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Document 52001AE1321

Avis du Comité économique et social sur la "Proposition de directive du Conseil relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée"

JO C 36 du 8.2.2002, p. 59–62 (ES, DA, DE, EL, EN, FR, IT, NL, PT, FI, SV)

52001AE1321

Avis du Comité économique et social sur la "Proposition de directive du Conseil relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée"

Journal officiel n° C 036 du 08/02/2002 p. 0059 - 0062


Avis du Comité économique et social sur la "Proposition de directive du Conseil relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée"

(2002/C 36/13)

Le 5 juin 2001, le Conseil, conformément à l'article 63 du traité instituant la Communauté européenne, a décidé de consulter le Comité économique et social sur la proposition susmentionnée.

La section "Emploi, affaires sociales, citoyenneté", chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a élaboré son avis le 3 octobre 2001 (rapporteur: M. Pariza Castaños).

Lors de sa 385e session plénière des 17 et 18 octobre 2001 (séance du 17 octobre 2001), le Comité économique et social a adopté le présent avis par 87 voix pour, une voix contre et 7 abstentions.

1. Introduction

1.1. Cette directive, présentée par la Commission européenne, marque le début de l'élaboration d'une réglementation communautaire en matière d'immigration - et plus particulièrement les aspects relatifs à l'admission et aux droits des ressortissants de pays tiers - dans le respect des critères annoncés par la Commission dans sa communication sur la politique communautaire en matière d'immigration. La réglementation communautaire en matière d'immigration se composera de deux règles de base: celle relative aux droits des résidents de longue durée et celle relative à l'admission et aux droits initiaux des ressortissants de pays tiers. Le Comité se félicite de la rapidité avec laquelle la Commission a présenté les premières directives en la matière.

1.2. Le Comité approuve le contenu général de la directive à l'examen dans la mesure où il répond aux attentes formulées par la Commission elle-même, et tient compte des observations exprimées dans la communication sur la politique communautaire en matière d'immigration ainsi que des contributions du Comité économique et social à la communication susmentionnée.

2. Contenu essentiel de la proposition de directive

2.1. La proposition de directive définit le statut de résident de longue durée, qui peut être obtenu après cinq ans de résidence légale sur demande de l'intéressé et sous certaines conditions. Les principales exigences ou conditions sont les suivantes: ne pas avoir dépassé les limites prévues concernant l'absence du territoire de l'État dans lequel la demande a été introduite (six mois), disposer de ressources économiques et d'une assurance-maladie, ne pas avoir un comportement qui constitue une menace pour l'ordre public et la sécurité intérieure.

2.2. Une distinction est faite entre le statut de résident de longe durée et le permis de séjour, c'est-à-dire le document délivré à la personne qui bénéficie de ce statut. Si le permis de séjour est renouvelable (tous les dix ans), le statut est quant à lui permanent. Le non-renouvellement du permis de séjour pourra constituer une faute administrative, mais n'affecte pas le caractère permanent du statut de résident de longue durée.

2.3. Bien qu'il soit permanent, le statut visé ci-dessus pourra être retiré dans certains cas: absence du territoire pendant une période de deux ans consécutifs au moins, constatation de l'acquisition frauduleuse du statut, acquisition du statut dans un autre État membre.

2.4. La proposition établit une série de garanties juridiques. Ainsi, le rejet de la demande d'acquisition du statut doit être motivée. Dans ce cas, la personne concernée a le droit d'utiliser les voies de recours juridictionnels dans l'État membre concerné.

2.5. Le document définit les droits des résidents de longue durée dans une série de domaines, conformément au principe d'égalité de traitement avec les nationaux. Il s'agit notamment du droit au travail, à l'éducation, à la sécurité sociale, aux soins de santé, à l'accès aux biens et aux services, ainsi que la liberté d'association et d'affiliation à une organisation syndicale et la libre circulation sur le territoire de l'État concerné.

2.6. Le résident de longue durée bénéficie d'une protection contre l'expulsion, bien que celle-ci soit autorisée au cas où son comportement constitue une menace grave pour l'ordre public ou la sécurité intérieure.

2.7. Le droit du résident de longue durée à séjourner dans un autre État membre constitue un élément important de la directive, qui fait l'objet d'un chapitre spécifique. Ce droit ne peut être exercé que dans certains cas, à savoir: pour travailler, pour suivre des études, ou lorsque la personne concernée dispose de ressources économiques propres. Si l'une de ces conditions est remplie, le résident de longue durée d'un État pourra se voir accorder le droit de séjour temporaire dans un autre État.

2.8. Les membres de la famille d'un résident de longue durée qui exerce son droit de séjour dans un autre État ont le droit d'accompagner cette personne ou de la rejoindre.

2.9. Le permis de séjour que doit délivrer le second État membre est temporaire et renouvelable, dans la mesure où le statut de résident de longue durée ne peut être obtenu que dans un seul État membre. Durant le séjour dans le second État membre, le statut de longue durée est maintenu dans le premier État membre.

2.10. Selon la proposition de directive, les droits dont bénéficient les personnes concernées dans le deuxième État membre diffèrent légèrement des droits acquis dans le premier État, et deux de ces droits en particulier ne sont pas accordés: le droit à l'assistance sociale et aux bourses d'entretien pour étudiants.

2.11. Le statut de résident de longue durée dans le second État membre peut être acquis au terme d'un séjour de cinq ans, mais entraînera le retrait de ce statut dans le premier État.

3. Observations générales

3.1. Droits du résident de longue durée

3.1.1. L'énumération des droits qui est faite à l'article 12 paragraphe 1, bien que nécessaire, n'est pas suffisante, dans la mesure où la jouissance d'autres droits ne figurant pas sur cette liste risque de poser des problèmes. Il convient d'inclure une clause générale d'égalité des droits avec les résidents communautaires, sauf dans les domaines faisant l'objet d'une réglementation différente, tels que la libre circulation et la liberté d'établissement dans un autre État membre et le droit de vote.

3.1.2. Une gradation dans les droits serait ainsi établie en fonction de la durée du séjour, comme l'avait proposé la communication de la Commission, les résidents de longue durée continuant de bénéficier de droits identiques à ceux des résidents communautaires, sauf dans les deux domaines mentionnés.

3.2. Droit de vote

3.2.1. Dans son exposé des motifs, la Commission évoque l'évolution politique, qui reconnaît incontestablement l'importance que le droit de vote et l'accès à la nationalité revêtent pour l'intégration des ressortissants de pays tiers qui sont résidents de longue durée. Elle souligne néanmoins l'absence de base juridique qui permettrait d'inclure ces droits dans la directive (Exposé des motifs, paragraphe 5.5). Le Comité est d'avis que ces deux aspects doivent être traités séparément et non comme une seule et même question. Alors que l'accès à la nationalité relève sans aucun doute de la compétence exclusive des États, le droit de vote lors des élections municipales et européennes peut faire l'objet d'une réglementation européenne. La prochaine CIG pour la réforme des traités devra tenir compte de ce problème.

3.2.2. Le Comité estime que le droit de vote lors des élections municipales et européennes pour les résidents de longue durée doit être pris en considération dans la législation communautaire, car il constitue également un instrument d'intégration primordial.

3.3. Mobilité entre le pays de résidence et le pays d'origine

3.3.1. La communication de la Commission sur la politique communautaire en matière d'immigration se montrait clairement favorable à une plus grande mobilité des migrants entre l'État membre de résidence et le pays d'origine, afin d'encourager les initiatives en faveur du développement économique du pays d'origine. La directive à l'examen va dans ce sens. Le Comité estime néanmoins qu'elle ne va pas assez loin dans la mesure où elle limite l'absence du territoire à deux ans (l'article 10, paragraphe 1, alinéa a) stipule que le statut est retiré lorsque l'absence est supérieure à deux ans). La durée de l'absence peut excéder deux ans en cas de "détachement pour raisons de travail", c'est-à-dire essentiellement lorsqu'un travailleur est détaché par l'entreprise qui l'emploie. Les États membres ont également la possibilité de prolonger ce délai de deux ans.

3.3.2. Afin d'encourager les personnes jouissant d'un statut de résident de longue durée au sein de l'UE à développer des activités économiques dans leur pays d'origine, la durée durant laquelle ils peuvent s'absenter doit être étendue.

3.3.3. Lorsque des résidents de longue durée retournent dans leur pays d'origine pour travailler à des projets de coopération financés par l'État où ils résident ou par des fonds communautaires, ils doivent conserver leur statut de résident de longue durée, et ce durant toute la durée du projet et, partant, de leur absence.

3.3.4. Ces mêmes critères doivent être appliqués aux absences autorisées durant les cinq premières années de résidence temporaire précédant l'accès au statut de résident de longue durée (l'article 5, paragraphe 3, alinéa a) stipule que les absences supérieures à six mois ne seront pas autorisées). Le Comité estime que ce délai devrait être étendu. De même, des dispositions souples doivent être prévues pour les absences motivées par la participation à des projets de codéveloppement.

3.4. Statut de résident de longue durée pour les membres de la famille

3.4.1. La proposition de directive ne fait pas référence à l'octroi du statut aux membres de la famille. Il faudrait envisager un mécanisme permettant à ceux-ci d'obtenir le statut permanent lorsqu'un membre de leur famille en bénéficie déjà.

3.4.2. Le Comité propose que le conjoint et les autres personnes considérées comme des membres de la famille dans le cadre du droit au regroupement familial(1) obtiennent le même statut de résident permanent que le premier membre de la famille auquel il a été octroyé. Ces personnes peuvent se voir imposer l'obligation d'avoir résidé légalement dans le pays concerné pendant au moins deux ans. Par conséquent, les membres de la famille devront justifier d'une résidence deux ans et non de cinq ans pour obtenir le statut permanent.

4. Observations particulières

4.1. L'octroi du statut de résident de longue durée est notamment soumis à deux conditions: la personne concernée doit disposer de ressources économiques et d'une assurance maladie (article 6). Il faudrait reconsidérer ces conditions, dans la mesure où l'octroi du statut devra se fonder exclusivement sur la durée du séjour légal (cinq ans), compte tenu des critères définis par le Conseil européen de Tampere.

4.1.1. Lorsque le demandeur est un travailleur ayant obtenu le statut de résident temporaire pour des raisons de travail (en tant que salarié ou indépendant) durant les cinq années précédentes, l'unique condition à remplir pourrait être celle d'être actif, c'est-à-dire d'avoir un emploi ou d'être demandeur d'emploi. En revanche, cette condition ne pourra être imposée aux membres de la famille.

4.1.2. Par ailleurs, la définition contenue dans la proposition stipulant que les ressources financières doivent être suffisantes et stables est ambiguë, et peut donner lieu à des décisions arbitraires de la part des États membres.

4.1.3. De même, il n'y a pas lieu d'exiger du demandeur qu'il dispose d'une assurance maladie, étant donné que les résidents doivent avoir accès, dans les mêmes conditions que les nationaux, au système de santé publique.

4.2. La référence à l'ordre public et à la sécurité (article 7) ne doit pas être de nature à donner lieu à des décisions arbitraires. Il faudrait définir plus précisément la gravité de la menace pour l'ordre public et la sécurité pouvant justifier un retrait du statut, et tenir plus particulièrement compte de l'ensemble des arrêts de la Cour de Justice concernant ces questions.

4.3. Les autorités nationales compétentes devront examiner la demande de statut permanent (article 8, paragraphe 2) dans un délai de six mois comme le prévoit la proposition de directive. Toutefois, le Comité recommande qu'en pratique ce délai n'excède pas trois mois. Pour le demandeur, toute la procédure administrative sera gratuite. Dans les États membres prévoyant un tel cas, l'absence de réponse de la part des autorités administratives entraîne l'acceptation d'office de la demande. Nous proposons d'ajouter à la directive un nouveau paragraphe dans ce sens.

4.3.1. Dans le cas d'un résident de longue durée introduisant une demande de séjour temporaire dans un autre État, le délai de réponse de l'État chargé de l'examen ne doit pas excéder six semaines (et non trois mois comme indiqué à l'article 21 de la proposition de directive, dans la mesure où un délai aussi long est néfaste pour l'emploi, les entreprises et la mobilité des personnes).

4.4. L'article 13, paragraphe 1, relatif à la protection contre l'expulsion des titulaires du statut de résident de longue durée, ne doit pas être de nature à donner lieu à des décisions arbitraires. Il faudra tenir plus particulièrement compte des arrêts de la Cour de Justice concernant ces questions.

4.5. L'article 13, paragraphe 5 devrait spécifier que le recours contre l'expulsion doit toujours avoir un effet suspensif dans tous les États membres.

4.6. En ce qui concerne le caractère obligatoire et explicite de la réponse, l'absence de réaction de la part des autorités administratives et la gratuité de la procédure lorsque le résident de longue durée a introduit une demande de titre de séjour dans un autre État (article 21), le Comité réitère les considérations formulées au paragraphe 4.3.

4.7. Qu'il s'agisse de ressortissants des États membres ou de ressortissants de pays tiers disposant du statut de résident de longue durée, les droits accordés dans le second État (article 24) doivent être équivalents à ceux dont ils bénéficiaient dans le premier État, sous réserve d'une adaptation à la législation et aux coutumes du second État. Par conséquent, et afin d'éviter toute bureaucratie supplémentaire dans le second État, il faudra supprimer de la proposition de directive l'exception portant sur l'assistance sociale et les bourses d'entretien pour étudiants.

5. Conclusions

5.1. Même si le thème de la régularisation des ressortissants de pays tiers résidant illégalement dans l'Union européenne n'entre pas dans le cadre de la directive à l'examen, le Comité tient à rappeler la nécessité de proposer des solutions à ce problème. La Commission doit adopter une initiative afin que soient effectivement reconnus les droits fondamentaux de ces personnes mais également afin que les mesures nécessaires pour la régularisation de leur situation soient adoptées.

5.2. Il importe que la directive à l'examen soit appliquée sur l'ensemble du territoire de l'UE. Dans ce sens, nous invitons expressément les gouvernements du Royaume-Uni, d'Irlande et du Danemark à prendre la décision d'appliquer cette directive. Nous croyons qu'une telle décision contribuerait pleinement à l'application effective du droit à la libre circulation accordé aux résidents de longue durée.

Bruxelles, le 17 octobre 2001.

Le Président

du Comité économique et social

Göke Frerichs

(1) Avis du CES sur le "Regroupement familial" -: JO C 204 du 18.7.2000 et avis du CES sur la "Protection temporaire en cas d'afflux massifs de personnes déplacées"- JO C 155 du 29.5.2001.

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