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Document 61997CJ0310

Arrêt de la Cour du 14 septembre 1999.
Commission des Communautés européennes contre AssiDomän Kraft Products AB, Iggesunds Bruk AB, Korsnäs AB, MoDo Paper AB, Södra Cell AB, Stora Kopparbergs Bergslags AB et Svenska Cellulosa AB.
Pourvoi - Effets d'un arrêt d'annulation à l'égard des tiers.
Affaire C-310/97 P.

Recueil de jurisprudence 1999 I-05363

ECLI identifier: ECLI:EU:C:1999:407

61997J0310

Arrêt de la Cour du 14 septembre 1999. - Commission des Communautés européennes contre AssiDomän Kraft Products AB, Iggesunds Bruk AB, Korsnäs AB, MoDo Paper AB, Södra Cell AB, Stora Kopparbergs Bergslags AB et Svenska Cellulosa AB. - Pourvoi - Effets d'un arrêt d'annulation à l'égard des tiers. - Affaire C-310/97 P.

Recueil de jurisprudence 1999 page I-05363


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés


1 Recours en annulation - Arrêt d'annulation - Portée - Obligation de réexaminer une décision semblable à l'acte annulé mais n'ayant pas fait l'objet d'un recours - Absence

(Traité CE, art. 176 (devenu art. 233 CE))

2 Recours en annulation - Délais - Décision non attaquée dans les délais - Sécurité juridique - Obligation de réexamen pesant sur l'institution en cas d'annulation de décisions similaires - Absence

(Traité CE, art. 173 (devenu, après modification, art. 230 CE))

Sommaire


1 Si l'article 176 du traité (devenu article 233 CE) impose à l'institution dont un acte a été annulé par le juge communautaire d'éviter que tout acte destiné à remplacer l'acte annulé soit entaché des mêmes irrégularités que celles identifiées dans l'arrêt d'annulation, en revanche, il n'implique pas qu'elle doive, à la demande de destinataires de décisions identiques ou similaires n'ayant pas eux-mêmes introduit un recours, réexaminer lesdites décisions prétendument affectées de la même irrégularité.

En effet, la portée d'un arrêt d'annulation est limité à un double titre:

- d'une part, le juge communautaire de l'excès de pouvoir ne pouvant statuer ultra petita, l'annulation qu'il prononce ne saurait excéder celle sollicitée par le requérant;

- d'autre part, si l'autorité absolue dont jouit un arrêt d'annulation d'une juridiction communautaire s'attache tant au dispositif de l'arrêt qu'aux motifs qui en constituent le soutien nécessaire, elle ne peut entraîner l'annulation d'un acte non déféré à la censure du juge communautaire qui serait entaché de la même illégalité.

2 Une décision qui n'a pas été attaquée par le destinataire dans les délais prévus à l'article 173 du traité (devenu, après modification, article 230 CE) devient définitive à son égard. Les délais de recours visent à garantir la sécurité juridique, en évitant la remise en cause indéfinie des actes communautaires entraînant des effets de droit. Le principe de la sécurité juridique s'oppose à ce que, dans une hypothèse où plusieurs décisions individuelles similaires infligeant des amendes ont été adoptées dans le cadre d'une procédure commune et où certains destinataires seulement en ont poursuivi et obtenu l'annulation en justice, l'institution dont elles émanent doive, à la demande d'autres destinataires, réexaminer, à la lumière des motifs de l'arrêt d'annulation, la légalité des décisions non attaquées et apprécier si, sur la base de cet examen, il y a lieu de procéder à un remboursement des amendes versées.

Parties


Dans l'affaire C-310/97 P,

Commission des Communautés européennes, représentée par M. W. Wils, membre du service juridique, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. C. Gómez de la Cruz, membre du même service, Centre Wagner, Kirchberg,

partie requérante,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l'arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes (deuxième chambre élargie) du 10 juillet 1997, AssiDomän Kraft Products e.a./Commission (T-227/95, Rec. p. II-1185), et tendant à l'annulation de cet arrêt,

les autres parties à la procédure étant:

AssiDomän Kraft Products AB, établie à Stockholm (Suède),

Iggesunds Bruk AB, établie à Örnsköldsvik (Suède),

Korsnäs AB, établie à Gävle (Suède),

MoDo Paper AB, établie à Örnsköldsvik (Suède),

Södra Cell AB, établie à Växjö (Suède),

Stora Kopparbergs Bergslags AB, établie à Falun (Suède),

Svenska Cellulosa AB, établie à Sundsvall (Suède),

représentées par M. J. E. Pheasant, solicitor, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Mes Loesch et Wolter, 11, rue Goethe,

parties demanderesses en première instance,

LA COUR,

composée de MM. G. C. Rodríguez Iglesias, président, P. J. G. Kapteyn, J.-P. Puissochet, G. Hirsch et P. Jann, présidents de chambre, J. C. Moitinho de Almeida, C. Gulmann, J. L. Murray, D. A. O. Edward, H. Ragnemalm, L. Sevón, M. Wathelet (rapporteur) et R. Schintgen, juges,

avocat général: M. D. Ruiz-Jarabo Colomer,

greffier: H. A. Rühl, administrateur principal,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l'audience du 8 décembre 1998, au cours de laquelle la Commission a été représentée par M. W. Wils et AssiDomän Kraft Products AB e.a. ont été représentées par MM. J. E. Pheasant et M. Levitt, solicitor,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 28 janvier 1999,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt


1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 4 septembre 1997, la Commission des Communautés européennes a, en vertu de l'article 49 du statut CE de la Cour de justice, formé un pourvoi contre l'arrêt du Tribunal de première instance du 10 juillet 1997, AssiDomän Kraft Products e.a./Commission (T-227/95, Rec. p. II-1185, ci-après l'«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a annulé la décision de la Commission, contenue dans la lettre du 4 octobre 1995 (ci-après la «décision du 4 octobre 1995»), rejetant la demande introduite le 24 novembre 1993 par AssiDomän Kraft Products e.a. tendant à obtenir le réexamen, à la lumière de l'arrêt de la Cour du 31 mars 1993, Ahlström Osakeyhtiö e.a./Commission (C-89/85, C-104/85, C-114/85, C-116/85, C-117/85 et C-125/85 à C-129/85, Rec. p. I-1307, ci-après l'«arrêt pâte de bois»), de la légalité de la décision 85/202/CEE de la Commission, du 19 décembre 1984, relative à une procédure d'application de l'article 85 du traité CEE (IV/29.725 - Pâte de bois) (JO 1985, L 85, p. 1, ci-après la «décision pâte de bois»).

Les faits devant le Tribunal

2 Les faits qui sont à l'origine du pourvoi, tels qu'ils résultent de l'arrêt attaqué, sont les suivants.

3 Par la décision pâte de bois, la Commission a constaté qu'un certain nombre des 43 destinataires de cette décision avaient enfreint l'article 85, paragraphe 1, du traité CEE [devenu article 85, paragraphe 1, du traité CE (lui-même devenu article 81, paragraphe 1, CE)], notamment en se concertant sur les prix de la pâte de bois au sulfate blanchie.

4 L'article 1er de la décision pâte de bois énumérait les infractions à l'article 85 retenues par la Commission, les destinataires concernés et les périodes pertinentes.

5 A l'article 1er, paragraphe 1, de cette décision, la Commission a constaté que les producteurs suédois, à l'exception de Billerud-Uddeholm et Uddeholm AB, ainsi que d'autres producteurs finlandais, américains, canadiens et norvégiens s'étaient concertés «sur les prix de la pâte de bois au sulfate blanchie à destination de la Communauté économique européenne» pendant tout ou partie de la période allant de 1975 à 1981. Selon le paragraphe 2 du même article, tous les producteurs suédois avaient commis une infraction à l'article 85 du traité en se concertant sur les prix de transaction effectifs demandés dans la Communauté, tout au moins aux clients établis en Belgique, en France, en Allemagne, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni, pour la pâte de bois au sulfate blanchie.

6 A l'article 3 de la décision pâte de bois, la Commission a infligé des amendes allant de 50 000 à 500 000 écus à presque tous les destinataires de ladite décision, parmi lesquels neuf des destinataires suédois.

7 Ces dernières entreprises ont décidé de ne pas introduire de recours en annulation contre la décision pâte de bois et ont payé les amendes qui leur avaient été infligées. En revanche, 26 autres des 43 destinataires originaires de cette décision ou leurs ayants droit ont formé un recours en annulation au titre de l'article 173 du traité CEE [devenu après modification, article 173 du traité CE (lui-même devenu, après modification, article 230 CE)].

8 Par l'arrêt pâte de bois, la Cour a annulé l'article 1er, paragraphes 1 et 2, de la décision pâte de bois, constatant des infractions à l'article 85, paragraphe 1, du traité. Elle a, ensuite, supprimé ou réduit les amendes infligées aux entreprises qui avaient introduit les recours.

9 La partie pertinente du dispositif de l'arrêt pâte de bois est rédigée dans les termes suivants:

«1) L'article 1er, paragraphe 1, de la décision 85/202/CEE de la Commission, du 19 décembre 1984, relative à une procédure d'infraction à l'article 85 du traité, est annulé.

2) L'article 1er, paragraphe 2, de la décision précitée est annulé.

...

7) Les amendes infligées aux requérantes sont supprimées, à l'exception de celle qui concerne la Finncell et à l'exception de celles infligées à Canfor, à MacMillan, à St Anne et à Westar qui sont réduites à 20 000 écus.

...»

10 Par lettre du 24 novembre 1993, AssiDomän Kraft Products e.a., qui n'avaient pas introduit de recours en annulation à l'encontre de la décision pâte de bois, ont demandé à la Commission de réexaminer leur situation juridique à la lumière de l'arrêt pâte de bois, même si elles n'étaient pas destinataires dudit arrêt, et de rembourser à chacune d'elles la quotité des amendes versées qui excédait 20 000 écus, c'est-à-dire la somme retenue par la Cour à la charge de certaines requérantes en raison d'infractions dont la constatation n'avait pas été invalidée. Elles soutenaient notamment qu'elles se trouvaient dans la même situation que les autres producteurs en ce qui concerne les points 1 et 2 du dispositif de l'arrêt pâte de bois et que l'infirmation par la Cour du constat de la Commission selon lequel les destinataires de la décision pâte de bois s'étaient concertés sur les prix de la pâte de bois au sulfate blanchie ainsi que sur ceux des transactions dans la Communauté devait également leur être appliquée.

11 Après un échange de correspondances au cours duquel les entreprises suédoises et la Commission ont exposé de manière détaillée leurs positions sur la possibilité d'étendre le bénéfice de l'arrêt pâte de bois aux destinataires de la décision pâte de bois qui ne l'avaient pas contestée dans les délais, le membre de la Commission en charge des affaires de concurrence a, par lettre du 4 octobre 1995, refusé de donner suite à la demande de remboursement des entreprises dans les termes suivants:

«`I do not see any possibility to accept your request. Article 3 of the decision imposed a fine on each of the producers on an individual basis. Consequently, in point 7 of the operative part of its judgment, the Court annuled or reduced the fines imposed on each of the undertakings who were applicants before it. In the absence of an application of annulment on behalf of your clients, the Court did not and indeed could not annul the parts of Article 3 imposing a fine on them. It follows that the obligation of the Commission to comply with the judgment of the Court has been fulfilled in its entirety by the Commission reimbursing the fines paid by the successfull applicants. As the judgment does not affect the decision with regard to your clients, the Commission was neither obliged nor indeed entitled to reimburse the fines paid by your clients.

As your clients' payment is based on a decision which still stands with regard to them, and which is binding not only on your clients but also on the Commission, your request for reimbursement cannot be granted.'

[`Je ne vois aucune possibilité de faire suite à votre demande. L'article 3 de la décision infligeait une amende à chacun des producteurs sur une base individuelle. C'est pourquoi, au point 7 du dispositif de son arrêt, la Cour a supprimé ou réduit les amendes infligées à chacune des entreprises requérantes dans les affaires dont elle était saisie. En l'absence d'un recours en annulation au nom de vos clientes, la Cour n'a pas annulé - elle ne pouvait d'ailleurs pas le faire - les parties de l'article 3 qui leur imposaient des amendes. Par conséquent, la Commission a intégralement satisfait à son obligation de se conformer à l'arrêt de la Cour lorsqu'elle a remboursé les amendes versées par les requérantes ayant obtenu gain de cause. Étant donné que l'arrêt n'affecte pas la décision dans la mesure où elle concerne vos clientes, la Commission n'était ni obligée, ni même autorisée à rembourser les amendes payées par celles-ci.

Comme le paiement effectué par vos clientes est fondé sur une décision qui est toujours valable en ce qui les concerne, et qui a toujours force contraignante non seulement pour elles, mais aussi pour la Commission, votre demande de remboursement ne saurait être satisfaite.']»

12 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 15 décembre 1995, les défenderesses au pourvoi ont introduit un recours en annulation contre la décision de la Commission du 4 octobre 1995.

Le recours devant le Tribunal

13 Les défenderesses au pourvoi ont soulevé un moyen unique, tiré de ce que, par sa décision du 4 octobre 1995, la Commission avait méconnu les conséquences juridiques qui découlent de l'arrêt pâte de bois.

14 Dans la première branche, elles ont fait valoir que la Commission avait méconnu le principe du droit communautaire selon lequel un arrêt d'annulation a pour effet de rendre l'acte attaqué nul et non avenu, erga omnes et ex tunc.

15 Dans la seconde branche, les défenderesses au pourvoi ont soutenu que la Commission avait violé l'article 176, paragraphe 1, du traité CE (devenu article 233, paragraphe 1, CE) aux termes duquel «L'institution ou les institutions dont émane l'acte annulé, ou dont l'abstention a été déclarée contraire au présent traité, sont tenues de prendre les mesures que comporte l'exécution de l'arrêt de la Cour de justice».

16 Selon les défenderesses au pourvoi, cette disposition obligeait la Commission à prendre des mesures à l'égard non seulement des parties au litige, mais aussi d'autres justiciables. En conséquence, la Commission devait réexaminer les cas similaires à la lumière de l'arrêt pâte de bois, et notamment des motifs de celui-ci. A cet égard, les défenderesses au pourvoi se prévalaient de l'arrêt du 26 avril 1988, Asteris e.a./Commission (97/86, 193/86, 99/86 et 215/86, Rec. p. 2181).

L'arrêt attaqué

17 Le Tribunal a rejeté la première branche du moyen.

18 Il a tout d'abord considéré, aux points 56 et 57, que, bien que rédigée et publiée sous la forme d'une seule décision, la décision pâte de bois devait s'analyser comme un faisceau de décisions individuelles constatant à l'égard de chacun des destinataires la ou les infractions retenues à sa charge et lui infligeant, le cas échéant, une amende, ainsi que cela était, en outre, étayé par le libellé de son dispositif et notamment des articles 1er et 3.

19 Le Tribunal a indiqué, au point 58, que, dès lors qu'un destinataire n'a pas introduit, au titre de l'article 173 du traité CE, un recours en annulation à l'encontre de la décision pâte de bois en tant qu'elle le concerne, cette décision reste valable et contraignante dans tous ses éléments à son égard (voir, en ce sens, arrêt du 9 mars 1994, TWD Textilwerke Deggendorf, C-188/92, Rec. p. I-833, point 13).

20 Il a ajouté, au point 60 de l'arrêt attaqué, que le juge communautaire ne peut, dans le cadre d'un recours en annulation, statuer que sur l'objet du litige qui lui a été déféré par les parties, en sorte qu'une décision telle que la décision pâte de bois ne pouvait être annulée qu'en ce qui concerne les destinataires ayant introduit un recours devant le juge communautaire.

21 Le Tribunal a, dès lors, au point 61, interprété les points 1 et 2 du dispositif de l'arrêt pâte de bois en ce sens que les deux premiers paragraphes de l'article 1er de la décision pâte de bois n'étaient annulés que dans la mesure où ils concernaient les parties ayant obtenu gain de cause devant la Cour. Il a estimé que cette appréciation était corroborée par le point 7 du dispositif de l'arrêt pâte de bois, selon lequel seules les «amendes infligées aux requérantes» étaient supprimées ou réduites.

22 En revanche, le Tribunal a accueilli la seconde branche du moyen.

23 D'abord, il a estimé, au point 69, que le libellé de l'article 176 du traité n'excluait pas que les conséquences à tirer d'un arrêt d'annulation excèdent le cercle des justiciables ayant introduit le recours.

24 A cet égard, le Tribunal s'est fondé, au point 70, sur l'arrêt du 22 mars 1961, Snupat/Haute Autorité (42/59 et 49/59, Rec. p. 99, 159 à 161).

25 Le Tribunal a estimé, aux points 71 et 72, que cette jurisprudence était transposable au cas d'espèce, compte tenu de trois circonstances.

26 Premièrement, les décisions individuelles annulées par la Cour et celles qui n'ont pas été contestées en justice ont été prises à l'issue de la même procédure administrative.

27 Deuxièmement, les défenderesses au pourvoi s'étaient vu infliger des amendes pour de prétendues infractions à l'article 85 du traité dont l'établissement à l'égard d'autres destinataires de l'acte, qui avaient introduit un recours au titre de l'article 173 du traité, a été infirmé par l'arrêt pâte de bois.

28 Troisièmement, les décisions individuelles prises à l'égard des défenderesses au pourvoi se fondaient sur les mêmes constatations de fait et les mêmes analyses économiques et juridiques que celles qui avaient été invalidées par l'arrêt pâte de bois.

29 Se référant au principe de légalité, le Tribunal a estimé, au point 72, que, dans de telles circonstances, l'institution concernée pouvait être tenue, en vertu de l'article 176 du traité, d'examiner, sur la base d'une demande introduite dans un délai raisonnable, s'il y avait lieu pour elle de prendre également des mesures à l'égard des destinataires de l'acte annulé qui n'avaient pas formé un recours en annulation.

30 Le Tribunal a ensuite indiqué, au point 73, qu'il convenait de déterminer les obligations découlant de l'arrêt pâte de bois et de rechercher, à la lumière des principes précédemment énoncés, dans quelle mesure cet arrêt faisait obligation à la Commission de réexaminer la situation juridique des destinataires suédois au regard de la décision pâte de bois, en sorte qu'une analyse du dispositif et des motifs s'imposait.

31 A cet égard, il a rappelé, au point 74, que la Commission était tenue de respecter non seulement le dispositif de l'arrêt, mais également les motifs le sous-tendant, ceux-ci identifiant la disposition exacte considérée comme illégale et faisant apparaître les raisons exactes de l'illégalité constatée dans le dispositif (arrêt Asteris e.a./Commission, précité, point 27).

32 Relevant que, à supposer que certains documents «puissent fournir le fondement qui permettrait de justifier à l'encontre de certains des destinataires suédois tout ou partie des constatations du dispositif de la décision pâte de bois (voir, à cet égard, les conclusions de l'avocat général M. Darmon sous l'arrêt du 31 mars 1993, points 464 à 476), il n'en reste pas moins que la Cour a invalidé la preuve principale invoquée par la Commission à l'encontre de tous les destinataires de la décision pâte de bois pour établir l'existence d'une concertation sur les prix et donc d'une infraction commise à l'article 85 du traité», le Tribunal en a déduit, au point 84, que, sur ce point, l'arrêt pâte de bois était clairement susceptible d'affecter les constatations faites à l'égard des destinataires suédois.

33 Dès lors, le Tribunal a considéré, au point 85, que la Commission était, en vertu de l'article 176 du traité et du principe de bonne administration, tenue de réexaminer, à la lumière des motifs de l'arrêt pâte de bois, la légalité de la décision pâte de bois pour autant qu'elle visait les destinataires suédois et d'apprécier si, sur la base d'un tel examen, il y avait lieu de procéder à un remboursement des amendes versées.

34 Le Tribunal a en outre considéré, aux points 86 et 87, que l'arrêt TWD Textilwerke Deggendorf, précité, ne s'opposait pas à cette solution, étant donné que celle-ci n'était pas susceptible de conférer aux défenderesses au pourvoi la faculté de contourner les délais de recours et, par conséquent, le caractère définitif que revêt à leur égard la décision pâte de bois. A la différence de l'affaire TWD Textilwerke Deggendorf, précitée, dans laquelle l'entreprise en question avait tenté d'invoquer, dans le cadre d'une procédure préjudicielle, l'illégalité d'une décision qu'elle n'avait pas attaquée dans le délai prévu à l'article 173 du traité, le contrôle juridictionnel exercé en l'espèce n'avait pas pour objet la décision initiale, à savoir la décision pâte de bois, mais une nouvelle décision prise en application de l'article 176 du traité. Le recours introduit contre celle-ci était donc recevable.

35 Le Tribunal a considéré, au point 92, que, si la Commission devait conclure, sur la base d'un réexamen de la décision pâte de bois à la lumière des motifs de l'arrêt pâte de bois, que certaines constatations d'infractions à l'article 85 du traité retenues à l'encontre des destinataires suédois étaient entachées d'une illégalité, elle était autorisée à procéder à un remboursement des amendes payées au titre de ces constatations. Dans ce cas de figure, la Commission était également tenue, en vertu des principes de légalité et de bonne administration, et sous peine de priver l'article 176 du traité de tout effet utile, de rembourser ces amendes, celles-ci étant dépourvues de base juridique.

36 La décision de la Commission du 4 octobre 1995 étant entachée d'une erreur de droit dans la mesure où il en ressortait que la Commission n'était ni obligée ni même autorisée à rembourser les amendes versées par les défenderesses au pourvoi, le Tribunal l'a annulée.

Le pourvoi

37 A l'appui de son pourvoi, la Commission invoque trois moyens, respectivement tirés de la violation de l'article 176 du traité, de la méconnaissance des articles 173 du traité et 189 du traité CE (devenu article 249 CE) ainsi que d'une contradiction de motifs qui entacherait l'arrêt attaqué.

38 Par son premier moyen, la Commission fait valoir que le Tribunal a retenu une conception trop large des mesures que comporte l'exécution d'un arrêt de la Cour au sens de l'article 176 du traité, en lui imposant de réexaminer la situation et de rembourser les amendes versées par les destinataires d'une décision qui ne l'ont pas contestée en justice dans les délais.

39 Comme le Tribunal l'a lui-même souligné au point 56 de l'arrêt attaqué, une décision telle que la décision pâte de bois, «bien que rédigée et publiée sous la forme d'une seule décision, doit s'analyser comme un faisceau de décisions individuelles constatant à l'égard de chacune des entreprises destinataires la ou les infraction(s) retenue(s) à sa charge et lui infligeant, le cas échéant, une amende». Aux termes du point 60 de l'arrêt attaqué, une telle décision «ne peut être annulée qu'en ce qui concerne les destinataires ayant obtenu gain de cause dans leurs recours devant le juge communautaire» et, selon le point 58, elle reste valable et contraignante à l'égard des destinataires n'ayant pas introduit de recours en annulation.

40 Il s'ensuivrait nécessairement que «les mesures que comporte l'exécution de l'arrêt de la Cour de justice», au sens de l'article 176 du traité, consistent à rembourser les amendes infligées aux seuls destinataires qui ont obtenu gain de cause devant le juge communautaire. La Commission ne serait pas tenue au surplus de réexaminer les décisions à l'égard des destinataires qui n'ont pas introduit de recours en annulation, puisque ces décisions ne sont pas concernées par l'arrêt de la Cour.

41 Au demeurant, toute autre interprétation de l'article 176 violerait le principe d'égalité, les défenderesses au pourvoi bénéficiant alors d'un avantage indu par rapport aux entreprises qui, contrairement à elles, ont pris le risque, notamment financier, d'introduire un recours en annulation. La Commission souligne à cet égard que, «si elles n'avaient pas eu gain de cause, les défenderesses au pourvoi ne leur auraient certainement pas proposé de partager leurs dépens; maintenant qu'elles ont gagné, elles veulent un billet gratuit sur le parcours payé par d'autres».

42 Par son deuxième moyen, la Commission reproche au Tribunal d'avoir violé l'article 173 du traité à un double titre ainsi que l'article 189 du même traité.

43 Se référant à l'arrêt TWD Textilwerke Deggendorf, précité, elle rappelle, d'une part, qu'une décision qui n'a pas été attaquée par le destinataire dans le délai prévu à l'article 173 du traité devient définitive à son égard.

44 Or, l'arrêt attaqué permettrait au destinataire d'une décision qui lui fait grief et qu'il n'a pas contestée dans les délais de la remettre en question après plusieurs années, à la suite d'un arrêt annulant une décision similaire qui avait été prise à l'issue d'une procédure commune. Le délai de deux mois fixé à l'article 173 du traité serait dès lors vidé de sa substance.

45 D'autre part, l'arrêt attaqué méconnaîtrait le principe selon lequel nul ne peut intenter une action en justice pour le compte d'autrui, implicitement consacré à l'article 173 du traité. Celui-ci prévoit, en effet, qu'une personne physique ou morale ne peut former un recours que contre les décisions dont elle est le destinataire ou qui la concernent directement et individuellement.

46 Enfin, l'arrêt attaqué violerait l'article 189 du traité dans la mesure où il méconnaîtrait le caractère individuel des décisions. Tandis que le règlement produit des effets juridiques à l'égard non seulement des parties devant la Cour, mais également de toutes les personnes auxquelles ce règlement est applicable, il n'en irait pas de même d'une décision, qui est un acte administratif individuel. Si un destinataire conteste une décision qui lui est adressée et obtient son annulation, celle-ci n'affecte que la situation juridique de ce destinataire.

47 Par son troisième moyen, la Commission fait valoir que le raisonnement exposé aux points 55 à 63 de l'arrêt attaqué est contredit par celui énoncé aux points 64 à 95.

48 Selon elle, il est contradictoire de soutenir, d'une part, que les décisions infligeant des amendes aux destinataires suédois n'ont pas été annulées par l'arrêt pâte de bois, de sorte qu'elles demeurent valides et contraignantes, et, d'autre part, que, à la suite du prononcé de cet arrêt, ces décisions sont dépourvues de base juridique, de sorte que ses destinataires doivent être remboursés.

Appréciation de la Cour

49 Le pourvoi soulève en substance la question de savoir si, lorsque plusieurs décisions individuelles similaires infligeant des amendes ont été adoptées dans le cadre d'une procédure commune et que certains destinataires seulement en ont poursuivi et obtenu l'annulation en justice, l'institution dont elles émanent doit, à la demande d'autres destinataires, réexaminer, à la lumière des motifs de l'arrêt d'annulation, la légalité des décisions non attaquées et apprécier si, sur la base d'un tel examen, il y a lieu de procéder à un remboursement des amendes versées.

50 Il y a lieu de souligner tout d'abord que l'article 176 du traité, seule disposition invoquée devant le Tribunal par les défenderesses au pourvoi et qui sous-tend l'arrêt attaqué, n'oblige l'institution dont émane l'acte annulé qu'à prendre les mesures que comporte l'exécution de l'arrêt d'annulation.

51 Or, la portée de celui-ci est limitée à un double titre.

52 D'une part, le juge communautaire de l'excès de pouvoir ne pouvant statuer ultra petita (voir arrêts du 14 décembre 1962, Meroni/Haute-Autorité, 46/59 et 47/59, Rec. p. 783, 801, et du 28 juin 1972, Jamet/Commission, 37/71, Rec. p. 483, point 12), l'annulation qu'il prononce ne saurait excéder celle sollicitée par le requérant.

53 Dès lors, si un destinataire d'une décision décide d'introduire un recours en annulation, le juge communautaire n'est saisi que des éléments de la décision le concernant. En revanche, ceux concernant d'autres destinataires, qui n'ont pas été attaqués, n'entrent pas dans l'objet du litige que le juge communautaire est appelé à trancher.

54 D'autre part, si l'autorité absolue dont jouit un arrêt d'annulation d'une juridiction communautaire (voir, notamment, arrêts du 21 décembre 1954, France/Haute Autorité, 1/54, Rec. p. 7, 34; Italie/Haute Autorité, 2/54, Rec. p. 73, 104, et du 11 février 1955, Assider/Haute Autorité, 3/54, Rec. p. 123) s'attache tant au dispositif de l'arrêt qu'aux motifs qui en constituent le soutien nécessaire, elle ne peut entraîner l'annulation d'un acte non déféré à la censure du juge communautaire qui serait entaché de la même illégalité.

55 En effet, la prise en considération des motifs qui font apparaître les raisons exactes de l'illégalité constatée par le juge communautaire (voir, notamment, arrêt du 12 novembre 1998, Espagne/Commission, C-415/96, Rec. p. I-6993, point 31) n'a pour objet que de déterminer le sens exact de ce qui a été jugé dans le dispositif. L'autorité d'un motif d'un arrêt d'annulation ne peut s'appliquer au sort de personnes qui n'étaient pas parties au procès et à l'égard desquelles l'arrêt ne peut dès lors avoir décidé quoi que ce soit.

56 Dans ces conditions, si l'article 176 du traité impose à l'institution concernée d'éviter que tout acte destiné à remplacer l'acte annulé soit entaché des mêmes irrégularités que celles identifiées dans l'arrêt d'annulation, en revanche et contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal, aux points 69, 72 et 85, cette disposition n'implique pas qu'elle doive, à la demande des intéressés, réexaminer des décisions identiques ou similaires prétendument affectées de la même irrégularité, adressées à d'autres destinataires que le requérant.

57 Ensuite, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, une décision qui n'a pas été attaquée par le destinataire dans les délais prévus à l'article 173 du traité devient définitive à son égard (voir, notamment, arrêt du 17 novembre 1965, Collotti/Cour de justice, 20/65, Rec. p. 1045, et TWD Textilwerke Deggendorf, précité, point 13).

58 En application de ce principe, la Cour a itérativement jugé qu'un État membre n'était plus fondé, à l'occasion d'un recours en manquement formé par la Commission, à mettre en cause par le biais de l'article 184 du traité CE (devenu article 241 CE) la validité d'une décision qui lui avait été adressée sur le fondement de l'article 93, paragraphe 2, du même traité (devenu article 88, paragraphe 2, CE) lorsqu'il avait laissé s'écouler le délai dans lequel il pouvait introduire un recours en annulation (voir, en ce sens, arrêts du 12 octobre 1978, Commission/Belgique, 156/77, Rec. p. 1881, point 20, et du 10 juin 1993, Commission/Grèce, C-183/91, Rec. p. I-3131, point 10).

59 De même, la Cour a jugé que, si une partie peut agir par le moyen d'une action en responsabilité sans être astreinte par aucun texte à poursuivre l'annulation de l'acte illégal qui lui cause préjudice, elle ne saurait toutefois tourner par ce biais l'irrecevabilité d'une demande d'annulation visant la même illégalité et tendant aux mêmes fins pécuniaires (voir, notamment, arrêts du 12 novembre 1981, Birke/Commission et Conseil, 543/79, Rec. p. 2669, point 28; Bruckner/Commission et Conseil, 799/79, Rec. p. 2697, point 19, et du 26 février 1986, Krohn/Commission, 175/84, Rec. p. 753, point 33).

60 En outre, dans l'arrêt TWD Textilwerke Deggendorf, précité, la Cour a jugé que l'article 173 du traité s'opposait à ce que le bénéficiaire d'une aide d'État, qui était habilité à contester la décision de la Commission déclarant cette aide illicite et incompatible avec le marché commun par la voie du recours en annulation dans le délai prévu à l'article 173, cinquième alinéa, du traité, et qui s'en est abstenu, puisse contester, devant la juridiction nationale, l'exécution de ladite décision en se fondant sur l'illégalité de celle-ci. En effet, décider le contraire reviendrait à lui reconnaître la faculté de contourner le caractère définitif que la décision revêt à son égard après l'expiration des délais de recours.

61 Cette jurisprudence est notamment fondée sur la considération que les délais de recours visent à garantir la sécurité juridique, en évitant la remise en cause indéfinie des actes communautaires entraînant des effets de droit, ainsi que sur les exigences de bonne administration de la justice et d'économie de la procédure.

62 Enfin, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, un arrêt d'annulation de la Cour ou du Tribunal n'est susceptible de constituer un fait nouveau permettant la réouverture des délais de recours qu'à l'égard, d'une part, des parties à la procédure et, d'autre part, des autres personnes directement concernées par l'acte annulé (arrêts du 17 juin 1965, Müller/Conseils CEE, CEEA et CECA, 43/64, Rec. p. 499, 515; du 14 décembre 1965, Pfloeschner/Commission, 52/64, Rec. p. 1211, 1219; du 21 février 1974, Kortner e.a./Conseil, Commission et Parlement, 15/73 à 33/73, 52/73, 53/73, 57/73 à 109/73, 116/73, 117/73, 123/73, 132/73 et 135/73 à 137/73, Rec. p. 177, point 38, et du 8 mars 1988, Brown/Cour de justice, 125/87, Rec. p. 1619, point 13).

63 Le principe de la sécurité juridique, qui sous-tend les solutions rappelées aux points 57 à 62, s'oppose donc à ce que, dans une hypothèse où plusieurs décisions individuelles similaires infligeant des amendes ont été adoptées dans le cadre d'une procédure commune et où certains destinataires seulement ont poursuivi et obtenu l'annulation en justice des décisions les concernant, l'institution dont elles émanent doive, à la demande d'autres destinataires, réexaminer, à la lumière des motifs de l'arrêt d'annulation, la légalité des décisions non attaquées et apprécier si, sur la base de cet examen, il y a lieu de procéder à un remboursement des amendes versées.

64 Les défenderesses au pourvoi considèrent toutefois que le Tribunal a fait une exacte application des principes découlant des arrêts du 22 mars 1961, Snupat/Haute Autorité, et Asteris e.a./Commission, précités.

65 Ces affaires Snupat/Haute Autorité et Asteris e.a./Commission concernaient cependant des situations différentes de celle à l'origine de la présente procédure.

66 Dans l'arrêt du 22 mars 1961, Snupat/Haute Autorité, précité, ce sont des circonstances très particulières qui ont amené la Cour à interpréter de façon extensive les obligations qui incombaient à la Haute Autorité à la suite de l'arrêt du 17 juillet 1959, Snupat/Haute Autorité (32/58 et 33/58, Rec. p. 275).

67 D'une part, la Snupat avait fait un usage systématique des voies de recours qui lui étaient ouvertes, contrairement aux défenderesses au pourvoi qui ont laissé s'écouler le délai de deux mois prévu à l'article 173, cinquième alinéa, du traité. En effet, la Snupat avait d'abord sollicité une dérogation à l'obligation qui lui était faite de cotiser à une caisse de péréquation, en se fondant sur les dérogations qui avaient été accordées par la Haute Autorité à deux autres producteurs, puis avait formé un recours en annulation contre ce refus. Après que la Cour eut rejeté ce recours, par l'arrêt du 17 juillet 1959, Snupat/Haute Autorité, précité, elle a demandé à la Haute Autorité de rapporter avec effet rétroactif les dérogations accordées aux deux autres producteurs, avant d'introduire finalement un nouveau recours devant la Cour contre le refus de la Haute Autorité de faire droit à cette deuxième demande, recours qui a été accueilli.

68 D'autre part, les dérogations accordées aux deux autres producteurs causaient un préjudice direct à la Snupat du fait du système de péréquation qui avait été établi, dans la mesure où elles réduisaient les coûts de production des deux premiers et majoraient ceux de la troisième, compte tenu de la réévaluation de sa cotisation. Il n'en va pas de même du montant des amendes respectivement infligées aux divers destinataires de la décision pâte de bois, l'annulation de certaines d'entre elles n'ayant aucune incidence sur le montant de celles qui n'ont pas été contestées.

69 Ne saurait davantage être invoqué utilement à l'appui de la position des défenderesses au pourvoi l'arrêt Asteris e.a./Commission, précité, dans lequel la Cour a jugé que, à la suite de l'annulation, par un arrêt antérieur, d'un règlement agricole applicable à une campagne de commercialisation déterminée, l'institution concernée avait l'obligation d'éliminer des textes déjà adoptés à la date de ce dernier arrêt et qui régissaient des campagnes postérieures les dispositions ayant le même contenu que celle jugée illégale.

70 Cette affaire concernait, en effet, l'annulation de règlements qui se succédaient dans le temps, en sorte que l'annulation d'un règlement antérieur faisait nécessairement obligation à l'institution dont il émanait de tenir compte, lors de l'élaboration des règlements qui lui étaient postérieurs, de l'arrêt de la Cour.

71 Le Tribunal a dès lors commis une erreur de droit en jugeant que l'article 176 du traité faisait obligation à la Commission de réexaminer, à la demande des intéressés, la légalité de la décision pâte de bois, pour autant qu'elle les concernait, à la lumière des motifs de l'arrêt pâte de bois et d'apprécier si, sur la base d'un tel examen, il y avait lieu de procéder à un remboursement des amendes versées. L'arrêt attaqué doit par conséquent être annulé.

72 Conformément à l'article 54, premier alinéa, deuxième phrase, du statut CE de la Cour de justice, celle-ci, en cas d'annulation de la décision du Tribunal, peut statuer définitivement sur le litige, lorsqu'il est en état d'être jugé. La Cour estime que tel est le cas.

Sur le recours en annulation présenté devant le Tribunal et dirigé contre la décision du 4 octobre 1995

73 Dans leur recours en annulation, les défenderesses au pourvoi ont soulevé un moyen unique, tiré de ce que, par sa décision du 4 octobre 1995, la Commission aurait méconnu les conséquences juridiques qui découlent de l'arrêt pâte de bois.

74 Dans la première branche, elles ont fait valoir que la Commission avait méconnu le principe du droit communautaire selon lequel un arrêt d'annulation a pour effet de rendre l'acte attaqué nul et non avenu, erga omnes et ex tunc.

75 Dans la seconde branche, les défenderesses au pourvoi ont soutenu que la Commission avait violé l'article 176, paragraphe 1, du traité.

76 La première branche du moyen étant non fondée pour les motifs exposés aux points 19, 20, 54 et 55 du présent arrêt et la seconde pour ceux développés aux points 50 à 56 du présent arrêt, il y a lieu de rejeter comme non fondé le recours en annulation introduit le 15 décembre 1995 devant le Tribunal par les défenderesses au pourvoi contre la décision du 4 octobre 1995 rejetant leur demande de réexamen à la lumière de l'arrêt pâte de bois.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

77 Aux termes de l'article 122, paragraphe 1, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi est fondé et que la Cour juge elle-même définitivement le litige, elle statue sur les dépens. Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l'article 118, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s'il est conclu en ce sens.

78 Le pourvoi étant fondé et le recours introduit par les défenderesses au pourvoi étant non fondé, il convient de décider que les défenderesses au pourvoi supporteront l'intégralité des dépens exposés devant le Tribunal et la Cour.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR

déclare et arrête:

1) L'arrêt du Tribunal de première instance du 10 juillet 1997, AssiDomän Kraft Products e.a./Commission (T-227/95), est annulé.

2) Le recours en annulation introduit le 15 décembre 1995 par AssiDomän Kraft Products AB e.a. devant le Tribunal est rejeté.

3) AssiDomän Kraft Products AB e.a. supporteront l'intégralité des dépens exposés devant le Tribunal et la Cour.

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