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Document 62017CC0121

Conclusions de l'avocat général M. M. Wathelet, présentées le 25 avril 2018.
Teva UK Ltd e.a. contre Gilead Sciences Inc.
Demande de décision préjudicielle, introduite par la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division (patents courts).
Renvoi préjudiciel – Médicaments à usage humain – Traitement du virus de l’immunodéficience humaine (VIH) – Médicaments princeps et médicaments génériques – Certificat complémentaire de protection – Règlement (CE) no 469/2009 – Article 3, sous a) – Conditions d’obtention – Notion de “produit protégé par un brevet de base en vigueur” – Critères d’appréciation.
Affaire C-121/17.

Recueil – Recueil général – Partie «Informations sur les décisions non publiées»

Identifiant ECLI: ECLI:EU:C:2018:278

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MELCHIOR WATHELET

présentées le 25 avril 2018 ( 1 )

Affaire C‑121/17

Teva UK Ltd,

Accord Healthcare Ltd,

Lupin Ltd,

Lupin (Europe) Ltd,

Generics (UK), agissant sous le nom commercial « Mylan »,

contre

Gilead Sciences Inc.

(demande de décision préjudicielle formée par la High Court of Justice [England & Wales], Chancery Division [patents court] [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), division de la Chancery (chambre des brevets), Royaume-Uni])

« Renvoi préjudiciel – Rapprochement des législations – Droit des brevets – Certificat complémentaire de protection pour les médicaments – Règlement (CE) no 469/2009 – Article 3, sous a) – Conditions d’obtention – Produit protégé par un brevet de base en vigueur – Critères d’appréciation »

I. Introduction

1.

La présente demande de décision préjudicielle, déposée au greffe de la Cour le 8 mars 2017 par la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division (patents court) [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), division de la Chancery (chambre des brevets), Royaume-Uni], porte sur l’interprétation de l’article 3, sous a), du règlement (CE) no 469/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 6 mai 2009, concernant le certificat complémentaire de protection pour les médicaments ( 2 ).

2.

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Teva UK Ltd, Accord Healthcare Ltd, Lupin Ltd, Lupin (Europe) Ltd et Generics (UK), agissant sous le nom commercial « Mylan », à Gilead Sciences Inc. (ci-après « Gilead »). Par leur litige au principal, les requérantes au principal contestent la validité du certificat complémentaire de protection (ci-après le « CCP ») SPC/GB05/041 de Gilead portant sur un produit décrit dans le CCP comme étant une « composition contenant du ténofovir disoproxil, le cas échéant sous la forme d’un sel, hydrate, tautomère ou solvate qui soit admis par la pharmacologie, et de l’emtricitabine ». Le produit couvert par le CCP est un médicament antirétroviral utilisé dans le traitement du virus de l’immunodéficience humaine (VIH) et est commercialisé par Gilead sous la marque TRUVADA.

3.

Gilead prétend que le produit couvert par le CCP est « protégé » au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 par un brevet européen, mais les requérantes au principal le contestent. Ces dernières prétendent dès lors que le CCP ne répond pas à l’article 3, sous a), dudit règlement.

4.

La demande de décision préjudicielle offre à la Cour une nouvelle occasion de s’exprimer sur la question épineuse des critères permettant de déterminer si un principe actif ( 3 ) ou une composition de principes actifs d’un médicament sont « protégé[s] par un brevet de base en vigueur » au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 ( 4 ).

II. Le cadre juridique

A.   Le droit de l’Union

5.

Les considérants 4, 5, 9 et 10 du règlement no 469/2009 se lisent comme suit :

« (4)

À l’heure actuelle, la période qui s’écoule entre le dépôt d’une demande de brevet pour un nouveau médicament et l’autorisation de mise sur le marché dudit médicament réduit la protection effective conférée par le brevet à une durée insuffisante pour amortir les investissements effectués dans la recherche.

(5)

Ces circonstances conduisent à une insuffisance de protection qui pénalise la recherche pharmaceutique.

[…]

(9)

La durée de la protection conférée par le certificat devrait être déterminée de telle sorte qu’elle permette une protection effective suffisante. À cet effet, le titulaire, à la fois d’un brevet et d’un certificat, doit pouvoir bénéficier au total de quinze années d’exclusivité au maximum à partir de la première autorisation de mise sur le marché, dans [l’Union], du médicament en question.

(10)

Néanmoins, tous les intérêts en jeu, y compris ceux de la santé publique, dans un secteur aussi complexe et sensible que le secteur pharmaceutique devraient être pris en compte. À cet effet, le certificat ne saurait être délivré pour une durée supérieure à cinq ans. La protection qu’il confère devrait en outre être strictement limitée au produit couvert par l’autorisation de sa mise sur le marché en tant que médicament. »

6.

L’article 1er du règlement no 469/2009, intitulé « Définitions », prévoit :

« Aux fins du présent règlement, on entend par :

a)

“médicament” : toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard des maladies humaines […] ;

b)

“produit” : le principe actif ou la composition de principes actifs d’un médicament ;

c)

“brevet de base” : un brevet qui protège un produit en tant que tel, un procédé d’obtention d’un produit ou une application d’un produit et qui est désigné par son titulaire aux fins de la procédure d’obtention d’un certificat ;

d)

“certificat” : le [CCP] ;

[…] »

7.

L’article 3 du règlement no 469/2009, intitulé « Conditions d’obtention du certificat », dispose :

« Le certificat est délivré, si, dans l’État membre où est présentée la demande visée à l’article 7 et à la date de cette demande :

a)

le produit est protégé par un brevet de base en vigueur ;

b)

le produit, en tant que médicament, a obtenu une autorisation de mise sur le marché en cours de validité conformément à la directive 2001/83/CE [du Parlement européen et du Conseil, du 6 novembre 2001, instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain (JO 2001, L 311, p. 67)] […] ;

c)

le produit n’a pas déjà fait l’objet d’un certificat ;

d)

l’autorisation mentionnée au point b) est la première autorisation de mise sur le marché du produit, en tant que médicament. »

B.   La convention sur le brevet européen

8.

Sous l’intitulé « Étendue de la protection », l’article 69 de la convention sur la délivrance de brevets européens, signée à Munich le 5 octobre 1973, dans sa version applicable aux faits au principal (ci–après la « CBE »), est libellé comme suit :

« (1)   L’étendue de la protection conférée par le brevet européen ou par la demande de brevet européen est déterminée par les revendications. Toutefois, la description et les dessins servent à interpréter les revendications.

(2)   Pour la période allant jusqu’à la délivrance du brevet européen, l’étendue de la protection conférée par la demande de brevet européen est déterminée par les revendications contenues dans la demande telle que publiée. Toutefois, le brevet européen tel que délivré ou tel que modifié au cours de la procédure d’opposition, de limitation ou de nullité détermine rétroactivement la protection conférée par la demande, pour autant que cette protection ne soit pas étendue. »

9.

S’agissant de cet article 69, le protocole interprétatif de l’article 69 de la CBE, qui fait partie intégrante de celle-ci en vertu de l’article 164, paragraphe 1, de ladite convention, indique, à son article 1er :

« L’article 69 ne doit pas être interprété comme signifiant que l’étendue de la protection conférée par le brevet européen est déterminée au sens étroit et littéral du texte des revendications et que la description et les dessins servent uniquement à dissiper les ambiguïtés que pourraient recéler les revendications. Il ne doit pas davantage être interprété comme signifiant que les revendications servent uniquement de ligne directrice et que la protection s’étend également à ce que, de l’avis d’un homme du métier ayant examiné la description et les dessins, le titulaire du brevet a entendu protéger. L’article 69 doit, par contre, être interprété comme définissant entre ces extrêmes une position qui assure à la fois une protection équitable au titulaire du brevet et un degré raisonnable de sécurité juridique aux tiers. »

10.

L’article 83 de la CBE, intitulé « Exposé de l’invention », stipule :

« L’invention doit être exposée dans la demande de brevet européen de façon suffisamment claire et complète pour qu’un homme du métier puisse l’exécuter. »

11.

L’article 84 de la CBE, intitulé « Revendications », prévoit que, « [l]es revendications définissent l’objet de la protection demandée. Elles doivent être claires et concises et se fonder sur la description ».

C.   Le droit du Royaume-Uni

12.

L’article 69 de la CBE et son protocole interprétatif ont reçu effet au Royaume-Uni par la section 125, paragraphes 1 et 3, du Patents Act 1977 (loi sur les brevets de 1977).

13.

Sous l’intitulé « Portée de l’invention », la section 125 de la loi sur les brevets de 1977 dispose :

« 1)   Aux fins de la loi, l’invention pour laquelle un brevet a été demandé ou a été délivré, à moins que le contexte n’en dispose autrement, doit être considérée comme étant celle spécifiée dans une revendication du fascicule de la demande ou du brevet, selon le cas, telle qu’interprétée au moyen de la description et d’éventuels dessins contenus dans cette spécification, et l’étendue de la protection conférée par le brevet ou la demande de brevet est déterminée de façon correspondante.

[…]

3)   Le protocole interprétatif de l’article 69 de la [CBE] (cet article contenant une disposition correspondant à la sous-section 1), ci-dessus, s’applique, tant qu’il est en vigueur, aux finalités de ladite sous-section 1 comme il s’applique aux finalités de cet article.

[…] »

III. Le litige au principal et la question préjudicielle

14.

Gilead est une société pharmaceutique qui commercialise, sous le nom de TRUVADA, un médicament antirétroviral indiqué pour le traitement des personnes infectées par le VIH. Ce médicament contient deux principes actifs, le ténofovir disoproxil (ci-après le « TD ») et l’emtricitabine ( 5 ). Il bénéficie d’une autorisation de mise sur le marché (ci-après l’« AMM ») délivrée en 2005 par l’Agence européenne des médicaments (EMA).

15.

Gilead est titulaire du brevet européen EP 0 915894 (ci-après le « brevet de base »). Ce brevet, demandé le 25 juillet 1997 avec revendication de priorité au 26 juillet 1996, a été délivré le 14 mai 2003 et a expiré le 24 juillet 2017. Il couvre, de manière générale, un ensemble de molécules utiles pour le traitement thérapeutique de plusieurs infections virales chez l’homme ou l’animal, notamment le VIH.

16.

Le « résumé de l’invention » indique que celle-ci divulgue des composés répondant à deux formules Markush, la formule (1a) et la formule (1), ainsi que des procédés pour les préparer.

17.

La revendication 1 concerne des composés de la formule (1a) et la revendication 2 couvre des composés de la formule (1). Les revendications 3 à 24 sont des revendications de composés liées aux deux premières qui resserrent progressivement leur champ.

18.

La revendication 25 est une revendication autonome du composé TD.

19.

La revendication 27 est rédigée dans les termes suivants :

« Composition pharmaceutique comprenant un composé conforme à l’une des revendications 1 à 25, conjointement avec un véhicule qui soit admis par la pharmacologie et, le cas échéant, d’autres ingrédients thérapeutiques» ( 6 ).

20.

Les revendications 28 à 33 concernent des procédés.

21.

En 2008, Gilead a obtenu le CCP SPC/GB05/041 sur le fondement de la revendication 27 du brevet de base et de l’AMM obtenue pour le TRUVADA. Ce CCP porte sur une « composition contenant du [TD], le cas échéant sous la forme d’un sel, hydrate, tautomère ou solvate qui soit admis par la pharmacologie, et de l’emtricitabine» ( 7 ).

22.

Les requérantes au principal, qui souhaitent commercialiser des versions génériques du TRUVADA sur le marché britannique dès l’expiration du brevet de base, ont introduit devant la juridiction de renvoi un recours tendant à contester la validité dudit CCP.

23.

À l’appui de leur recours, les requérantes au principal au principal soutiennent en substance que, pour répondre à l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009, le produit en question doit « figurer dans le libellé des revendications» ( 8 ) et, lorsque la revendication contient une définition fonctionnelle, elle doit « viser, implicitement mais nécessairement, le produit en cause, et ce de manière spécifique» ( 9 ). Elles relèvent que l’emtricitabine ne figure absolument pas dans le libellé de la revendication 27 et que les mots « autres ingrédients thérapeutiques » ne précisent aucun agent actif ni structurellement, ni fonctionnellement, ni d’une autre manière. « Au contraire, ils couvrent un éventail susceptible d’être illimité d’agents actifs pour le traitement de nombreuses maladies. En effet, l’emtricitabine n’a été homologuée pour un usage clinique que sept ans après la date de priorité du brevet et rien ne prouve que son efficacité était connue à cette date. »

24.

Les requérantes au principal soutiennent également que la revendication 27 ne requiert pas la présence d’« autres ingrédients thérapeutiques », dès lors qu’ils ne sont présents que « le cas échéant ». Selon elles, « [i]l ressort clairement de la jurisprudence de la Cour […] qu’il ne suffit pas qu’il y ait un empiétement sur une revendication d’une “composition comprenant le composé A” en raison de la présence de A dans un produit composé de A et B. Il n’y a aucune différence entre une revendication de ce type et la revendication d’une “composition consistant en un composé A et, le cas échéant, d’autres principes actifs” ».

25.

Gilead soutient que pour répondre à l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009, il est nécessaire et suffisant que le produit en question relève du champ de protection d’au moins une revendication du brevet de base par application des règles relatives au champ de protection ( 10 ). Elle estime que la combinaison du TD et de l’emtricitabine relève du champ de protection de la revendication 27 du brevet par application de l’article 69 de la CBE et du protocole interprétatif.

26.

La juridiction de renvoi considère qu’en dépit des nombreux arrêts rendus par la Cour sur l’interprétation de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 ( 11 ), le sens à donner à cette disposition « reste flou ». Elle relève que la nécessité de saisir la Cour peut être décelée dans les décisions divergentes qui ont été rendues à travers l’Europe sur la possibilité d’obtenir un CCP dans le contexte de la présente affaire et dans les différentes interprétations de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009, qui ont été adoptées dans la jurisprudence des juridictions nationales ( 12 ).

27.

La juridiction de renvoi estime qu’il ne suffit pas que le produit relève d’au moins une revendication du brevet de base et « qu’il faut plus ». Les arrêts du 12 décembre 2013, Actavis Group PTC et Actavis UK (C‑443/12, EU:C:2013:833), du 12 décembre 2013, Eli Lilly and Company (C‑493/12, EU:C:2013:835), et du 12 mars 2015, Actavis Group PTC et Actavis UK (C‑577/13, EU:C:2015:165) laisseraient en effet entendre que, pour déterminer si un « produit est protégé par un brevet de base », il convient également de prendre en compte « l’objet de l’invention couverte par le brevet » ou « le cœur de l’activité inventive ». Ces arrêts ne préciseraient cependant pas le sens et la portée de ces nouveaux critères, ni même s’ils sont applicables à l’interprétation de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 ( 13 ).

28.

Selon la juridiction de renvoi, le produit doit contenir un principe actif ou une combinaison de principes actifs qui renferme l’activité inventive (ou la contribution technique) du brevet de base ( 14 ).

29.

En l’occurrence, la juridiction de renvoi relève que l’emtricitabine n’est pas mentionnée dans le brevet de base en cause. En outre, rien ne démontrerait qu’à la date de priorité revendiquée par ce brevet, l’efficacité de l’emtricitabine était connue pour le traitement du VIH. Compte tenu de ces éléments, la juridiction de renvoi hésite à considérer que la combinaison TD/emtricitabine est protégée par le brevet de base au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009, d’autant plus que les critères de la jurisprudence n’apportent que peu de clarification pour trancher la question.

30.

Dans ces conditions, la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division (patents court) [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), division de la Chancery (chambre des brevets)] a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« Quels sont les critères permettant de déterminer si “le produit est protégé par un brevet de base en vigueur” au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 ? »

IV. La procédure devant la Cour

31.

La juridiction de renvoi a joint à sa demande de décision préjudicielle une demande de procédure accélérée, en application de l’article 105, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour ( 15 ). Par ordonnance du 4 avril 2017, la Cour a rejeté cette demande ( 16 ).

32.

Des observations écrites ont été déposées par les requérantes au principal, Gilead, le gouvernement du Royaume-Uni, les gouvernements hellénique et néerlandais, ainsi que par la Commission européenne.

33.

Les requérantes au principal, Gilead, le gouvernement du Royaume-Uni, les gouvernements hellénique et letton, ainsi que la Commission ont formulé des observations orales lors de l’audience qui s’est tenue le 20 février 2018.

V. Analyse

A.   Observations des parties

34.

Les requérantes au principal soutiennent que dans l’arrêt du 24 novembre 2011, Medeva (C‑322/10, EU:C:2011:773), la Cour a répondu en substance à la même question sur l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009. Elles estiment que cette disposition doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à l’octroi d’un CCP portant sur des principes actifs qui ne sont pas mentionnés dans le libellé des revendications du brevet de base invoqué au soutien d’une telle demande.

35.

Selon les requérantes au principal, la jurisprudence de la Cour postérieure à cet arrêt a réitéré le même critère en donnant les mêmes motifs de l’adopter. Elles estiment qu’il est évident que, dans la présente affaire, le CCP ne répond pas aux conditions requises à l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009, car l’emtricitabine n’est évoquée nulle part dans le brevet ni nommément, ni par structure chimique, ni autrement.

36.

Les requérantes au principal relèvent également qu’il « est clair que le champ de protection de la revendication 27 n’est pas limité à une composition pharmaceutique contenant deux (ou plusieurs) ingrédients thérapeutiques mais s’étend à une composition pharmaceutique contenant un seul ingrédient pharmaceutique consistant en un composant relevant des revendications 1 à 25. Ainsi que la juridiction de renvoi l’a indiqué, la présence ou l’absence d’un autre ingrédient thérapeutique est dénuée de pertinence pour apprécier si une composition pharmaceutique relève de la revendication 27 et donc pour apprécier si des transactions portant sur une telle composition pharmaceutique empiètent sur cette revendication du brevet ».

37.

Gilead fait valoir qu’un produit est protégé par un brevet de base en vigueur, conformément à l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009, si le produit relève du champ de protection d’une revendication du brevet de base en vigueur, ce qui se déterminera conformément à l’article 69 de la CBE ou à la législation nationale dérivée de cet article. Elle estime que le droit de l’Union n’impose aucune autre condition. Selon Gilead, l’approche évoquée par la juridiction de renvoi devrait être rejetée, car elle n’a aucun fondement dans le règlement no 469/2009, n’est pas conforme à la jurisprudence de la Cour et a été évoquée dans le passé par la juridiction de renvoi et rejetée par la Cour.

38.

Le gouvernement du Royaume-Uni relève que, au point 41 de l’arrêt du 12 décembre 2013, Actavis Group PTC et Actavis UK (C‑443/12, EU:C:2013:833), la Cour a précisé que « l’objectif fondamental du règlement no 469/2009 est de compenser le retard pris dans la commercialisation de ce qui constitue le cœur de l’activité inventive faisant l’objet du brevet de base ». Selon le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, ce critère du « cœur de l’activité inventive » constitue une approche réaliste conforme à la conciliation des intérêts opposés qui sous-tend le règlement no 469/2009, car il n’exige pas des offices nationaux de la propriété intellectuelle qu’ils effectuent un examen de l’activité inventive semblable à celui qui doit être fait quand la validité du brevet est mise en cause. Il relève que la juridiction de renvoi a suggéré de substituer « la contribution technique » à « l’activité inventive ». Toutefois, selon le gouvernement du Royaume-Uni le rapprochement de ces notions doit être effectué avec prudence car le terme « contribution technique » émerge dans un certain nombre de contextes différents dans la jurisprudence des chambres de recours de l’Office européen des brevets (OEB), et est de nature à générer confusion et insécurité juridique si le critère à appliquer, au titre du règlement no 469/2009, est trop étroitement lié à cette jurisprudence ( 17 ).

39.

Le gouvernement du Royaume-Uni estime donc que le critère adéquat comprend les trois étapes suivantes :

« (i)

la première étape est de déterminer si le produit relève d’au moins une revendication du brevet. Les revendications doivent viser, explicitement ou implicitement (mais nécessairement, et ce de manière spécifique), le(s) principe(s) actif(s) en cause ;

(ii)

la deuxième étape consiste à déterminer le cœur de l’activité inventive, et

(iii)

enfin, a) si le produit contient un seul principe actif, il faut déterminer si ce principe actif renferme l’activité inventive déterminée à l’étape (ii) ; ou bien, b) si le produit contient une combinaison de principes actifs, il faut déterminer si la combinaison elle-même, et non pas l’un des principes actifs qui la composent, renferme l’activité inventive déterminée à l’étape (ii) » (voir, point 38 de ses observations).

40.

Le gouvernement néerlandais estime qu’un « produit est protégé par un brevet de base en vigueur » au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 si le produit figure dans les revendications du brevet de base. Selon lui, tel est le cas lorsque l’homme du métier aurait aperçu, tant au vu de la description que de sa connaissance générale à la date de priorité, que le principe actif pour lequel un certificat complémentaire est sollicité appartient aux substances figurant dans les revendications. Toutefois, selon le gouvernement néerlandais, pour établir qu’un produit combiné (en l’espèce, la combinaison de TD et de l’emtricitabine) est couvert par un brevet de base en vigueur, ce produit combiné doit aussi pouvoir être considéré comme étant le cœur de l’activité inventive ( 18 ).

41.

Dans la présente affaire, le gouvernement néerlandais estime qu’il ne faut donc pas seulement que l’homme du métier aperçoive que les termes d’« autres ingrédients thérapeutiques » figurant dans la revendication 27 du brevet de base visent l’emtricitabine. Selon ce gouvernement, il faut aussi déterminer si cette substance, en combinaison avec le principe actif TD, constitue l’objet de l’invention couverte par le brevet. Si la combinaison de TD et de l’emtricitabine ne fait pas partie du cœur de l’activité inventive, le gouvernement néerlandais estime alors que la condition de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 n’est pas remplie.

42.

Le gouvernement hellénique considère qu’il ressort clairement de la jurisprudence de la Cour que, dans le cas d’un produit pharmaceutique composé consistant en deux principes actifs au moins, tel le médicament litigieux ( 19 ), il faut pour obtenir un CCP que ce soit la composition qui renferme l’activité inventive du brevet, telle qu’elle figure dans l’énoncé des revendications du brevet. En conséquence, dans un cas comme celui en cause, un CCP ne serait pas délivré à un produit pharmaceutique constitué d’un principe actif ou d’une composition de principes actifs ne renfermant pas l’activité inventive du brevet de base.

43.

Le gouvernement letton a fait valoir lors de l’audience du 20 février 2018 qu’il était nécessaire d’adopter une interprétation stricte des termes « protégé par un brevet de base en vigueur » au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009, afin de remplir les objectifs dudit règlement et de protéger non seulement les intérêts des fabricants des médicaments brevetés, mais également ceux des fabricants des médicaments génériques et des consommateurs. À cet égard, ce gouvernement estime que le principe actif doit être clairement mentionné dans les revendications du brevet de base, interprété conformément à l’article 69 de la CBE. Toutefois, le gouvernement letton considère que ce critère n’est pas suffisant. Il estime qu’il est nécessaire d’appliquer un critère supplémentaire, à savoir que le principe actif en cause constitue le cœur de l’activité inventive du brevet de base. Selon ce gouvernement, lorsqu’il s’agit d’une combinaison de principes actifs, cette combinaison doit constituer le cœur de l’activité inventive.

44.

La Commission fait valoir qu’au point 28 de l’arrêt du 24 novembre 2011, Medeva (C‑322/10, EU:C:2011:773), la Cour a jugé que « l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 [devait] être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce que les services compétents de la propriété industrielle d’un État membre octroient un CCP portant sur des principes actifs qui ne sont pas mentionnés dans le libellé des revendications du brevet de base invoqué au soutien d’une telle demande ».

45.

La Commission estime que la revendication 27 est rédigée de manière excessivement large, ouverte et générique. Selon elle, ce libellé, pour suffisant qu’il aurait pu être dans le cadre d’un contrôle approprié à l’époque de l’arrêt du 16 septembre 1999, Farmitalia (C‑392/97, EU:C:1999:416), au regard des « règles relatives au champ de protection », ne satisferait pas au critère fixé dans la jurisprudence plus récente de la Cour.

46.

À cet égard, la Commission relève que les termes « comprenant » et « le cas échéant » vont à l’encontre de ce critère parce qu’intentionnellement larges et ouverts.

47.

En ce qui concerne le critère de l’« activité inventive centrale » préconisé par la juridiction de renvoi et la question de savoir si ce critère peut être appliqué aux fins de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009, la Commission estime que l’on pourrait considérer que la Cour a déjà fait allusion audit critère au point 41 de son arrêt du 12 décembre 2013, Actavis Group PTC et Actavis UK (C‑443/12, EU:C:2013:833). Elle souligne qu’il s’agissait cependant de l’article 3, sous c), du règlement no 469/2009 dans un contexte où un CCP avait déjà été délivré au demandeur pour le même produit et où un second CCP était demandé pour une combinaison comprenant ledit produit. La Commission ajoute que dans ladite affaire, la Cour a renoncé à répondre à la première question, qui portait sur l’article 3, sous a), dudit règlement.

B.   Observations liminaires

48.

L’adoption du règlement no 469/2009 a été motivée par la durée insuffisante de la protection effective conférée par les brevets pour amortir les investissements effectués dans la recherche pharmaceutique et visait ainsi à combler cette insuffisance par la création d’un CCP pour les médicaments ( 20 ).

49.

Le règlement no 469/2009 institue une solution uniforme au niveau de l’Union en créant un CCP susceptible d’être obtenu par le titulaire d’un brevet national ou européen selon les mêmes conditions dans chaque État membre prévenant ainsi une évolution hétérogène des législations nationales aboutissant à de nouvelles disparités de nature à entraver la libre circulation des médicaments au sein de l’Union ( 21 ).

50.

En effet, l’article 2 du règlement no 469/2009 prévoit que tout produit protégé par un brevet sur le territoire d’un État membre et soumis, en tant que médicament, préalablement à sa mise sur le marché, à une procédure d’autorisation administrative ( 22 ) peut, dans les conditions et selon les modalités prévues par ce règlement, faire l’objet d’un CCP.

51.

À cet égard, l’article 3 du règlement no 469/2009 prévoit quatre conditions cumulatives pour l’obtention d’un CCP. Dans la présente affaire, seule la première condition prévue à l’article 3, sous a), dudit règlement qui exige que le produit soit « protégé par un brevet de base en vigueur » est en cause.

52.

Conformément à l’article 5 du règlement no 469/2009, tout CCP confère les mêmes droits que ceux conférés par le brevet de base et est soumis aux mêmes limitations et aux mêmes obligations.

53.

En application de l’article 13, paragraphe 1, du règlement no 469/2009, le CCP produit effet au terme légal du brevet de base pour une durée égale à la période écoulée entre la date du dépôt de la demande du brevet de base et la date de la première AMM dans l’Union, réduite d’une période de cinq ans. Conformément à l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 469/2009, « [n]onobstant le paragraphe 1, la durée du certificat ne peut être supérieure à cinq ans à compter de la date à laquelle il produit effet» ( 23 ).

C.   L’article 3, sous a), du règlement no 469/2009

1. L’arrêt Medeva et l’importance des revendications

54.

Aux termes du point 32 de l’arrêt du 24 novembre 2011, Medeva (C‑322/10, EU:C:2011:773), et vu que, conformément à l’article 5 du règlement no 469/2009, tout CCP confère les mêmes droits que ceux conférés par le brevet de base et est soumis aux mêmes limitations et aux mêmes obligations, il s’ensuit que l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 s’oppose à la délivrance d’un CCP portant sur des principes actifs qui ne figurent ( 24 )pas dans le libellé des revendications de ce brevet de base ( 25 ).

55.

Au point 30 de l’ordonnance du 25 novembre 2011, Daiichi Sankyo (C‑6/11, EU:C:2011:781), la Cour a encore jugé que « l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce que les services compétents de la propriété industrielle d’un État membre octroient un CCP portant sur des principes actifs qui ne sont pas mentionnés dans le libellé des revendications du brevet de base invoqué au soutien d’une telle demande» ( 26 ).

56.

À mon avis, les termes « figurer » et « mentionner » sont des synonymes utilisés de façon interchangeable par la Cour.

57.

Par conséquent, la Cour a souligné le rôle essentiel des revendications aux fins de déterminer si un produit est protégé par un brevet de base au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009.

2. Les règles d’interprétation des revendications – Les règles relatives à l’étendue de l’invention – L’article 69 de la CBE

58.

S’agissant des règles devant servir à déterminer ce qui est protégé par le brevet de base au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009, la Cour a clairement dit pour droit que ces règles sont celles relatives à l’étendue de l’invention faisant l’objet d’un tel brevet et non celles relatives aux actions en contrefaçon ( 27 ).

59.

Afin d’illustrer de façon simple la différence entre les règles relatives à l’étendue de l’invention et celles relatives aux actions en contrefaçon, un médicament composé des principes actifs A+B porterait atteinte à un brevet et donnerait lieu à une action en contrefaçon, alors même que les revendications du brevet ne portent que sur le principe actif A.

60.

En revanche, il est clair que le principe actif B, qui ne figure aucunement dans les revendications, ne relève pas de l’étendue de l’invention et n’est pas « protégé » par le brevet en cause au sens de l’article 69 de la CBE et de son protocole interprétatif ainsi que de l’article 125 de la loi sur les brevets de 1977.

61.

En effet, si l’objectif du règlement no 469/2009 est d’instituer une solution uniforme au niveau de l’Union en ce qu’il crée un CCP susceptible d’être obtenu par le titulaire d’un brevet national ou européen selon les mêmes conditions dans chaque État membre, la Cour a toutefois jugé que, en l’absence d’harmonisation du droit des brevets au niveau de l’Union, l’étendue de la protection du brevet ne peut être déterminée qu’au regard des règles régissant ce dernier, lesquelles ne relèvent pas du droit de l’Union ( 28 ).

62.

Au point 40 de l’arrêt du 12 décembre 2013, Eli Lilly and Company (C‑493/12, EU:C:2013:835), la Cour a jugé qu’elle n’était nullement compétente pour interpréter les dispositions de cette convention, étant donné que, à la différence des États membres, l’Union n’y a pas adhéré et que la Cour ne saurait fournir d’autres indications à la juridiction de renvoi quant à la manière dont elle devrait apprécier la portée des revendications d’un brevet délivré par l’OEB.

63.

À mon avis, c’est cette tension entre deux régimes juridiques distincts qui caractérise le système du CCP mis en place par le règlement no 469/2009 et qui donne lieu à des difficultés d’interprétation et d’application de certaines dispositions de ce règlement, notamment à son article 3, sous a) ( 29 ).

3. La jurisprudence de la Cour après l’arrêt Medeva

64.

La question qui se pose dans la présente affaire est celle de savoir s’il est suffisant qu’un produit relève d’au moins une revendication du brevet de base par application des règles relatives à l’étendue de la protection du brevet pour être un produit protégé par un brevet de base au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 ou s’il faut appliquer d’autres critères additionnels.

65.

La juridiction de renvoi propose comme solution à cette problématique de vérifier non seulement si le produit relève d’au moins une revendication du brevet de base par application des règles relatives au champ de protection, mais également de vérifier si le produit renferme l’activité inventive du brevet de base.

66.

Cette question s’est posée à la suite de certains enseignements fournis par la jurisprudence de la Cour postérieure à l’arrêt du 24 novembre 2011, Medeva (C‑322/10, EU:C:2011:773).

67.

En effet, au point 41 de l’arrêt du 12 décembre 2013, Actavis Group PTC et Actavis UK (C‑443/12, EU:C:2013:833), la Cour a dit pour droit que « l’objectif fondamental du règlement no 469/2009 [était] de compenser le retard pris dans la commercialisation de ce qui constitue le cœur de l’activité inventive faisant l’objet du brevet de base» ( 30 ).

68.

Il convient toutefois de souligner que cet arrêt n’est pas pertinent en l’espèce, car il porte uniquement sur l’article 3, sous c), du règlement no 469/2009, qui n’est pas en cause dans la présente affaire ( 31 ), la Cour ayant clairement indiqué qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur la question posée dans cette affaire sur l’article 3, sous a), dudit règlement.

69.

Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 12 décembre 2013, Eli Lilly and Company (C‑493/12, EU:C:2013:835), la Cour était interrogée sur la question de savoir si l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 devait être interprété en ce sens que, pour pouvoir considérer qu’un principe actif était « protégé par un brevet de base en vigueur » au sens de cette disposition, il était nécessaire que ce principe actif soit mentionné dans les revendications de ce brevet au moyen d’une formule structurelle ou s’il pouvait également être considéré comme protégé lorsqu’il était couvert par une formule fonctionnelle ( 32 ) figurant dans ces revendications.

70.

Le point 44 du même arrêt du 12 décembre 2013, Eli Lilly and Company (C‑493/12, EU:C:2013:835), précise que « [l]orsque ce principe actif est couvert par une formule fonctionnelle ( 33 ) figurant dans les revendications d’un brevet délivré par l’OEB, cet article 3, sous a), ne s’oppose pas en principe à la délivrance d’un CCP pour ce principe actif, à la condition toutefois que, sur la base de telles revendications, interprétées notamment à la lumière de la description de l’invention, ainsi que le prescrivent l’article 69 de la CBE et le protocole interprétatif de celui-ci, il est possible de conclure que ces revendications visaient, implicitement mais nécessairement, le principe actif en cause, et ce de manière spécifique, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier» ( 34 ).

71.

Enfin, au point 38 de l’arrêt du 12 mars 2015, Actavis Group PTC et Actavis UK (C‑577/13, EU:C:2015:165), la Cour a dit pour droit que « pour qu’un brevet de base protège “en tant que tel” un principe actif au sens des articles 1er, sous c), et 3, sous a), du règlement no 469/2009, ce principe actif [devait] constituer l’objet de l’invention ( 35 )couverte par ledit brevet ( 36 ) ».

72.

À mon sens, il ressort de la jurisprudence de la Cour, en particulier dans les arrêts du 24 novembre 2011, Medeva (C‑322/10, EU:C:2011:773), du 12 décembre 2013, Eli Lilly and Company (C‑493/12, EU:C:2013:835), et du 12 mars 2015, Actavis Group PTC et Actavis UK (C‑577/13, EU:C:2015:165), que le seul moyen de vérifier si un brevet de base protège un principe actif au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 réside strictement dans le libellé ou l’interprétation du libellé des revendications du brevet délivré ( 37 ).

73.

Tout autre critère additionnel, comme l’exigence proposée par la juridiction de renvoi que le principe actif renferme « l’activité inventive du brevet » risque, à mon avis, d’engendrer une confusion avec les critères de brevetabilité ( 38 ) d’une invention. Or, la question de savoir si un produit est protégé par un brevet au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 n’est pas la même que celle de savoir si ce produit est brevetable, cette dernière question relevant exclusivement du droit national ou du droit conventionnel.

74.

Toutefois, le fait qu’une substance relèverait éventuellement de la protection des revendications d’un brevet par application de l’article 69 de la CBE et de son protocole interprétatif, ainsi que des dispositions du droit national correspondant, telles que l’article 125 de la loi sur les brevets de 1977, n’implique pas nécessairement que cette substance constitue un produit protégé par une brevet au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009.

75.

En effet, le fait qu’une substance ou composition relève de l’étendue de la protection d’un brevet, notamment par l’application de l’article 69 de la CBE et de son protocole interprétatif, ainsi que des dispositions du droit national correspondant, serait une condition nécessaire, mais non suffisante, pour constituer un produit protégé par un brevet au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009.

4. Le niveau de spécificité ou d’abstraction des revendications

76.

Étant donné que les brevets contiennent souvent un éventail de revendications qui varient selon leur niveau de spécificité ou d’abstraction ( 39 ), la véritable question qui se pose en l’espèce est celle de savoir à quel niveau de spécificité ou d’abstraction un produit « figure » dans les revendications du brevet de base aux termes de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009.

77.

Au point 39 de l’arrêt du 12 décembre 2013, Eli Lilly and Company (C‑493/12, EU:C:2013:835), la Cour a jugé qu’une référence littérale au principe actif par son nom ou sa structure chimique dans les revendications d’un brevet de base n’est pas toujours nécessaire aux fins de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 et qu’une définition fonctionnelle d’un principe actif dans les revendications d’un brevet de base pouvait, dans certains cas, être suffisante ( 40 ).

78.

En revanche, il ressort des points 36 à 39 et 41 de l’arrêt du 12 mars 2015, Actavis Group PTC et Actavis UK (C‑577/13, EU:C:2015:165), que le fait que le brevet de base contienne une revendication sur un principe actif spécifiquement nommé pourrait dans certains cas ne pas être suffisant.

79.

Cet arrêt doit toutefois être lu avec prudence au vu des faits très particuliers qu’il tranche. En effet, le principe actif en cause ne figurait pas dans le brevet tel que délivré initialement. Une nouvelle revendication portant sur ce principe actif aurait été insérée rétroactivement dans le brevet de base après sa délivrance suite à une procédure de modification du brevet de base ( 41 ) dans le but, à mon avis, d’obtenir un CCP.

80.

Comme je l’ai indiqué au point 74 des présentes conclusions, il ne suffit pas qu’un produit relève simplement de l’étendue de la protection d’un brevet ( 42 ) pour être considéré comme un produit protégé au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009. Il est notoire que des revendications sont souvent rédigées (délibérément et de façon ingénieuse) dans des termes larges ( 43 ), vagues, génériques et stéréotypés ( 44 ) afin de couvrir une multitude de substances.

81.

À mon avis, un produit est protégé par un brevet au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 468/2006 si, à la date de la priorité du brevet, il aurait été évident pour l’homme du métier que le principe actif en cause était spécifiquement et précisément identifiable dans le libellé des revendications du brevet. Lorsqu’il s’agit d’une combinaison de principes actifs, chaque principe actif doit être spécifiquement et précisément ainsi qu’individuellement ( 45 ) identifiable dans le libellé des revendications du brevet.

82.

À cet égard, une référence explicite au nom du principe actif ou à sa composition chimique dans les revendications n’est pas nécessaire ( 46 ), à condition que ce principe actif soit spécifiquement et précisément identifiable à la date de la priorité du brevet.

83.

Si, par exemple, une substance revendiquée par un brevet comporte plusieurs variantes ( 47 ), le produit protégé par le brevet au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 n’englobe pas nécessairement toutes ces variantes. À la date de la priorité du brevet, une variante doit être spécifiquement et précisément identifiable dans le libellé des revendications du brevet afin de constituer « un produit protégé par le brevet » au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 ( 48 ).

84.

En effet, il convient de souligner que la Cour a dit pour droit au point 35 de l’arrêt du 12 mars 2015, Actavis Group PTC et Actavis UK (C‑577/13, EU:C:2015:165), que « l’objectif poursuivi par le règlement no 469/2009 [n’était] pas de compenser intégralement les retards pris dans la commercialisation d’une invention ni de compenser de tels retards en lien avec toutes les formes de commercialisation possibles de ladite invention, y compris celle de compositions déclinées autour du même principe actif» ( 49 ).

5. Application aux faits en cause dans l’affaire au principal

85.

Dans l’affaire au principal, il est constant que le principe actif emtricitabine n’est pas nommément mentionné dans les revendications du brevet de base.

86.

Toutefois, il ressort de la demande de décision préjudicielle que Gilead a obtenu le CCP en cause dans l’affaire au principal pour un médicament antirétroviral contenant deux principes actifs, à savoir le TD et l’emtricitabine, sur le fondement de la revendication 27 du brevet de base. En effet, cette revendication fait référence à une composition pharmaceutique « comprenant » un composé conforme à l’une des revendications 1 à 25, à savoir en l’espèce le TD conformément à la revendication 25, et« le cas échéant, d’autres ingrédients thérapeutiques ».

87.

À mon avis et sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi, étant donné que le principe actif emtricitabine est revendiqué uniquement au moyen de termes totalement indéterminés, tels que « comprenant » et « le cas échéant, d’autres ingrédients thérapeutiques» ( 50 ), termes qui peuvent couvrir une multitude de substances qui ne sont pas spécifiquement et précisément identifiables à la date de la priorité du brevet ( 51 ), la composition contenant les principes actifs TD et emtricitabine, à savoir le médicament commercialisé sous le nom TRUVADA, n’est pas protégée par le brevet de base au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009, même si cette composition pourrait éventuellement relever de la protection de la revendication 27 du brevet en cause dans l’affaire au principal par application de l’article 69 de la CBE et de son protocole interprétatif, ainsi que de l’article 125 de la loi sur les brevets de 1977.

88.

En effet, il semble, sous réserve encore de vérification par la juridiction de renvoi que, au 26 juillet 1996, date de la revendication de priorité du brevet en cause au principal, il n’aurait pas été évident pour l’homme du métier que le principe actif emtricitabine était spécifiquement et précisément identifiable dans le libellé des revendications de ce brevet.

VI. Conclusion

89.

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre à la question préjudicielle posée par la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division (patents court) [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), division de la Chancery (chambre des brevets), Royaume-Uni] de la manière suivante :

L’article 3, sous a), du règlement (CE) no 469/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 6 mai 2009, concernant le certificat complémentaire de protection pour les médicaments, s’oppose à la délivrance d’un certificat complémentaire de protection portant sur des principes actifs qui ne figurent pas dans le libellé des revendications du brevet de base. Le fait qu’une substance ou composition relève de l’étendue de la protection du brevet de base est une condition nécessaire, mais non suffisante, pour constituer un produit protégé par un brevet au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009. Un produit est protégé par un brevet au sens de l’article 3, sous a), dudit règlement si, à la date de la priorité du brevet, il aurait été évident pour l’homme du métier que le principe actif en cause était spécifiquement et précisément identifiable dans le libellé des revendications du brevet de base. Lorsqu’il s’agit d’une combinaison de principes actifs, chaque principe actif de cette combinaison doit être spécifiquement et précisément ainsi qu’individuellement identifiable dans le libellé des revendications du brevet de base.


( 1 ) Langue originale : le français.

( 2 ) JO 2009, L 152, p. 1.

( 3 ) Au point 25 de l’arrêt du 15 janvier 2015, Forsgren (C‑631/13, EU:C:2015:13), la Cour a dit pour droit que « la notion de “principe actif”, aux fins de l’application du règlement no 469/2009, se rapporte aux substances produisant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique propre ».

( 4 ) Il convient de relever que deux autres demandes de décision préjudicielle portant sur l’interprétation de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 sont actuellement pendantes devant la Cour. Voir demande de décision préjudicielle dans l’affaire C‑650/17, QH, déposée au greffe de la Cour, le 21 novembre 2017, par le Bundespatentgericht (Cour fédérale des brevets, Allemagne) (JO 2018, C 52, p. 20) et demande de décision préjudicielle dans l’affaire C‑114/18, Sandoz et Hexal, déposée au greffe de la Cour, le 14 février 2018, par la Court of Appeal (Cour d’appel, Royaume-Uni).

( 5 ) Selon la juridiction de renvoi, « [l]’emtricitabine apparaît avoir été décrite pour la première fois dans un article datant de novembre 1992. Cet article a notamment fait état de données sur l’emtricitabine tirées d’études antivirales réalisées in vitro sur le VIH. Rien ne démontre que l’on savait en juillet 1996 que l’emtricitabine était un agent efficace dans le traitement du VIH [chez l’être humain], et encore moins que cela était notoirement connu de l’homme [du métier] auquel est destiné le brevet. L’Agence européenne des médicaments n’a homologué l’emtricitabine qu’en octobre 2003, plus de sept ans plus tard » (voir points 6 et 7 de sa demande de décision préjudicielle).

( 6 ) Selon la juridiction de renvoi « [l]a revendication 27 requiert la présence, dans la composition pharmaceutique, d’un composé conforme à l’une des revendications 1 à 25, et d’un véhicule qui soit admis par la pharmacologie. La signification des mots “comprenant” et “le cas échéant” figurant dans cette revendication 27 permet, mais ne requiert pas, la présence d’autres ingrédients, à la fois thérapeutiques ou non thérapeutiques. Ainsi, le champ de protection de la revendication 27 n’est pas limité à une composition pharmaceutique contenant deux (ou plus) ingrédients thérapeutiques, mais s’étend à une composition pharmaceutique contenant un seul ingrédient thérapeutique consistant en un composé relevant des revendications 1 à 25. Il s’ensuit que la présence ou l’absence d’un autre ingrédient thérapeutique est dénuée de pertinence pour apprécier si une composition pharmaceutique relève de la revendication 27 et donc pour apprécier si des transactions portant sur une telle composition pharmaceutique empiètent sur cette revendication du brevet ». Selon cette juridiction, « c’est au titulaire du brevet qu’il revient de décider d’inclure tout simplement des revendications telle [la revendication 27] dans un brevet de cette nature et, le cas échéant, dans quels termes. En pratique, ce choix revient au conseil en brevet qui établit la demande de brevet en fonction de considérations juridiques plus que scientifiques ou techniques » (voir, respectivement, points 22 et 20 de sa demande de décision préjudicielle).

( 7 ) Selon la juridiction de renvoi « [i]l est constant que l’emtricitabine n’est pas mentionnée ni visée dans le brevet » (voir point 15 de sa demande de décision préjudicielle).

( 8 ) Voir arrêt du 24 novembre 2011, Medeva (C‑322/10, EU:C:2011:773).

( 9 ) Voir arrêt du 12 décembre 2013, Eli Lilly and Company (C‑493/12, EU:C:2013:835).

( 10 ) Voir arrêt du 12 décembre 2013, Eli Lilly and Company (C‑493/12, EU:C:2013:835, points 32 et 39).

( 11 ) La juridiction de renvoi se réfère aux arrêts du 16 septembre 1999, Farmitalia (C‑392/97, EU:C:1999:416) ; du 24 novembre 2011, Medeva (C‑322/10, EU:C:2011:773) ; du 12 décembre 2013, Actavis Group PTC et Actavis UK (C‑443/12, EU:C:2013:833) ; du 12 décembre 2013, Eli Lilly and Company (C‑493/12, EU:C:2013:835), et du 12 mars 2015, Actavis Group PTC et Actavis UK (C‑577/13, EU:C:2015:165), ainsi qu’aux ordonnances du 25 novembre 2011, Yeda Research and Development Company et Aventis Holdings (C‑518/10, EU:C:2011:779), University of Queensland et CSL (C‑630/10, EU:C:2011:780), et Daiichi Sankyo (C‑6/11, EU:C:2011:781).

( 12 ) Au point 93 de la demande de décision préjudicielle, la juridiction de renvoi relève que « les demandes de [CCP] pour la combinaison du TD et de l’emtricitabine ont été rejetées par l’Office des brevets et par la Cour d’appel des brevets en Suède, il est vrai avant l’arrêt Medeva, par l’Office des brevets aux Pays-Bas et par l’Office des brevets en Grèce, mais la demande a été accordée en Espagne à la suite d’une décision de la cour administrative de Madrid. Une demande a également été accordée en Allemagne à la suite d’une décision du tribunal fédéral des brevets, là aussi avant l’arrêt Medeva. Mais, plus récemment, l’Office allemand des brevets a rejeté une demande de certificat complémentaire de protection introduite par Gilead pour une triple combinaison de TD, d’emtricitabine et d’éfavirenz. » Il convient d’ajouter que dans son arrêt du 6 août 2014, no 10607, le Varhoven administrativen sad (Cour administrative suprême, Bulgarie) s’est penché sur la question de savoir si le produit Atripla était protégé par le brevet de base BG 62612 aux fins de délivrer un CCP. Le CCP en cause visait trois principes actifs : l’éfavirenz, l’emtricitabine et le ténofovir disoproxil, tandis que le brevet de base ne couvrait que les deux premiers principes actifs ; le ténofovir disoproxil n’y figurant pas. Le Varhoven administrativen sad (Cour administrative suprême) a souligné que l’emtricitabine et le ténofovir disoproxil étaient des composants individuels du produit en question qui ne formaient pas une nouvelle substance active ayant la qualité d’un analogue de nucléotide biologiquement actif contre une HIV rétrotranscriptase. Il a conclu que la composition des trois principes actifs en cause constituant le produit Atripla n’était pas protégée par le brevet de base et a, dès lors, confirmé la décision de l’Office des brevets refusant la délivrance du CCP en cause. En outre, dans son arrêt du 22 mars 2017, 3.Pfv.IV.21.502/2016/3, la Kúria (Cour suprême, Hongrie) a confirmé les décisions des juridictions inférieures rendues à la suite du recours juridictionnel introduit contre une décision de l’Office national de la propriété intellectuelle (ci-après l’« ONPI »). Par cette décision, l’ONPI avait rejeté la demande de CCP visant la protection du médicament Atripla comprenant une combinaison de trois principes actifs, notamment l’éfavirenz, l’emtricitabine et le fumarate de ténofovir disoproxil et bénéficiant d’une autorisation de mise sur le marché. Selon l’ONPI, ladite combinaison n’était pas protégée par un brevet de base, étant donné que seul l’éfavirenz était explicitement mentionné dans la revendication du brevet de base en cause. Dès lors, la condition d’obtention énoncée dans l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 n’était pas satisfaite eu égard à la combinaison. Les juridictions inférieures ont confirmé la décision de rejet de l’ONPI à cet égard. De surcroît, il y a actuellement deux affaires jointes pendantes devant la High Court (Haute Cour, Irlande) opposant, d’une part, les sociétés Gilead Sciences Inc. et Gilead Biopharmaceutics Ireland UC à Mylan SAS Generics (UK) Ltd et McDermott Laboratories Ltd et, d’autre part, les mêmes requérantes à Teva B. V. et Norton (Waterford) Ltd, au sujet du CCP irlandais no 2005/021 pour le médicament TRUVADA.

( 13 ) L’arrêt du 12 décembre 2013, Actavis Group PTC et Actavis UK (C‑443/12, EU:C:2013:833), porte sur l’interprétation de l’article 3, sous c), du règlement no 469/2009 et l’arrêt du 12 mars 2015, Actavis Group PTC et Actavis UK (C‑577/13, EU:C:2015:165) porte sur l’interprétation de l’article 3, sous a) et c), de ce même règlement.

( 14 ) La juridiction de renvoi relève que « [l]orsque le produit est une combinaison de principes actifs, c’est la combinaison, et non pas l’un d’entre eux, qui doit renfermer l’activité inventive du brevet de base. Dans un cas comme celui-ci, où l’activité inventive du brevet consiste de manière générale en les composés des formules (1) et (1a), en ce compris spécifiquement le TD, un médicament ayant le TD comme principe actif est protégé par le brevet au sens de l’article 3, sous a), parce qu’il renferme l’activité inventive du brevet. Un médicament dont les principes actifs sont le TD combiné à un autre ingrédient thérapeutique[,] tel[le] l’emtricitabine, n’est pas protégé par le brevet au sens de l’article 3, sous a), parce que la combinaison, par opposition au TD, ne renferme pas l’activité inventive du brevet. Cela ne tient pas au libellé des revendications du brevet de base, lequel […] peut être manipulé par le conseil en brevet qui le rédige, mais bien à sa substance. En revanche, si Gilead (ou un autre inventeur) devait obtenir un brevet pour une invention consistant en la combinaison du TD et d’une substance X, qui aurait un effet synergique inattendu dans le traitement contre le VIH, alors un médicament qui aurait pour principes actifs le TD et X serait protégé par ce brevet en ce qu’il renfermerait l’activité inventive de ce brevet. [C]ette interprétation de l’article 3, sous a), serait conforme à l’objet du règlement no 469/2009 qui est non pas de conférer des monopoles injustifiés, mais d’encourager les inventions dans le domaine des médicaments en accordant une compensation aux inventeurs qui doivent reporter l’exploitation de leurs inventions en raison de la nécessité d’obtenir une autorisation réglementaire » (voir point 97 de sa demande de décision préjudicielle).

( 15 ) La juridiction de renvoi a fait valoir que, si l’affaire ne devait pas bénéficier d’une telle procédure, elle ne pourrait être traitée avant l’expiration du brevet en cause dans l’affaire au principal. Selon cette juridiction, cela conduirait inévitablement à repousser la date de disponibilité des médicaments génériques pour le National Health Service England (service national de santé, Angleterre) et impliquerait, par là même, des coûts plus élevés ainsi qu’une charge budgétaire plus importante pour ce dernier.

( 16 ) La Cour a considéré que l’invocation d’intérêts économiques, y compris ceux qui sont susceptibles d’avoir un impact sur les finances publiques, n’est pas de nature à justifier le recours à une procédure accélérée. En outre, selon elle, la juridiction de renvoi n’a nullement fait état d’un risque imminent pour la santé publique qui serait susceptible de constituer une circonstance exceptionnelle de nature à justifier le recours à une procédure accélérée. La Cour a jugé qu’il ressort de la décision de renvoi que si le traitement de la présente affaire par la procédure ordinaire serait de nature, selon la juridiction de renvoi, à retarder la date de disponibilité des médicaments génériques, un tel traitement n’affecterait cependant pas la santé des patients concernés, qui continueraient à être traités au moyen du TRUVADA.

( 17 ) Voir, notamment, les nombreuses utilisations du terme « recensées » dans le recueil de la jurisprudence des chambres de recours de l’OEB, 8e éd., juillet 2016, disponible sur Internet à l’adresse suivante : https ://www.epo.org/law-practice/case-law-appeals/case-law_fr.html.

( 18 ) Cela découle, selon le gouvernement néerlandais, des arrêts du 12 mars 2015, Actavis Group PTC et Actavis UK (C‑577/13, EU:C:2015:165), et du 12 décembre 2013, Actavis Group PTC et Actavis UK (C‑443/12, EU:C:2013:833), qui ont trait à des produits combinés.

( 19 ) TRUVADA.

( 20 ) Voir arrêt du 24 novembre 2011, Georgetown University e.a. (C‑422/10, EU:C:2011:776, point 25). « La durée de validité normale de la protection conférée par le brevet s’élève à vingt ans à compter du jour de la notification de la découverte. Si l’autorisation de mise sur le marché du médicament est délivrée après le dépôt du brevet […], le fabricant ne peut pas exploiter économiquement les droits d’exclusivité qu’il possède sur les principes actifs brevetés de ce médicament entre la date de dépôt du brevet et celle de l’autorisation de mise sur le marché du médicament. C’est parce que le législateur de l’Union a estimé que cela réduirait la protection effective conférée par le brevet à une durée insuffisante pour amortir les investissements effectués dans la recherche et pour rassembler les moyens nécessaires à la pérennité d’une recherche efficace que le règlement no 469/2009 ouvre la possibilité de prolonger, au moyen d’un [CCP], la durée de validité des droits d’exclusivité sur les principes actifs brevetés d’un médicament en la portant à quinze ans au maximum à partir de la première autorisation de mise sur le marché du médicament en question dans l’Union ». « Cette règle doit permettre d’établir un équilibre entre les différents intérêts qui sont en jeu dans le secteur pharmaceutique. Il s’agit, d’une part, des intérêts des entreprises et des institutions qui effectuent des recherches parfois très coûteuses dans le domaine pharmaceutique et souhaitent donc une prolongation de la durée de la protection de leurs découvertes, de manière à pouvoir amortir les frais qu’ils ont investis dans ces recherches. D’autre part, entrent également en jeu les intérêts des fabricants de médicaments génériques que la prolongation de la durée de la protection des principes actifs brevetés empêche de fabriquer et de commercialiser ces médicaments génériques. Le succès de ce type de médicaments entraîne, d’une manière générale, une baisse des prix des médicaments dont les brevets sont tombés dans le domaine public, de sorte que les intérêts des patients se situent entre ceux des entreprises et des instituts de recherche, et ceux des fabricants des produits génériques. En effet, les patients ont, d’une part, intérêt à ce que de nouveaux principes actifs pour médicaments soient mis au point, mais, d’autre part, ils ont également intérêt à ce que ceux-ci leur soient ensuite offerts au meilleur prix possible. Il en va de même des systèmes nationaux de santé publique en général, qui ont, en outre, un intérêt particulier à empêcher que de vieux principes actifs soient mis sur le marché sous une forme légèrement modifiée, mais sans véritable propriété innovante, tout en bénéficiant de la protection d’un certificat et que cette pratique entraîne une augmentation des dépenses de santé » (voir conclusions de l’avocat général Trstenjak dans les affaires jointes Medeva (C‑322/10 et C‑422/10, EU:C:2011:476, points 76 et 77).

( 21 ) Voir arrêt du 6 octobre 2015, Seattle Genetics (C‑471/14, EU:C:2015:659, point 26 et jurisprudence citée), ainsi que ordonnance du 25 novembre 2011, Yeda Research and Development Company et Aventis Holdings (C‑518/10, EU:C:2011:779, point 36).

( 22 ) En vertu de la directive 2001/83 ou de la directive 2001/82/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 novembre 2001, instituant un code communautaire relatif aux médicaments vétérinaires (JO 2001, L 311, p. 1).

( 23 ) La protection d’un CCP commence le jour suivant l’expiration du brevet de base. Il ressort du point 42 de l’ordonnance du président de la Cour du 14 novembre 2013, Astrazeneca (C‑617/12, EU:C:2013:761), et du point 30 de l’ordonnance du 13 février 2014, Merck Canada (C‑555/13, EU:C:2014:92), que le titulaire à la fois d’un brevet et d’un CCP ne doit pas pouvoir bénéficier de plus de quinze années d’exclusivité à partir de la première AMM, délivrée dans l’Union, du médicament concerné.

( 24 ) Voir, également, en ce sens, arrêt du 12 décembre 2013, Eli Lilly and Company (C‑493/12, EU:C:2013:835, point 34).

( 25 ) C’est ainsi, notamment, que la Cour a dit pour droit que si un brevet revendique une composition de deux principes actifs, mais ne comporte aucune revendication sur l’un de ces principes actifs considéré individuellement, un CCP ne saurait être délivré sur la base d’un tel brevet pour l’un de ces principes actifs considéré isolément. Voir, à cet égard, arrêt du 24 novembre 2011, Medeva (C‑322/10, EU:C:2011:773, point 26), et ordonnance du 25 novembre 2011, Yeda Research and Development Company et Aventis Holdings (C‑518/10, EU:C:2011:779, point 38).

( 26 ) C’est moi qui souligne. Voir, également, en ce sens, ordonnances du 25 novembre 2011, University of Queensland et CSL (C‑630/10, EU:C:2011:780, point 31), et Yeda Research and Development Company et Aventis Holdings (C‑518/10, EU:C:2011:779, point 39). Dans l’ordonnance du 25 novembre 2011, University of Queensland et CSL (C‑630/10, EU:C:2011:780, points 38 à 40), la Cour a dit pour droit qu’un brevet protégeant un procédé d’obtention d’un « produit » au sens du règlement no 469/2009 pouvait, conformément à l’article 2 de celui-ci, permettre l’octroi d’un CCP. Si le droit applicable à ce brevet le prévoit, l’extension de la protection du procédé d’obtention au produit obtenu par ce procédé est également conférée par un CCP délivré sur la base d’un tel brevet. Toutefois, de même que l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 s’oppose à la délivrance d’un CCP portant sur des principes actifs qui ne figurent pas dans le libellé des revendications du brevet de base, cette disposition s’oppose à ce que, lorsque le brevet de base invoqué au soutien d’une demande de CCP porte sur un procédé d’obtention d’un produit, un CCP soit octroyé pour un produit différent de celui qui figure dans le libellé des revendications de ce brevet comme étant le produit auquel aboutit le procédé d’obtention.

( 27 ) Voir arrêt du 12 décembre 2013, Eli Lilly and Company (C‑493/12, EU:C:2013:835, points 33 et 37).

( 28 ) Voir arrêts du 16 septembre 1999, Farmitalia (C‑392/97, EU:C:1999:416, point 27), et du 24 novembre 2011, Medeva (C‑322/10, EU:C:2011:773, point 23), ainsi que ordonnance du 25 novembre 2011, Yeda Research and Development Company et Aventis Holdings (C‑518/10, EU:C:2011:779, point 35). Il ressort de la demande de décision préjudicielle que, dans l’affaire au principal, les règles nationales d’interprétation des revendications sont celles prévues à la section 125 de la loi sur les brevets de 1977. Voir, en ce sens, arrêt du 12 décembre 2013, Eli Lilly and Company (C‑493/12, EU:C:2013:835, point 32). La section 125, paragraphe 3, de la loi sur les brevets de 1977 prévoit que le protocole interprétatif de l’article 69 de la CBE s’applique aux fins de l’application de la section 125, paragraphe 1, de cette loi.

( 29 ) « [B]ien que le régime du CCP crée une nouvelle forme, distincte, de droit de propriété intellectuelle au lieu de se borner à étendre la période de protection assurée par les brevets existants, il est néanmoins étroitement lié aux systèmes nationaux en vertu desquels les brevets pharmaceutiques sont initialement octroyés et protégés. En des termes plus concrets, un certificat ne peut être accordé que si un produit est protégé par un brevet de base et la protection conférée par le certificat ne doit pas dépasser les limites de celle qui est conférée par le brevet de base. Le titulaire du certificat jouit des mêmes droits et est soumis aux mêmes limitations et obligations que celles qui affectent le brevet de base », voir conclusions de l’avocat général Fennelly dans l’affaire Farmitalia (C‑392/97, EU:C:1999:277, point 21).

( 30 ) C’est moi qui souligne. Je dois avouer que j’ai une certaine difficulté à distinguer entre « le cœur de l’activité inventive faisant l’objet du brevet » et l’invention telle que divulguée par les revendications.

( 31 ) Selon cette disposition, un produit peut faire l’objet d’un seul CCP. Au point 33 de l’arrêt du 12 mars 2015, Actavis Group PTC et Actavis UK (C‑577/13, EU:C:2015:165), la Cour a jugé « qu’un brevet protégeant plusieurs “produits” distincts peut permettre en principe d’obtenir plusieurs CCP en lien avec chacun de ces produits distincts, pour autant, notamment, que chacun de ceux-ci soit “protégé” en tant que tel par ce “brevet de base” au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009, lu en combinaison avec l’article 1er, sous b) et c), de celui-ci. » Je relève à cet égard que la juridiction de renvoi a indiqué dans la demande de décision préjudicielle que « [e]n plus du TRUVADA, Gilead commercialise sous la marque Viread une monothérapie pour le traitement du VIH, ayant le [TD] pour seul principe actif. Gilead a obtenu la première [AMM] pour le Viread le 5 février 2002 […]. Gilead n’a pas obtenu de [CCP] pour le Viread sans doute parce que la durée qui s’est écoulée entre la date de dépôt de la demande de brevet et la date de cette [AMM] était inférieure à cinq années (en sorte que la durée du [CCP] aurait été négative) » (voir point 24 de sa demande de décision préjudicielle).

( 32 )

( 33 ) Dans cette affaire, le brevet en cause portait sur la découverte d’une nouvelle protéine. Ledit brevet divulguait et revendiquait notamment cette protéine. Il ressort des revendications dudit brevet qu’il portait également sur des anticorps qui se lient spécifiquement à cette protéine. Eli Lilly souhaitait commercialiser une composition pharmaceutique qui contiendrait comme principe actif un anticorps qui se lie spécifiquement à la nouvelle protéine. Elle a formé un recours afin d’obtenir une déclaration d’invalidité de tout CCP ayant pour base légale le brevet en cause. Elle a fait valoir, à cet égard, que cet anticorps n’était pas couvert par un « brevet de base » au sens de l’article 3 du règlement no 469/2009, dans la mesure où la revendication du brevet en cause était rédigée de manière trop large pour que ledit anticorps puisse être considéré comme étant mentionné, dans le libellé des revendications dudit brevet. Ainsi, selon Eli Lilly, pour qu’il puisse servir de base à la délivrance d’un CCP, le brevet en cause aurait dû contenir une définition structurelle des principes actifs et les revendications auraient dû présenter un degré significativement plus élevé de spécificité.

( 34 ) C’est moi qui souligne. La juridiction de renvoi estime que le point 44 de l’arrêt du 12 décembre 2013, Eli Lilly and Company (C‑493/12, EU:C:2013:835) est ambigu. Elle relève au point 81 de la demande de décision préjudicielle que « [b]ien que la Cour […] dise clairement que l’article 3, sous a), n’empêche pas qu’un produit soit protégé par un brevet de base en vertu d’une définition fonctionnelle, elle dit ensuite qu’il ne le permet que lorsque les revendications “visent, implicitement mais nécessairement, le [produit] en cause, et ce de manière spécifique”. Qu’est-ce à dire ? Comment les autorités nationales sont-elles censées appliquer ce critère ? La Cour […] ne l’explique pas. Tout ce que l’on peut dire avec certitude c’est que, une nouvelle fois, la Cour […] semble laisser entendre que le produit ne doit pas simplement relever du champ de protection du brevet de base par application des règles relatives au champ de protection mais qu’il faut quelque chose de plus, mais sans préciser clairement ce qu’il faut de plus. »

( 35 ) Au point 37 de l’arrêt du 12 mars 2015, Actavis Group PTC et Actavis UK (C‑577/13, EU:C:2015:165), la Cour a dit pour droit que « compte tenu des intérêts visés aux considérants 4, 5, 9 et 10 du règlement no 469/2009, il ne saurait être admis que le titulaire d’un brevet de base en vigueur puisse obtenir un nouveau CCP, éventuellement assorti d’une durée de validité plus étendue, à chaque fois qu’il met sur le marché d’un État membre un médicament contenant, d’une part, un principe actif, protégé en tant que tel par son brevet de base, constituant l’objet de l’invention couverte par ce brevet et, d’autre part, une autre substance, laquelle ne constitue pas l’objet de l’invention couverte par le brevet de base ».

( 36 ) C’est moi qui souligne. La juridiction de renvoi estime que cette formulation est ambiguë. Elle relève que « l’on n’aperçoit néanmoins toujours pas clairement ce qu’il faut pour répondre à l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 ».

( 37 ) En effet, nonobstant le fait que l’arrêt du 12 mars 2015, Actavis Group PTC et Actavis UK (C‑577/13, EU:C:2015:165), ne fait aucune référence au libellé des revendications du brevet délivré, je considère qu’une éventuelle vérification de « l’objet de l’invention couverte par un brevet » exigerait l’interprétation du libellé de ces revendications.

( 38 ) Pour être brevetable une invention doit être nouvelle, impliquer une activité inventive et être susceptible de faire l’objet d’une application industrielle.

( 39 ) Outre les formules fonctionnelles, il y a lieu de noter également que dans le domaine des médicaments, des formules Markush qui couvrent des classes de composés chimiques sont souvent utilisées dans les revendications d’un brevet. Or, la chambre de recours de l’OEB a indiqué dans l’affaire T 1020/98 - 3.3.1 que « [l]a longueur exceptionnelle des revendications, le fait que la formule [Markush] se compose exclusivement de variables et le nombre de ces variables, dont la plupart sont définies à l’aide d’autres variables, suscitent des problèmes particuliers » (http ://www.epo.org/law-practice/case-law-appeals/recent/t981020fp1.html#q).

( 40 ) Nonobstant le fait qu’une référence littérale au principe actif par son nom chimique ou par sa structure chimique dans les revendications d’un brevet de base ne soit pas toujours nécessaire aux fins de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009, je considère qu’il ressort notamment de ce même point 39 de l’arrêt du 12 décembre 2013, Eli Lilly and Company (C‑493/12, EU:C:2013:835), et l’usage des termes « implicitement mais nécessairement » et « de manière spécifique », que la Cour a effectivement entrepris de limiter l’interprétation du libellé des revendications à un certain niveau de spécificité ou d’abstraction.

( 41 ) Il ressort des faits de cette affaire que l’United Kingdom Intellectual Property Office (Office de la propriété intellectuelle du Royaume-Uni, ci-après l’« UKIPO ») avait signalé au demandeur du CCP que, s’agissant de certificats portant sur des produits comprenant une composition de principes actifs, la composition doit être explicitement revendiquée afin d’être considérée comme devant être protégée en tant que telle. Le brevet de base Boehringer Ingelheim Pharma (ci-après « Boehringer ») contenant seulement des revendications qui portent sur l’un des principes actifs du produit, notamment le composant telmisartan, l’UKIPO a suggéré à Boehringer de demander la modification de ce brevet de base afin d’insérer une revendication de la composition du telmisartan et de l’hydrochlorothiazide. Boehringer a ensuite demandé une modification du brevet de base en cause tel que délivré en y insérant ex post une revendication portant, en outre, sur une composition pharmaceutique du telmisartan avec de l’hydrochlorothiazide afin uniquement d’obtenir un CCP. À mon avis, il ressort clairement de l’arrêt du 12 mars 2015, Actavis Group PTC et Actavis UK (C‑577/13, EU:C:2015:165), que la Cour n’a pas été impressionnée par un tel comportement stratégique.

( 42 ) Au sens notamment de l’article 69 de la CBE.

( 43 ) Ainsi qu’en attestent des formules Markush et des formules fonctionnelles.

( 44 ) Ainsi qu’en atteste l’usage des revendications comme la revendication 27 du brevet en cause dans l’affaire au principal. Ce genre de revendication est rédigé de façon tellement large qu’il peut couvrir potentiellement toute combinaison éventuelle de TD avec une autre substance chimique. Je relève qu’au point 97 de la demande de décision préjudicielle, la juridiction de renvoi rappelle que le « libellé des revendications du brevet de base […] peut être manipulé par le conseil en brevet qui le rédige […] ». Il convient de souligner que s’agissant de la brevetabilité d’une invention, une question qui ne relève pas de la compétence de la Cour, je ne prétends pas davantage remettre en cause cette pratique.

( 45 ) Voir, en ce sens, arrêt du 24 novembre 2011, Medeva (C‑322/10, EU:C:2011:773, point 26), et ordonnance du 25 novembre 2011, Yeda Research and Development Company et Aventis Holdings (C‑518/10, EU:C:2011:779, point 38).

( 46 ) Outre le fait que la Cour a déjà rejeté une telle exigence au point 39 dans son arrêt du 12 décembre 2013, Eli Lilly and Company (C‑493/12, EU:C:2013:835), je considère qu’elle serait trop stricte et restrictive, car elle ne tient pas suffisamment compte des intérêts du titulaire du brevet et de la nécessité de promouvoir le développement et la commercialisation des médications. Au vu de l’arrêt du 12 mars 2015, Actavis Group PTC et Actavis UK (C‑577/13, EU:C:2015:165), des modifications ultérieures et stratégiques du brevet, dans le but d’obtenir un CCP, ne sont pas pertinentes.

( 47 ) Je considère qu’une simple référence dans le libellé des revendications, par exemple, à un « diurétique » ou un « anti-inflammatoire non stéroïdien » n’est pas suffisante.

( 48 ) Voir, en ce sens, point 39 de l’arrêt du 12 décembre 2013, Eli Lilly and Company (C‑493/12, EU:C:2013:835). Je considère que plusieurs variantes d’une substance chimique peuvent être revendiquées pourvu qu’à la date de la priorité du brevet, chacune soit spécifiquement et précisément identifiable.

( 49 ) C’est moi qui souligne.

( 50 ) qui sont les seuls qui pourraient éventuellement viser le principe actif emtricitabine.

( 51 ) Voire des substances non encore inventées à la date de la priorité du brevet. En effet, le principe actif emtricitabine n’est pas spécifiquement identifiable en tant que tel de la revendication 27 du brevet en cause dans l’affaire au principal. Voir, en ce sens, arrêt du 12 décembre 2013, Eli Lilly and Company (C‑493/12, EU:C:2013:835, point 36). À mon avis, une interprétation de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 qui inclurait des substances qui ne seraient pas spécifiquement et précisément identifiables reviendrait à méconnaître l’objectif de ce règlement qui vise à pallier la durée insuffisante pour amortir les investissements effectués dans la recherche pour des nouveaux médicaments (tel que visé au considérant 4 dudit règlement), car il confère un bénéfice au titulaire du brevet alors qu’il n’a pas réalisé d’investissements dans la recherche portant sur ces substances. Voir, en ce sens, point 43 de l’arrêt du 12 décembre 2013, Eli Lilly and Company (C‑493/12, EU:C:2013:835).

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