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Document 62019CJ0890
Judgment of the Court (Ninth Chamber) of 29 April 2021.#Fortischem a.s. v European Commission.#Appeal – State aid – Advantage – Recovery – Economic continuity.#Case C-890/19 P.
Arrêt de la Cour (neuvième chambre) du 29 avril 2021.
Fortischem a.s. contre Commission européenne.
Pourvoi – Aides d’État – Avantage – Récupération – Continuité économique.
Affaire C-890/19 P.
Arrêt de la Cour (neuvième chambre) du 29 avril 2021.
Fortischem a.s. contre Commission européenne.
Pourvoi – Aides d’État – Avantage – Récupération – Continuité économique.
Affaire C-890/19 P.
Identifiant ECLI: ECLI:EU:C:2021:345
ARRÊT DE LA COUR (neuvième chambre)
29 avril 2021 (*)
« Pourvoi – Aides d’État – Avantage – Récupération – Continuité économique »
Dans l’affaire C‑890/19 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 4 décembre 2019,
Fortischem a.s., établie à Nováky (Slovaquie), représentée par Me C. Arhold, Rechtsanwalt, ainsi que par Mes P. Hodál et M. Staroň, avocats,
partie requérante,
les autres parties à la procédure étant :
Commission européenne, représentée par Mme L. Armati ainsi que par MM. P. Arenas et G. Conte, en qualité d’agents,
partie défenderesse en première instance,
AlzChem AG, établie à Trostberg (Allemagne), représentée par Me A. Borsos, avocat, et Me V. Dolka, dikigoros,
partie intervenante en première instance,
LA COUR (neuvième chambre),
composée de M. N. Piçarra, président de chambre, M. M. Vilaras (rapporteur), président de la quatrième chambre, et Mme K. Jürimäe, juge,
avocat général : M. G. Pitruzzella,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 Par son pourvoi, Fortischem a.s. demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 24 septembre 2019, Fortischem/Commission (T‑121/15, ci–après l’« arrêt attaqué », EU:T:2019:684), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation des articles 1er et 3 à 5 de la décision (UE) 2015/1826 de la Commission, du 15 octobre 2014, concernant l’aide d’État SA.33797 (2013/C) (ex 2013/NN) (ex 2011/CP) mise à exécution par la Slovaquie en faveur de l’entreprise NCHZ (JO 2015, L 269, p. 71, ci–après la « décision litigieuse »).
Le cadre juridique
2 L’article 14 du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO 1999, L 83, p. 1), intitulé « Récupération de l’aide », énonce :
« 1. En cas de décision négative concernant une aide illégale, la Commission décide que l’État membre concerné prend toutes les mesures nécessaires pour récupérer l’aide auprès de son bénéficiaire (ci-après dénommée “décision de récupération”). La Commission n’exige pas la récupération de l’aide si, ce faisant, elle allait à l’encontre d’un principe général de droit communautaire.
2. L’aide à récupérer en vertu d’une décision de récupération comprend des intérêts qui sont calculés sur la base d’un taux approprié fixé par la Commission. Ces intérêts courent à compter de la date à laquelle l’aide illégale a été mise à la disposition du bénéficiaire jusqu’à celle de sa récupération.
3. Sans préjudice d’une ordonnance de la Cour de justice [de l’Union européenne] prise en application de l’article [278 TFUE], la récupération s’effectue sans délai et conformément aux procédures prévues par le droit national de l’État membre concerné, pour autant que ces dernières permettent l’exécution immédiate et effective de la décision de la Commission. À cette fin et en cas de procédure devant les tribunaux nationaux, les États membres concernés prennent toutes les mesures prévues par leurs systèmes juridiques respectifs, y compris les mesures provisoires, sans préjudice du droit communautaire. »
Les antécédents du litige et la décision litigieuse
3 Les antécédents du litige figurent aux points 1 à 20 de l’arrêt attaqué et, pour les besoins de la présente procédure, peuvent être résumés de la manière suivante.
4 Novácké chemické závody a.s. v konkurze (ci-après « NCHZ ») était un producteur chimique exploitant une usine chimique installée dans la région de Trenčín (Slovaquie). Le 8 octobre 2009, ayant déclaré son incapacité à poursuivre ses activités et déposé son bilan, NCHZ a fait l’objet d’une procédure de faillite.
5 Le 5 novembre 2009, la République slovaque a adopté le zákon č. 493/2009 Z.z. o niektorých opatreniach týkajúcich sa strategických spoločností a o zmene a doplnení niektorých zákonov (loi no 493/2009 sur certaines mesures concernant les sociétés stratégiques et sur la modification de certaines lois, ci-après la « loi sur les sociétés stratégiques »), entrée en vigueur le 1er décembre suivant. Cette loi, applicable aux sociétés qualifiées de « stratégiques » qui faisaient l’objet d’une procédure de faillite, exigeait la présence d’un administrateur de faillite tenu d’assurer la poursuite de l’exploitation de la société stratégique durant cette procédure et d’empêcher les licenciements collectifs injustifiés. Le 2 décembre 2009, NCHZ a été qualifiée par les autorités slovaques de « société stratégique », au sens de ladite loi, et a bénéficié de ce statut jusqu’à l’expiration de celle-ci, le 31 décembre 2010. Elle a été la seule société à faire l’objet d’une application de cette même loi.
6 Le 7 juin 2011, le súd v Trenčíne (tribunal de Trenčín, Slovaquie), qui conduisait la procédure de faillite de NCHZ, a rendu une ordonnance exécutoire demandant à l’administrateur de faillite de procéder à la vente de cette société conformément à la procédure d’appel d’offres organisée par ce tribunal. Le 29 décembre 2011, à l’issue de cette procédure, ledit tribunal a rendu une ordonnance exécutoire demandant à l’administrateur de faillite de déclarer adjudicataire Via Chem Slovakia a.s. (ci–après « Via Chem »). Après la conclusion du contrat d’acquisition entre cette société et NCHZ le 16 janvier 2012 et l’approbation de la vente par le Protimonopolný úrad SR (autorité de concurrence slovaque), la vente a été finalisée le 31 juillet 2012.
7 Le 1er août 2012, Via Chem a vendu la division chimique de NCHZ, à l’exception des biens immobiliers, à la requérante. Les biens immobiliers nécessaires à la production chimique ont été mis à la disposition de cette dernière en vertu d’un contrat de location.
8 Entre temps, la Commission avait reçu, le 13 octobre 2011, une plainte d’AlzChem AG concernant une aide illégale que la République slovaque aurait accordée à NCHZ. Après avoir adressé plusieurs demandes de renseignements aux autorités slovaques et reçu les réponses de ces dernières, la Commission a notifié à la République slovaque, le 2 juillet 2013, sa décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen, en vertu de l’article 108, paragraphe 2, TFUE (JO 2013, C 297, p. 85), s’agissant, notamment de l’autorisation de l’État, du fait de la loi sur les sociétés stratégiques, de poursuivre l’exploitation de NCHZ du mois de décembre 2009 au mois de décembre 2010.
9 Le 15 octobre 2014, la Commission a adopté la décision litigieuse. Dans celle–ci, elle a, notamment, considéré que l’attribution du statut de société stratégique à NCHZ constituait un avantage sélectif au profit de cette société, était imputable à l’État, avait conduit à l’utilisation de ressources d’État et avait faussé la concurrence sur un marché ouvert aux échanges entre les États membres. Elle en a conclu que cette mesure constituait une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE et que cette aide était illégale et incompatible avec le marché intérieur. Après avoir estimé que le montant de ladite aide s’élevait à 4 783 424,10 euros, elle a considéré que celle-ci devait être récupérée auprès de NCHZ et que l’ordre de récupération devait être étendu à la requérante, celle-ci étant liée à NCHZ dans le cadre d’une continuité économique.
10 Le dispositif de la décision litigieuse est libellé comme suit :
« Article premier
L’aide d’État à hauteur de 4 783 424,10 [euros] accordée à NCHZ du fait du statut de société stratégique qui lui a été attribué en vertu de la loi [sur les sociétés stratégiques] et qui l’a préservée de l’application standard de la loi sur la faillite, a été mise à exécution de manière illégale par la [République slovaque], en violation de l’article 108, paragraphe 3, [TFUE], et est incompatible avec le marché intérieur.
[...]
Article 3
1. La [République slovaque] récupérera auprès de NCHZ l’aide illégale visée à l’article 1er.
2. Compte tenu de la continuité économique entre NCHZ et [Fortischem], l’obligation de remboursement de l’aide est étendue à [cette dernière].
3. Les sommes à récupérer produisent des intérêts depuis la date à laquelle elles ont été mises à la disposition de NCHZ, et jusqu’à leur récupération effective.
4. Les intérêts sont calculés sur une base composée, conformément au chapitre V du règlement (CE) no 794/2004 [...] et au règlement (CE) [no 271/2008] modifiant le règlement (CE) no 794/2004.
Article 4
1. La récupération de l’aide visée à l’article 1er est immédiate et effective.
2. La [République slovaque] veille à ce que la présente décision soit appliquée dans un délai de quatre mois à compter du jour de sa notification.
Article 5
1. Dans les deux mois suivant la notification de la présente décision, la [République slovaque] communiquera les informations suivantes :
a) le montant total (principal et intérêts) à récupérer auprès des bénéficiaires ;
b) une description détaillée des mesures qu’elle a déjà prises ou qu’elle prévoit de prendre pour se conformer à la présente décision ;
c) les documents attestant que le bénéficiaire a été sommé de restituer l’aide.
2. La [République slovaque] informera la Commission de l’état d’avancement des mesures nationales prises en vue d’exécuter la présente décision, jusqu’à la récupération de l’aide mentionnée à l’article 1er. Elle transmettra aussi immédiatement, sur simple demande de la Commission, toute information sur les mesures qu’elle a déjà prises ou qu’elle prévoit de prendre pour se conformer à la présente décision. Elle transmettra également des informations détaillées sur le montant de l’aide et les intérêts sur la somme à récupérer que les bénéficiaires ont déjà remboursés.
Article 6
La [République slovaque] est destinataire de la présente décision. »
La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué
11 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 6 mars 2015, la requérante a introduit un recours tendant à l’annulation des articles 1er et 3 à 5 de la décision litigieuse.
12 Par ordonnance du président de la neuvième chambre du Tribunal, du 22 septembre 2015, AlzChem a été admise à intervenir au soutien des conclusions de la Commission.
13 À l’appui de son recours, la requérante a invoqué six moyens, dont le premier, tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE du fait de l’absence, notamment, d’un avantage économique conféré à NCHZ, et le quatrième, tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, et de l’article 108, paragraphe 2, TFUE ainsi que de l’article 14, paragraphe 1, du règlement no 659/1999, du fait de l’extension à elle–même de l’obligation de récupération de l’aide d’État alléguée.
14 Aux points 67 à 153 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a examiné conjointement les première et deuxième branches du premier moyen, tirées de l’absence, respectivement, d’un transfert de ressources d’État et d’un avantage économique conféré à NCHZ. Dans ce contexte, tout d’abord, dans le cadre de l’examen des conditions dans lesquelles la poursuite de l’activité de NCHZ a été autorisée, le Tribunal a relevé, au point 77 de cet arrêt, que le fait que, dans le cadre de l’application de la loi sur les sociétés stratégiques, la poursuite automatique de l’activité de NCHZ était couplée à une interdiction des licenciements collectifs engendrait le risque d’une augmentation des dettes de celle-ci, en particulier à l’égard des créanciers publics, dès lors que, en raison de cette interdiction, les coûts de fonctionnement de NCHZ ne pouvaient pas être limités au moyen d’une réduction du personnel. Or, selon le Tribunal, eu égard à sa situation financière, NCHZ ne pouvait pas, parallèlement, payer ses fournisseurs dans le cadre de la poursuite automatique de son activité et assumer pleinement les coûts sociaux à l’égard des créanciers publics.
15 Ensuite, dans le cadre de l’examen des allégations de la requérante concernant l’identité de situation si NCHZ avait été soumise au régime de droit commun de la faillite, le Tribunal a relevé, au point 121 de l’arrêt attaqué, qu’il était indéniable que, sans l’application de la loi sur les sociétés stratégiques à cette société, d’une part, l’interdiction des licenciements collectifs n’aurait pas été imposée et, d’autre part, la poursuite de l’activité de ladite société aurait dû être décidée par le comité compétent et n’aurait pas été automatique. Il a ajouté, au point 135 de cet arrêt, que, si l’application de cette loi à NCHZ ne garantissait pas la réalisation effective des livraisons par cette dernière, elle garantissait que le personnel était maintenu, du fait de l’interdiction des licenciements collectifs, et assurait notamment aux clients et aux fournisseurs de NCHZ que l’activité de celle–ci serait poursuivie au moins jusqu’à l’expiration de ladite loi, quels que soient les impayés des créances, notamment les créances publiques.
16 Dans le même contexte, le Tribunal a aussi examiné l’allégation de la requérante selon laquelle NCHZ n’a bénéficié d’aucun avantage supplémentaire dans le cadre du maintien de son activité imposé par la loi sur les sociétés stratégiques. Le Tribunal a, notamment, relevé, au point 145 de l’arrêt attaqué, que NCHZ ne pouvait pas assumer l’ensemble de ses dettes et que les dettes à l’égard des deux entités publiques slovaques, respectivement responsables de l’assurance sociale et de l’assurance maladie, s’étaient accrues, alors que, parallèlement, cette société conservait le bénéfice de disposer de ses salariés aux fins de la poursuite de son activité. Le Tribunal a ainsi estimé que l’argument de la requérante selon lequel l’interdiction des licenciements collectifs ne constituait pas un avantage économique pour NCHZ ne saurait prospérer.
17 Enfin, dans la partie conclusive du volet de l’arrêt attaqué consacré à l’examen des première et deuxième branches du premier moyen, le Tribunal a relevé, au point 149 de cet arrêt que, du fait de la qualification de NCHZ, par les autorités slovaques, de « société stratégique », au sens de la loi sur les société stratégiques, ont été imposés, d’une part, la poursuite de son activité, indépendamment de toute prise en considération de sa situation économique et de sa capacité d’honorer ses dettes, notamment les dettes publiques, ainsi que, d’autre part, le maintien de son personnel, du fait de l’interdiction des licenciements collectifs, lui permettant ainsi de poursuivre son activité avec la certitude donnée à ses clients et à ses fournisseurs que son activité serait poursuivie jusqu’à la fin de l’année 2010. Le Tribunal a, dès lors, considéré, au point 152 dudit arrêt, que la Commission n’avait pas commis d’erreur en concluant à l’existence d’un avantage économique conféré à NCHZ et impliquant des ressources d’État. Cette considération a amené le Tribunal à rejeter, au point 153 du même arrêt, les première et deuxième branches du premier moyen.
18 Le quatrième moyen a été examiné aux points 197 à 284 de l’arrêt attaqué. Après avoir résumé les arguments des parties aux points 198 à 203 de cet arrêt, le Tribunal a, notamment, relevé, au point 212 dudit arrêt, lequel s’insère dans un volet intitulé « Observations liminaires », qu’il découlait de la jurisprudence que, si le fait que le prix du transfert de l’entreprise bénéficiaire d’une aide d’État à un nouvel acquéreur n’est pas le prix du marché peut entraîner l’extension de l’obligation de récupération de cette aide à cet acquéreur, la circonstance que le prix de ce transfert soit conforme aux conditions du marché ne peut suffire à exclure, à elle seule, l’existence d’une continuité économique entre le bénéficiaire de ladite aide et l’acquéreur et n’empêche pas, dans certaines circonstances, l’extension de l’obligation de récupération de celle-ci, cette extension étant due à l’existence d’un effet de contournement, sans que soit exigée l’intention d’un tel contournement.
19 Poursuivant l’analyse du quatrième moyen, le Tribunal a examiné, aux points 216 à 250 de l’arrêt attaqué, la question de savoir si, comme l’alléguait la requérante, les actifs de NCHZ avaient été vendus au prix du marché. Dans ce contexte, au point 221 de cet arrêt, qui s’insère dans le volet intitulé « Sur la charge de la preuve », le Tribunal a examiné l’argument de la requérante selon lequel la charge de la preuve de l’avantage économique dont bénéficie l’acquéreur des actifs du bénéficiaire de l’aide incombe à la Commission. Le Tribunal a relevé, à cet égard, que, dans la mesure où, conformément à la jurisprudence, un élément parmi ceux devant être pris en considération afin d’apprécier l’existence d’une continuité économique, tel qu’un prix de vente correspondant au prix du marché, ne suffit pas à lui seul pour exclure l’extension de l’obligation de récupération de l’aide en cause à une entreprise autre que le bénéficiaire initial de celle-ci, la Commission ne doit pas nécessairement prouver l’absence d’un tel prix de vente afin de conclure à une continuité économique et l’absence de garantie d’un tel prix de vente peut être prise en compte dans le cadre de l’appréciation globale des différents éléments examinés, à laquelle la Commission doit se livrer.
20 À l’issue de l’examen effectué aux points 216 à 250 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a relevé, au point 251 de cet arrêt, que, comme la Commission l’avait considéré aux considérants 144 à 146 et 168 de la décision litigieuse, il ne pouvait pas être tenu pour certain que les deux ventes successives des actifs de NCHZ aient été réalisées au prix du marché. Après examen des arguments de la requérante relatifs à l’ampleur et à la logique économique de l’opération de transfert des actifs de NCHZ, il a estimé, au point 258 dudit arrêt, que les considérations de la Commission dans la décision litigieuse n’apparaissaient pas comme étant entachées d’erreur et permettaient de considérer que l’ampleur de l’opération, au sens de l’objet du transfert, militait en faveur de l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante et, au point 265 du même arrêt, que la Commission avait pu, sans commettre d’erreur, conclure que la logique économique de l’opération constituait l’indice d’une telle continuité.
21 Dès lors, le Tribunal a considéré, au point 282 de l’arrêt attaqué, que la Commission n’avait pas commis d’erreur en estimant, en premier lieu, que tant l’ampleur de l’opération, à savoir l’objet du transfert, que sa logique économique pouvaient constituer des indices de l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante et, en second lieu, qu’il ne pouvait être tenu pour certain que les deux ventes successives des actifs de NCHZ avaient été réalisées au prix du marché. Il a ajouté, au point 283 de cet arrêt que, dans ce contexte, eu égard au fait que, conformément à la jurisprudence, d’une part, quand bien même le prix du transfert aurait été conforme au prix du marché, il ne constituerait qu’un élément dans l’analyse de l’existence d’une éventuelle continuité économique et, d’autre part, le versement d’un prix conforme aux conditions du marché peut ne pas suffire à neutraliser l’avantage concurrentiel lié au bénéfice des aides illégales, il devait être considéré que, en raison des circonstances de l’espèce, la Commission avait pu conclure à bon droit à l’extension de l’obligation de récupération de l’aide en cause à la requérante, indépendamment de toute constatation de l’intention d’un contournement. Le Tribunal a ainsi rejeté le quatrième moyen.
22 Ayant également écarté les autres moyens avancés par la requérante, le Tribunal a rejeté le recours et condamné celle-ci à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission.
Les conclusions des parties devant la Cour
23 Fortischem demande à la Cour :
– d’annuler l’arrêt attaqué ;
– d’annuler les articles 1er et 3 à 5 de la décision litigieuse, et
– de condamner la Commission aux dépens.
24 La Commission et AlzChem demandent à la Cour de rejeter le pourvoi et de condamner Fortischem aux dépens.
Sur le pourvoi
25 À l’appui de son pourvoi, la requérante soulève sept moyens tirés, le premier, d’une erreur de droit commise par le Tribunal, en ce qu’il a jugé que la décision de récupération de l’aide visée par la décision litigieuse pouvait être étendue à elle-même, bien qu’elle ait payé les actifs du bénéficiaire de cette aide au prix du marché, le deuxième, d’une erreur de droit dans la répartition de la charge de la preuve, le troisième, d’une erreur de droit et d’une dénaturation des faits, en ce que le Tribunal a ignoré plusieurs présomptions indiquant que les actifs de NCHZ avaient été payés au prix du marché, le quatrième, d’une erreur de droit dans l’interprétation des critères d’appréciation relatifs à l’ampleur et à la logique économique de l’opération, le cinquième, d’une erreur de droit, en ce que le Tribunal a considéré que la Commission pouvait conclure à l’existence d’une continuité économique sur la seule base des critères de l’ampleur et de la logique économique de l’opération, le sixième, d’une erreur de droit, en ce que le Tribunal a considéré que l’interdiction des licenciements collectifs constituait un avantage pour NCHZ et, le septième, d’une erreur de droit, en ce que le Tribunal a substitué sa propre appréciation à celle de la Commission figurant dans la décision litigieuse.
26 Il y a lieu d’examiner, d’abord, les sixième et septième moyens, qui remettent en cause la conclusion du Tribunal selon laquelle NCHZ a bénéficié d’une aide d’État, puis les troisième, deuxième, quatrième, cinquième et premier moyens, relatifs à la récupération de cette aide auprès de la requérante.
Sur le sixième moyen, tiré d’une erreur de droit, en ce que le Tribunal a considéré que l’interdiction des licenciements collectifs constituait un avantage pour NCHZ
Argumentation des parties
27 Par son sixième moyen, la requérante fait valoir que le Tribunal a considéré à tort, aux points 77, 121, 135 et 145 de l’arrêt attaqué, que l’interdiction des licenciements collectifs représentait, pour NCHZ, un avantage. Selon la requérante, cette interdiction représentait, en réalité, un désavantage, en raison de l’augmentation des coûts auxquels celle–ci était exposée. Ladite interdiction serait ainsi dépourvue de pertinence pour l’activité de NCHZ et ne pouvait pas avoir d’effets pour les tiers. Il s’ensuit, selon la requérante, que le Tribunal a commis une erreur de droit et a procédé à une qualification erronée des faits, en se fondant sur une interprétation erronée de la loi sur les sociétés stratégiques. En raison de cette erreur, le Tribunal aurait omis de réduire le montant de l’aide d’État visée par la décision litigieuse, à concurrence d’un montant correspondant à l’augmentation des coûts auxquels NCHZ a été exposée.
28 Selon la requérante, en l’absence de l’interdiction des licenciements collectifs instituée par la loi sur les sociétés stratégiques, NCHZ aurait procédé plus tôt à des licenciements d’une partie de son personnel et aurait ainsi amélioré sa structure de coûts ainsi que, par voie de conséquence, sa compétitivité. Or, tout en admettant l’augmentation des coûts de fonctionnement de cette société du fait de l’interdiction des licenciements collectifs, le Tribunal aurait, de manière illogique, considéré, aux points 145 et 149 de l’arrêt attaqué, que cette interdiction constituait un avantage économique pour celle-ci. Cette considération du Tribunal reposerait sur la prémisse erronée selon laquelle, pour pouvoir poursuivre son activité, NCHZ était obligée de conserver le niveau d’emploi existant avant sa faillite. Dans son mémoire en réplique, la requérante précise que le point 89 de cet arrêt confirme que le Tribunal s’est fondé sur cette prémisse erronée. La requérante souligne que, en réalité, les emplois que NCHZ a été obligée de maintenir, en application de la loi sur les sociétés stratégiques, n’ont eu aucun impact sur son niveau réel de production, ni n’ont pu donner une quelconque certitude à ses clients ou à ses fournisseurs.
29 La requérante ajoute que, dans les motifs de l’arrêt attaqué contestés par le sixième moyen, le Tribunal a ignoré les arguments qu’elle avait avancés devant lui et s’est fondé non pas sur des faits spécifiques, mais seulement sur des impressions. En particulier, la considération du Tribunal, au point 145 de cet arrêt, selon laquelle l’interdiction des licenciements collectifs a entraîné, pour les créanciers publics de NCHZ, une charge supplémentaire par rapport à celle qui aurait découlé de l’application du régime de droit commun de la faillite, reposerait sur une interprétation manifestement erronée des faits. Les cotisations versées par NCHZ à la Sociálna poisťovňa a.s. (compagnie d’assurance sociale, Slovaquie) et à la Všeobecná zdravotná poisťovňa a.s. (compagnie d’assurance maladie, Slovaquie) ne représenteraient qu’environ 25 % des coûts salariaux de cette entreprise.
30 La Commission et AlzChem soutiennent que le sixième moyen procède d’une lecture erronée de l’arrêt attaqué et doit être rejeté. S’agissant de l’argument de la requérante tiré du point 89 de cet arrêt, la Commission fait valoir qu’il s’agit d’un moyen nouveau irrecevable, dès lors qu’il a été avancé pour la première fois dans le mémoire en réplique.
Appréciation de la Cour
31 Il convient de constater que les points 77, 121, 135 et 145 de l’arrêt attaqué font partie des motifs exposés par le Tribunal pour rejeter les première et deuxième branches du premier moyen, tirées de l’absence, respectivement, d’un transfert de ressources d’État et d’un avantage économique conféré à NCHZ.
32 À cet égard, il y a lieu de rappeler, à l’instar du Tribunal au point 72 de l’arrêt attaqué, que l’application à une entreprise d’un régime dérogatoire aux règles de droit commun en matière de faillite doit être considérée comme donnant lieu à l’octroi d’une aide d’État, lorsqu’il est établi que cette entreprise a été autorisée à poursuivre son activité économique dans des circonstances où une telle éventualité aurait été exclue dans le cadre de l’application des règles de droit commun en matière de faillite, ou a bénéficié d’un ou de plusieurs avantages, tels que, notamment, un renoncement effectif, total ou partiel, aux créances publiques, auxquels n’aurait pas pu prétendre une autre entreprise insolvable dans le cadre de l’application des règles de droit commun en matière de faillite (arrêt du 17 juin 1999, Piaggio, C‑295/97, EU:C:1999:313, point 43).
33 Aux points 149 à 153 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a exposé les conclusions qu’il a tirées de l’examen des différents arguments avancés par la requérante dans le cadre des première et deuxième branches du premier moyen.
34 Dans ce cadre, il a relevé, au point 149 de l’arrêt attaqué, que la qualification de NCHZ de « société stratégique », au sens de la loi sur les sociétés stratégiques, a conduit, d’une part, à la poursuite de l’activité de cette entreprise, indépendamment de toute prise en considération de sa situation économique et de sa capacité d’honorer ses dettes, notamment publiques, ainsi que, d’autre part, au maintien de son personnel, du fait de l’entrave aux licenciements collectifs, ce qui a permis à ladite entreprise de poursuivre son activité avec la certitude donnée à ses clients et à ses fournisseurs que son activité serait maintenue jusqu’à la fin de l’année 2010.
35 Au point 150 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que, dans des circonstances qui correspondent aux conditions normales du marché, NCHZ n’aurait pas pu obtenir le même avantage que celui qui a été mis à sa disposition, et ce au moyen de ressources d’État. Selon le Tribunal, la situation n’aurait pas été identique si cette société avait été soumise au régime de droit commun de la faillite et il ne saurait être considéré qu’aucune charge supplémentaire n’a été imposée aux créanciers publics.
36 Sur la base de ces constatations, le Tribunal a estimé, au point 152 de l’arrêt attaqué, que la Commission n’avait pas commis d’erreur en concluant à l’existence d’un avantage économique conféré à NCHZ au moyen de ressources d’État, du fait de la qualification de cette société de « société stratégique », au sens de la loi sur les sociétés stratégiques.
37 Ce faisant, le Tribunal a fait une correcte application de la jurisprudence citée au point 32 du présent arrêt aux faits de l’espèce tels qu’il les avait constatés.
38 Les arguments de la requérante ne sauraient justifier une conclusion différente.
39 L’argument de la requérante selon lequel le Tribunal aurait considéré, à tort, que, pour pouvoir poursuivre son activité, NCHZ était obligée de conserver le « niveau d’emploi », à savoir le même nombre d’employés qu’avant sa déclaration en faillite, procède d’une lecture erronée de l’arrêt attaqué et doit, dès lors, être écarté, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur sa recevabilité. En effet, une telle considération du Tribunal ne figure dans aucun des points de cet arrêt mentionnés par la requérante.
40 En particulier, au point 89 de l’arrêt attaqué, le Tribunal s’est borné à indiquer que le maintien des activités de NCHZ aurait été rendu, à tout le moins, difficile, voire impossible, si les mesures prises par l’administrateur de la faillite de cette société avaient impliqué une importante compression du personnel de celle-ci. Il ne découle nullement de cette considération que le Tribunal a estimé que NCHZ devait maintenir le même nombre d’employés qu’avant sa faillite pour continuer à assurer le même niveau de production.
41 Pour ce qui est de la prétendue omission du Tribunal de tenir compte de l’argument selon lequel le fait, pour une entreprise, de se voir interdire toute réduction de son personnel constitue un désavantage et non pas un avantage, il y a lieu de relever que le Tribunal a tenu compte de cet argument, mais qu’il l’a écarté au motif que, lorsque NCHZ s’est vu interdire tout licenciement, elle était déjà en situation de faillite.
42 Si, pour une entreprise qui n’est pas en situation de cessation de paiements, le fait de ne pas pouvoir licencier une partie de son personnel pour réduire les coûts d’exploitation constitue un désavantage, il en va différemment d’une entreprise qui a été déclarée en faillite, telle que NCHZ.
43 Aux points 77 et 145 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a exposé que la poursuite des activités de NCHZ sans réduction de son personnel a nécessairement augmenté la dette de cette société à l’égard des créanciers publics, plus particulièrement à l’égard de la compagnie d’assurance sociale et de la compagnie d’assurance maladie. Dans la mesure où NCHZ était déjà, au moment de sa déclaration en faillite, incapable de régler l’intégralité de ses dettes, l’augmentation de celles-ci auprès de ces créanciers publics équivalait, en réalité, à un renoncement effectif à tout le moins partiel desdits créanciers à leurs créances, comme le Tribunal l’a, en substance, relevé au point 145 de cet arrêt.
44 C’est sur la base de ces considérations que le Tribunal a pu, sans commettre d’erreur de droit, rejeter l’argument de la requérante selon lequel l’interdiction des licenciements collectifs ne constituait pas un avantage économique pour NCHZ.
45 Compte tenu des considérations qui précèdent, il y a lieu d’écarter le sixième moyen.
Sur le septième moyen, tiré d’une erreur de droit, en ce que le Tribunal a substitué sa propre appréciation à celle de la Commission figurant dans la décision litigieuse
Argumentation des parties
46 Par son septième moyen, la requérante fait valoir que, dans le cadre de l’examen de ses arguments relatifs à l’existence d’un avantage économique pour NCHZ découlant de l’interdiction des licenciements collectifs, le Tribunal a commis une erreur de droit en substituant sa propre motivation à celle de la Commission, figurant dans la décision litigieuse. En effet, les points 135, 145 et 149 de l’arrêt attaqué contiendraient de nouvelles justifications tendant à démontrer que la prétendue possibilité, pour cette société, de maintenir le niveau des salariés tout en ne payant pas les cotisations de sécurité sociale et d’assurance maladie constituait en elle–même un avantage. Il en irait de même de la considération, figurant au point 149 de cet arrêt, selon laquelle la possibilité pour NCHZ de maintenir l’ensemble de son personnel lui permettait de poursuivre son activité avec la certitude donnée à ses clients et à ses fournisseurs que son activité serait poursuivie jusqu’à la fin de l’année 2010. Ces considérations ne seraient liées à aucune appréciation figurant dans la décision litigieuse. En réalité, le Tribunal aurait comblé, par sa propre motivation, une lacune dans la motivation de la décision litigieuse.
47 La Commission et AlzChem répondent que toutes les considérations du Tribunal contestées par la requérante trouvent leur fondement dans la décision litigieuse, de telle sorte que le septième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.
Appréciation de la Cour
48 Selon la jurisprudence de la Cour si, dans le cadre d’un recours en annulation, le Tribunal peut être amené à interpréter la motivation de l’acte attaqué d’une manière différente de son auteur, voire même, dans certaines circonstances, à rejeter la motivation formelle retenue par celui-ci, il ne peut substituer sa propre motivation à celle de l’auteur de l’acte attaqué (arrêts du 27 janvier 2000, DIR International Film e.a./Commission, C‑164/98 P, EU:C:2000:48, points 38 et 42, ainsi que du 22 décembre 2008, British Aggregates/Commission, C‑487/06 P, EU:C:2008:757, points 141 et 142).
49 Toutefois, en l’espèce, contrairement aux allégations de la requérante, il ne ressort pas de l’arrêt attaqué que le Tribunal s’est fondé sur une motivation différente de celle retenue par la Commission dans la décision litigieuse pour considérer que NCHZ a bénéficié, du fait de sa qualification de « société stratégique », d’un avantage constitutif d’une aide d’État.
50 Le Tribunal s’est limité à confirmer l’appréciation de la Commission, résumée aux points 44 à 48 de l’arrêt attaqué, selon laquelle l’application, à NCHZ, de la loi sur les sociétés stratégiques et l’interdiction des licenciements collectifs qu’elle a impliquée ont eu pour effet d’octroyer à cette société un avantage sélectif constitutif d’une aide d’État. Aux points 135, 145 et 149 de cet arrêt, évoqués par la requérante dans son argumentation, le Tribunal s’est borné à répondre à des arguments soulevés devant lui par la requérante, sans exposer une motivation différente de celle figurant dans la décision litigieuse.
51 Par conséquent, il y a lieu d’écarter le septième moyen.
Sur le troisième moyen, tiré d’une erreur de droit et d’une dénaturation des faits, en ce que le Tribunal a ignoré plusieurs présomptions indiquant que les actifs de NCHZ avaient été payés au prix du marché
Argumentation des parties
52 Par son troisième moyen, la requérante fait valoir que, tant au cours de la procédure devant la Commission qu’au cours de la procédure devant le Tribunal, elle a démontré l’exactitude de plusieurs faits qui permettaient de présumer que le prix qu’elle a payé pour les actifs de NCHZ correspondait au prix du marché. Or, le Tribunal n’aurait pas, à la suite d’une erreur de droit, accepté la validité de ces présomptions et aurait, de surcroît, dénaturé les faits à la base de celles-ci.
53 En particulier, la requérante soutient que, dans l’arrêt du 29 avril 2004, Allemagne/Commission (C‑277/00, EU:C:2004:238, points 93 et 94), la Cour a établi une présomption selon laquelle des actifs vendus dans le cadre d’une procédure de faillite menée par un administrateur de faillite personnellement responsable, agissant sous le contrôle d’un tribunal de la faillite et dans le seul intérêt des créanciers, l’ont été au prix du marché. Or, aux points 224 et 225 de l’arrêt attaqué, le Tribunal aurait, à la suite d’une erreur de droit, refusé d’admettre l’existence de cette présomption.
54 La requérante ajoute que ni les doutes brefs et abstraits, exprimés dans la décision litigieuse quant au point de savoir si la procédure de vente des actifs de NCHZ était inconditionnelle, ni les spéculations du Tribunal, exposées au point 231 de l’arrêt attaqué, ne permettent de renverser la présomption de vente au prix du marché. Devant le Tribunal, elle aurait démontré que la possibilité, pour les intéressés qui ont participé à la procédure de vente des actifs de NCHZ, de prendre certains engagements relatifs aux investissements à réaliser et au maintien d’un niveau de production déterminé, en contrepartie du droit d’égaler l’offre du plus offrant qui n’a pas souscrit aux mêmes engagements, était dépourvue d’utilité pratique et aucun soumissionnaire n’a fait usage de cette possibilité.
55 Ce serait également à tort que la Commission a considéré, dans la décision litigieuse, que l’option d’acheter de manière séparée certains actifs de NCHZ aurait pu conduire à la réalisation d’un prix total de vente plus élevé. L’administrateur et le tribunal de la faillite auraient conclu, après une analyse profonde, qu’une vente globale de tous les actifs de NCHZ était susceptible de conduire à un prix de vente plus élevé et était la meilleure option économique pour les créanciers. Toutefois, ainsi qu’il ressort du point 236 de l’arrêt attaqué, ils auraient évalué des offres non sollicitées pour des actifs individuels ou pour des groupes d’actifs, mais ils auraient conclu que ces offres ne pouvaient conduire à un meilleur résultat économique pour les créanciers.
56 Enfin, la requérante fait valoir que le prix qu’elle a payé à Via Chem pour l’achat des actifs de NCHZ correspondait au prix du marché, dès lors que cet achat a été conclu entre deux opérateurs indépendants agissant en économie de marché. Or, tant la Commission que le Tribunal, aux points 248 à 250 de l’arrêt attaqué, n’auraient pas accepté cette présomption, au seul motif que Via Chem a vendu les actifs de NCHZ à la requérante sans organiser de procédure d’appel d’offres.
57 La Commission et AlzChem estiment que plusieurs arguments de la requérante visent à obtenir de la Cour une nouvelle appréciation des faits et doivent, dès lors, être rejetés comme étant irrecevables. En tout état de cause, elles estiment que le troisième moyen n’est pas fondé et doit être rejeté.
Appréciation de la Cour
58 Il importe de rappeler, à titre liminaire et à l’instar du Tribunal au point 207 de l’arrêt attaqué, que, selon la jurisprudence de la Cour, les aides illégales doivent être récupérées auprès de la société qui poursuit l’activité économique de l’entreprise ayant bénéficié de ces aides lorsqu’il est établi que cette société conserve la jouissance effective de l’avantage concurrentiel lié au bénéfice desdites aides (arrêt du 7 mars 2018, SNCF Mobilités/Commission, C‑127/16 P, EU:C:2018:165, point 106 et jurisprudence citée).
59 Il ressort de cette même jurisprudence qu’une continuité économique entre les sociétés parties à un transfert d’actifs s’apprécie en fonction de l’objet du transfert, à savoir les actifs et les passifs, le maintien de la force de travail et les actifs groupés, du prix du transfert, de l’identité des actionnaires ou des propriétaires de l’entreprise repreneuse et de l’entreprise de départ, du moment où le transfert a lieu, à savoir après le début de l’enquête, l’ouverture de la procédure ou la décision finale, ou encore de la logique économique de l’opération (arrêt du 7 mars 2018, SNCF Mobilités/Commission, C‑127/16 P, EU:C:2018:165, point 108 et jurisprudence citée).
60 La Cour a itérativement jugé que, lorsqu’une entreprise ayant bénéficié d’une aide d’État illégale est rachetée au prix du marché, c’est–à–dire au prix le plus élevé qu’un investisseur privé agissant dans des conditions normales de concurrence était prêt à payer pour cette société dans la situation où elle se trouvait, notamment après avoir bénéficié d’aides d’État, l’élément d’aide a été évalué au prix du marché et inclus dans le prix d’achat. Dans de telles conditions, l’acheteur ne saurait être considéré comme ayant bénéficié d’un avantage par rapport aux autres opérateurs sur le marché (arrêt du 1er octobre 2015, Electrabel et Dunamenti Erőmű/Commission, C‑357/14 P, EU:C:2015:642, point 112 ainsi que jurisprudence citée).
61 En l’espèce, il y a lieu de rappeler que, ainsi qu’il ressort des points 8 et 11 de l’arrêt attaqué, l’ensemble des actifs de NCHZ a été vendu à Via Chem, dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres menée par l’administrateur de faillite, sous le contrôle du tribunal de la faillite. Il ressort du point 12 de cet arrêt que le lendemain de la finalisation de cette vente, Via Chem a vendu à la requérante la division chimique de NCHZ, à l’exception des biens immobiliers, lesquels ont été mis à la disposition de la requérante en vertu d’un contrat de location.
62 Dans la décision litigieuse, la Commission a considéré qu’il existait une continuité économique entre NCHZ et la requérante, de telle sorte que l’ordre de récupération de l’aide devait être étendu à cette dernière. La requérante a contesté cette considération par le quatrième moyen de son recours.
63 Après avoir examiné, aux points 204 à 280 de l’arrêt attaqué, les différents arguments avancés par la requérante dans le cadre de ce moyen, le Tribunal a relevé, au point 282 de cet arrêt, que la Commission n’avait pas commis d’erreur en estimant, en premier lieu, que tant l’ampleur de l’opération, à savoir l’objet du transfert, que sa logique économique pouvaient constituer des indices de l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante et, en second lieu, qu’il ne pouvait être tenu pour certain que les deux ventes successives des actifs de NCHZ avaient été réalisées au prix du marché. Il a ajouté, au point 283 dudit arrêt, que, dans ce contexte, eu égard au fait que, conformément à la jurisprudence, d’une part, quand bien même le prix du transfert aurait été conforme au prix du marché, il ne constituerait qu’un élément dans l’analyse de l’existence d’une éventuelle continuité économique et, d’autre part, le versement d’un prix conforme aux conditions du marché peut ne pas suffire à neutraliser l’avantage concurrentiel lié au bénéfice des aides illégales, il devait être considéré que, en raison des circonstances de l’espèce, la Commission avait pu conclure à bon droit à l’extension de l’obligation de récupération de l’aide en cause à la requérante, indépendamment de toute constatation de l’intention d’un contournement.
64 Ce sont ces considérations du Tribunal qui sont contestées par le troisième moyen, lequel s’articule, en substance, en deux branches. Par la première branche du troisième moyen, la requérante reproche au Tribunal une erreur de droit, en ce qu’il a prétendument méconnu une présomption établie par la Cour dans l’arrêt du 29 avril 2004, Allemagne/Commission (C‑277/00, EU:C:2004:238). Selon cette présomption, telle qu’interprétée par la requérante, si des actifs ont été vendus dans le cadre d’une procédure de faillite menée par un administrateur de faillite personnellement responsable, agissant sous le contrôle d’un tribunal de la faillite et dans le seul intérêt des créanciers, il devrait être considéré que ces actifs ont été vendus au prix du marché.
65 Or, contrairement à ce que fait valoir la requérante, il ne ressort pas de l’arrêt du 29 avril 2004, Allemagne/Commission (C‑277/00, EU:C:2004:238, points 93 et 94), que la Cour a entendu établir une présomption d’application générale. Les considérations énoncées au point 93 de cet arrêt concernent le contexte spécifique de l’affaire ayant donné lieu audit arrêt et elles ne laissent apparaître l’existence d’aucune présomption d’application générale.
66 En outre, il ressort du point 92 de l’arrêt du 29 avril 2004, Allemagne/Commission (C‑277/00, EU:C:2004:238), que, dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, il était constant que la vente des actifs du bénéficiaire de l’aide en cause à une autre entreprise avait été effectuée au prix du marché. C’est donc sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a affirmé, au point 224 de l’arrêt attaqué, que la requérante faisait une lecture extensive de l’arrêt du 29 avril 2004, Allemagne/Commission (C‑277/00, EU:C:2004:238).
67 Partant, la première branche du troisième moyen doit être écartée comme étant non fondée.
68 Par la seconde branche du troisième moyen, la requérante conteste, en substance, les considérations qui ont amené le Tribunal à conclure, au point 246 de l’arrêt attaqué, que la Commission avait, à juste titre, estimé qu’il n’existait pas de garanties quant au fait que le prix payé par Via Chem correspondait au prix du marché pour les actifs de NCHZ.
69 Or, il y a lieu de rappeler qu’il résulte de l’article 256, paragraphe 1, second alinéa, TFUE et de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne que le Tribunal est seul compétent, d’une part, pour constater les faits, sauf dans le cas où l’inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d’autre part, pour apprécier ces faits. Partant, l’appréciation des faits ne constitue pas, sous réserve du cas de la dénaturation des éléments de preuve produits devant le Tribunal, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour (arrêt du 8 mars 2016, Grèce/Commission, C‑431/14 P, EU:C:2016:145, points 30 et 31 ainsi que jurisprudence citée).
70 Lorsqu’il allègue une dénaturation d’éléments de preuve par le Tribunal, un requérant doit, en application de l’article 256 TFUE, de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 168, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure de la Cour, indiquer de façon précise les éléments qui auraient été dénaturés par celui-ci et démontrer les erreurs d’analyse qui, dans son appréciation, auraient conduit le Tribunal à cette dénaturation. Par ailleurs, il est de jurisprudence constante de la Cour qu’une dénaturation doit apparaître de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves (arrêt du 8 mars 2016, Grèce/Commission, C‑431/14 P, EU:C:2016:145, point 32 et jurisprudence citée).
71 En l’espèce, comme le soutiennent, en substance, la Commission et AlzChem, l’argumentation avancée par la requérante dans le cadre de la seconde branche du troisième moyen concerne essentiellement la question de savoir si les conditions de l’appel d’offres qui a conduit à la vente des actifs de NCHZ à Via Chem étaient de nature à assurer que le prix de vente qui serait obtenu serait le prix du marché. Les appréciations du Tribunal afférentes à cette question sont de nature factuelle et ne sauraient, partant, être remises en cause au stade du pourvoi, sauf dans l’hypothèse d’une dénaturation des éléments de fait et de preuve par le Tribunal.
72 Or, si la requérante a évoqué une dénaturation des faits par le Tribunal, elle n’a indiqué ni quels sont les faits que le Tribunal aurait dénaturés ni en quoi précisément consisterait cette dénaturation.
73 Par conséquent, en application de la jurisprudence citée aux points 69 et 70 du présent arrêt, la seconde branche du troisième moyen doit être écartée comme étant irrecevable.
74 Il ressort de tout ce qui précède que le troisième moyen doit être rejeté.
Sur le deuxième moyen, tiré d’une erreur de droit dans la répartition de la charge de la preuve
Argumentation des parties
75 Par son deuxième moyen, la requérante fait valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit en considérant, au point 221 de l’arrêt attaqué, que la Commission ne supporte pas la charge de la preuve du caractère inférieur au prix du marché du prix d’achat des actifs du bénéficiaire de l’aide. Selon la requérante, les circonstances factuelles de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 7 mars 2018, SNCF Mobilités/Commission (C‑127/16 P, EU:C:2018:165), cité aux points 205 à 209 de l’arrêt attaqué, étaient tout à fait différentes de celles de la présente affaire, dans laquelle un appel d’offres ouvert, transparent et non discriminatoire a été organisé sous la responsabilité d’un administrateur de faillite personnellement responsable et sous le contrôle du tribunal de la faillite et a abouti à un prix de vente positif.
76 La Commission et AlzChem estiment que le deuxième moyen doit être rejeté comme étant dépourvu de fondement.
Appréciation de la Cour
77 Il y a lieu de relever que, au point 221 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a répondu à l’argument de la requérante résumé au point 219 de cet arrêt, selon lequel la charge de la preuve concernant l’avantage économique dont bénéficie l’acquéreur des actifs du bénéficiaire de l’aide incombe à la Commission et il ne suffit pas que celle–ci exprime des doutes.
78 Le Tribunal a relevé, à cet égard, que, dans la mesure où, conformément à la jurisprudence, un élément parmi ceux devant être pris en considération afin d’apprécier l’existence d’une continuité économique ne suffit pas à lui seul afin d’exclure l’extension de l’obligation de récupération de l’aide en cause à une autre entreprise que le bénéficiaire initial de celle-ci, tel qu’un prix de vente au prix du marché, la Commission ne doit pas nécessairement prouver l’absence d’un tel prix de vente afin de conclure à une continuité économique et l’absence de garantie d’un tel prix de vente peut être prise en compte dans le cadre de l’appréciation globale par la Commission des différents éléments examinés.
79 Contrairement aux allégations de la requérante, cette considération du Tribunal découle logiquement de la jurisprudence rappelée aux points 58 et 59 du présent arrêt. Il ressort, en effet, de cette jurisprudence que le prix du transfert n’est qu’un des éléments à prendre en considération pour apprécier l’existence d’une continuité économique.
80 Cette considération ne saurait être remise en cause par l’argument, avancé par la requérante dans son mémoire en réplique, selon lequel les circonstances factuelles de l’arrêt du 7 mars 2018, SNCF Mobilités/Commission (C‑127/16 P, EU:C:2018:165), étaient différentes de celles de la présente affaire. En effet, les points 106 et 108 de cet arrêt, cités par le Tribunal aux points 207 et 208 de l’arrêt attaqué, énoncent des considérations d’ordre général et ne se rapportent pas aux circonstances spécifiques de l’affaire ayant donné lieu audit arrêt.
81 Il s’ensuit que le deuxième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.
Sur le quatrième moyen, tiré d’une erreur de droit dans l’interprétation des critères d’appréciation relatifs à l’ampleur et à la logique économique de l’opération
Argumentation des parties
82 Par son quatrième moyen, la requérante fait valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit en considérant, aux points 264 et 265 de l’arrêt attaqué, que le critère de la « logique économique de l’opération », utilisée dans la jurisprudence pour constater une continuité économique entre le bénéficiaire de l’aide et une autre entreprise, est rempli lorsqu’une entreprise ayant acquis les actifs du bénéficiaire de l’aide ne parvient pas à démontrer qu’elle les utilisera dans le futur d’une manière différente de celle dont ce bénéficiaire les a utilisés.
83 La requérante relève, à cet égard, que, comme elle l’a soutenu devant le Tribunal, ce critère vise uniquement à identifier des tentatives de contournement de la récupération d’une aide d’État, notamment dans le cas d’une opération à l’intérieur d’un groupe d’entreprises. L’interprétation dudit critère retenue par le Tribunal impliquerait une discrimination au détriment d’un acquéreur actif dans un autre secteur économique, qui serait incapable de démontrer qu’il intégrera les actifs du bénéficiaire de l’aide dans ses propres activités.
84 Ces considérations seraient également valables à l’égard du critère de l’« ampleur de l’opération ». Celui–ci serait un critère négatif, qui milite contre l’existence d’un contournement lorsque seuls des actifs séparés ont été vendus. Il serait, en effet, douteux que ce critère puisse être utile pour l’identification d’une tentative de contournement en cas de vente en bloc des actifs. En toute hypothèse, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en considérant, au point 258 de l’arrêt attaqué que, en l’espèce, l’objet du transfert « milite en faveur de l’existence d’une continuité économique ».
85 La Commission et AlzChem estiment que le quatrième moyen n’est pas fondé et doit être rejeté.
Appréciation de la Cour
86 Selon la jurisprudence de la Cour citée au point 59 du présent arrêt, le critère de la « logique économique de l’opération » est l’un des critères utilisés pour apprécier l’existence d’une continuité économique entre les sociétés parties à un transfert d’actifs, laquelle pourrait justifier la récupération d’une aide illégale auprès de la société qui a acquis les actifs du bénéficiaire de cette aide et poursuit l’activité économique de celui–ci.
87 En revanche, contrairement aux allégations de la requérante, il ne ressort pas de cette jurisprudence que ce critère vise exclusivement l’identification des tentatives de contournement de la récupération de l’aide en cause.
88 C’est, dès lors, sans méconnaître le sens dudit critère ni commettre d’erreur de droit que le Tribunal a pu considérer, aux points 264 et 265 de l’arrêt attaqué, que le fait que la requérante utilisait les actifs qu’elle avait acquis de la même façon que NCHZ, sans changement de stratégie commerciale, mène à la conclusion selon laquelle la logique économique de l’opération d’achat par la requérante était, pour celle-ci, la poursuite des activités précédemment conduites par NCHZ, ce qui constituait l’indice d’une continuité économique entre cette dernière et la requérante.
89 L’argumentation de la requérante relative au critère de l’« ampleur de l’opération » ne saurait non plus prospérer. Tout comme dans le cas du critère de la « logique économique de l’opération », l’argument de la requérante selon lequel le critère de l’« ampleur de l’opération » ne sert qu’à identifier des tentatives de contournement de la récupération de l’aide en cause ne trouve aucun appui dans la jurisprudence de la Cour.
90 Il ne saurait, dès lors, être reproché au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit en affirmant, au point 258 de l’arrêt attaqué, que l’ampleur de l’opération d’acquisition des actifs de NCHZ par la requérante, au sens de l’objet du transfert, militait en faveur de l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et celle-ci.
91 En effet, il est constant que la requérante a acquis l’ensemble des actifs de NCHZ, à l’exception des biens immobiliers nécessaires à la production chimique qu’elle a, toutefois, pris en location, comme le Tribunal l’a rappelé au point 258 de l’arrêt attaqué. Il s’agit, ainsi, d’un transfert complet de NCHZ à la requérante ce qui plaide en faveur de l’existence d’une continuité économique entre ces deux entreprises.
92 Il ressort des considérations qui précèdent que le quatrième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.
Sur le cinquième moyen, tiré d’une erreur de droit, en ce que le Tribunal a considéré que la Commission pouvait conclure à l’existence d’une continuité économique sur la seule base des critères de l’ampleur et de la logique économique de l’opération
Argumentation des parties
93 Par son cinquième moyen, la requérante fait valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit, au point 282 de l’arrêt attaqué, en considérant que la continuité économique entre NCHZ et la requérante pouvait être établie sur la seule base des critères de l’ampleur et de la logique économique de l’opération et que les seuls doutes de la Commission quant au point de savoir si l’acquisition des actifs de la première par la seconde a été payée au prix du marché suffisaient à justifier cette conclusion. En effet, au point 283 de cet arrêt, le Tribunal aurait considéré que, quand bien même cette acquisition aurait été payée au prix du marché, il serait possible de conclure à l’existence d’une continuité économique sur la seule base des critères de l’ampleur et de la logique économique de l’opération.
94 La Commission et AlzChem répondent que le cinquième moyen procède d’une lecture erronée de l’arrêt attaqué ainsi que de la jurisprudence en la matière et doit être rejeté comme étant non fondé.
Appréciation de la Cour
95 Il convient de constater que les points 282 et 283 de l’arrêt attaqué, visés par le cinquième moyen, s’insèrent dans une partie de cet arrêt qui porte, selon son intitulé figurant avant le point 281 dudit arrêt, sur « l’appréciation globale de la Commission quant à l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante ».
96 Ainsi qu’il ressort de l’arrêt attaqué, pour constater l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante, la Commission ne s’est pas limitée, dans la décision litigieuse, à examiner les seuls critères de l’ampleur et de la logique économique de l’opération de transfert des actifs de NCHZ à la requérante, mais a aussi analysé d’autres critères, à savoir le prix de vente, l’éventuelle intention d’échapper à la décision de récupération, les éventuels liens entre le propriétaire initial et le nouveau ainsi que le moment de la vente.
97 Aux points 216 à 280 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a contrôlé les appréciations de la Commission relatives à l’ensemble de ces critères. À la suite de cet examen et dans le cadre de son appréciation souveraine des faits de l’espèce, il a confirmé, au point 282 de cet arrêt, le bien-fondé des conclusions de la Commission selon lesquelles, d’une part, l’ampleur de l’opération de transfert des actifs de NCHZ d’abord à Via Chem, puis à la requérante, ainsi que la logique économique de cette opération pouvaient constituer des indices de l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante et, d’autre part, qu’il ne pouvait être tenu pour certain que les deux ventes successives avaient été réalisées au prix du marché.
98 Il ressort également de l’arrêt attaqué que le Tribunal a confirmé l’appréciation de la Commission selon laquelle, en substance, aucun des critères analysés ne permettait d’exclure définitivement l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante.
99 Par conséquent, c’est sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a pu juger que la Commission était en droit de constater, dans le cadre d’une appréciation globale, l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante, laquelle justifiait l’extension, à cette dernière, de l’obligation de récupération de l’aide versée à la première et visée par la décision litigieuse.
100 Il ressort, en effet, de la jurisprudence citée aux points 58 et 59 du présent arrêt que l’extension de l’obligation de récupération d’aides illégales dépend de la question de savoir si la société qui poursuit les activités du bénéficiaire de ces aides conserve la jouissance effective de celles–ci, ce qui est le cas s’il existe une continuité économique entre ce bénéficiaire et ladite société. Le critère de la logique économique de l’opération est expressément visé par cette jurisprudence, alors que le critère de l’ampleur de l’opération correspond à celui de l’objet du transfert. Or, comme l’a, en substance, jugé le Tribunal, ces deux critères plaidaient clairement en faveur d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante.
101 S’agissant du critère relatif au prix de vente, il ressort clairement du point 282 de l’arrêt attaqué que le Tribunal, dans son appréciation souveraine des faits, a, en substance, considéré qu’il n’avait pas été établi que, en l’espèce, ce prix correspondait au prix du marché, de telle sorte que la jurisprudence citée au point 60 du présent arrêt ne pouvait pas, en tout état de cause, trouver à s’appliquer.
102 Dans ces conditions, la considération figurant au point 283 de l’arrêt attaqué, selon laquelle, en substance, à supposer que le prix d’achat des actifs de NCHZ par la requérante fût conforme au prix du marché, cet élément n’aurait pas suffi pour exclure l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante, a été émise à titre surabondant par le Tribunal.
103 Or, au vu des constats opérés aux points 99 à 101 du présent arrêt, la considération figurant au point 283 de l’arrêt attaqué ne saurait, même à la supposer entachée d’erreur, entraîner l’annulation de cet arrêt. L’argument de la requérante dirigé contre celle-ci doit donc être écarté comme étant inopérant (voir, par analogie, arrêt du 26 mars 2019, Commission/Italie, C‑621/16 P, EU:C:2019:251, point 57 et jurisprudence citée).
104 Il ressort des considérations qui précèdent que le cinquième moyen doit être rejeté.
Sur le premier moyen, tiré d’une erreur de droit commise par le Tribunal, en ce qu’il a jugé que la décision de récupération de l’aide visée par la décision litigieuse pouvait être étendue à la requérante, bien que celle–ci ait payé les actifs du bénéficiaire de cette aide au prix du marché
Argumentation des parties
105 Par son premier moyen, la requérante fait valoir que le Tribunal a violé l’article 14, paragraphe 1, du règlement no 659/1999 en considérant, ainsi qu’il ressort du point 212 de l’arrêt attaqué que, dans un cas où les actifs du bénéficiaire de l’aide ont été achetés par un concurrent, il n’est pas nécessaire de démontrer que le prix d’achat était inférieur au prix du marché.
106 La Commission et AlzChem estiment que le premier moyen doit être rejeté.
Appréciation de la Cour
107 Le point 212 de l’arrêt attaqué, visé par le premier moyen, fait partie des observations liminaires énoncées par le Tribunal avant de procéder à l’analyse des différents arguments avancés par la requérante dans le cadre du quatrième moyen de son recours. Le Tribunal y a notamment énoncé que la circonstance que le prix du transfert des actifs du bénéficiaire de l’aide illégale à une autre entreprise soit conforme aux conditions du marché peut ne pas suffire à exclure, à elle seule, l’existence d’une continuité économique entre le bénéficiaire de cette aide et l’acquéreur des actifs de celui–ci et n’empêche pas, dans certaines circonstances, l’extension de l’obligation de récupération de ladite aide à l’acquéreur.
108 La considération énoncée au point 212 de l’arrêt attaqué est, ainsi, liée à celle énoncée au point 283 de cet arrêt, rappelée au point 102 du présent arrêt. En effet, cette considération ne constitue qu’une transposition, aux circonstances de l’espèce, de la considération d’ordre général exposée au point 212 de l’arrêt attaqué.
109 Or, il ressort des points 97 et 101 du présent arrêt que le Tribunal a considéré qu’il n’avait pas été démontré que la vente des actifs de NCHZ d’abord à Via Chem, puis à la requérante, a été effectuée au prix du marché.
110 Partant, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 103 du présent arrêt, il doit être conclu que, à supposer que le point 283 de l’arrêt attaqué, transposant les considérations jurisprudentielles d’ordre général exposées au point 212 de cet arrêt, soit entaché d’une erreur de droit, cette erreur ne saurait justifier l’annulation dudit arrêt, de telle sorte que le premier moyen doit être écarté comme étant inopérant.
111 Tous les moyens du pourvoi devant être écartés, il y a lieu de rejeter celui-ci.
Sur les dépens
112 En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.
113 En vertu de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi conformément à l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute personne qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
114 La requérante ayant succombé en ses moyens et la Commission ainsi qu’AlzChem ayant conclu à sa condamnation aux dépens, la requérante supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission ainsi que par AlzChem.
Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) déclare et arrête :
1) Le pourvoi est rejeté.
2) Fortischem a.s. supporte, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne ainsi que par AlzChem AG.
Signatures
* Langue de procédure : l’anglais.