux règles du traité est tenu à un devoir de collaboration envers la Commission, en vertu duquel il lui incombe, notamment, de fournir tous les éléments de nature à permettre à cette institution de vérifier que les conditions de la dérogation sollicitée sont remplies.

    4 La motivation exigée par l'article 190 du traité (devenu article 253 CE) doit faire apparaître, d'une façon claire et non équivoque, le raisonnement de l'institution auteur de l'acte, de manière à permettre au juge communautaire d'exercer son contrôle et aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise.

    Toutefois, une décision qui a été adoptée dans un contexte bien connu des parties et qui se place dans la ligne d'une pratique décisionnelle constante peut être motivée d'une manière sommaire.

    Par ailleurs, la motivation d'un acte doit être appréciée, notamment, en fonction de l'intérêt que le destinataire ou d'autres personnes concernées peuvent avoir à recevoir des explications, en particulier lorsqu'elles ont joué un rôle actif dans la procédure d'élaboration de l'acte attaqué et qu'elles connaissaient les raisons de fait et de droit ayant amené la Commission à prendre sa décision.

    De plus, la Commission n'est pas tenue de répondre, dans la motivation d'une décision, à tous les points de droit et de fait soulevés par les intéressés, pour autant qu'elle tienne compte de toutes les circonstances et de tous les éléments pertinents du cas d'espèce. En conséquence, dans le cas particulier d'une décision en matière d'aides d'État, dans la mesure où les parties requérantes ont été étroitement associées à la procédure administrative ayant conduit à l'élaboration de la décision, ni le fait que la décision ne reprenne pas les données chiffrées détaillées de l'analyse des coûts et bénéfices de l'investissement prévu, ni le fait que cette analyse n'ait pas été annexée à la décision ne sont constitutifs d'une violation de l'obligation de motivation.

    5 Il ressort du contexte et de l'économie générale de l'article 92, paragraphe 3, sous b), du traité (devenu, après modification, article 87, paragraphe 3, sous b), CE), aux termes duquel peuvent être considérées comme compatibles avec le marché commun les aides destinées à remédier à une perturbation grave de l'économie d'un État membre, que la perturbation en question doit affecter l'ensemble de l'économie de l'État membre concerné, et pas seulement celle d'une de ses régions ou parties de territoire. Cette solution est d'ailleurs conforme à la nécessité d'interpréter strictement une disposition dérogatoire telle que l'article 92, paragraphe 3, sous b), du traité.

    6 Le contrôle exercé par le juge communautaire sur l'exercice par la Commission du large pouvoir d'appréciation dont elle jouit dans le domaine de l'article 92, paragraphe 3, du traité (devenu, après modification, article 87, paragraphe 3, CE) et dont relèvent des evaluations complexes d'ordre économique et social, à effectuer dans un contexte communautaire, doit se limiter à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, ainsi que de l'exactitude matérielle des faits, de l'absence d'erreur manifeste d'appréciation et de détournement de pouvoir. En particulier, il n'appartient pas au juge communautaire de substituer son appréciation économique à celle de la Commission.

    7 La différence de formulation entre les points a) et c) de l'article 92, paragraphe 3, du traité (devenu, après modification, article 87, paragraphe 3, CE) ne saurait conduire à considérer que la Commission ne doive tenir aucun compte de l'intérêt communautaire lorsqu'elle fait application de l'article 92, paragraphe 3, sous a), et qu'elle doive se borner à vérifier la spécificité régionale des mesures en cause sans évaluer leur incidence sur le ou les marchés pertinents dans l'ensemble de la Communauté.

    L'application de l'article 92, paragraphe 3, sous a) comme sous c), suppose la prise en considération non seulement des implications d'ordre régional des aides visées par ces dispositions du traité, mais également, au regard de l'article 92, paragraphe 1, de l'impact de ces aides sur les échanges entre les États membres et donc des répercussions sectorielles qu'elles sont susceptibles de provoquer au niveau communautaire.

    8 Si les règles de l'encadrement communautaire des aides d'État dans certains secteurs de l'industrie, en tant que mesures utiles proposées par la Commission aux États membres, sur la base de l'article 93, paragraphe 1, du traité (devenu article 88, paragraphe 1, CE), sont dénuées de tout caractère contraignant et ne s'imposent à ces derniers que lorsque ceux-ci y ont consenti, rien ne saurait empêcher la Commission d'examiner les aides qui doivent lui être notifiées à la lumière de ces règles, dans le cadre de l'exercice du large pouvoir d'appréciation dont elle dispose en vue de l'application des articles 92 du traité (devenu, après modification, article 87 CE) et 93 du traité.

    9 La légalité d'une décision en matière d'aides doit être appréciée en fonction des éléments d'information dont la Commission pouvait disposer au moment où elle l'a arrêtée.

    Par ailleurs, lorsqu'elle vérifie l'existence d'une aide au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité (devenu, après modification, article 87, paragraphe 1, CE), la Commission n'est pas strictement liée par les conditions de la concurrence existant à la date d'adoption de sa décision. Elle doit procéder à une évaluation dans une perspective dynamique, et tenir compte de l'évolution prévisible de la concurrence et des effets qu'aura sur elle l'aide en question.

    Il en résulte que l'on ne saurait reprocher à la Commission d'avoir tenu compte d'éléments survenus après l'adoption d'un projet tendant à instituer ou à modifier une aide. La circonstance que l'État membre intéressé a mis à exécution les mesures projetées avant que la procédure d'examen ait abouti à une décision finale, en violation de ses obligations au titre de l'article 93, paragraphe 3, du traité (devenu article 88, paragraphe 3, CE), est sans incidence sur cette question.

    10 Si la procédure préliminaire d'examen mise en oeuvre par l'article 93, paragraphe 3, du traité (devenu article 88, paragraphe 3, CE) doit procurer à la Commission un délai utile, cette dernière doit, cependant, faire diligence et tenir compte de l'intérêt des États membres à être fixés rapidement dans des domaines où la nécessité d'intervenir peut revêtir un caractère d'urgence en raison de l'effet que ces États membres attendent des mesures d'encouragement projetées. La Commission doit, dès lors, prendre position dans un délai raisonnable, que la Cour a évalué à deux mois.

    Par ailleurs, la Commission reste tenue au même devoir général de diligence lorsqu'elle décide d'ouvrir la procédure contradictoire d'examen prévue à l'article 93, paragraphe 2, du traité, et sa carence en la matière peut, le cas échéant, être sanctionnée par le juge communautaire dans le cadre d'une procédure au titre de l'article 175 du traité (devenu article 232 CE).

    11 Le pouvoir de prendre tous règlements utiles en vue de l'application des articles 92 du traité (devenu, après modification, article 87 CE) et 93 du traité (devenu article 88 CE), conféré au Conseil par l'article 94 du traité (devenu article 89 CE), n'est nullement mis en cause par le fait que la Commission recourt à des critères opérationnels préétablis, tels que ceux qui sont à la base de la distinction entre investissements «en rase campagne» et investissements «d'extension», dans le cadre de l'exercice du large pouvoir d'appréciation dont elle dispose en vue de l'application de ces dispositions.

    Par ailleurs, la qualification d'un investissement d'investissement «d'extension» ou, au contraire, d'investissement «en rase campagne», s'opère dans un contexte communautaire, indépendamment de la qualification retenue par le droit comptable ou fiscal de l'État membre dont relève l'entreprise bénéficiaire.

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