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Document 62017CJ0648

    Arrêt de la Cour (sixième chambre) du 15 novembre 2018.
    « BTA Baltic Insurance Company » AS contre « Baltijas Apdrošināšanas Nams » AS.
    Demande de décision préjudicielle, introduite par l'Augstākā tiesa.
    Renvoi préjudiciel – Assurance obligatoire de la responsabilité civile résultant de la circulation des véhicules automoteurs – Directive 72/166/CEE – Article 3, paragraphe 1 – Notion de “circulation des véhicules” – Accident impliquant deux véhicules stationnés sur un parking – Dommage matériel causé à un véhicule par un passager du véhicule voisin ouvrant la portière de celui‑ci.
    Affaire C-648/17.

    Identifiant ECLI: ECLI:EU:C:2018:917

    ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)

    15 novembre 2018 ( *1 )

    « Renvoi préjudiciel – Assurance obligatoire de la responsabilité civile résultant de la circulation des véhicules automoteurs – Directive 72/166/CEE – Article 3, paragraphe 1 – Notion de “circulation des véhicules” – Accident impliquant deux véhicules stationnés sur un parking – Dommage matériel causé à un véhicule par un passager du véhicule voisin ouvrant la portière de celui-ci »

    Dans l’affaire C‑648/17,

    ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Augstākā tiesa (Cour suprême, Lettonie), par décision du 13 novembre 2017, parvenue à la Cour le 20 novembre 2017, dans la procédure

    « BTA Baltic Insurance Company » AS, anciennement « Balcia Insurance » SE,

    contre

    « Baltijas Apdrošināšanas Nams » AS,

    LA COUR (sixième chambre),

    composée de M. A. Arabadjiev (rapporteur), président de la deuxième chambre, faisant fonction de président de la sixième chambre, MM. C. G. Fernlund et S. Rodin, juges,

    avocat général : M. Y. Bot,

    greffier : M. A. Calot Escobar,

    vu la procédure écrite,

    considérant les observations présentées :

    pour « BTA Baltic Insurance Company » AS, par Mme E. Matveja et M. W. Stockmeyer,

    pour « Baltijas Apdrošināšanas Nams » AS, par M. A. Pečerica,

    pour le gouvernement letton, par Mmes I. Kucina et V. Soņeca, en qualité d’agents,

    pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. P. Garofoli, avvocato dello Stato,

    pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna, en qualité d’agent,

    pour la Commission européenne, par MM. K.‑P. Wojcik et A. Sauka, en qualité d’agents,

    vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

    rend le présent

    Arrêt

    1

    La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 72/166/CEE du Conseil, du 24 avril 1972, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à l’assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation de véhicules automoteurs, et au contrôle de l’obligation d’assurer cette responsabilité (JO 1972, L 103, p. 1, ci-après la « première directive »).

    2

    Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant « BTA Baltic Insurance Company » AS, anciennement « Balcia Insurance » SE (ci-après « BTA »), à « Baltijas Apdrošināšanas Nams » AS (ci‑après « BAN ») au sujet du remboursement d’une indemnité d’assurance versée par BTA à l’un de ses clients.

    Le cadre juridique

    Le droit de l’Union

    3

    La directive 2009/103/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 septembre 2009, concernant l’assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation de véhicules automoteurs et le contrôle de l’obligation d’assurer cette responsabilité (JO 2009, L 263, p. 11), a abrogé notamment la première directive et la deuxième directive 84/5/CEE du Conseil, du 30 décembre 1983, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à l’assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation des véhicules automoteurs (JO 1984, L 8, p. 17, ci-après la « deuxième directive »). Néanmoins, compte tenu de la date des faits afférents à l’affaire au principal, cette dernière demeure régie par les directives abrogées.

    4

    L’article 1er de la première directive disposait :

    « Au sens de la présente directive, il faut entendre par :

    [...]

    2.

    personne lésée : toute personne ayant droit à réparation du dommage causé par des véhicules ;

    [...] »

    5

    Aux termes de l’article 3, paragraphe 1, de cette directive :

    « Chaque État membre prend toutes les mesures utiles, sous réserve de l’application de l’article 4, pour que la responsabilité civile relative à la circulation des véhicules ayant leur stationnement habituel sur son territoire soit couverte par une assurance. Les dommages couverts ainsi que les modalités de cette assurance sont déterminés dans le cadre de ces mesures. »

    6

    L’article 2, paragraphe 1, de la deuxième directive prévoyait :

    « Chaque État membre prend les mesures utiles pour que toute disposition légale ou clause contractuelle qui est contenue dans une police d’assurance délivrée conformément à l’article 3 paragraphe 1 de la [première directive], qui exclut de l’assurance l’utilisation ou la conduite de véhicules par :

    des personnes n’y étant ni expressément ni implicitement autorisées,

    ou

    des personnes non titulaires d'un permis leur permettant de conduire le véhicule concerné,

    ou

    des personnes qui ne se sont pas conformées aux obligations légales d’ordre technique concernant l’état et la sécurité du véhicule concerné,

    soit, pour l’application de l’article 3 paragraphe 1 de la [première directive], réputée sans effet en ce qui concerne le recours des tiers victimes d’un sinistre.

    [...] »

    7

    L’article 3 de cette directive énonçait :

    « Les membres de la famille du preneur, du conducteur ou de toute autre personne dont la responsabilité civile est engagée dans un sinistre et couverte par l’assurance visée à l’article 1er paragraphe 1, ne peuvent être exclus en raison de ce lien de parenté du bénéfice de l’assurance pour leurs dommages corporels. »

    Le droit letton

    8

    L’article 1er du Sauszemes transportlīdzekļu īpašnieku civiltiesiskās atbildības obligātās apdrošināšanas likums (loi relative à l’assurance obligatoire de la responsabilité civile des propriétaires des véhicules terrestres transposant la première directive et la deuxième directive, ci‑après la « loi relative à l’assurance obligatoire ») dispose :

    « Au sens de la présente loi, on entend par :

    [...]

    2.

    risque assuré : un accident de la circulation donnant lieu au paiement de l’indemnité d’assurance.

    [...] »

    9

    L’article 3 de cette loi énonce :

    « 1.   L’assurance obligatoire a pour objet la responsabilité civile du propriétaire ou détenteur du véhicule (ci-après la “responsabilité civile du propriétaire”) du fait du dommage causé à un tiers lors d’un accident de la circulation.

    2.   Tout propriétaire de véhicule assure la responsabilité civile du propriétaire pour tout véhicule mis en circulation en concluant un contrat d’assurance approprié. [...] »

    10

    L’article 18 de ladite loi prévoit :

    « En cas de survenance d’un risque assuré, l’assureur de la responsabilité civile du propriétaire du véhicule à l’origine du dommage [...] répare, dans la limite de la responsabilité de l’assureur, le préjudice [...] qui a été causé à un tiers lors d’un accident de la circulation. »

    11

    Aux termes de l’article 25, paragraphe 1, de cette même loi :

    « Le dommage causé aux biens d’un tiers lors d’un accident de la circulation est le dommage résultant :

    1)

    des dégâts causés à un véhicule ou de sa perte totale ;

    [...] »

    12

    L’article 31, paragraphe 10, de la loi relative à l’assurance obligatoire dispose :

    « Si une autre compagnie d’assurances a réparé le dommage en vertu d’un contrat d’assurance facultative, l’assureur qui a assuré la responsabilité civile du propriétaire du véhicule à l’origine du dommage causé lors d’un accident de la circulation [...] rembourse le montant du dédommagement calculé et payé selon les modalités prévues par la présente loi. »

    13

    L’article 1er du Ceļu satiksmes likums (loi relative à la sécurité routière) est libellé comme suit :

    « La loi emploie les termes suivantes :

    [...]

    5)

    circulation : rapports naissant du déplacement sur la route avec ou sans véhicule

    [...]

    7)

    accident de la circulation : évènement malheureux survenu dans le cadre de la circulation impliquant au moins un véhicule et entraînant le décès d’une personne, lui causant un dommage corporel ou bien portant atteinte aux biens d’une personne physique ou morale ou à l’environnement, ainsi que la survenance d’un évènement malheureux dans un autre lieu où la conduite d’un véhicule est possible et qui implique un véhicule. »

    14

    L’article 44 de cette loi énonce :

    « 1.   Les dommages résultant d’une violation de la présente loi ou d’autres actes réglementaires relatifs à la sécurité routière doivent être réparés.

    2.   Le propriétaire ou le possesseur d’un véhicule répond du dommage causé par l’exploitation de ce véhicule s’il ne prouve pas que le dommage est dû à un cas de force majeure, à l’intention ou à une négligence grave de la victime elle-même ainsi qu’à une autre cause qui, conformément à la loi, exonère de la responsabilité du dommage.

    [...] »

    Le litige au principal et les questions préjudicielles

    15

    Le 24 octobre 2008, le passager d’un véhicule garé sur un parking de supermarché (ci-après le « premier véhicule ») a, en ouvrant la portière arrière droite de celui-ci, endommagé l’aile arrière gauche du véhicule voisin (ci-après le « second véhicule »).

    16

    Le propriétaire du second véhicule et le conducteur du premier véhicule ont complété sur les lieux de l’accident un constat amiable d’accident dans lequel le conducteur du premier véhicule a reconnu ses torts et a indiqué que c’est le passager du premier véhicule qui a heurté, avec la portière de celui-ci, le second véhicule.

    17

    BTA avait conclu un contrat d’assurance facultative avec le propriétaire du second véhicule. La responsabilité civile résultant de la circulation du premier véhicule était assurée auprès de BAN.

    18

    BTA a versé à son client, propriétaire du second véhicule, en vertu du contrat d’assurance qu’elle avait conclu avec lui, la somme de 47,42 lats letton (LVL) (environ 67,47 euros) correspondant aux frais de réparation des dommages causés à ce véhicule, après déduction de la franchise. Cette société a, par la suite, invité BAN à lui rembourser les frais ainsi exposés.

    19

    BAN a refusé de rembourser ces frais au motif qu’un accident survenu entre deux véhicules immobilisés ne peut pas être considéré comme un « risque assuré », au sens de la loi relative à l’assurance obligatoire.

    20

    BTA a alors assigné BAN en justice, aux fins du remboursement de l’indemnité qu’elle avait versée au propriétaire du second véhicule. Les juridictions de première instance et d’appel ont accueilli son recours.

    21

    Sur pourvoi formé par BAN, l’Augstākā tiesa (Cour suprême, Lettonie) a, par arrêt du 28 mars 2014, annulé l’arrêt rendu en appel pour défaut de motivation.

    22

    Statuant sur renvoi, la Rīgas apgabaltiesas Civillietu tiesas kolēģija (cour régionale de Riga, collège des affaires civiles, Lettonie) a, par arrêt du 20 mai 2014, rejeté le recours de BTA au motif qu’il n’y a d’accident de circulation que si au moins l’un des véhicules impliqués est en mouvement et que, par conséquent, le risque assuré auprès de BAN ne s’est pas réalisé en l’espèce. Cette juridiction a considéré, en outre, qu’est civilement responsable des dommages causés au second véhicule non pas le conducteur du premier véhicule, mais le passager de celui-ci.

    23

    BTA s’est pourvue en cassation contre cet arrêt devant l’Augstākā tiesa (Cour suprême). À l’appui de son pourvoi, elle fait valoir, notamment, que l’interprétation de la notion de « risque assuré » retenue par la Rīgas apgabaltiesas Civillietu tiesas kolēģija (cour régionale de Riga, collège des affaires civiles) est contraire à l’objectif de protection des victimes d’accidents causés par les véhicules automoteurs, poursuivi par la réglementation de l’Union en matière d’assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation de ceux-ci, que l’utilisation d’un tel véhicule peut relever de la notion de « circulation des véhicules » même si celui-ci est à l’arrêt et que, le propriétaire d’un véhicule répondant des dommages causés aux tiers par les passagers de celui-ci dans le cadre de son utilisation, ces dommages sont couverts par l’assurance de la responsabilité civile afférente à ce véhicule.

    24

    La juridiction de renvoi se demande si l’action d’ouvrir la portière d’un véhicule stationné constitue une « utilisation d’un véhicule qui est conforme à la fonction habituelle de ce véhicule », au sens de l’arrêt du 4 septembre 2014, Vnuk (C‑162/13, EU:C:2014:2146), et si elle relève, en conséquence, de la notion de « circulation des véhicules », au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la première directive.

    25

    La juridiction de renvoi fait observer, à cet égard, que la définition large que la Cour aurait donnée à cette notion dans ledit arrêt milite en faveur d’une réponse affirmative à cette question. En effet, selon cette juridiction, l’embarquement et le débarquement des passagers d’un véhicule sont la manifestation de l’utilisation de celui-ci, et il ne saurait être exploité complètement si les passagers restent à bord.

    26

    En cas de réponse affirmative à ladite question, la juridiction de renvoi se demande si la notion de « circulation des véhicules » qui figure à l’article 3, paragraphe 1, de la première directive englobe également les cas où un passager utilise le véhicule.

    27

    À cet égard, la juridiction de renvoi relève que, aux termes de l’article 1er, point 2, de la première directive, la notion de « personne lésée », au sens de cette directive, vise toute personne ayant droit à la réparation du dommage causé par des véhicules. Elle ajoute que l’article 3, paragraphe 1, de ladite directive évoque la « circulation » des véhicules et non pas la seule responsabilité des conducteurs.

    28

    Par ailleurs, ladite juridiction fait observer que la Cour a précisé, dans l’arrêt du 4 septembre 2014, Vnuk (C‑162/13, EU:C:2014:2146), que relève de la notion de « circulation des véhicules » qui figure à cette disposition toute utilisation d’un véhicule qui est conforme à la fonction habituelle de ce véhicule. Or, l’action d’ouvrir les portières d’un véhicule pour en débarquer ou y embarquer constituerait une telle utilisation.

    29

    Dans ces conditions, l’Augstākā tiesa (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

    « 1)

    L’article 3, paragraphe 1, de la [première directive] doit-il être interprété en ce sens que la notion de “circulation des véhicules” englobe une situation telle que celle en cause au principal, à savoir l’ouverture des portières d’un véhicule en stationnement ?

    2)

    Si la première question appelle une réponse affirmative, l’article 3, paragraphe 1, de la [première directive] doit-il être interprété en ce sens que la notion de “circulation des véhicules” englobe une situation telle que celle en cause au principal, à savoir [celle dans laquelle] le dommage au bien d’un tiers résulte de l’utilisation du véhicule par un passager ? »

    Sur les questions préjudicielles

    30

    Par ses questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi cherche à savoir, en substance, si l’article 3, paragraphe 1, de la première directive doit être interprété en ce sens que relève de la notion de « circulation des véhicules », visée à cette disposition, une situation dans laquelle le passager d’un véhicule stationné sur un parking, en ouvrant la portière de ce véhicule, a heurté et a endommagé le véhicule qui était stationné à côté de celui-ci.

    31

    À cet égard, il convient de rappeler que la notion de « circulation des véhicules », prévue à l’article 3, paragraphe 1, de la première directive, ne saurait être laissée à l’appréciation de chaque État membre, mais constitue une notion autonome du droit de l’Union, devant être interprétée, conformément à la jurisprudence constante de la Cour, au regard, notamment, du contexte de cette disposition et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie (arrêts du 4 septembre 2014, Vnuk, C‑162/13, EU:C:2014:2146, points 41 et 42, ainsi que du 28 novembre 2017, Rodrigues de Andrade, C‑514/16, EU:C:2017:908, point 31).

    32

    Or, la réglementation de l’Union en matière d’assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation des véhicules tend, d’une part, à assurer la libre circulation tant des véhicules stationnant habituellement sur le territoire de l’Union européenne que des personnes qui sont à leur bord et, d’autre part, à garantir que les victimes des accidents causés par ces véhicules bénéficieront d’un traitement comparable, quel que soit l’endroit du territoire de l’Union où l’accident s’est produit (voir, en ce sens, arrêts du 23 octobre 2012, Marques Almeida, C‑300/10, EU:C:2012:656, point 26 ; du 4 septembre 2014, Vnuk, C‑162/13, EU:C:2014:2146, point 50, et du 28 novembre 2017, Rodrigues de Andrade, C‑514/16, EU:C:2017:908, point 32).

    33

    Il ressort, en outre, de l’évolution de cette réglementation que l’objectif de protection des victimes d’accidents causés par ces véhicules a constamment été poursuivi et renforcé par le législateur de l’Union (arrêts du 4 septembre 2014, Vnuk, C‑162/13, EU:C:2014:2146, points 52 à 55, ainsi que du 28 novembre 2017, Rodrigues de Andrade, C‑514/16, EU:C:2017:908, point 33).

    34

    Au regard de ces considérations, la Cour a jugé que l’article 3, paragraphe 1, de la première directive doit être interprété en ce sens que la notion de « circulation des véhicules » qui y figure n’est pas limitée aux situations de circulation routière, à savoir à la circulation sur la voie publique, et que relève de cette notion toute utilisation d’un véhicule qui est conforme à la fonction habituelle de ce dernier (arrêts du 4 septembre 2014, Vnuk, C‑162/13, EU:C:2014:2146, point 59, et du 28 novembre 2017, Rodrigues de Andrade, C‑514/16, EU:C:2017:908, point 34).

    35

    À cet égard, la Cour a précisé que, dans la mesure où les véhicules automoteurs visés à l’article 1er, point 1, de la première directive, indépendamment de leurs caractéristiques, ont vocation à servir habituellement de moyens de transport, relève de ladite notion toute utilisation d’un véhicule en tant que moyen de transport (arrêt du 28 novembre 2017, Rodrigues de Andrade, C‑514/16, EU:C:2017:908, points 37 et 38).

    36

    En l’occurrence, il y a lieu de considérer que l’action d’ouvrir la portière d’un véhicule constitue une utilisation de celui-ci qui est conforme à sa fonction de moyen de transport, dans la mesure où elle permet notamment l’embarquement et le débarquement des personnes ou le chargement et le déchargement des biens qui sont à transporter ou qui viennent d’être transportés au moyen de ce véhicule.

    37

    Cette conclusion n’est pas affectée par la circonstance que les véhicules en cause au principal étaient, au moment de l’accident, à l’arrêt et qu’ils se trouvaient sur un parking.

    38

    En effet, il convient de rappeler, d’une part, que le fait que le véhicule impliqué dans l’accident était à l’arrêt au moment de la survenance de celui-ci n’exclut pas, à lui seul, que l’utilisation de ce véhicule à ce moment puisse relever de sa fonction de moyen de transport et, en conséquence, de la notion de « circulation des véhicules », au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la première directive (arrêt du 28 novembre 2017, Rodrigues de Andrade, C‑514/16, EU:C:2017:908, point 39). Or, l’ouverture des portières n’est généralement effectuée que lorsque les véhicules sont à l’arrêt.

    39

    Par ailleurs, la Cour a également précisé que le point de savoir si le moteur du véhicule concerné était, ou non, en marche au moment de la survenance de l’accident n’est pas davantage déterminant (arrêt du 28 novembre 2017, Rodrigues de Andrade, C‑514/16, EU:C:2017:908, point 39).

    40

    En ce qui concerne, d’autre part, la circonstance que les véhicules en cause au principal se trouvaient sur un parking, il convient de rappeler que la portée de la notion de « circulation des véhicules », au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la première directive, ne dépend pas des caractéristiques du terrain sur lequel ce véhicule est utilisé (voir, en ce sens, arrêts du 28 novembre 2017, Rodrigues de Andrade, C‑514/16, EU:C:2017:908, point 35, et du du 20 décembre 2017, Núñez Torreiro, C‑334/16, EU:C:2017:1007, point 30).

    41

    S’agissant de la circonstance que l’accident en cause au principal résulte d’une action non pas du conducteur du premier véhicule, mais d’un passager de celui-ci, il convient de relever, tout d’abord, que l’article 3, paragraphe 1, de la première directive énonce de manière générale que c’est « la responsabilité civile relative à la circulation des véhicules ayant leur stationnement habituel sur son territoire [de chaque État membre] » qui doit être couverte par une assurance.

    42

    Ainsi, contrairement à la position exposée par le gouvernement polonais en relation avec la réponse à apporter à la seconde question, ni cette disposition ni les autres dispositions des directives relatives à l’assurance obligatoire ne limitent la couverture de l’assurance obligatoire à la responsabilité civile d’une catégorie de personnes déterminée, telle que le conducteur du véhicule.

    43

    En revanche, l’article 2, paragraphe 1, de la deuxième directive, qui évoque « l’utilisation ou la conduite de véhicules », et l’article 3 de cette directive, qui se réfère au « conducteur ou [à] toute autre personne dont la responsabilité civile est engagée dans un sinistre et couverte par l’assurance [obligatoire] », donnent à penser que cette assurance porte sur la responsabilité civile résultant non seulement de la conduite des véhicules, mais également d’autres utilisations de ceux-ci et d’utilisations qui en sont faites par des personnes autres que le conducteur.

    44

    Ensuite, il ressort de la jurisprudence citée aux points 34 et 35 du présent arrêt que relève de la notion de « circulation des véhicules », au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la première directive, « toute » utilisation d’un véhicule qui est conforme à la fonction habituelle de ce dernier, à savoir à la fonction de moyen de transport.

    45

    À cet égard, il importe de souligner que cette utilisation des véhicules ne se limite pas à la conduite de ces derniers, mais inclut des actions qui, telles que celle mentionnée au point 36 du présent arrêt, sont également habituellement effectuées par les passagers.

    46

    Enfin, il convient de rappeler que la réglementation de l’Union en matière d’assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation des véhicules s’oppose à ce que l’obligation pour l’assureur de dédommager une victime d’un accident de la circulation impliquant un véhicule assuré soit exclue lorsque cet accident a été causé par une personne qui n’est pas la personne visée par la police d’assurance (voir, en ce sens, arrêt du 1er décembre 2011, Churchill Insurance Company Limited et Evans, C‑442/10, EU:C:2011:799, points 33 à 44 ainsi que jurisprudence citée).

    47

    Il résulte des considérations qui précèdent que la circonstance que l’accident en cause au principal résulte d’une action non pas du conducteur du premier véhicule, mais d’un passager de celui-ci n’exclut pas, à elle seule, que l’utilisation de ce véhicule à ce moment puisse relever de sa fonction de moyen de transport et, en conséquence, de la notion de « circulation des véhicules », au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la première directive.

    48

    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre aux questions posées que l’article 3, paragraphe 1, de la première directive doit être interprété en ce sens que relève de la notion de « circulation des véhicules », visée à cette disposition, une situation dans laquelle le passager d’un véhicule stationné sur un parking, en ouvrant la portière de ce véhicule, a heurté et a endommagé le véhicule qui était stationné à côté de celui-ci.

    Sur les dépens

    49

    La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

     

    Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) dit pour droit :

     

    L’article 3, paragraphe 1, de la directive 72/166/CEE du Conseil, du 24 avril 1972, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à l’assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation des véhicules automoteurs, et au contrôle de l’obligation d’assurer cette responsabilité, doit être interprété en ce sens que relève de la notion de« circulation des véhicules », visée à cette disposition, une situation dans laquelle le passager d’un véhicule stationné sur un parking, en ouvrant la portière de ce véhicule, a heurté et a endommagé le véhicule qui était stationné à côté de celui-ci.

     

    Signatures


    ( *1 ) Langue de procédure : le letton.

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