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Document 52001AE1311

Avis du Comité économique et social sur:la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 96/92/CE et 98/30/CE concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et du gaz naturel, et la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les conditions d'accès au réseau pour les échanges transfrontaliers d'électricité

JO C 36 du 8.2.2002, p. 10–19 (ES, DA, DE, EL, EN, FR, IT, NL, PT, FI, SV)

52001AE1311

Avis du Comité économique et social sur:la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 96/92/CE et 98/30/CE concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et du gaz naturel, et la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les conditions d'accès au réseau pour les échanges transfrontaliers d'électricité

Journal officiel n° C 036 du 08/02/2002 p. 0010 - 0019


Avis du Comité économique et social sur:

- la "Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 96/92/CE et 98/30/CE concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et du gaz naturel", et

- la "Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les conditions d'accès au réseau pour les échanges transfrontaliers d'électricité"

(2002/C 36/03)

Le 22 mai 2001, conformément aux articles 47, paragraphe 2, 55 et 95 du traité instituant la Communauté européenne, le Conseil a décidé de consulter le Comité économique et social sur les propositions susmentionnées.

La section "Transports, énergie, infrastructures, société de l'information", chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a élaboré son avis le 25 septembre 2001 (rapporteur: M. Hernández Bataller).

Lors de sa 385e session plénière des 17 et 18 octobre 2001 (séance du 17 octobre 2001), le Comité économique et social a adopté le présent avis par 84 voix pour et 9 abstentions.

1. Historique

1.1. Sur le plan législatif, les premiers progrès sur la voie de la création d'un marché intérieur de l'électricité et du gaz dans l'Union européenne sont dus aux directives sur le transit du gaz et de l'électricité par les grands réseaux, adoptées en 1990 et 1991(1). Le Comité économique et social s'est prononcé sur le contenu de ces directives dans des avis antérieurs, en marquant son accord quant à certaines nuances qu'elles comportaient et qui se rapportaient plus particulièrement à la sécurité de l'approvisionnement à long terme.

1.2. Un pas supplémentaire a par la suite été accompli avec l'approbation des directives sur des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et du gaz naturel, dont l'adoption a fait l'objet d'un processus complexe depuis les premières ébauches élaborées par la Commission. L'objectif de ces directives était d'ouvrir les marchés de l'électricité et du gaz, en y introduisant progressivement la concurrence, ce qui devait conduire à une efficacité accrue du secteur énergétique et une plus grande compétitivité de l'économie européenne dans son ensemble.

1.3. Le Comité a adopté son avis y relatif en janvier 1993(2), avis dans lequel il réaffirmait son soutien aux directives, tout en y exprimant déjà des réserves d'une grande importance. Concrètement, l'avis précité formulait des observations critiques concernant des points aussi importants que le schéma et les délais relatifs à l'introduction du système d'accès de tiers au réseau, la sécurité de l'approvisionnement, la capacité des réseaux d'interconnexion, l'harmonisation des politiques énergétiques des États membres et les obligations de service public.

1.4. Les directives concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et du gaz naturel ont finalement été adoptées en 1996 et 1998 respectivement, et depuis lors elles ont été incorporées, non sans difficultés, à la législation des États membres.

2. Justification des propositions de la Commission

2.1. Selon les informations fournies par la Commission, depuis la mise en oeuvre des directives 96/92/CE et 98/30/CE, le degré d'ouverture des marchés du gaz et de l'électricité dans les États membres a connu une nette hausse, dépassant largement à la fin de l'année 2000 les objectifs fixés dans ces directives. Il varie toutefois considérablement d'un État membre à l'autre (entre 30 et 100 % en ce qui concerne l'électricité, et entre 20 et 100 % en ce qui concerne le gaz naturel). En l'absence de mesures correctrices, il est fort probable que cette tendance s'amplifiera dans les années à venir. La Commission estime que les disparités entre États membres entravent l'instauration d'un véritable marché unique en Europe.

2.2. Depuis le lancement des processus de libéralisation dans les différents États membres, l'on a enregistré une chute considérable des prix de l'électricité pour les grands consommateurs (entre 15 % et 35 %, selon les données fournies par la Commission), cette réduction étant plus importante dans les pays qui ont davantage progressé dans le processus d'ouverture de leurs marchés. Toutefois, les consommateurs domestiques et les PME n'ont pas bénéficié d'améliorations aussi significatives en termes de prix de l'électricité, dès lors que cette baisse est liée à la possibilité de changer facilement de fournisseur, possibilité qui restera limitée pour cette catégorie de consommateurs tant que le processus d'ouverture ne sera pas mené à terme.

2.3. Les prix du gaz naturel n'ont pas suivi une évolution aussi favorable, en raison principalement des tensions s'exerçant sur le prix du baril de pétrole, auquel sont couplés les prix de base du gaz naturel. Cependant, dans ce cas également, la Commission établit un lien entre les différences de prix moyens existant entre les États membres, d'une part, et le degré d'ouverture de leur marché, d'autre part.

2.4. La mise en oeuvre des directives a eu un effet notable sur l'instauration d'obligations de service public, qui auparavant étaient assumées dans une large mesure par des entreprises publiques ou soumises à un régime de concession public, responsables de la fourniture de gaz et d'électricité. L'ouverture des marchés, conjuguée à la privatisation de nombre de ces entreprises, a obligé les États membres à réglementer certains niveaux minimaux de service public et à établir des contrôles pour en vérifier le respect. La Commission estime néanmoins que des mesures complémentaires sont nécessaires afin de renforcer les dispositions en vigueur dans ce domaine.

2.5. Par ailleurs, la plupart des États membres ont opté pour une réglementation de l'accès de tiers au réseau, pour la définition de procédures d'autorisation pour la construction de nouvelles centrales électriques, pour l'instauration de la séparation totale des activités des gestionnaires de réseaux de transport et de distribution, y compris la création d'autorités de réglementation indépendantes. Dans ce contexte, la Commission estime que l'on peut éliminer certaines des procédures proposées initialement et qui n'ont pas été suffisamment développées par les États membres, et qu'il y a lieu d'approfondir la question de la garantie de l'indépendance des gestionnaires de réseau.

2.6. Les échanges commerciaux entre les pays sont une autre conséquence du processus d'ouverture des marchés, qui est en soi un indicateur de première importance sur le degré de consolidation du marché intérieur. À cet égard, les échanges en électricité atteignent actuellement, selon les informations fournies par la Commission, 8 % de l'électricité totale produite dans l'Union européenne, pourcentage inférieur à celui enregistré dans d'autres secteurs et très en deçà de celui qu'on devrait attendre d'un marché intégré en Europe. Afin de multiplier les échanges internationaux dans le secteur de l'électricité, la Commission propose d'élaborer au niveau européen un règlement qui porterait sur les facteurs concrets ayant un impact négatif sur ce commerce.

2.7. Le Conseil européen de Lisbonne, tenu en mars 2000, a chargé la Commission d'élaborer des propositions de nature à permettre une accélération du processus d'ouverture afin de parvenir le plus rapidement possible à un marché intérieur pleinement opérationnel.

2.8. Quant au Conseil de Nice, tenu en décembre 2000, il a souligné dans sa "déclaration sur les services d'intérêt économique général" que la mission de ces services devait être remplie dans le respect des attentes légitimes des consommateurs et des citoyens, qui souhaitent des prix abordables dans le cadre d'un système de prix transparent et un accès sur un pied d'égalité à des services de qualité, indispensables pour leur insertion économique, territoriale et sociale.

2.9. Le Conseil européen de Stockholm, tenu les 23 et 24 mars 2001, a rappelé la nécessité d'ouvrir les marchés de l'électricité et du gaz naturel, "en tenant compte de la nécessité de satisfaire les besoins des consommateurs et d'assurer la transparence des marchés grâce aux outils réglementaires appropriés".

3. La proposition de directive

3.1. Le document présenté définit les modifications spécifiques à apporter aux directives 96/92/CE et 98/30/CE, lesquelles présentent néanmoins une grande similitude et peuvent être structurées, comme cela est évoqué dans le préambule, en deux volets: propositions quantitatives et propositions qualitatives.

3.2. Au titre des propositions quantitatives, un calendrier est proposé pour que tous les clients des secteurs de l'électricité et du gaz puissent, indépendamment de leur taille, choisir librement les entreprises qui vont les fournir. Ainsi, dans le secteur électrique, tous les clients non domestiques auront cette liberté de choix à partir du 1er janvier 2003, afin d'ouvrir totalement le marché deux ans après. Dans le secteur du gaz naturel, la date limite d'ouverture du marché pour les usagers non domestiques serait reportée au 1er janvier 2004, mais l'objectif du 1er janvier 2005 serait maintenu pour que la totalité des clients puissent choisir librement leur fournisseur.

3.2.1. Quant aux propositions qualitatives, elles porteront principalement sur deux aspects: la procédure d'accès de tiers aux réseaux de gaz et d'électricité et la séparation des activités des entreprises de ces secteurs.

3.2.2. La procédure d'accès de tiers aux réseaux qui est proposée se fonde sur un système de tarifs publiés et réglementés, qui s'appliqueraient à tous les usagers des réseaux de transport et de distribution, dans des conditions non discriminatoires. Ce système remplacerait les autres procédures alternatives définies dans les directives en vigueur, basées sur un accès négocié entre l'entreprise responsable de la fourniture et les clients éligibles ou sur le modèle de l'acheteur unique.

3.2.3. Les mesures relatives à la dissociation des activités visent quant à elles à établir un cadre garantissant un déroulement de l'activité de chacun des gestionnaires de réseau de manière totalement indépendante des autres intérêts commerciaux du groupe auquel il appartient. Dans cette optique, le champ d'application du principe de séparation des fonctions est élargi, s'étendant désormais à tous les gestionnaires de réseau, tant de distribution que de transport de l'électricité et de transport de gaz, et des critères devant régir l'activité des gestionnaires sont établis pour garantir l'indépendance de leur fonction vis-à-vis du groupe auquel ils sont intégrés. La proposition de directive fixe un délai pour la séparation effective des activités des réseaux de distribution, janvier 2003 pour l'électricité et une année plus tard pour le gaz naturel.

3.3. Le document présenté va plus loin dans la définition des obligations de service public et approfondit la question des instances de réglementation des secteurs de l'électricité et du gaz, de même qu'il propose quelques modifications concernant certaines procédures dont celle relative à la construction de nouvelles installations de production d'électricité.

3.3.1. La définition des obligations de service public détaille les aspects pouvant être englobés dans ce concept. Ainsi, seraient clairement inclus dans celles-ci le service universel pour l'électricité (impliquant un approvisionnement de qualité à tous les clients) et d'autres aspects relatifs à la fourniture de gaz naturel et d'électricité qui touchent à la protection des consommateurs domestiques, à la cohésion économique et sociale, à la protection de l'environnement et à la sécurité de l'approvisionnement.

3.3.2. La nouvelle directive propose de désigner des autorités nationales de réglementation indépendantes, qui seraient chargées de fixer les tarifs et les conditions d'accès au réseau et de mettre en place des mécanismes pour éviter des distorsions de concurrence. Il est également proposé de créer un organisme pour superviser la sécurité de l'approvisionnement en électricité et en gaz naturel.

3.3.3. En ce qui a trait à la construction de nouvelles centrales de production d'électricité, le nouveau texte ne retient que la procédure d'autorisation adoptée dans la pratique par tous les États membres, et réserve la procédure d'appel d'offres à titre de mesure de sauvegarde pour les cas où la capacité prévue par voie d'autorisation ne serait pas suffisante pour garantir la sécurité de l'approvisionnement.

3.4. La proposition de directive prévoit de déroger aux dispositions des directives sur le transit du gaz et de l'électricité(3), afin d'abroger certaines procédures qui pourraient être source de confusion pour les différents acteurs intervenant sur ces marchés.

4. La proposition de règlement

4.1. Le texte élaboré par la Commission propose des mesures allant dans trois directions:

- la définition de mécanismes de compensation pour le transit des flux d'électricité;

- la fixation de critères harmonisés pour les tarifs applicables au transport transfrontalier et

- l'attribution des capacités d'interconnexion disponibles entre réseaux de transport nationaux.

4.2. Partant du constat d'une réalité très changeante dans ces domaines, le document fait valoir que les règles du jeu doivent s'adapter le plus rapidement possible à son évolution, afin d'éviter qu'un retard dans l'approbation de modifications dans le cadre établi ne fausse à l'avenir le marché. Aussi, la proposition de règlement prévoit l'établissement d'une série d'orientations qui pourraient être adoptées et modifiées sans qu'il soit nécessaire de changer le règlement. La modification de ces orientations, qui doit toujours se faire en accord avec les principes établis dans le règlement, serait réalisée par la Commission après consultation d'un "comité de réglementation", composé de représentants des États membres et présidé par un représentant de la Commission. Ce comité serait créé en vertu de l'article 5 (procédure de réglementation) de la décision 1999/468/CE relative aux modalités d'exercice des compétences d'exécution conférées à la Commission.

4.3. Conformément à cette procédure, la Commission sera chargée de définir les éléments essentiels du règlement, dont: l'attribution des responsabilités et la procédure correspondante relative au paiement des compensations pour le transit de l'électricité; la méthode à suivre pour déterminer les quantités d'électricité concernées et les coûts associés à son transit; les critères d'harmonisation des charges appliquées par les gestionnaires de réseaux nationaux; les méthodes d'attribution de la capacité d'interconnexion disponible, y compris des règles communes en matière de sécurité et d'exploitation des réseaux.

4.4. La Commission se réserve également la faculté de déterminer les montants à payer au titre des compensations pour le transit des flux d'électricité par les réseaux transnationaux. Pour ce faire, elle sera assistée d'un "comité consultatif", conformément à la procédure établie à l'article 3 (procédure consultative) de la décision 1999/468/CE, qui sera composé, comme le comité de réglementation, de représentants des États membres et présidé par le représentant de la Commission.

4.5. La proposition de règlement établit les principes fondamentaux qui doivent régir les échanges internationaux d'électricité et comporte une annexe contenant des orientations pour la gestion et l'attribution de la capacité d'interconnexion entre les réseaux nationaux. Dans cette annexe sont établis des critères relatifs à la gestion des réseaux encombrés et à la capacité excédentaire de transfert, aux contrats à long terme, à l'échange d'informations entre les gestionnaires de réseau et à la procédure pour les ventes aux enchères explicites de la capacité disponible. Ces orientations reposent sur les règles du marché libre et de non-discrimination et visent en outre une maximisation de l'utilisation des infrastructures existantes.

5. Observations générales

5.1. Le Comité économique et social souhaite souligner que les initiatives présentées s'inscrivent dans le cadre de la stratégie pour l'instauration du marché unique européen, à laquelle il a marqué son soutien à plusieurs reprises, dans la mesure où il contribue dans son ensemble au respect des principes fondamentaux du Traité relatifs à la promotion du développement économique, de l'emploi, de la compétitivité, de la qualité de la vie et de la cohésion économique et sociale.

5.2. Le Comité partage le souci de la Commission de progresser vers un vrai marché intérieur de l'électricité et du gaz naturel au sein de l'Union européenne, en tant que moyen d'accroître la concurrence entre les entreprises, ce qui se traduirait par des réductions des prix de l'énergie pour les entreprises et les consommateurs, et partant, augmenterait la compétitivité de l'économie européenne dans son ensemble, tout en améliorant le niveau et la qualité de vie de toute la population. C'est pourquoi il soutient les propositions présentées par la Commission.

5.3. Toutefois, compte tenu de l'expérience acquise au sein de l'Union européenne mais également en dehors de celle-ci, le processus d'ouverture des marchés et l'existence-même d'un marché intérieur de l'électricité et du gaz naturel donnent lieu à certaines incertitudes et ont des effets indirects sur les domaines social et/ou géographique, qui méritent de faire l'objet d'observations spécifiques. Toutes les institutions liées à ce processus doivent coopérer pour atteindre l'objectif de la création d'un marché unique, en minimisant les conséquences négatives. Aussi, faut-il mettre en évidence les inconvénients qui se présentent et proposer des solutions pour y remédier le plus tôt possible. Le CES espère que les aspects abordés dans le présent avis seront pris en considération dans le prochain rapport d'évaluation du marché intérieur dans le secteur de l'électricité et du gaz.

5.4. Le CES invite également la Commission à veiller à la mise en oeuvre du processus d'ouverture des marchés afin que les consommateurs domestiques en bénéficient réellement et afin d'éviter des distorsions de concurrence et, plus particulièrement, d'éviter que les entreprises fournisseuses qui jouissaient auparavant d'une situation de monopole, tant de fait que de droit, sur leurs marchés nationaux, ne profitent pas indûment de cette situation, ni n'entraînent des situations d'abus de position dominante.

5.5. Toutefois, le Comité constate avec préoccupation que la proposition de directive présente des défauts, dès lors qu'elle maintient des systèmes et des procédures supposés être remplacés, qu'elle ne développe pas les prémisses annoncées dans le préambule, qu'elle fait un rappel de rapports qui auraient dû être produits au moment de l'approbation des directives ou qu'elle fait référence à des termes, voire à des articles, qui n'apparaissent plus dans la nouvelle rédaction. Dans les observations particulières, des objections concrètes seront formulées à ce propos.

6. Observations particulières

6.1. Ouverture complète des marchés

6.1.1. Le Comité approuve pleinement la proposition de la Commission d'établir un calendrier aussi serré que possible afin que l'ensemble des consommateurs puissent choisir librement leur fournisseur d'électricité et de gaz au plus tard le 1er janvier 2005.

6.1.2. L'ouverture complète des marchés du gaz et de l'électricité permettra de résoudre le problème de la coexistence de différentes règles du jeu dans les différents États membres, qui est actuellement source de distorsions de concurrence et entrave la mise en place du marché intérieur.

6.1.3. Avec cette mesure, l'on réduira en plus les inconvénients dont souffrent les PME qui, souvent, doivent payer davantage pour la fourniture de gaz et d'électricité que les entreprises de taille supérieure, étant donné que ces dernières peuvent plus facilement changer de fournisseur dans la situation actuelle d'ouverture partielle des marchés.

6.1.4. Dans cette optique, il faut adopter des mesures pour éviter que cette accélération du processus d'ouverture des marchés n'aggrave pas le processus de destruction de l'emploi que connaissent les entreprises des secteurs touchés.

6.2. Sauvegardes pour garantir une offre suffisante

6.2.1. Le Comité tient à exprimer sa préoccupation quant aux problèmes qui sont apparus dans certaines régions du Monde, en Californie, par exemple, où un processus de libéralisation présentant de grandes défaillances a été engagé avec pour conséquence une nette réduction de la qualité du service fourni aux usagers ainsi qu'une importante hausse des prix à la consommation finale. Tout en sachant qu'il s'agit de processus différents, le processus d'ouverture du marché au niveau européen doit être menée en tirant les leçons des erreurs commises ailleurs et en adoptant toutes les mesures nécessaires pour éviter l'apparition de situations de déficit d'approvisionnement ou des tensions artificielles sur les prix.

6.2.2. En conséquence, le Comité accueille avec satisfaction les mesures proposées par la Commission pour établir des sauvegardes de nature à éloigner le risque d'apparition de ce type de problèmes. La plupart de ces mesures sont reprises dans le Livre vert sur la sécurité d'approvisionnement énergétique, qui a reçu le soutien du CES(4). Dans ce sens, la directive proposée comprend également des mesures concrètes consistant notamment à confier aux autorités réglementaires indépendantes la charge de veiller à l'équilibre entre l'offre et la demande et de maintenir le système d'appels d'offres pour les centrales électriques lorsque la capacité de génération nécessaire n'est pas atteinte, ou encore celle consistant à confier aux gestionnaires de réseau la responsabilité de leur maintenance et de leur développement.

6.2.3. L'existence d'une capacité de réserve suffisante est vitale pour le fonctionnement du système électrique. Toutefois, cette capacité excédentaire a un coût qui doit être supporté par l'ensemble du système, tant au niveau national que communautaire éventuellement. L'achèvement d'un vrai marché intérieur, dans lequel les échanges internationaux d'électricité atteignent le volume approprié, permettra d'optimiser à l'échelle européenne le niveau de la capacité de réserve nécessaire.

6.3. Séparation des activités

6.3.1. Le Comité économique et social juge positif l'approfondissement de la question de la séparation des activités des entreprises électriques et gazières, en y intégrant la nécessité d'une indépendance des gestionnaires des réseaux de transport vis-à-vis des autres activités du groupe dont ils font partie et en détaillant les conditions qu'ils doivent remplir afin de garantir que cette indépendance est effective.

6.3.2. Toutefois, ces mesures doivent être proportionnelles à l'objectif poursuivi et il faut éviter qu'elles entraînent pour les agents économiques des charges administratives excessives.

6.4. Obligations de service public

6.4.1. Le Comité tient à exprimer sa satisfaction quant au point de vue de la Commission selon lequel le parachèvement du marché intérieur est compatible avec la réalisation des objectifs de service public, comme il l'a dit avec beaucoup d'insistance depuis son avis de 1993(5).

6.4.2. Aussi, se félicite-t-il que la proposition présentée fasse valoir que la réalisation de certains objectifs de service public constitue un préalable essentiel pour la Commission en la matière et qu'il faut concrétiser les garanties associées à ces derniers, à savoir la satisfaction des usagers, la protection de l'environnement et la cohésion économique et sociale, sans oublier l'obligation de fourniture universelle pour l'électricité. Toutefois, le Comité économique et social souhaiterait que la directive ait notamment pour objectif la création, dans le secteur de l'électricité et du gaz naturel, de services publics qui, tout en garantissant un niveau de qualité élevé et des prix concurrentiels, contribueraient à la santé, à la sécurité d'approvisionnement et au bien-être économique des citoyens européens.

6.4.3. Le Comité estime que la réalisation d'objectifs primordiaux de service public doit s'accompagner de l'adoption de dispositions de nature à garantir un niveau élevé de protection des consommateurs domestiques grâce à des mesures spéciales pour les plus vulnérables. Pour ce faire, il faudrait définir des mesures sociales destinées aux catégories les plus vulnérables afin qu'elles puissent bénéficier de l'approvisionnement à un prix juste.

6.4.4. Il faudrait également adopter un ensemble minimal de conditions applicables aux contrats et à la transparence de l'information ainsi que de mécanismes transparents et abordables de règlement des litiges. Aussi, rappelle-t-il qu'il importe que les instances chargées du règlement des litiges remplissent les critères de la recommandation 98/257/CE(6) et utilisent si possible le "formulaire européen de réclamation" élaboré par la Commission. Il conviendrait également que celle-ci, dans le but d'améliorer la qualité de vie des consommateurs domestiques, tente d'instaurer au niveau européen des "profils de charge harmonisés"(7).

6.4.5. Par ailleurs, la proposition tient compte des progrès apportés par les directives originales. Dans cette logique, elle maintient les exceptions prévues quant à la préférence à accorder à l'intégration dans le réseau électrique de l'énergie provenant de sources renouvelables, de résidus ou d'installations de cogénération. Il convient néanmoins de maintenir, conformément aux dispositions de l'actuelle proposition de directive relative à la promotion de l'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables, des systèmes d'aide à ce type de sources d'énergie afin de garantir la compétitivité de ces dernières sur un marché libéralisé, comme le préconise le Comité dans son avis(8).

6.4.6. L'entretien approprié des réseaux est primordial pour en garantir la continuité et la qualité du service, tout en permettant de réduire les pertes d'énergie qui se produisent pendant le transport et la distribution. Le Comité estime que le principe de base, contenu dans la proposition de directive, qui consiste à confier aux gestionnaires de réseaux la responsabilité de leur entretien devrait être défini plus clairement et plus précisément lorsqu'il s'agira de transposer la directive dans les législations nationales. À cet effet, les niveaux d'investissement devront être tels que les gestionnaires de réseaux puissent répondre à tous les besoins économiques des usagers afin de fournir l'infrastructure nécessaire permettant de parvenir aux niveaux convenus de sécurité de l'approvisionnement à des niveaux compétitifs.

6.4.7. Cohésion territoriale et sociale

6.4.7.1. En ce qui concerne la cohésion territoriale, essentielle pour l'existence même de l'Union, il conviendrait d'étudier de manière plus approfondie les conséquences que peut avoir la création du marché intérieur sur les régions défavorisées, isolées, insulaires et ultrapériphériques.

6.4.7.2. Dans certaines de ces régions, et en raison de leur dimension, il est peu probable que la concurrence puisse avoir une incidence bénéfique pour les consommateurs domestiques et, par conséquent, ces régions se verront peut-être acculées au maintien de prix de l'énergie nettement supérieurs à ceux qui sont pratiqués dans les régions centrales de l'Europe à plus forte densité de population et partant, où les coûts de l'infrastructure par unité d'énergie fournie sont inférieurs. Cela créerait des conditions de compétitivité extrêmement défavorables et le sentiment chez les consommateurs, habitués depuis le début de la fourniture à des tarifs pratiquement identiques, d'être pénalisés par rapport à d'autres à l'intérieur de chaque État membre.

6.4.7.3. Pour éviter un tel déséquilibre, il faut mettre en place des mécanismes de compensation à l'échelle nationale, basés sur des critères objectifs, durables et compatibles avec le système d'aide d'État au niveau communautaire. De plus, comme l'a dit le Comité dans son avis sur la politique énergétique communautaire de 1993, l'on pourrait utiliser les fonds à finalité structurelle pour compenser, en un premier temps, le surcoût lié au développement de ces infrastructures, ce qui réduirait considérablement le niveau de compensation nécessaire pendant la vie utile de ces installations.

6.4.7.4. La directive 96/92/CE prévoit déjà une procédure à l'intention des réseaux électriques isolés de petite dimension, selon laquelle les État membres peuvent demander de bénéficier de certaines exceptions à l'application de la directive, lorsqu'ils peuvent prouver que des problèmes importants se sont produits sur ce type de réseaux. Le Comité estime qu'il faudrait pouvoir recourir au mécanisme d'exception avant l'apparition de situations de déséquilibre, après notification préalable à la Commission, qui quoi qu'il en soit, veillera à la conformité de la situation avec le droit communautaire.

6.4.7.5. En ce qui a trait au gaz naturel, la directive 98/30/CE prévoit également une procédure d'exception, mais qui est dans ce cas destinée aux marchés émergents, dont la définition s'applique uniquement aux États dans lesquels la première fourniture de gaz date d'il y a moins de dix ans. Il faut élargir cette définition pour y englober les régions isolées où la fourniture de gaz est antérieure.

6.4.7.6. Le CES estime que l'instauration du marché intérieur de l'électricité et du gaz ne doit pas entraver les progrès accomplis dans la réalisation des objectifs de cohésion économique et sociale dans les régions défavorisées de la Communauté.

6.4.8. Afin d'éviter l'existence de divergences entre les dispositions légales des États membres dans des matières pouvant relever de la notion de service public pour les secteurs de l'électricité et du gaz, qui faussent les conditions de concurrence et provoquent des distorsions que l'on doit éliminer, il conviendrait que la Commission envisage l'élaboration d'une réglementation spécifique harmonisant les droits des usagers (en particulier des entreprises) et les obligations des entreprises de distribution d'énergie, en vue du bon fonctionnement du marché intérieur.

6.4.9. Effets sur l'environnement

6.4.9.1. L'environnement semble être l'un des domaines les plus touchés par ce processus d'ouverture du marché, bien que l'Union européenne et les États membres aient adopté des mesures visant à réduire les effets environnementaux de la production et de la consommation d'énergie. Parmi ces mesures, il convient de souligner celles destinées à lutter contre le changement climatique en encourageant le recours aux énergies renouvelables ainsi que l'utilisation efficace de l'énergie.

6.4.9.2. Si l'achèvement du marché intérieur devait conduire à une réduction du prix de l'électricité et du gaz, il s'ensuivrait probablement une augmentation de la consommation. Les améliorations en matière d'efficience du système qui découleraient de l'ouverture à la concurrence dans le secteur pourront difficilement compenser l'accroissement de la consommation d'énergie, avec pour éventuel résultat final une augmentation de la consommation d'énergie primaire. Cette situation entraînerait une augmentation des émissions polluantes et compromet la réalisation des objectifs de Kyoto.

6.4.9.3. Il faut adopter, tant à l'échelle européenne que nationale, des mesures d'urgence dans l'esprit des mesures inscrites dans le cadre de la directive sur la performance énergétique des bâtiments ou dans le cadre du programme SAVE, afin de promouvoir une utilisation efficace de l'énergie et compenser ainsi les éventuels effets des augmentations de la demande. Une solution serait d'utiliser une partie des économies réalisées dans le cadre de la libéralisation pour le programme SAVE ou pour de nouveaux programmes de gestion de la demande, d'éducation et de formation des consommateurs domestiques, et de réduction des processus énergétiques. Une autre solution pourrait consister à augmenter la dotation du programme SAVE ou à créer de nouveaux programmes.

6.4.9.4. Le renforcement nécessaire de la capacité de transport qui permettrait un développement des échanges internationaux d'électricité et de gaz aura des incidences sur l'environnement, qu'il faudra atténuer si l'on veut vaincra l'opposition croissante des citoyens, en particulier lorsqu'elle peuvent toucher des zones faisant l'objet d'une protection spéciale du point de vue de l'environnement.

6.5. Effets sur l'emploi dans le secteur du gaz et de l'électricité

6.5.1. Le Comité souhaite exprimer sa préoccupation quant au processus de destruction de l'emploi que connaissent les secteurs de l'électricité et du gaz, suite à la libéralisation des marchés et en raison de la tendance à la sous-traitance et à l'externalisation de certains coûts des entreprises.

6.5.2. Cet état de fait semble indiquer que les coûts de l'ouverture à la concurrence sont supportés par les travailleurs des entreprises de ces secteurs principalement, sans que l'on ait pu constater qu'une compensation totale des pertes enregistrées dans les entreprises traditionnelles découlait d'une création directe d'emplois dans les nouvelles activités liées à l'ouverture du marché. Afin que les travailleurs concernés adhèrent au processus de déréglementation, un système de sécurité sociale qui adopte des mesures innovantes, est nécessaire. Il faudrait non seulement garantir une situation économique stable, y compris pour les travailleurs ayant perdu leur emploi, mais également mettre en oeuvre des systèmes de formation continue et des politiques efficaces en matière de bases de données sur le marché de l'emploi.

6.5.3. L'éventuel problème de la perte d'emplois dans ces secteurs prend une telle ampleur qu'il serait conseillé de le prendre en considération lors de l'élaboration des différents programmes nationaux en faveur de l'emploi. Cela permettrait d'engager des actions visant à minimiser les conséquences de ce phénomène, surtout si l'on tient compte du fait qu'une partie non négligeable des emplois perdus étaient occupés par des personnes ayant un niveau de formation et de qualification élevé, dont l'expérience peut être mise à profit dans d'autres domaines.

6.5.4. En tout état de cause, il est primordial que les processus de libéralisation soient gérés dans un contexte de prévention, et plus particulièrement en appliquant les meilleures pratiques en matière d'information, de consultation, de participation et de formation des travailleurs afin de réimplanter de façon appropriée la main-d'oeuvre excédentaire.

6.5.5. Le Comité demande à la Commission d'agir pour remédier à cette situation et d'élaborer, dans le cadre de sa compétence, une stratégie en vue de pouvoir accompagner l'ouverture des marchés par l'adoption de mesures communautaires ayant pour objectif le développement d'une stratégie coordonnée visant un niveau élevé d'emploi.

6.6. Effets sur les pays candidats

6.6.1. Le Comité émet également de nombreuses réserves quant aux répercussions de la libéralisation des marchés de l'énergie sur les pays qui feront partie dans un avenir proche de l'Union européenne.

6.6.2. Les secteurs de l'électricité et du gaz naturel dans les pays candidats se caractérisent, en général, par un niveau de soutien et d'intervention des pouvoirs publics élevé ainsi que par des infrastructures et des méthodes de gestion peu compétitives.

6.6.2.1. Cela peut avoir pour conséquence immédiate une forte réduction de l'emploi dans les entreprises de ces secteurs, qui provoquerait des tensions sociales insupportables dans les pays candidats, en particulier s'ils ne disposent pas d'un système de sécurité sociale similaire à celui qui existe dans les États membres.

6.6.2.2. Aussi, l'Union européenne doit-elle faire bénéficier ces pays des expériences acquises dans les processus de libéralisation en cours en Europe et apporter un concours financier à la modernisation des entreprises. Il faut en conséquence adapter l'ouverture de ces nouveaux marchés à la restructuration de leurs secteurs énergétiques, afin que les pays candidats soient en mesure d'entrer en concurrence sur un pied d'égalité.

6.7. Autorités réglementaires nationales

6.7.1. Il est à espérer que l'instauration d'autorités réglementaires nationales dans tous les États membres et l'attribution à celles-ci de la faculté de fixer ou d'approuver les tarifs pour l'accès de tiers au réseau seront garantes de transparence et de non-discrimination dans le processus, raison pour laquelle le Comité est favorable à la création de ces instances et à celle d'un organisme chargé du suivi de la sécurité de la fourniture d'électricité et de gaz naturel, tout en attendant avec intérêt les résultats du rapport qui sera présenté au Conseil européen de Barcelone.

6.7.2. L'utilité de l'existence de cette instance a été confirmée par le fait que presque tous les pays de l'Union européenne ont créé leurs autorités réglementaires nationales, qui leur permettent d'agir "ex ante" et dans certains cas, de leur propre initiative à la différence d'autres types d'organismes qui n'interviennent qu'une fois l'infraction commise.

6.7.3. Les fonctions que la proposition de directive confère à ces autorités sont suffisamment larges, dès lors qu'elles englobent, en plus de la fixation ou de l'approbation des tarifs d'accès au réseau, la garantie du respect des obligations de service public par les entreprises et la gestion de la congestion des réseaux à l'échelle nationale.

6.7.4. Toutefois, il faudrait que ces autorités fonctionnent de manière plus transparente et démocratique, en faisant participer les différents acteurs concernés des marchés de l'électricité et du gaz naturel (consommateurs, travailleurs et entreprises) au processus de prise de décision.

6.7.5. Le CES se félicite de la création du Conseil des régulateurs européens de l'énergie (CEER), et invite la Commission à envisager, au vu de l'expérience acquise par ledit Conseil, la possibilité de transformer cet organe en une Agence européenne ou en un organisme similaire compétent dans les matières relatives au transport international d'électricité et de gaz naturel.

6.8. Effets sur les consommateurs et les PME

6.8.1. La création du marché intérieur de l'énergie n'a pas bénéficié aux consommateurs domestiques et aux PME autant qu'aux grandes entreprises. Comme mentionné précédemment, cette situation est plus particulièrement significative en période de transition de l'ouverture du libre accès au fournisseur, qui porte préjudice au niveau de compétitivité des PME.

6.8.2. Le Comité estime que pour compenser ces différences, il faut encourager la création d'organisations de gestion d'achat en commun pour les PME et les consommateurs domestiques. Ces organisations peuvent négocier, au nom d'un ensemble de clients, un contrat-cadre avec différents fournisseurs, qui évite à ceux-ci le travail de négociation individuelle avec chaque client et qui permet aux clients de bénéficier de meilleures conditions de fourniture.

6.8.3. Dans cet ordre d'idées, il faudra mettre en place des mécanismes souples et transparents de règlement des conflits entre les entreprises fournisseuses et les entreprises clientes.

6.9. Systèmes d'accès au réseau

6.9.1. L'existence de différentes procédures d'accès aux réseaux dans les différents États membres peut provoquer des situations de déséquilibre en matière d'accès réciproque des entreprises de différents pays aux réseaux nationaux.

6.9.2. La majeure partie des États membres ont adopté le système d'accès réglementé avec des tarifs publiés car il s'agit, de l'avis des États membres, du meilleur moyen de garantir la liberté d'accès et d'éviter les distorsions de concurrence et/ou les éventuelles situation d'abus de position dominante. Le fait que ces tarifs constituent un plafond pourrait contribuer à surmonter la méfiance qui règne à ce sujet dans certains États membres. Toutefois, la capacité de fonctionnement des systèmes actuels ou la concurrence réelle entre les différents États membres n'ont jusqu'à présent fait l'objet d'aucune évaluation. Par conséquent, il a été demandé à la Commission de présenter au Sommet de Barcelone un rapport comprenant une évaluation comparative.

6.9.3. Le Comité estime que la proposition de la Commission d'instaurer un système unique d'accès aux réseaux basé sur des tarifs publiés suppose de faire progresser l'harmonisation dans le secteur. Le Comité est néanmoins partisan de tout type de système d'accès de tiers au réseau, à condition que la procédure soit neutre, transparente, équitable et non discriminatoire.

6.9.4. Toutefois, il est nécessaire de prendre des mesures pour garantir effectivement que l'accès au réseau a lieu dans des conditions non discriminatoires. Parmi ces mesures, il faudra prévoir notamment un délai de réponse à la demande d'accès et des mécanismes souples de règlement des litiges qui pourraient exister, ainsi qu'un organisme chargé de son contrôle.

6.10. Aspects liés à la concurrence

6.10.1. La réalisation du marché intérieur suppose souvent la disparition de monopoles nationaux et la déréglementation des secteurs concernés, afin de faire place à un marché où les entreprises peuvent se lancer dans la concurrence à armes égales.

6.10.2. Toutefois, la recherche de nouveaux marchés et d'économies d'échelle au sein des entreprises peut engendrer un processus de concentration, qui entraîne à son tour la disparition de petites entreprises dont une grande partie fait partie des biens municipaux. Le marché européen de l'électricité et du gaz peut ainsi être contrôlé par un nombre restreint de grandes entreprises qui, dans la pratique, opèrent dans leur zone d'influence respective en faussant la concurrence par abus de marché individuel ou collectif.

6.10.3. Dans de telles circonstances, qui peuvent être assimilées à une situation monopolistique bien que l'on soit en présence d'un marché ouvert et déréglementé, les entreprises pourraient tendre à augmenter leurs bénéfices au détriment de la qualité du service et grâce à une augmentation des prix, ce qui porterait préjudice à la compétitivité de l'économie européenne et, d'une façon générale, à l'ensemble des consommateurs.

6.10.4. Afin d'éviter une telle situation, les autorités de concurrence tant nationales que communautaires doivent veiller tout particulièrement à éviter que les entreprises engagées dans des processus de concentration comme ceux qui donnent lieu à des situations d'abus de position dominante individuelle et/ou collective finissent par violer les principes d'une économie de marché ouverte et fondée sur la libre concurrence.

6.11. Observations particulières concernant la proposition de règlement

6.11.1. La proposition de règlement présentée par la Commission a pour objectif de donner un élan aux échanges internationaux d'électricité et d'établir la cadre nécessaire pour leur régulation.

6.11.2. Le Comité estime également qu'il est nécessaire d'édicter des mesures en vue d'accroître les échanges internationaux d'électricité et considère que la proposition de règlement à l'examen est un bon instrument pour ce faire. Les principes définis dans ce document sont justes et portent sur des aspects du problème qui sont fondamentaux pour parvenir à une augmentation considérable du volume d'échanges internationaux d'électricité, à condition qu'ils entrent en vigueur en même temps que la directive modifiée. Dans le cas contraire, la concurrence pourrait être faussée, ce qui entraînerait de graves distorsions en raison des différences dans le degré d'ouverture des marchés.

6.11.3. Toutefois, recourir aussi largement aux dispositions des articles 3 et 5 de la décision 1999/468/CE, revient à conférer à la Commission des compétences bien plus larges que ne le sont les siennes en la matière. La raison d'une telle délégation de pouvoirs est peut-être la complexité technique des décisions à prendre et la nécessité d'adapter, de manière effective, les règles aux nouvelles situations qui pourraient se faire jour.

6.11.4. Le Comité estime qu'il est nécessaire de déléguer ces compétences à la Commission, tout en considérant que cette délégation ne doit lui conférer que la faculté de modifier des orientations et des règles qui auraient été préalablement consignées dans le règlement et approuvées et non celle de définir celles-ci en marge du processus législatif.

6.11.5. En ce sens, le Comité demande à la Commission que sa proposition de règlement actuelle tienne compte du principe de subsidiarité et justifie en particulier que:

- la question en objet comporte des aspects transnationaux qui ne sauraient être réglementés de manière satisfaisante à travers une intervention des États membres;

- les actions des États membres à elles seules, ou l'absence d'intervention communautaire, entreraient en conflit avec les exigences du traité (telles que la nécessité de corriger les distorsions de concurrence, d'éviter des restrictions cachées au commerce ou encore, de renforcer la cohésion économique et sociale, entre autres), et pourraient porter préjudice dans une mesure considérable aux intérêts des États membres;

- l'action communautaire apportera des bénéfices évidents compte tenu de son échelle ou de ses effets, par comparaison avec l'intervention au niveau des États membres.

6.11.6. De même, la Commission devra tenir compte des aspects suivants:

- la forme de l'intervention communautaire devra être la plus simple possible et cohérente avec la réalisation satisfaisante de l'objectif de la mesure et

- les mesures communautaires devront laisser une marge de manoeuvre la plus large possible pour que des décisions puissent être prises au niveau national, de manière compatible avec le double objectif poursuivi, à savoir que les mesures doivent atteindre leur but et respecter les exigences du traité.

6.11.7. Toutefois, le Comité juge positif le contenu de la proposition de règlement en ce qui concerne la création du comité consultatif et de réglementation, dans la mesure où elle peut contribuer à la pleine réalisation du marché intérieur, tout en faisant valoir qu'il conviendrait de présenter des rapports périodiques au Conseil, au Parlement européen et au Comité économique et social.

7. Observations particulières concernant la modification apportée à la directive 96/92/CE

7.1. Comme cela a déjà été dit précédemment, la proposition de directive instaure un système d'accès de tiers au réseau basé sur des tarifs publiés, qui doivent être fixés ou approuvés par l'autorité réglementaire nationale. Toutefois, en plusieurs endroits du document, le doute est permis quant à l'exclusivité de ce système et son éventuelle coexistence avec celui de l'"accès négocié", à l'article 20, paragraphe 1, par exemple, qui n'a pas été modifié dans la proposition présentée par la Commission et qui prévoit la possibilité d'un "accès négocié" pour les autoproducteurs et les producteurs indépendants. Le deuxième paragraphe de ce même article comporte une nouvelle référence, d'ordre général cette fois, à la négociation. Il y aurait lieu de préciser si l'objectif est de maintenir cette modalité d'accès négocié et, dans l'affirmative, quelles peuvent être les répercussions quant aux discriminations entre les usagers du réseau.

7.2. La rédaction de l'article 21, qui n'est pas modifiée dans le nouveau texte proposé, est également source de confusion, en ce qu'il fait référence à plusieurs reprises aux articles 17 et 18 de la directive 96/92/CE. Ces deux articles n'apparaissent plus dans le nouveau texte et se réfèrent précisément aux systèmes d'accès au réseau négocié ou fondés sur le modèle de l'acheteur unique. Aussi, faut-il modifier la rédaction de l'article 21, en y consignant les modifications proposées par la Commission concernant le système d'accès de tiers aux réseaux.

7.3. Le texte est émaillé de nombreuses références au "client éligible", plus précisément aux articles 3, 16, 19 et 21. Certains de ces articles conservent la rédaction originale, tandis que dans d'autres celle-ci a été modifiée. Le texte de la directive 96/92/CE en vigueur confie aux États membres, à son article 19, paragraphe 3, la responsabilité de publier tous les ans les critères de définition des clients éligibles. Toutefois, ce paragraphe ne figure plus dans le nouveau texte de la directive, et par conséquent cette notion de "client éligible" demeure imprécise.

7.4. Dans le texte présenté par la Commission, il est estimé nécessaire que les États membres garantissent que les gestionnaires de réseau de transport et de distribution répondent aux demandes d'accès dans un délai raisonnable. Il conviendrait néanmoins que la directive mentionne un délai précis pour éviter certaines décisions arbitraires.

8. Observations spécifiques concernant la modification apportée à la directive 98/30/CE

8.1. Les installations de stockage du gaz naturel font l'objet de la seule exception au système d'accès établi dans les deux directives. Dans ce cas en effet, outre l'accès réglementé, l'accès négocié est autorisé (article 15). On peut en conclure que les installations de stockage de gaz naturel liquéfié (GNL) peuvent faire l'objet d'un accès négocié ou pas, dès lors qu'aux termes de l'article 14, seule la procédure d'accès réglementé est admise pour les installations de GNL.

8.2. Comme dans la directive 96/92/CE, la notion de "client éligible" n'est pas bien définie, en raison de la modification de l'article 18 dans la nouvelle rédaction, dans lequel étaient fixées des exigences minimales et confiée aux États membres la charge de définir la portée finale de la notion.

8.3. Aux termes de la directive, les États membres ne désignent pas les gestionnaires de réseau de transport de gaz naturel, alors qu'elles désignent ceux des réseaux de distribution, voire, dans la directive 96/92/CE, de réseaux de transport et de distribution d'électricité. Ce critère semble indiquer que la Commission entend assimiler les fonctions de gestionnaire de réseau de distribution de gaz naturel à l'entreprise propriétaire de celui-ci. Toutefois, les paragraphes 4 et 5 de l'article 10 mentionnent expressément les gestionnaires de réseau de distribution, ce qui pourrait vouloir dire qu'il s'agit d'entités distinctes des entreprises de distribution. Dans un souci de cohérence des textes, il faudrait établir une similitude quant à l'exploitation des réseaux par les gestionnaires.

8.4. Le texte comporte plusieurs références croisées ayant leur origine dans la rédaction originale de la directive mais qui, avec le contenu actuel, perdent de leur validité ou devraient être modifiées. L'on peut citer par exemple les références à l'article 18 figurant aux articles 20, paragraphe 1 et 23, paragraphe 1, qui compte tenu de la rédaction actuelle n'ont plus de sens, dès lors qu'elles concernent à nouveau la portée de la notion de "client éligible". De même, aux articles 1, 2 et 3 de l'article 26, figurent des références aux paragraphes 3, 4, et 6 de l'article 18, qui n'existent plus dans le nouveau texte. L'article 25 contient également une référence à l'article 16 qui a été supprimé du texte proposé.

8.5. La directive sur le marché intérieur de l'électricité prévoit une mesure de sauvegarde pour la sécurité de l'approvisionnement, à savoir la possibilité de recourir à l'appel d'offres pour la construction d'une nouvelle capacité de production d'électricité, lorsque celle qu'il est prévu d'installer à travers la procédure d'autorisation peut s'avérer insuffisante pour satisfaire la demande. Il conviendrait d'étudier la possibilité de recourir à une procédure similaire pour les installations de GNL.

Bruxelles, le 17 octobre 2001.

Le Président

du Comité économique et social

Göke Frerichs

(1) JO C 75 du 26.3.1990.

(2) Avis du CES sur la proposition de directive relative à des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et la proposition de directive relative à des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel du 27 janvier 1993, JO C 73 du 15.3.1993 et avis du CES sur la proposition modifiée de directive relative à des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et la proposition modifiée de directive concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel, du 28 avril 1994, JO C 195 du 18.7.1994.

(3) Directives 90/547/CEE et 91/296/CEE.

(4) JO C 221 du 7.8.2001, p. 45.

(5) JO C 75 du 26.3.1990.

(6) Recommandation relative aux principes applicables aux organes responsables pour la résolution extrajudiciaire des litiges de consommation, JO L 115 du 17.4.1998, p. 31-34.

(7) Selon la Commission, l'on peut avec les profils de charge harmonisés déterminer le volume et le calendrier de la demande en électricité d'un petit consommateur. Tout écart par rapport au profil est rectifié après lecture périodique du compteur, ce qui élimine la nécessité d'une coûteuse lecture minute par minute de la consommation effective et la mise en relation de cette mesure avec la quantité contractuelle.

(8) JO C 367 du 20.12.2000, p. 5.

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