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Document 52016AE0688

Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 768/2005 du Conseil instituant une Agence communautaire de contrôle des pêches» [COM(2015) 669 final — 2015/0308 (COD)], la «Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — Un corps européen de garde-frontières et de garde-côtes et une gestion efficace des frontières extérieures de l’Europe» [COM(2015) 673 final] et la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes et abrogeant le règlement (CE) n° 2007/2004, le règlement (CE) n° 863/2007 et la décision 2005/267/CE du Conseil» [COM(2015) 671 final — 2015/0310 (COD)]

JO C 303 du 19.8.2016, p. 109–115 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

19.8.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 303/109


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 768/2005 du Conseil instituant une Agence communautaire de contrôle des pêches»

[COM(2015) 669 final — 2015/0308 (COD)],

la

«Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — Un corps européen de garde-frontières et de garde-côtes et une gestion efficace des frontières extérieures de l’Europe»

[COM(2015) 673 final]

et la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes et abrogeant le règlement (CE) no 2007/2004, le règlement (CE) no 863/2007 et la décision 2005/267/CE du Conseil»

[COM(2015) 671 final — 2015/0310 (COD)]

(2016/C 303/15)

Rapporteur:

M. Giuseppe IULIANO

Corapporteur:

M. Cristian PÎRVULESCU

Le 21 janvier et le 4 février 2016, respectivement, le Parlement européen et le Conseil ont décidé, conformément à l’article 114 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur les propositions de règlement et la communication suivantes:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 768/2005 du Conseil instituant une Agence communautaire de contrôle des pêches»

[COM(2015) 669 final — 2015/0308 (COD)]

«Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — Un corps européen de garde-frontières et de garde-côtes et une gestion efficace des frontières extérieures de l’Europe»

[COM(2015) 673 final]

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes et abrogeant le règlement (CE) no 2007/2004, le règlement (CE) no 863/2007 et la décision 2005/267/CE du Conseil»

[COM(2015) 671 final — 2015/0310 (COD)].

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 12 mai 2016.

Lors de sa 517e session plénière des 25 et 26 mai 2016 (séance du 25 mai 2016), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 133 voix pour et 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE se dit globalement favorable aux propositions de modification des règlements avancées par la Commission mais entend formuler un certain nombre d’observations.

1.2

Les fermetures de frontières décrétées par plusieurs États membres sont en train de menacer gravement l’exercice de la libre circulation. Les institutions européennes doivent garantir le bon fonctionnement de Schengen. Lors de sa session plénière du 17 février 2016, le CESE a adopté une importante résolution (1) pour défendre l’espace Schengen, dans laquelle il a exigé du Conseil et des États membres qu’ils garantissent l’exercice de la libre circulation, ainsi que la consolidation et l’élargissement de l’espace Schengen.

1.3

Il convient que les règles de Schengen soient appliquées de la même manière dans tous les États membres; à cette fin, il sera nécessaire d’adopter de nouvelles mesures qui soient juridiquement contraignantes. Cependant, le CESE ne partage pas la proposition de la Commission visant à mettre en place des contrôles systématiques et obligatoires pour les citoyens de l’UE aux frontières extérieures de l’espace Schengen, dans la mesure où cette disposition limite l’exercice d’une des libertés fondamentales.

1.4

Pour garantir un bon fonctionnement de Schengen, il convient que les frontières extérieures, qui sont les frontières communes, soient gérées de manière partagée entre l’UE et les États membres. Le CESE a été la première institution à proposer la création d’un corps européen de garde-frontières.

1.5

La proposition de renforcer le mandat de Frontex en dotant cette agence de nouvelles équipes et d’un contingent d’intervention rapide de 1 500 agents et experts doit s’accompagner d’une amélioration de la transparence en ce qui concerne sa gouvernance, ses actions et sa capacité à rendre des comptes.

1.6

Il y a lieu d’améliorer la collaboration entre l’agence Frontex et les autorités nationales. L’agence doit renforcer le centre d’analyse des risques et elle pourra, à cette fin, déployer des officiers de liaison dans les États membres et disposer d’un mandat qui l’autorise à évaluer la capacité opérationnelle et les ressources disponibles. Il revient à l’UE de s’assurer que les États membres coopèrent aux opérations menées par l’agence aux frontières.

1.7

Le droit de l’agence d’intervenir même si l’État membre concerné ne sollicite pas d’assistance est la mesure la plus sensible figurant dans la proposition de la Commission. Le CESE est d’accord pour que la Commission puisse décider d’une intervention de l’agence aux frontières extérieures, mais seulement dans des situations d’urgence et conformément à une procédure transparente qui prévoit d’informer immédiatement les législateurs européens (Parlement et Conseil).

1.8

Il convient d’améliorer la coordination entre les différentes agences et institutions qui sont compétentes en matière de contrôle des frontières, de surveillance des côtes, de sécurité maritime, de sauvetage en mer, de douanes et de pêche. Toutefois, il faut veiller à ce que ces instances conservent l’intégralité de leurs missions respectives. À cet égard, le CESE préconise que le règlement fasse référence à un «corps européen de garde-frontières» et que l’on supprime la mention «de garde-côtes» (2).

1.9

Il convient de ne pas «militariser» le contrôle des frontières. Le corps de garde-frontières ne doit pas revêtir un caractère militaire mais de police civile.

1.10

Quand des personnes se trouvent en situation de risque pour leur vie ou leur sécurité aux frontières extérieures de l’Union, qu’elles soient maritimes ou terrestres, la première obligation des garde-frontières et des autres instances qui opèrent sur place est de les sauver et de les assister de manière appropriée. Le CESE fait observer qu’au cours des derniers mois, de nombreuses personnes déplacées en raison des conflits voisins ont trouvé la mort sur les côtes de l’UE ou à ses frontières sans que les autorités aient mis en œuvre les opérations de sauvetage et de protection qui s’imposaient.

1.11

Le CESE estime que la proposition de la Commission visant à améliorer la gestion des frontières extérieures gagnerait à être adoptée parallèlement à une refonte du régime d’asile européen commun. La crise actuelle s’explique par l’incapacité de l’UE à mettre en place le régime d’asile européen commun et à accorder une protection appropriée aux centaines de milliers de déplacés et demandeurs d’asile qui se présentent à nos frontières. Certains gouvernements ont rejeté les propositions de la Commission et les décisions du Conseil s’agissant de mettre en place les programmes de relocalisation et de réinstallation et ont refusé de remplir les obligations qui sont les leurs en vertu du traité et du droit international.

1.12

Le CESE souligne qu’en de nombreuses occasions, les autorités chargées des frontières n’ont pas respecté le principe de «non-refoulement» qui apparaît explicitement dans le droit international en matière d’asile et dans le traité. Il préconise, dans le cadre du nouveau système intégré de frontières extérieures, d’améliorer les garanties que les droits de l’homme seront respectés.

1.13

Afin de collaborer avec l’agence pour ce qui concerne la protection des droits fondamentaux, le CESE propose d’avoir un représentant parmi les membres du forum consultatif consacré à ce thème. Il avance également la proposition de renforcer les attributions de l’officier aux droits fondamentaux de sorte qu’il puisse agir de sa propre initiative, ainsi que de mettre en place le mécanisme de recours qui a été proposé par le médiateur européen.

1.14

Le CESE attire l’attention sur la situation d’abandon et d’absence de protection que subissent actuellement, à l’intérieur de l’UE, les milliers de mineurs non accompagnés qui arrivent sur son territoire après avoir été déplacés par des conflits et il suggère à la Commission que des mesures urgentes de protection soient lancées en leur faveur.

2.   Contexte

2.1

Le règlement (CE) no 2007/2004 a créé une Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne (Frontex).

2.2

Le CESE a élaboré un avis (3) sur ce texte, dans lequel il s’est félicité de la mise en place de Frontex, en rappelant qu’il convient de garantir, aux frontières de l’Union, le respect du droit d’asile (principe de non-refoulement) et la protection des droits fondamentaux.

2.3

Par la suite, le règlement (CE) no 863/2007 a institué un mécanisme de création d’«équipes d’intervention rapide aux frontières» (RABIT), modifié le règlement (CE) no 2007/2004 pour ce qui a trait à ce mécanisme et défini les tâches et compétences des agents invités. En vertu de la modification apportée à ce règlement, un État membre a la possibilité de demander que soient dépêchées sur son territoire, dans le cadre de l’agence, des équipes d’intervention rapide aux frontières, qui sont composées d’experts spécialement formés d’autres États membres.

2.4

Le CESE a élaboré un avis (4) où il s’est montré favorable à la mise à jour du règlement. Il a toutefois mis en garde quant à la nécessité de mieux protéger les droits de l’homme et le droit d’asile. Il a également émis un avertissement sur le risque de «militarisation» des activités de surveillance et de contrôle des frontières extérieures.

2.5

La directive 2008/115/CE, connue sous le nom de «directive retour», a établi des normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, «conformément aux droits fondamentaux […] y compris aux obligations en matière de protection des réfugiés et de droits de l’homme».

2.6

La dernière modification apportée à Frontex est intervenue en octobre 2011 et a ouvert la voie à une définition du contrôle des frontières comme responsabilité partagée de l’UE et des États membres et à la mise en place d’une gestion intégrée. Des équipes européennes de garde-frontières ont alors commencé à se constituer mais c’est toujours à un État membre qu’il incombe de solliciter l’assistance de l’agence. Le rôle de Frontex dans les opérations de retour a également été renforcé et des améliorations ont été apportées en ce qui concerne son mandat pour la protection des droits fondamentaux.

3.   Proposition de la Commission — Un corps européen de garde-frontières et de garde-côtes et une gestion efficace des frontières extérieures de l’Europe

3.1

La proposition avancée par la Commission de créer un corps européen de garde-frontières et de garde-côtes fait partie des mesures prévues par l’agenda européen en matière de migration pour renforcer la gestion des frontières extérieures de l’UE et leur sécurité et répond à la nécessité de contrôles de sécurité renforcés aux frontières extérieures de l’UE, conformément à l’appel lancé par les ministres de l’intérieur, le 20 novembre 2015 (5).

3.2

Ce corps regroupera l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes, constituée à partir de Frontex, et les autorités chargées de gérer les frontières au niveau des États membres, qui continueront d’en exercer la gestion quotidienne.

3.3

Le nouveau corps européen de garde-frontières et de garde-côtes sera doté d’une réserve d’intervention rapide constituée de 1 500 agents et experts, pouvant être déployés en moins de trois jours, et d’un stock d’équipements techniques; il disposera d’une fonction de suivi et de surveillance et d’un droit d’intervention, exercera une activité de surveillance côtière et un mandat pour opérer dans les pays tiers, garantira un niveau élevé de sécurité intérieure et jouera un rôle plus décisif en matière de retour. Pour les retours, un document de voyage européen normalisé garantira que les personnes qui y sont soumises soient mieux acceptées par les pays tiers.

3.4

La Commission européenne a également proposé d’autres mesures visant à gérer les frontières extérieures de l’Union et à protéger l’espace Schengen dépourvu de frontières intérieures. Pour renforcer davantage encore la sécurité des citoyens européens, elle propose de mettre en place des contrôles systématiques de toutes les personnes qui pénètrent dans l’espace Schengen ou en sortent, au moyen de la consultation des bases de données pertinentes. Les propositions offriront une contribution pour gérer le flux migratoire de manière plus efficace, améliorer la sécurité intérieure de l’UE et sauvegarder le principe de libre circulation des personnes.

3.5

La Commission propose une modification ciblée du code frontières Schengen en vue d’instaurer des obligations de vérifications systématiques pour les citoyens de l’UE à toutes les frontières extérieures, terrestres, maritimes et aériennes, en ayant recours à la consultation de bases de données telles que le système d’information Schengen, la base de données d’Interpol sur les documents de voyage volés ou perdus, ou encore les systèmes nationaux pertinents. La proposition insiste par ailleurs sur la nécessité de vérifier les données biométriques des passeports des citoyens de l’UE, lorsqu’il existe un doute sur l’authenticité du passeport ou sur la légitimité de son détenteur. Désormais, les contrôles seront également obligatoires à la sortie du territoire de l’Union européenne.

4.   Observations générales

4.1

Lors de la réunion du Forum européen sur la migration (6) qui s’est tenue les 26 et 27 janvier 2015, la société civile, invitée par la Commission et le CESE, a débattu avec les institutions européennes de la situation d’urgence humanitaire en Méditerranée et de l’arrivée de flux de nature composite, constitués d’immigrants économiques et de demandeurs d’asile. Sur la base des conclusions du forum, la Commission a adopté plusieurs initiatives visant à améliorer les politiques en matière d’asile et de frontières. Le CESE déplore toutefois que le Conseil n’ait quant à lui pas tenu compte de ces conclusions. En effet, bien des problèmes qui se posent actuellement auraient pu être évités si leurs recommandations avaient été mises en œuvre.

4.2

La crise actuelle montre de manière éclatante les limites du modèle de gestion des frontières extérieures et l’insuffisance du mandat que Frontex détient aujourd’hui. Dans plusieurs de ses avis (7), le CESE a proposé que les frontières extérieures de l’espace Schengen soient considérées par l’UE comme des frontières communes et qu’à ce titre, leur gestion relève de la responsabilité partagée de l’UE et des États membres.

4.3

Le CESE a été la première institution à proposer la création d’un corps européen de garde-frontières. De même, il a élaboré des propositions (8) pour garantir la protection des droits fondamentaux dans le cadre des contrôles aux frontières et de la politique de retour.

4.4

Le CESE estime que les propositions de la Commission visant à améliorer la gestion des frontières extérieures doivent être adoptées parallèlement à une refonte du régime d’asile européen commun. L’affluence massive de déplacés aux frontières extérieures de certains pays dépasse à présent la capacité d’action de ces États et révèle de manière manifeste que le système de Dublin n’est pas opératoire pour gérer une arrivée en masse de personnes déplacées et de demandeurs d’asile. Il convient que les responsabilités soient partagées et gérées solidairement. Le Comité avance les propositions suivantes:

4.4.1

que l’UE applique le plan de relocalisation d’urgence et mette en place le mécanisme de relocalisation permanente, tels qu’approuvés lors du Conseil européen du 22 septembre 2015,

4.4.2

que l’on renforce les programmes de réinstallation pour le transfert de réfugiés depuis l’extérieur de l’UE et leur établissement dans celle-ci, en coopération avec les pays tiers et le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés,

4.4.3

que l’on lance de nouveaux programmes de relocalisation au sein de l’UE, en attribuant des incitations financières aux États membres qui s’y engagent. Le mécanisme de relocalisation doit être permanent et effectif et se fonder sur une clé de répartition.

4.4.4

Le CESE a déjà fait valoir en d’autres occasions (9) que le système de Dublin doit être modifié et remplacé par un dispositif qui assure davantage de solidarité au sein de l’UE, tienne compte des souhaits des demandeurs d’asile et garantisse une répartition des responsabilités entre les États membres.

4.5

La proposition de la Commission renforce le rôle de l’agence pour ce qui est des opérations de retour. Le Comité rappelle:

4.5.1

que la procédure administrative d’expulsion doit être individuelle et que toute personne qui en fait l’objet doit pouvoir soumettre des observations aux autorités administratives ou judiciaires,

4.5.2

que la charte interdit expressément les expulsions collectives et garantit que «nul ne peut être éloigné, expulsé ou extradé vers un État où il existe un risque sérieux qu’il soit soumis à la peine de mort, à la torture ou à d’autres peines ou traitements inhumains ou dégradants» (principe de non-refoulement).

4.5.3

Le CESE a déjà fait valoir (10) que l’UE ne doit pas considérer la Turquie comme un pays sûr en matière d’asile. Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés et différentes ONG, en affirmant que «les réfugiés ont besoin de protection plutôt que de refoulement» (11), ont relevé que le récent accord entre l’UE et la Turquie ne respecte pas pleinement le droit international en matière d’asile. La décision prise par l’ancienne République yougoslave de Macédoine de fermer ses frontières aux réfugiés constitue également une violation du droit d’asile.

4.6

Le CESE se félicite qu’aient été mis en place, dans le cadre de la réforme du règlement Frontex d’octobre 2011, le forum consultatif sur les droits fondamentaux et le poste d’officier aux droits fondamentaux et que certaines des propositions qu’il avait formulées (12) en faveur d’une protection des droits fondamentaux aux frontières extérieures aient été prises en considération dans la nouvelle proposition de règlement.

5.   Observations particulières

5.1

Le CESE préconise une approche qui soit à la fois intégrée et préventive, mettant l’accent sur l’analyse attentive des données sur la mobilité aux frontières de l’Union et capable de prévoir anticipativement où et quand les autorités nationales pourraient avoir besoin d’assistance. De même, il est nécessaire de mettre au point un ensemble d’orientations et d’indicateurs capables de refléter dans quelle mesure ce système intégré remplit la mission complexe qui lui est assignée. L’expérience du système Schengen et les procédures d’évaluation le concernant sont pertinentes pour construire un mécanisme similaire de gestion des informations et des mesures opérationnelles.

5.2

Pour ce qui concerne les décisions contraignantes de l’agence et son droit à intervenir, le CESE, tout en considérant que ces dispositions sont indispensables, estime qu’il convient que l’UE utilise tous les moyens nécessaires pour s’assurer que les États membres coopèrent à toute opération menée par ladite agence aux frontières. Le CESE est d’accord pour que la Commission puisse décider d’une intervention de l’agence aux frontières extérieures, mais seulement dans des situations d’urgence et conformément à une procédure transparente qui prévoit d’informer immédiatement les législateurs européens (Parlement et Conseil). Il s’agit là d’une dimension essentielle pour la réussite d’une approche intégrée et coordonnée de la gestion des frontières, qui doit s’accompagner d’une amélioration de la transparence et d’une consolidation de sa capacité à rendre des comptes sur sa gouvernance et ses actions.

5.3

Le CESE considère qu’il est nécessaire d’accroître le niveau de coordination entre les nombreuses agences qui détiennent des responsabilités en matière de surveillance des côtes, de contrôle des frontières, de douanes, de sécurité maritime, de recherche et de sauvetage en mer, de protection de l’environnement et de pêche. Il est possible d’éviter les chevauchements et de réaliser des économies, au moins au niveau du budget de l’Union. Toutefois, il faut veiller à ce que les différentes agences et institutions conservent l’intégralité de leurs missions respectives et éviter qu’elles ne soient subordonnées à une superstructure qui aurait pour finalité d’assurer la sécurité.

5.4

Le CESE accueille favorablement la proposition de créer un corps européen de garde-frontières, composé de 1 500 experts (policiers des frontières). Sa taille pourra être modifiée au fil du temps, en fonction des besoins. La rapidité avec laquelle ces garde-frontières seront envoyés dans les zones frontalières et la manière dont ils collaboreront avec leurs homologues sont des facteurs importants.

5.5

Un autre volet essentiel de leur préparation opérationnelle est celui de la formation. Le CESE considère qu’il est nécessaire de former tant les garde-frontières du corps européen que ceux des États membres. L’agence doit assumer un rôle moteur pour la formation et pour le transfert de bonnes pratiques entre les garde-frontières de tous les États membres. Dans le déroulement des programmes de formation, il conviendra d’accorder une attention particulière aux droits fondamentaux, sachant que les garde-frontières sont les premières personnes de contact que rencontrent les réfugiés et les immigrants, lesquels se trouvent pour la plupart dans un état de haute vulnérabilité.

5.6

Il est positif que l’agence participe aux opérations de retour. Étant donné l’attention dont bénéficiera à l’avenir cette politique, il est possible que les ressources de l’agence qui lui seront consacrées soient insuffisantes. Dans la formulation de la communication comme sur le plan opérationnel, il conviendrait également de clarifier les modalités selon lesquelles l’agence participera aux activités de retour, notamment lorsqu’elle lancera des opérations de sa propre initiative. De même, l’agence devra s’assurer qu’elle participe à des opérations de retour qui s’effectuent dans le plein respect des droits fondamentaux des personnes concernées (13).

5.7

L’agence doit coopérer avec les autorités concernées pour garantir des conditions d’accueil appropriées aux personnes soumises à un retour, y compris pour ce qui concerne leur sécurité. Le CESE estime que le respect des droits de l’homme est une condition préalable à la signature des accords de réadmission avec des pays tiers et se refuse à ce que des États membres ou l’UE dans son ensemble signent des conventions de retour avec des pays qui n’ont pas ratifié les principaux instruments internationaux de protection des droits de l’homme ou les ont systématiquement enfreints (14).

5.8

La protection des droits fondamentaux doit constituer une priorité pour l’agence. Ils s’appliquent à tous et non aux seuls citoyens de l’Union. Les demandeurs d’asile et les immigrants sont protégés par la Convention européenne des droits de l’homme et la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (15). Plus spécifiquement, le CESE se dit préoccupé en ce qui concerne le respect des droits fondamentaux dans le cadre des opérations qui ont lieu dans les pays tiers, le principe de non-discrimination lors des opérations de vérification à l’entrée du territoire de l’Union, les expulsions collectives et celles d’immigrants et de demandeurs d’asile vers des pays qui enfreignent les droits de l’homme, ainsi que la protection des personnes particulièrement vulnérables, telles que les femmes et les mineurs non accompagnés.

5.9

Afin d’assurer que la protection des droits fondamentaux bénéficie de l’attention et du soutien qui s’imposent, le CESE se propose d’assister l’agence en étant représenté au sein du forum consultatif sur les droits fondamentaux. Il recommande par ailleurs que l’agence soit ouverte aux évaluations indépendantes de ses procédures et des opérations qu’elle mène. Pour ce qui concerne son organisation interne, il estime que nommer un officier responsable des droits fondamentaux peut suffire, à condition qu’il dispose d’une structure de travail solide, ainsi que de responsabilités et de ressources importantes.

5.10

Le CESE est favorable à la création, qu’il juge nécessaire, d’un nouveau document européen de voyage, destiné aux ressortissants des pays tiers, qui sera utilisé dans les opérations de retour les concernant.

5.11

Le CESE estime que le code Schengen peut être modifié, à condition que soient déployés les efforts qui s’imposent afin que les contrôles appliqués aux citoyens de l’Union, qu’ils ressortissent ou non à l’espace Schengen, n’entravent pas leur mobilité, laquelle constitue une de leurs libertés essentielles. Une généralisation de ces contrôles, effectués avec des moyens technologiques plus ou moins avancés, aboutira à compromettre la viabilité du régime Schengen.

5.12

Le CESE entend réaffirmer qu’une ouverture vers la société civile est nécessaire à tous les niveaux et dans le cadre de toutes les activités. Il rappelle que le rôle de la société civile et des citoyens a été fondamental pour éviter que la situation ne soit encore plus grave du point de vue humanitaire, tant dans les eaux territoriales des États membres que sur leurs territoires respectifs. Il estime que l’assistance octroyée à la société civile est prioritaire, sachant qu’elle s’efforce d’apporter son aide dans des situations extrêmes alors même que ses ressources sont très limitées.

Bruxelles, le 25 mai 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  JO C 133 du 14.4.2016, p. 1.

(2)  JO C 177 du 18.5.2016, p. 57.

(3)  JO C 108 du 30.4.2004, p. 97.

(4)  JO C 44 du 11.2.2011, p. 162.

(5)  http://www.consilium.europa.eu/es/press/press-releases/2015/11/20-jha-conclusions-counter-terrorism.

(6)  http://www.eesc.europa.eu/?i=portal.fr.events-and-activities-european-migration-forum-1

(7)  JO C 451 du 16.12.2004, p. 1, JO C 458 du 19.12.2014, p. 7, JO C 44 du 11.2.2011, p. 162.

(8)  JO C 128 du 18.5.2010, p. 29.

(9)  JO C 451 du 16.12.2014, p. 1.

(10)  JO C 71 du 24.2.2016, p. 82.

(11)  http://www.unhcr.fr/cgi-bin/texis/vtx/search?page=search&docid=56efa45ec&query=position sur l’accord

(12)  Voir note de bas de page no 8.

(13)  L’article 19 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne interdit expressément les expulsions collectives et dispose que nul ne peut être éloigné, expulsé ou extradé vers un État où il existe un risque sérieux qu’il soit soumis à la peine de mort, à la torture ou à d’autres peines ou traitements inhumains ou dégradants.

(14)  Voir note de bas de page no 8.

(15)  Voir note de bas de page no 8.


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