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Document 61994TJ0146

Sommaire de l'arrêt

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

7 mars 1996

Affaire T-146/94

Calvin Williams

contre

Cour des comptes des Communautés européennes

«Fonctionnaires — Obligations — Actes contraires à la dignité de la fonction publique — Devoir de loyauté — Procédure disciplinaire — Révocation»

Texte complet en langue française   II-329

Objet:

Recours ayant pour objet l'annulation de la décision de la Cour des comptes du 24 juin 1993, portant révocation du requérant, sans réduction ni suppression de son droit à une pension d'ancienneté.

Résultat:

Rejet.

Résumé de l'arrêt

Dans le cadre de la candidature qu'il présente en vue de se faire élire au comité du personnel de la Cour des comptes, le requérant diffuse, dans les locaux de la Cour des comptes, deux écrits considérés comme diffamatoires, ce qui lui vaut la suspension de ses fonctions et l'introduction, à son encontre, de la procédure disciplinaire prévue à l'annexe IX du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (statut). Le conseil de discipline, saisi, émet l'avis d'appliquer la sanction prévue à l'article 86, paragraphe 2, sous f), du statut. Le 24 juin 1993, l'autorité investie du pouvoir de nomination (AIPN) arrête la décision disciplinaire infligée au requérant, à savoir, compte tenu de la gravité des manquements lui imputables et des circonstances aggravantes et atténuantes retenues, la révocation sans réduction ni suppression du droit à sa pension d'ancienneté. L'AIPN, dans cette décision, constate que le requérant est l'auteur des deux documents comportant des propos injurieux, diffamatoires et portant atteinte à l'honneur des membres et de certains agents de la Cour des comptes ainsi que des membres d'autres institutions et que ces documents ont été rendus publics, puisqu'ils ont été adressés à des personnes n'appartenant pas à la Cour des comptes et qu'ils ont été diffusés à la cafétéria et au restaurant, où des personnes étrangères à l'institution ont pu en prendre connaissance. De plus, l'AIPN considère que les écrits diffusés par le requérant constituent une violation, à la fois, de l'article 12, premier alinéa, du statut, en ce qu'ils portent atteinte à la dignité de la fonction d'administrateur principal qu'il remplissait, et de l'article 21, premier alinéa, du statut, les propos tenus étant, de par leur nature, constitutifs d'une violation du devoir de loyauté incombant à tout fonctionnaire vis-à-vis de l'institution dont il relève et de ses supérieurs.

Le 23 septembre 1993, suite à la notification de cette décision, le requérant dépose, auprès du secrétariat général de la Cour des comptes, un document intitulé «Réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut» qui mentionne un document annexé contenant les mêmes moyens, griefs et arguments que ceux qu'il a visés et développés dans le cadre du recours qu'il introduit auprès du Tribunal. Ce même jour, le requérant introduit un recours devant le Tribunal, inscrit sous le numéro T-522/93 et signifié à la Cour des comptes le 27 septembre. Le 24 septembre 1993, le secrétaire général accuse réception de la réclamation déposée à la Cour des comptes le 23 septembre 1993, en précisant que l'annexe y annoncée n'est pas jointe à celle-ci. Par ordonnance du 16 décembre 1993, le Tribunal rejette le recours formé dans l'affaire T-522/93 comme irrecevable au motif qu'il a été introduit prématurément. Le 24 janvier 1994, la Cour des comptes, statuant sur la réclamation introduite le 23 septembre 1993 par le requérant, rejette celle-ci comme irrecevable et, en tout état de cause, comme non fondée.

Le requérant introduit alors le présent recours et, simultanément, une demande en référé qui est rejetée par ordonnance du président du Tribunal du 29 juin 1994, Williams/Cour des comptes (T-146/94 R, RecFP p. II-571).

Sur la recevabilité

Le but de la procédure précontentieuse étant le règlement amiable d'un litige qui naît au moment de la réclamation, l'AIPN doit être en mesure de connaître de façon suffisamment précise les arguments que le fonctionnaire formule à l'encontre d'une décision administrative. Il en résulte que la réclamation doit contenir un exposé des moyens et arguments invoqués à l'encontre de la décision administrative contre laquelle elle est dirigée (point 44).

Référence à Cour 14 mars 1989, Del Amo Martínez/Parlement. 133/88, Rec. p. 689, point 9; Tribunal 22 juin 1990. Marcopoulos/Cour de justice, T-32/89 et T-39/89, Rec. p. II-281. point 28

Le texte de la réclamation ne comportait l'exposé d'aucun moyen ni argument. Il s'étendait sur deux pages dont la première portait l'apposition de deux cachets de réception; le texte figurant sur la seconde page faisait état de l'existence d'une annexe, contenant l'ensemble des moyens, griefs et arguments développés dans le cadre du recours que le requérant déclarait vouloir introduire devant le Tribunal le même jour. Il s'ensuit que l'exposé de l'argumentation se trouvait non pas dans le texte de la réclamation, mais dans un autre document, lequel, selon le requérant, était annexé à sa réclamation, ce qui est contesté par la défenderesse (points 45 et 46).

La personne qui, au nom d'une institution, est chargée de la réception de documents à caractère administratif n'a pas pour mission de vérifier d'abord, dans chaque document qui lui est remis, s'il est fait référence à une annexe et si cette annexe est effectivement jointe au document en question. Les cachets attestent seulement qu'un document a été déposé à la date indiquée, mais ils n'ont aucune valeur probante en ce qui concerne le nombre de pages de ce document. L'administration, lorsqu'elle se rend compte, à la réception d'un document, qu'une pièce mentionnée n'est pas jointe, est tenue de signaler au signataire du document cette absence et de lui demander de fournir la pièce manquante dans un bref délai. Cette exigence ne saurait être considérée comme une violation du principe selon lequel les délais sont d'ordre public et ne se trouvent pas à la disposition des parties ou du juge. En effet, la sécurité juridique, qui constitue la raison d'être du respect des délais, n'est pas mise en cause si la réclamation a été introduite dans le délai prévu (points 47 et 48).

Le Tribunal rappelle que la défenderesse a reçu signification, par les soins du greffe du Tribunal, de la requête déposée par le requérant, laquelle contenait l'ensemble des moyens et arguments à l'encontre de la décision litigieuse. Dès lors, deux jours après l'expiration du délai pour introduire une réclamation, la défenderesse était en mesure de prendre connaissance de l'argumentation du requérant et donc de prendre position à ce sujet (point 49).

Etant donné que la défenderesse était en mesure de comiaître de façon précise les arguments du requérant, que, dans sa décision de rejet de la réclamation, elle a rejeté celle-ci comme non fondée et que, après les avoir examinés, elle a répondu, de façon détaillée, aux mêmes moyens et arguments que ceux développés dans le recours, il en résulte que le moyen d'irrecevabilité invoqué par la défenderesse n'est pas fondé et que le recours doit donc être déclaré recevable (points 50 à 52).

Sur le fond

Sur la demande en annulation

Sur le moyen tiré de la violation de l'article 12, premier alinéa, du statut

— Sur l'existence d'une atteinte à la dignité de la fonction

L'article 12, premier alinéa, du statut vise à garantir que les fonctionnaires communautaires, dans leur comportement, présentent une image de dignité conforme à la conduite particulièrement correcte et respectable que l'on est en droit d'attendre des membres d'une fonction publique internationale. Il en résulte que c'est en fonction de ce critère qu'il faut analyser la portée de la notion d'une atteinte à la dignité de la fonction, qui ne saurait dépendre de la conception subjective que le fonctionnaire concerné se fait des tâches qui lui sont confiées au sein d'une institution communautaire. Le Tribunal rappelle que des propos injurieux constituent une atteinte à la dignité de la fonction (points 64 à 66).

Référence à: Tribunal 26 novembre 1991. Williams/Cour des comptes, T-146/89. Rec. p. II-1293. points 76 et 80

Les deux documents en cause contenant des affirmations constitutives d'injures et portant atteinte à l'honneur des membres de l'institution et des membres d'autres institutions ainsi qu'à celui des fonctionnaires et agents doivent être considérés comme des expressions d'opinions qui portent atteinte à la dignité de la fonction (point 67).

Le respect que, en tant que membre du personnel d'une institution, le fonctionnaire doit à la dignité de sa fonction ne se limite pas au moment particulier où il exerce telle ou telle tâche spécifique, mais s'impose à lui en toute circonstance et, notamment, dans le cadre d'une élection au comité du personnel, sa qualité de fonctionnaire étant précisément une condition pour être candidat (point 68).

Le Tribunal rappelle qu'un fonctionnaire, au cas où il estime que certaines des mesures arrêtées par une institution ont été prises en violation des dispositions des traités, est libre de recourir à toutes les voies de droit qui lui sont ouvertes ou d'entamer les actions appropriées, mais ce dans le respect des principes inscrits dans le statut, c'est-à-dire en observant, tant dans ses écrits que dans ses propos, l'obligation de réserve et de modération exigible de tout fonctionnaire (point 69).

Référence à: Williams/Cour des comptes, précité, point 80

Le Tribunal estime que c'est à bon droit que la décision attaquée a considéré que les écrits en question constituaient une atteinte à la dignité de la fonction et que, partant, ce grief doit être rejeté (points 70 et 71).

— Sur le caractère public de l'expression d'opinions

Une diffusion limitée à l'intérieur d'une institution de notes qui portent atteinte à la dignité de la fonction, même dans le cadre d'une procédure administrative, remplit la condition de publicité exigée par l'article 12, premier alinéa, du statut pour qu'il y ait violation de cet article. A cet égard, le Tribunal estime que la dignité de la fonction publique communautaire est susceptible d'être mise en cause non seulement par l'image négative qu'un fonctionnaire donnerait à l'extérieur de l'institution dont il relève, mais aussi par un comportement qui se cantonnerait à l'intérieur de l'institution, où il doit faire particulièrement preuve d'un comportement digne et respectueux'vis-à-vis de cette dernière et de toutes les personnes qui y sont affectées (points 79 et 80).

Référence à: Williams/Cour des comptes, précité, point 76

Les deux écrits en cause ont connu une publicité à la fois interne et externe. Pour ce qui est de la publicité externe, le requérant a admis lui-même que la diffusion de ces écrits dans le restaurant de l'institution avait atteint des personnes étrangères et qu'il en avait envoyé des copies à des personnalités en dehors de l'institution. De surcroît, il est notoire que les restaurants des institutions communautaires sont fréquentés par des fonctionnaires des différentes institutions ainsi que par des familiers de ces personnes (points 81 et 82).

Le Tribunal estime que c'est à juste titre que la défenderesse a considéré que les écrits en cause ont connu une publicité interne et externe à l'institution et que le grief du requérant doit, partant, être rejeté. De même, c'est à bon droit que la défenderesse a considéré que les écrits et leur diffusion constituaient une violation de l'article 12, premier alinéa, du statut. Dès lors, le moyen doit être rejeté (points 83 à 86).

Sur le moyen tiré de la violation de l'article 21, premier alinéa, du statut

L'article 21, premier alinéa, du statut établit un devoir de loyauté et de coopération qui incombe à tout fonctionnaire vis-à-vis de l'institution dont il relève et de ses supérieurs. Ce devoir de loyauté et de coopération ne comporte pas seulement des obligations positives, mais aussi, a fortiori, une obligation négative, l'obligation de s'abstenir, de manière générale, de conduites attentatoires à la dignité et au respect dus à l'institution et à ses autorités (points 96 et 97).

Référence à: Cour 14 décembre 1966, Alfieri/Parlement, 3/66, Rec. p. 633, 650 et 651; Williams/Cour des comptes, précité, point 72

Les propos tenus par le requérant dans ses deux écrits, qui ont été jugés injurieux et diffamatoires, sont, de par leur nature, constitutifs d'une grave violation du devoir de loyauté et de coopération qui incombe à tout fonctionnaire vis-à-vis de l'institution dont il relève et de ses supérieurs. En effet, les affirmations injurieuses et diffamatoires du requérant contenues dans les tracts litigieux se réfèrent quasi exclusivement à la manière dont la Cour des comptes s'acquitte de sa mission de contrôle des comptes dans le cadre institutionnel de la Communauté. Ainsi, la portée du devoir de loyauté et de coopération qui incombe au requérant vis-à-vis de l'institution dont il relève et des ses supérieurs doit être appréciée à la lumière précisément du fait qu'il participe, en tant que fonctionnaire, à l'accomplissement de la mission de contrôle dévolue à l'institution dont il relève. Le fait que les propos en cause ont été tenus dans le cadre d'une campagne pour l'élection du comité du personnel de la Cour des comptes ne saurait avoir d'incidence sur cette appréciation. En effet, l'observation de ce devoir de loyauté et de coopération ne s'impose pas seulement dans la réalisation des tâches spécifiques qui sont confiées au fonctionnaire, mais s'étend aussi à toute la sphère des relations existant entre le fonctionnaire et l'institution. Une campagne électorale concernant un organe institué en vertu du statut fait partie de la sphère des relations existant entre le fonctionnaire et son institution, et l'obligation énoncée par l'article 21, premier alinéa, du statut ne saurait être méconnue à cette occasion (points 98 à 100).

Référence à: Williams/Cour des comptes, précité, point 72

S'agissant du droit du fonctionnaire à la libre expression d'opinions, il suffit de remarquer que, en aucun cas, un tel droit ne saurait être exercé par la voie d'affirmations diffamatoires ou injurieuses (point 101).

C'est à bon droit que la défenderesse a qualifié la diffusion des deux écrits comme constituant une violation de l'article 21, premier alinéa, du statut. Ce moyen doit donc être rejeté (points 102 et 103).

Sur le moyen tiré de la violation du principe de proportionnalité et de l'absence de motivation pertinente

— Sur la portée du moyen

Le choix de la sanction adéquate appartient à l'AIPN, lorsque la réalité des faits retenus à la charge du fonctionnaire est établie, et le juge communautaire ne saurait censurer le choix de la sanction disciplinaire par l'AIPN, à moins que la sanction infligée ne soit disproportionnée par rapport aux faits relevés à la charge du fonctionnaire (point 106).

Référence à: Cour 4 février 1970. Van Eick/Commission, 13/69. Rec. p. 3, points 24 et 25; Cour 30 mai 1973 De Greef/Commission, 46/72, Rec. p. 543. points 44 à 46; Cour 29 janvier 1985. F./Commission. 228/83. Rec. p. 275. point 34; Cour 19 avril 1988, M./Conseil, 175/86 et 209/86, Rec. p. 1891, point 9; Williams/Courdes comptes, précité, point 83

La détermination de la sanction est fondée sur une évaluation globale par l'AIPN de tous les faits concrets et circonstances propres à chaque cas individuel, les articles 86 à 89 du statut ne prévoyant pas de rapports fixes entre les différentes sortes de manquements commis par les fonctionnaires et ne précisant pas dans quelle mesure l'existence de circonstances aggravantes ou atténuantes doit intervenir dans le choix de la sanction. Dès lors, l'examen du Tribunal se limite à la question de savoir si la pondération des circonstances aggravantes et atténuantes par l'AIPN a été effectuée de façon proportionnée, étant précisé que, lors de cet examen, le Tribunal ne saurait se substituer à l'AIPN quant aux jugements de valeur portés à cet égard par celle-ci (points 107 et 108).

Référence à: Cour du 5 février 1987, F./Commission, 403/85, Rec. p. 645, point 26; Williams/Cour des comptes, précité, point 83

— Sur la première circonstance aggravante

Le Tribunal ne saurait retenir le premier argument invoqué par le requérant selon lequel les termes utilisés n'auraient pas été réfléchis et pesés à cause de ses troubles psychologiques. Le Tribunal estime que les déclarations faites par le requérant plusieurs mois après la rédaction des documents en question n'ont pu que confirmer l'appréciation de l'AIPN selon laquelle les termes utilisés avaient été réfléchis et pesés (point 116).

Le Tribunal ne saurait non plus retenir le second argument du requérant selon lequel les propos tenus au cours d'une campagne électorale sont susceptibles de comporter certains excès de langage. En effet, le Tribunal a jugé (voir point 67) que les documents en cause contenaient des propos injurieux et diffamatoires et que rien ne peut justifier, même dans le cadre d'une campagne électorale, l'utilisation de ce type de langage. En second lieu, et à titre surabondant, il y a lieu de souligner que les affirmations injurieuses et diffamatoires du requérant dans les tracts litigieux se réfèrent quasi exclusivement à la manière dont la Cour des comptes s'acquitte de sa mission de contrôle des comptes dans le cadre institutionnel de la Communauté et que cette mission, qui est définie aux articles 188 A et 188 C du traité CE, ne fait, en aucun cas, l'objet des compétences exercées par le comité du personnel auquel le requérant souhaitait être élu. En effet, les compétences du comité du personnel, telles qu'elles sont définies à l'article 9 du statut, concernent exclusivement le fonctionnement interne d'une institution et la participation à la gestion du personnel. Aucune relation n'existait donc entre la fonction de l'organe à laquelle le requérant souhaitait être élu et le contenu de ses écrits. En conséquence, les affirmations contenues dans ces tracts ne sauraient être considérées comme étant susceptibles d'être justifiées par leur contexte électoral, étant donné leur absence totale de rapport avec les fonctions de l'organe auquel le requérant souhaitait être élu (point 117).

Au surplus, il y a lieu de relever que l'avis du conseil de discipline du 10 juillet 1992 considérait comme une circonstance aggravante le fait que les propos injurieux et diffamatoires aient été formulés par écrit. Par conséquent, il y a lieu de rejeter le grief du requérant (points 118 et 119).

— Sur la deuxième circonstance aggravante

L'argument du requérant manque en fait. En effet, il a été jugé (voir point 81) que la diffusion interne et externe de ces tracts a été établie et que le requérant lui-même a reconnu que la diffusion de ces écrits au restaurant et à la cafétéria avait atteint des personnes étrangères à la Cour des comptes et qu'il en avait envoyé des copies à des personnalités en dehors de l'institution. En outre, l'avis du conseil de discipline du 10 juillet 1992 considérait que la diffusion des documents en cause au restaurant et à la cafétéria de la Cour des comptes à un moment où des personnes étrangères à l'institution étaient présentes constituait une circonstance aggravante. Partant, il y lieu de rejeter le grief (points 123 à 125).

— Sur la troisième circonstance aggravante

La circonstance aggravante sous examen ne consiste pas dans le fait que le requérant a eu recours à des actions inappropriées, mais dans le fait qu'il a récidive, c'est-à-dire qu'il a eu recours à des actions comparables à celles qui lui avaient deja valu des sanctions disciplinaires dans le passé. A cet égard, la Cour a déjà jugé que, en dépit de la gravité des faits reprochés, l'administration est en droit de ne prononcer qu'une sanction légère, compte tenu de circonstances indépendantes des reproches invoqués, telle l'absence de toute sanction disciplinaire antérieure. A contrario il est permis de déduire de cette jurisprudence que 1'AIPN peut prendre en considération, à titre de circonstance aggravante, l'existence d'une sanction disciplinaire antérieure (point 128).

Référence à: Cour 8 juillet 1965. Fonzi/Commissionde la CEEA. 27/64 et 30/64. Rec. p. 615. 639

Il ressort du dossier que le requérant avait déjà fait l'objet de deux sanctions disciplinaires pour des faits comparables à ceux du cas d'espèce, à savoir pour une note manquant de la plus élémentaire courtoisie vis-à-vis d'un supérieur, et pour des écrits dont les termes avaient été considérés comme injurieux et diffamatoires à l'égard de la Cour des comptes, de ses membres et de ses agents. Contre cette dernière décision, le requérant a introduit devant le Tribunal un recours qui a donné lieu à l'arrêt du 26 novembre 1991, Williams/Cour des comptes, précité, lequel a entièrement confirmé la sanction imposée au requérant. La circonstance que les faits à l'origine du présent litige se situent dans le cadre d'une campagne électorale, tandis que, dans les précédentes procédures disciplinaires, les faits imputés au requérant s'inscrivaient dans un cadre différent, n'est pas de nature à infirmer l'appréciation portée par l'AIPN sur le caractère récidiviste du comportement du requérant. Au surplus, les notes qui se trouvaient à l'origine de la sanction disciplinaire qui a fait l'objet de l'arrêt du 26 novembre 1991, Williams/Cour des comptes, précité, et les tracts en raison desquels la sanction de la révocation a été prononcée à l'égard du requérant ont été qualifiés comme contenant des propos injurieux et diffamatoires à l'égard des membres de la Cour des comptes (points 129 à 131).

Enfin, il y a lieu de relever que l'avis du conseil de discipline du 10 juillet 1992 considérait que l'existence de sanctions disciplinaires antérieures pour des écrits jugés discourtois, calomnieux ou diffamatoires constituait une circonstance aggravante. Le Tribunal estime donc que la défenderesse était habilitée à prendre en considération comme circonstance aggravante le fait que le requérant avait déjà fait l'objet de deux sanctions disciplinaires pour des faits comparables à ceux de l'espèce. Dès lors, le grief du requérant doit être rejeté (points 132 à 134).

Au vu de tout ce qui précède, le Tribunal considère qu'aucun élément ne permet de conclure que la sanction infligée soit disproportionnée par rapport au comportement reproché ainsi qu'aux circonstances aggravantes retenues à juste titre par l'AIPN.

Il en découle également que la décision attaquée contient une motivation appropriée en ce qu'elle précise de façon claire les faits retenus à la charge du requérant ainsi que les éléments d'appréciation qui ont amené l'AIPN à adopter la sanction de la révocation. Par conséquent, il y a lieu de rejeter le moyen et de rejeter la demande en annulation comme non fondée (points 135 à 138).

Sur les autres demandes

Quant à la demande visant à ce que le requérant soit réintégré dans toutes ses fonctions, le Tribunal rappelle que le juge communautaire ne saurait, sans empiéter sur les prérogatives de l'autorité administrative, adresser des injonctions à une institution communautaire. Cette demande doit, dès lors, être rejetée comme irrecevable (point 139).

Référence à: Tribunal 10 avril 1992. Bollenűorff/Parlement, T-15/91. Rec. p. II-1679. point 57

Étant donné que la demande en annulation n'est pas fondée, les autres demandes formulées pour le cas où la décision de révocation serait annulée deviennent sans objet. Dès lors, le recours doit être rejeté dans son ensemble (points 140 et 141).

Dispositif:

Le recours est rejeté.

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