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Document 62021CJ0302

Arrêt de la Cour (quatrième chambre) du 24 novembre 2022.
Casilda contre Banco Cetelem SA.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Juzgado de Primera Instancia de Castellón de la Plana.
Renvoi préjudiciel – Litige au principal devenu sans objet – Non‑lieu à statuer.
Affaire C-302/21.

Recueil – Recueil général – Partie «Informations sur les décisions non publiées»

Identifiant ECLI: ECLI:EU:C:2022:919

 ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

24 novembre 2022 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Litige au principal devenu sans objet – Non‑lieu à statuer »

Dans l’affaire C‑302/21,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Juzgado de Primera Instancia no 4 de Castelló de la Plana (tribunal de première instance no 4 de Castelló de la Plana, Espagne), par décision du 7 mai 2021, parvenue à la Cour le 12 mai 2021, dans la procédure

Casilda

contre

Banco Cetelem SA,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. C. Lycourgos, président de chambre, Mme L. S. Rossi, MM. J.‑C. Bonichot, S. Rodin et Mme O. Spineanu-Matei (rapporteure), juges,

avocat général : M. G. Pitruzzella,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour Banco Cetelem SA, par Mes D. Sarmiento Ramírez-Escudero et C. Vendrell Cervantes, abogados,

pour le gouvernement espagnol, par Mme M. J. Ruiz Sánchez, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par M. J. Baquero Cruz, Mme I. Rubene et M. N. Ruiz García, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des principes de primauté du droit de l’Union et de sécurité juridique, de l’article 120 TFUE ainsi que de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO 1993, L 95, p. 29).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Casilda, une consommatrice, à Banco Cetelem SA au sujet d’un contrat de crédit renouvelable, consenti par Banco Cetelem à celle-ci, dont le taux d’intérêt aurait un caractère usuraire.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 93/13

3

L’article 4 de la directive 93/13 prévoit :

« 1.   Sans préjudice de l’article 7, le caractère abusif d’une clause contractuelle est apprécié en tenant compte de la nature des biens ou services qui font l’objet du contrat et en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat, ou d’un autre contrat dont il dépend.

2.   L’appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation entre le prix et la rémunération, d’une part, et les services ou les biens à fournir en contrepartie, d’autre part, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible. »

4

L’article 8 de cette directive énonce :

« Les États membres peuvent adopter ou maintenir, dans le domaine régi par la présente directive, des dispositions plus strictes, compatibles avec le traité, pour assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur. »

La directive 2008/48/CE

5

L’article 22 de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil (JO 2008, L 133, p. 66), intitulé « Harmonisation et caractère impératif de la présente directive », dispose :

« 1.   Dans la mesure où la présente directive contient des dispositions harmonisées, les États membres ne peuvent maintenir ou introduire dans leur droit national d’autres dispositions que celles établies par la présente directive.

2.   Les États membres veillent à ce que le consommateur ne puisse renoncer aux droits qui lui sont conférés en vertu des dispositions du droit national qui mettent en œuvre la présente directive ou qui lui correspondent.

3.   Les États membres veillent, en outre, à ce que les dispositions qu’ils adoptent pour la mise en œuvre de la présente directive ne puissent être contournées par le biais du libellé des contrats, notamment en intégrant des prélèvements ou des contrats de crédit relevant du champ d’application de la présente directive dans des contrats de crédit dont le caractère ou le but permettrait d’éviter l’application de celle-ci.

[...] »

Le droit espagnol

Le code civil

6

Selon l’article 1255 du Código civil (code civil), « les parties contractantes peuvent établir les conventions, clauses et conditions qu’ils jugent convenables, pour autant qu’elles ne soient pas contraires aux lois, à la morale ou à l’ordre public ».

La loi relative à l’usure

7

Aux termes de l’article 1er, premier alinéa, de la Ley sobre nulidad de los contratos de préstamos usurarios (loi relative à la nullité des contrats de prêt usuraires), du 23 juillet 1908 (BOE no 206, du 24 juillet 1908, ci-après la « loi relative à l’usure ») :

« Tout contrat de prêt dans lequel le taux d’intérêt est sensiblement supérieur au taux d’intérêt normal de l’argent et manifestement disproportionné eu égard aux circonstances de l’affaire ou dont les conditions sont léonines est nul et non avenu, lorsqu’il existe des raisons de considérer que l’emprunteur y a consenti en raison de sa situation de détresse, de son inexpérience ou d’une limitation de ses facultés mentales. »

La LGDCU

8

L’article 80 de la refonte de la loi générale relative à la protection des consommateurs et des usagers, approuvée par le Real Decreto Legislativo 1/2007, por el que se aprueba el texto refundido de la Ley General para la Defensa de los Consumidores y Usuarios (décret législatif royal 1/2007 portant refonte de la loi générale relative à la protection des consommateurs et des usagers), du 16 novembre 2007 (BOE no 287, du 30 novembre 2007, ci‑après la « LGDCU »), relatif aux « Exigences applicables aux clauses n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle », mentionne au nombre de ces exigences, à son point c), la « bonne foi et [le] juste équilibre entre les droits et obligations des parties, ce qui exclut, en tout état de cause, le recours aux clauses abusives ».

9

Aux termes de l’article 82, paragraphe 1, de la LGDCU :

« Sont considérées comme abusives toutes les clauses n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle ainsi que toutes les pratiques qui ne résultent pas d’un accord exprès et qui, en dépit de l’exigence de bonne foi, créent au détriment du consommateur et de l’usager un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat. »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

10

Le 8 avril 2011, la requérante au principal, une consommatrice, a souscrit auprès de Banco Cetelem un contrat de crédit à la consommation de type renouvelable (revolving), prévoyant un taux annuel effectif global (ci-après le « TAEG ») de 23,14 % et auquel était associée la mise à disposition d’une carte de crédit (ci-après le « contrat de crédit en cause »).

11

Cette consommatrice a saisi la juridiction de renvoi, le Juzgado de Primera Instancia no 4 de Castelló de la Plana (tribunal de première instance no 4 de Castelló de la Plana, Espagne), d’une action visant à constater la nullité du contrat de crédit en cause, aux motifs, à titre principal, d’un défaut de transparence et d’information lors de sa conclusion en ce qu’il fixe un TAEG de 23,14 % et, à titre subsidiaire, que ce taux d’intérêt doit être qualifié d’usuraire. Cette action tend également à la condamnation de Banco Cetelem à lui rembourser les intérêts déjà payés, la requérante au principal ne devant être tenue qu’au remboursement du capital prêté.

12

Banco Cetelem conteste le défaut de transparence ainsi que le caractère usuraire du contrat de crédit en cause. À cette fin, elle invoque, notamment, l’arrêt no 149/2020 du Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne), du 4 mars 2020 (ES:TS:2020:600), relatif à une interprétation de la loi relative à l’usure. Il découlerait de cet arrêt que le taux stipulé dans le contrat de crédit en cause ne saurait être considéré comme présentant un caractère usuraire. En effet, il ressortirait dudit arrêt que, pour déterminer si un taux d’intérêt revêt un tel caractère, il y a lieu de se référer au taux d’intérêt moyen applicable à la catégorie dont relève l’opération en question, tel que publié dans les statistiques officielles de la Banque nationale d’Espagne. En l’occurrence, le TAEG de 23,14 % mentionné dans le contrat de crédit en cause serait inférieur au taux d’intérêt moyen généralement appliqué pour cette catégorie de contrats, à savoir les contrats de crédit renouvelables.

13

La juridiction de renvoi nourrit des doutes sur la compatibilité des arrêts du Tribunal Supremo (Cour suprême) no 628/2015, du 25 novembre 2015 (ES:TS:2015:4810), et no 149/2020, du 4 mars 2020 (ES:TS:2020:600), avec les principes de primauté du droit de l’Union et de sécurité juridique ainsi qu’avec les directives 93/13 et 2008/48.

14

Selon la juridiction de renvoi, les principes dégagés par ces arrêts du Tribunal Supremo (Cour surprême) non seulement dénaturent la notion d’« usure », en ce qu’ils en éliminent l’aspect subjectif, à savoir l’appréciation d’une situation de vulnérabilité chez le consommateur, mais sont également incompatibles avec l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13, en ce qu’ils permettent la fixation ou le contrôle juridictionnel du prix ou, encore, du coût du crédit à la consommation, sans fondement légal et en dehors du cadre de la constatation de la nullité du contrat pour caractère usuraire. Par conséquent, cette juridiction se pose la question de savoir si, conformément au principe de primauté du droit de l’Union, elle doit laisser inappliquée cette jurisprudence du Tribunal Supremo (Cour suprême) dans le cadre du litige dont elle est saisie.

15

En outre, dès lors que le Tribunal Supremo (Cour suprême) aurait décidé, dans l’arrêt no 149/2020, du 4 mars 2020 (ES:TS:2020:600), que le juge ne peut examiner le caractère abusif de la clause fixant le taux d’intérêt que lorsque le consommateur a formulé une demande en ce sens, cette jurisprudence serait également incompatible avec l’obligation pour le juge, découlant de la directive 93/13, de vérifier d’office le caractère abusif d’une clause d’un contrat de crédit à la consommation.

16

Enfin, selon la juridiction de renvoi, le Tribunal Supremo (Cour suprême) a, dans cet arrêt, limité le pouvoir d’appréciation du juge national quant au caractère éventuellement usuraire d’un contrat de crédit à la consommation, en fixant, à cet effet, des critères qui ne sont ni objectifs ni précis, violant de ce fait le principe de sécurité juridique, ainsi qu’en témoignerait la jurisprudence discordante des juridictions nationales. Cette insécurité juridique serait incompatible avec l’objectif d’efficacité de fonctionnement du marché intérieur du crédit à la consommation auquel tendraient la directive 2008/48 ainsi que l’article 120 TFUE.

17

Dans ces circonstances, le Juzgado de Primera Instancia no 4 de Castelló de la Plana (tribunal de première instance no 4 de Castelló de la Plana) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

a)

Compte tenu du principe de “primauté” du droit de l’Union dans les domaines de compétence de l’Union européenne et, en particulier, du cadre réglementaire du crédit à la consommation et des contrats de crédit conclus avec des consommateurs, la juridiction nationale est-elle tenue de vérifier d’office la conformité au droit de l’Union de la jurisprudence du Tribunal Supremo (Cour suprême) relative à la [loi relative à l’usure], en tant que disposition du droit national (dans la mesure où la portée de cette jurisprudence s’étend non seulement à l’invalidité du contrat conclu, mais également à la définition de l’“objet principal” du contrat de crédit à la consommation, dans sa modalité de crédit renouvelable, ainsi qu’à l’adéquation du rapport “qualité/prix” du service fourni), ou faut-il adopter la position du Tribunal Supremo (Cour suprême), qui estime que cette obligation de vérification de la conformité au droit de l’Union et à ses directives est subordonnée à la demande de la partie requérante et conditionnée par celle‑ci (principe dispositif), de sorte qu’il y a lieu de considérer que la primauté du droit de l’Union et sa portée harmonisatrice n’“entrent pas en jeu” si l’action exercée en vertu du droit national est “uniquement ou principalement” fondée sur la nullité du crédit à la consommation “en raison de son caractère usuraire”, et ce même si la portée de la jurisprudence de cette juridiction suprême relative à l’interprétation et à l’application de ladite loi relative à l’usure s’étend à la définition de l’objet principal et à l’adéquation du rapport qualité/prix du crédit à la consommation sur lequel la juridiction nationale est appelée à statuer ?

b)

En tout état de cause, compte tenu : du principe de primauté et de la portée harmonisatrice du droit de l’Union en matière de réglementation du crédit à la consommation et des contrats de crédit conclus avec des consommateurs ; du fait que le Tribunal Supremo (Cour suprême) a itérativement déclaré dans de multiples arrêts que l’“exclusion” prévue par la règle harmonisée de l’article 4, paragraphe 2, de la directive [93/13] a été pleinement transposée dans le droit espagnol et que le juge national ne saurait dès lors procéder à un contrôle juridictionnel des prix ; du fait qu’aucune disposition du droit espagnol, pas même [la loi relative à l’usure], ne permet ou ne couvre, de manière générale, un tel contrôle juridictionnel des prix ; et du fait que l’éventuel manque de transparence de la clause déterminant le prix du crédit à la consommation n’a, en outre, fait l’objet d’aucune appréciation, l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 s’oppose-t-il à ce que la juridiction nationale applique ladite loi relative à l’usure en étendant sa portée hors de son cadre naturel de constatation de la nullité du contrat et exerce, en vertu d’un pouvoir “ex novo”, un “contrôle juridictionnel” sur l’objet principal du contrat de nature à déterminer, de manière générale, le prix du crédit à la consommation (par référence à son taux d’intérêt rémunératoire, ou taux d’intérêt nominal) ou le coût de ce crédit (par référence à son [TAEG]) ?

c)

Enfin, conformément à ce qui précède et compte tenu du cadre réglementaire et harmonisateur établi par le traité FUE, en particulier dans le domaine de compétences de l’Union relatif au fonctionnement du marché intérieur, l’article 120 TFUE, combiné à une économie de marché ouverte et au principe de liberté contractuelle, s’oppose-t-il à ce que la juridiction nationale exerce un contrôle permettant de fixer de manière générale le prix ou le coût d’un crédit à la consommation sans que ledit contrôle soit expressément couvert par une disposition du droit national ?

2)

Compte tenu du principe de primauté du droit de l’Union dans le champ d’harmonisation relevant de la compétence de l’Union, en particulier dans le cadre des directives régissant le crédit à la consommation et les contrats de crédit conclus avec des consommateurs, et dès lors que le principe de sécurité juridique constitue une condition nécessaire au bon fonctionnement et à l’efficacité du marché intérieur du crédit à la consommation, ce principe de sécurité juridique s’oppose-t-il à une limitation du [TAEG] dans les contrats de crédit à la consommation, susceptible d’être imposée de manière générale au consommateur afin de lutter contre l’usure, telle que celle établie par le Tribunal Supremo (Cour suprême) sur la base non pas de critères objectifs et précis, mais d’une simple approximation par rapport à une référence, de sorte que chaque juridiction nationale reste libre de déterminer concrètement cette limite afin de statuer sur les litiges dont elle est saisie ? »

La procédure devant la Cour

18

La juridiction de renvoi a demandé que la présente affaire soit soumise à la procédure accélérée prévue à l’article 105 du règlement de procédure de la Cour. À l’appui de sa demande, la juridiction de renvoi a indiqué que les questions posées ont une incidence importante sur le contexte actuel du marché financier du crédit à la consommation.

19

L’article 105, paragraphe 1, du règlement de procédure prévoit que, à la demande de la juridiction de renvoi ou, à titre exceptionnel, d’office, le président de la Cour peut, lorsque la nature de l’affaire exige son traitement dans de brefs délais, le juge rapporteur et l’avocat général entendus, décider de soumettre un renvoi préjudiciel à une procédure accélérée.

20

À cet égard, s’agissant du fait que les questions soulevées par la présente affaire concernent potentiellement un grand nombre de personnes et de rapports juridiques, il convient de rappeler que la procédure accélérée visée à cette disposition constitue un instrument procédural destiné à répondre à une situation d’urgence extraordinaire (voir, en ce sens, arrêt du 15 septembre 2022, Veridos, C-669/20, EU:C:2022:684, point 24 et jurisprudence citée).

21

Or, le nombre important de personnes ou de situations juridiques potentiellement concernées par la décision qu’une juridiction de renvoi doit rendre après avoir saisi la Cour à titre préjudiciel n’est pas susceptible, en tant que tel, de constituer une circonstance exceptionnelle de nature à justifier le recours à une procédure accélérée [arrêt du 3 mars 2022, Presidenza del Consiglio dei Ministri e.a. (Médecins spécialistes en formation), C‑590/20, EU:C:2022:150, point 28 et jurisprudence citée].

22

Dans ces conditions, le 12 mai 2021, le président de la Cour a décidé, la juge rapporteure et l’avocat général entendus, qu’il n’y avait pas lieu de faire droit à cette demande.

Les développements intervenus postérieurement à l’introduction de la demande de décision préjudicielle

23

Par courrier du 1er août 2022, Banco Cetelem a informé la Cour, pièces à l’appui, d’une part, que, le 29 avril 2021, un acte d’acquiescement, par lequel Banco Cetelem a accepté toutes les demandes de la requérante au principal, avait été déposé devant la juridiction de renvoi. D’autre part, Banco Cetelem expose que les parties au principal sont parvenues à un accord transactionnel par lequel la requérante au principal renonce à l’ensemble de ses chefs de demande en échange du paiement par Banco Cetelem du montant réclamé. Une copie de la demande d’homologation de cet accord transactionnel, présentée à la juridiction de renvoi le 10 mai 2021, ainsi qu’une copie de preuve de paiement du montant convenu en date du 12 mai 2021 ont été jointes à ce courrier.

24

Aux termes dudit accord, il est mis fin au contrat de crédit en cause et chacune des parties déclare ne plus rien avoir à réclamer à l’autre.

25

Interrogée par la Cour quant à savoir si une réponse aux questions préjudicielles lui était toujours nécessaire aux fins de la résolution du litige au principal, la juridiction de renvoi a indiqué, dans sa réponse du 31 août 2022, qu’elle a décidé, en date du 7 mai 2021, que, nonobstant l’acte d’acquiescement, la demande de décision préjudicielle devait être maintenue dès lors qu’un intérêt général manifeste sous-tendait celle-ci. Par ailleurs, en date du 11 mai 2021, elle a décidé qu’une suite favorable à la demande d’homologation de l’accord transactionnel ne pouvait être donnée aussi longtemps que la procédure était suspendue dans l’attente de la décision préjudicielle de la Cour.

Sur le non-lieu à statuer

26

Aux termes d’une jurisprudence constante de la Cour, les questions relatives à l’interprétation du droit de l’Union posées par le juge national dans le cadre réglementaire et factuel qu’il définit sous sa responsabilité, et dont il n’appartient pas à la Cour de vérifier l’exactitude, bénéficient d’une présomption de pertinence (arrêt du 26 mars 2020, Miasto Łowicz et Prokurator Generalny, C‑558/18 et C‑563/18, EU:C:2020:234, point 43 et jurisprudence citée).

27

Toutefois, il est également de jurisprudence constante que la procédure instituée à l’article 267 TFUE constitue un instrument de coopération entre la Cour et les juridictions nationales, grâce auquel la première fournit aux secondes les éléments d’interprétation du droit de l’Union qui leur sont nécessaires pour la solution des litiges qu’elles sont appelées à trancher (arrêt du 26 mars 2020, Miasto Łowicz et Prokurator Generalny, C‑558/18 et C‑563/18, EU:C:2020:234, point 44).

28

En outre, conformément à l’article 100, paragraphe 2, de son règlement de procédure, la Cour peut, à tout moment, constater que les conditions de sa compétence ne sont plus remplies.

29

En l’occurrence, d’une part, il ressort du courrier du 1er août 2022 transmis à la Cour par Banco Cetelem que les parties au principal ont conclu un accord transactionnel, par lequel la requérante au principal, en contrepartie du paiement d’une somme par Banco Cetelem, renonce à toute demande à son égard tirée du contrat de crédit en cause. Ainsi qu’il ressort de son courrier du 31 août 2022 et des pièces jointes à celui-ci, la juridiction de renvoi confirme l’existence de cet accord transactionnel.

30

D’autre part, force est de constater que, dans son courrier du 31 août 2022, la juridiction de renvoi a indiqué vouloir maintenir sa demande de décision préjudicielle au motif que ses questions portent sur une matière d’intérêt général. À son avis, les réponses pourraient mettre fin à une situation d’insécurité juridique, générée par la jurisprudence du Tribunal Supremo (Cour suprême) et pourraient être pertinentes en vue de la solution de nombreux litiges analogues pendants, entre autres, devant elle.

31

Il est toutefois de jurisprudence constante que la justification du renvoi préjudiciel est non pas la formulation d’opinions consultatives sur des questions générales ou hypothétiques, mais le besoin inhérent à la solution effective d’un litige. Partant, s’il apparaît que les questions posées ne sont manifestement plus pertinentes pour la solution de ce litige, la Cour doit constater le non-lieu à statuer [arrêt du 19 novembre 2019, A. K. e.a. (Indépendance de la chambre disciplinaire de la Cour suprême), C‑585/18, C‑624/18 et C‑625/18, EU:C:2019:982, point 70 ainsi que jurisprudence citée].

32

En particulier, dès lors qu’il ressort à la fois des termes et de l’économie de l’article 267 TFUE que la procédure préjudicielle présuppose qu’un litige soit effectivement pendant devant les juridictions nationales, dans le cadre duquel elles sont appelées à rendre une décision susceptible de prendre en considération l’arrêt préjudiciel, la Cour doit conclure au non-lieu à statuer si le litige au principal est devenu sans objet [voir, en ce sens, arrêt du 12 mars 1998, Djabali, C‑314/96, EU:C:1998:104, points 21 et 22, ainsi que ordonnance du 1er octobre 2019, YX (Transmission d’un jugement à l’État membre de nationalité du condamné), C‑495/18, EU:C:2019:808, points 19 et 24 à 26].

33

En l’occurrence, même si le litige au principal est encore formellement pendant devant la juridiction de renvoi, cette dernière ayant décidé de surseoir à statuer sur ce litige aux fins du présent renvoi préjudiciel, il ressort des informations dont dispose la Cour que les parties au principal ont conclu un accord transactionnel, lequel a été exécuté, et qu’elles ont saisi la juridiction de renvoi d’une demande tendant à l’homologation de cet accord mettant fin à leur différend. Il s’ensuit qu’une réponse de la Cour aux questions posées par la juridiction de renvoi ne serait d’aucune utilité à cette dernière pour statuer sur ce litige, lequel est devenu sans objet.

34

Dans ces conditions, il n’y a pas lieu de statuer sur la demande de décision préjudicielle.

Sur les dépens

35

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit :

 

Il n’y a pas lieu de statuer sur la demande de décision préjudicielle présentée par le Juzgado de Primera Instancia no 4 de Castelló de la Plana (tribunal de première instance no 4 de Castelló de la Plana, Espagne), par décision du 7 mai 2021.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : l’espagnol.

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