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Document 61999TO0079

    Ordonnance du Tribunal de première instance (deuxième chambre) du 8 décembre 1999.
    Euro-Lex European Law Expertise GmbH contre Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles).
    Marque communautaire - Représentation par un avocat qui est gérant de la partie requérante - Irrecevabilité.
    Affaire T-79/99.

    Recueil de jurisprudence 1999 II-03555

    Identifiant ECLI: ECLI:EU:T:1999:312

    61999B0079

    Ordonnance du Tribunal de première instance (deuxième chambre) du 8 décembre 1999. - Euro-Lex European Law Expertise GmbH contre Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles). - Marque communautaire - Représentation par un avocat qui est gérant de la partie requérante - Irrecevabilité. - Affaire T-79/99.

    Recueil de jurisprudence 1999 page II-03555


    Sommaire
    Parties
    Motifs de l'arrêt
    Décisions sur les dépenses
    Dispositif

    Mots clés


    Procédure - Requête introductive d'instance - Exigences de forme - Signature par un avocat, tiers par rapport au requérant - Société requérante représentée par un avocat étant également son gérant - Irrecevabilité

    [Statut (CE) de la Cour de justice, art. 17, alinéas 3 et 4, et 19, alinéa 1; règlement de procédure du Tribunal, art. 43, § 1, alinéa 1]

    Sommaire


    Aux fins de l'introduction d'un recours devant le Tribunal, une partie au sens de l'article 17, troisième alinéa, du statut de la Cour, applicable au Tribunal en vertu de l'article 46 dudit statut, doit recourir aux services d'un tiers habilité à exercer en tant qu'avocat devant une juridiction d'un État membre ou d'un État partie à l'accord sur l'Espace économique européen.

    Un avocat ainsi habilité qui est l'un des deux gérants et, partant, l'organe directeur de la société requérante ne peut pas être considéré comme un tiers, indépendant de la requérante, et, dès lors, une requête signée par cet avocat est irrecevable.

    Parties


    Dans l'affaire T-79/99,

    Euro-Lex European Law Expertise GmbH, société de droit allemand, établie à Emmerich (Allemagne), représentée par M. Eckhard Benkelberg, avocat à Emmerich et à Kleve, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude Faltz et Kremer, 6, rue Heinrich Heine,

    partie requérante,

    contre

    Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles), représenté par MM. Detlef Schennen, chef du service de la législation et des affaires juridiques internationales, et Emmanuel Joly, administrateur au service juridique et contentieux, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique de la Commission des Communautés européennes, Centre Wagner, Kirchberg,

    partie défenderesse,

    ayant pour objet une demande d'annulation de la décision de la première chambre de recours de l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) du 26 janvier 1999 (affaire R 114/1998-1), notifiée à la requérante le 1er février 1999,

    LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

    DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (deuxième chambre),

    composé de MM. J. Pirrung, président, A. Potocki et A. W. H. Meij, juges,

    greffier: M. H. Jung,

    vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 8 avril 1999,

    vu la question écrite du Tribunal aux parties du 21 juin 1999,

    vu les observations déposées au greffe du Tribunal les 14 et 15 juillet 1999,

    vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 16 août 1999,

    rend la présente

    Ordonnance

    Motifs de l'arrêt


    Procédure

    1 Par le présent recours, la requérante tend à obtenir l'annulation de la décision de la première chambre de recours de l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (ci-après «Office») du 26 janvier 1999 (affaire R 114/1998-1), en ce qu'elle a confirmé celle de l'examinateur du même Office du 20 mai 1998, selon laquelle sa demande de marque communautaire devait être rejetée.

    2 La marque dont l'enregistrement était demandé est le terme Eu-Lex.

    3 Dans le cadre de la régularisation de la requête au titre de l'article 44, paragraphe 6, du règlement de procédure du Tribunal, la requérante a produit un extrait du registre de commerce, conformément à l'article 44, paragraphe 5, sous b), du même règlement.

    4 Le Tribunal a constaté que, selon cet extrait, Me Benkelberg, qui est l'avocat représentant la requérante et a signé la requête, est l'un des deux gérants («Geschäftsführer») de celle-ci.

    5 Par lettre du greffe du 21 juin 1999, les parties ont été invitées à se prononcer sur la régularité formelle de la requête et, par conséquent, sur la recevabilité du recours, au regard des articles 17, troisième et quatrième alinéas, et 19, premier alinéa, du statut (CE) de la Cour, de l'article 43, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, ainsi que de l'ordonnance de la Cour du 5 décembre 1996, Lopes/Cour de justice (C-174/96 P, Rec. p. I-6401).

    6 La requérante et l'Office ont soumis leurs observations dans le délai imparti par le Tribunal.

    Conclusions des parties

    7 La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal annuler le point 3 du dispositif de la décision de la première chambre de recours de l'Office du 26 janvier 1999.

    8 L'Office conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

    - rejeter le recours;

    - condamner la requérante aux dépens.

    Sur la recevabilité

    9 Aux termes de l'article 111 du règlement de procédure, lorsqu'un recours est manifestement irrecevable, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d'ordonnance motivée.

    10 En l'espèce, le Tribunal estime qu'il est suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide de statuer en application de cette disposition.

    Arguments des parties

    Argumentation de la requérante

    11 La requérante est une société constituée de plusieurs avocats. Selon le droit allemand, les gérants d'une telle société - qui doivent être avocats - peuvent agir en justice au nom de celle-ci.

    12 L'interdiction faite à un avocat par la Bundesrechtsanwaltsordnung (ordonnance fédérale réglementant la profession d'avocat) de représenter une entreprise ne vise que le «Syndikus-Anwalt», c'est-à-dire le juriste (avocat) salarié ayant pour mission de conseiller l'entreprise sur les questions juridiques.

    13 Or, Me Benkelberg n'est ni conseiller juridique de la société requérante ni salarié de celle-ci. En revanche, en sa qualité de gérant, il en est l'«organe directeur».

    14 En ce sens, il n'est nullement interdit à Me Benkelberg, en sa qualité d'avocat, de représenter la requérante devant une juridiction allemande.

    15 Les articles 17, troisième et quatrième alinéas, et 19, premier alinéa, du statut exigent seulement que, devant le juge communautaire, la représentation de la société concernée soit assurée par un avocat habilité à la représenter devant les juridictions nationales.

    16 Dès lors que Me Benkelberg est habilité à représenter la requérante devant les juridictions allemandes, il est également autorisé à assurer sa représentation devant le juge communautaire.

    17 Enfin, il est exclu que la Cour ou le Tribunal puisse adopter une solution contraire qui restreindrait le droit des avocats allemands d'exercer leur profession.

    18 La requérante conclut que la requête est regulière en la forme et que le recours est recevable.

    Argumentation de l'Office

    19 Les règles de procédure applicables devant le juge communautaire se distinguent de la procédure civile en droit allemand, en ce que cette dernière autorise expressément les avocats à assurer leur propre représentation en justice. En outre, les conditions prévues par les dispositions réglementaires allemandes, qui limitent le droit à la représentation de tiers pour des motifs de conflits d'intérêts, ne sont pas remplies en l'espèce.

    20 L'identité de la personne partie à la procédure et de son représentant, avérée dans l'affaire ayant donné lieu à l'ordonnance Lopes/Cour de justice, précitée, n'existe pas en l'espèce. En effet, la requérante, personne morale, est distincte de Me Benkelberg, avocat, personne physique. Le fait que Me Benkelberg soit le gérant de la requérante et, partant, l'«organe directeur» de celle-ci, ne change rien à cette analyse.

    21 Il est certain que les intérêts économiques de Me Benkelberg sont les mêmes que ceux de la requérante. En outre, dans la mesure où Me Benkelberg agit dans la procédure au nom de la requérante, il peut, en qualité de gérant de celle-ci, se donner à lui-même des instructions pour la conduite du procès. Or, il n'en résulte aucun obstacle quant à la recevabilité du présent recours.

    22 L'Office conclut que, sous cet aspect, la requête est régulière en la forme et que le recours est recevable. Il exprime cependant des réserves sur la régularité formelle du pouvoir donné par la requérante à Me Benkelberg.

    Appréciation du Tribunal

    23 Aux termes de l'article 17, troisième et quatrième alinéas, du statut, applicable au Tribunal en vertu de l'article 46 dudit statut:

    «Les [...] parties doivent être représentées par un avocat.

    Seul un avocat habilité à exercer devant une juridiction d'un État membre ou d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen peut représenter ou assister une partie devant la Cour.»

    24 L'article 19, premier alinéa, du statut, dispose en outre ce qui suit:

    «La Cour est saisie par une requête adressée au greffier. La requête doit contenir l'indication du nom et du domicile du requérant et de la qualité du signataire [...]»

    25 Enfin, selon l'article 43, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal:

    «L'original de tout acte de procédure doit être signé par l'agent ou l'avocat de la partie.»

    26 Dès lors que ces dispositions relèvent du droit communautaire, il y a lieu de les interpréter, dans la mesure du possible, de manière autonome, sans référence au droit national.

    27 Il ressort de ces dispositions, et en particulier de l'emploi du terme «représentées» à l'article 17, troisième alinéa, du statut, que, aux fins de l'introduction d'un recours devant le Tribunal, une «partie» au sens de cet article doit recourir aux services d'un tiers qui doit être habilité à exercer en tant qu'avocat devant une juridiction d'un État membre ou d'un État partie à l'accord sur l'Espace économique européen (voir l'ordonnance Lopes/Cour de justice, précitée, point 11).

    28 Cette exigence d'avoir recours à un tiers correspond à la conception du rôle de l'avocat selon laquelle celui-ci est considéré comme collaborateur de la justice et appelé à fournir, en toute indépendance et dans l'intérêt supérieur de celle-ci, l'assistance légale dont le client a besoin. Cette conception répond aux traditions juridiques communes aux États membres et se retrouve également dans l'ordre juridique communautaire, ainsi qu'il résulte, précisément, de l'article 17 du statut (en ce sens arrêt de la Cour du 18 mai 1982, AM & S/Commission, 155/79, Rec. p. 1575, point 24).

    29 Il s'ensuit que l'avocat représentant la requérante, Me Benkelberg, ne peut pas être considéré, aux fins de la présente affaire, comme un «tiers» au sens de l'ordonnance Lopes/Cour de justice, précitée, indépendant de la requérante. En effet, il est un des deux gérants de la requérante. Cela implique, ainsi que les deux parties le font valoir, qu'il est l'«organe directeur» de la requérante. Dans ces circonstances, Me Benkelberg n'est pas autorisé à la représenter dans cette procédure.

    30 Par conséquent, la requête introductive d'instance ayant été signée par Me Benkelberg, le présent recours n'a pas été introduit conformément aux articles 17, troisième et quatrième alinéas, et 19, premier alinéa, du statut, et à l'article 43, paragraphe 1, du règlement de procédure.

    31 Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté comme étant manifestement irrecevable.

    Décisions sur les dépenses


    Sur les dépens

    32 Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens.

    33 La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions en ce sens de l'Office.

    Dispositif


    Par ces motifs,

    LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

    ordonne:

    1) Le recours est rejeté comme irrecevable.

    2) La requérante est condamnée aux dépens.

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