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Document 62017CJ0041

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 19 septembre 2018.
Isabel González Castro contre Mutua Umivale e.a.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Tribunal Superior de Justicia de Galicia.
Renvoi préjudiciel – Directive 92/85/CEE – Articles 4, 5 et 7 – Protection de la sécurité et de la santé des travailleurs – Travailleuse allaitante – Travail de nuit – Travail posté accompli partiellement en horaires de nuit – Évaluation des risques présentés par le poste de travail – Mesures de prévention – Contestation par la travailleuse concernée – Directive 2006/54/CE – Article 19 – Égalité de traitement – Discrimination fondée sur le sexe – Charge de la preuve.
Affaire C-41/17.

Identifiant ECLI: ECLI:EU:C:2018:736

ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

19 septembre 2018 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Directive 92/85/CEE – Articles 4, 5 et 7 – Protection de la sécurité et de la santé des travailleurs – Travailleuse allaitante – Travail de nuit – Travail posté accompli partiellement en horaires de nuit – Évaluation des risques présentés par le poste de travail – Mesures de prévention – Contestation par la travailleuse concernée – Directive 2006/54/CE – Article 19 – Égalité de traitement – Discrimination fondée sur le sexe – Charge de la preuve »

Dans l’affaire C‑41/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunal Superior de Justicia de Galicia (Cour supérieure de justice de Galice, Espagne), par décision du 30 décembre 2016, parvenue à la Cour le 25 janvier 2017, dans la procédure

Isabel González Castro

contre

Mutua Umivale,

Prosegur España SL,

Instituto Nacional de la Seguridad Social (INSS),

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. J. L. da Cruz Vilaça, président de chambre, MM. E. Levits, A. Borg Barthet, Mme M. Berger et M. F. Biltgen (rapporteur), juges,

avocat général : Mme E. Sharpston,

greffier : Mme L. Carrasco Marco, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 22 février 2018,

considérant les observations présentées :

pour l’Instituto Nacional de la Seguridad Social (INSS), par Mmes P. García Perea et M. A. Lozano Mostazo, en qualité d’agents,

pour le gouvernement espagnol, par M. S. Jiménez García, en qualité d’agent,

pour le gouvernement allemand, par MM. T. Henze et D. Klebs, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mmes S. Pardo Quintillán et A. Szmytkowska, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 26 avril 2018,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 19, paragraphe 1, de la directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 juillet 2006, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail (refonte) (JO 2006, L 204, p. 23), ainsi que des articles 4, 5 et 7 de la directive 92/85/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail (JO 1992, L 348, p. 1).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Mme Isabel González Castro à la Mutua Umivale (ci-après la « mutuelle Umivale »), à son employeur, Prosegur España SL (ci-après « Prosegur ») et à l’Instituto Nacional de la Seguridad Social (INSS) (Institut National de la Sécurité Sociale, Espagne) (ci-après l’« INSS »), au sujet du refus de ces derniers de suspendre son contrat de travail et de lui octroyer une prestation économique pour risque pendant l’allaitement.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 92/85

3

Les premier, huitième à onzième et quatorzième considérants de la directive 92/85 énoncent :

« considérant que l’article 118 A du traité [CEE] prévoit que le Conseil arrête, par voie de directive, les prescriptions minimales en vue de promouvoir l’amélioration, notamment du milieu de travail, pour protéger la sécurité et la santé des travailleurs ;

[...]

considérant que les travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes doivent être considérées à maints égards comme un groupe à risques spécifiques et que des mesures doivent être prises en ce qui concerne leur sécurité et leur santé ;

considérant que la protection de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes ne doit pas défavoriser les femmes sur le marché du travail et ne doit pas porter atteinte aux directives en matière d’égalité de traitement entre hommes et femmes ;

considérant que certaines activités peuvent présenter un risque spécifique d’exposition de la travailleuse enceinte, accouchée ou allaitante à des agents, procédés ou conditions de travail dangereux et que, dès lors, ces risques doivent être évalués et le résultat de cette évaluation communiqué aux travailleuses et/ou à leurs représentants ;

considérant que, par ailleurs, le cas où le résultat de cette évaluation relève un risque pour la sécurité ou la santé de la travailleuse, un dispositif visant la protection de la travailleuse doit être prévu ;

[...]

considérant que la vulnérabilité de la travailleuse enceinte, accouchée ou allaitante rend nécessaire un droit à congé de maternité d’au moins quatorze semaines continues, réparties avant et/ou après l’accouchement, et obligatoire un congé de maternité d’au moins deux semaines, réparties avant et/ou après l’accouchement ;

[...] »

4

L’article 1er, paragraphe 1, de la directive 92/85 prévoit :

« La présente directive, qui est la dixième directive particulière au sens de l’article 16, paragraphe 1, de la directive 89/391/CEE [du Conseil, du 12 juin 1989, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail (JO 1989, L 183, p. 1)], a pour objet la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail. »

5

L’article 2 de cette directive, intitulé « Définitions », dispose :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

c)

“travailleuse allaitante” : toute travailleuse allaitante au sens des législations et/ou pratiques nationales, qui informe l’employeur de son état, conformément à ces législations et/ou pratiques. »

6

L’article 3 de ladite directive prévoit :

« 1.   La Commission, en concertation avec les États membres et assistée du comité consultatif pour la sécurité, l’hygiène et la protection de la santé sur le lieu de travail, établit les lignes directrices concernant l’évaluation des agents chimiques, physiques et biologiques ainsi que des procédés industriels considérés comme comportant un risque pour la sécurité ou la santé des travailleuses au sens de l’article 2.

Les lignes directrices visées au premier alinéa portent également sur les mouvements et les postures, la fatigue mentale et physique et les autres charges physiques et mentales liées à l’activité des travailleuses au sens de l’article 2.

2.   Les lignes directrices visées au paragraphe 1 ont pour objet de servir de guide pour l’évaluation visée à l’article 4, paragraphe 1.

À cet effet, les États membres portent ces lignes directrices à la connaissance des employeurs et des travailleuses et/ou de leurs représentants dans l’État membre respectif. »

7

Les lignes directrices mentionnées à l’article 3 de la directive 92/85, dans leur version pertinente pour la présente affaire, figurent dans la communication de la Commission, du 20 novembre 2000, sur les lignes directrices concernant l’évaluation des agents chimiques, physiques et biologiques ainsi que des procédés industriels considérés comme comportant un risque pour la sécurité ou la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes [COM(2000) 466 final/2, ci-après les « lignes directrices »].

8

En ce qui concerne l’évaluation des risques et l’information des travailleurs sur cette évaluation, l’article 4 de la directive 92/85 dispose :

« 1.   Pour toute activité susceptible de présenter un risque spécifique d’exposition aux agents, procédés ou conditions de travail, dont une liste non exhaustive figure à l’annexe I, la nature, le degré et la durée de l’exposition, dans l’entreprise et/ou l’établissement concernés, des travailleuses au sens de l’article 2 devront être évalués par l’employeur, directement ou par l’intermédiaire des services de protection et de prévention visés à l’article 7 de la [directive 89/391], afin de pouvoir :

apprécier tout risque pour la sécurité ou la santé ainsi que toute répercussion sur la grossesse ou l’allaitement des travailleuses au sens de l’article 2,

déterminer les mesures à prendre.

2.   Sans préjudice de l’article 10 de la [directive 89/391], dans l’entreprise et/ou l’établissement concernés, les travailleuses au sens de l’article 2 et les travailleuses susceptibles de se trouver dans l’une des situations visées à l’article 2 et/ou leurs représentants sont informés des résultats de l’évaluation visée au paragraphe 1 et de toutes les mesures en ce qui concerne la sécurité et la santé au travail. »

9

Pour ce qui est des conséquences de l’évaluation des risques, l’article 5, paragraphes 1 à 3, de cette directive prévoit :

« 1.   Sans préjudice de l’article 6 de la [directive 89/391], si les résultats de l’évaluation visée à l’article 4, paragraphe 1, révèlent un risque pour la sécurité ou la santé ainsi qu’une répercussion sur la grossesse ou l’allaitement d’une travailleuse au sens de l’article 2, l’employeur prend les mesures nécessaires pour que, par un aménagement provisoire des conditions de travail et/ou du temps de travail de la travailleuse concernée, l’exposition de cette travailleuse à ce risque soit évitée.

2.   Si l’aménagement des conditions de travail et/ou du temps de travail n’est pas techniquement et/ou objectivement possible ou ne peut être raisonnablement exigé pour des motifs dûment justifiés, l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer à la travailleuse concernée un changement de poste.

3.   Si le changement de poste n’est pas techniquement et/ou objectivement possible ou ne peut être raisonnablement exigé pour des motifs dûment justifiés, la travailleuse concernée est, conformément aux législations et/ou pratiques nationales, dispensée de travail pendant toute la période nécessaire pour la protection de sa sécurité ou de sa santé. »

10

L’article 7 de la directive 92/85, intitulé « Travail de nuit », dispose :

« 1.   Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les travailleuses au sens de l’article 2 ne soient pas tenues d’accomplir un travail de nuit pendant leur grossesse et au cours d’une période consécutive à l’accouchement, qui sera déterminée par l’autorité nationale compétente pour la sécurité et la santé, sous réserve de la présentation, selon les modalités déterminées par les États membres, d’un certificat médical qui en atteste la nécessité du point de vue de la sécurité ou de la santé de la travailleuse concernée.

2.   Les mesures visées au paragraphe 1 doivent comporter la possibilité, conformément aux législations et/ou pratiques nationales :

a)

d’un transfert à un travail de jour

ou

b)

d’une dispense de travail ou d’une prolongation du congé de maternité, lorsqu’un tel transfert n’est pas techniquement et/ou objectivement possible ou ne peut être raisonnablement exigé pour des motifs dûment justifiés. »

La directive 2006/54

11

L’article 1er de la directive 2006/54, intitulé « Objet », prévoit :

« La présente directive vise à garantir la mise en œuvre du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail.

À cette fin, elle contient des dispositions destinées à mettre en œuvre le principe de l’égalité de traitement en ce qui concerne :

a)

l’accès à l’emploi, y compris la promotion, et à la formation professionnelle ;

b)

les conditions de travail, y compris les rémunérations ;

c)

les régimes professionnels de sécurité sociale.

Elle comprend également des dispositions visant à faire en sorte que la mise en œuvre de ce principe soit rendue plus effective par l’établissement de procédure appropriées. »

12

L’article 2 de cette directive, intitulé « Définitions », dispose :

« 1.   Aux fins de la présente directive, on entend par :

a)

“discrimination directe” : la situation dans laquelle une personne est traitée de manière moins favorable en raison de son sexe qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne le serait dans une situation comparable ;

b)

“discrimination indirecte” : la situation dans laquelle une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre désavantagerait particulièrement des personnes d’un sexe par rapport à des personnes de l’autre sexe, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour parvenir à ce but soient appropriés et nécessaires ;

[...]

2.   Aux fins de la présente directive, la discrimination inclut :

[...]

c)

tout traitement moins favorable d’une femme lié à la grossesse ou au congé de maternité au sens de la directive [92/85]. »

13

L’article 14, paragraphe 1, de ladite directive étend l’interdiction des discriminations, entre autres, aux conditions de travail et prévoit ce qui suit :

« Toute discrimination directe ou indirecte fondée sur le sexe est proscrite dans les secteurs public ou privé, y compris dans les organismes publics, en ce qui concerne :

[...]

c)

les conditions d’emploi et de travail, y compris les conditions de licenciement ainsi que la rémunération, comme le prévoit l’article 141 du traité [CE] ;

[...] »

14

En ce qui concerne la charge de la preuve et l’accès à la justice en cas de discrimination directe ou indirecte, l’article 19, paragraphes 1 et 4, de la même directive dispose :

« 1.   Les États membres, conformément à leur système judiciaire, prennent les mesures nécessaires afin que, dès lors qu’une personne s’estime lésée par le non-respect à son égard du principe de l’égalité de traitement et établit, devant une juridiction ou une autre instance compétente, des faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, il incombe à la partie défenderesse de prouver qu’il n’y a pas eu violation du principe de l’égalité de traitement.

[...]

4.   Les paragraphes 1, 2 et 3 s’appliquent également :

a)

aux situations couvertes par l’article 141 du traité [CE] et, dans la mesure où il y a discrimination fondée sur le sexe, par la directive [92/85] et la directive 96/34/CE [du Conseil, du 3 juin 1996, concernant l’accord-cadre sur le congé parental conclu par l’UNICE, le CEEP et la CES (JO 1996, L 145, p. 4)] ;

[...] »

La directive 2003/88/CE

15

Le considérant 14 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil, du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail (JO 2003, L 299, p. 9), énonce :

« Les normes spécifiques prévues par d’autres instruments communautaires en ce qui concerne, par exemple, les périodes de repos, le temps de travail, le congé annuel et le travail de nuit de certaines catégories de travailleurs doivent prévaloir sur les dispositions de la présente directive. »

16

Aux termes de l’article 1er de cette directive, intitulé « Objet et champ d’application » :

« 1.   La présente directive fixe des prescriptions minimales de sécurité et de santé en matière d’aménagement du temps de travail.

2.   La présente directive s’applique :

[...]

b)

à certains aspects du travail de nuit, du travail posté et du rythme de travail.

[...] »

17

L’article 2 de ladite directive, intitulé « Définitions », dispose, à ses points 3 et 4 :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

3.   “période nocturne” : toute période d’au moins sept heures, telles que définies par la législation nationale, comprenant en tout cas l’intervalle entre 24 heures et 5 heures ;

4.   “travailleur de nuit” :

a)

d’une part, tout travailleur qui accomplit durant la période nocturne au moins trois heures de son temps de travail journalier accomplies normalement ;

b)

d’autre part, tout travailleur qui est susceptible d’accomplir, durant la période nocturne, une certaine partie de son temps de travail annuel, définie selon le choix de l’État membre concerné :

i)

par la législation nationale, après consultation des partenaires sociaux, ou

ii)

par des conventions collectives ou accords conclus entre partenaires sociaux au niveau national ou régional ;

[...] »

Le droit espagnol

18

La prestation sociale liée aux risques pendant l’allaitement a été intégrée dans l’ordre juridique espagnol par la Ley Orgánica 3/2007 para la igualdad efectiva de mujeres y hombres (loi organique 3/2007 pour l’égalité effective entre hommes et femmes), du 22 mars 2007 (BOE no 71, du 23 mars 2007, p. 12611, ci-après la « loi 3/2007 »).

19

L’objectif de la loi 3/2007 est de favoriser l’intégration des femmes dans le monde du travail, en leur permettant de concilier leur vie professionnelle avec leur vie privée et leur vie de famille.

20

La douzième disposition additionnelle de cette loi a entraîné la modification de l’article 26 de la Ley 31/1995 de Prevención de Riesgos Laborales (loi 31/1995 relative à la prévention des risques professionnels), du 8 novembre 1995 (BOE no 269, du 10 novembre 1995, p. 32590, ci-après la « loi 31/1995 »), en ce sens qu’a ainsi été instituée la protection de la travailleuse et du nouveau-né dans les situations de risque rencontrées pendant l’allaitement naturel lorsque les conditions d’un poste de travail sont susceptibles d’avoir des répercussions négatives sur la santé de la travailleuse ou de l’enfant.

21

L’article 26 de la loi 31/1995, qui transpose notamment les articles 4 et 7 de la directive 92/85 en droit interne, est rédigé comme suit :

« 1.   L’évaluation des risques [pour la sécurité ou la santé des travailleurs] visés à l’article 16 de la présente loi comprend la détermination de la nature, du degré et de la durée d’exposition des travailleuses enceintes ou ayant récemment accouché à des agents, à des méthodes ou à des conditions de travail susceptibles d’influencer négativement la santé des travailleuses ou du fœtus, dans toute activité généralement quelconque susceptible de présenter un risque spécifique. Si les résultats de l’évaluation révèlent un risque pour la sécurité ou la santé ou une répercussion potentielle sur la grossesse ou l’allaitement des travailleuses susmentionnées, l’employeur adopte les mesures nécessaires afin d’éviter l’exposition à ce risque, par un aménagement des conditions de travail ou du temps de travail de la travailleuse affectée.

Ces mesures incluent si nécessaire la non-réalisation d’un travail nocturne ou d’un travail par équipes.

2.   Lorsque les services médicaux de [l’INSS] ou des mutuelles, selon le type d’entité auprès de laquelle l’employeur a organisé la couverture des risques professionnels, certifient, avec le rapport du médecin du Servicio National de Salud [(Service national public de santé, Espagne)] qui assiste la travailleuse, que l’aménagement des conditions de travail ou du temps de travail n’est pas possible ou que, malgré un tel aménagement, les conditions d’un poste de travail sont susceptibles d’influencer négativement la santé de la travailleuse enceinte ou du fœtus, celle-ci est affectée à un autre poste de travail ou à une autre fonction, compatible avec son état. À cet effet, l’employeur détermine, après consultation des représentants des travailleurs, une liste récapitulative des postes de travail exempts de risque.

Le changement de poste ou de fonction s’effectue en conformité avec les règles et les critères applicables dans les cas de mobilité fonctionnelle, et produit ses effets jusqu’au moment où l’état de santé de la travailleuse permet sa réaffectation à son poste antérieur.

[...]

3.   Si un tel changement de poste n’est pas techniquement ou objectivement possible, ou s’il ne peut être raisonnablement exigé pour des motifs dûment justifiés, le passage de la travailleuse à la situation de suspension du contrat de travail pour risque pendant la grossesse, visé à l’article 45, paragraphe 1, sous d), [du Real Decreto Legislativo 1/1995, por el que se aprueba el texto refundido de la Ley del Estatuto de los Trabajadores (décret royal législatif 1/1995, portant approbation du texte refondu de la loi portant statut des travailleurs), du 24 mars 1995 (BOE no 75, du 29 mars 1995, p. 9654)], peut être déclaré, durant la période nécessaire à la protection de sa sécurité et de sa santé, et aussi longtemps que persiste l’impossibilité de réintégrer son poste antérieur, ou d’intégrer un autre poste compatible avec son état.

4.   Les dispositions des paragraphes 1 et 2 du présent article sont également applicables pendant la période d’allaitement naturel si les conditions de travail sont susceptibles d’influencer négativement la santé de la travailleuse ou de l’enfant et que les services médicaux de [l’INSS] ou des mutuelles, selon le type d’entité auprès de laquelle l’employeur a organisé la couverture des risques professionnels, certifient, avec le rapport du médecin du Service national public de santé qui assiste la travailleuse ou son enfant, l’existence de cette situation. De même, le passage de la travailleuse à la situation de suspension du contrat de travail pour risque pendant l’allaitement naturel d’enfants âgés de moins de neuf mois, visée à l’article 45, paragraphe 1, sous d), du [décret royal législatif 1/1995] peut être déclaré si les conditions prévues au paragraphe 3 du présent article sont réunies.

[...] »

22

La dix-huitième disposition additionnelle de la loi 3/2007 a modifié la législation espagnole de telle manière que la période d’allaitement naturel soit expressément reconnue comme l’une des situations couvertes par la Ley General de la Seguridad Social – Real Decreto Legislativo 1/1994 por el que se aprueba el texto refundido de la Ley General de la Seguridad Social (décret royal législatif 1/994, portant approbation du texte refondu de la loi générale relative à la Sécurité sociale), du 20 juin 1994 (BOE no 154, du 29 juin 1994, p. 20658, ci–après la « loi générale relative à la Sécurité sociale »).

23

L’article 135 bis de la loi générale relative à la Sécurité sociale dispose :

« Situation protégée.

Aux fins de la prestation économique pour risque pendant l’allaitement naturel, est considérée comme une situation protégée la période de suspension du contrat de travail survenant dans le cas où, alors que la travailleuse doit changer de poste pour intégrer un poste compatible avec sa situation, un tel changement est, selon les termes de l’article 26, paragraphe 4, de la loi 31/1995, techniquement ou objectivement impossible, ou ne peut être raisonnablement exigé pour des motifs dûment justifiés. »

24

L’article 135 ter de la loi générale relative à la Sécurité sociale prévoit :

« Prestations en espèces.

La prestation économique pour risque pendant l’allaitement naturel est accordée à la travailleuse dans les termes et conditions prévus dans la présente loi pour la prestation économique pour risque pendant la grossesse, et s’éteint au moment où l’enfant atteint l’âge de neuf mois, à moins que la bénéficiaire n’ait anticipativement réincorporé son poste de travail antérieur ou un autre poste de travail compatible avec sa situation. »

25

En ce qui concerne le droit procédural, l’article 96, paragraphe 1, de la Ley 36/2011, reguladora de la jurisdicción social (loi 36/2011, régissant la juridiction sociale), du 10 octobre 2011 (BOE no 245, du 11 octobre 2011, p. 106584), prévoit :

« Charge de la preuve dans les cas de discrimination et d’accidents du travail

1.   Dans les procédures où il résulte des arguments de la partie requérante qu’il y existe des indices fondés de discrimination basée sur le sexe, l’orientation sexuelle, l’origine raciale ou ethnique, la religion ou les convictions, le handicap, l’âge ou de harcèlement, et dans tout autre cas de violation d’un droit fondamental ou de la liberté publique, il incombe à la partie défenderesse de fournir une justification objective et raisonnable, établie à suffisance de droit, des mesures adoptées et de leur proportionnalité. »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

26

Il ressort de la décision de renvoi que Mme González Castro travaille comme gardienne de sécurité pour Prosegur.

27

Le 8 novembre 2014, elle a accouché d’un garçon qui, par la suite, a bénéficié d’un allaitement maternel.

28

Depuis le mois de mars 2015, Mme González Castro exerce ses fonctions dans un centre commercial, selon un système de rotation variable avec des journées de travail de 8 heures.

29

Les missions de surveillance qu’elle assure sur le lieu de travail se font généralement avec un autre garde de sécurité, sauf pendant les tranches horaires suivantes, durant lesquelles elle les assure seule : du lundi au jeudi de minuit à huit heures du matin, le vendredi de deux à huit heures du matin, le samedi de trois à huit heures du matin, et le dimanche de une à huit heures du matin.

30

Mme González Castro a engagé, auprès de la mutuelle Umivale, une société mutuelle privée à but non lucratif couvrant les risques liés aux accidents du travail et aux maladies professionnelles, la procédure visant à l’obtention de la prestation économique pour risque pendant l’allaitement, prévue à l’article 26 de la loi 31/1995. À cette fin, elle a demandé à cette mutuelle, conformément à la législation nationale, de lui octroyer un certificat médical attestant l’existence d’un risque pour l’allaitement présenté par son poste de travail.

31

Sa demande ayant été refusée par la mutuelle Umivale, elle a introduit une réclamation qui a également été rejetée.

32

Mme González Castro a formé un recours contre ce refus devant le Juzgado de lo Social no 3 de Lugo (tribunal du travail no 3 de Lugo, Espagne).

33

Son recours ayant été rejeté, Mme González Castro a fait appel de cette décision devant la juridiction de renvoi, le Tribunal Superior de Justicia de Galicia (Cour supérieure de justice de Galice, Espagne).

34

En premier lieu, la juridiction de renvoi s’interroge sur l’interprétation de la notion de « travail de nuit », au sens de l’article 7 de la directive 92/85, lorsque, comme dans l’affaire dont elle est saisie, celui-ci se combine à un travail posté. Selon la juridiction de renvoi, les travailleuses allaitantes qui effectuent un travail posté dans le cadre duquel elles sont occupées uniquement sur certains postes en horaires de nuit doivent bénéficier de la même protection que celle accordée aux travailleuses allaitantes exerçant un travail de nuit non posté.

35

En second lieu, la juridiction de renvoi considère qu’il n’est pas exclu que l’évaluation des risques présentés par le poste de travail de Mme González Castro, prévue dans le cadre de la procédure visant à l’obtention d’une prestation économique pour risque pendant l’allaitement, conformément à l’article 26 de la loi 31/1995 transposant les articles 4 et 7 de la directive 92/85, n’ait pas été correctement réalisée et que son poste de travail présente, en réalité, un risque pour sa santé ou sa sécurité, notamment en raison du fait qu’elle exerce un travail de nuit et posté, qu’elle est occupée sur certains postes en solitaire, en faisant des rondes et en devant réagir aux urgences, telles que les délits, incendies ou autres évènements de cette nature, et que l’existence d’un endroit adapté à l’allaitement naturel ou, le cas échéant, à l’extraction du lait maternel, n’aurait pas été démontrée.

36

Dans ce contexte, la juridiction de renvoi cherche à savoir s’il y a lieu d’appliquer les règles de renversement de la charge de la preuve prévues à l’article 19, paragraphe 1, de la directive 2006/54 dans une situation telle que celle en cause dans l’affaire dont elle est saisie et, dans l’affirmative, elle se demande quelles sont les modalités d’application de cette disposition, notamment quant au point de savoir s’il incombe à la travailleuse concernée ou à la partie défenderesse, soit l’employeur ou l’organisme responsable du paiement de la prestation économique pour risque pendant l’allaitement, de démontrer que l’aménagement des conditions de travail ou le changement de poste de la travailleuse concernée ne sont pas techniquement ou objectivement possibles ou ne peuvent raisonnablement être exigés.

37

Dans ces conditions, le Tribunal Superior de Justicia de Galicia (Cour supérieure de justice de Galice) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

L’article 7 de la [directive 92/85] doit-il être interprété en ce sens que le travail de nuit que les travailleuses, au sens de l’article 2 de la même directive (et donc également les travailleuses allaitantes), ne doivent pas être tenues d’accomplir recouvre non seulement le travail entièrement accompli en horaires de nuit, mais également le travail posté lorsque, comme dans l’affaire qui nous occupe, certains de ces postes se déroulent en horaires de nuit ?

2)

Dans un litige relatif à l’existence d’une situation de risque pendant l’allaitement par une travailleuse, les règles spéciales sur la charge de la preuve prévues à l’article 19, paragraphe 1, de la [directive 2006/54] (notamment transposé en droit espagnol par l’article 96, paragraphe 1, de la loi 36/2011) sont-elles applicables, en ce qui concerne les conditions prévues à l’article 5 de la [directive 92/85] (transposé en droit espagnol par l’article 26 de la [loi 31/1995]), à la dispense de l’obligation de travailler pendant l’allaitement et, le cas échéant, à la reconnaissance de la prestation associée à une telle situation dans l’ordre juridique national conformément à l’article 11, paragraphe 1, de la [directive 92/85] ?

3)

Dans un litige relatif à l’existence d’une situation de risque pendant l’allaitement avec dispense de travail en vertu de l’article 5 de la [directive 92/85] (transposé en droit espagnol par l’article 26 de la [loi 31/1995]), peut-on interpréter l’article 19, paragraphe 1, de la [directive 2006/54] en ce sens que i) le fait que la travailleuse exerce un travail posté en tant que garde de sécurité, comprenant certains postes en horaires de nuit qu’elle accomplit d’ailleurs en solitaire, ii) ce travail consistant, par ailleurs, à faire des rondes et à réagir le cas échéant aux urgences (délits, incendies ou autres évènements), sans, en plus, que iii) l’existence, sur le lieu de travail, d’un endroit adapté à l’allaitement naturel ou, le cas échéant, à l’extraction du lait maternel, soit démontrée, constituent “des faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte” d’une travailleuse allaitante ?

4)

Lorsque, dans un litige relatif à l’existence d’une situation de risque pendant l’allaitement avec dispense de travail, les “faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte” au sens de l’article 19, paragraphe 1, de la [directive 2006/54] en combinaison avec l’article 5 de la [directive 92/85] (transposé en droit espagnol par l’article 26 de la [loi 31/1995]) sont démontrés, peut-on exiger de la travailleuse allaitante que, afin d’être dispensée de travailler conformément à la législation nationale qui transpose l’article 5, paragraphes 2 et 3, de la [directive 92/85], elle démontre que l’aménagement des conditions de travail ou du temps de travail n’est pas techniquement ou objectivement possible ou ne peut pas être raisonnablement exigé pour des motifs dûment justifiés et que, en outre, le changement de poste n’est pas techniquement ou objectivement possible ou ne peut être raisonnablement exigé ? La démonstration de ces éléments revient-elle au contraire aux parties défenderesses (entreprise employeuse et entité collaboratrice qui couvre la prestation couplée à la suspension du contrat de travail) ? »

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

38

Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 7 de la directive 92/85 doit être interprété en ce sens qu’il s’applique à une situation, telle que celle en cause au principal, dans laquelle la travailleuse concernée effectue un travail posté dans le cadre duquel elle accomplit uniquement une partie de ses fonctions en horaires de nuit.

39

En vue de répondre à cette question, il importe de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante de la Cour, pour l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union, il y a lieu de tenir compte non seulement des termes de celles-ci, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie (voir, notamment, arrêt du 17 avril 2018, Egenberger, C‑414/16, EU:C:2018:257, point 44 et jurisprudence citée).

40

Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, de la directive 92/85, les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes ne soient pas tenues d’accomplir un travail de nuit pendant leur grossesse et au cours d’une période consécutive à l’accouchement, qui sera déterminée par l’autorité nationale compétente pour la sécurité et la santé, sous réserve de la présentation, selon les modalités déterminées par les États membres, d’un certificat médical qui en atteste la nécessité du point de vue de la sécurité ou de la santé de la travailleuse concernée.

41

Le paragraphe 2 du même article précise que les mesures visées au paragraphe 1 doivent comporter la possibilité, conformément aux législations et/ou pratiques nationales, d’un transfert à un travail de jour ou d’une dispense de travail ou d’une prolongation du congé de maternité, lorsqu’un tel transfert n’est pas techniquement et/ou objectivement possible ou ne peut être raisonnablement exigé pour des motifs dûment justifiés.

42

Le libellé de cette disposition ne contient cependant aucune précision quant à la portée exacte de la notion de « travail de nuit ».

43

À cet égard, il ressort du 1er considérant de la directive 92/85 que celle-ci fait partie d’une série de directives, adoptées sur la base de l’article 118A du traité CEE, ayant pour finalité d’arrêter des prescriptions minimales, notamment en ce qui concerne l’amélioration du milieu de travail en vue de la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs.

44

Ainsi que Mme l’avocat général l’a relevé au point 44 de ses conclusions, tel est également le cas de la directive 2003/88, qui fixe des prescriptions minimales de sécurité et de santé en matière d’aménagement du temps de travail et s’applique, notamment, à certains aspects du travail de nuit, du travail posté et du rythme de travail.

45

Or, la directive 2003/88 définit, à son article 2, paragraphe 4, le travailleur de nuit comme « tout travailleur qui accomplit durant la période nocturne au moins trois heures de son temps de travail journalier accomplies normalement » et « tout travailleur qui est susceptible d’accomplir, durant la période nocturne, une certaine partie de son temps de travail annuel ». En outre, le paragraphe 3 du même article précise que la notion de « période nocturne » doit être comprise comme « toute période d’au moins sept heures, telle que définie par la législation nationale, comprenant en tout cas l’intervalle compris entre 24 heures et 5 heures ».

46

Il découle du libellé de ces dispositions, et notamment de l’emploi des expressions « toute période », « au moins trois heures de son temps de travail » et « une certaine partie de son temps de travail », qu’une travailleuse qui, comme dans l’affaire au principal, effectue un travail posté dans le cadre duquel elle accomplit uniquement une partie de ses fonctions en horaires de nuit doit être considérée comme accomplissant un travail durant la « période nocturne » et doit partant être qualifiée de « travailleur de nuit », au sens de la directive 2003/88.

47

Il convient de constater que, dans la mesure où il est dans l’intérêt des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes de se voir appliquer, conformément au considérant 14 de la directive 2003/88, les dispositions spécifiques prévues par la directive 92/85 en ce qui concerne le travail de nuit, notamment en vue de renforcer la protection dont elles doivent bénéficier à cet égard, ces dispositions spécifiques ne doivent pas être interprétées de manière moins favorable que les dispositions générales prévues par la directive 2003/88, qui sont applicables aux autres catégories de travailleurs.

48

Par conséquent, il y a lieu de considérer qu’une travailleuse telle que celle en cause au principal exerce un « travail de nuit », au sens de l’article 7 de la directive 92/85, et que celle-ci relève, en principe, de ladite disposition.

49

Cette interprétation est corroborée par la finalité de l’article 7 de la directive 92/85.

50

En effet, cette dernière disposition vise à renforcer la protection dont bénéficient les travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes en consacrant le principe selon lequel celles-ci ne sont pas tenues d’effectuer un travail de nuit lorsque celui-ci les expose à un risque pour leur santé ou leur sécurité.

51

Or, si une travailleuse allaitante qui, comme dans l’affaire au principal, effectue un travail posté devait être exclue du champ d’application de l’article 7 de la directive 92/85 au motif qu’elle accomplit uniquement une partie de ses fonctions en horaires de nuit, ceci aurait pour conséquence de vider cette disposition d’une partie de son effet utile. En effet, la travailleuse concernée serait susceptible d’être exposée à un risque pour sa santé ou sa sécurité et la protection dont elle est en droit de bénéficier en vertu de cette disposition s’en trouverait considérablement réduite.

52

En ce qui concerne les modalités d’application de l’article 7 de la directive 92/85 à une situation telle que celle en cause au principal, il importe de préciser que, pour bénéficier des mesures de protection énumérées au paragraphe 2 de cette disposition, à savoir un transfert à un travail de jour ou, à défaut, une dispense de travail, la travailleuse concernée doit présenter un certificat médical qui en atteste la nécessité du point de vue de sa sécurité ou de sa santé, selon les modalités déterminées par l’État membre en cause. Il incombera à la juridiction de renvoi de vérifier si tel est le cas en l’espèce.

53

Compte tenu de ce qui précède, il convient de répondre à la première question que l’article 7 de la directive 92/85 doit être interprété en ce sens qu’il s’applique à une situation, telle que celle en cause au principal, dans laquelle la travailleuse concernée effectue un travail posté dans le cadre duquel elle accomplit uniquement une partie de ses fonctions en horaires de nuit.

Sur les deuxième à quatrième questions

54

À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, dans le cadre de la coopération entre les juridictions nationales et la Cour instituée par l’article 267 TFUE, il appartient à celle-ci de donner au juge national une réponse utile qui lui permette de trancher le litige dont il est saisi. Dans cette optique, il incombe, le cas échéant, à la Cour de reformuler les questions qui lui sont soumises et, dans ce contexte, d’interpréter toutes les dispositions du droit de l’Union dont les juridictions nationales ont besoin pour statuer sur les litiges qui leur sont soumis, même si ces dispositions ne sont pas indiquées expressément dans les questions qui lui sont adressées par ces juridictions (arrêt du 19 octobre 2017, Otero Ramos, C‑531/15, EU:C:2017:789, point 39 et jurisprudence citée).

55

En conséquence, même si, sur le plan formel, la juridiction de renvoi a limité ses deuxième à quatrième questions à l’interprétation de l’article 19, paragraphe 1, de la directive 2006/54 et de l’article 5 de la directive 92/85, il appartient à la Cour d’extraire de l’ensemble des éléments fournis par la juridiction nationale, et notamment de la motivation de la décision de renvoi, les éléments du droit de l’Union qui appellent une interprétation compte tenu de l’objet du litige (voir, en ce sens, arrêt du 19 octobre 2017, Otero Ramos, C‑531/15, EU:C:2017:789, point 40 et jurisprudence citée).

56

En l’occurrence, il ressort de la décision de renvoi que la réglementation nationale pertinente dans l’affaire au principal, à savoir l’article 26 de la loi 31/1995, transpose en droit interne, sans distinction claire, notamment les articles 4 et 7 de la directive 92/85 et cette réglementation prévoit, en particulier, que la suspension du contrat de travail pour risque pendant l’allaitement ainsi que l’octroi de la prestation y afférente ne sont possibles que s’il est établi, à la suite de l’évaluation du poste de travail de la travailleuse concernée, que celui-ci présente un tel risque et qu’il n’est pas possible d’aménager les conditions de travail de cette travailleuse ou de la changer de poste de travail.

57

La juridiction de renvoi part de la prémisse qu’il n’est pas exclu que, si l’évaluation des risques présentés par le poste de travail de la travailleuse concernée prévue par cette réglementation nationale avait été correctement réalisée, l’existence d’un risque pour la santé ou la sécurité de cette travailleuse aurait pu être révélée, notamment au regard de l’article 7 de la directive 92/85, en raison du fait que ladite travailleuse exerce un travail de nuit et posté, occupe certains postes en solitaire, en faisant des rondes et en devant réagir aux urgences, telles que les délits, incendies ou autres évènements de cette nature, sans que l’existence d’un endroit adapté à l’allaitement naturel ou, le cas échéant, à l’extraction du lait maternel, soit prévue.

58

Dans ce contexte, la juridiction de renvoi demande s’il y a lieu d’appliquer les règles de renversement de la charge de la preuve prévues à l’article 19, paragraphe 1, de la directive 2006/54 dans une situation telle que celle en cause au principal, dans laquelle une travailleuse qui s’est vu refuser l’octroi du certificat médical attestant l’existence d’un risque pour l’allaitement présenté par son poste de travail et, par voie de conséquence, la prestation économique pour risque pendant l’allaitement, conteste, devant une juridiction nationale ou toute autre instance compétente de l’État membre concerné, l’évaluation des risques présentés par son poste de travail. Dans l’affirmative, la juridiction de renvoi demande quelles sont les modalités d’application de cette disposition, notamment en ce qui concerne le point de savoir s’il incombe à la travailleuse concernée ou à la partie défenderesse, qu’il s’agisse de l’employeur ou de l’organisme responsable du paiement de la prestation économique pour risque pendant l’allaitement, de démontrer que l’aménagement des conditions de travail ou le changement de poste de la travailleuse concernée ne sont pas techniquement ou objectivement possibles ou ne peuvent raisonnablement être exigés.

59

Compte tenu de ces considérations, il y a lieu de comprendre que, par ses deuxième à quatrième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi cherche, en substance, à savoir si l’article 19, paragraphe 1, de la directive 2006/54 doit être interprété en ce sens qu’il s’applique à une situation, telle que celle en cause au principal, dans laquelle une travailleuse qui s’est vu refuser l’octroi d’un certificat médical attestant l’existence d’un risque pour l’allaitement présenté par son poste de travail et, par voie de conséquence, la prestation économique pour risque pendant l’allaitement, conteste, devant une juridiction nationale ou toute autre instance compétente de l’État membre concerné, l’évaluation des risques présentés par son poste de travail et, dans l’affirmative, quelles sont les modalités d’application de cette disposition dans un tel cas de figure.

60

Il convient, en premier lieu, de rappeler que, aux termes de l’article 19, paragraphe 1, de la directive 2006/54, les États membres prennent, conformément à leur système judiciaire, les mesures nécessaires afin que, dès lors qu’une personne s’estime lésée par le non-respect à son égard du principe de l’égalité de traitement et établit, devant une juridiction ou toute autre instance compétente, des faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, il incombe à la partie défenderesse de prouver qu’il n’y a pas eu de violation du principe de l’égalité de traitement.

61

L’article 19, paragraphe 4, sous a), de cette directive précise, notamment, que les règles renversant la charge de la preuve prévues par le paragraphe 1 du même article s’appliquent également aux situations couvertes par la directive 92/85, dans la mesure où il y a discrimination fondée sur le sexe.

62

À cet égard, la Cour a jugé que l’article 19, paragraphe 1, de la directive 2006/54 s’applique à une situation dans laquelle une travailleuse allaitante conteste, devant une juridiction nationale ou toute autre instance compétente de l’État membre concerné, l’évaluation des risques présentés par son poste de travail en ce qu’elle n’aurait pas été effectuée conformément à l’article 4, paragraphe 1, de la directive 92/85 (arrêt du 19 octobre 2017, Otero Ramos, C‑531/15, EU:C:2017:789, point 65).

63

Le fait de ne pas évaluer le risque présenté par le poste de travail d’une travailleuse allaitante conformément aux exigences de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 92/85 doit en effet être considéré comme un traitement moins favorable d’une femme lié à la grossesse ou au congé de maternité, au sens de cette directive, et constitue donc une discrimination directe fondée sur le sexe, au sens de l’article 2, paragraphe 2, sous c), de la directive 2006/54 (arrêt du 19 octobre 2017, Otero Ramos, C‑531/15, EU:C:2017:789, points 62 et 63).

64

La Cour a précisé, à cet égard, que, pour être conforme aux exigences de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 92/85, l’évaluation des risques présentés par le poste de travail d’une travailleuse allaitante doit comprendre un examen spécifique prenant en considération la situation individuelle de la travailleuse concernée afin de déterminer si sa santé ou sa sécurité ou celles de son enfant sont exposées à un risque (arrêt du 19 octobre 2017, Otero Ramos, C‑531/15, EU:C:2017:789, point 51).

65

Il importe, en second lieu, de relever que l’évaluation des risques prévue à l’article 4 de la directive 92/85 a pour finalité de protéger les travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes et leur enfant en ce que, lorsque cette évaluation révèle que le poste de travail d’une telle travailleuse présente un risque pour sa santé ou pour sa sécurité, a une répercussion sur sa grossesse ou encore sur l’allaitement de son enfant, l’employeur est tenu, conformément à l’article 5 de cette directive, de prendre les mesures nécessaires pour que l’exposition à ce risque soit évitée.

66

Ainsi que Mme l’avocat général l’a relevé au point 61 de ses conclusions, l’article 4 de la directive 92/85 est la disposition générale qui définit les actions à entreprendre à l’égard de toutes les activités susceptibles de comporter un risque spécifique pour les travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes. En revanche, l’article 7 de cette directive constitue une disposition spécifique qui s’applique dans le cas du travail de nuit que le législateur de l’Union a reconnu comme étant susceptible de présenter un risque particulier pour les travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes.

67

Si les articles 4 et 7 de la directive 92/85 poursuivent ainsi la même finalité de protection des travailleuses enceintes, accouchées et allaitantes contre les risques présentés par leurs postes de travail, l’article 7 de la directive 92/85 vise, plus particulièrement, à renforcer cette protection en posant le principe selon lequel les travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes ne sont pas tenues d’accomplir un travail de nuit, dès lors qu’elles présentent un certificat médical qui atteste la nécessité d’une telle protection du point de vue de leur sécurité ou de leur santé.

68

L’évaluation des risques présentés par le poste de travail de travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes, prévue dans le cadre de l’article 7 de la directive 92/85, ne saurait, dès lors, être soumise à des exigences moins strictes que celles qui s’appliquent dans le cadre de l’article 4, paragraphe 1, de la même directive.

69

Cette interprétation se trouve corroborée par le fait que les lignes directrices, qui ont pour objectif, conformément à l’article 3, paragraphe 2, de la directive 92/85, de servir de guide pour l’évaluation visée par l’article 4, paragraphe 1, de cette directive, font expressément référence au travail de nuit.

70

Il ressort, en particulier, du tableau détaillé relatif à l’évaluation des risques, des situations et des dangers de nature générale auxquels sont exposés la plupart des femmes enceintes, accouchées ou allaitantes, figurant à la page 13 de ces lignes directrices, que le travail de nuit peut avoir des répercussions considérables sur la santé des femmes enceintes, accouchées ou allaitantes, que les risques encourus par ces femmes varient en fonction du type de travail, des conditions de travail et de la personne concernée et que, par conséquent, en raison d’une fatigue accrue, certaines femmes enceintes ou allaitantes peuvent être dans l’incapacité d’assurer des postes irréguliers ou tardifs, de travailler la nuit. Ce tableau prévoit, par ailleurs, des mesures de prévention en ce qui concerne le travail de nuit.

71

En outre, il ressort des lignes directrices que l’évaluation des risques présentés par le poste de travail d’une travailleuse allaitante doit comprendre un examen spécifique prenant en compte la situation individuelle de la travailleuse concernée (arrêt du 19 octobre 2017, Otero Ramos, C‑531/15, EU:C:2017:789, points 46 et 51).

72

Par conséquent, il y a lieu de considérer, à l’instar de Mme l’avocat général au point 50 de ses conclusions, que l’évaluation des risques présentés par le poste de travail de la travailleuse concernée, effectuée dans le cadre de l’article 7 de la directive 92/85, doit comprendre un examen spécifique prenant en considération la situation individuelle de cette travailleuse afin de déterminer si sa santé ou sa sécurité ou celles de son enfant sont exposées à un risque. Dans l’hypothèse où un tel examen ferait défaut, il s’agirait d’un traitement moins favorable d’une femme lié à la grossesse ou au congé de maternité, au sens de cette directive et constituerait une discrimination directe fondée sur le sexe, au sens de l’article 2, paragraphe 2, sous c), de la directive 2006/54, permettant l’application de l’article 19, paragraphe 1, de cette directive.

73

En ce qui concerne les modalités d’application de cette disposition, il y a lieu de rappeler que les règles de preuve qu’elle prévoit ne s’appliquent pas au moment où la travailleuse concernée demande un aménagement de ses conditions de travail ou, comme dans l’affaire au principal, une prestation économique pour risque pendant l’allaitement, et qu’une évaluation des risques présentés par son poste de travail doit, de ce fait, être effectuée, conformément à l’article 4, paragraphe 1, ou, le cas échéant, à l’article 7 de la directive 92/85. Ce n’est que dans une phase ultérieure, où une décision relative à cette évaluation des risques est contestée par la travailleuse concernée devant une juridiction ou devant toute autre instance compétente, que ces règles de preuve ont vocation à s’appliquer (voir, en ce sens, arrêt du 19 octobre 2017, Otero Ramos, C‑531/15, EU:C:2017:789, point 67).

74

Cela étant, conformément à l’article 19, paragraphe 1, de la directive 2006/54, il appartient à la travailleuse qui s’estime lésée par le non–respect, à son égard, du principe de l’égalité de traitement d’avancer, devant une juridiction ou toute autre instance compétente, des faits ou des éléments de preuve qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte (arrêt du 19 octobre 2017, Otero Ramos, C‑531/15, EU:C:2017:789, point 68 et jurisprudence citée).

75

Dans une situation telle que celle au principal, cela signifie que la travailleuse concernée doit produire, devant la juridiction de renvoi ou toute autre instance compétente de l’État membre en cause, des faits ou des éléments de preuve susceptibles d’indiquer que l’évaluation des risques présentés par son poste de travail prévue par la réglementation nationale transposant, notamment, les articles 4 et 7 de la directive 92/85 en droit interne n’a pas comporté un examen spécifique prenant en considération sa situation individuelle et qu’elle a, partant, été discriminée.

76

En l’occurrence, il ressort de la décision de renvoi et du dossier soumis à la Cour que Mme González Castro a engagé, auprès de la mutuelle Umivale, la procédure visant à l’obtention d’une prestation économique pour risque pendant l’allaitement et a, à cet effet, présenté, le 9 mars 2015, une demande de certificat médical attestant l’existence d’un risque pour l’allaitement présenté par son poste de travail au moyen d’un formulaire fourni par ladite mutuelle à cet égard.

77

Dans le cadre de cette procédure, Prosegur a envoyé, le 13 mars 2015, à la mutuelle Umivale une déclaration dans laquelle elle a indiqué ne pas avoir tenté d’adapter les conditions de travail présentées par le poste de travail de Mme González Castro ni de changer celle-ci de poste de travail puisqu’elle considérait que les fonctions qu’elle exerçait et ses conditions de travail n’influençaient pas l’allaitement naturel.

78

Or, cette déclaration, qui se présente sous la forme d’un formulaire-type fourni par la mutuelle Umivale, ne contient aucune motivation sur la manière dont Prosegur est parvenue à cette conclusion et il n’apparaît pas qu’elle se soit basée sur un examen spécifique prenant en considération la situation individuelle de la travailleuse concernée.

79

Quant à la décision par laquelle la mutuelle Umivale a rejeté la demande introduite par Mme González Castro, celle-ci se borne à indiquer qu’« il n’existe pas de risque inhérent à son poste de travail qui puisse être préjudiciable, après une étude exhaustive de la documentation fournie par la travailleuse elle-même ». Dans les conclusions figurant à l’annexe de cette décision, la mutuelle Umivale fait référence aux « lignes directrices pour l’évaluation des risques professionnels pendant l’allaitement maternel », établies par l’Association espagnole de pédiatrie et publiées par l’INSS, pour estimer que celles-ci indiquent que le travail posté ou le travail de nuit ne présente pas de risque pour l’allaitement. La mutuelle Umivale affirme également, sans autres explications, que Mme González Castro n’est pas exposée pendant son travail à des substances nuisibles pour son enfant et que ses conditions de travail n’interfèrent pas avec l’allaitement.

80

Dans ces conditions, il apparaît, à l’instar de ce que Mme l’avocat général a constaté aux points 70 et 77 de ses conclusions, que l’évaluation des risques présentés par le poste de travail de Mme González Castro n’a pas comporté un examen spécifique prenant en considération sa situation individuelle et que l’intéressée a été discriminée. Il appartient en définitive à la juridiction de renvoi, seule compétente pour apprécier les faits de l’affaire dont elle est saisie, de vérifier si tel est effectivement le cas.

81

Dans l’affirmative, il incombera à la partie défenderesse au principal de prouver que l’évaluation des risques prévue par la réglementation nationale transposant, notamment, les articles 4 et 7 de la directive 92/85 en droit interne comprenait un examen spécifique prenant en considération la situation individuelle de Mme González Castro, étant entendu que des documents tels qu’une déclaration de l’employeur selon laquelle les fonctions exercées par ladite travailleuse et ses conditions de travail n’influencent pas l’allaitement naturel, sans explications de nature à étayer cette affirmation, combinée à la circonstance que son poste de travail ne figure pas dans la liste des postes présentant un risque pour l’allaitement établie par l’organisme compétent de l’État membre en cause, ne sauraient, à eux seuls, emporter une présomption irréfragable que tel est le cas. À défaut, tant les articles 4 et 7 de la directive 92/85 que les règles de preuve prévues à l’article 19 de la directive 2006/54 seraient privés de tout effet utile (voir, en ce sens, arrêt du 19 octobre 2017, Otero Ramos, C‑531/15, EU:C:2017:789, point 74).

82

Il convient d’ajouter que les mêmes règles de preuve sont applicables dans le cadre de l’article 5 ou, le cas échéant, de l’article 7, paragraphe 2, de la directive 92/85. En particulier, dans la mesure où une travailleuse allaitante sollicite une dispense de travail pour toute la période nécessaire pour la protection de sa sécurité ou de sa santé et produit des éléments de nature à indiquer que les mesures de protection prévues à l’article 5, paragraphes 1 et 2, ou à l’article 7, paragraphe 2, premier alinéa, de cette directive n’étaient pas envisageables, il incombe à l’employeur d’établir que ces mesures étaient techniquement ou objectivement possibles et pouvaient raisonnablement être exigées dans la situation de la travailleuse concernée.

83

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre aux deuxième à quatrième questions que l’article 19, paragraphe 1, de la directive 2006/54 doit être interprété en ce sens qu’il s’applique à une situation, telle que celle au principal, dans laquelle une travailleuse, qui s’est vu refuser l’octroi du certificat médical attestant l’existence d’un risque pour l’allaitement présenté par son poste de travail et, par voie de conséquence, de la prestation économique pour risque pendant l’allaitement, conteste, devant une juridiction nationale ou toute autre instance compétente de l’État membre concerné, l’évaluation des risques présentés par son poste de travail, dès lors que cette travailleuse avance des faits de nature à suggérer que cette évaluation n’a pas comporté un examen spécifique prenant en considération sa situation individuelle et permettant ainsi de présumer l’existence d’une discrimination directe fondée sur le sexe, au sens de la directive 2006/54, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier. Il incombe alors à la partie défenderesse de rapporter la preuve que ladite évaluation des risques comprenait effectivement un tel examen concret et que, partant, il n’y a pas eu violation du principe de non-discrimination.

Sur les dépens

84

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) dit pour droit :

 

1)

L’article 7 de la directive 92/85/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail, doit être interprété en ce sens qu’il s’applique à une situation, telle que celle en cause au principal, dans laquelle la travailleuse concernée effectue un travail posté dans le cadre duquel elle accomplit uniquement une partie de ses fonctions en horaires de nuit.

 

2)

L’article 19, paragraphe 1, de la directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 juillet 2006, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail (refonte), doit être interprété en ce sens qu’il s’applique à une situation, telle que celle au principal, dans laquelle une travailleuse, qui s’est vu refuser l’octroi du certificat médical attestant l’existence d’un risque pour l’allaitement présenté par son poste de travail et, par voie de conséquence, de la prestation économique pour risque pendant l’allaitement, conteste, devant une juridiction nationale ou toute autre instance compétente de l’État membre concerné, l’évaluation des risques présentés par son poste de travail, dès lors que cette travailleuse avance des faits de nature à suggérer que cette évaluation n’a pas comporté un examen spécifique prenant en considération sa situation individuelle et permettant ainsi de présumer l’existence d’une discrimination directe fondée sur le sexe, au sens de la directive 2006/54, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier.

Il incombe alors à la partie défenderesse de rapporter la preuve que ladite évaluation des risques comprenait effectivement un tel examen concret et que, partant, il n’y a pas eu violation du principe de non-discrimination.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : l’espagnol.

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