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Document 62005TJ0019

Arrêt du Tribunal (huitième chambre) du 19 mai 2010.
Boliden AB, Outokumpu Copper Fabrication AB et Outokumpu Copper BCZ SA contre Commission européenne.
Concurrence - Ententes - Secteur des tubes sanitaires en cuivre - Décision constatant une infraction à l’article 81 CE - Infraction continue et multiforme - Amendes - Prescription - Coopération.
Affaire T-19/05.

Recueil de jurisprudence 2010 II-01843

Identifiant ECLI: ECLI:EU:T:2010:203

Affaire T-19/05

Boliden AB e.a.

contre

Commission européenne

« Concurrence — Ententes — Secteur des tubes sanitaires en cuivre — Décision constatant une infraction à l’article 81 CE — Infraction continue et multiforme — Amendes — Prescription — Coopération »

Sommaire de l'arrêt

1.      Concurrence — Ententes — Entreprises pouvant se voir reprocher l'infraction consistant à participer à une entente globale

(Art. 81, § 1, CE)

2.      Concurrence — Amendes — Lignes directrices pour le calcul des amendes — Méthode de calcul prenant en compte divers éléments de flexibilité

(Art. 229 CE; règlements du Conseil nº 17, art. 15, § 2, et nº 1/2003, art. 23, § 2; communication de la Commission 98/C 9/03)

3.      Procédure — Production de moyens nouveaux en cours d'instance — Conditions — Moyen nouveau

(Règlement de procédure du Tribunal, art. 44, § 1, et 48, § 2)

4.      Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Critères — Durée de l'infraction — Infractions de longue durée — Majoration de 10 % du montant de départ par année

(Règlements du Conseil nº 17, art. 15, § 2, et nº 1/2003, art. 23, § 2; communication de la Commission 98/C 9/03, point 1 B)

5.      Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Critères — Réduction du montant de l'amende en contrepartie d'une coopération de l'entreprise incriminée — Conditions

(Règlements du Conseil nº 17 et nº 1/2003; communication de la Commission 96/C 207/04)

1.      Une entreprise peut être tenue pour responsable d’une entente globale même s’il est établi qu’elle n’a participé directement qu’à un ou plusieurs des éléments constitutifs de cette entente, dès lors qu’elle savait ou devait nécessairement savoir, d’une part, que la collusion à laquelle elle participait s’inscrivait dans un plan global et, d’autre part, que ce plan global recouvrait l’ensemble des éléments constitutifs de l’entente.

(cf. point 61)

2.      Les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 15, paragraphe 2, du règlement nº 17 et de l'article 65, paragraphe 5, du traité CECA, bien qu’elles ne puissent être qualifiées de règle de droit, énoncent une règle de conduite indicative de la pratique à suivre, dont la Commission ne peut s’écarter, dans un cas particulier, sans donner des raisons qui soient compatibles avec le principe d’égalité de traitement. Il appartient donc au Tribunal de vérifier, dans le cadre du contrôle de la légalité des amendes infligées par une décision de la Commission, si cette dernière a exercé son pouvoir d’appréciation selon la méthode exposée dans lesdites lignes directrices et, dans la mesure où il devrait constater qu’elle s’en est départie, de vérifier si cet écart est justifié et motivé à suffisance de droit.

L’autolimitation du pouvoir d’appréciation de la Commission résultant de l’adoption des lignes directrices n’est pas incompatible avec le maintien d’une marge d’appréciation substantielle pour la Commission. Les lignes directrices contiennent différents éléments de flexibilité qui permettent à la Commission d’exercer son pouvoir discrétionnaire en conformité avec les dispositions des règlements nº 17 et nº 1/2003, telles qu’interprétées par la Cour de justice. Partant, dans les domaines où la Commission a conservé une marge d’appréciation, le contrôle de la légalité opéré sur ces appréciations se limite à celui de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation. La marge d’appréciation de la Commission et les limites qu’elle y a apportées ne préjugent pas, en principe, de l’exercice, par le juge, de sa compétence de pleine juridiction, qui l’habilite à supprimer, à réduire ou à majorer le montant de l’amende infligée par la Commission.

(cf. points 74-78)

3.      Il ressort des dispositions combinées de l’article 44, paragraphe 1, sous c), et de l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal que la requête introductive d’instance doit indiquer l’objet du litige et contenir un exposé sommaire des moyens invoqués et que la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure. Cependant, un moyen qui constitue l’ampliation d’un moyen énoncé antérieurement, directement ou implicitement, dans la requête introductive d’instance et qui présente un lien étroit avec celui-ci doit être déclaré recevable. Une solution analogue s’impose pour un grief invoqué au soutien d’un moyen.

Dans le cadre d'un recours tendant à l'annulation ou à la réduction du montant d'une amende infligée à une entreprise par une décision de la Commission pour infraction aux règles communautaires de concurrence, doit être déclaré irrecevable un grief, invoqué pour la première fois dans la réplique, portant sur l’appréciation de la gravité de la participation de l'entreprise concernée à l'infraction, lorsque la requête ne contient qu'un moyen tiré du caractère prétendument disproportionné de l’amende infligée et visant uniquement la majoration du montant de départ de l'amende au titre de la durée. Ce grief ne peut pas être considéré comme étant une ampliation du moyen de la requête. En effet, la contestation d’un élément essentiel d’une décision, tel que l’appréciation de la gravité de l’infraction, doit être formulée de façon spécifique devant le Tribunal dès le stade de la requête.

(cf. points 90-92)

4.      Il ressort des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 15, paragraphe 2, du règlement nº 17 et de l'article 65, paragraphe 5, du traité CECA que la Commission n’a établi aucun chevauchement ni aucune interdépendance entre l’appréciation de la gravité et celle de la durée de l’infraction. Le fait qu'elle se soit réservé une possibilité de majoration par année d’infraction allant, s’agissant des infractions de longue durée, jusqu’à 10 % du montant retenu pour la gravité de l’infraction ne l’oblige nullement à fixer ce taux en fonction de l’intensité des activités de l’entente ou des effets de celle-ci, voire de la gravité de l’infraction. Il lui appartient en effet de choisir, dans le cadre de sa large marge d’appréciation, le taux de majoration qu’elle entend appliquer au titre de la durée de l’infraction.

(cf. points 95-96, 98)

5.      Dans le cadre de l’appréciation de la coopération fournie par les membres d’une entente, la Commission bénéficie d'une large marge d'appréciation pour évaluer la qualité et l’utilité de la coopération fournie par une entreprise, notamment par rapport aux contributions d’autres entreprises. Seule une erreur manifeste d’appréciation de la part de la Commission est donc susceptible d’être censurée. La Commission ne saurait pour autant, dans le cadre de ladite appréciation, méconnaître le principe d’égalité de traitement.

(cf. point 105)







ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

19 mai 2010 (*)

« Concurrence – Ententes – Secteur des tubes sanitaires en cuivre – Décision constatant une infraction à l’article 81 CE – Infraction continue et multiforme – Amendes – Prescription – Coopération »

Dans l’affaire T‑19/05,

Boliden AB, établie à Stockholm (Suède),

Outokumpu Copper Fabrication AB, anciennement Boliden Fabrication AB, établie à Västerås (Suède),

Outokumpu Copper BCZ SA, anciennement Boliden Cuivre & Zinc SA, établie à Liège (Belgique),

représentées initialement par Mes C. Wetter et O. Rislund, puis par Mes Wetter et M. Johansson, avocats,

parties requérantes,

contre

Commission européenne, représentée par MM. É. Gippini Fournier et S. Noë, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, en premier lieu, une demande d’annulation de l’article 1er, sous a) à c), de la décision C (2004) 2826 de la Commission, du 3 septembre 2004, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (Affaire COMP/E-1/38.069 – Tubes sanitaires en cuivre), en ce qu’il y est constaté que les requérantes ont participé à une infraction entre le 1er juillet 1995 et le 27 août 1998, ainsi qu’entre le 10 décembre 1998 et le 7 octobre 1999, en deuxième lieu, une demande de réduction du montant de l’amende infligée par cette décision aux requérantes et, en troisième lieu, une demande reconventionnelle de la Commission tendant à l’augmentation dudit montant,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de Mme M. E. Martins Ribeiro, président, MM. S. Papasavvas et N. Wahl (rapporteur), juges,

greffier : Mme C. Kantza, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 4 novembre 2008,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Les requérantes, Outokumpu Copper Fabrication AB (anciennement Boliden Fabrication AB), Outokumpu Copper BCZ SA (anciennement Boliden Cuivre & Zinc SA) et Boliden AB font partie du groupe Boliden, dont la société mère, Boliden, est une société de droit suédois, cotée à la Bourse de Stockholm (Suède), qui possède des établissements en Europe et au Canada. Le groupe est spécialisé, notamment, dans l’exploitation minière, la transformation et la vente de métaux et de produits minéraux, principalement le cuivre et le zinc.

1.     Procédure administrative

2        À la suite de la communication d’informations par Mueller Industries Inc. (ci-après « Mueller ») en janvier 2001, la Commission des Communautés européennes a procédé à des vérifications inopinées, en mars 2001, dans les locaux de plusieurs entreprises actives dans le secteur des tubes en cuivre, en vertu de l’article 14 du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d’application des articles [81 CE] et [82 CE] (JO 1962, 13, p. 204).

3        Les 9 et 10 avril 2001, des vérifications complémentaires ont été effectuées dans les locaux de KME Germany AG (anciennement KM Europa Metal AG) ainsi que d’Outokumpu Oyj et de Luvata Oy (anciennement Outokumpu Copper Products Oy) (ci-après, prises ensemble, le « groupe Outokumpu »). Le 9 avril 2001, Outokumpu a présenté à la Commission une offre de coopération au titre de la communication de la Commission concernant la non-imposition d’amendes ou la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 1996, C 207, p. 4, ci-après la « communication de 1996 sur la coopération »), tant pour les tubes industriels que pour les tubes sanitaires. À la suite de vérifications complémentaires, la Commission a scindé son enquête portant sur les tubes en cuivre en trois procédures distinctes, à savoir l’affaire COMP/E‑1/38.069 (Tubes sanitaires en cuivre), l’affaire COMP/E‑1/38.121 (Raccords) et l’affaire COMP/E‑1/38.240 (Tubes industriels).

4        Par lettre du 30 mai 2001, le groupe Outokumpu a transmis à la Commission un mémorandum, accompagné d’un certain nombre d’annexes, décrivant le secteur des tubes en cuivre et les accords collusifs s’y rapportant.

5        Le 5 juin 2002, dans le cadre de l’affaire COMP/E‑1/38.240 (Tubes industriels), des entretiens relatifs à l’offre de coopération faite par le groupe Outokumpu ont eu lieu, à l’initiative de la Commission, avec des représentants de cette entreprise. Cette dernière a également fait savoir qu’elle était disposée à ce que la Commission interroge les membres de son personnel impliqués dans les accords visés par l’affaire COMP/E‑1/38.069 (Tubes sanitaires en cuivre).

6        En juillet 2002, dans le cadre de l’affaire COMP/E‑1/38.240 (Tubes industriels), la Commission a, en application de l’article 11 du règlement n° 17, d’une part, adressé des demandes de renseignements à Wieland-Werke AG (ci-après « Wieland ») et au groupe KME [composé de KME Germany, KME France SAS (anciennement Tréfimétaux SA) et KME Italy SpA (anciennement Europa Metalli SpA)] et, d’autre part, invité le groupe Outokumpu à lui communiquer des informations complémentaires. Le 15 octobre 2002, le groupe KME a répondu à ladite demande de renseignements. Sa réponse contenait également une déclaration et une demande visant à bénéficier de l’application de la communication de 1996 sur la coopération dans le cadre de l’affaire COMP/E‑1/38.069 (Tubes sanitaires en cuivre). En outre, le groupe KME a permis à la Commission d’utiliser toutes les informations fournies dans le cadre de l’affaire COMP/E‑1/38.240 (Tubes industriels) dans celui de l’affaire COMP/E‑1/38.069 (Tubes sanitaires en cuivre).

7        Le 23 janvier 2003, Wieland a communiqué à la Commission une déclaration comprenant une demande visant à bénéficier, dans le cadre de l’affaire COMP/E‑1/38.069 (Tubes sanitaires en cuivre), de l’application de la communication de 1996 sur la coopération.

8        Dans le cadre de l’affaire COMP/E‑1/38.069 (Tubes sanitaires en cuivre), la Commission a adressé, le 3 mars 2003, des demandes de renseignements au groupe Boliden, à HME Nederland BV (ci-après « HME ») et à Chalkor AE Epexergasias Metallon (ci-après « Chalkor »), ainsi que, le 20 mars 2003, au groupe IMI (composé d’IMI plc, d’IMI Kynoch Ltd et de Yorkshire Copper Tube).

9        Le 9 avril 2003, des représentants de Chalkor ont rencontré les représentants de la Commission et ont demandé, dans le cadre de l’affaire COMP/E‑1/38.069 (Tubes sanitaires en cuivre), l’application de la communication de 1996 sur la coopération.

10      Le 29 août 2003, la Commission a, dans le cadre de l’affaire COMP/E‑1/38.069 (Tubes sanitaires en cuivre), adopté une communication des griefs adressée aux sociétés concernées. Après que lesdites sociétés ont eu accès au dossier, sous format électronique, et qu’elles ont présenté des observations écrites, elles ont pris part, à l’exception de HME, à une audition le 28 novembre 2003.

11      Le 16 décembre 2003, la Commission a adopté la décision C (2003) 4820 final, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (Affaire COMP/E‑1/38.240 – Tubes industriels), dont un résumé est publié au Journal officiel de l’Union européenne du 28 avril 2004 (JO L 125, p. 50).

2.     Décision attaquée

12      Le 3 septembre 2004, la Commission a adopté la décision C (2004) 2826 relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (Affaire COMP/E-1/38.069 – Tubes sanitaires en cuivre) (ci-après la « décision attaquée »), dont un résumé est publié au Journal officiel de l’Union européenne du 13 juillet 2006 (JO L 192, p. 21).

13      La décision attaquée comprend notamment les dispositions suivantes :

« Article premier

Les entreprises suivantes ont enfreint les dispositions de l’article 81, paragraphe 1, [CE] et, à compter du 1er janvier 1994, de l’article 53, paragraphe 1, de l’accord EEE, en participant, au cours des périodes indiquées, à un ensemble d’accords et de pratiques concertées qui ont porté sur la fixation des prix et le partage des marchés dans le secteur des tubes sanitaires en cuivre :

a)      Boliden […], solidairement avec [Outokumpu Copper Fabrication] et [Outokumpu Copper BCZ], du 3 juin 1988 au 22 mars 2001 ;

b)      [Outokumpu Copper Fabrication], solidairement avec Boliden […] et [Outokumpu Copper BCZ], du 3 juin 1988 au 22 mars 2001 ;

c)      [Outokumpu Copper BCZ], solidairement avec Boliden […] et [Outokumpu Copper Fabrication], du 3 juin 1988 au 22 mars 2001 ;

d)      Austria Buntmetall AG :

i)      solidairement avec Buntmetall Amstetten [GmbH], du 29 août 1998 au moins au 8 juillet 1999, et

ii)      solidairement avec [Wieland] et Buntmetall Amstetten […], du 9 juillet 1999 au 22 mars 2001 ;

e)      Buntmetall Amstetten […] :

i)      solidairement avec Austria Buntmetall […], du 29 août 1998 au moins au 8 juillet 1999, et

ii)      solidairement avec [Wieland] et Austria Buntmetall […], du 9 juillet 1999 au 22 mars 2001 ;

f)      [Chalkor], du 29 août 1998 au moins jusqu’au moins au début de septembre 1999 ;

g)      [HME] du 29 août 1998 au moins jusqu’au 22 mars 2001 ;

h)      IMI […], solidairement avec IMI Kynoch […] et Yorkshire Copper Tube […], du 29 septembre 1989 au 22 mars 2001 ;

i)      IMI Kynoch […], solidairement avec IMI […] et Yorkshire Copper Tube […], du 29 septembre 1989 au 22 mars 2001 ;

j)      Yorkshire Copper Tube […], solidairement avec IMI […] et IMI Kynoch […], du 29 septembre 1989 au 22 mars 2001 ;

k)      [KME Germany] :

i)      individuellement, du 3 juin 1988 au 19 juin 1995, et

ii)      solidairement avec [KME France] et [KME Italy], du 20 juin 1995 au 22 mars 2001 ;

l)      [KME Italy] :

i)      solidairement avec [KME France], du 29 septembre 1989 au 19 juin 1995, et

ii)      solidairement avec [KME Germany] et [KME France], du 20 juin 1995 au 22 mars 2001 ;

m)      [KME France] :

i)      solidairement avec [KME Italy], du 29 septembre 1989 au 19 juin 1995, et

ii)      solidairement avec [KME Germany] et [KME Italy], du 20 juin 1995 au 22 mars 2001 ;

[…]

s)      Outokumpu […], solidairement avec [Luvata], du 29 septembre 1989 au 22 mars 2001 ;

t)      [Luvata], solidairement avec Outokumpu […], du 29 septembre 1989 au 22 mars 2001 ;

u)      [Wieland] :

i)      individuellement du 29 septembre 1989 au 8 juillet 1999, et

ii)      solidairement avec Austria Buntmetall […] et Buntmetall Amstetten […], du 9 juillet 1999 au 22 mars 2001.

Article 2

Pour les infractions visées à l’article 1er, les amendes suivantes sont infligées :

a)      Boliden […], [Outokumpu Copper Fabrication] et [Outokumpu Copper BCZ], solidairement : 32,6 millions d’euros ;

b)      Austria Buntmetall […] et Buntmetall Amstetten […], solidairement: 0,6695 million d’euros ;

c)      Austria Buntmetall […], Buntmetall Amstetten […] et [Wieland], solidairement : 2,43 millions d’euros ;

d)      [Chalkor] : 9,16 millions d’euros ;

e)      [HME] : 4,49 millions d’euros ;

f)      IMI […], IMI Kynoch […] et Yorkshire Copper Tube […], solidairement : 44,98 millions d’euros ;

g)      [KME Germany] : 17,96 millions d’euros ;

h)      [KME Germany], [KME France] et [KME Italy], solidairement : 32,75 millions d’euros ;

i)      [KME Italy] et [KME France], solidairement : 16,37 millions d’euros ;

j)      Outokumpu […] et [Luvata], solidairement : 36,14 millions d’euros ;

k)      [Wieland], individuellement : 24,7416 millions d’euros.

[…] »

14      La Commission a estimé que les entreprises en cause avaient participé à une infraction (ci-après le « cartel » ou l’« infraction en cause ») unique, continue, complexe et, dans le cas du groupe Boliden, du groupe KME et de Wieland, multiforme. La Commission a précisé que les accords nationaux n’étaient pas visés, en tant que tels, par la décision attaquée (considérants 2 et 106 de la décision attaquée).

 Produits et marchés en cause

15      Le secteur concerné, celui de la fabrication des tubes en cuivre, englobe deux groupes de produits, à savoir, d’une part, les tubes industriels, qui se subdivisent en différents sous-groupes en fonction de leur utilisation finale (air conditionné et réfrigération, raccords, chauffe-eau et chaudières à gaz, filtres déshydrateurs et télécommunications) et, d’autre part, les tubes sanitaires, appelés aussi « tubes de plomberie », qui sont utilisés dans le bâtiment pour les installations d’eau, les conduites de gaz et de mazout et les systèmes de chauffage (considérant 3 de la décision attaquée).

16      La Commission a considéré que les affaires COMP/E-1/38.069 (Tubes sanitaires en cuivre) et COMP/E-1/38.240 (Tubes industriels) concernaient deux infractions distinctes. À cet égard, elle s’est principalement fondée sur le fait que « ce sont des entreprises différentes (et des membres différents du personnel de ces entreprises) qui étaient impliquées dans les accords sur les tubes sanitaires, d’une part, et sur les tubes industriels, d’autre part, accords dont l’organisation aussi était différente ». En outre, la Commission a estimé que le secteur des tubes sanitaires se distinguait de celui des tubes industriels en ce qui concerne la clientèle visée, l’utilisation finale et les caractéristiques techniques des produits (considérants 4 et 5 de la décision attaquée).

17      S’agissant des tubes sanitaires en cuivre, la Commission a affirmé dans la décision attaquée que ce groupe de produits comprenait deux « sous-familles » de produits : les tubes sanitaires en cuivre nus, d’une part, et les tubes sanitaires en cuivre gainés, d’autre part. Elle a noté que « les tubes sanitaires en cuivre nus et les tubes sanitaires en cuivre gainés ne sont pas obligatoirement interchangeables et qu’ils peuvent constituer des marchés de produits distincts à la lumière de la communication de la Commission sur la définition du marché en cause aux fins du droit communautaire de la concurrence » (JO 1997, C 372, p. 5). Toutefois, pour les besoins de la décision attaquée, la Commission a estimé que ces deux « sous-familles » de produits devaient être considérées comme « un seul et même groupe de produits […] parce que ce sont pour l’essentiel les mêmes entreprises (et les mêmes membres du personnel de ces entreprises) qui ont été impliquées dans les accords sur ces deux sous-familles de produits et que les accords étaient organisés de manière similaire » (considérants 13 et 459 de la décision attaquée).

18      Dans la décision attaquée, la Commission a également indiqué que le marché géographique pertinent était l’Espace économique européen (EEE). Elle a estimé que, en 2000, dans l’EEE, la valeur du marché des tubes sanitaires en cuivre nus était d’environ 970,1 millions d’euros et celle du marché des tubes sanitaires en cuivre gainés de 180,9 millions d’euros. La valeur cumulée de ces deux marchés a, par conséquent, été évaluée à 1 151 millions d’euros en 2000 dans l’EEE (considérants 17 et 23 de la décision attaquée).

 Composantes de l’infraction en cause

19      La Commission a relevé que l’infraction en cause s’était manifestée sous trois formes distinctes, mais liées (considérants 458 et 459 de la décision attaquée). La première branche du cartel, à savoir les accords SANCO, consistait dans les accords conclus entre les « producteurs SANCO », SANCO étant une marque de tubes sanitaires en cuivre nus produits par le groupe KME, Wieland et le groupe Boliden (considérants 115 à 118, 125 à 146 et 456 de la décision attaquée).

20      La deuxième branche de l’infraction en cause, à savoir les accords WICU et Cuprotherm, comprenait les accords conclus entre les « producteurs WICU et Cuprotherm », WICU et Cuprotherm étant des marques de tubes sanitaires en cuivre gainés produits par le groupe KME et Wieland (considérants 121 et 149 de la décision attaquée).

21      La troisième branche du cartel, à savoir les accords européens élargis, visait les accords conclus au sein d’un groupe plus large de producteurs de tubes sanitaires en cuivre nus. Elle comprenait les entreprises visées aux points 19 et 20 ci-dessus ainsi que le groupe Buntmetall (composé d’Austria Buntmetall et de Buntmetall Amstetten), Chalkor, HME, le groupe IMI, Mueller et le groupe Outokumpu (considérants 147, 148, 192 et 459 à 462 de la décision attaquée).

 Durée et caractère continu de l’infraction en cause

22      La Commission a relevé dans la décision attaquée que l’infraction en cause avait commencé le 3 juin 1988 en ce qui concerne le groupe KME et le groupe Boliden, le 29 septembre 1989 en ce qui concerne le groupe IMI, le groupe Outokumpu et Wieland, le 21 octobre 1997 en ce qui concerne Mueller et, au plus tard, le 29 août 1998 en ce qui concerne Chalkor, le groupe Buntmetall et HME. Pour ce qui est de la date à laquelle l’infraction a pris fin, la Commission a retenu celle du 22 mars 2001, sauf en ce qui concerne Mueller et Chalkor, qui, d’après la Commission, ont respectivement cessé de participer au cartel le 8 janvier 2001 et en septembre 1999 (considérant 597 de la décision attaquée).

23      En ce qui concerne le caractère continu de l’infraction en cause, s’agissant du groupe Boliden, du groupe IMI, du groupe KME, du groupe Outokumpu et de Wieland, la Commission a relevé dans la décision attaquée que, bien que le cartel ait connu des périodes d’activité moins intense entre 1990 et décembre 1992, d’une part, et entre juillet 1994 et juillet 1997, d’autre part, l’activité infractionnelle n’avait toutefois jamais totalement cessé, de sorte que l’infraction en cause constituait effectivement une infraction unique non prescrite (considérants 466, 471, 476, 477 et 592 de la décision attaquée).

 Détermination du montant des amendes

24      Par la décision attaquée, la Commission a infligé des amendes, au titre de l’article 23, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 [CE] et 82 [CE] (JO 2003, L 1, p. 1), ainsi qu’au titre de l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17, au groupe Boliden, au groupe Buntmetall, à Chalkor, à HME, au groupe IMI, au groupe KME, au groupe Outokumpu et à Wieland (considérant 842 et article 2 de la décision attaquée).

25      Les montants des amendes ont été déterminés par la Commission en fonction de la gravité et de la durée de l’infraction en cause, soit les deux critères explicitement mentionnés à l’article 23, paragraphe 3, du règlement n° 1/2003 et à l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17, qui était, aux termes de la décision attaquée, applicable au moment de l’infraction en cause (considérants 601 à 603 de la décision attaquée).

26      Aux fins de fixer le montant de l’amende infligée à chaque entreprise, la Commission a fait application de la méthodologie définie dans les lignes directrices pour le calcul du montant des amendes infligées en application de l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 et de l’article 65, paragraphe 5, [CA] (JO 1998, C 9, p. 3, ci-après les « lignes directrices »), même si elle ne s’y est pas systématiquement référée. Dans la décision attaquée, la Commission a également apprécié si, et dans quelle mesure, les entreprises concernées satisfaisaient aux exigences fixées par la communication de 1996 sur la coopération.

 Montant de départ des amendes

–       Gravité

27      S’agissant de l’évaluation de la gravité de l’infraction en cause, la Commission a tenu compte de la nature propre de l’infraction, de son impact concret sur le marché, de l’étendue du marché géographique en cause et de la taille dudit marché (considérants 605 et 678 de la décision attaquée).

28      Elle a fait valoir que les pratiques de répartition des marchés et de fixation des prix, comme celles visées en l’espèce, constituaient, de par leur nature même, une infraction très grave et a considéré que le marché géographique affecté par le cartel correspondait à celui du territoire de l’EEE. La Commission a également tenu compte du fait que le marché des tubes sanitaires en cuivre constituait un secteur industriel très important, dont la valeur avait été estimée à 1 151 millions d’euros dans l’EEE en 2000, dernière année complète du cartel (considérants 606 et 674 à 678 de la décision attaquée).

29      En ce qui concerne l’impact concret sur le marché, la Commission a relevé qu’il existait des éléments de preuve suffisants pour démontrer que le cartel avait globalement produit des effets sur le marché concerné, notamment sur les prix, même s’il était impossible de les quantifier précisément (considérants 670 et 673 de la décision attaquée). Aux fins de cette constatation, elle s’est notamment fondée sur plusieurs indices. Premièrement, elle s’est basée sur la mise en œuvre de l’entente en se référant au fait que les participants avaient échangé des informations sur les volumes de vente et les niveaux de prix (considérants 629 et 630 de la décision attaquée).

30      Deuxièmement, elle a pris en compte la circonstance que les membres du cartel détenaient une partie importante, à savoir 84,6 %, du marché dans l’EEE (considérant 635 de la décision attaquée).

31      Troisièmement, la Commission s’est fondée sur les tableaux, mémorandums et notes rédigés, dans le contexte des réunions du cartel, par les membres de celui-ci. Ces documents feraient état de ce que les prix avaient augmenté au cours de certaines périodes du cartel et que les membres du cartel avaient réalisé des recettes additionnelles par rapport aux périodes précédentes. Certains desdits documents indiqueraient que les personnes impliquées dans le cartel estimaient qu’il avait permis aux entreprises concernées d’atteindre leurs objectifs de prix. La Commission s’est également appuyée sur les déclarations faites par M. M., ancien directeur d’une des sociétés du groupe Boliden, ainsi que par Wieland, par le groupe Boliden et par Mueller dans le cadre de leurs coopérations respectives (considérants 637 à 654 de la décision attaquée).

32      Enfin, la Commission a constaté que les parts de marché respectives des participants à l’entente étaient restées relativement stables pendant toute la durée du cartel, même si les clients des participants avaient parfois changé (considérant 671 de la décision attaquée).

33      La Commission en a conclu que les entreprises concernées avaient commis une infraction très grave (considérant 680 de la décision attaquée).

–       Traitement différencié

34      La Commission a identifié dans la décision attaquée quatre groupes qu’elle estimait représentatifs de l’importance relative des entreprises dans l’infraction en cause. La répartition des membres du cartel en plusieurs catégories effectuée par la Commission s’est fondée sur les parts de marché respectives des participants au cartel pour les ventes des produits concernés dans l’EEE au cours de l’année 2000. En conséquence, le groupe KME a été considéré comme étant le principal acteur sur le marché concerné et a été classé dans la première catégorie. Les groupes Wieland (composé de Wieland et du groupe Buntmetall, dont Wieland a pris le contrôle en juillet 1999), IMI et Outokumpu ont été considérés comme des opérateurs de taille moyenne sur ce marché et ont été placés dans la deuxième catégorie. Le groupe Boliden a été placé dans la troisième catégorie. Dans la quatrième catégorie figurent HME et Chalkor (considérants 681 à 692 de la décision attaquée).

35      Les parts de marché ont été déterminées en fonction du chiffre d’affaires, réalisé par chaque contrevenant, provenant des ventes de tubes sanitaires sur le marché cumulé des tubes sanitaires en cuivre nus et des tubes sanitaires en cuivre gainés. Partant, les parts de marché des entreprises qui ne vendaient pas de tubes WICU et Cuprotherm ont été calculées par division de leurs chiffres d’affaires pour les tubes sanitaires en cuivre nus par la taille cumulée du marché des tubes sanitaires en cuivre nus et gainés (considérants 683 et 692 de la décision attaquée).

36      La Commission a par conséquent fixé le montant de départ des amendes à 70 millions d’euros pour le groupe KME, à 23,8 millions d’euros pour Wieland, les groupes IMI et Outokumpu, à 16,1 millions d’euros pour le groupe Boliden et à 9,8 millions d’euros pour Chalkor et pour HME (considérant 693 de la décision attaquée).

37      Compte tenu du fait que Wieland et le groupe Buntmetall constituaient une seule entreprise après juillet 1999 et que, jusqu’à juin 1995, KME France et KME Italy constituaient conjointement une entreprise distincte de KME Germany, le montant de départ des amendes qui leur ont été respectivement infligées a été fixé de la façon suivante : 35 millions d’euros pour le groupe KME (KME Germany, KME France et KME Italy solidairement) ; 17,5 millions d’euros pour KME Germany ; 17,5 millions d’euros pour KME Italy et KME France solidairement ; 3,25 millions d’euros pour le groupe Wieland ; 19,52 millions d’euros pour Wieland et 1,03 million d’euros pour le groupe Buntmetall (considérants 694 à 696 de la décision attaquée).

38      Afin de tenir compte de la nécessité de fixer l’amende à un niveau lui assurant un effet dissuasif, la Commission a majoré le montant de départ de l’amende infligée au groupe Outokumpu de 50 %, le portant ainsi à 35,7 millions d’euros, en considérant que le chiffre d’affaires mondial de celui-ci, supérieur à 5 milliards d’euros, indiquait qu’il disposait d’une taille et d’une puissance économique justifiant ladite majoration (considérant 703 de la décision attaquée).

 Montant de base des amendes

39      Il ressort de la décision attaquée que la Commission a majoré les montants de départ des amendes de 10 % par année complète d’infraction et de 5 % pour toute période supplémentaire égale ou supérieure à six mois, mais inférieure à un an. Ainsi, il a été conclu que :

–        le groupe IMI ayant participé au cartel pendant onze ans et cinq mois, une majoration de 110 % du montant de départ de l’amende de 23,8 millions d’euros devait lui être appliquée ;

–        le groupe Outokumpu ayant participé au cartel pendant onze ans et cinq mois, une majoration de 110 % du montant de départ de l’amende, fixé à 35,7 millions d’euros après son augmentation aux fins de dissuasion, devait lui être appliquée ;

–        le groupe Boliden ayant participé au cartel pendant douze ans et neuf mois, une majoration de 125 % du montant de départ de l’amende de 16,1 millions d’euros devait lui être appliquée ;

–        Chalkor ayant participé au cartel pendant douze mois, une majoration de 10 % du montant de départ de l’amende de 9,8 millions d’euros devait lui être appliquée ;

–        HME ayant participé au cartel pendant deux ans et six mois, une majoration de 25 % du montant de départ de l’amende de 9,8 millions d’euros devait lui être appliquée ;

–        le groupe KME ayant participé au cartel pendant cinq ans et sept mois, une majoration de 55 % du montant de départ de l’amende de 35 millions d’euros devait lui être appliquée ;

–        KME Germany ayant participé au cartel pendant sept ans et deux mois, une majoration de 70 % du montant de départ de l’amende de 17,5 millions d’euros devait lui être appliquée ;

–        KME France et KME Italy ayant participé au cartel pendant cinq ans et dix mois, une majoration de 55 % du montant de départ de l’amende de 17,5 millions d’euros devait leur être appliquée ;

–        Wieland ayant été considérée, d’une part, individuellement responsable pour une période de neuf ans et neuf mois et, d’autre part, solidairement responsable avec le groupe Buntmetall pour une période additionnelle d’un an et huit mois, une majoration de 95 % du montant de départ de l’amende de 19,52 millions d’euros, pour lequel Wieland est seule responsable, et une majoration de 15 % du montant de départ de l’amende de 3,25 millions d’euros, pour lequel Wieland et le groupe Buntmetall sont solidairement responsables, ont été appliquées (considérants 706 à 714 de la décision attaquée).

40      Partant, les montants de base des amendes infligées aux entreprises en cause s’établissent comme suit :

–        le groupe KME : 54,25 millions d’euros ;

–        KME Germany : 29,75 millions d’euros ;

–        KME France et KME Italy (solidairement) : 27,13 millions d’euros ;

–        le groupe Buntmetall : 1,03 million d’euros ;

–        le groupe Wieland : 3,74 millions d’euros ;

–        Wieland : 38,06 millions d’euros ;

–        le groupe IMI : 49,98 millions d’euros ;

–        le groupe Outokumpu : 74,97 millions d’euros ;

–        Chalkor : 10,78 millions d’euros ;

–        HME : 12,25 millions d’euros ;

–        le groupe Boliden : 36,225 millions d’euros (considérant 719 de la décision attaquée).

 Circonstances aggravantes et atténuantes

41      Le montant de base de l’amende infligée au groupe Outokumpu a été majoré de 50 % au motif que celui-ci était l’auteur d’une récidive, puisqu’il avait été destinataire de la décision 90/417/CECA de la Commission, du 18 juillet 1990, relative à une procédure au titre de l’article 65 [CA] concernant l’accord et les pratiques concertées des producteurs européens de produits plats en acier inoxydable laminés à froid (JO L 220, p. 28) (considérants 720 à 726 de la décision attaquée).

42      Au titre des circonstances atténuantes, la Commission a tenu compte du fait que les groupes KME et Outokumpu lui avaient fourni des informations, dans le cadre de leurs coopérations respectives, ne relevant pas de la communication de 1996 sur la coopération.

43      Partant, la Commission a réduit le montant de base de l’amende infligée au groupe Outokumpu de 40,17 millions d’euros, ce qui correspondrait à l’amende qui lui aurait été infligée pour la période infractionnelle allant de septembre 1989 à juillet 1997, dont l’établissement avait été rendu possible par les informations qu’il avait fournies à la Commission (considérants 758 et 759 de la décision attaquée).

44      S’agissant du groupe KME, le montant de base de l’amende qui lui a été infligée a été réduit de 7,93 millions d’euros en raison de sa coopération, qui avait permis à la Commission d’établir que l’infraction en cause englobait les tubes sanitaires en cuivre gainés (considérants 760 et 761 de la décision attaquée).

 Application de la communication de 1996 sur la coopération

45      La Commission a, au titre du point D de la communication de 1996 sur la coopération, accordé une réduction du montant des amendes de 50 % au groupe Outokumpu, de 35 % au groupe Wieland, de 15 % à Chalkor, de 10 % au groupe Boliden et au groupe IMI et de 35 % au groupe KME. HME n’a bénéficié d’aucune réduction au titre de cette communication (considérant 815 de la décision attaquée).

 Montant final des amendes

46      Conformément à l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 et à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, la Commission a fixé les montants des amendes à infliger aux entreprises destinataires de la décision attaquée comme suit :

–        le groupe Boliden : 32,6 millions d’euros ;

–        le groupe Buntmetall : 0,6695 million d’euros ;

–        Chalkor : 9,16 millions d’euros ;

–        HME : 4,49 millions d’euros ;

–        le groupe IMI : 44,98 millions d’euros ;

–        le groupe KME : 32,75 millions d’euros ;

–        KME Germany : 17,96 millions d’euros ;

–        KME France et KME Italy (solidairement) : 16,37 millions d’euros ;

–        le groupe Outokumpu : 36,14 millions d’euros ;

–        le groupe Wieland : 2,43 millions d’euros ;

–        Wieland : 24,7416 millions d’euros (considérant 842 de la décision attaquée).

 Procédure et conclusions des parties

47      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 20 janvier 2005, les requérantes ont introduit le présent recours.

48      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la huitième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

49      Les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’article 1er, sous a) à c), de la décision attaquée dans la mesure où il se rapporte aux périodes comprises entre le 1er juillet 1995 et le 27 août 1998 et entre le 10 décembre 1998 et le 7 octobre 1999 ;

–        réduire le montant de l’amende qui leur a été infligée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

50      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        augmenter le montant de l’amende infligée aux requérantes ;

–        condamner les requérantes aux dépens.

 En droit

51      Par leur recours, les requérantes visent, d’une part, à l’annulation partielle de la décision attaquée et, d’autre part, à la réduction du montant de l’amende qui leur a été infligée.

1.     Sur la demande tendant à l’annulation partielle de la décision attaquée

 Arguments des parties

52      Au soutien de leur demande, les requérantes soulèvent un seul moyen, tiré d’une erreur de droit viciant la constatation de leur participation à une infraction unique et continue.

53      Les requérantes estiment que la Commission n’a pas prouvé à suffisance de droit et conformément à la jurisprudence qu’elles avaient entendu, pendant les périodes comprises entre le 1er juillet 1995 et le 27 août 1998, ainsi qu’entre le 10 décembre 1998 et le 7 octobre 1999, contribuer, par leur comportement, aux objectifs communs poursuivis par l’ensemble des participants au cartel et qu’elles avaient connaissance des comportements matériels envisagés ou mis en oeuvre par d’autres contrevenants dans la poursuite de ces mêmes objectifs ou qu’elles pouvaient raisonnablement les prévoir et étaient prêtes à en accepter le risque.

54      S’agissant de la période allant du 1er juillet 1995 au 27 août 1998, les requérantes font valoir, en substance, que, depuis le 1er juillet 1995, les accords SANCO ne constituaient plus une branche du cartel. Partant, le cartel n’aurait plus été constitué que de deux branches, à savoir les accords WICU et Cuprotherm et les accords européens élargis.

55      Eu égard au fait qu’il serait constant que les requérantes n’ont jamais participé aux accords WICU et Cuprotherm et qu’elles ont cessé d’assister aux réunions tenues dans le cadre des accords européens élargis entre le 1er juillet 1995 et le 27 août 1998, l’infraction reprochée aux requérantes n’aurait pas été continue, mais aurait été interrompue.

56      Selon les requérantes, le fait qu’elles ont continué, après le 1er juillet 1995, à participer au réseau d’échange d’informations entre les « producteurs SANCO » n’a aucun impact sur la question de savoir si leur participation au cartel a été ou non interrompue. En effet, depuis le départ, au milieu de 1995, de M. M, un de leurs directeurs généraux de l’époque, et jusqu’au 21 novembre 1997, elles auraient ignoré l’existence des réunions du cartel, voire l’existence du cartel en tant que tel. Les requérantes ne seraient devenues conscientes de l’existence des accords européens élargis que le 21 novembre 1997, date à laquelle elles auraient été invitées par le groupe KME à participer à cette coopération, ce qu’elles auraient refusé.

57      Par ailleurs, le système d’échange d’informations existant entre les « producteurs SANCO » depuis 1988 aurait été le résultat de la mise en œuvre d’accords de licences licites. Partant, l’objectif original et principal dudit système aurait été licite. Au cours de l’audience, les requérantes ont néanmoins admis que, entre 1988 et le milieu de 1995, ledit système d’échange d’informations avait également servi d’outil au sein du cartel. Elles affirment que, puisqu’elles ignoraient le caractère continu des réunions et des contacts collusoires au sein du cartel après le milieu de 1995, leur participation au système d’échange d’informations après cette date n’avait plus constitué une participation au cartel, mais uniquement à la mise en œuvre des accords de licences licites.

58      Concernant la période allant du 10 décembre 1998 au 7 octobre 1999, les requérantes allèguent que, lors de la réunion du 10 décembre 1998, elles ont, de manière claire et explicite, annoncé leur retrait de la coopération dans le cadre des accords européens élargis. Les requérantes n’auraient participé à nouveau au cartel que lors d’une réunion organisée le 8 octobre 1999.

59      La Commission conclut au rejet du moyen.

 Appréciation du Tribunal

60      À titre liminaire, il convient de rappeler que la Cour a jugé qu’une violation de l’article 81, paragraphe 1, CE peut résulter non seulement d’un acte isolé, mais également d’une série d’actes ou bien encore d’un comportement continu. Cette interprétation ne saurait être contestée au motif qu’un ou plusieurs éléments de cette série d’actes ou de ce comportement continu pourraient également constituer en eux-mêmes et pris isolément une violation de ladite disposition (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 8 juillet 1999, Commission/Anic Partecipazioni, C‑49/92 P, Rec. p. I‑4125, point 81). Lorsque les différentes actions s’inscrivent dans un plan d’ensemble, en raison de leur objet identique faussant le jeu de la concurrence à l’intérieur du marché commun, la Commission est en droit d’imputer la responsabilité de ces actions en fonction de la participation à l’infraction considérée dans son ensemble (arrêt de la Cour du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, Rec. p. I‑123, point 258).

61      De même, une entreprise peut être tenue pour responsable d’une entente globale même s’il est établi qu’elle n’a participé directement qu’à un ou plusieurs des éléments constitutifs de cette entente dès lors qu’elle savait ou devait nécessairement savoir, d’une part, que la collusion à laquelle elle participait s’inscrivait dans un plan global et, d’autre part, que ce plan global recouvrait l’ensemble des éléments constitutifs de l’entente (arrêts du Tribunal du 20 avril 1999, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, T‑305/94 à T‑307/94, T‑313/94 à T‑316/94, T‑318/94, T‑325/94, T‑328/94, T‑329/94 et T‑335/94, Rec. p. II‑931, point 773, et du 20 mars 2002, HFB e.a./Commission, T‑9/99, Rec. p. II‑1487, point 231).

62      En l’espèce, il est constant que les requérantes ont participé aux accords européens élargis du 3 juin 1988 jusqu’au 30 juin 1995, du 27 août 1998 jusqu’au 10 décembre 1998 et du 8 octobre 1999 jusqu’au 22 mars 2001. Il est également constant qu’elles ont fréquemment et perpétuellement échangé avec le groupe KME et Wieland des données détaillées sur les volumes de ventes des tubes sanitaires de la marque SANCO pendant toute la durée du cartel, c’est-à-dire du 3 juin 1988 au 22 mars 2001.

63      Il convient par conséquent de déterminer si ledit échange de données constituait l’un des éléments constitutifs du plan global du cartel et si les requérantes auraient dû avoir connaissance de l’existence du cartel et de son fonctionnement au cours des périodes comprises entre le 1er juillet 1995 et le 27 août 1998, ainsi qu’entre le 10 décembre 1998 et le 7 octobre 1999.

64      Dans la décision attaquée (considérants 449 à 457), la Commission a affirmé que les éléments du plan global du cartel comprenaient :

–        le gel des parts de marché respectives par le biais de la répartition des volumes de ventes par pays ;

–        un accord sur des majorations de prix ou des prix coordonnés et l’application de ces majorations ou de ces prix coordonnés ;

–        la mise en œuvre du partage des marchés et de la coordination des prix par le biais d’un mécanisme de surveillance reposant sur la désignation de chefs de file pour différents territoires européens, ainsi que sur l’échange régulier d’informations confidentielles sur les stratégies commerciales, les volumes et objectifs de vente, de même que, de façon ponctuelle, sur les prix et les remises.

65      S’agissant plus précisément des échanges d’informations portant sur les tubes SANCO, la Commission a noté, au considérant 143 de la décision attaquée, qu’ils permettaient de contrôler les volumes de ventes. Il y a également lieu de rappeler que, au considérant 138 de la décision attaquée, la Commission a affirmé que la répartition des volumes de ventes faisait l’objet d’une coordination régulière entre les « producteurs SANCO » et les membres des accords européens élargis. Enfin, au considérant 486 de la décision attaquée, la Commission a souligné que le cartel « consistait essentiellement en des échanges d’informations sur les volumes de ventes et, sur la base de ceux-ci, en la répartition des quotas ».

66      Les requérantes n’ont pas contesté ces constatations pour la période allant du 3 juin 1988 au 1er juillet 1995. S’agissant de la période allant du 1er juillet 1995 au 22 mars 2001, elles font valoir qu’elles ne pouvaient raisonnablement pas avoir prévu que leur participation au système d’échange d’informations après le milieu de 1995 aurait contribué au fonctionnement du cartel.

67      Les arguments des requérantes ne sont toutefois pas convaincants. En effet, ayant participé pendant plusieurs années à la fois aux accords SANCO et aux accords européens élargis, qui comprenaient la répartition de la production et la surveillance de la mise en œuvre de cette répartition par le biais d’échanges fréquents et détaillés portant sur les volumes de ventes, les requérantes ne sauraient prétendre que le départ au milieu de 1995 de M. M. a causé une amnésie aiguë au sein de l’entreprise en ce qui concerne l’existence du cartel ou de son mode de fonctionnement.

68      Les requérantes ne prétendent au demeurant pas que M. M. était le seul employé ou dirigeant ayant connaissance de leur participation au cartel entre 1988 et 1995.

69      Il convient de constater que, durant la totalité de la durée de leur participation au système d’échange d’informations, les requérantes ont soutenu le mécanisme anticoncurrentiel convenu au sein du cartel. Leur implication dans ledit système d’échange d’informations a donc constitué la continuation de leur participation au cartel (voir, en ce sens, arrêt Aalborg Portland e.a./Commission, point 60 supra, point 281). En effet, pour les raisons mentionnées aux points 64 à 68 ci-dessus, les requérantes devaient nécessairement savoir que leur participation au système d’échange d’informations s’inscrivait dans le plan global du cartel.

70      Enfin, il y a lieu de relever que l’argument des requérantes selon lequel les accords SANCO ne constituaient plus une branche du cartel après le milieu de 1995 est inopérant. En effet, ainsi qu’il a été exposé au point 69 ci-dessus, la participation continue des requérantes au cartel est établie par le fait qu’elles ont participé d’une manière ininterrompue à un système d’échange d’informations et qu’elles devaient nécessairement savoir que ledit système faisait partie du plan global de l’infraction en cause.

71      Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter la demande d’annulation partielle présentée par les requérantes.

2.     Sur la demande tendant à la réduction du montant de l’amende

72      À l’appui de cette demande, les requérantes invoquent trois moyens tirés, respectivement, d’une erreur de droit dans l’application des règles relatives aux délais de prescription, d’une augmentation erronée du montant de départ de l’amende en raison de la durée de l’infraction et d’une application erronée de la communication de 1996 sur la coopération.

73      Avant d’examiner les moyens soulevés par les requérantes, il importe de rappeler qu’il ressort des considérants 601 et 842 de la décision attaquée que les amendes imposées par la Commission du fait de l’infraction l’ont été en vertu de l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 ainsi que de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003. En outre, la Commission a déterminé le montant des amendes en faisant application de la méthodologie définie dans les lignes directrices et la communication de 1996 sur la coopération (voir point 26 ci-dessus).

74      Les lignes directrices, bien qu’elles ne puissent être qualifiées de règle de droit, énoncent une règle de conduite indicative de la pratique à suivre dont la Commission ne peut s’écarter, dans un cas particulier, sans donner des raisons qui soient compatibles avec le principe d’égalité de traitement (voir arrêt de la Cour du 18 mai 2006, Archer Daniels Midland et Archer Daniels Midland Ingredients/Commission, C‑397/03 P, Rec. p. I‑4429, point 91, et la jurisprudence citée).

75      Il appartient donc au Tribunal de vérifier, dans le cadre du contrôle de la légalité des amendes infligées par la décision attaquée, si la Commission a exercé son pouvoir d’appréciation selon la méthode exposée dans les lignes directrices et, dans la mesure où il devrait constater qu’elle s’en est départie, de vérifier si cet écart est justifié et motivé à suffisance de droit. À cet égard, il importe de relever que la Cour a confirmé la validité, d’une part, du principe même des lignes directrices et, d’autre part, de la méthode générale qui y est indiquée (arrêt de la Cour du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, Rec. p. I‑5425, points 252 à 255, 266 à 267, 312 et 313).

76      L’autolimitation du pouvoir d’appréciation de la Commission résultant de l’adoption des lignes directrices n’est en effet pas incompatible avec le maintien d’une marge d’appréciation substantielle pour la Commission. Les lignes directrices contiennent différents éléments de flexibilité qui permettent à la Commission d’exercer son pouvoir discrétionnaire en conformité avec les dispositions des règlements nos 17 et 1/2003, telles qu’interprétées par la Cour (arrêt Dansk Rørindustri e.a./Commission, point 75 supra, point 267).

77      Partant, dans les domaines où la Commission a conservé une marge d’appréciation, par exemple en ce qui concerne le montant de départ ou le taux de majoration au titre de la durée, le contrôle de la légalité opéré sur ces appréciations se limite à celui de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 18 juillet 2005, Scandinavian Airlines System/Commission, T‑241/01, Rec. p. II‑2917, points 64 et 79).

78      La marge d’appréciation de la Commission et les limites qu’elle y a apportées ne préjugent par ailleurs pas, en principe, de l’exercice, par le juge, de sa compétence de pleine juridiction (arrêt du Tribunal du 8 juillet 2004, JFE Engineering e.a./Commission, T‑67/00, T‑68/00, T‑71/00 et T‑78/00, Rec. p. II‑2501, point 538), qui l’habilite à supprimer, à réduire ou à majorer le montant de l’amende infligée par la Commission (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 8 février 2007, Groupe Danone/Commission, C‑3/06 P, Rec. p. I‑1331, points 60 à 62, et arrêt du Tribunal du 21 octobre 2003, General Motors Nederland et Opel Nederland/Commission, T‑368/00, Rec. p. II‑4491, point 181).

 Sur le moyen tiré d’une erreur de droit dans l’application des règles relatives aux délais de prescription

 Arguments des parties

79      Les requérantes font valoir que, puisqu’elles n’ont pas participé à une infraction unique et continue, la Commission a enfreint les règles applicables en matière de délais de prescription en infligeant une amende pour la période précédant le 22 mars 1996, dès lors que son enquête n’a débuté que le 22 mars 2001. À cet égard, les requérantes soulignent que l’échange d’informations relatives aux volumes de ventes en application des licences SANCO après le milieu de 1995 ne faisait pas partie du cartel et que l’entente à laquelle elles se sont jointes le 27 août 1998 ne correspondait pas à l’entente qu’elles avaient quittée au milieu de 1995.

80      Les requérantes font également valoir qu’elles auraient dû bénéficier du même traitement que HME, Mueller, le groupe Buntmetall et Chalkor en ce qui concerne les délais de prescription, conformément au principe d’égalité de traitement.

81      La Commission conclut au rejet du présent moyen.

 Appréciation du Tribunal

82      À titre liminaire, il convient de rappeler qu’il ressort des points 60 à 71 ci-dessus que c’est à bon droit que la Commission a établi, dans la décision attaquée, que les requérantes avaient participé à une infraction unique et continue entre le 3 juin 1988 et le 22 mars 2001. En effet, leur participation ininterrompue au système d’échange d’informations suffisait pour établir leur participation continue au cartel.

83      Il s’ensuit que, indépendamment des constatations de la Commission relatives à HME, à Mueller, au groupe Buntmetall et à Chalkor, la prescription au sens de l’article 25 du règlement n° 1/2003 ne s’applique pas en ce qui concerne les requérantes.

84      En tout état de cause, et à titre surabondant, il convient de constater qu’il ressort des considérants 216, 449 et 450 de la décision attaquée ainsi que de son article 1er que HME, Mueller, le groupe Buntmetall et Chalkor ont été tenus responsables pour leurs participations respectives au cartel à partir de 1997 ou de 1998, tandis que les requérantes ont été tenues responsables à partir de 1988.

85      Il y a donc lieu de rejeter le présent moyen comme non fondé.

 Sur le moyen tiré d’une violation du principe de proportionnalité

 Arguments des parties

86      Les requérantes font valoir que la Commission a enfreint le principe de proportionnalité en ne prenant pas en considération, lors de la majoration du montant de départ de l’amende au titre de la durée, leur participation réduite au cartel au cours d’une importante période. À cet égard, elles allèguent que, au cours des deux périodes d’interruption de leur participation au cartel, elles ont seulement soumis et reçu des informations sur les volumes de ventes en vertu de l’accord de licence SANCO.

87      Dans leur réplique, les requérantes allèguent que la Commission, en fixant le montant de l’amende, a seulement eu égard à la gravité du cartel, en tant que telle, et a omis de prendre en compte, à sa juste valeur, leur rôle dans l’infraction en cause. À cet égard, les requérantes soutiennent, en se référant à la jurisprudence, que la gravité d’une infraction ne s’apprécie pas uniquement en fonction des éléments qui lui sont propres, mais également en fonction des circonstances propres à l’entreprise concernée.

88      Dès lors, même si la Commission ne devait pas être jugée comme étant tenue de prendre en compte l’intensité réduite de la participation des requérantes aux fins de majorer le montant de départ de l’amende infligée au titre de la durée, elle n’en demeurerait pas moins tenue de le faire en fixant le montant de l’amende au regard de la gravité.

89      La Commission conclut au rejet du présent moyen et excipe d’une fin de non-recevoir en ce qui concerne le grief selon lequel elle aurait, lors de son appréciation de la gravité de l’infraction, omis de prendre en compte le rôle joué par les requérantes dans le cartel. D’après la Commission, ledit grief constitue un nouveau moyen, qui ne figurait pas dans la requête et qui devrait donc être rejeté comme irrecevable.

 Appréciation du Tribunal

90      En ce qui concerne la fin de non-recevoir soulevée par la Commission, il y a lieu de rappeler qu’il ressort des dispositions combinées de l’article 44, paragraphe 1, sous c), et de l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal que la requête introductive d’instance doit contenir l’objet du litige ainsi que l’exposé sommaire des moyens invoqués et que la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure. Cependant, un moyen qui constitue l’ampliation d’un moyen énoncé antérieurement, directement ou implicitement, dans la requête introductive d’instance et qui présente un lien étroit avec celui-ci doit être déclaré recevable (arrêt du Tribunal du 5 février 1997, Ibarra Gil/Commission, T‑207/95, RecFP p. I‑A‑13 et II‑31, point 51 ; voir également, en ce sens, arrêt de la Cour du 19 mai 1983, Verros/Parlement, 306/81, Rec. p. 1755, points 9 et 10). Une solution analogue s’impose pour un grief invoqué au soutien d’un moyen (arrêts du Tribunal du 21 mars 2002, Joynson/Commission, T‑231/99, Rec. p. II‑2085, point 156, et du 15 octobre 2008, Mote/Parlement, T‑345/05, non encore publié au Recueil, point 85).

91      Il y a lieu de constater que, dans leur requête, les requérantes ont mis en exergue le fait que la Commission n’aurait pas, lors du calcul du montant de l’amende qui leur a été infligée, pris en compte leur participation prétendument réduite au cartel. Il ressort de la requête que leur moyen porte sur le caractère prétendument disproportionné de l’amende infligée. Toutefois, le grief qui y est présenté par les requérantes vise uniquement la majoration du montant de départ au titre de la durée.

92      Dans leur réplique, les requérantes ne font pas référence à de nouveaux éléments de fait, mais tendent à élargir la portée de leur moyen pour inclure également un grief portant sur l’appréciation de la gravité de leur participation au cartel. Cependant ce dernier grief ne peut pas être considéré comme étant une ampliation du moyen tiré du caractère prétendument disproportionné de l’amende infligée, tel qu’il a été exposé dans la requête, et présentant un lien étroit avec celui-ci. En effet, la contestation d’un élément essentiel d’une décision, tel que, comme en l’espèce, l’appréciation de la gravité de l’infraction en cause, doit être formulée de façon spécifique devant le Tribunal dès le stade de la requête.

93      Par conséquent, il y a lieu de rejeter comme irrecevable le grief des requérantes portant sur l’appréciation de la gravité de leur participation au cartel.

94      S’agissant du bien-fondé du moyen, il convient de constater que celui-ci vise un élément à l’égard duquel la Commission a, en vertu des lignes directrices, conservé une marge d’appréciation. Partant, ledit moyen ne pourrait être accueilli que dans l’hypothèse où le Tribunal constaterait une erreur manifeste d’appréciation de la part de la Commission (voir point 77 ci-dessus).

95      À cet égard, il convient de rappeler qu’une augmentation du montant de départ de l’amende en fonction de la durée n’est pas limitée à l’hypothèse où il existerait une relation directe entre la durée et un préjudice accru causé aux objectifs visés par les règles de concurrence (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 30 septembre 2003, Michelin/Commission, T‑203/01, Rec. p. II‑4071, point 278, et la jurisprudence citée).

96      Il ressort en outre des lignes directrices que la Commission n’a établi aucun chevauchement ni aucune interdépendance entre l’appréciation de la gravité et celle de la durée de l’infraction.

97      Au contraire, en premier lieu, il ressort des lignes directrices qu’elles prévoient l’appréciation de la gravité de l’infraction en tant que telle aux fins de déterminer un montant de départ de l’amende. En deuxième lieu, la gravité de l’infraction est analysée par rapport aux caractéristiques de l’entreprise concernée, notamment sa taille et sa position sur le marché pertinent, ce qui peut donner lieu à une pondération du montant de départ, à la répartition des entreprises en catégories et à la fixation d’un montant de départ spécifique. En troisième lieu, la durée de l’infraction est prise en compte pour la fixation du montant de base et, en quatrième lieu, les lignes directrices prévoient la prise en considération de circonstances aggravantes et atténuantes permettant de moduler le montant de l’amende, notamment en fonction du rôle actif ou passif des entreprises concernées dans la mise en œuvre de l’infraction.

98      Il s’ensuit que le simple fait que la Commission se soit réservée une possibilité de majoration par année d’infraction allant, s’agissant des infractions de longue durée, jusqu’à 10 % du montant retenu pour la gravité de l’infraction ne l’oblige nullement à fixer ce taux en fonction de l’intensité des activités de l’entente ou des effets de celle-ci, voire de la gravité de l’infraction. Il appartient en effet à la Commission de choisir, dans le cadre de sa large marge d’appréciation (voir point 77 ci-dessus), le taux de majoration qu’elle entend appliquer au titre de la durée de l’infraction.

99      En l’espèce, la Commission a constaté, notamment au considérant 706 de la décision attaquée, que les requérantes avaient participé au cartel pendant une durée de douze ans et neuf mois (voir, à cet égard, points 60 à 71 ci-dessus), soit une longue durée au sens des lignes directrices. Par conséquent, elle a majoré le montant de départ de l’amende qui leur a été infligée de 125 %. Ce faisant, la Commission ne s’est pas écartée des règles qu’elle s’est imposées dans les lignes directrices.

100    Au demeurant, le Tribunal estime que cette augmentation de 125 %, eu égard à la durée de l’infraction en cause, n’est pas, en l’espèce, manifestement disproportionnée.

 Sur le moyen tiré d’une réduction insuffisante du montant de l’amende, eu égard à la coopération des requérantes au titre de la communication de 1996 sur la coopération

 Arguments des parties

101    Les requérantes font valoir que leur coopération aurait mérité une réduction du montant de leur amende plus importante, dès lors qu’elles ont confirmé l’exactitude des informations fournies par M. M. et qu’elles ont, dans leur réponse à la communication des griefs, fourni à la Commission une description détaillée des accords SANCO.

102    Elles affirment également que la Commission a enfreint le principe d’égalité de traitement en leur accordant la même réduction du montant de l’amende que celle accordée au groupe IMI, alors qu’elles auraient davantage coopéré avec la Commission que ledit groupe. La réduction du montant de l’amende infligée au groupe IMI aurait été motivée par le seul fait que celui-ci aurait reconnu l’infraction et qu’il n’aurait pas contesté les faits sur lesquels la Commission s’est fondée. Or, les requérantes auraient, en outre, transmis des informations à la Commission ainsi que clarifié ou confirmé des faits importants ayant facilité l’enquête et sur lesquels celle-ci se serait appuyée dans la décision attaquée.

103    La Commission conclut au rejet du moyen.

 Appréciation du Tribunal

104    À titre liminaire, il convient de relever que, selon une jurisprudence constante, une réduction de l’amende au titre de la coopération lors de la procédure administrative trouve son fondement dans la considération selon laquelle une telle coopération facilite la tâche de la Commission de constater une infraction (arrêts du Tribunal du 14 mai 1998, BPB de Eendracht/Commission, T‑311/94, Rec. p. II‑1129, point 325, et Finnboard/Commission, T‑338/94, Rec. p. II‑1617, point 363).

105    Il convient également de souligner que, dans le cadre de l’appréciation de la coopération fournie par les membres d’une entente, seule une erreur manifeste d’appréciation de la part de la Commission est susceptible d’être censurée dès lors qu’elle bénéfice d’une large marge d’appréciation pour évaluer la qualité et l’utilité de la coopération fournie par une entreprise, notamment par rapport aux contributions d’autres entreprises (arrêt de la Cour du 10 mai 2007, SGL Carbon/Commission, C‑328/05 P, Rec. p. I‑3921, point 88). La Commission ne saurait pour autant, dans le cadre de ladite appréciation, méconnaître le principe d’égalité de traitement.

106    Par ailleurs, il y a lieu de constater qu’il ressort du point D 2 de la communication de 1996 sur la coopération qu’une entreprise peut bénéficier de l’application de ladite communication si, avant l’envoi de la communication des griefs, elle fournit à la Commission des informations qui contribuent à confirmer l’existence de l’infraction commise, ou si, après avoir reçu la communication des griefs, elle informe la Commission qu’elle ne conteste pas la matérialité des faits sur lesquels celle-ci a fondé ses accusations.

107    En l’espèce, tant le groupe IMI que les requérantes ont commencé à coopérer après l’envoi de la communication des griefs. Partant, les requérantes ne sauraient prétendre obtenir une réduction plus importante que celle attribuée au groupe IMI, sauf dans l’hypothèse où, aux fins d’établir l’infraction, leur coopération aurait davantage facilité la tâche de la Commission que celle fournie par le groupe IMI.

108    À cet égard, force est de constater qu’il ressort de la décision attaquée que la coopération fournie par les requérantes se distingue uniquement de celle fournie par le groupe IMI en ce que seules les requérantes ont « clarifié certains détails de fait » (considérants 809 et 812 de la décision attaquée). Il ressort en outre implicitement de la décision attaquée que la Commission a estimé que l’utilité des coopérations respectives du groupe IMI et des requérantes avait été d’un degré comparable, dès lors qu’elles ont toutes deux commencé à coopérer à un stade où la Commission était déjà en mesure, notamment en raison des coopérations de Mueller, des groupes Outokumpu et KME, de Wieland et de Chalkor, d’établir l’existence de l’intégralité de l’infraction en cause. Les requérantes ne soutiennent d’ailleurs pas que la Commission n’était pas en mesure d’établir l’existence du cartel dans son intégralité au moment de leur coopération.

109    Il y a également lieu de souligner qu’une déclaration telle que celle visée au point 102 ci-dessus se limitant à confirmer des informations communiquées à la Commission par une autre entreprise à un stade antérieur de l’enquête ne facilite pas la tâche de la Commission de manière significative et, partant, n’est pas suffisante pour justifier une réduction du montant de l’amende au titre de la coopération (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 8 juillet 2004, Mannesmannröhren-Werke/Commission, T‑44/00, Rec. p. II‑2223, point 301, et du 25 octobre 2005, Groupe Danone/Commission, T‑38/02, Rec. p. II‑4407, point 455).

110    Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de constater que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation dans l’évaluation de l’utilité de la coopération des requérantes et n’a pas violé le principe d’égalité de traitement en accordant un taux de réduction identique, au titre de la communication de 1996 sur la coopération, aux requérantes et au groupe IMI. Par conséquent, le présent moyen n’est pas non plus fondé.

111    Partant, le recours doit être rejeté.

3.     Sur la demande reconventionnelle, fondée sur le traitement potentiellement favorable des requérantes par rapport à Chalkor et au groupe IMI

 Arguments des parties

112    La Commission constate que le groupe IMI et Chalkor ont respectivement fait valoir, dans leurs requêtes dans les affaires T‑18/05 et T‑21/05, que, lors de la détermination du montant des amendes, elle n’a pas pris en considération le fait qu’ils n’avaient pas été impliqués dans les accords SANCO et les accords WICU et Cuprotherm et qu’ils avaient donc commis une infraction moins grave que celle commise par les requérantes, Wieland et le groupe KME. Les arguments du groupe IMI et de Chalkor soulèveraient la question de la prétendue discrimination entre les participants au cartel dans le cadre de ce qui a été considéré comme une infraction unique.

113    La Commission soutient que, si le Tribunal devait admettre les arguments du groupe IMI et de Chalkor sur ce point, il devrait, dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction, relever le montant des amendes infligées au groupe KME, aux requérantes et à Wieland, plutôt que de réduire celui des amendes infligées au groupe IMI et à Chalkor.

114    Les requérantes concluent au rejet de cette demande.

 Appréciation du Tribunal

115    Il y a lieu de constater que le Tribunal a jugé, dans ses arrêts de ce jour, IMI e.a./Commission (T‑18/05, non encore publié au Recueil), et Chalkor/Commission (T‑21/05, non encore publié au Recueil), que le groupe IMI et Chalkor ont commis une infraction moins grave que celle commise par le groupe Boliden, le groupe KME et Wieland et que la Commission a commis une erreur en omettant de prendre en considération cet élément lors du calcul des montants des amendes.

116    Le Tribunal a en outre jugé, dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction, que le montant de départ des amendes retenu par la Commission était, par rapport à la gravité que représentait l’ensemble des trois branches du cartel, approprié et qu’il y avait lieu de réduire les montants de départ des amendes infligées au groupe IMI et à Chalkor afin de prendre en compte le fait qu’ils n’ont pas été tenus responsables par la Commission en ce qui concerne les accords SANCO ( arrêts IMI e.a./Commission, point 115 supra, points 166, 167 et 189, et Chalkor/Commission, point 115 supra, points 104, 105 et 185).

117    Il s’ensuit que la demande de la Commission doit être écartée.

 Sur les dépens

118    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Cependant, aux termes de l’article 87, paragraphe 3, premier alinéa, dudit règlement de procédure, le Tribunal peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, ou pour des motifs exceptionnels.

119    En l’espèce, les requérantes ont succombé en leur recours, alors que la Commission a succombé en sa demande reconventionnelle. Cependant, force est de constater que ce sont essentiellement les requérantes qui ont succombé. Dans ces conditions, il y a lieu de décider que les requérantes supporteront leurs propres dépens et 90 % des dépens exposés par la Commission, alors que la Commission supportera 10 % de ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La demande reconventionnelle formulée par la Commission européenne est rejetée.

3)      Boliden AB, Outokumpu Copper Fabrication AB et Outokumpu Copper BCZ SA supporteront leurs propres dépens et 90 % des dépens exposés par la Commission.

4)      La Commission supportera 10 % de ses propres dépens.

Martins Ribeiro

Papasavvas

Wahl

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 mai 2010.

Signatures

Table des matières


Antécédents du litige

1.  Procédure administrative

2.  Décision attaquée

Produits et marchés en cause

Composantes de l’infraction en cause

Durée et caractère continu de l’infraction en cause

Détermination du montant des amendes

Montant de départ des amendes

–  Gravité

–  Traitement différencié

Montant de base des amendes

Circonstances aggravantes et atténuantes

Application de la communication de 1996 sur la coopération

Montant final des amendes

Procédure et conclusions des parties

En droit

1.  Sur la demande tendant à l’annulation partielle de la décision attaquée

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

2.  Sur la demande tendant à la réduction du montant de l’amende

Sur le moyen tiré d’une erreur de droit dans l’application des règles relatives aux délais de prescription

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur le moyen tiré d’une violation du principe de proportionnalité

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur le moyen tiré d’une réduction insuffisante du montant de l’amende, eu égard à la coopération des requérantes au titre de la communication de 1996 sur la coopération

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

3.  Sur la demande reconventionnelle, fondée sur le traitement potentiellement favorable des requérantes par rapport à Chalkor et au groupe IMI

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’anglais.

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