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Document 52004IE0523

    Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Réalités et perspectives pour des technologies environnementales adaptées dans les pays candidats»

    JO C 112 du 30.4.2004, p. 83–91 (ES, DA, DE, EL, EN, FR, IT, NL, PT, FI, SV)

    30.4.2004   

    FR

    Journal officiel de l'Union européenne

    C 112/83


    Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Réalités et perspectives pour des technologies environnementales adaptées dans les pays candidats»

    (2004/C 112/23)

    Le 17 juillet 2003, le Comité économique et social européen, conformément à l'article 29, paragraphe 2 de son Règlement intérieur, a décidé d'élaborer un avis sur le thème suivant: «Réalités et perspectives pour des technologies environnementales dans les pays candidats».

    La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 4 mars 2004 (rapporteur: M. RIBBE).

    Lors de sa 407ème session plénière des 31 mars et 1er avril 2004 (séance du 31 mars 2004), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 80 voix pour, 1 voix contre et 2 abstentions.

    1.   Situation de départ – Aperçu général de la situation en matière de technologies environnementales

    1.1

    La situation de l'environnement en Europe, mais également au-delà des frontières européennes, reste préoccupante. Bien des études et des rapports publics montrent que si beaucoup d'efforts ont déjà été entrepris, par exemple pour purifier l'eau et l'air, et pourtant il reste beaucoup à faire, tant dans les États membres actuels que dans les pays candidats, pour préserver les conditions de vie naturelles de l'homme et le patrimoine naturel européen, se conformer aux réglementations actuelles en matière d'environnement et contribuer au développement durable de l'Europe.

    1.2

    Les technologies environnementales jouent un rôle important dans la solution de certains problèmes écologiques. Consciente de ce rôle, la Commission a élaboré un «Plan d'action de l'Union européenne en faveur des écotechnologies» (1), qui fait l'objet d'un débat avec les institutions concernées et la société civile organisée. Le CESE a accueilli favorablement cette démarche, étant donné qu'au cours des dernières années et des dernières décennies les technologies environnementales (comme les installations d'épuration et de filtrage) ont fait largement progresser la protection de l'environnement. Cela vaut tant pour les installations fixes, comme les installations ou centrales électriques, que pour certaines installations techniques mobiles.

    1.3

    L'établissement et le renforcement des valeurs-limites pour les gaz d'échappement des automobiles sont un exemple du développement constant de nouvelles technologies soucieuses de l'environnement. Toutefois, cet exemple montre également que:

    certains progrès dans le développement et l'introduction de technologies environnementales comme le catalyseur n'interviennent souvent qu'après des discussions politiques houleuses – que l'on se rappelle par exemple la résistance qu'opposa l'industrie automobile à cette occasion. Ces discussions politiques semblent d'ailleurs se répéter actuellement dans le cas des filtres de particules diesel;

    les technologies environnementales ont des limites: alors que notamment les émissions d'oxyde d'azote et de dioxyde de souffre ont pu être réduites de manière déterminante, il n'existe pas globalement de technologies utilisables dans la pratique pour contenir par exemple le CO2 ou les émissions de chlorofluorocarbones (CFC), responsables d'un des plus grands défis politiques environnementaux pour l'avenir, à savoir le changement climatique.

    1.4

    Les technologies environnementales sont devenues avec le temps une composante importante de la politique environnementale. Cependant, lorsque les solutions techniques seules n'apportent pas les succès voulus, des modifications structurelles sont nécessaires. Dans le présent avis, le CESE se limite toutefois à étudier le secteur des technologies environnementales sous différents aspects.

    1.5

    L'importance des technologies environnementales ne se limite toutefois pas à des considérations de politique écologique. La science et l'industrie qui figurent en arrière plan de ces technologies sont devenues entre-temps un facteur économique et un employeur important, avec un chiffre d'affaires qui atteint plus de 183 milliards d'euros en Europe (2). C'est ainsi que la communication publiée par la Commission européenne portant «Élaboration d'un plan d'action en faveur de l'écotechnologie» a déjà été accueillie favorablement par le CESE (3).

    1.6

    L'expérience du passé montre cependant que dans le secteur des technologies environnementales, comme dans beaucoup d'autres secteurs de l'économie, les moyens financiers ne suffisent pas pour mettre en œuvre tous les projets identifiés et reconnus comme nécessaires dans les délais souhaités. C'est la raison pour laquelle de nombreuses mesures de politique environnementale n'aboutissent pas.

    Situation dans les pays candidats

    1.7

    Dans le cadre du présent avis, il n'est ni possible ni souhaitable de formuler une déclaration générale sur l'état et le développement de l'environnement et de la protection de l'environnement dans les pays candidats à l'adhésion. La situation est beaucoup trop complexe pour la résumer en un rapport sur la situation de l'environnement, qu'il soit positif ou négatif. En revanche, il est clair que l'on a pu réduire dans certains cas massivement, au cours des dernières années, les pollutions environnementales directement perceptibles (locales) dans les pays candidats. Par contre, d'autres problèmes écologiques moins perceptibles directement sont apparus récemment (4) (par exemple suite à l'augmentation du transport individuel ou à une agriculture plus intensive). Il est indéniable toutefois que la fermeture d'industries particulièrement polluantes ainsi que l'introduction de technologies respectueuses de l'environnement ont permis entre-temps de réduire considérablement les dangers directs pour la santé que comporte la pollution.

    1.8

    Il reste cependant à fournir des efforts plus que considérables pour remplir les normes environnementales prescrites par le droit européen. Des investissements de l'ordre de 80 à 110 milliards d'euros seront nécessaires afin de mettre en œuvre l'acquis communautaire dans les PECO (5). Toutefois, l'argent fait défaut également dans les pays candidats et les investissements nationaux dans l'environnement sont assurément en concurrence avec les autres missions nationales comme la politique sociale, l'éducation, l'infrastructure, etc. Pour ce qui est des investissements attendus de l'industrie et des particuliers, on note également une certaine frilosité par crainte des erreurs. Aussi s'agira-t-il d'utiliser le plus efficacement possible les moyens financiers disponibles en recherchant des solutions économiques et rentables.

    1.9

    Le présent avis se penchera dès lors sur les technologies environnementales des pays PECO. Les exemples utilisés dans ce contexte proviennent en grande partie de Pologne. D'abord, parce que la Pologne est le plus grand pays candidat, ce qui fait qu'une grande partie des futures ressources communautaires lui seront destinées. En outre, parce que la Pologne présente de façon plus nette que la plupart des autres pays candidats de fortes différences entre régions urbaines et régions rurales, ce qui, comme le montrera cet avis, est particulièrement pertinent pour la question qui nous occupe. De plus, la Pologne sera peut-être le pays candidat le plus exposé à de nouveaux bouleversements dans le secteur industriel. Enfin, la Pologne a été choisie comme exemple parce que le CESE partage avec ce pays une longue expérience de collaboration dans le domaine de l'environnement.

    1.10

    Toutefois les déclarations et les propositions formulées dans le présent avis sont applicables à tous les pays candidats et restent valables pour un bon nombre d'États membres actuels.

    Moyens financiers en faveur de la protection environnementale dans les pays candidats

    1.11

    Ces dernières années, c'est-à-dire dans la perspective de l'élargissement, l'Union européenne s'est déjà engagée dans les pays candidats en contribuant par des subventions financières à des investissements environnementaux. Cela constitue une différence importante – dont il y a lieu de se féliciter – par rapport aux élargissements précédents de l'UE. Par son engagement financier, la Commission souligne l'importance croissante de la protection de l'environnement. Étaient disponibles jusqu'à présent notamment les programmes PHARE, ISPA et, partiellement, SAPARD. À noter toutefois que la Commission constate à chaque reprise les mêmes difficultés dans l'utilisation des crédits.

    1.12

    Au cours de la période 1995-2000, 398,2 millions d'euros ont été dégagés pour l'environnement au titre du programme PHARE et 460,2 millions d'euros au titre du programme ISPA, en grande partie pour des projets liés à l'eau (environ 82,3 % de l'ensemble des moyens), suivis des projets liés au traitement des déchets (15,7 %) et à la lutte contre la pollution atmosphérique (2 %) (6). Au cours des six années de la période considérée, la Pologne a obtenu en tout 233,4 millions d'euros (soit en moyenne environ 40 millions d'euros par an).

    1.13

    En outre, il y a lieu de tenir compte du fait que le programme ISPA n'a démarré qu'en l'an 2000. Depuis cette date, ISPA consacre chaque année quelque 500 millions d'euros à des investissements liés à la protection de l'environnement dans les PECO. La Pologne reçoit entre 30 et 37 % de cette somme.

    1.14

    Par le passé, les aides financières mises à disposition par l'UE ont certainement constitué une aide précieuse pour ces pays mais force est de constater qu'ils doivent apporter eux-mêmes la plus grosse partie des dépenses financières et qu'ils devront continuer à l'avenir. Les moyens PHARES et ISPA ne peuvent couvrir qu'une petite partie des besoins en financement des pays candidats dans le domaine de l'environnement: 1,1 % des besoins globaux dans le secteur de l'eau, 0,75 % des besoins dans le secteur des déchets et seulement 0,03 % dans le secteur de l'air, ainsi que le rappelle la Cour des comptes (7).

    1.15

    Dans le cas de la Pologne, l'aide étrangère globale dans le financement de mesures écologiques n'a représenté généralement, jusqu'en 2000, «que» grosso modo 5 % de l'ensemble des investissements destinés à la protection de l'environnement; les contributions de l'UE n'ont constitué qu'une partie de ces investissements.

    1.16

    Cette situation changera du tout au tout après l'adhésion. D'après le ministère polonais de l'environnement, sur les 7,3 milliards d'euros que la Pologne doit recevoir pour la période 2004-2006, 545 millions seront consacrés à l'environnement. Le fonds de cohésion remplacera le programme ISPA et ne fournira que 7,6 milliards d'euros entre 2004 et 2006. En tout, la Pologne recevra dès lors, à l'avenir, entre 45 et 52 % de ces ressources, soit de 3,4 à 4 milliards d'euros. D'après ce que l'on sait, le Fonds de cohésion interviendra pour moitié dans les investissements liés à l'environnement et pour moitié dans ceux liés aux transports. La Pologne disposera donc à l'avenir, pour la protection de l'environnement, d'une somme totale se situant entre 1,3 et 1,5 milliard d'euros par an.

    1.17

    Jusqu'à présent, l'utilisation des fonds communautaires en vue de protéger l'environnement dans les pays candidats est loin d'avoir été optimale; si à l'avenir les sommes disponibles augmentent, il faudra veiller plus encore à ce que ces sommes considérables soient effectivement affectées à la protection de l'environnement et non à d'illusoires plans de croissance ou à des projets inadaptés, par exemple à l'aide de techniques excessives et trop onéreuses. La Cour des comptes européenne, dans son rapport spécial no 5/2003 sur le financement des projets environnementaux dans les pays candidats, critique notamment le fait qu'à plusieurs reprises, des projets ont été autorisés alors qu'il existait des risques de surcapacité et dès lors d'utilisation non économique des moyens financiers de l'UE, ainsi que des coûts de fonctionnement inutilement élevés. L'un des nombreux exemples cités par le rapport concerne une installation de traitement des eaux usées pour la ville de Szczecin, qui n'est exploitée qu'à 40 %.

    2.   Qu'entend-on par «technologies adaptées» et pourquoi en avons-nous besoin? (exemples)

    2.1

    Selon le CESE, les dites technologies environnementales «adaptées» peuvent jouer un rôle important à cet égard, lorsqu'il s'agit de:

    développer des projets effectifs pour résoudre des problèmes locaux

    économiser des ressources financières si pas à la phase de planification du moins à celle d'investissement ainsi qu'au niveau des dépenses courantes

    créer des emplois au niveau régional et local.

    2.2

    Pour le CESE «adaptées» signifie la nécessité de rechercher, dans chaque cas individuel, des solutions qui ne répondent pas uniquement à des critères de faisabilité ou d'efficacité technique mais tiennent compte, dans une forte mesure, de la dimension locale et de la situation de la population locale.

    2.3

    Le CESE tente ci-après de préciser de ce qu'il entend par cette notion au moyen de quelques exemples:

    2.3.1   Exemple: purification de l'air/efficacité énergétique

    2.3.1.1

    Lorsque la Pologne, à la fin des années 80, a rompu définitivement avec son passé communiste, la protection de l'environnement était extrêmement importante dans le contexte politique. Cela n'a rien d'étonnant, si l'on songe que la population subissait massivement une situation de pollution environnementale extrême provenant principalement des installations industrielles mais aussi du charbon à usage domestique.

    2.3.1.2

    Des études réalisées à Cracovie ont montré comment réduire la pollution par le dioxyde de souffre, néfaste non seulement pour la santé des individus mais aussi pour la préservation des façades de maison de grande valeur culturelle et architecturale. Parmi les premières mesures prévues figurait l'assainissement à grande échelle de deux centrales électriques.

    2.3.1.3

    Des calculs alternatifs élaborés parallèlement avaient également montré qu'avec la même dépense financière que celle requise par l'équipement technique des centrales électriques, on aurait pu obtenir un effet d'économie de dioxyde de souffre deux fois plus élevé si au lieu de procéder à l'assainissement des deux centrales l'on avait supprimé les vieux systèmes de chauffage domestique au charbon et introduit des mesures d'économie d'énergie dans les maisons (isolation, vitrage de protection thermique, etc.).

    2.3.1.4

    De telles mesures auraient eu par ailleurs l'avantage d'offrir aux habitants de meilleures conditions de logement tout en encourageant l'artisanat local et en contribuant par-là même à relancer plus fortement la conjoncture locale. Pourtant, l'assainissement des centrales électriques a été financé, ce qui était sûrement dans l'intérêt de la grande industrie étrangère qui bénéficiait en fin de compte d'une grande partie de la commande.

    2.3.2   Exemple de l'épuration des eaux usées

    2.3.2.1

    La Pologne fournit actuellement des efforts considérables et louables pour améliorer son système d'épuration des eaux usées. Après avoir commencé dans les grandes villes par la construction ou l'assainissement des stations d'épuration, de nombreuses planifications et mesures de construction sont en cours, voire déjà achevées, dans des localités plus petites également.

    2.3.2.2

    Il convient de remarquer que pour les zones rurales et peu peuplées les solutions centrales, qui conviennent incontestablement pour les grandes agglomérations, sont fréquemment moins appropriées, tant pour des raisons techniques que pour des raisons financières. L'on constate pourtant que de telles solutions, conformes «à l'état de la technique» sont envisagées presque sans exception.

    2.3.2.3

    Un exemple à ce sujet nous est donné par la municipalité de Sokoli dans la voïvodie de Podlachie (nord-est de la Pologne): c'est une municipalité étendue (plus de 160 km2) à faible densité de population, composée de plus 29 sections locales qui, d'après les plans, doivent toutes être rattachées à la station d'épuration actuellement en cours de construction dans la municipalité centrale.

    2.3.2.4

    Parallèlement à la construction de ce type d'installation technique, les canaux d'évacuation des eaux usées représentent toujours un des principaux postes d'investissement et d'entretien. Le programme polonais de traitement des eaux usées daté de décembre 2003 précise clairement que seul 1/3 des investissements sont consacrés à la construction ou la modernisation de stations d'épuration, tandis que 2/3 sont consacrés aux canalisations. Dans le cas présent, des conduites de pression (avec les coûteuses stations de pompage correspondantes) seront construites pour transporter les eaux usées vers la station d'épuration centrale. La longueur de ces canaux varie généralement, dans les agglomérations, entre 0,5 et 2 mètres par habitant, alors que dans les zones rurales on tolère dans certaines circonstances une longueur allant de 5 à 10 mètres par habitant. Dans le cas présent, il est question, dans le projet, d'une longueur parfois largement supérieure à 20 mètres, et dans certains cas jusqu'à 40 mètres par habitant, et ce sans inclure dans le calcul les canaux de raccordement vers chaque habitation.

    2.3.2.5

    Les propositions de ces planificateurs en matière d'évacuation des eaux usées ne peuvent aucunement être considérées comme des solutions adaptées à la situation locale. La solution offerte ressemble à s'y méprendre aux planifications erronées dans le secteur des eaux usées, juste après la réunification des deux Allemagnes, qui avaient conduit à l'époque à l'apparition de montants exorbitants pour les taxes sur les eaux usées et ont fini par constituer un désavantage pour le lieu d'implantation. L'on citera également le cas de projets fondés sur des attentes illusoires en matière de croissance, dues à la mauvaise transposition de grandes structures sur des régions rurales.

    2.3.2.6

    La très forte taxation des eaux usées résultant de solutions inappropriées porte doublement atteinte au développement économique des régions concernées: d'une part, l'argent dépensé pour payer ces taxes élevées pourrait servir au développement économique d'autres secteurs, d'autre part, ces taxes élevées peuvent dissuader des secteurs industriels grands consommateurs d'eau de venir s'installer dans les régions en question.

    2.3.2.6.1

    Selon un mouvement fondé en Thuringe et regroupant diverses initiatives citoyennes opposées à des projets coûteux de traitement des eaux usées, les coûts des syndicats intercommunaux chargés de l'approvisionnement en eau et du traitement des eaux usées ont explosé après le financement partiel des investissements par les fonds structurels. C'est ainsi que récemment, la commune de Friedrichsroda a demandé à ses habitants une cotisation de plus de 10.000 euros, dans un cas de 99.000 euros, pour être raccordés à l'approvisionnement en eau et au retraitement des eaux usées (8). Les citoyens, dont on avait jadis suscité l'intérêt pour les plans d'épuration à coup de gros investissements réagissent à présent avec indignation aux coûts d'entretien, qui leur avaient été cachés.

    2.3.2.7

    Dans ce contexte, le CESE renvoie également aux critiques formulées par la Cour des comptes européenne, qui parlait, en matière d'eaux usées, non seulement de projets surdimensionnés mais aussi de l'incompétence de certains conseillers qui vendaient des projets onéreux pratiquement «clés en main ».

    2.3.2.8

    Le projet de Mirosławice (commune de Trzebiatow sur la Baltique) montre que comme le craignait le Comité, la répétition des exemples de mauvaise planification est réelle et que les exemples cités par la Cour des Comptes ne sont pas des cas isolés. L'on voit dès lors les graves répercussions, y compris en ce qui concerne l'utilisation de technologies adaptées. Dans le cas de Trezebiatow, des fonds ont été utilisés pour une station d'épuration complètement surdimensionnée. Dans le quartier de Mirosławice, la Fondation allemande pour l'environnement voulait promouvoir un projet de démonstration pour la construction d'une station d'épuration respectueuse de l'environnement, dont la technologie avait été étudiée spécialement pour les petites communes de la côte de la Baltique. Après deux ans de préparation, en dépit de l'accord de la commune et de la délivrance d'un permis de construire, la commune a finalement décidé de se retirer du projet après que l'on eut constaté que la station centrale d'épuration de Trzebiatow, du fait de sa taille totalement surdimensionnée, devait être reliée à d'autres communes afin de pouvoir fonctionner de manière efficace. Le projet, qui devait servir à la mise en œuvre et à la démonstration d'une solution décentralisée adaptée au retraitement des eaux usées, a finalement dû être abandonné.

    2.3.3   L'exemple des boues d'épuration

    2.3.3.1

    Nécessité fait loi, dit-on. Le préposé à l'épuration de la municipalité de Zambrow, au nord-est de la Pologne, n'avait pas - jusqu'alors - assez de moyens financiers à sa disposition pour installer un dispositif technique de traitement des boues d'épuration. Sa solution: il composte en partie des boues d'épuration et utilise pour ce faire l'aide de vers de compost, qu'il qualifie de «ses collaborateurs les plus fidèles et les plus efficaces». Une partie de ces boues d'épuration sont introduites dans l'installation d'épuration sur des litières de roseaux, après s'être développées comme dans de véritables paradis naturels. Le compost est très apprécié de la population et des agriculteurs, qui l'utilisent comme engrais (9). Le coût du traitement des boues d'épuration ne représente à Zambrow que 5 % du coût des installations d'épuration qui traitent et éliminent les boues d'épuration à l'aide de solutions techniques. À souligner, et cela fait également partie du concept d'«adaptabilité», que dans le cas de Zambrow les boues d'épuration ne sont pas toxiques (ce qui vaut du reste pour de nombreuses communes rurales dans les pays candidats). Cela a pour conséquence que la municipalité de Zambrow affiche les coûts les plus bas de la région en matière de traitement des eaux usées. Et pourtant, bien que la municipalité dispose ainsi d'une installation efficace et économique de traitement des eaux usées et des boues d'épuration, la solution développée par le préposé lui-même n'est que rarement présentée comme un modèle.

    2.3.3.2

    Le CESE fait observer qu'il existe, précisément pour les régions rurales, des techniques d'épuration (adaptées) assurément très praticables où le problème des boues d'épuration ne se pose absolument pas, par exemple les installations d'épuration à base de végétaux.

    Autres exemples

    2.4

    Sans prétendre à l'exhaustivité, on peut trouver d'autres exemples de technologies environnementales dans toutes les installations de production d'énergies décentralisées.

    2.4.1

    L'Allemagne, en tant que pays qui s'intéresse depuis plusieurs années aux énergies renouvelables et donc neutres du point de vue du CO2, peut être considérée comme un exemple de la possibilité de combiner favorablement les technologies environnementales adaptées avec des intérêts écologiques et des incidences en matière d'emploi.

    2.4.2

    On utilise désormais en Allemagne plus d'acier dans la construction d'éoliennes que dans la construction navale. Dans certaines régions structurellement faibles, comme par exemple la Fries orientale, plusieurs milliers (!) de nouveaux emplois ont pu être créés grâce à la puissance éolienne.

    2.4.3

    En Allemagne, la construction et l'exploitation d'installations de biogaz deviennent de plus en plus intéressantes en tant que nouvelles sources de revenus pour les agriculteurs. Des écoles et d'autres bâtiments publics sont chauffés dans une mesure croissante au moyen d'énergies renouvelables disponibles localement comme par exemple les copeaux de bois, et non plus avec les combustibles fossiles traditionnels comme le pétrole ou le gaz, qui sont importés sur de longues distances. Rien qu'en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, ce «pays du charbon», plus de 1.000 incinérateurs de pastilles de bois ont été installés, ce qui en plus de soulager l'environnement, constitue une source d'emplois.

    2.4.4

    Ainsi, pour une installation fonctionnant avec des copeaux de bois permettant, dans une petite ville, de chauffer par exemple l'hôtel de ville, le centre scolaire, la salle des fêtes, la maison de retraite et l'hôpital, il faut facilement 3, 4 ou 5 agriculteurs pour fournir et débiter le petit bois nécessaire et pour l'acheminer jusqu'à l'installation en question.

    2.4.5

    Dans des pays comme par exemple l'Autriche ou les pays scandinaves, l'on enregistre également un boom dans la construction et l'exploitation d'installations de pastilles de bois alors que dans les pays candidats il n'existait guère jusqu'à présent d'installations dans le secteur des énergies renouvelables.

    3.   Quels enseignements tirer de ces exemples?

    3.1

    Le CESE recommande à la Commission, dans le cadre de sa stratégie de promotion des technologies de l'environnement, d'examiner attentivement les raisons d'une telle diversité dans l'utilisation des technologies adaptées. Certes, le Comité est conscient de l'importance, notamment, de l'environnement économique. Or c'est précisément dans les pays où l'industrie charbonnière continue de bénéficier d'importantes subventions que l'on constate dans le même temps un manque de soutien pour les sources d'énergie de remplacement (comme en Pologne), que les mesures d'économie d'énergie elles-mêmes ne sont pas viables sur le plan économique.

    3.2

    Parallèlement à l'absence d'une base juridique, il faut mentionner surtout les conditions de financement relativement défavorables. Avec des taux d'intérêt allant jusqu'à 20 %, les investissements, malgré l'important potentiel d'économies d'énergie, ne sont pas toujours faciles à amortir à court terme. L'élaboration de «modèles de contrat » (financés par le secteur privé ou liés à des fonds, etc.) peut ainsi acquérir une grande importance et mériterait d'être encouragée.

    3.3

    L'intérêt de la Commission - y compris dans le sens de la promotion du développement durable - est sans doute de rendre publics les déficits qui entravent encore l'utilisation de technologies environnementales adaptées, afin d'aider à leur élimination.

    3.4

    À cet égard, il y a lieu de ne pas se concentrer uniquement sur les pays candidats mais de scruter également la situation dans les actuels États membres. L'on s'apercevra alors que l'environnement économique n'est pas seul en cause, mais qu'il existe également d'autres facteurs. C'est ainsi que le CESE a constaté avec un grand intérêt dans ses travaux qu'à l'intérieur de l'UE, des situations de départ grosso modo identiques dans les divers États membres donnaient lieu à des utilisations très différentes en matière de technologies de l'environnement. En Grèce, à titre d'exemple, pratiquement chaque maison dispose désormais d'une installation solaire (utilisée pour produire de l'eau chaude et renforcer la production d'électricité) sur le toit; en Italie ou en Espagne l'on en trouve sensiblement moins.

    3.5

    Même si, pour reprendre l'exemple de la Pologne et d'autres pays PECO, de telles approches en sont encore aux premiers balbutiements le pays profite pourtant dès à présent de l'utilisation croissante de technologies environnementales décentralisées et adaptées dans les pays de l'UE. En effet, quelques unités de production de pastilles de bois ont été mises en service entre-temps, mais elles travaillent exclusivement pour l'exportation vers la Suède, la Finlande et l'Autriche.

    3.6

    Le CESE souligne qu'il conviendrait de prendre en considération dans ce contexte non seulement les technologies environnementales classiques mais également les technologies adaptées dans des secteurs qui à première vue ne seraient pas directement concernés, car celles-ci également peuvent entraîner des effets très favorables sur le plan de la politique environnementale et de la politique régionale.

    3.7

    Ainsi en Pologne on ne connaissait pratiquement pas jusqu'à présent, par exemple, les petites fromageries et les laiteries artisanales – alors que dans bon nombre d'États membres elles sont presque l'incarnation des spécialités régionales et de l'identité régionale. Dans ce pays, certains représentants des autorités allaient même jusqu'à prétendre que les dispositions UE allaient interdire la construction et l'exploitation de petites fromageries. Or, de telles installations de transformation décentralisées sont non seulement importantes pour l'agriculture locale et pour l'artisanat local, mais elles contribuent également, de manière indirecte, à stabiliser les cycles économiques régionaux et favorisent la production rurale et, par conséquent, la préservation de la nature et de l'environnement.

    3.8

    Les exemples choisis ici ne doivent pas être mal interprétés en ce sens que le CESE serait opposé à des solutions techniques à l'échelle industrielle dans le domaine des technologies environnementales. Il ne fait aucun doute que dans certains cas, des solutions techniques à l'échelle industrielle peuvent très bien être adaptées. Lorsque l'on sait qu'en Hongrie, la moitié de la pollution du Danube est le fait de la ville de Budapest, l'on ne peut exclure le recours à une station d'épuration de type industriel. Le CESE veut au contraire attirer l'attention sur le fait qu'il convient toujours de trouver la solution respectivement la mieux adaptée à une situation locale afin:

    d'éviter l'allocation erronée de moyens financiers;

    de réaliser les actions les plus judicieuses pour la population locale mais aussi pour l'économie locale;

    de promouvoir le développement durable par le biais de technologies environnementales adaptées, susceptibles de réduire de manière importante la consommation d'énergie et de matières premières et de contribuer à la croissance et à la création d'emplois.

    3.9

    Le CESE souhaite dès lors mettre en garde contre une certaine «fascination» pour les grands projets qui risque de connaître une nouvelle poussée dans certains PECO lors de la mise à disposition des moyens financiers dans les années à venir. Le CESE a pour but non d'«empêcher» quoi que ce soit mais de promouvoir.

    3.10

    Le Comité constate avec préoccupation que les pays candidats manquent de connaissances sur les technologies adaptées et que les bureaux d'ingénieurs (qui ne sont guère nombreux) ainsi que les instances d'homologation préfèrent les solutions à l'échelle industrielle, même dans les cas où elles ne se justifient absolument pas. Cela a pour conséquence des investissements beaucoup plus coûteux, ce qui se répercute favorablement sous les honoraires des bureaux d'ingénieurs. À cela s'ajoute le fait que l'on s'imagine ainsi, en utilisant une technologie «reconnue», être du «bon côté» pour ce qui est des objectifs à atteindre en matière d'environnement.

    3.11

    C'est cette motivation qui guide souvent les administrations, qu'il s'agisse de la Commission UE ou des organismes locaux. Se concentrer sur un petit nombre de grands projets comporte en outre moins de charges administratives - à commencer par le fait que Bruxelles manque souvent de capacités humaines pour passer à des solutions techniques adaptées, qui sont souvent de plus petites dimensions. Que le coût économique de cette approche soit bien plus élevé que les dépenses accrues en personnel que cela représente ne semble intéresser personne. À cela s'ajoute que souvent les grandes installations ne nécessitent pas beaucoup d'aides dans la mesure où, à la différence de ce qui se passe dans le cas des communes de moyennes ou petites dimensions, il est plus facile de trouver des investisseurs privés.

    3.12

    De plus, dans les pays candidats fortement marqués par leur passé centralisateur, que la croyance en des solutions centralisées et uniformes dans les pays est loin d'avoir disparu partout.

    3.13

    Les exemples cités montrent qu'avec des technologies adaptées, à petite ou à moyenne échelle, l'on obtient avec une dépense financière inférieure les mêmes, voire de meilleurs résultats en matière d'élimination des pollutions environnementales locales. Les technologies adaptées:

    sont meilleur marché dans la phase d'investissement, ce qui a pour effet positif que l'on peut construire plus d'installations pour la même dépense et obtenir ainsi plus d'effets bénéfiques pour l'environnement;

    sont sensiblement meilleur marché dans la phase d'entretien, ce qui entraîne des économies au niveau des dépenses pour la population locale; les ressources ainsi «économisées» pouvant servir à d'autres mesures favorisant l'économie (10);

    offrent souvent des perspectives d'emploi à l'artisanat local alors que les solutions techniques à échelle industrielle nécessitent pratiquement toujours l'intervention d'entreprises spécialisées, ce qui est à considérer comme un profit pour l'économie locale et régionale.

    3.14

    Curieusement, les solutions économiques («système D») produisent une image plutôt négative.

    4.   Déficits et obstacles: comment les éliminer?

    4.1

    Dans les années à venir, des montants considérables vont être déversés dans les pays candidats à titre d'investissements en faveur de l'environnement. L'utilisation qui en sera faite dépendra essentiellement des décisions prises par les responsables de ces pays.

    4.2

    Le CESE est conscient du fait qu'il n'y aura aucun obstacle direct de la part de l'UE lors de la réflexion menée dans les pays candidats quant à l'utilisation des technologies respectueuses de l'environnement. Cela ne suffit pas. Le Comité estime qu'une promotion active s'impose tant sur le plan technique que sur le plan financier.

    4.3

    Le Comité souligne que les chances d'un renforcement de l'intervention de ce type de technologies n'augmenteront réellement que si les conditions suivantes sont réunies:

    élimination du déficit flagrant en matière de connaissances quant aux possibilités offertes par les technologies environnementales grâce à un transfert massif de savoir-faire;

    promotion des bonnes pratiques et construction d'installations de démonstration;

    création d'un environnement juridique et économique approprié;

    amélioration des conditions et des possibilités de financement, le cas échéant par la constitution d'un fonds spécial;

    association des responsables politiques à tous les niveaux, afin qu'ils puissent examiner des solutions de rechange à leurs projets quant à leur faisabilité et leur compatibilité avec la législation communautaire (et nationale);

    participation des partenaires sociaux et de la société civile organisée pour sensibiliser la population sur le sujet.

    Promotion de la connaissance et de la conscience des technologies environnementales

    4.4

    De plus en plus de décisions relatives aux investissements dans le domaine environnemental seront prises à l'avenir au niveau local. Les responsables de petites communes, notamment, qui ne disposent pas de personnel spécialisé, seront presque toujours tributaires d'une aide extérieure pour la planification et ensuite pour la mise en œuvre des investissements. Les bureaux d'ingénieurs auxquels ils font appel ne disposent pas toujours des connaissances nécessaires, et n'ont parfois pas toute la volonté nécessaire pour offrir les solutions les plus adaptées ou les meilleures, que ce soit en termes de coût, sur le plan social ou environnemental. Enfin, leurs prestations sont généralement évaluées en fonction du volume des constructions, et non sur le caractère durable et l'adaptation de leurs solutions aux conditions locales.

    4.5

    Il n'est pas rare que les responsables de la planification soient en liaison avec des entreprises du bâtiment ou des prestataires techniques. L'on ne doit pas sous-estimer l'intérêt de ces responsables, des entreprises, mais aussi de la politique pour les «grands projets» sur mesure: les honoraires des architectes et des ingénieurs, tout comme les intérêts des entreprises du bâtiment, sont autant d'arguments qui font pencher la balance en faveur des grands projets. Citons à titre d'exemple le conseil d'un fabricant de tuyaux d'évacuation à un jeune technicien: «Évidemment, à chaque mètre de tuyau en plus, vous êtes gagnant !» – et il ne s'agit pas d'un cas isolé. De même, la perspective d'une cérémonie d'inauguration d'un grand projet, avec présence de la télévision et de la presse écrite, peut sembler plus attrayante à une personnalité politique locale que la réalisation de 20, 50 ou 100 petits projets qui passent inaperçus.

    4.6

    Il arrive plus souvent qu'on ne pense que, consciemment ou non, les informations transmises soient biaisées. C'est ainsi que le CESE a eu à connaître des cas dans lesquels il a été signifié clairement au décideur que la législation communautaire ne permettrait soi-disant pas d'autre possibilité que la construction d'une station d'épuration centrale et le raccordement de tous les quartiers. Même s'il s'agit ici manifestement d'une fausse information, l'on se trouve en présence d'un problème de compétence.

    4.7

    À cela s'ajoutent d'autres aspects, en partie d'ordre pratique, en partie d'ordre psychologique: construire d'après «l'état de la technique» est souvent très simple: il suffit pour cela de suivre le projet exposé sur la planche à dessin dans le bureau d'ingénieurs. Les solutions décentralisées, adaptées, exigent souvent davantage d'efforts, une bonne connaissance des détails et souvent une forte capacité de persuasion – le tout pour un moindre profit. Qui donc choisirait d'emprunter un chemin difficile, surtout si le chemin le plus facile est, en plus, le plus lucratif? En choisissant les solutions «industrielles», les responsables de la planifications et les politiques se sentent «du bon côté». Les solutions plus modestes, souvent considérées comme «mauvaises», primitives et peu sûres, n'inspirent pas confiance. Qui – voir l'exemple de Zambrow (cf. 2.3.3) – pourrait exiger d'un simple préposé à l'épuration ce qui – volontairement ou non – ne vient pas à l'idée des ingénieurs?

    4.8

    Il paraît particulièrement important au Comité de former et d'informer à la fois les responsables politiques et les bureaux d'ingénieurs. La Commission serait bien inspirée de réfléchir à la création de «centres de compétence pour les technologies adaptées» dans les pays candidats. Ces centres auraient pour tâche d'organiser le nécessaire transfert de savoir-faire, de conseiller les responsables locaux et la société civile, c'est-à-dire de promouvoir la demande de technologies environnementales adaptées. Le cas échéant, ils pourraient également jouer un rôle dans l'administration de certains fonds spéciaux (voir paragraphes 4.16 et ss.).

    4.9

    La création et le développement d'une banque de données européenne, à laquelle pourrait participer l'Agence européenne de l'environnement, qui répertorierait les technologies environnementales adaptées abordables sur le plan financier, considérées par l'UE comme ayant fait leurs preuves et qui obtiendraient de ce fait une sorte de «label de qualité», pourraient être utiles au travail des centres de compétence. L'orientation donnée par la DG Environnement pour une alternative dans le traitement des eaux usées peut être perçue comme un pas en avant dans cette direction.

    4.10

    Rien ne fait davantage impression et n'est plus efficace pour éliminer la méfiance à l'égard des technologies environnementales adaptées que l'inspection d'exemples déjà mis en pratique. Le maire de la commune de Sokoli (voir paragraphe 2.3.2.3) a stoppé ses projets de station d'épuration qui prévoyaient le raccordement de tous les quartiers à l'installation centrale après avoir constaté (11) qu'il existe des solutions de rechange.

    4.11

    Aussi le CESE estime-t-il que l'offre et le transfert de technologies adaptées devront être, eux-aussi, «adaptés», et s'accompagner notamment d'actions visant à parvenir au consensus social, qui n'est pas toujours présent dès le début au sein de la population et des administrations locales.

    4.12

    À cet effet, des procédures d'information, de consultation et de participation qui associent les acteurs socioprofessionnels et la population devraient être mises en place.

    4.13

    Il pourrait également être utile de promouvoir les partenariats entre les régions et/ou communes qui, au sein de l'UE, ont mis en place des expériences intéressantes d'application de technologies appropriées et les régions et/ou communes des nouveaux États membres qui sont sur le point de faire des choix similaires (voire opposés!). Il conviendrait en outre d'accorder une certaine priorité aux projets qui, dans le cadre du programme Interreg ou d'autres programmes communautaires, ont intégré la promotion de technologies environnementales appropriées.

    4.14

    Le plan d'action européen pour les technologies de l'environnement, actuellement en cours d'élaboration, envisage d'examiner comment l'on peut éliminer les barrières qui empêchent la diffusion des technologies environnementales communautaires. Le CESE se féliciterait de l'organisation de programmes de formation et de visite de ce type. Tout dépend toutefois de la manière dont ces programmes seraient organisés. En effet, les programmes de visites ne doivent pas toujours avoir pour but de ne montrer que les solutions les plus judicieuses. Il n'est pas rare que l'on insiste sur les aspects commerciaux.

    Aspects financiers

    4.15

    La Commission peut à bon droit faire valoir qu'en général, dans ses aides, ne pratique aucune exclusive vis-à-vis des technologies environnementales adaptées. Certes, l'on peut voir d'un œil critique le fait que des projets devant bénéficier d'une aide au titre du Fonds de cohésion, par exemple, doivent faire état d'un niveau d'investissement d'au moins 10 millions d'euros pour être éligibles. De nombreux petits projets extrêmement efficaces ne peuvent de la sorte bénéficier d'une aide pouvant atteindre jusqu'à 85 % de l'investissement.

    4.16

    L'analyse de la pratique actuelle en matière d'aide montre clairement que les grandes villes ont jusqu'ici été favorisées. Cela pourrait s'expliquer par le fait que les investissements correspondants ont pour objectif l'élimination de grosses sources ponctuelles de pollution environnementale et par le fait que, par exemple, la directive cadre sur les eaux usées prévoit d'abord le traitement des eaux usées dans les grandes agglomérations urbaines. Néanmoins, il faut transmettre en même temps des idées sur la façon de promouvoir les technologies adaptées, parce que c'est aujourd'hui que l'on pose les jalons pour les investissements de demain.

    4.17

    Le CESE sait parfaitement que le fonds de cohésion ne sert pas uniquement à financer des projets destinés à de grandes agglomérations urbaines mais aussi, par exemple, à soutenir la mise en oeuvre de projets de traitement des eaux usées au niveau d'associations territoriales. Il est donc concevable de regrouper plusieurs projets plus petits mais en réalité cela se produit rarement. Étant donné que les décisions sur les subsides au titre du fond de cohésion se prennent à Bruxelles, le Comité recommande d'assortir les demandes de financement d'un calcul clair des coûts (d'investissement et d'entretien) des solutions techniques au niveau central, semi-central et décentralisé. En invitant les demandeurs à évaluer, ne serait-ce que de façon approximative, les éventuelles solutions alternatives, on pourrait contribuer à réaliser de sensibles économies dans la phase d'investissement et à éviter des coûts élevés dans les phases successives.

    4.18

    En Pologne, il existe diverses possibilités de financement pour les mesures environnementales, en principe aussi pour les petits investissements: il existe des fonds de protection de l'environnement au niveau national, régional et – en partie – local, l'écofonds (12) et autres. À l'avenir, ces fonds, davantage que par le passé, seront utilisés pour libérer des ressources pour des projets cofinancés par l'UE. Concrètement, cela signifie que la situation ne sera vraisemblablement pas plus facile pour les technologies environnementales adaptées, alors même que leur amortissement est rapide et que leurs coûts de suivi à long terme sont modestes.

    4.19

    Le CESE propose dès lors de réfléchir à la création d'une aide destinée spécialement aux investissements liés aux technologies environnementales adaptées. C'est ainsi qu'un certain pourcentage des moyens du Fonds de cohésion pourrait être réservé aux projets dont le volume d'investissement serait inférieur à un seuil donné. Il va de soi que les projets financés par ce biais ne pourraient plus être autorisés par la seule Commission de l'UE, et qu'un fonds de ce genre marquerait une étape importante dans la diffusion des idées relatives aux technologies environnementales adaptées.

    4.20

    Au CESE, dans le cadre de l'élaboration du présent avis, le professeur Bernhard FRIEDMANN, qui a notamment présidé la Cour des comptes européenne, a proposé un jour - ce sujet a fait l'objet de nombreux débats - de ne plus accorder de subventions mais uniquement des crédits (à taux préférentiel, voire à taux nul) (13).

    4.20.1

    La pratique actuelle en matière d'aide conduit en effet à aider la construction de stations d'épuration dans certaines communes et pas dans d'autres – du fait du manque de moyens. Dans la pratique, une telle situation conduit à des injustices. Dans le domaine de l'environnement, cela signifie que ce sont précisément les communes rurales (c'est-à-dire les plus pauvres) qui, du fait de la pratique actuelle, sont reléguées à l'arrière-plan au profit des villes (plus riches).

    4.20.2

    Si les moyens étaient répartis sous forme non de subventions, mais sous forme de crédits provenant d'un fonds renouvelable, l'on n'aurait pas seulement davantage de projets. Un avantage supplémentaire serait que les bénéficiaires seraient peut-être plus prudents avec de l'argent qu'ils auraient emprunté qu'avec des subventions.

    4.20.3

    Un problème susceptible de rendre difficile la restructuration des programmes d'aide, en Pologne par exemple, est le niveau actuel d'endettement des communes. Le niveau élevé d'endettement est d'ores et déjà un obstacle à la préparation d'investissements visant à appliquer les exigences communautaires au niveau local. Pour l'année 2001, l'endettement des collectivités locales et régionales en Pologne a atteint 12,3 milliards de zlotys (soit 3 milliards d'euros) et en 2002 15,4 milliards de zlotys (soit environ 4 milliards d'euros) – et la tendance est à la hausse.

    4.21

    S'agissant des investissements privés dans les technologies adaptées (par exemple dans le domaine des mesures d'économies d'énergie, de la promotion des énergies renouvelables, des constructions et matériaux de construction alternatifs, etc.) ce type de fonds spécial renouvelable permettant d'accorder des prêts à taux nul ou à taux très faible pourrait constituer une solution intéressante. L'on pourrait envisager un lien avec les «centres de compétence» proposés.

    4.22

    Pour mobiliser des moyens financiers supplémentaires, on pourrait envisager la participation du secteur privé à la fourniture de services publics (partenariats public/privé, PPP).

    4.23

    Cependant si les modèles de PPP offrent de nouvelles perspectives, ils comportent également des risques. Ainsi, un PPP mal équilibré peut entraîner par exemple des hausses de prix considérables. À Budapest, capitale de la Hongrie, l'apparition de hausses massives de prix (supérieures à 200 %) a entraîné des différends considérables entre l'entreprise concessionnaire du secteur privé et le pouvoir municipal.

    5.   Résumé

    5.1

    Les technologies environnementales jouent un rôle important dans la réduction des nuisances environnementales et dans le cadre du développement durable.

    5.2

    Pour éviter les investissements erronés il est important de veiller rigoureusement à choisir des solutions adaptées à chaque situation.

    5.3

    Certes, le choix d'une solution adaptée peut parfois comporter des dépenses administratives plus importantes, mais elle permet, dès la phase d'investissement et ensuite dans la phase d'exploitation, d'économiser des montants importants et de créer plus d'emplois à long terme. Les ressources ainsi «économisées» peuvent soulager dans une mesure correspondante les budgets, qu'ils soient publics ou privés. Les technologies environnementales adaptées répondent donc à un besoin actuel.

    5.4

    Cependant, les technologies adaptées ne sont guère connues, et bien trop peu utilisées, tant dans les pays candidats que dans les États membres actuels. Cela s'explique entre autres par le manque de connaissances et par l'incertitude quant à la possibilité d'atteindre effectivement les valeurs prescrites à l'aide de technologies alternatives.

    5.5

    Le CESE recommande à la Commission de se pencher sérieusement sur ce problème dans le cadre de la mise en oeuvre du plan d'action visant à promouvoir l'utilisation des technologies environnementales. Elle pourrait commencer son action en réduisant le déficit d'informations, par exemple par la création de «centres de compétence» en matière de technologies adaptées dans les pays candidats.

    5.6

    Une partie des crédits pourraient alimenter un fonds qui servirait principalement à financer des petits projets. Le fonds de cohésion, qui finance des projets avec moins de 10 millions d'euros, n'encourage pas assez le choix de solutions adaptées. Dans les demandes de financement au titre du fonds de cohésion, il serait utile que le demandeur fournisse des indications sur les raisons qui l'ont amené à choisir précisément la technologie demandée et sur les alternatives qu'il a rejetées.

    Bruxelles, le 31 mars 2004.

    Le Président

    du Comité économique et social européen

    Roger BRIESCH


    (1)  COM(2004) 38 final du 28 janvier 2004.

    (2)  Rapport de la Commission - L'écotechnologie au service du développement durable, COM(2002) 122 final.

    (3)  Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission Élaboration d'un plan d'action en faveur des écotechnologies (COM(2003) 131 final - CESE 1027/2003, session plénière d'octobre 2003, pas encore publié au JO).

    (4)  (par exemple suite à l'augmentation du transport individuel; à mentionner également les problèmes liés à la protection d'espèces ou les nuisances environnementales liées notamment à des investissements dans le secteur agro-industriel par exemple, gigantesques installations d'élevage porcin introduites en Pologne par l'investisseur américain Smithfield).

    (5)  COM(2001) 304 final «Les aspects financiers de la protection de l'environnement dans les pays candidats», page 6.

    (6)  Source: Actualité de l'Union européenne, no 20, 28 mai 2003, sur la base de calculs effectués par la Cour des comptes.

    (7)  idem.

    (8)  Thüringische Landeszeitung/Eisenacher Presse du 24 octobre 2003.

    (9)  Le CESE est conscient du problème de l'utilisation des boues dépuration sur les terres agricoles. Elles doivent souvent être strictement interdites en raison de leur concentration élevée en substances toxiques. Concernant la problématique générale des boues d'épuration cf. l'avis du Comité économique et social sur la «Révision de la directive du Conseil 86/278/CEE relative à l'utilisation des boues d'épuration en agriculture», JO no C 014 du 16 janvier 2001, pp. 141-150.

    (10)  Ainsi, dans la commune de Kamieniec dans l'arrondissement occidental de Grodzisk Wielkopolski, au lieu d'une seule grande installation centrale d'épuration il est prévu de construire au total 917 installations séparées. Cela devrait permettre de réduire les coûts de 60 % tant au niveau des investissements que de l'entretien (W. Halicki, Zielon Gora, 2003).

    (11)  Dans le cadre d'un projet de la Fondation allemande pour l'environnement, du ministère allemand de l'environnement et de l'organisation environnementale Euronatur.

    (12)  Alimenté par des remises de dettes au niveau bilatéral et qui existera jusqu'en 2010.

    (13)  «Le contrôle financier au service de l'idée européenne», discours du prof. Bernhard FRIEDMANN à l'occasion de la remise du prix «Taureau européen» 2001 de l'Association des contribuables d'Europe.


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