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Document 52021IP0282

    Résolution du Parlement européen du 10 juin 2021 sur le conflit d’intérêts impliquant le Premier ministre de la République tchèque (2021/2671(RSP))

    JO C 67 du 8.2.2022, p. 56–63 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

    8.2.2022   

    FR

    Journal officiel de l'Union européenne

    C 67/56


    P9_TA(2021)0282

    Le conflit d’intérêts du Premier ministre de la République tchèque

    Résolution du Parlement européen du 10 juin 2021 sur le conflit d’intérêts impliquant le Premier ministre de la République tchèque (2021/2671(RSP))

    (2022/C 67/04)

    Le Parlement européen,

    vu les articles 310 et 325 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

    vu l’article 61 du règlement (UE, Euratom) 2018/1046 du Parlement européen et du Conseil du 18 juillet 2018 relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union (1) (ci-après le «règlement financier»),

    vu les orientations de la Commission relatives à la prévention et à la gestion des conflits d’intérêts en vertu du règlement financier (2),

    vu ses précédentes décisions et résolutions sur la décharge octroyée à la Commission pour les exercices 2014, 2015, 2016, 2017, 2018 et 2019,

    vu sa résolution du 13 décembre 2018 sur les conflits d’intérêts et la protection du budget de l’Union européenne en République tchèque (3) et sa résolution du 19 juin 2020 sur la réouverture de l’enquête à l’encontre du Premier ministre de la République tchèque pour utilisation abusive des fonds européens et conflits d’intérêts potentiels (4),

    vu les missions d’information effectuées en République tchèque par la commission du contrôle budgétaire du 26 au 27 mars 2014 et du 26 au 28 février 2020,

    vu le rapport final de novembre 2019 sur l’audit du fonctionnement des systèmes de gestion et de contrôle mis en place pour éviter les conflits d’intérêts en Tchéquie, réalisé par la direction générale de la politique régionale et urbaine (REGIO) et la direction générale de l’emploi, de l’inclusion et des affaires sociales (EMPL) de la Commission, qui a été publié le 23 avril 2021,

    vu le règlement (UE, Euratom) 2020/2092 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2020 relatif à un régime général de conditionnalité pour la protection du budget de l’Union (5),

    vu le rapport 2020 de la Commission sur l’état de droit, en particulier le chapitre consacré à la situation de l’état de droit en Tchéquie (SWD(2020)0302),

    vu le rapport d’évaluation de quatrième cycle sur la conformité portant sur la République tchèque, élaboré par le Groupe d’États contre la corruption (GRECO) et adopté lors de la 84e réunion plénière du GRECO en décembre 2019,

    vu le rapport 2020 sur la Tchéquie du 26 février 2020 (SWD(2020)0502) accompagnant la communication de la Commission sur le semestre européen 2020: évaluation des progrès concernant les réformes structurelles, la prévention et la correction des déséquilibres macroéconomiques, et résultats des bilans approfondis au titre du règlement (UE) no 1176/2011 (COM(2020)0150),

    vu l’article 132, paragraphe 2, de son règlement intérieur,

    vu la proposition de résolution de la commission du contrôle budgétaire,

    A.

    considérant que les articles 61 et 63 du règlement financier, l’article 24 de la directive 2014/24/UE sur les règles de passation des marchés visant à éviter les conflits d’intérêts, les articles 144 et 145 du règlement (UE) no 1303/2013 portant dispositions communes pour les fonds en gestion partagée, la jurisprudence de la Cour de justice et la loi tchèque no 159/2006 sur les conflits d’intérêts, telle que modifiée le 29 novembre 2016, fixent des obligations spécifiques et prévoient des instruments permettant de remédier efficacement aux situations de conflit d’intérêts;

    B.

    considérant qu’Agrofert est un conglomérat fondé et établi par Andrej Babiš, Premier ministre tchèque, qui est composé de plus de 230 entreprises; considérant que M. Babiš s’est révélé être l’un des propriétaires effectifs de la société Agrofert qui contrôle le groupe Agrofert, lequel possède notamment un certain nombre de médias tchèques majeurs, au moyen des fonds fiduciaires AB Private Trust I et AB Private Trust II, dont il est également le bénéficiaire effectif;

    C.

    considérant qu’en janvier et en février 2019, plusieurs services de la Commission (DG REGIO/DG EMPL, et DG AGRI en tant que DG associée) ont réalisé un audit coordonné complet sur l’application du droit de l’Union et du droit national; qu’un audit en cours de la commission AGRI examine les conflits d’intérêts présumés dans la mise en œuvre de la politique agricole commune en Tchéquie;

    D.

    considérant qu’en avril 2021, la Commission a publié une version dûment expurgée du rapport d’audit final sur la mise en œuvre juridique des Fonds ESI tel que vérifié par la DG EMPL et la DG REGIO; que le deuxième rapport d’audit de la DG AGRI n’a toujours pas été publié;

    E.

    considérant que le rapport d’audit publié fait état de graves lacunes dans le système de gestion et de contrôle (6) en République tchèque, ainsi que de déficiences auxquelles il convient de remédier par des corrections financières;

    F.

    considérant que, dans son rapport d’audit, la DG REGIO a fait état de trois subventions accordées au titre du Fonds européen de développement régional qui contreviennent au droit tchèque ainsi qu’au règlement de l’Union portant dispositions communes;

    G.

    considérant que l’enquête judiciaire sur le Premier ministre tchèque Andrej Babiš, ouverte à la suite du rapport de l’OLAF sur une utilisation irrégulière des subventions de l’Union destinées aux petites entreprises, initialement clôturée puis rouverte, et qui avait fait l’objet de la résolution du Parlement du 19 juin 2020, est toujours en cours;

    H.

    considérant qu’un an plus tard, la Commission n’a toujours pas fourni une réponse détaillée à la demande du Parlement de quantifier le montant total des subventions reçues par les entités du groupe Agrofert;

    I.

    considérant qu’à la suite des résolutions du Parlement de décembre 2018 et de juin 2020 sur le conflit d’intérêts impliquant Andrej Babiš, et plus de deux ans après le début des audits de la Commission, la situation concernant le conflit d’intérêts impliquant le Premier ministre tchèque n’est toujours pas réglée;

    J.

    considérant que les États membres ne peuvent assurer une bonne gestion financière que si les pouvoirs publics se conforment à la législation, tant nationale que de l’Union, et que si les agissements criminels occasionnés par des cas de conflit d’intérêts qui n’ont pas été correctement traités donnent effectivement lieu à des enquêtes et des poursuites de la part des services répressifs;

    K.

    considérant qu’en vertu de l’article 3, point b), du règlement (UE, Euratom) 2020/2092, le fait de ne pas veiller à l’absence de conflits d’intérêts peut être indicatif de violations des principes de l’État de droit;

    L.

    considérant que l’existence de mesures et de règles détaillées sur la prévention et la gestion des conflits d’intérêts et des conflits d’intérêts perçus comme tels est un élément essentiel de la bonne gouvernance et de la bonne gestion financière;

    M.

    considérant qu’en février 2020, la mission de la commission du contrôle budgétaire a révélé des limitations préoccupantes du cadre juridique qui entravent le fonctionnement efficace et effectif de la Cour des comptes de la République tchèque en l’empêchant de contrôler la régularité et l’exécution des dépenses publiques aux niveaux régional et local ou d’effectuer des contrôles sur place auprès des bénéficiaires finaux;

    1.   

    se félicite de la publication, en réponse aux demandes répétées du Parlement, du rapport d’audit final de la DG REGIO et de la DG EMPL sur le fonctionnement des systèmes de gestion et de contrôle mis en place pour éviter les conflits d’intérêts en Tchéquie, qui confirme l’existence d’un conflit d’intérêts persistant impliquant le Premier ministre M. Babiš à l’égard du conglomérat Agrofert et soutient la position du Parlement exprimée dans des résolutions et des rapports de décharge antérieurs;

    2.   

    se félicite du fait que la DG REGIO et la DG EMPL reconnaissent que l’intérêt public à la transparence et à l’information sur cette situation exceptionnelle sont des motifs raisonnables de publication; regrette néanmoins que les conclusions n’aient été publiées qu’en avril 2021, alors que le rapport d’audit final a été envoyé aux autorités tchèques en novembre 2019 et que la Commission a reçu des réponses en mai 2020; demande instamment la DG AGRI d’accélérer sa procédure d’audit et le suivi y afférent, et de publier son rapport d’audit final dans les meilleurs délais; demande qu’une attention particulière soit accordée aux paiements effectués aux entreprises détenues directement ou indirectement par M. Babiš ou par d’autres membres du gouvernement tchèque;

    3.   

    estime regrettable que les procédures d’audit et les procédures contradictoires, ainsi que les procédures relatives à l’application d’une correction financière, s’étendent actuellement sur plusieurs années; prie instamment la Commission de réviser les règles relatives aux procédures d’audit et de correction financière afin qu’elles permettent d’obtenir plus rapidement des conclusions et le recouvrement des fonds indûment versés par l’Union; demande une nouvelle fois à la Commission de publier tous les documents relatifs à l’affaire du conflit d’intérêts impliquant le Premier ministre tchèque;

    4.   

    se dit profondément préoccupé par les conclusions du rapport d’audit, qui indiquent:

    que les Fonds ESI ont été indûment octroyés à des entités du groupe Agrofert,

    que le Premier ministre est le bénéficiaire effectif d’Agrofert Holding et, depuis février 2017, des fonds fiduciaires AB Private Trust I et AB Private Trust II, qu’il contrôle, en ayant un intérêt économique direct dans la réussite d’Agrofert;

    que M. Babiš a participé activement à l’exécution du budget de l’Union en République tchèque, et qu’il a été en mesure d’exercer une influence sur des organes tels que le Conseil pour les Fonds ESI et l’autorité nationale de coordination, tout en prenant part aux décisions concernant le groupe Agrofert;

    que les projets identifiés ont été attribués en violation de l’article 4, point c), de la loi tchèque révisée sur les conflits d’intérêts, ainsi que du règlement financier de l’Union.

    qu’au cours de la période auditée, l’exercice impartial et objectif des fonctions de M. Babiš a été compromis, en sa qualité de Premier ministre, de président du Conseil pour les Fonds ESI, de ministre des Finances et de vice-premier ministre chargé de l’économie;

    5.   

    relève que le 1er juin 2021, la loi tchèque no 37/2021 sur l’enregistrement des bénéficiaires effectifs a finalement transposé en droit national la 5e directive antiblanchiment, qui requiert la mise en place de registres accessibles au public pour les sociétés, les fiducies et autres constructions juridiques; rappelle que le délai de transposition de cette directive était arrivé à expiration le 10 janvier 2020; critique vivement le fait que la Tchéquie ait transposé la 5e directive antiblanchiment avec un si grand retard; relève que le premier ministre Babiš est inscrit au registre des détenteurs tchèque comme «détenteur réel indirect» d’Agrofert depuis le 1er juin 2021; critique vivement la déclaration publiée par le ministère tchèque de la Justice, selon laquelle Agrofert peut continuer à bénéficier de subventions en dépit du fait qu’Andrej Babiš soit répertorié comme bénéficiaire effectif d’Agrofert en Tchéquie;

    6.   

    insiste sur le fait qu’un conflit d’intérêts au plus haut niveau du gouvernement d’un État membre, désormais confirmé par la publication, le 23 avril 2021, du rapport final de la Commission sur l’audit du fonctionnement des systèmes de gestion et de contrôle mis en place pour éviter les conflits d’intérêts en République tchèque, ne peut être toléré et que pour y remédier pleinement, la Tchéquie doit:

    a)

    prendre des mesures garantissant que le Premier ministre n’a plus d’intérêt économique ou d’autres intérêts en lien avec le groupe Agrofert, qui relèvent du champ d’application de l’article 61 du règlement financier de l’Union ou de la loi tchèque sur les conflits d’intérêts; ou

    b)

    veiller à ce que les entités commerciales placées sous le contrôle de M. Babiš cessent de recevoir des financements provenant de fonds de l’Union, des subventions publiques ou des fonds distribués par tous les niveaux des pouvoirs publics dans l’ensemble de l’Union; ou

    c)

    s’abstenir totalement de participer à tout processus décisionnel de l’Union susceptible de concerner directement ou indirectement les intérêts du groupe Agrofert; souligne, cependant, qu’à la lumière des fonctions et des pouvoirs du Premier ministre et des membres de son gouvernement, il semble peu probable qu’une telle mesure puisse résoudre correctement le conflit d’intérêts dans la pratique si les personnes en question continuent d’exercer leurs fonctions publiques, et que la démission du mandat public constitue donc une manière plus adéquate de remédier pleinement au conflit d’intérêts;

    7.   

    se félicite de l’annonce selon laquelle le Parquet européen mènera une enquête impartiale et factuelle sur le conflit d'intérêts; prend acte de la déclaration publiée par le parquet compétent selon laquelle le dossier «remplit les conditions de compétence obligatoire du Paquet européen nouvellement institué au titre du règlement applicable de l'Union européenne, auquel il doit être transmis sans retard»;

    8.   

    regrette que les constatations d’audit confirment l’existence de graves défaillances systémiques dans le fonctionnement du système de gestion et de contrôle, en particulier dans la détection de conflits d’intérêts; déplore que l’inefficacité des contrôles par recoupements et l’opacité des processus et des structures nuisent à la fiabilité de toute prévention et détection des conflits d’intérêts en République tchèque;

    9.   

    se dit profondément préoccupé par le fait que, même après l’entrée en vigueur des articles 61 et 63 du règlement financier en 2018, les systèmes de gestion et de contrôle en matière de prévention des conflits d’intérêts comportent toujours des lacunes et que les autorités tchèques n’ont pris que quelques mesures qui ne suffisent pas à garantir le respect des règles;

    10.   

    déplore les tentatives alléguées du gouvernement tchèque de légaliser le conflit d’intérêts impliquant le Premier ministre M. Babiš au moyen d’une loi, proposée au début de la crise de la COVID-19 en mars 2020, plutôt que de résoudre le conflit d’intérêts même;

    11.   

    attend des autorités nationales qu’elles mettent en œuvre toutes les recommandations édictées, notamment dans le but d’améliorer le système de gestion et de contrôle ainsi que de vérifier toutes les subventions octroyées après le 9 février 2017 susceptibles d’enfreindre la loi sur les conflits d’intérêts;

    12.   

    demande à la Commission d’informer le Parlement sur la mise en œuvre par le gouvernement tchèque des recommandations de l’audit, en particulier en ce qui concerne l’examen de tous les fonds octroyés au groupe Agrofert qui ne faisaient pas partie de l’échantillon d’audit;

    13.   

    se dit profondément préoccupé par les lacunes du cadre réglementaire général, lesquelles rendent difficile l’identification systématique des bénéficiaires effectifs des entités qui reçoivent des fonds de l’Union; rappelle que la Commission a confirmé avoir effectué des paiements au titre de la PAC en faveur d’entreprises appartenant au groupe Agrofert, ainsi qu’à d’autres entreprises basées dans plusieurs autres États membres dont le bénéficiaire effectif est le Premier ministre tchèque, mais qu’elle n’est pas en mesure d’identifier de façon exhaustive tous les opérateurs économiques qui en ont bénéficié; insiste sur le fait que la Commission devrait fournir à l’autorité de décharge un aperçu complet et fiable de tous les paiements effectués au bénéfice du groupe Agrofert et d’entreprises ayant le même bénéficiaire effectif dans tous les États membres pour les exercices 2018 et 2019; invite la Commission à inclure également des informations sur l’exercice 2020; estime, au vu de ce qui précède, qu’il est urgent que la Commission élabore, en coopération avec les agences nationales, un format standardisé et publiquement accessible mentionnant les bénéficiaires finaux des versements au titre de la PAC;

    14.   

    prend acte de la correction apportée récemment au registre du commerce des bénéficiaires effectifs («Transparenzregister»), qui fait désormais figurer le Premier ministre tchèque au nombre des bénéficiaires et actionnaires d’une filiale d’Agrofert en Allemagne; rappelle que M. Babiš figure sur la liste des six personnes actives exerçant une influence ou un contrôle significatif sur les fiduciaires d’une fiducie liée à la filiale d’Agrofert dénommée GreenChem Solutions Ltd, basée au Royaume-Uni; invite tous les États membres dans lesquels des filiales d’Agrofert exercent des activités à revoir le registre des bénéficiaires effectifs à cet égard;

    15.   

    déplore que les entités du groupe Agrofert continuent à recevoir des paiements au titre du premier pilier de la PAC; rappelle que la loi tchèque sur les conflits d’intérêts interdit d’accorder des subventions, y compris des paiements directs au titre de la PAC, à une entreprise dont un fonctionnaire ou une entité contrôlée par un fonctionnaire détient une participation égale ou supérieure à 25 %; insiste sur les doutes sérieux quant à l’indépendance des autorités tchèques qui décident de l’admissibilité et du contrôle des paiements agricoles directs; recense des indicateurs de risque dans le fait que les entreprises faisant partie du groupe Agrofert continuent à recevoir ces fonds en violation de la loi tchèque sur les conflits d’intérêts;

    16.   

    constate que la législation tchèque sur les conflits d’intérêts en vigueur depuis 2006 présente de graves lacunes et des insuffisances importantes dans sa mise en œuvre, ce qui a permis la mise en place et le développement de profondes structures oligarchiques; déplore que la mission de la commission du contrôle budgétaire du Parlement ait révélé, en février 2020, de graves lacunes dans les systèmes visant à prévenir, à détecter et à résoudre les conflits d’intérêts en République tchèque;

    17.   

    s’étonne des approches apparemment différentes de la DG REGIO, de la DG EMPL et de la DG AGRI à l’égard de violations similaires de la loi tchèque sur les conflits d’intérêts ainsi que de l’article 61 du règlement financier, observe qu’alors que la DG REGIO et la DG EMPL estiment qu’une violation de la loi tchèque sur les conflits d’intérêts constitue une violation de l’article 61, paragraphe 2, du règlement financier, la DG AGRI ne semble pas appliquer la même logique; souligne, en outre, que les contrôles d’admissibilité des paiements fondés sur des droits (paiements directs) comportent également un élément de décision dans la vérification; souligne que cette décision de vérification peut être influencée par un conflit d’intérêts; demande à la Commission d’apporter au Parlement une explication juridique détaillée des différents effets des violations de la législation nationale sur les conflits d’intérêts ainsi que de l’article 61 du règlement financier, et notamment d’expliquer plus en détail comment elle veille à ce que les décisions de vérification relatives aux paiements fondés sur des droits n’ont pas été influencées par un conflit d’intérêts;

    18.   

    s’étonne de l’évaluation de la Commission selon laquelle le ministre tchèque de l’agriculture ne se trouve pas dans une situation de conflit d’intérêts bien que les membres de sa famille reçoivent des subventions agricoles substantielles, alors qu’il est responsable de la programmation et de la mise en œuvre des programmes agricoles dans le cadre de la PAC; demande à la Commission de partager cette évaluation avec le Parlement; invite la Commission à veiller à l’interprétation et à l’application uniformes de l’article 61 du règlement financier;

    19.   

    demande à la Commission d’évaluer l’efficacité de l’article 61 du règlement financier pour prévenir ou révéler et résoudre efficacement les cas de conflits d’intérêts lorsqu’ils se produisent et, le cas échéant, de faire des propositions dans le cadre de la prochaine révision du règlement financier afin de renforcer davantage encore les règles régissant les conflits d’intérêts, en accordant une attention particulière aux définitions, au champ d’application (à savoir, qui il couvre), à l’identification des fonctions ou activités sensibles, aux «situations qui peuvent, objectivement, être perçues comme un conflit d’intérêts» et aux obligations en cas de conflit d’intérêts; rappelle que l’article 61 du règlement financier ne fait pas de distinction entre les différents types de paiements provenant du budget de l’Union et que la simple possibilité d’user d’une position découlant du conflit d’intérêts constitue un indicateur suffisant;

    20.   

    s’inquiète de l’interprétation restrictive de l’article 61 du règlement financier par l’organisme payeur agricole tchèque (le Fonds d’intervention agricole de l’État), qui estime qu’il ne s’applique pas aux membres du gouvernement; rappelle les préoccupations du Parlement à l’égard d’un certain nombre de lacunes constatées dans la gestion de l’organisme payeur tchèque pour l’agriculture, en particulier l’absence d’indépendance du conseil de surveillance, comme l’a souligné le Parlement dans son rapport sur sa mission en République tchèque en février 2020 (7); demande à la Commission d’ouvrir une procédure d’audit afin de garantir la bonne gestion de l’agence;

    21.   

    considère que les orientations de la Commission sur la prévention et la gestion des conflits d’intérêts au titre du règlement financier constituent un instrument important pour renforcer davantage encore les mesures visant à protéger le budget de l’Union contre la fraude et les irrégularités; demande à la Commission de mener un travail de sensibilisation et de promouvoir une interprétation ainsi qu’une application uniformes des règles relatives à la prévention des conflits d’intérêts, y compris les paiements directs au titre du premier pilier de la PAC, et de contrôler l’indépendance du fonctionnement des organismes payeurs ainsi que des structures d’audit à cet égard; invite la Commission à communiquer aux autorités des États membres concernés d’autres exemples pratiques, suggestions et recommandations pour les aider à éviter les conflits d’intérêts;

    22.   

    rappelle que les citoyens et les contribuables tchèques ne devraient subir aucune conséquence, y compris financière, découlant du conflit d’intérêts du Premier ministre M. Babiš, et que les entreprises appartenant au groupe Agrofert devraient rembourser toutes les subventions qu’elles ont reçues illégalement du budget de l’Union ou du budget national de la République tchèque; prie instamment les autorités tchèques de récupérer toutes les subventions qui ont été indûment versées à toute entité du groupe Agrofert;

    23.   

    insiste pour qu’il soit mis un terme au versement de fonds, provenant du budget de l’Union ou du budget national de la République tchèque, aux entreprises contrôlées en dernier ressort par le Premier ministre M. Babiš ou par des membres du gouvernement tchèque, et ce jusqu’à ce que les cas de conflit d’intérêts aient été entièrement résolus;

    24.   

    exhorte le gouvernement tchèque à améliorer l’équité globale de la distribution des subventions de l’Union et à mettre en place un système qui garantira une transparence pleine et entière de la distribution des fonds de l’Union; constate avec inquiétude que, selon les informations dont dispose la Commission, aucune décision n’a été prise pour modifier le système tchèque de paiements directs depuis sa mise en place en 2014 et pour créer un mécanisme efficace de lutte contre les conflits d’intérêts;

    25.   

    rappelle que, dans le cadre du projet «Nid de cigogne», Agrofert a créé artificiellement une entreprise de taille moyenne, qui est restée sous son contrôle, afin d’obtenir des fonds destinés aux petites et moyennes entreprises pour un montant total d’environ 2 millions d’euros; juge inacceptable qu’après avoir conclu à de graves irrégularités dans le cadre des enquêtes sur le «Nid de cigogne», les autorités tchèques aient retiré au projet tout financement de l’Union dans le but de le financer sur le budget national, en faisant ainsi porter la charge financière sur les contribuables tchèques; estime que cette situation tend à confirmer que les autorités tchèques ne sont pas parvenues à convaincre la Commission de la légalité et de la régularité de ces paiements; déplore que l’OLAF n’ait dès lors plus le droit d’enquêter et que seul le procureur national soit en mesure d’engager des poursuites; est vivement préoccupé par le fait que le procureur tchèque ait provisoirement clôturé la procédure, puis rouvert l’affaire par la suite; invite les autorités tchèques à informer les institutions européennes des résultats de l’enquête sur le «Nid de cigogne» dans les meilleurs délais;

    26.   

    observe que la police tchèque a recommandé pour la deuxième fois que le premier ministre Babiš soit inculpé en raison d’allégations de fraude se montant à environ 2 millions d’euros dans le cadre des enquêtes «Stork Nest»; observe que le procureur chargé du dossier, Jaroslav Šaroch, qui avait décidé à l’origine, en septembre 2019, de classer le dossier, est chargé de décider des chefs d’accusation; rappelle que le procureur général Pavel Zeman, qui a aujourd’hui démissionné, avait ordonné, le 4 décembre 2019, la réouverture du dossier, en faisant état de lacunes dans l’évaluation juridique du procureur Šaroch;

    27.   

    est profondément préoccupé par la pression politique exercée à l’encontre des médias et des institutions indépendants en République tchèque, pression qu’a récemment mise en évidence la démission du procureur général, qui a déclaré que sa démission était due à la pression qu’avait exercée le ministre de la justice;

    28.   

    demande à la Commission d’examiner les vulnérabilités du système judiciaire tchèque et de prendre les mesures nécessaires; demande à la Commission d’étudier et d’analyser attentivement si d’autres affaires impliquant des membres du gouvernement tchèque ont été abandonnées ou clôturées prématurément, potentiellement à la suite de pressions; invite la Commission à tenir le Parlement informé sans retard injustifié de ses constatations et conclusions;

    29.   

    est préoccupé par les informations selon lesquelles le gouvernement tchèque aurait déjà versé plus de 150 millions de CZK à Agrofert sur le budget national tchèque au cours de la période auditée (8); étant donné que cette situation peut constituer une aide d’État illégale et mettre à mal la concurrence loyale dans le marché unique de l’Union, ainsi que son intégrité, demande à la Commission d’enquêter de manière approfondie sur ces cas de financement provenant du budget national et d’informer le Parlement des conclusions de son enquête ainsi que des mesures prises;

    30.   

    condamne la pratique consistant à retirer tout financement aux projets de l’Union afin de les financer sur le budget national lorsque la Commission ou la Cour des comptes européenne ont détecté des irrégularités à cet égard; demande à la Commission de suivre de près ces affaires et d’en procéder à une analyse juridique minutieuse, en accordant une attention particulière aux éventuelles violations des règles relatives aux aides d’État;

    31.   

    déplore les commentaires formulés en public par le Premier ministre M. Babiš en réaction à la publication du rapport d’audit final de la DG REGIO et de la DG EMPL (9); juge inacceptable que les auditeurs de la Commission soient traités de «mafieux» par un membre du Conseil européen;

    32.   

    condamne les propos diffamatoires que le Premier ministre M. Babiš à tenus à l’encontre des organes de presse qui font état de son conflit d’intérêts et des activités de ses entreprises; rappelle à cet égard ses commentaires négatifs sur le quotidien Deník Referendum au Parlement tchèque en novembre 2020;

    33.   

    est profondément préoccupé par le faible niveau de respect des recommandations du GRECO que contient le rapport d’évaluation du quatrième cycle — une seule une des quatorze recommandations a été mise en œuvre de manière satisfaisante, sept recommandations ont été partiellement mises en œuvre et les six recommandations restantes n’ont pas été mises en œuvre du tout;

    34.   

    demande instamment à tous les États membres d’interdire les paiements de subventions de plusieurs centaines de millions d’euros à des personnes physiques au titre du nouveau cadre financier pluriannuel (CFP) et de se rapprocher de la position du Parlement, qui consiste à garantir une transparence totale et la possibilité d’agréger les paiements ainsi que les procédures de contrôle et d’audit numériques par-delà les frontières des États membres dans les programmes relevant de la gestion partagée;

    35.   

    invite le Conseil, dans le cadre des négociations en cours sur le règlement relatif à la PAC, à tenir dûment compte de l’efficacité budgétaire et d’une répartition plus équitable et plus transparente des paiements directs, à se rapprocher de la position du Parlement, à savoir de la fixation de plafonds spécifiques par personne physique pour les deux piliers de la PAC, ainsi que de la dégressivité, du plafonnement obligatoire et des paiements redistributifs, pour faire en sorte que les citoyens de l’Union perçoivent de manière positive la PAC dans son ensemble; souligne que les négociations au Conseil ne doivent pas être affectées par des conflits d’intérêts et qu’aucun ministre, membre ou représentant d’un gouvernement national ne doit participer à des négociations lorsqu’il est impliqué dans un conflit d’intérêts; juge inacceptable que le Premier ministre M. Babiš ait pris part aux négociations sur la PAC et se soit battu contre le plafonnement des subventions alors qu’il est le bénéficiaire effectif du groupe Agrofert; insiste sur le fait que les plafonds par personne physique pour les premier et deuxième piliers de la PAC doivent être uniformément applicables, y compris aux membres des gouvernements nationaux, afin de les empêcher de négocier au sein du Conseil à leur avantage;

    36.   

    désapprouve fermement les structures oligarchiques qui font appel aux fonds agricoles et de cohésion de l’Union et permettent ainsi à une petite minorité de bénéficiaires de recevoir la grande majorité des fonds de l’Union; invite la Commission, le Conseil et le Conseil européen à empêcher la promotion de ces structures, qui réduisent la compétitivité des petites et moyennes exploitations agricoles ainsi que des exploitations familiales, alors qu’elles devraient être les principaux bénéficiaires de la PAC;

    37.   

    se déclare vivement préoccupé par le fait que le Premier ministre M. Babiš se trouve en situation de conflit d’intérêts lorsqu’il participe à la prise de décision sur l’alignement de la PAC sur les objectifs généraux de la politique climatique européenne, étant donné que les intérêts commerciaux du groupe Agrofert pourraient primer sur l’intérêt public, qui sont de soutenir une agriculture plus durable et de limiter les effets négatifs du changement climatique;

    38.   

    estime que l’inaction du gouvernement tchèque face aux conflits d’intérêts du Premier ministre M. Babiš a une incidence négative sur le fonctionnement des autorités de l’État tchèque, y compris de celles chargées de faire respecter la loi et les systèmes et des systèmes de gestion et de contrôle, ainsi que sur le respect de la législation de l’Union;

    39.   

    demande à la Commission d’évaluer la situation décrite plus haut, ainsi que l’influence du Premier ministre M. Babiš sur les médias tchèques et sur le système judiciaire, afin de recenser les violations de l’état de droit et, si ses conclusions viennent à confirmer cet état de fait, d’activer en temps utile le mécanisme de conditionnalité pour la protection du budget de l’Union;

    40.   

    est toujours préoccupé par la concentration croissante de la propriété des médias entre les mains de quelques oligarques (10);

    41.   

    constate que des enquêtes et des audits sont en cours, tant au niveau national qu’au niveau européen, sur d’éventuels conflits d’intérêts et sur l’utilisation des fonds de l’Union; s’inquiète des préoccupations exprimées dans le rapport 2020 de la Commission sur l’état de droit, selon lequel les actions engagées contre les affaires de corruption à haut niveau sont insuffisantes et certaines lacunes ont été recensées dans les cadres d’intégrité applicables aux membres du parlement;

    42.   

    demande au Conseil et au Conseil européen de prendre toutes les mesures nécessaires et appropriées pour prévenir les conflits d’intérêts, conformément à l’article 61, paragraphe 1, du règlement financier; se dit préoccupé par le fait que le Premier ministre tchèque a participé et participe encore activement aux négociations sur le budget et les programmes de l’Union alors qu’il est toujours en situation de conflit d’intérêts; demande au Conseil et au Conseil européen d’expliquer au Parlement comment ils prévoient de tenir compte de la participation du Premier ministre M. Babiš au processus décisionnel relatif à la PAC ainsi qu’au budget de l’Union européenne, et d’y réagir, à la suite des rapports d’audit de la Commission;

    43.   

    estime que le cas du conflit d’intérêts du Premier ministre M. Babiš confirme également la nécessité urgente de mettre en place, pour les finances de l’Union, un système numérique de signalement et de contrôle qui soit interopérable; déplore vivement que les colégislateurs ne soient pas parvenus à un accord satisfaisant sur les dispositions établissant l’interopérabilité des systèmes informatiques, qui permettrait d’établir des rapports normalisés et uniformes et favoriserait la coopération; demande à tous les acteurs concernés de s’efforcer de trouver des solutions tout aussi efficaces afin d’améliorer l’obligation de rendre des comptes;

    44.   

    demande à la Commission de veiller à ce que les dispositions du règlement financier relatives aux conflits d’intérêts, y compris dans le cas du conflit d’intérêts du Premier ministre M. Babiš, soient pleinement appliquées dans la mise en œuvre du CFP 2021-2027 et de l’instrument de l’Union européenne pour la relance, pour qu’aucun paiement ne soit effectué en faveur d’entreprises détenues directement ou indirectement par le Premier ministre M. Babiš (11); demande un examen plus approfondi de tout conflit d’intérêts potentiel ainsi que d’autres éléments relatifs à l’état de droit dans les plans de relance nationaux;

    45.   

    fait valoir que les députés au Parlement européen doivent être en mesure de mener leurs travaux sans faire l’objet de menaces et que les gouvernements nationaux sont chargés d’assurer leur protection dans leur pays d’origine;

    46.   

    charge son Président de transmettre la présente résolution à la Commission, au Conseil et au gouvernement ainsi qu’aux deux chambres du parlement de la République tchèque.


    (1)  JO L 193 du 30.7.2018, p. 1.

    (2)  JO C 121 du 9.4.2021, p. 1.

    (3)  JO C 388 du 13.11.2020, p. 157.

    (4)  Textes adoptés de cette date, P9_TA(2020)0164.

    (5)  JO L 433 I du 22.12.2020, p. 1.

    (6)  Le rapport d’audit final a relevé de graves lacunes dans la conception du système de contrôle destiné à éviter les conflits d’intérêts, comme en témoignent les sept infractions à l’article 4, point c, de la loi tchèque sur les conflits d’intérêts et le taux d’erreur élevé de 96,7 % dans l’échantillon audité.

    (7)  Rapport sur la mission d’information de la commission du contrôle budgétaire (CONT) en République tchèque, du 26 au 28 février 2020.

    (8)  iROZHLAS, Penam, Lovochemie, Cerea. Česko vyplatilo Agrofertu podle Bruselu na dotacích neoprávněně 155 milionů, 27 avril 2021.

    (9)  Euractiv, Czech PM slams EU Commission auditors as «mafia», 26 avril 2021.

    (10)  Reporters sans frontières, Czech Republic, https://rsf.org/en/czech-republic (consulté le 2.6.2021).

    (11)  La liste des entreprises et des projets approuvés par le gouvernement tchèque en vue d’un financement au titre du Fonds pour une transition juste comprend plus de 6 milliards de CZK pour Lovochemie, une entreprise qui fait partie du groupe Agrofert, précédemment dirigée par l’actuel ministre tchèque de l’environnement, Richard Brabec.


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