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Document 61996TJ0035
Sommaire de l'arrêt
Sommaire de l'arrêt
ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)
18 mars 1997
Affaire T-35/96
Lars Bo Rasmussen
contre
Commission des Communautés européennes
«Fonctionnaires — Avis de vacance — Annulation de la procédure en cours — Avis de concours — Emploi réservé aux ressortissants de nouveaux États membres — Recours en annulation — Recevabilité — Articles 4 et 29 du statut — Principe de protection de la confiance légitime — Principe de sécurité juridique — Détournement de pouvoir — Recours en indemnisation»
Texte complet en langue française II-187
Objet:
Recours ayant pour objet, d'une part, une demande d'annulation de la décision de la Commission d'annuler la procédure d'avis de vacance d'emploi COM/116/94 et, pour autant que de besoin, de la décision de la Commission de réserver l'emploi faisant l'objet de cet avis de vacance aux ressortissants de nouveaux États membres et de publier un avis de concours général COM/A/929 (chef de l'unité V.F.3), ainsi que de la décision de la Commission du 14 décembre 1995 portant rejet de la réclamation du requérant du 14 juillet 1995 et, d'autre part, une demande de condamnation de la Commission au versement d'une indemnité en réparation des préjudices moraux subis.
Résultat:
Rejet.
Résumé de l'arrêt
Le 13 octobre 1994, sur la base des articles 4 et 29, paragraphe 1, sous a), du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (statut), la Commission des Communautés européennes (Commission) publie, dans la publication Emplois d'encadrement — Vacances d'emplois no 32, un avis de vacance de l'emploi de chef de l'unité «promotion de la santé et surveillance des maladies» de la direction F («santé publique et sécurité au travail») de la direction générale V (Emploi, relations industrielles et affaires sociales) (DG V) (COM/116/94 — A 3/A 4/A 5 — V.F.3, avis de vacance).
Le requérant, administrateur principal de grade A 5, et cinq autres fonctionnaires se portent candidats à cet emploi.
A la fin de novembre 1994, le directeur de la direction F de la DG V communique au directeur général les noms de quatre candidats, parmi lesquels celui du requérant, qui remplissent les conditions nécessaires pour être nommés chef de l'unité V.F.3.
Le 25 mars 1995, entre en vigueur le règlement (CE) no 626/95 du Conseil, du 20 mars 1995, instituant, à l'occasion de l'adhésion de l'Autriche, de la Finlande et de la Suède, des mesures particulières et temporaires concernant le recrutement de fonctionnaires des Communautés européennes (JO L 66, p. 1, règlement no 626/95). Son article 1er, paragraphe 1, dispose : «Jusqu'au 31 décembre 1999, il peut être pourvu à des emplois vacants par la nomination de ressortissants autrichiens, finlandais et suédois, par dérogation à l'article 4, deuxième et troisième alinéas, à l'article 5, paragraphe 3, à l'article 7, paragraphe 1, à l'article 27, troisième alinéa, à l'article 29, paragraphe 1, [sous] a), b), et c), et à l'article 31 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans la limite des emplois prévus à cet effet dans le cadre des délibérations budgétaires au sein des institutions compétentes.»
Le 30 mars 1995, la Commission annule l'avis de vacance. Cene annulation est publiée dans la publication Emplois d'encadrement — Vacances d'emplois no 9, du 30 mars 1995, distribuée au personnel de la Commission à Luxembourg par le service du courrier interne, le 5 avril 1995.
Le 3 avril 1995, la Commission décide de réserver l'emploi faisant l'objet de l'avis de vacance à un ressortissant d'un nouvel État membre.
Par note du 5 avril 1995, l'administration envoie au requérant une note par laquelle on l'informe que l'avis de vacance a été annulé et que, par conséquent, sa candidature ne peut être retenue pour le poste de chef de l'unité V.F.3. Le même jour, le directeur de la direction F de la DG V envoie au requérant une note par laquelle il l'informe que le poste de chef de l'unité V.F.3 «promotion de la santé et surveillance des maladies» sera réservé à un ressortissant de l'un des trois nouveaux États membres.
Le 5 avril 1995, à 7 heures, le requérant part en mission puis en vacances. Il revient à Luxembourg le 25 avril 1995.
Le 1er juin 1995, la Commission publie au Journal officiel des Communautés européennes un avis de concours généraux pour le pourvoi de neuf postes de chef d'unité de nationalité autrichienne, finlandaise ou suédoise. Un de ces concours généraux, le concours COM/A/929, est destiné à pourvoir au poste de «chef de l'unité V.F.3».
Sur les conclusions en annulation de la décision d'annuler l'avis de vacance d'emploi COM/116/94 et de la décision de réserver l'emploi concerné à un ressortissant d'un nouvel État membre
Sur la recevabilité
Le fait qu'une institution réponde sur le fond à une réclamation administrative tardive et donc irrecevable ne peut avoir pour effet de déroger au système des délais impératifs institués par les articles 90 et 91 du statut ni de priver l'administration de la faculté de soulever, au stade de la procédure juridictionnelle, une exception d'irrecevabilité tirée de la tardiveté de la réclamation et encore moins de dispenser le Tribunal de l'obligation qui lui incombe de vérifier le respect des délais statutaires (points 29 et 30).
Référence à: Tribunal 6 décembre 1990, B./Commission, T-130/89, Rec. p. II-761, publication sommaire, point 16; Tribunal 6 décembre 1990, Petrilli/Commission, T-6/90, Rec. p. II-765, publication sommaire, point 26; Tribunal 7 juin 1991, Weyrich/Commission, T-14/91, Rec. p. II-235, points 40 à 42; Tribunal 25 septembre 1991, Lacroix/Commission, T-54/90, Rec. p. II-749, points 24 et 25; Tribunal 17 octobre 1991, Offermann/Parlement, T-129/89, Rec. p. II-855, points 31 et 34
Il incombe à l'administration de s'assurer que les fonctionnaires reçoivent effectivement notification des actes les concernant individuellement. Dans ces conditions, il ne saurait être exigé d'un fonctionnaire normalement diligent qu'il veille à se procurer une publication émanant de l'administration, distribuée par le service du courrier interne et concernant les emplois d'encadrement déclarés vacants, dont il ignore la date de publication, même s'il attend des prises de position importantes le concernant (point 36).
La «connaissance» d'un acte à laquelle fait référence l'article 90, paragraphe 2, du statut, et qui ouvre le délai de réclamation de trois mois, est la connaissance résultant de la notification ou de la publication d'un tel acte, et non la connaissance à laquelle une personne parvient par des moyens officieux (point 40).
Au vu de tout ce qui précède, force est de constater que le requérant n'a eu connaissance des deux actes visés par les conclusions en annulation que le 25 avril 1995. La réclamation du requérant du 14 juillet 1995 a donc été introduite dans le délai prévu à l'article 90, paragraphe 2, du statut, de sorte que le recours en annulation subséquent doit être déclaré recevable (points 41 et 42).
Sur le fond
Sur le premier moyen tiré d'une violation des articles 4 et 29, paragraphe 1, sous a), du statut ainsi que des principes de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique
L'autorité investie du pouvoir de nomination (AIPN) n'est pas tenue de donner suite à une procédure de recrutement, engagée conformément à l'article 29 du statut, s'il existe des raisons objectives, telles le besoin d'intégrer dans l'institution des ressortissants des nouveaux États membres, qui justifient une telle décision (points 60 et 61).
Référence à: Cour 24 juin 1969. Fux/Commission, 26/68, Rec. p. 145, points 11 et 12; Cour 2 avril 1981, Pizziolo/Commission, 785/79, Rec. p. 969, point 10; Cour 1er décembre 1983, Morina/Parlement, 18/83, Rec. p. 4051, points 9 et 12; Cour 9 février 1984, Kohler/Courdes comptes, 316/82et 40/83. Rec p. 641, point 22; Tribunal 9 février 1994, Latham/Commission, T-3/92, RecFP p. II-83, point 50; Tribunal 30 novembre 1995, Branco/Cour des comptes, T-507/93, RecFP p. II-797, point 28; Tribunal 6 juin 1996, Baiwir/Commission, T-262/94, RecFP p. II-739, point 67
Partant, l'AIPN pouvait légitimement adopter en l'espèce une décision d'annuler la procédure entamée tant que le poste était vacant, afin de fixer de nouvelles conditions de pourvoi du poste (point 62).
Enfin, le requérant n'a pu légitimement s'attendre à ce que l'AIPN conduise à son terme sa procédure de sélection. En effet, aucun fonctionnaire ne peut invoquer une violation du principe de protection de la confiance légitime en l'absence d'assurances précises que lui aurait fournies l'administration (point 63).
Référence à: Tribunal 27 mars 1990, Chomel/Commission, T-123/89, Rec. p. II-131, point 26; Tribunal 30 novembre 1994, Dornonville de la Cour/Commission, T-498/93, RecFP p. II-813, point 46
La faculté qui appartient à l'AIPN de ne pas donner suite à une procédure engagée conformément à l'article 29 du statut s'il existe des raisons objectives justifiant une telle décision exclut en outre que le principe de la sécurité juridique ait pu être violé par les décisions attaquées (point 65).
Sur le second moyen tiré d'un détournement de pouvoir
Le détournement de pouvoir n'est réputé exister que s'il est prouvé qu'en adoptant l'acte litigieux l'AIPN a poursuivi un but autre que celui visé par la réglementation en cause ou s'il apparaît, sur la base d'indices objectifs, pertinents et concordants que l'acte en question a été pris pour atteindre des fins autres que celles excipées. En l'espèce, le requérant ne rapporte pas la preuve d'un éventuel détournement de pouvoir (points 70 et 71).
Référence à: Tribunal 14 février 1990, Hochbaum/Commission, T-38/89, Rec. p. II-43, point 22; Tribunal 2 février 1995, Freueriksen/Parlement, T-106/92, RecFP p. II-99, point 47; Tribunal 22 mars 1995, Kotzonis/CES, T-586/93, RecFP p. II-203, point 73
Sur les conclusions en annulation de la décision de la Commission de publier l'avis de concours général COM/A/929
Sur la recevabilité
L'intérêt du requérant à agir en annulation de l'avis de concours général fait défaut dans le cas d'espèce. En effet, dès lors qu'un emploi à pourvoir a été légalement réservé aux ressortissants de nouveaux États membres en application d'un régime de recrutement transitoire comme celui mis en place par le règlement no 626/95, un fonctionnaire qui, en raison de sa nationalité, n'a pas vocation à occuper l'emploi, n'a pas intérêt à contester la décision de publier l'avis de concours général ouvrant la procédure de pourvoi du poste litigieux (point 78).
Référence à: Cour 7 février 1990, Laval/CES, C-95/88, Rec. p. I-253, publication sommaire, point 37
Sur les conclusions en indemnisation
La responsabilité de la Communauté suppose la réunion d'un ensemble de conditions en ce qui concerne l'illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l'existence d'un lien de causalité entre le comportement et le préjudice invoqué. Doit être rejetée la demande introduite par un fonctionnaire visant à obtenir réparation du préjudice qui lui aurait été causé par un comportement de l'administration l'ayant privé d'une possibilité de promotion, dès lors que l'illégalité de ce comportement n'est pas établie (point 82).
Référence à: Cour 1er juin 1994, Commission/BrazzelliLualdi e.a., C-136/92 P, Rec. p. I-1981, point 42; Tribunal 9 février 1994, Latham/Commission, T-82/91, RecFP p. II-61, point 75; Tribunal 9 février 1994, Latham/Commission, T-3/92, RecFP p. II-83, point 66; Tribunal 21 février 1995, Moat/Commission, T-506/93, RecFP p. II-147, points 46 à 49; Tribunal 6 juillet 1995, Ojha/Commission, T-36/93, RecFP p. II-497, point 130
Dès lors qu'il a été jugé que la Commission était en droit d'annuler l'avis de vacance et de réserver le poste de chef de l'unité V.F.3 aux ressortissants des trois nouveaux États membres, aucun comportement illégal ne peut être reproché à l'institution (point 83).
Dispositif:
Le recours est rejeté comme irrecevable pour autant qu'il vise à l'annulation de la décision de la Commission de publier l'avis de concours général COM/A/929 (chef de l'unité V.F.3).
Le recours est rejeté comme non fondé pour le surplus.